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Athènes-Chypre : Tous les démocrates d’Europe sont concernés

Panagiotis Grigoriou  » Ce qui s’y joue à propos de Chypre actuellement, n’est que l’expérience en réel de ce qui demeure programmé à court et moyen terme, s’agissant de la mise à mort (voulue par les mondialisateurs) des États et des nations, (autant) autrement que par la guerre classique »

Son analyse en 3 parties intitulées :

Chypre embrassée par les vagues – I  http://www.greekcrisis.fr/2017/01/Fr0579.html#deb

Chypre embrassée par les vagues – II  http://www.greekcrisis.fr/2017/01/Fr0580.html#deb

Chypre embrassée par les vagues – III  http://www.greekcrisis.fr/2017/01/Fr0581.html#deb

 

Les grecs obligés de dépenser

En Grèce, on vous oblige à dépenser sous peine d’amende ! Rédigé le 17 janvier 2017 par Brian Maher | Cash – Cashless

 Une nouvelle année commence. Et un nouveau front s’ouvre dans la guerre contre le cash…

L’Inde a lancé une offensive de grande ampleur en novembre dernier, lorsqu’elle a démonétisé les billets de banques les plus utilisés du pays. Le résultat a été le chaos total. A présent, c’est au tour de la Grèce de lancer sa dernière offensive contre le cash…

On pourrait la réduire à une sorte d’interdiction « en douceur » du cash. Certes, la Grèce est un petit pays sans importance… mais prenez garde : cette interdiction « soft » du cash pourrait devenir un modèle.

Le site d’informations grec, Keep Talking Greece, rapporte que depuis le 1er janvier, le contribuable grec est obligé d’utiliser une carte de crédit pour payer un montant cumulé déterminé à l’avance selon ses revenus.

Voici ce qu’il en est exactement :

« Si vous êtes Grec et gagnez moins de 10 000 euros, vous devez effectuer 10% de vos paiements en carte. Entre 10 000 et 30 000 euros, ce chiffre monte à 15%. Au-delà de 30 000 euros, il passe à 20%. »

Et si vous ne vous pliez pas à ces règles ? Vous écoperez d’une pénalité de 22%. Admettons que vous gagniez 50 000 euros ; vous devez alors dépenser 10 000 euros par CB. Supposons que vous ne dépensiez que 5 000 euros par carte. Votre amende sera de 22% sur ces 5 000 euros que vous n’avez pas dépensés — soit 1 100 euros. [DNLR : Savez-vous que la plupart des taxes foncières sont truffées d’erreurs ? Ne payez plus sans vérifier ! Donnez-vous les moyens de réduire cette dépense, récupérez les sommes trop versées et commencez à économiser chaque année sur cette dépense. 

Les loyers, les services publics, les remboursements de prêts, les frais de transports et bien d’autres dépenses ne comptent pas. Non. Vous devrez dépenser par carte au supermarché, dans les restaurants, chez le coiffeur, pour vos cours de danse et ce genre de choses.

Comment ça, vous ne voulez pas apprendre à valser ? Allez donc l’expliquer au juge. Keep Talking Greece explique :

« Les ménages seront obligés de dépenser de l’argent même s’ils ne le veulent pas. Comme la majeure partie des dépenses mensuelles nécessaires (services publics, etc.) n’est pas acceptée par la direction des impôts, les ménages qui ne parviennent pas à atteindre le pourcentage nécessaire avec les dépenses de supermarché devront dépenser à tout va dans les magasins, les écoles de danse, les cours de gym et d’autres fournisseurs de biens et services. »

« Vous voyez bien qu’on n’interdit pas le cash, » vous expliquera-t-on doctement. « Nous ne ferons jamais une chose pareille. Dépensez en liquide autant que vous voulez. Mais si vous voulez éviter cette pénalité de 22%, vous savez ce qui vous reste à faire… »

Qui peut dire que cette obligation de dépense restera plafonnée à 20% ? Peut-être l’économie sera-t-elle dans le marasme l’année prochaine et que le seuil sera relevé à 50% afin que vos dépenses supplémentaires « stimulent » l’économie. Et pourquoi pas 75% ?

Les élites n’ont pas besoin d’interdire le cash pour l’éliminer

L’étape suivante ? Le cash sera si peu utilisé que plus personne ne l’acceptera, pas même vos parents. Cela posera trop de problèmes d’en avoir alors que quasiment plus personne ne l’utilisera.

Une fois que le niveau de cash dans la société chutera à un certain point, il n’y aura plus qu’un petit pas à franchir avant qu’il ne disparaisse entièrement.

Voilà comment le cash disparaîtra. Nul besoin de l’interdire du jour au lendemain. Il mourra par négligence. Il sera devenu si incommode que plus personne ne l’acceptera. L’utiliser sera aussi compliqué qu’acheter une Ferrari avec des pièces d’un dollar. C’est certes légal aux Etats-Unis— mais essayez de le faire.

Voilà comment les élites réaliseront leur rêve de taux d’intérêt véritablement négatifs. Vous préférerez dépenser votre argent en cours de tango ou en billets d’opéra plutôt que de payer à la banque le privilège de le garder pour vous.

Ce type d’interdiction « en douceur » du cash est une attaque indirecte plutôt qu’une attaque frontale comme celle qu’a lancée l’Inde en novembre. La résistance est trop solide au centre. Mieux vaut une bonne attaque latérale : cela fait beaucoup moins de bruit et l’ennemi est rapidement encerclé. C’est l’objectif des élites dans la guerre contre le cash : doucement, sans faire de bruit, vous déborder, vous encercler, pour empêcher toute échappatoire.

Puis viendra l’ordre : posez par terre votre cash et sortez les mains en l’air. Direction le camp des prisonniers numériques. Que voulez-vous. Pour tondre les moutons, il faut bien les parquer avant…

[NDLR : Si ces mesures vous révoltent car vous comprenez que c’est une privation totale de liberté, signez la pétition que nous avons mise en place : http://nonalasocietesanscash.fr/. Luttons contre la société totalitaire que l’on veut nous imposer !]

 Aujourd’hui c’est la Grèce. Demain ce sera un autre pays. Ne soyez pas surpris si la semaine prochaine, le mois prochain ou l’année prochaine cela arrive chez vous.

Plus d’infos sur : http://la-chronique-agora.com/grece-oblige-depenser-amende/
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Communiqué de presse de Migreurop

« L’Union européenne ne peut pas abolir les hivers : elle doit mettre fin à la politique criminelle des hotspots !

À partir de quel moment la non assistance à personne en danger devient-elle un crime ? Quel nombre de morts permet de qualifier un crime contre l’humanité ? Ces questions se posent depuis longtemps à propos des milliers de personnes décédées en Méditerranée faute de voies légales d’accès à l’Union européenne (UE). Aujourd’hui, la situation de plus en plus grave de milliers d’exilé·es, pris au piège par des températures glaciales dans les camps grecs et sur les « routes des Balkans », met très directement en cause les choix de l’UE en matière de « gestion des flux migratoires ».

Au printemps dernier, pour ne pas accueillir les centaines de milliers de réfugié·es qui fuyaient les conflits syriens, irakiens ou d’autres régions en crise, les fonctionnaires de la Commission et les membres du Conseil européen ont mis en œuvre une « solution hotspot » qui n’a manifestement pas intégré les variable météorologiques : l’hiver, les températures baissent et le froid sévit, y compris sur les îles de la mer Egée désertées par les touristes.  Seuls des camps de toile ont été prévus pour des exilé·es « stockés » dans l’attente de l’organisation des retours forcés, considérés par les fonctionnaires et les dirigeants européens comme la meilleure solution pour régler la « crise migratoire ».

Car la Commission européenne et les États membres n’ont jamais cru à la « relocalisation », dispositif censé « soulager » les pays de première ligne (Grèce et Italie) et permettre aux hotspots de ne pas devenir des lieux durables de relégation « d’indésirables ». De fait, alors que l’objectif annoncé est le transfert de 63 000 personnes depuis la Grèce vers d’autres pays de l’UE avant le mois de septembre 2017, moins de 8 000 ont, à ce jour, pu bénéficier de ce dispositif.

Ainsi, environ 15 000 personnes sont actuellement prisonnières des hotspots des îles grecques, battues par le vent et la neige ; des milliers d’autres sont bloquées, dans une urgence humanitaire et un froid extrêmes, sur les « routes des Balkans » fermées par les membres de l’UE et leurs alliés. Or, les personnes enfermées dans les hotspots sont placées sous l’autorité directe d’agences et de fonctionnaires européens qui doivent veiller à ce que ces lieux ne se transforment pas en mouroirs. Faire remonter la température n’est pas de leur ressort ; supprimer les hivers n’est pas à l’agenda de l’UE. En revanche, la fermeture des hotspots ainsi que l’organisation d’un accès au séjour et d’un accueil durables relèvent du pouvoir des responsables européens. C’est à l’aune des camps de toile disparaissant sous la neige que leur politique criminelle sera jugée.

Contact : contact@migreurop.org

Photo : Belgrade, janvier 2017 | (c) Danilo Balducci

Visite dans les dispensaires sociaux

Du 11 au 15 janvier, une visite de solidarité dans les dispensaires sociaux grecs

par Carine, José, Karim, Marie-France, Nadia, Philippe, Yiorgos de Bruxelles.

krasnyi collectif

Depuis plusieurs mois, la CGSP-ALR Bruxelles, l’Initiative de solidarité avec la Grèce qui résiste, le CADTM avec le soutien des « Supporters and Friends of Elliniko », organisent une campagne de solidarité avec les dispensaires sociaux grecs. Ceux-ci jouent, en effet, un rôle vital dans la situation de crise sanitaire sans précédent que traverse la Grèce. En effet, avec 42,3% des Grecs vivant en 2012 sous le seuil officiel de pauvreté de 2009 |1| et un énorme pourcentage de la population en situation de privation matérielle |2|, il y a plus de 2.5 millions des gens qui n’ont aucune assurance maladie. |3| Les dispensaires sociaux ont été créé par des gens actifs dans les mouvements anti-Troïka pour redonner un accès à la sante à ceux qui en ont été privés par l’austérité brutale imposée à la Grèce. Dans le but de construire des liens de solidarité concrète dans la lutte commune des peuples européens contre le rouleau compresseur néolibéral, nous avons estimé qu’il était de notre devoir d’agir et d’informer sur cette situation dramatique et d’organiser à notre échelle une solidarité importante pour les travailleurs et les jeunes Grecs.

Nous avons, dès lors, mis sur pied une campagne et une soirée de solidarité le 1er octobre à Bruxelles avec une centaine de participants au cours de laquelle le Docteur Vichas, de la Clinique solidaire d’Elliniko, a pu nous expliquer la gravité de la situation sanitaire dans son pays et l’action des dispensaires sociaux. Ceux-ci constituent un exemple de comment le mouvement social organisé peut prendre en charge des problèmes sociaux, tout en continuant de revendiquer une autre politique publique pour leur résolution globale. En décembre, nous avons organisé un petit brunch solidaire afin de continuer la récolte de dons et de médicaments. Contrairement à ce que certains peuvent penser, ces activités nous ont prouvé que la solidarité existe toujours bel et bien parmi les travailleurs car nous avons pu récolter 5000 euros qui ont servi à acheter sur place à Athènes des médicaments urgents et indispensables à la clinique Elliniko. A noter que cette clinique fournit parfois aux hôpitaux publics certains médicaments impossibles à acquérir sur le marché.

Pour être sûrs de la destination de ces dons, nous avons voulu remettre en mains propres le matériel et les médicaments récoltés et en acheter à Athènes sur base d’une liste fournie par la clinique d’Elliniko. Notre délégation a pu ainsi visiter la clinique solidaire ainsi que rencontrer de nombreux militants grecs tout au long de son séjour. Voici un résumé de cette expérience riche en rencontres et qui nous a tous stimulés à continuer le combat contre la régression sociale imposée par l’Union Européenne à l’ensemble des travailleurs.

Visite de la clinique d’Elliniko :

A environ 30 minutes du centre d’Athènes se trouve le dispensaire social d’Elliniko. Le dispensaire est ouvert de 10 à 20 heures en semaine et le samedi matin. Ce sont près de deux cents bénévoles dont une centaine de médecins qui s’y relaient pour offrir des soins et des médicaments à ceux qui n’ont plus les moyens de se rendre dans les hôpitaux publics.

Avec la crise et les plans d’austérité imposés par la Troïka (FMI, UE, BCE), les coupes budgétaires ont concerné tous les secteurs et la santé n’a bien évidemment pas été épargnée. Aujourd’hui, les chômeurs de longue durée, après un an sans emploi, perdent leur couverture sociale ! Plus de 2,5 millions de Grecs n’auraient donc plus d’assurance maladie… Les conséquences sont la réapparition de pathologies qui avaient quasiment disparu, la hausse des suicides, des malades chroniques qui ne sont plus soignées par manque de traitements, des cancers qui ne sont plus soignés ou dont le traitement doit être raccourci, la flambée du VIH, …

Le dispensaire d’Elliniko, créé en décembre 2011 sous l’impulsion du docteur Vichas avec des membres du personnel soignant révoltés de la situation, connaît depuis un succès grandissant. Au début, ils recevaient uniquement les patients sans couverture sociale. Aujourd’hui, alors que la situation sociale s’aggrave, ceux qui ont encore une sécurité sociale mais qui n’ont pas les moyens de payer le ticket modérateur ont aussi recours au centre. Même s’il est l’un des premiers, le dispensaire n’est pas le seul à Athènes à offrir des soins gratuitement ; plus d’une dizaine d’endroits accueillent désormais ceux qui, sans ça, resteraient en marge du système de santé. Des dizaines de milliers de patients ont été soignés ces six dernières années par la trentaine des dispensaires qui ont été établis dans toute la Grèce.

Tous ceux qui y travaillent sont volontaires et bénévoles ; les médecins, les infirmiers, les pharmaciens, ceux qui assurent le secrétariat ; certains sont à la retraite, d’autres sont chômeurs, d’autres y viennent après leurs heures de travail… Les médecins bénévoles sont en mesure d’offrir des consultations et des soins primaires dans toutes les spécialités (pédiatrie, gynéco-obstétrique, chirurgie générale, orthopédie, ORL, cardio, médecine interne et diabétologie, gastro-entero, psychothérapie, néphrologie, dermatologie, dentisterie, une nutritionniste, et des généralistes…).

En avril 2016, face à la pression populaire et aux mobilisations du secteur, le gouvernement a mis en place une nouvelle loi qui est censée donner un accès plus large à la santé publique. Cette loi aurait dû permettre à ceux qui n’ont pas de couverture sociale d’accéder aux soins de santé. Cette loi est cependant considérée par beaucoup comme une loi cosmétique car il reste toujours le ticket modérateur à payer (25% du prix de la consultation) et de très nombreuses personnes en grande difficulté financière restent ainsi encore et toujours exclues des soins. Cette loi ne peut pas non plus vraiment être appliquée car le manque de moyens dans les hôpitaux publics est tel que les listes d’attente sont interminables. Le matériel désuet, les bâtiments en très mauvais état et surtout, le manque de personnel chronique dans les hôpitaux publics ne leur permet pas de répondre aux besoins de la population.

Dans ce contexte, les objectifs définis par le centre sont de mener le combat pour des soins de santé universels, égalitaires et de qualité. Leur approche : ne pas se limiter à la maladie du patient mais prendre en compte son environnement, ses difficultés de vie, … Les membres des dispensaires ne veulent pas se substituer aux services publics et c’est pourquoi, par tous les moyens, ils font pression pour que les hôpitaux publics puissent reprendre leur rôle essentiel.-

Au cours de notre visite, nous avons pu discuter avec des médecins bénévoles, des pharmaciens qui triaient les nombreux dons en médicaments,… Nous remercions l’ensemble des camarades de la clinique Elliniko pour leur travail remarquable et de nous avoir accueilli de la sorte. La solidarité est notre arme, ne l’oublions jamais !

Rencontre avec des médecins syndicalistes de l’ EINAP (Union des médecins des hôpitaux d’Athènes et du Pirée)

Nous avons eu l’honneur de rencontrer des camarades du plus grand syndicat de médecins (par adhésion individuelle)de la Grèce qui compte 9000 adhérents. Ils nous ont expliqué qu’entre 2012 et 2013, dans le cadre des mémorandums imposés à la Grèce, on a assisté 1) à une désarticulation des soins de base non hospitaliers à travers le démantèlement des services offerts par la sécurité sociale, 2) àbeaucoup de fermetures d’hôpitaux, 3) au licenciement de milliers de médecins,… La volonté du gouvernement de l’époque était de réduire la capacité hospitalière de 33000 à 22000 lits. Heureusement, les mobilisations massives des travailleurs du secteur et des habitants ont empêché plus de fermetures et ont mis une limite temporaire à la destruction du secteur public des soins de santé.

Ils nous ont expliqué avoir vécu des manifestations très importantes, des occupations de longue durée par le personnel et les habitants. Pendant toute cette période, il était impossible au Ministre de la santé Adonis Georgiadis (Nouvelle Démocratie) |4| de se rendre dans n’importe quel hôpital en Grèce tellement la colère était grande !!

Les camarades de l’EINAP dénoncent la baisse systématique du financement des hôpitaux publics (de 1,8 milliards en 2013 à 1,1 en 2016). Ils organisent la lutte contre l’apparition des contrats précaires dans les hôpitaux publics, le non-remplacement du personnel partant à la retraite, la baisse importante des salaires du personnel soignant dans son ensemble moins de 30% pour les médecins et les infirmiers). Pour eux, le plus important problème est le manque de personnel : il manquerait 7000 postes de médecins et 30000 postes pour les autres catégories de personnel. Ils nous ont expliqué que par manque de brancardiers, ce sont parfois les familles qui doivent aujourd’hui assurer le transport du patient dans l’hôpital.

En Grèce, aujourd’hui, il y a un besoin de +ou- 3000 lits de soins intensifs alors que seulement 700 existent (550 réellement en fonctionnement car 150 lits n’ont pas le personnel nécessaire). Les conséquences peuvent être très graves, une des plus importantes étant que de nombreuses interventions importantes doivent être postposées. Une estimation d’un conseil scientifique serait qu’à cause de ces 150 lits non utilisables, 1500 vies n’ont pas pu être sauvées l’année passée. Parfois, il faut aussi par exemple attendre des mois pour recevoir un traitement de chimiothérapie. En règle générale, le manque de médicaments est criant dans les hôpitaux publics à tel point que ce sont parfois les dispensaires sociaux qui y envoient des médicaments en urgence.

Nous en avons profité pour expliquer aussi aux camarades les différentes mesures d’économies dans la santé lancées par la ministre Mme De Block. Leur réaction a été : « ici aussi cela a commencé comme ça… ». La combativité des médecins en Grèce contre l’austérité à la santé fait rêver sur les effets qu’une mobilisation des médecins pourrait avoir en Belgique.

Rencontre avec le chef du cabinet du ministère de la santé, Panos Papadopoulos

Nous sommes aussi reçus par Mr Padapopoulos, directeur de cabinet du ministre de la santé (Andreas Xanthos). Nous avons discuté longuement avec lui et il serait impossible de retranscrire l’ensemble de la discussion. Voici quelques éléments qui nous semblaient importants.

Nous l’avons tout d’abord interpellé à propos de la privatisation du terrain de l’ancien aéroport d’Athènes sur lequel se trouve les bâtiments actuellement utilisés par le dispensaire d’Elliniko et le risque d’expulsion par le nouveau propriétaire Spiro Latsis : « Nous n’avons jamais eu d’avertissement à propos d’un problème à ce sujet. C’est la première fois que notre ministère est sollicité sur cette question. On soutient les dispensaires sociaux car ils sont une nécessité. Si la clinique a des problèmes, on essayera de leur trouver un bâtiment ».

Nous avons rebondi en demandant :« Est-ce que vous nous assurez que le dispensaire ne sera pas expulsé ».

« Comme je vous le dis, nous les soutenons et il faut qu’ils nous contactent pour que l’on trouve une solution… ». Nous en avons informé le docteur Vichas.

Quel est le % du PIB consacré aux soins de santé ? : « Aujourd’hui, 5,2% du PIB. Ce pourcentage est très bas… Cela pousse les gens vers le privé. Nous faisons le maximum dans le cadre limité actuel… ».

Une camarade lui demande : « Que nous conseillez-vous de faire pour éviter la situation dans laquelle vous vous trouvez ? »

« Faites payer les riches ! Avant toute autre facteur comme la corruption, certes existante, la cause la plus essentielle de la crise grecque a été la faible imposition des riches ! Ceci ne concerne pas seulement les super-riches mais aussi la couche la plus aisée des classes moyennes et c’est le résultat d’un marchandage socio-politique de longue durée en Grèce sur lequel reposait la domination des partis traditionnels ».

Le ministère a confirmé le manque de 5000 médecins et 15000 autres métiers dans les soins de santé sans commenter la différence avec les estimations que nous avait données le syndicat des médecins. « Des carences, il y en a toujours eues mais la crise les a aggravées ».

Mr Padapopoulos nous explique qu’ il y trois facteurs qui empêchent la couverture des besoins de santé de base de la population : 1) la stricte politique budgétaire de la Troïka qui impose des coupures dans tous les services publics, 2) les limites annuelles que la Troïka nous met en termes d’engagement statutaire 3) son rejet des toutes les propositions du gouvernement grec de taxer les riches.

On lui demande si c’est la troïka (UE-FMI-BCE) qui gouverne la Grèce aujourd’hui ?

C’est l’impression que tout cela nous donne et on ressent que Syriza mène au final la politique d’austérité que la troïka impose. On s’est mobilisé en soutien au peuple grec, en Belgique aussi, et on se sent trahi.

« C’est une question difficile. La déception je la vis aussi. Je viens des mouvements sociaux et du syndicalisme comme vous. J’ai rejoint et j’ai voté Syriza pour en finir avec l’austérité. J’ai mal d’avoir trahi la solidarité des camarades partout en Europe. »

« En juillet 2015, le gouvernement grec a dû faire face à un choix difficile : accepter un nouveau programme d’austérité ou sortir de l’Euro mais de là, aurait résulté entre autres que les multinationales pharmaceutiques ne nous vendraient plus les médicaments dont nous avons besoin. »

« Alors, oui, dans certains champs, c’est la Troïka qui gouverne effectivement : fiscalité, budget,… Par contre, la Troïka ne peut pas et n’essaye pas d’imposer la privatisation de la santé en Grèce. Il existe donc un espoir de revenir sur la privatisation. Notre gouvernement a renversé la politique du favoritisme discret au secteur privé suivi par les gouvernements précédents. Contrairement à ces derniers, nous arrivons aujourd’hui à couvrir chaque jour plus de besoins par le secteur public. Après 2018, nous espérons d’être libres de suivre la politique budgétaire et fiscale que nous voulons. ».

Pour conclure, nous avons demandé quelles initiatives politiques prend le gouvernement grec afin de changer la politique sur la santé au niveau de l’UE. Mr Papadopoulos n’a pas cité d’ initiatives proprement politiques, mais seulement un effort de coordination à faire entre les pays de l’Europe du Sud pour mieux négocier le prix de médicaments avec les multinationales.

Il nous a fortement remerciés pour notre initiative de solidarité.

Notre séjour s’est terminé par une interview radio dans une émission animée par le Dr Vichas lui-même dans la radio publique d’ERT.

L’interview a porté sur la situation de la santé en Grèce et en Belgique. En regardant la Grèce, on voit clairement ce qu’il faut absolument empêcher qu’il arrive en Belgique. Il paraît aussi évident que la dégradation de la santé publique dans un pays européen permet d’exercer une forte pression sur tous les autres pays.

Alors, pour que notre solidarité soit importante, il ne faut pas uniquement les aider mais il faut aussi agir ensemble au niveau de l’Europe, pour faire changer les causes de cette situation !!!

Nous nous sommes engagés à continuer notre campagne de solidarité, mais avant tout à nous préparer au mieux pour faire échouer les projets dévastateurs de Magie de Block. Ceci est une étape indispensable vers de futures luttes pour sauver et améliorer la santé publique pas seulement en Belgique mais dans toute l’Europe.

Carine, José, Karim, Marie-France, Nadia, Philippe, Yiorgos.

Voir en ligne : http://www.infoskes.be/du-11-au-15-…

Notes

|1| Le taux de la pauvreté absolu prenant 2012 comme référence est 23, 1% en 2012 et 21,4% en 2014 (Eurostat). Néanmoins prendre comme référence le seuil de pauvreté en 2009 pondéré avec le pouvoir d’achat de 2012 nous permet de saisir de façon plus claire la paupérisation subie par de vastes couches de la population. Rapport annuel 2015 du service d’étude de la Confédération générale des travailleurs en Grèce (ΙΝΕ-GSEE) : « l’économie grecque et l’emploi », p. 142 http://www.inegsee.gr/wp-content/up…

|2| Selon le ministère de l’emploi, les travailleurs en Grèce ont perdu environ 50% de leur pouvoir d’achat (http://www.amna.gr/article/120204/Y…). Selon Eurostat, le salaire médian en Grèce a tombé de 915€ en 2010 à 793€ en 2011. Selon un développement de la même étude par INE-GSEE, 33,7% de la population n’arrive pas à couvrir trois des neuf besoins de base (situation de privation matérielle), alors que ce pourcentage était de 21,8% en 2008. http://ineobservatory.gr/deltio-tip… Par le passé, INE-GSEE a effectué une étude qui analysait en détail les prix des besoins de base, en concluant le fait que le seuil de pauvreté réel était d’environ 200€ supérieur au seuil de pauvreté officiel (« Approche empirique de la pauvreté absolue en Grèce », décembre 2010, p. 135 http://ineobservatory.gr/wp-content…). Ce seuil n’arrête pas de tomber : à 598€ en 2010, il est arrivé à 376€ en 2014. Notre conclusion est que la pauvreté absolue en Grèce est beaucoup plus importante que ce que les chiffres officiels déjà effrayants dévoilent. Le taux belge (15%) est aussi mis en question (http://www.lalibre.be/economie/libr…).

|3| https://www.theguardian.com/world/2…

|4| Le vice-président actuel de la Nouvelle Démocratie (ND) a été élu pour la première fois avec le parti d’extrême droite « Alerte Orthodoxe Populaire » (LAOS) et il a basculé à ND après l’expérience du gouvernement tripartite imposé par l’UE en 2011-2012. Il est connu pour ses propos racistes récurrents et son anti-syndicalisme primaire.

Sur les réfugies semaine 4

27/1/17  L’UE appelée à aider les migrants mineurs « victimes d’abus » https://www.lorientlejour.com/article/1031816/lue-appelee-a-aider-les-migrants-mineurs-victimes-dabus.html

25/1/17  L’UE et l’UNICEF annoncent un projet conjoint pour aider les enfants réfugiés en Grèce ANA- MPA

BRUXELLES (ANA / C. Vasilaki) La Commission européenne a annoncé mercredi un nouveau projet conjoint UNICEF-UE pour aider 6 000 enfants réfugiés et migrants à travers la Grèce, y compris les mineurs non accompagnés.
L’action sera financée à hauteur de 8,5 millions d’euros grâce à l’instrument de soutien d’urgence de l’Union européenne, qui permet à la Commission européenne de financer des opérations d’urgence au sein de l’UE.
« Les enfants réfugiés, en particulier les mineurs non accompagnés, font partie des personnes les plus vulnérables et il est de notre devoir moral de les aider et de les protéger autant que possible », a déclaré Christos Stylianides, Commissaire européen à l’Aide humanitaire et à la gestion des crises.
Dans un contexte de conditions météorologiques difficiles en Grèce, le projet aidera à protéger les enfants réfugiés et migrants et à leur donner accès à des services éducatifs et de protection de l’enfance, selon un communiqué de la Commission.
Selon la Commission, on estime à 21 000 le nombre d’enfants réfugiés et migrants en Grèce. Nombre d’entre eux souffrent d’une profonde détresse psychosociale à la suite de leurs expériences troublées, des conditions de vie difficiles dans les sites de réfugiés et de l’incertitude persistante. Beaucoup d’entre eux, quel que soit leur âge, ont quitté l’école pendant deux ans en moyenne.
Une attention particulière sera accordée aux services destinés aux enfants non accompagnés – dont 400 seront hébergés temporairement en attendant l’asile, le regroupement familial ou le déménagement en Grèce ou ailleurs en Europe. 6.000 autres enfants vulnérables et les femmes vivant dans des sites ouverts et les milieux urbains bénéficieront d’un soutien psychosocial, la gestion des cas et de renvoi à des services spécialisés de protection de l’enfance.

24/01/2017 Revue de presse hellénique : Crise des réfugiés:

La presse (Avghi, Kathimerini) relève que le Premier ministre, M. Tsipras, s’est entretenu hier avec les maires des îles de Lesbos, Chios, Samos, Cos et Leros sur la gestion de la crise des réfugiés. Les discussions ont notamment porté sur la nécessité de renforcer en personnel les services de l’asile et des corps de sécurité mais aussi sur l’amélioration des conditions de vie dans les hotspots. Les maires ont souligné la nécessité d’adopter de mesures visant au désencombrement des îles et au soutien des sociétés locales mais aussi à la promotion touristique des îles, où l’arrivée massive de migrants a entraîné une chute de la fréquentation touristique
Il n’y a pas eu d’engagement ferme à décongestionner les îles du Premier Ministre.

20/1/17 Enfants réfugiés et migrants en Europe : en danger face à la vague de froid  UNICEF/UN049071/Georgiev

Les retards administratifs et les mauvaises conditions climatiques aggravent les difficultés des enfants bloqués.

New York, 20 janvier 2017 – Sans aucun signe d’accalmie des conditions météo extrêmes et des tempêtes qui balayent le centre, l’est et le sud de l’Europe, les enfants réfugiés et migrants risquent des infections respiratoires et autres maladies graves – voire la mort par hypothermie, a déclaré l’UNICEF aujourd’hui.

En Grèce et dans les Balkans, environ 23 700 enfants réfugiés et migrants – dont des nourrissons et des nouveaux-nés, la plupart de Syrie, d’Irak et d’Afghanistan – sont toujours bloqués. Beaucoup sont hébergés dans des abris qui sont mal équipés pour l’hiver et encore moins pour des températures au-dessous de zéro.

Certaines régions de Grèce, en particulier sur les îles où des milliers de réfugiés s’abritent dans des tentes fragiles, ont connu de fortes chutes de neige pour la première fois depuis des années. L’UNICEF continue à demander que les réfugiés et migrants qui vivent dans des camps surpeuplés et sous-desservis sur les îles soient déplacés dans des hébergements plus sûrs et appropriés sur le continent.

« Sans hébergement digne de ce nom et des vêtements chauds, les jeunes enfants sont vraiment en danger à cause des mauvaises conditions climatiques » a déclaré Basil Rodrigues, le conseiller Santé de l’UNICEF pour la région Europe centrale et orientale. « Les nourrissons et les très jeunes enfants ont généralement une constitution moins résistante au froid, ce qui les rend plus vulnérables aux problèmes respiratoires et aux infections virales et bactériennes potentiellement fatales, comme la pneumonie et la grippe. »

La surpopulation et le manque d’isolation rendent les arbris particulièrement insalubres et favorisent la propagation rapide des maladies respiratoires en cas de mauvais temps. Selon l’OMS, la saison de la grippe en Europe a déjà commencé.

« Hormis la vague de froid, les problèmes de santé qui menacent les enfants sont la conséquence de leur situation desepérée  en tant que réfugiés et migrants, victimes de l’incertitude et des retards dans le traitement de leurs demandes d’asile, » a ajouté Basil Rodrigues. « Cet état d’incertitude impacte la santé des enfants, et aggrave leur souffrance.« 

Les interventions de l’UNICEF pour faire face aux conditions hivernales sont en cours en Croatie, en Serbie, en Slovenie et dans l’ex-république yougoslave de Macédoine, et permettent aux femmes et aux enfants d’avoir moins froid.

En Bulgarie, l’UNICEF a soutenu 1 100 enfants dans les centres de réception avec un ensemble complet de vêtements et des bottes. Depuis fin 2015-2016, les structures légères des plateformes d’accueil pour les familles et les enfants, des espaces pour les enfants et pour les mères et les bébés ont été remplacés par des infrastructures chauffées et adaptées aux conditions hivernales ou ont été déplacées dans des structures permanentes. L’UNICEF distribue des vêtements d’hiver et d’autres articles essentiels pour les enfants et les femmes, en utilisant des équipes mobiles dans certains endroits.

https://www.unicef.fr/contenu/espace-medias/enfants-refugies-et-migrants-en-europe-en-danger-face-la-vague-de-froid

Dette grecque de 2012 et recapitalisation bancaire jusqu’à 2016

La restructuration de la dette grecque de 2012 et la recapitalisation bancaire jusqu’à 2016 par Daniel Munevar 

En premier lieu seront analysés l’impact qu’a eu la restructuration de la dette de 2012 sur les banques grecques et les mesures prises afin de garantir leur recapitalisation effective. Cette partie aborde le rôle du Fonds hellénique de stabilité financière (FHSF) dans ce processus et les problèmes découlant de la composition de son conseil général. Celui-ci incluait d’anciens banquiers grecs et étrangers qui avaient eux-mêmes été impliqués dans la mauvaise gestion de banques. En conséquence, le FHSF s’est interdit de prendre des mesures significatives qui auraient bouleversé le statu quo autour du fonctionnement du système bancaire grec. Enfin, cette partie montre en quoi les politiques imposées par la Troïka dans le cadre du premier processus de recapitalisation ont fragilisé la stabilité du système bancaire grec.

Au début de l’année 2012, il est apparu clairement que le programme d’assistance financière à la Grèce était un échec. La mise en œuvre de mesures d’austérité a provoqué un effondrement économique, rendant inatteignables les objectifs fiscaux du programme. En conséquence de ces mesures, la dette publique a augmenté pour atteindre fin 2011 le montant de 356 milliards d’euros (172,1% du PIB). Cela a provoqué un important problème puisque le premier programme d’assistance financière était basé sur l’hypothèse qu’au début de l’année 2012, la majeure partie des besoins financiers du pays serait assurée par des fonds privés |1|. Or, l’accès de la Grèce aux marchés de capitaux était quasiment bloqué par la perspective imminente d’une restructuration de la dette. Ainsi, en plus des fonds publics nécessaires à la satisfaction des besoins financiers du pays, des mesures devaient être prises afin de réduire le fardeau de la dette.

il est apparu clairement que le programme d’assistance financière à la Grèce était un échec.

Un deuxième programme d’assistance financière à la Grèce fut préparé à cet effet. Le nouveau programme conservait la même contradiction interne que celle du précédent : il était supposé que d’importants surplus budgétaires seraient compatibles avec une reprise économique. Ce programme incluait également la restructuration de la dette dans le cadre de ce que l’on a appelé Private Sector Involvement (PSI, « participation du secteur privé »). Le PSI prévoyait un échange de dette des derniers créanciers privés du pays, afin de réduire le fardeau de la dette. En conséquence, on attendait des banques grecques qu’elles jouent un rôle clé dans ce processus, étant donnée leur importante exposition aux titres grecs. Ainsi, afin d’assurer la stabilité financière, le programme devait simultanément s’occuper de la restructuration de la dette et de ses répercussions sur la solvabilité des banques.

Les négociations autour de la restructuration de la dette eurent lieu entre mars et avril 2012. Il s’agissait de l’opération la plus importante dans l’histoire des défauts sur la dette souveraine, puisqu’elle concernait des titres de créance pour une valeur nominale de 205 milliards d’euro |2|. Afin d’accomplir cette opération, le gouvernement grec a amendé les conditions associées à des titres soumis au droit grec pour une valeur nominale de 177 milliards d’euros |3|. En théorie, le gouvernement aurait pu utiliser ce mécanisme pour imposer unilatéralement des conditions à ses créanciers, mais il a préféré négocier avec eux en soumettant leurs titres, de manière rétroactive, à des clauses d’action collective (CAC) |4|. À l’aide de cet instrument, le gouvernement a obtenu un accord de restructuration de la dette publique concernant 82,5% des détenteurs de titres soumis au droit grec |5|. Les CAC ont été un élément-clé pour qu’un niveau important de créanciers détenant des titres soumis au droit grec acceptent l’accord et participent à la restructuration. En conséquence de cette restructuration, la valeur nominale de la dette grecque a été réduite de 107 milliards d’euros, soit près de 50% du PIB.

Cependant, l’allégement réel de la dette grecque n’a pas atteint ces montants. Cela s’explique par la distribution inégale des pertes liées à la restructuration. Alors que les fonds de pension et d’autres détenteurs domestiques de titres ont subi une perte d’environ 65% de la valeur de leurs titres, les banques ont quant à elles été entièrement dédommagées à travers un mécanisme de recapitalisation bancaire. Ainsi, un large montant de l’allègement de la dette a finalement servi à compenser les pertes des banques. Le deuxième programme d’assistance financière prévoyait un fonds de 40,5 milliards d’euros destiné à s’assurer que les besoins en capitaux des principales banques du pays soient satisfaits |6|. Il est important de souligner que, comme c’était déjà le cas dans le premier programme, aucun mécanisme de bail-in (faisant porter les coûts de la recapitalisation sur les actionnaires et les détenteurs des obligations émises par les banques) n’a été envisagé afin de réduire le besoin de financement par des fonds publics. Le gouvernement grec aurait pu épargner jusqu’à 25 milliards d’euros destinés au bail-out s’il avait pris ce type de mesure |7|. Cette décision contraste de manière importante avec l’approche adoptée pour le deuxième processus de recapitalisation de 2015, qui a impliqué un mécanisme de bail-in des parts du gouvernement dans les banques afin de réduire le montant du bail-out. Le « deux poids, deux mesures » appliqué ici (protéger les actionnaires privés en 2012, mais appliquer un bail-in des parts publiques en 2015) mérite d’être mis en question.

les banques ont quant à elles été entièrement dédommagées à travers un mécanisme de recapitalisation bancaire.

De plus, les fonds de recapitalisation ont été attribués afin d’assurer que les banques grecques supportent l’impact de la restructuration de la dette ainsi que la détérioration rapide de leurs portefeuilles de prêts. En théorie, un niveau adéquat de recapitalisation aurait dû leur permettre de reconnaître leurs pertes et d’assainir leurs bilans comptables, afin de pouvoir recommencer à distribuer des crédits dans l’économie et faire démarrer la reprise économique. À cet égard, un cadre crédible pour régler les problèmes des défauts de paiement (NPLs, « Non-performing loans  ») aurait dû inclure, parmi d’autres, des mesures visant à appliquer des changements dans le personnel de direction et les modèles de gestion des banques. Mais le programme s’est limité à quelques mesures superficielles telles que la projection de changements du cadre juridique afin de faciliter, entre autres, la maximisation du recouvrement des actifs |8|.

L’absence d’un cadre crédible pour régler les problèmes des NPLs s’explique en partie par l’hypothèse explicitement formulée par les régulateurs vis-à-vis de l’impact de ce deuxième programme sur l’économie – et par extension sur l’évolution des portefeuilles de prêts des banques. Le programme se basait sur l’hypothèse d’une forte contraction de l’économie en 2012 qui serait suivie d’une rapide reprise à partir de 2014. L’augmentation du pouvoir d’achat et de l’emploi aurait ainsi dû permettre aux banques de stabiliser, puis éventuellement d’endiguer, la croissance des créances douteuses |9|. Mais, puisque ces projections ne prenaient pas en compte les effets multiplicateurs de l’austérité budgétaire comprise dans le programme, elles se révélèrent largement erronées |10|. Tandis que la crise économique s’approfondissait en Grèce, les NPLs ont continué d’augmenter à un rythme effréné (graphique 1) |11|. Ainsi, au dernier trimestre de l’année 2013, les NPLs représentaient 138% du capital des banques |12|, et ce alors que leur recapitalisation avait eu lieu moins de 18 mois plus tôt. Sauver les banques sans relancer l’activité économique et sans reconnaître la qualité douteuse des portefeuilles de prêts était condamné à l’échec.

Graphique 1 – Évolution des défauts de paiement (Non-performing loans) en % de l’ensemble des prêts octroyés par les banques grecques (2009-2015)

Source : FMI

C’est le Fonds hellénique de stabilité financière (FHSF) qui supervisait le processus de recapitalisation bancaire. Le FHSF avait été mis en place en 2010 afin de garantir la stabilité du système bancaire grec. Parmi d’autres responsabilités, il est chargé de pourvoir en capital les établissements de crédit, de contrôler et de superviser la réalisation des plans de restructuration soumis par les établissements de crédit ayant bénéficié des ressources du Fonds, ainsi que de faciliter la gestion des NPLs |13|. Les débuts du Fonds, créé en tant qu’organe indépendant du gouvernement, furent timides. Dans les 18 mois qui ont suivi sa création, le FHSF disposait d’un capital de 1,5 milliard d’euros. Durant cette période, il n’a attribué des fonds qu’à la banque New Proton |14|. Nous reviendrons plus loin sur les caractéristiques particulières de la relation entre le FHSF et New Proton.

Une fois que le deuxième programme a commencé à être appliqué, l’étendue des opérations du FHSF a largement augmenté. Il reçut 50 milliards d’euros de fonds destinés au bail-out, qui allaient être utilisés pour la recapitalisation des banques affectées par la restructuration de la dette. Dans le cadre de ce processus, son indépendance par rapport au contrôle public fut renforcée. Malgré le fait qu’il allait bientôt acquérir une part importante du système bancaire en raison du processus de recapitalisation |15|, le programme a fixé des limitations strictes concernant les droits de votes du FHSF associés aux actions des banques en sa possession. Ces mesures avaient pour objectif de garantir l’autonomie des affaires des banques, de jure et de facto |16|. Ainsi, même si le processus de recapitalisation était principalement financé par des fonds publics, le contrôle réel du gouvernement grec sur les ressources des institutions qui en bénéficièrent était limité. Le mémorandum excluait implicitement la possibilité de propriété publique ou coopérative des institutions recapitalisées, alors que cette option avait déjà été appliquée avec succès, par exemple en Norvège et en Suède au début des années 90 |17|.

Le mémorandum excluait implicitement la possibilité de propriété publique ou coopérative des institutions recapitalisée.

Tandis que l’indépendance du conseil général du FHSF était renforcée, des questions préoccupantes furent soulevées concernant sa composition. Le gouvernement grec et la Troïka avaient dû faire face à un choix difficile pour sélectionner ses membres. D’un côté, se reposer uniquement sur des membres grecs était problématique en raison des importantes allégations de corruption et de connivence au sein du système bancaire grec. De l’autre, se reposer uniquement sur des membres étrangers aurait été perçu comme une décision de la Troïka outrepassant son rôle de manière injustifiée |18|. Finalement, en décidant de nommer des membres étrangers au passif douteux, c’est la pire combinaison des deux options qui a été choisie. Par exemple, on comptait Pierre Mariani et Wouter Devriendt parmi les membres du conseil. Ces deux hommes avaient été impliqués en Belgique dans le processus de résolution du groupe Dexia, qui avait été un fiasco.

Le cas d’Anastasia Sakellariou, directrice générale du FHSF entre 2013 et 2015, est encore pire. En mai 2015, Sakellariou a été sommée par le gouvernement grec de quitter son poste car elle était inculpée pour fraude et blanchiment d’argent, aux côtés de 25 autres anciens cadres de la banque Hellenic Post Bank |19|. Les charges portées contre Mme Sakellariou sont liées à l’approbation, en 2012, d’un prêt permettant le rallongement de deux lignes de crédit de la banque à un fameux magnat local |20|. Au lieu d’exiger son renvoi jusqu’à la fin de l’enquête, le directeur de la Banque de Grèce, Yannis Stournaras, et le conseil général du FHSF ont soutenu Mme Sakellariou |21|. Cela aide à comprendre pourquoi il a été si difficile de s’attaquer à la présence importante de NPLs dans le système : il n’est pas possible d’attendre une résolution satisfaisante de ce problème si les autorités chargées de réguler les banques et d’imposer la reconnaissance des pertes sont elles-mêmes impliquées dans ce jeu de corruption bancaire. Sans de fortes mesures de restructuration des banques incluant un changement complet du personnel de direction et des modes de gestion afin d’enrayer la corruption, les problèmes découlant des prêts douteux continueront à gangréner les institutions financières du pays.

On peut observer des exemples de cette dynamique dans la réponse apportée par le FHSF aux difficultés auxquelles devaient faire face deux autres établissements grecs, les banques Proton et Piraeus. Concernant Proton, la gestion de la banque fut modifiée en 2010, après que M. Lavrentis Lavrentiadis eut acheté une part minoritaire de la banque, ce que George Pavropoulos, directeur de la Banque de Grèce, avait personnellement approuvé malgré l’avis défavorable délivré par un audit |22|. La vente fut officiellement conclue un mois avant la signature du premier programme d’assistance. La banque Proton, contrôlée par M. Lavrentiadis, fut utilisée par celui-ci pour accorder à lui-même et à ses associés des prêts à hauteur de 600 millions d’euros avec des garanties faibles voire inexistantes. Parmi ces prêts, 51 millions d’euros furent transmis directement sur les propres comptes de M. Lavrentiadis |23|. Cette frénésie de prêts fut financée en recourant à la fourniture de liquidité d’urgence (« Emergency Liquidity Assistance », ELA) de la BCE |24|. Bien qu’il était de la responsabilité de la Banque de Grèce et du FHSF de superviser les opérations de la banque Proton, ces deux entités sont restées les bras croisés tandis qu’il a fallu qu’une commission spéciale d’investigation de la Cour suprême de Grèce intervienne pour révéler la fraude |25|. Au final, le FHSF a procédé en 2011 au bail-out de la banque Proton à l’aide de fonds publics à hauteur de 1,3 milliard d’euros |26|.

L’affaire de corruption à la banque Piraeus suit une logique similaire. En 2011, afin de renforcer son capital de base, Piraeus émit de nouvelles actions. Une fois le processus achevé, la famille de Michael Sallas, qui était alors le président exécutif de Piraeus, devint l’actionnaire majoritaire de la banque. Afin d’accomplir cet exploit, la famille Sallas avait contracté des prêts pour un montant total de 100 millions d’euros auprès de la Banque Marfin Popular (MPB), en donnant comme garantie les parts ainsi acquises |27|. Les responsables de l’audit de la MPB ont souligné que ces prêts avaient été accordés alors que les perspectives financières de Piraeus étaient « profondément négatives » et « désespérées » |28|. Il est estimé que près d’un cinquième du nouveau capital apporté à la banque fut permis par les prêts d’autres banques grecques. De la part de la Banque de Grèce et du FHSF, le fait d’avoir permis ce type d’opération représente un manquement majeur à leur rôle de gardiens de la stabilité financière. Concrètement, l’utilisation de prêts accordés par une banque pour acheter des parts d’une autre banque n’est rien d’autre qu’un système de Ponzi : si des pertes se matérialisent dans une banque financée de la sorte, son capital se réduisant alors et ses actionnaires étant éliminés, les mêmes pertes s’étendent à la banque ayant fourni les prêts. C’est pour cette raison que les normes internationales prévoient que les banques qui adoptent cette conduite doivent traiter les prêts comme une acquisition directe des actions de la banque concernée et déduire les montants de leur propre capital. Dans le cas présenté ici, la Banque de Grèce et le FHSF ont préféré détourner le regard |29|.

ces prêts avaient été accordés alors que les perspectives financières de Piraeus étaient « profondément négatives » et « désespérées »

De plus, les mesures prises par le FHSF ont conduit à une augmentation dangereuse du niveau de concentration du système financier dans le pays. Entre 2008 et 2013, la Grèce est le pays de la zone euro où le nombre d’établissements de crédit a diminué le plus |30|. Ce processus a notamment été marqué par la quasi disparition des filiales et branches étrangères, acquises par deux des plus grandes banques du pays soutenues et encouragées par les autorités européennes |31|. La Grèce s’est retrouvée avec le système bancaire le plus concentré de la zone euro : une fois que la première vague de consolidation fut accomplie en 2013, les cinq plus grands établissements de crédit du pays détenaient près de 95% de la totalité des actifs dans le système |32|. Ce degré de concentration soulève des questions supplémentaires quant à la capacité des banques à éviter la connivence et la protection d’intérêts particuliers, et quant à celle du gouvernement à se protéger lui-même et à protéger le public des risques associés à l’insolvabilité de ces institutions.

À la fin de l’année 2013, il apparaissait très clairement que la tentative initiale de recapitalisation des banques grecques était un échec quasi complet. À cette période, le FHSF avait alloué 37,3 milliards d’euros à la recapitalisation et à la consolidation du système bancaire du pays. Sur l’allocation initiale de 50 milliards d’euros, les fonds restants furent mis en réserve au cas où de nouveaux besoins de recapitalisation apparaitraient. Lorsque le deuxième programme est apparu comme un échec et les spéculations autour d’un potentiel troisième programme ont commencé, le gouvernement grec a proposé d’utiliser les fonds restants du FHSF dans le but de réduire les divers besoins de financement du pays. Cependant, dès septembre 2013, les responsables de la Troïka craignaient que l’impact de la détérioration de l’économie grecque, couplé aux répercussions de la crise financière à Chypre, conduise à l’utilisation de fonds supplémentaires pour recapitaliser les banques au-delà des réserves disponibles du FHSF |33|.

Le désaccord entre les autorités grecques et la Troïka concernant la situation réelle du système bancaire grec apparut au début de l’année 2014, quand la Banque de Grèce fit fuiter dans la presse locale son évaluation des besoins en capitaux des banques grecques avant la publication d’une évaluation du programme par la Troïka et sans consulter celle-ci. Selon la Banque de Grèce, qui faisait l’hypothèse d’une reprise des profits de l’activité bancaire dès 2015, les besoins en capitaux des banques s’élevaient à 6 milliards d’euros. Dans le même temps, le FMI et la BCE évaluaient ce besoin à près de 20 milliards d’euros |34|. Toutefois, si la Troïka avait voulu pousser à agir dans son sens, cela aurait signifié deux choses. Premièrement, elle aurait dû insister sur la nécessité d’une restructuration plus profonde du secteur bancaire grec à peine un an après l’injection massive de fonds publics dans celui-ci. Deuxièmement, elle aurait dû ouvrir une discussion formelle sur un troisième plan de sauvetage, dans une situation où il n’y avait plus de fonds disponibles dans le cadre du deuxième programme et où la Troïka avait de sérieux doutes sur la volonté du gouvernement grec de remplir ses engagements.

Finalement, le FMI et la BCE se mirent en retrait sur la question. Dans une évaluation menée en avril 2014, le FMI se contenta de rendre compte que les hypothèses de la Banque de Grèce étaient « optimistes » et certainement situées dans la « tranche basse » des besoins réels de financement des banques. Le FMI s’abstint de faire part de sa propre estimation des besoins en capitaux des banques. En l’état, le FMI estimait que le pays avait besoin de 12,6 milliards d’euros supplémentaires afin de couvrir ses besoins de financement pour l’année 2015, sans prendre en compte les fonds de recapitalisation bancaire additionnels |35|. Cet écart devait être couvert soit par un retour sur les marchés de capitaux, soit par un nouveau programme. Reconnaître les besoins de fonds additionnels aurait écarté la première option et rendu la seconde inévitable.

La BCE allait suivre une approche similaire quelques mois plus tard. En octobre 2014, elle conduisit une évaluation approfondie afin d’examiner la situation des banques européennes et de déterminer si des mesures supplémentaires devaient être prises pour assurer leur capitalisation et leur fonctionnement. À l’issue de cet exercice, la BCE estima que trois des quatre principales banques grecques avaient passé le test de résistance avec succès |36|. Concernant la quatrième banque, Eurobank, son échec fut considéré comme étant marginal |37|. Cela représentait un changement important dans l’orientation de la BCE, étant donné son rôle en tant que gardienne de la stabilité financière du pays. De plus, cela indique que les considérations politiques et stratégiques ont pris le dessus sur les réalités financières alors que les doutes étaient de plus en plus importants quant à la capacité du gouvernement grec à mettre en place l’accord.

les considérations politiques et stratégiques ont pris le dessus sur les réalités financières.

Afin de justifier son orientation, la BCE a appliqué une approche similaire à celle de la Banque de Grèce en utilisant des prévisions basées sur des hypothèses favorables. Dans ses scénarios, la BCE supposait des taux d’inflation positifs, allant de 0,3% à 1,3% entre 2014 et 2016 |38|. Or, la Grèce connaissait déjà une situation de déflation depuis 2013 qui a pris de l’ampleur au point d’atteindre une baisse des prix de 1,4% en 2014 |39|. Vu l’impact négatif de la déflation sur les portefeuilles de prêts, la BCE aurait reconnu qu’il y avait un manque de capital dans tous les grands établissements bancaires si elle avait utilisé des hypothèses plus réalistes. Par définition, cela aurait signifié qu’elle aurait admis l’échec de la recapitalisation bancaire de 2012 et la nécessité de lancer un vrai processus de résolution bancaire. Mais à ce moment, le fait de cacher sous le tapis les problèmes des banques grecques était devenu une pratique routinière.


Le deuxième processus de recapitalisation bancaire (de 2015 à aujourd’hui)

Cette partie se consacre à présenter les principaux développements du système bancaire grec depuis le début de l’année 2015. Les contradictions des mesures adoptées par la BCE, en tant que conductrice de la politique monétaire de la zone euro et en tant qu’exécutrice en dernier ressort des politiques de la Troïka, seront analysées en détail. Cette partie se conclut par une vue d’ensemble des principaux éléments du deuxième processus de recapitalisation des banques grecques et par une exposition des principaux éléments permettant d’expliquer pourquoi ce processus ne pourra pas remplir ses objectifs affichés.

Comme l’a montré l’analyse faite précédemment, le système bancaire grec se trouvait dans une situation précaire au moment des élections de janvier 2015. Du côté de leurs actifs, le manque de changements appliqués au personnel et au modèle de gestion des banques s’est traduit par une constante contraction du crédit et, en conséquence, par une augmentation des NPLs. L’issue incertaine des négociations entre la Troïka et le gouvernement nouvellement élu a aggravé ce problème plus encore. Du côté des passifs, les banques devaient faire face à de nouvelles tensions en raison de la panique bancaire et étaient forcées d’augmenter leur dépendance au financement apporté par l’Eurosystème. Dans ce contexte, l’insolvabilité des banques systémiques n’était pas une question de probabilité, mais de temps. Les autorités européennes, notamment la BCE, étaient conscientes de ce fait et l’ont utilisé de manière déterminée afin de mettre le gouvernement grec sous pression. Il vaut la peine d’étudier chacun de ces développements.

l’insolvabilité des banques systémiques n’était pas une question de probabilité, mais de temps.

La contraction du crédit et l’augmentation conséquente des NPLs sont les principaux problèmes des banques grecques si l’on regarde du côté de l’actif de leurs bilans financiers. Les graphiques 1 et 2 montrent ces développements. Les crédits aux ménages et aux entreprises non-financières ont chuté de manière continue depuis le début de la crise. Cela reflétait l’effondrement économique à l’œuvre dans le pays et, par extension, le manque de demande de crédit et la sous-capitalisation bancaire. Par ailleurs, l’évolution des NPLs a suivi la tendance établie depuis 2008. On estime qu’au deuxième trimestre 2015, leur montant était proche de 100 milliards d’euros, obstruant réellement le système de crédit du pays et empêchant ce faisant toute perspective crédible de reprise économique |40|.


Graphique 2 – Évolution du crédit interne en Grèce (2009-2015)

Source : Banque de Grèce

Aggravant ces problèmes, une fuite des dépôts fut provoquée par l’absence d’engagement clair de la BCE en faveur d’un soutien illimité aux banques qu’elle avait jugé solvables lors de son dernier test de résistance. Entre décembre 2014 et juillet 2015, les dépôts des ménages ont diminué de 39,4 milliards d’euros, soit une réduction de près d’un quart de la totalité des dépôts (graphique 3) |41|. Parmi ces sorties d’argent, 17,8 milliards d’euros (45,1% du total) ont été transformés en monnaie en circulation |42|. Tandis que les besoins de financement provoqués par la fuite des dépôts s’amplifiaient, la dépendance des banques grecques à la BCE s’intensifiait. Les coûts de cette dépendance ont augmenté suite à la décision de la BCE de suspendre la dérogation appliquée à l’éligibilité des titres publics grecs en tant que garanties acceptables. Depuis avant la restructuration de la dette de 2012, les titres de créance grecs étaient qualifiés de pourris par toutes les grandes agences de notation. En conséquence, ils étaient considérés comme inéligibles en tant que garanties acceptables pour l’obtention de prêts de la BCE. Cependant, afin d’assurer le bon fonctionnement des opérations du système financier grec, la BCE avait introduit une dérogation permettant aux banques grecques de présenter des titres publics en tant que garanties afin d’accéder au financement de la banque centrale. Cette dérogation a été annulée en février 2015, et n’a été réintroduite que le 22 juin 2016. Dans ce contexte où les titres publics n’étaient plus acceptés en tant que garanties, la BCE a augmenté sa fourniture de liquidités d’urgence (ELA) aux banques grecques de façon continue, tout en la conditionnant à une issue positive aux négociations. Ainsi, l’ELA est passée de 59,5 milliards d’euros en février 2015 à 89 milliards d’euros au moment où le contrôle des capitaux a été introduit à la fin du mois de juin 2015 |43|.


Graphique 3 – Dépôts des résidents dans les banques grecques (2009-2016)

Source : Banque de Grèce

À cet égard, il est important de souligner que la décision de la BCE de limiter la mise à disposition de liquidités supplémentaires dans le système bancaire grec, qui a conduit à l’imposition effective d’un contrôle des capitaux, contrevenait aux principes guidant son action en tant que banque centrale, ainsi qu’à son mandat et à ses principales responsabilités |44|. En effet, l’une des principales tâches d’une banque centrale est de juguler les paniques bancaires. Pour ce faire, la banque centrale doit fournir des liquidités de manière illimitée en échange de bonnes garanties, afin d’assurer qu’un problème de liquidité ne se transforme pas en problème de solvabilité. Dans les lignes directrices de son cadre institutionnel, la BCE reconnaît que ce type de mise à disposition de liquidité est l’un de ses principaux outils de gestion de crise : « Le cadre institutionnel pour la stabilité financière de l’UE est composé de deux éléments : (i) la prévention des crises ; et (ii) la gestion et la résolution des crises. La BCE, en partenariat avec les banques centrales nationales de la zone euro, contribue à ces deux éléments. […] Les autorités peuvent prendre différentes mesures pour gérer une crise et empêcher les perturbations. Par exemple : […] les banques centrales peuvent chercher à rétablir des conditions normales d’accès aux liquidités sur les marchés financiers, ou prendre des mesures assurant le bon déroulement des opérations des structures de marché telles que les systèmes de paiement » |45|. Puisque la BCE avait estimé que les banques grecques étaient solvables lors du test de résistance appliqué en 2014, elle avait l’obligation de leur faire bénéficier de l’ELA afin de juguler la panique bancaire tant que ces banques étaient capables de présenter des garanties en accord avec les régulations de la BCE. Au moment où la BCE a plafonné l’ELA en contradiction avec ses outils de gestion de crise, les banques grecques auraient pu accéder à des fonds d’urgence pour un montant estimé à 28 milliards d’euros |46|. C’est pourquoi l’on peut dire qu’à travers ses actions, la BCE a placé des contraintes supplémentaires sur les conditions d’accès aux liquidités de l’économie grecque, de même qu’elle a causé des perturbations dans son système de paiement.

la BCE a placé des contraintes supplémentaires sur les conditions d’accès aux liquidités de l’économie grecque.

De plus, les agissements de la BCE contrevenaient à deux de ses responsabilités telles que fixées explicitement par les traités de l’UE |47|. Premièrement, les importantes perturbations qui ont été imposées au système de paiement sont clairement une violation de l’article 127 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, qui dit que la BCE doit assurer le bon fonctionnement de ce système. Deuxièmement, la BCE a pour mandat d’apporter « son soutien aux politiques économiques générales dans l’Union, en vue de contribuer à la réalisation des objectifs de l’Union » |48|. L’une de ces politiques économiques est « [l’]impératif de briser le cercle vicieux qui existe entre les banques et les États » |49|. En forçant la fermeture des banques, en imposant des contrôles de capitaux et en poussant le pays, de fait, au bord d’une sortie illégale de la zone euro, la BCE a renforcé plus encore l’interdépendance entre l’État grec et ses banques. Comme à Chypre en 2013, ces agissements de la BCE étaient des moyens de pression destinés à obtenir une issue favorable à l’UE dans ses négociations avec une nation souveraine.

L’attitude générale de la BCE durant les négociations, violant son mandat et outrepassant son autorité, a été illustrée par les déclarations de Benoît Coeuré, membre du conseil exécutif de la BCE, le 29 juin 2015. Plutôt que de faire son travail en tant que banquier central, c’est-à-dire de rassurer tant les marchés que les déposants, Coeuré a nourri les incertitudes en déclarant : « La sortie de la Grèce de la zone euro, qui était un objet théorique, ne peut malheureusement plus être exclue » |50|. Concernant le référendum du 5 juillet, Coeuré a déclaré que si le peuple grec votait « Oui » au plan de sauvetage, il n’avait « pas de doute sur le fait que les autorités de la zone euro trouver[aient] les moyens […] de tenir leurs engagements » envers la Grèce. Continuant, il a déclaré que si le « Non » devait gagner, « [i]l serait alors très difficile de renouer un dialogue politique » |51|. Inutile de préciser qu’une ingérence aussi flagrante dans les affaires internes d’un pays membre est largement hors du champ d’intervention d’un membre du conseil exécutif de la BCE.

Malgré cette longue liste de problèmes, la Troïka a défendu l’inclusion d’un nouveau processus de recapitalisation – suivant la même logique que les processus précédents – dans le troisième mémorandum. Ce dernier limite explicitement la capacité du gouvernement à introduire n’importe quelle mesure qui pourrait avoir une incidence sur les opérations bancaires sans consultation préalable des membres de la Troïka |52|. L’accord du mémorandum énonce également la nécessité de mener une évaluation quant aux besoins en capital des banques afin de procéder à leur recapitalisation avant la fin 2015. Sur les 86 milliards qu’il était prévu de prêter à la Grèce dans le cadre du troisième programme d’assistance financière, l’accord allouait 25 milliards d’euros à cette recapitalisation.

L’évaluation devait être réalisée en urgence car la recapitalisation devait être achevée avant la fin de l’année 2015 afin d’éviter la mise en œuvre complète de la directive européenne relative au redressement des banques et à la résolution de leurs défaillances, qui devait entrer en vigueur le 1er janvier 2016. Celle-ci aurait nécessité le bail-in de 8% du passif des banques avant un versement de fonds de la part du Mécanisme européen de stabilité (MES). Concrètement, cela aurait signifié, outre le fait d’éliminer les créanciers ne disposant d’aucune sûreté particulière, de pratiquer une coupe partielle sur les dépôts non garantis supérieurs à 100 000 euros |53|. La réalisation d’un bail-in (qui aurait été adéquate au début de la crise pour distribuer les pertes plus équitablement) risquerait donc maintenant de faire plus de mal que de bien, particulièrement pour les déposants. Eu égard aux caractéristiques de l’instrument de recapitalisation du MES, la part des déposants qui aurait été soumise à une coupe est estimée entre 13 et 39%. Or, les plus gros déposants ayant déjà transféré leur argent à l’étranger, ces coupes auraient touché de manière disproportionnée le fonds de roulement des petites et moyennes entreprises grecques |54|. Comme ces chiffres le mettent en lumière, la décision de reporter à plus tard la reconnaissance des pertes et de l’insolvabilité des banques grecques continue à faire porter les coûts de la crise sur la population.

L’évaluation du système financier grec par la BCE se termina finalement en octobre 2015. Elle conclut à un manque en capitaux dans les banques grecques, au mieux, de 4,4 milliards d’euros et, au pire, de 14,4 milliards d’euros |55|. À cet égard, l’un des aspects les plus intéressants de cette évaluation concerne l’utilisation de critères nettement plus stricts que lors de l’évaluation précédente (conduite moins de douze mois plus tôt) en termes de besoins en capitaux des banques grecques |56|. Cette approche prudente se retrouve dans les hypothèses macroéconomiques utilisées : alors que les évaluations précédentes étaient caractérisées par l’utilisation d’hypothèses trop optimistes, comme cela a été expliqué précédemment, le dernier test de résistance prenait cette fois en compte, dans son scénario le plus défavorable, une récession prolongée et une déflation soutenue pour la période 2015-2017 |57|. Au vu des événements qui se sont produits en 2015, on peut légitimement se demander pourquoi la BCE n’avait pas choisi cette approche prudente fin 2014. Étant donné qu’à cette époque, les banques avaient réussi le test de justesse, il est certain que l’utilisation d’hypothèses plus prudentes aurait forcé le déclenchement d’un large processus de résolution bancaire dès 2013, lorsque sont apparus les doutes du FMI et de la BCE concernant le premier processus de recapitalisation bancaire. Curieusement, la BCE est incapable de fournir une explication quant à ce changement d’approche dans sa dernière évaluation |58|.

Néanmoins, les responsables européens accueillirent positivement les résultats de cette évaluation de la BCE puisqu’ils ne prévoyaient qu’un montant de 14 milliards d’euros nécessaire à la recapitalisation des banques, nettement en-dessous des 25 milliards que prévoyait le troisième mémorandum |59|. De plus, sur la base de ces résultats, les banques grecques disposaient d’une semaine pour présenter à la BCE leurs plans de recapitalisation et de plus d’un mois pour les mettre à exécution avant l’entrée en vigueur de la directive relative au redressement des banques et à la résolution de leurs défaillances. En décembre, les banques avaient réussi à lever 8,3 milliards d’euros provenant de sources privées grâce à des échanges d’obligations, des constitutions de carnets d’ordre et des outils de bail-in. Les 5,4 milliards d’euros restants furent fournis par les fonds de bail-out du FHSF |60|.

Il faut souligner que ce deuxième processus de recapitalisation transforma radicalement la répartition des actions des banques parmi les actionnaires. Les actions nouvellement émises étant vendues au rabais (avec un coût diminué de 34,4% par rapport à leur valeur nominale dans le cas d’Alpha, de 80% dans le cas de Piraeus et de 93% dans le cas de NBG |61|), la participation du FHSF dans le capital des banques, qui avait coûté plus de 40 milliards d’euros de fonds de bail-out, fut fortement diluée. Elle passa de 66,2% à 11% dans le cas d’Alpha, de 35,4% à 2,3% dans le cas d’Eurobank, de 57,4% à 40,3% dans le cas de NBG et de 66,9% à 26,4% dans le cas de Piraeus |62|. Cette importante dilution de la participation publique dans les banques du pays témoigne d’une approche qui contraste avec celle adoptée en 2012 afin de protéger les actionnaires privés. Cette mesure diluant la participation publique était justifiée par la nécessité, énoncée dans le troisième mémorandum, de réduire l’utilisation de fonds de bail-out pour recapitaliser les banques, en attirant des fonds privés. En effet, étant donnée la nécessité de protéger les déposants non garantis (c’est-à-dire principalement les fonds de roulement des PME), l’utilisation de fonds de recapitalisation supplémentaires sans dilution de la participation publique aurait conduit le système bancaire du pays à passer entièrement sous le contrôle du FHSF. Afin d’empêcher cette situation inconcevable aux yeux de la BCE, la seule option possible était de vendre les parts du FHSF à des investisseurs privés pour une fraction de leur prix. En outre, même si ces parts étaient soumises à d’importantes restrictions quant au degré de contrôle et d’influence que pouvait exercer le gouvernement grec sur les banques concernées, leur dilution représente tout de même une perte matérielle dans le patrimoine du secteur public grec. Après tout, il était attendu que leur vente constitue une part centrale des 50 milliards d’euros du fonds de privatisation mis en place par le troisième mémorandum |63|.

En complément de l’injection de fonds publics dans les banques, le mémorandum inclut des mesures approfondies afin de s’attaquer au problème des NPLs. Cependant, celles-ci reposent principalement sur des procédures institutionnelles et juridiques destinées à accélérer le processus de liquidation des prêts et l’établissement d’un marché secondaire des NPLs |64|. Les mesures proposées à ces fins permettent à chaque banque de gérer son propre portefeuille de NPLs, ce qui est problématique pour au moins deux raisons. Premièrement, puisque les banques pourront accéder à de nouveaux financements, elles seront certainement moins incitées à entreprendre des réformes structurelles pourtant nécessaires. Dans le cas du Japon par exemple, où les banques ont pu supporter les NPLs à un bas coût, celles-ci ont été peu enclines à conduire une restructuration de leurs établissements |65|. En Grèce, où il existe de manière avérée une longue histoire de connivence, l’absence de ces réformes permettra aux relations de clientélisme de perdurer puisque les banques pourront choisir les prêts qu’elles garderont et ceux dont elles se débarrasseront. Deuxièmement, la création d’un organe centralisé de gestion des actifs (une « bad bank ») permettrait de réaliser des économies d’échelle en termes de gestion, de capacité opérationnelle et de financement à bas coût, ce qui améliorerait le taux de recouvrement des NPLs.

Considérant cela, il apparaît clairement que le sort réservé aux banques et la résolution des problèmes liés aux NPLs sont intimement liés à la reprise économique. Malheureusement, étant donné l’impact négatif du nouveau processus de consolidation budgétaire que le pays doit mettre en œuvre sur les trois prochaines années, la reprise économique risque d’être trop lente pour améliorer réellement la situation ou pour s’attaquer efficacement au chômage |66|. Ainsi, il est peu probable que les nouvelles mesures de recapitalisation suffisent à restaurer la stabilité du système bancaire grec, en l’absence de mesures supplémentaires permettant de lutter de manière coordonnée contre les NPLs et de modifications radicales dans la gestion des banques. Cela a récemment été reconnu par le FMI. Malgré l’optimisme des autorités européennes quant à l’issue du dernier processus de recapitalisation, l’institution basée à Washington estime que les banques grecques auront besoin d’au moins 10 milliards d’euros supplémentaires afin de satisfaire leurs besoins en capitaux |67|. Le FMI souligne également que, sans d’importants changements dans la gouvernance des banques grecques et sans des mesures permettant de consolider leurs bilans, les problèmes de ces dernières années perdureront |68|.

Cette estimation, réalisée par un membre de la Troïka moins d’un an après la mise en œuvre du deuxième processus de recapitalisation, résume les problèmes contenus dans la réponse apportée à la crise par les autorités. Après sept ans de crise, on ne sait toujours pas précisément combien de ressources supplémentaires seront nécessaires afin de stabiliser le système financier du pays. De plus, les responsables des nombreux excès qui ont eu lieu avant 2008 sont encore aux commandes des banques tandis que les coûts de la crise continuent à être supportés par les contribuables grecs. À cet égard, et étant donnée la situation complexe dans laquelle se trouvent aujourd’hui les banques grecques suite aux politiques mises en œuvre par la Troïka, la proposition d’un plan alternatif afin de restaurer la stabilité bancaire doit compléter le présent article. Il est clair qu’un tel plan est nécessaire, dans la mesure où les politiques à l’œuvre actuellement se sont révélées être une succession d’échecs cuisants dont on ne peut entrevoir la fin.

http://www.cadtm.org/Grece-la-restructuration-de-la Traduit de l’anglais par Nathan Legrand

Notes

|1| IMF. (2013). Greece : Ex Post Evaluation of Exceptional Access under the 2010 Stand-By Arrangement, IMF Country Report No. 13/156. Retrieved June 12, 2015, from http://goo.gl/7CLyBd

|2| Xafa, M. (2014). Sovereign Debt Crisis Management : Lessons from the 2012 Greek Debt Restructuring. Consulté le 20 mai 2016 à l’adresse https://www.cigionline.org/publicat…

|3| Les autres titres (28 milliards d’euros), soumis au droit anglais, n’ont pas pu recevoir ce traitement. Certains détenteurs de ces titres, possédant 6,4 milliards d’euros de dette, ont fait obstacle à la restructuration et ont reçu la totalité du paiement qu’ils réclamaient.

|4| Zettelmeyer, J., Trebesch, C., & Gulati, M. (2012). The Greek Debt Exchange : An Autopsy. Consulté à l’adresse http://av.r.ftdata.co.uk/files/2012…

|5| Ibid.

|6| Bank of Greece. (2012). Report on the recapitalisation and restructuring of the Greek banking sector. Consulté à l’adresse http://www.bankofgreece.gr/BogEkdos…

|7| Zettelmeyer, J., Trebesch, C., & Gulati, M. (2012). The Greek Debt Exchange : An Autopsy. Consulté à l’adresse http://av.r.ftdata.co.uk/files/2012…

|8| IMF. (2012). Greece : Request for Extended Arrangement Under the Extended Fund Facility, IMF Country Report No. 12/57. Consulté le 21 septembre 2015 à l’adresse http://www.imf.org/external/pubs/ft…

|9| Bank of Greece. (2012). Report on the recapitalisation and restructuring of the Greek banking sector. Consulté à l’adresse http://www.bankofgreece.gr/BogEkdos…

|10| En mai 2012, le FMI projetait une croissance du PIB réel de -4,8% pour 2012, 0% pour 2013, et 2,5% pour 2014, la croissance a été en réalité de -7%, -3,9% et 0,8%.
IMF. (2012). Greece : Request for Extended Arrangement Under the Extended Fund Facility, IMF Country Report No. 12/57. Consulté le 21 septembre 2015 à l’adresse http://www.imf.org/external/pubs/ft… ; IMF. (2014). GREECE FIFTH REVIEW UNDER THE EXTENDED ARRANGEMENT UNDER THE EXTENDED FUND FACILITY, IMF Country Report No. 14/151. IMF Country Report No. 14/151. Consulté le 16 octobre 2014 à l’adresse https://goo.gl/jhUCjr

|11| IMF. (2014). GREECE FIFTH REVIEW UNDER THE EXTENDED ARRANGEMENT UNDER THE EXTENDED FUND FACILITY, IMF Country Report No. 14/151. IMF Country Report No. 14/151. Consulté le 16 octobre 2014 à l’adresse https://goo.gl/jhUCjr

|12| Ibid.

|13| HFSF. (2016). Hellenic Financial Stability Fund – What we do. Consulté le 21 mai 2016 à l’adresse http://www.hfsf.gr/en/about_whatwedo.htm

|14| HFSF. (2012). HFSF Annual Report 2010-2011. Consulté le 21 mai 2016 à l’adresse http://www.hfsf.gr/files/hfsf_annua…

|15| En juin 2015, le FHSF détenait 57,2% des parts de NBG, 35,4% d’Eurobank, 66,2% d’Alpha et 66,9% de Piraeus, pour une valeur totale estimée à 7,5 milliards d’euros. Comme cela sera étudié plus loin dans le texte, ces participations ont été diluées suite au processus de recapitalisation bancaire de novembre 2015.
Données apportées par la Banque de Grèce au Comité pour la vérité sur la dette grecque.

|16| IMF. (2012). Greece : Request for Extended Arrangement Under the Extended Fund Facility, IMF Country Report No. 12/57. Consulté le 21 septembre 2015 à l’adresse http://www.imf.org/external/pubs/ft…

|17| Mayes, D. (2009). Banking crisis resolution policy – different country experiences. Central Bank of Norway. Consulté à l’adresse http://www.norges-bank.no/Upload/77…

|18| Reuters. (2012). Greek banking governance is a gamble. Consulté le 21 mai 2016 à l’adresse http://www.breakingviews.com/greek-…

|19| Reuters. (2015). Greek bank bailout fund CEO asked to resign -government official. Consulté le 1er février 2016 à l’adresse http://uk.reuters.com/article/uk-eu…

|20| ThePressProject. (2014). Head of Greek bank rescue fund to face charges over crony loans in Hellenic Postbank scandal – UPDATE. Consulté le 1er février 2016 à l’adresse http://www.thepressproject.net/arti…

|21| Ibid.

|22| ThePressProject. (2014). George Provopoulos : The most powerful man in Greece a few months ago, now a suspect in a bank probe. Consulté le 1er février 2016 à l’adresse http://www.thepressproject.gr/detai…

|23| Reuters. (2012). Special report : Greece claims magnate stole from his own bank. Consulté le 1er février 2016 à l’adresse http://www.reuters.com/article/us-g…

|24| Ibid.
Le mécanisme ELA se rapporte au financement apporté dans ce cas par la Banque de Grèce à une institution solvable, ou à un groupe d’institutions solvables, faisant temporairement face à des difficultés d’accès aux liquidités. Bank of Greece. (2014). The Chronicle of the Great Crisis, The Bank of Greece 2008 – 2013. Consulté à l’adresse http://www.bankofgreece.gr/BogEkdos… Chronicle Of The Great Crisis.pdf

|25| Ibid.

|26| Reuters. (2011). Greece activates rescue fund to save Proton Bank. Consulté le 1er février 2016 à l’adresse http://uk.reuters.com/article/uk-gr…

|27| Reuters. (2012). Special Report : Clandestine loans were used to fortify Greek bank. Consulté le 1er février 2016 à l’adresse http://www.reuters.com/article/us-g…

|28| Ibid.

|29| Ibid.

|30| ECB. (2014). Banking Structures Report 2014. Consulté le 29 janvier 2016 à l’adresse https://www.ecb.europa.eu/pub/pdf/o…

|31| Ibid.

|32| Ibid.

|33| Financial Times. (16 septembre 2013). Third time lucky ? The latest plan to rescue Greece. Consulté à l’adresse https://next.ft.com/content/d8bee48…

|34| Financial Times. (14 février 2014). Greece in banking sector stand-off with bailout lenders — FT.com. Consulté à l’adresse https://next.ft.com/content/90df6be…

|35| IMF. (2014). GREECE FIFTH REVIEW UNDER THE EXTENDED ARRANGEMENT UNDER THE EXTENDED FUND FACILITY, IMF Country Report No. 14/151. IMF Country Report No. 14/151. Consulté le 16 octobre 2014 à l’adresse https://goo.gl/jhUCjr

|36| ECB. (2014). Aggregate Report on the Comprehensive Assessment. Consulté à l’adresse https://www.ecb.europa.eu/pub/pdf/o…

|37| Ibid.

|38| Ibid.

|39| European Commission. (2015). European Economic Forecast Spring 2015. Consulté à l’adresse http://ec.europa.eu/economy_finance…

|40| Ekathimerini. (2015). Banks fear NPL sum will reach 100 bln euros. Consulté à l’adresse http://www.ekathimerini.com/197217/…

|41| Bank of Greece. (2015). Deposits Statistics. Consulté à l’adresse http://www.bankofgreece.gr/Pages/en…

|42| Bank of Greece. (2015). Financial Statements. Consulté à l’adresse http://www.bankofgreece.gr/Pages/en…

|43| Barclays Research. (2015). Greece : Capital controls imminent without breakthrough.

|44| Wyplosz, C. (2015). Grexit : The staggering cost of central bank dependence. Consulté à l’adresse http://www.voxeu.org/article/grexit…

|45| ECB. (2015). Macroprudential policy and financial stability. Consulté à l’adresse https://www.ecb.europa.eu/ecb/tasks… ; cité par Klein, M. (2015). Greece shows ECB’s stress tests were nonsense. Financial Times. Consulté à l’adresse http://ftalphaville.ft.com/2015/07/…

|46| Barclays Research. (2015). Greece’s Achilles heel.

|47| Sandbu, M. (2015). ECB, enemy of the euro ? Financial Times. Consulté à l’adresse http://www.ft.com/intl/cms/s/3/bbf2…

|48| Commission européenne, 2012, Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (version consolidée). Consulté à l’adresse http://eur-lex.europa.eu/legal-cont…

|49| Conseil de l’Union européenne, 2012, Déclaration du sommet de la zone euro du 29 juin 2012. Consulté à l’adresse http://www.consilium.europa.eu/uedo…

|50| Benoît Coeuré (entretien avec), « La sortie de la Grèce de l’euro « ne peut plus être exclue » », Les Échos, 29 juin 2015. Consulté à l’adresse http://www.lesechos.fr/monde/europe…

|51| Ibid.

|52| European Commission. (2015). Greece Memorandum of Understanding for a three-year ESM programme. Consulté à l’adresse http://ec.europa.eu/economy_finance…

|53| Merler, S. (2015). Preserving the Greek financial sector : options for recap and assistance. Bruegel. Consulté le 22 septembre 2015 à l’adresse http://bruegel.org/2015/07/preservi…

|54| Coppola, F. (2015). The coming Greek bank nationalization, bail-in and privatization | Credit Writedowns. Consulté à l’adresse https://www.creditwritedowns.com/20…

|55| ECB. (2015). AGGREGATE REPORT ON THE GREEK COMPREHENSIVE ASSESMENT. Consulté le 2 février 2016 à l’adresse https://www.bankingsupervision.euro…

|56| Alors qu’en 2014, la BCE attendait des banques qu’elles atteignent un ratio CET1 de 8% dans le meilleur des scénarios et de 5,5% dans le scénario le plus défavorable, ces chiffres sont montés respectivement à 9,5% et 8% pour l’évaluation menée en 2015[[Ibid.

|57| Ibid.

|58| Merler, S. (2015). Greek bank recap. Bruegel. Consulté le 2 février 2016 à l’adresse http://bruegel.org/2015/11/greek-ba…

|59| Zero Hedge. (2015). Greek Bad Debt Rises Above 50% For The First Time, ECB Admits. Consulté le 2 février 2016 à l’adresse http://www.zerohedge.com/news/2015-…

|60| Macropolis. (2015). Greek banks complete book building : A recap of where we stand. Consulté à l’adresse http://www.macropolis.gr/?i=portal….

|61| Ibid.

|62| Macropolis. (2016). Last round of Greek banks’ recapitalisation drastically shifts shareholder structures. Consulté à l’adresse http://www.macropolis.gr/?i=portal….

|63| WSJ. (2015). How Will The Greek Privatization Fund Work ? Consulté le 2 février 2016 à l’adresse http://blogs.wsj.com/briefly/2015/0…

|64| On peut trouver une explication plus détaillée des mesures prises concernant les NPLs dans une version précédente de ce texte. Munevar, D. (2016). An analysis of the recapitalization of Greek banks in the context of the third Memorandum of Understanding. Consulté le 12 juin 2016 à l’adresse http://cadtm.org/An-analysis-of-the

|65| Claessens, S. (2000). Experiences of resolution of banking crises. BIS. Consulté à l’adresse https://www.bis.org/publ/plcy07s.pdf

|66| Papadimitriou, D., Nikiforos, M., & Zezza, G. (2016). HOW LONG BEFORE GROWTH AND EMPLOYMENT ARE RESTORED IN GREECE ? Levy Economics Institute of Bard College Strategic Analysis. Consulté le 3 février 2016 à l’adresse http://www.levyinstitute.org/pubs/s…

|67| IMF. (2016). Greece : Preliminary Debt Sustainability Analysis—Updated Estimates and Further Considerations – IMF Country Report No. 16/130. Consulté à l’adresse https://www.imf.org/external/pubs/f…

|68| Ibid.

Daniel Munevar  est un économiste post-keynésien de 30 ans originaire de Bogotá, en Colombie. De mars à juillet 2015, il a travaillé comme assistant de l’ancien ministre des finances grec, Yanis Varoufakis ; il le conseillait en matière de politique budgétaire et de soutenabilité de la dette. Auparavant, il était conseiller au Ministère des Finances de Colombie et conseiller spécial pour les investissements directs à l’étranger auprès du Ministère des Affaires étrangères de l’Équateur. C’est une des figures marquantes dans l’étude de la dette publique en Amérique latine. Il est membre du CADTM AYNA.

 

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Suite de l’appel pour les dispensaires

Nous avions publié l’appel de Yannis Youlontas pour un convoi solidaire le 23 janvier.

Suite à cet appel les véhicules du 23 janvier étant pleins à craquer deux autres convois sont prévus en février et mars. Nous sommes en attente de précisions concernant un éventuel départ depuis Chambéry.

Si nous avons plus d’informations nous les publierons mais dans l’attente pour ceux qui le veulent vous pouvez toujours envoyer des fonds à : Anepos BP10 81540 Sorèze

Voici le message de Yannis du collectif Anepos :

Encore un grand merci à tou-te-s.

Presque tous vos colis ont pu être chargés :

– soit par le premier fourgon qui est parti avant-hier (Nathalie et Cyril) ;
– soit par les trois autres fourgons (plus une remorque) qui viennent de partir ce matin (Marc, Yves, Guy, JM, Eric et moi).

Les autres colis seront embarqués par deux autres fourgons dans quelques jours, avant un grand convoi solidaire fin mars (au moins douze fourgons), toujours à destination de la résistance et des réfugiés/migrants piégés en Grèce (accompagnés d’aides financières et d’actions diverses.

Nous venons de franchir la frontière italienne (à 58 ans, c’est la première fois que mon co-voitureur Eric voyage hors de France). Demain, nous commencerons une traversée de l’Adriatique durant 23 heures, avant d’arriver à Patras puis Athènes après-demain.

Voici quelques photos d’aujourd’hui à travers le sud de la France et le nord de l’Italie, ainsi que d’autres d’hier durant le classement final et le chargement des trois fourgons et de la remorque. Quelques photos également des lycéens de Mazamet qui ont été formidables sans faiblir devant les critiques de quelques fachos dans leur secteur : « quoi, c’est pour les Grecs et les réfugiés ? Vous croyez qu’il n’y a pas déjà assez de pauvres en France pour aller s’occuper des étrangers ? »

Ben oui, Madame, et c’est même plus que de la solidarité, c’est aussi de la politique. En soutenant la résistance en Grèce ainsi que les réfugiés et les migrants, on participe à la lutte, par-delà nos différences : minuscules maillons d’une chaîne de solidarité jusqu’au bout de l’Europe et au-delà.

Trois petits fourgons comme trois petites gouttes d’eau, mais parmi beaucoup d’autres formes actions, ici et là, pour ne pas baisser les bras.

Yannis po/ collectif Anepos

PS : des camarades de Narbonne vont également faire partir un fourgon le 4 février. D’autres initiatives se préparent… A suivre.

Migrants. Comment l’UE transgresse le droit

Par Isabelle Lendrevie Docteure en droit, avocate au barreau de la Seine-Saint-Denis et membre d’Avocats pour la défense des droits des étrangers (ADDE).

RETOUR DE LESBOS

Il est 6 h 30 du matin, je quitte le port de Mytilène pour l’aéroport. L’écrivain voyageur suisse, Nicolas Bouvier, avait raison : « on ne fait pas un voyage, c’est le voyage qui vous fait ou vous défait »1. J’ai fait un voyage humanitaire et juridique et je reviens désespérée par la façon dont l’Europe accueille ceux qui fuient la guerre et les persécutions. Toutefois, cette solidarité entre les civils européens m’a rendue plus européenne et méditerranéenne que jamais, et me donne du courage pour reprendre le combat juridique sur le terrain français.

Je suis partie dans le cadre de la mission juridique et humanitaire « European Lawyers in Lesvos », soutenue par le Conseil des barreaux européens (CCBE) et l’association des avocats allemands (Deutscher Anwaltverein,DAV) en coopération avec les barreaux grecs. L’objectif était d’assurer, en 2016-2017, la présence d’avocats européens sur l’île grecque de Lesbos, où se trouve le seul centre d’enregistrement véritablement opérationnel, pour apporter assistance et conseil juridiques aux migrants et jouer un rôle d’observateur.

DES CAMPS AUX MARGES DE L’EUROPE

Les conditions de vie et d’accueil sont très difficiles dans les hotspots (centre d’accueil), notamment dans le camp grec de Moria qui est situé en plein milieu des champs d’oliviers, à plus de 5 kilomètres de la première grande ville de l’île de Lesbos, Mytilène. La surpopulation et l’insalubrité des lieux rendent les choses très compliquées. Mais c’est l’attente interminable, le flou administratif et juridique total, le non-accès au droit et le désespoir qui expliquent surtout les tensions et les risques d’incendies ou de révoltes.

La gestion de la sélection des migrants est faite par les services d’asile grecs. Pour faire face à cette crise, Athènes a reçu de l’Union européenne des aides financières très importantes, et une assistance humaine et logistique avec la présence sur place de fonctionnaires européens spécialisés qui dépendent de l’European Asylum Support Office (EASO). La mission principale de ces hotspots est donc d’enregistrer les demandes d’asile sur la base de la Convention de Genève, d’orienter vers les autres États de l’UEceux qui ont des membres de leur famille déjà installés dans ces pays (Règlement de Dublin III) et surtout de « trier » et distinguer les demandeurs d’asile des migrants économiques afin de gérer les retours vers la Turquie de ceux qui ne peuvent pas prétendre au statut de réfugié au regard de la convention de Genève.

La première difficulté que rencontrent les migrants est le barrage de la langue et le non-accès à l’information et à l’assistance juridique. Beaucoup d’entre eux n’ont pas connaissance de l’accord conclu entre l’Europe et la Turquie et ne peuvent pas accéder à un interprète. Pour faire simplement enregistrer leur demande d’asile, certains attendent depuis des mois. Il existe en outre une discrimination en fonction des nationalités. Les demandes des Syriens sont enregistrées avant celles des Irakiens, par exemple, et il y a certains groupes totalement abandonnés, comme les réfugiés palestiniens qui ont fui la Syrie.

L’entretien devant un officier du service d’asile se fait généralement soit en anglais, soit en grec. Il n’y a que trois ou quatre interprètes en arabe et en farsi pour tous les réfugiés du camp. Dans le service d’asile du camp, les agents grecs sont généralement de très jeunes femmes inexpérimentées qui mènent les entretiens. Dans un cas, j’ai dû intervenir plusieurs fois pour faire respecter le principe de confidentialité (les fenêtres et les portes étaient ouvertes…). Les interruptions étaient nombreuses à cause de la ligne téléphonique, et l’interprète francophone qui se trouvait au bout du fil avait très souvent des problèmes de compréhension. Des personnes qui ont été persécutées ne peuvent pas parler facilement dans un tel contexte d’amateurisme.

Plus de 5 000 personnes de 45 nationalités différentes vivent dans ce camp de Moria alors que sa capacité est de 1 000. Les personnes vulnérables sont en très grand nombre, et livrées à elles-mêmes, en proie aux passeurs et trafiquants en tous genres (prostitution, criminels…). Les enfants avec leur famille et les mineurs isolés sont les principales victimes de ce système inhumain de fermeture des frontières et de camps de tri mis en place par l’Union européenne. D’après [un rapport du Conseil de l’Europe publié en juin 2016, les enfants représentent le tiers des migrants et demandeurs d’asile qui passent la frontière entre la Turquie et la Grèce : « On estime que, seulement en 2015, quelque 300 000 enfants ont traversé la mer Méditerranée pour fuir l’horreur de la guerre et chercher refuge, traumatisés par la violence et la mort ».

RETOUR SUR UN DROIT FONDAMENTAL

En matière de droit d’asile, les sources juridiques sont multiples. Dans la législation française, à côté de la source constitutionnelle peu usitée, la France a aussi intégré la source conventionnelle liée à la Convention de Genève de 1951. Ces règles sont transposées et codifiées en droit français. On les retrouve dans le livre VII du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (Ceseda). La Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (CDFUE) — qui n’est pas encore assez appliquée par la jurisprudence française et européenne — fait également référence au droit d’asile (article 18) et à la protection « par ricochet » en cas d’expulsion et d’extradition (article 19)2.

Les États qui ont rejoint l’UE se sont engagés vers plus d’intégration économique, politique et juridique et par voie de conséquence, ils ont accepté l’harmonisation juridique, que ce soit dans le domaine du droit commercial, du droit de la famille ou du droit d’asile. Ainsi, de nouvelles directives ou règlements européens en matière d’asile ont été promulgués3. Ces textes juridiques européens obligent les États membres à adapter leur législation et à la modifier quand celle-ci n’est pas conforme à ces standards juridiques européens. La France a par exemple voté la loi pour la réforme du droit d’asile le 29 juillet 2015.

Après les printemps arabes, les conflits syrien et irakien, l’afflux des réfugiés et les attentats de 2015, on assiste en Europe à un retour du nationalisme, de la xénophobie et de la fermeture des frontières intérieures et extérieures de l’Europe. L’Union européenne exerce une pression sans précédent sur les pays du sud (Proche-Orient, Maghreb, Afrique, Afghanistan…). Ainsi, le Conseil européen a demandé en 2015 qu’un sommet international ait lieu pour renforcer la coopération politique sur les questions migratoires avec les principaux pays africains d’origine et de transit. Il a eu lieu à La Valette les 11 et 12 novembre 2015. Les dirigeants européens et africains se sont mis d’accord sur un plan d’action ? et des initiatives prioritaires et transitoires sont lancées depuis 2016.

L’autre mesure phare de l’UE est la relocalisation de ces migrants sur l’ensemble du reste du territoire européen. En septembre 2015, le Conseil européen souhaitait relocaliser plus de 40 000 réfugiés vers l’Europe depuis la Grèce et l’Italie. Le but est de supprimer tout ce qui peut inciter les migrants et les demandeurs d’asile à entrer par les îles grecques et italiennes pour rejoindre la route des Balkans et gagner l’Union européenne.

Nous sommes donc au tout début d’un nouveau processus juridique et politique concernant l’application du droit d’asile européen dans les centres d’accueil de Grèce et d’Italie, devenus des camps de tri des migrants, des centres d’enregistrement des demandes d’asile et de véritables prisons à ciel ouvert.

LUTTE DES AVOCATS EUROPÉENS

Les avocats grecs et européens, spécialisés en droit des étrangers et en droit d’asile, ont dénoncé l’accord signé entre l’UE et la Turquie qui fait de ce pays un « pays tiers sûr » vers lequel il est possible de renvoyer les migrants ayant été déboutés du droit d’asile. Ils dénoncent aussi le fait que ces hotspots grecs et italiens deviennent des camps fermés de tri des migrants, inadaptés pour accueillir des populations majoritairement composées d’enfants, de mineurs isolés, de femmes enceintes, de personnes âgées ou malades. Enfin, ils tentent de mener une action juridique sur le plan européen et de dépasser les nationalismes juridiques. Le CCBE a organisé conjointement avec le DAV le projet « European Lawyers in Lesvos », qui a pour but d’envoyer des avocats européens volontaires à Lesbos afin d’apporter une assistance juridique personnalisée aux réfugiés4. Certains d’entre eux ont fait le constat que l’application du droit d’asile européen est impossible dans cette situation et qu’il est de leur devoir de le dénoncer haut et fort.

Une nouvelle justice semble émerger en Europe, et notamment en Grèce. Ainsi, des décisions concernant les migrants et l’application du droit d’asile européen sont rendues au nom de l’État grec, les juges qui composent par exemple les comités d’appel pouvant toutefois être de nationalités différentes.

La principale difficulté à Lesbos est d’assurer une application du droit d’asile européen dans un contexte politique européen tendu, et tout en tenant compte des spécificités nationales de la Grèce, des conséquences de la crise économique et de son système juridique et judiciaire encore défaillant en matière d’asile. Il semble que les juristes et les avocats européens vont être de plus en plus intégrés au système juridique d’asile grec et cela ne semble pas très facile à mettre en place. On peut également comprendre la méfiance des avocats grecs du barreau de Lesbos face à l’arrivée de confrères étrangers (européens) ou issus d’autres barreaux grecs. Nous sommes donc dans une phase de contacts et d’échanges entre barreaux grecs et européens qui rend encore plus complexe l’application du droit d’asile européen dans un camp de réfugiés comme celui de Moria.

L’autre inconnue est l’indépendance des avocats et des juges grecs dans un contexte de fortes tensions politiques internes et européennes. Dès le printemps 2016, l’UE a fait pression sur le gouvernement grec pour changer la composition des comités d’appel en matière d’asile qui fonctionnent depuis janvier 2016 et qui, selon elle, ne renverraient aucun réfugié vers la Turquie, considérant que ce n’est pas un « pays tiers sûr ». Après un amendement en date du 16 juin 2016, des membres de ces comités d’appel d’asile ont dénoncé cette réforme. Ainsi, le chemin est encore long pour qu’un véritable système de défense des migrants et des demandeurs d’asile soit effectif.

Face à ce véritable drame humanitaire, construire des camps de tri de migrants dans l’Union européenne n’est pas une solution viable. Ces « camps d’accueil » ont été transformés en centres de rétention où s’entassent des milliers de personnes parquées dans des conditions inhumaines. Les tensions se multiplient entre les migrants et les représentants du service d’asile grec ou européen. En plus d’une volonté politique pour sortir de cette crise, une véritable mobilisation des juristes européens est nécessaire. La coopération juridique entre les autorités grecques et ses voisins européens ne peut se réduire au déploiement de l’armée, au contrôle des frontières ou à une simple logistique juridique. La solidarité et la défense des droits humains doivent revenir au cœur de la construction européenne. Des projets comme « European Lawyers in Lesvos » sont des réponses encore imparfaites certes, mais qui tentent de lutter contre ce nationalisme européen malsain qui pourrait bien désintégrer l’Europe.

1L’usage du monde, Payot & Rivage, 2001.

3Directive «  qualification  » de 2011, directive «  accueil  » de 2013 et directive «  procé-dure  » de 2013, Règlement Dublin III du 26 juin 2013 qui vient remplacer le Règlement Dublin II du 18 février 2003 et la Convention de Dublin de 1990.

Grèce : Après deux memoranda et au milieu du troisième

par Marie-Laure Coulmin Koutsaftis Cadtm

CC – Flickr – Joanna

Nous n’entrerons pas dans le détail des mesures qui vont accabler le peuple grec dans les années à venir, et même rétroactivement puisque les réductions sur les retraites et l’augmentation des cotisations de santé pour les retraites ont été appliquées à partir du 1er juin 2015, par des retenues supplémentaires sur les retraites correspondant à l’augmentation des cotisations sociales. Un rapide examen des mesures énumérées dans le troisième mémorandum et déjà adoptées permet de rendre compte de l’ampleur du désastre.

Ce n’est pas un mémorandum n°3, c’est un nouveau traité de Versailles. – Yanis Varoufakis.

Il faut d’abord souligner le fait que le droit anglais qui avait été imposé lors de la signature du deuxième mémorandum a été remplacé par un droit « communautaire » et que c’est le droit du Mécanisme européen de stabilité (MES) qui entre en vigueur. Ceci ne manque pas d’être inquiétant, en effet, il n’y a pas d’exemple jusqu’à maintenant de l’application sur des populations de ce droit communautaire, qui ne trouve pas son origine dans le droit coutumier (ensemble de pratiques communément admises comme « justes » par l’usage au fil des siècles ou la « sagesse des nations ») contrairement aux droits nationaux et international.

La dette publique grecque de 370 milliards, déjà insoutenable en juillet 2015 s’est vue abondée d’encore 86 milliards « d’aide », avec pour objectif tout à fait irréaliste de dégager un excédent primaire |1| de 3,5% en 2018, accompagné d’un retour à la croissance, avec une récession supposée reculer puis se transformer en croissance (croissance exigée de 3,1% en 2018.) Ainsi, ce pays à l’économie exténuée, dont le PIB a reculé de 30%, doit réaliser grâce à de nouvelles dettes à la fois un excédent primaire et un retour à la croissance.

La Grèce doit réaliser grâce à de nouvelles dettes à la fois un excédent primaire et un retour à la croissance.

Pour ce faire, on impose de nouvelles réductions dans les dépenses publiques, déjà complètement en recul, ce qui a provoqué en partie la récession.

Avec la signature en août 2015 du troisième mémorandum, la Grèce a perdu le peu de souveraineté qui lui restait après le passage des deux premiers. Toute proposition de loi doit être visée au préalable et approuvée par les créanciers avant d’être soumise au vote du parlement. Les quelques lois adoptées par le premier gouvernement Syriza-ANEL lors du premier semestre 2015 doivent être annulées « parce qu’elles ne sont pas dans l’esprit des précédents programmes ». Les modifications du corps législatif touchent la structure même de l’État grec.

De manière caractéristique, à partir du 13 juillet 2015, et pour obéir aux termes du mémorandum, le gouvernement grec a dû adopter en procédure accélérée toute une série de lois réclamées en vain depuis longtemps par les créanciers, et que les précédents gouvernements – de droite ou d’union nationale – avaient refusé de faire adopter, puisqu’elles étaient contraires au code pénal grec. Qu’à cela ne tienne : parmi les prérequis pour les 86 milliards d’euros que conditionne ce 3e mémorandum, la première attaque aux droits de l’Homme a déjà eu lieu sous forme du passage en force en août 2015 (par procédure d’urgence à l’Assemblée, malgré les vives protestations de la Présidente de l’époque, Zoé Konstantopoulou) d’une « révision du Code Pénal ». Entraînant une grève de protestation du barreau grec de septembre 2015 à septembre 2016, elle avait déjà été refusée l’année d’avant par 93% des avocats. En effet, le nouveau Code Pénal facilite les procédures de liquidation par les établissements de crédit privés pour se rembourser ; en cas de faillite d’une entreprise, il donne désormais aux banques la priorité avant l’État (caisses d’assurance) et avant les travailleurs. Cette même disposition facilite l’accélération des mises aux enchères d’habitations principales hypothéquées pour des emprunts en rouge ou encore, pour dettes excessives auprès de l’État grec.

Or, depuis le 1er janvier 2017, le service des impôts est devenu une « agence des recettes autonome » répondant directement aux créanciers étrangers, dont les décisions ont valeur de décret ministériel et dont le personnel devra être agréé par les créanciers, donc directement lié aux « institutions ». Cette agence récupère la majorité des compétences du ministère du budget et de l’économie : politique fiscale, gestion des ressources, moyens fiscaux et instruments d’investigation, émission et application des mesures fiscales, douanières et budgétaires, mais aussi « l’élaboration et la mise en place des mesures de protection de la santé publique, de l’environnement, des intérêts des consommateurs, son soutien au bon fonctionnement du marché, à la compétitivité de l’industrie chimique (sic) et le soutien aux services juridiques, policiers et autres autorités, … l’élaboration et la gestion du budget de l’État… |2| ». En fait, tous les domaines normalement gérés par un État souverain selon les conventions internationales en vigueur à la fin du XXe siècle. Cette agence disposera aussi, selon le nouveau Code Pénal, des compétences pour mettre en vente les habitations principales des débiteurs en suspension de paiement. Outre les biens publics, ce sont désormais les biens privés grecs qui sont dans le collimateur des créanciers.

Le service des impôts est devenu une « agence des recettes autonome » répondant directement aux créanciers étrangers

L’augmentation de la TVA d’un point, la portant à 24% en juin 2016, est restée relativement inaperçue dans la presse internationale.

Les « réformes structurelles » réclamées par le troisième mémorandum relèvent de l’acharnement de vautours sur l’économie du pays, déjà moribonde, alors même que, de l’avis de l’OCDE et du FMI, la Grèce a déjà appliqué de très importantes réformes structurelles, « réformes du marché du travail », « réformes de la protection sociale » (lire : destruction), plus que n’importe où dans le monde occidental, avec pour résultat une baisse de 30% de son PIB en 6 ans.

Les nouvelles « réformes du marché du travail » prévoient une destruction accrue de la législation du travail, une attaque ciblée sur les syndicats par la réduction des fonctions et des droits des syndicalistes, la réduction du droit de grève, la suppression des conventions collectives, la facilitation des licenciements collectifs. Autre mesure adoptée en procédure d’urgence (par une loi de 7500 pages votée en une nuit par la majorité parlementaire Syriza-ANEL) : l’imposition de nouvelles baisses des retraites et des salaires (la sixième depuis 2010). La baisse des retraites les plus faibles, désormais réduite de 380 € à 310 €, la modification du système des retraites qui est passé d’un système par répartition à un système par capitalisation, ont été adoptées en mai 2016. D’après le rapport |3| de l’expert des Nations unies, J. P. Bohoslavsky cité par Éric Toussaint |4|, « Un point nodal de ce troisième mémorandum est la réduction des dépenses de sécurité sociale pour un montant équivalent à 1,5 % du PIB par an. »

D’après Romaric Godin, « pour rembourser la BCE en juillet 2016, la Grèce a dû accepter un nouveau plan d’austérité de 5,5 milliards d’euros avec des augmentations d’impôts, de cotisations et de TVA, une douloureuse réforme des retraites et une abdication de sa souveraineté budgétaire par l’acceptation de mesures « automatiques » de baisse des dépenses pour atteindre ces objectifs. Cette nouvelle ponction va encore peser lourd sur une économie dont le PIB trimestriel en volume a reculé de 1,5 % sur un an entre janvier et mars 2016 après trois trimestres consécutifs de baisse. Son niveau, toujours en volume, n’a jamais été si bas depuis le quatrième trimestre 2002, voici donc plus de treize ans. En regard du pic du troisième trimestre 2008, le PIB trimestriel affiche un recul de 30 %. |5| »

Enfin, malgré le célèbre « combat de lion » d’Alexis Tsipras lors de la nuit du 13 juillet 2015, les créanciers ont obtenu la création, adoptée en avril 2016, d’un nouveau « super » fonds de privatisations pour « accélérer les cessions d’actifs publics et doper leur exploitation ». Remplaçant le TAIPED, ce fonds de droit privé, dénommé Société de Participations Publiques a été créé pour 99 ans, est contrôlé par les créanciers étrangers et chargé de privatiser tous les actifs et biens publics de l’État grec. Comme le TAIPED, ce fonds est formé sur le modèle de la Treuhand, l’agence créée par Schäuble pour brader tous les actifs et propriétés de l’ancienne RDA, qui dépendaient entièrement du secteur public. Une première liste fait état de plus de 11 000 actifs de l’État grec passés sous contrôle de ce nouveau fonds. Le but est de les mettre aux enchères pour récupérer jusqu’à 50 milliards d’euros, dont 50% pour la recapitalisation des banques grecques, 25% pour « réduire le ratio dette/PIB » (?) et 25% pour des « réinvestissements » (non précisés) dans le développement du pays.

Le « sécateur » (koftis), permet d’imposer de nouvelles mesures d’austérité sans passer par une décision ministérielle ou par le parlement grec

Ces privatisations auront pour résultat direct de profondes modifications des paysages et du territoire grec lui-même, puisque ce sont des montagnes et des réserves naturelles entières qui sont appelées à disparaître, (gisements de marbre, extraction des minerais ou énergie solaire), au mépris de toute étude d’impact écologique, tandis que les quelques plaines agricoles, comme la plaine de Lassithie en Crète, sont menacées de désertification par de grands projets d’exploitation d’énergie solaire, qui menacent de surcroît les réserves naturelles en eau de la grande île (réserves elles-mêmes mises à l’encan).

Par exemple, la compagnie nationale de chemin de fer TRAINOSE a été vendue en juin 2016 pour 45 millions d’euros, quand bien même les nouveaux propriétaires (la compagnie nationale italienne) devraient pouvoir revendiquer plus de 200 millions d’euros de subventions de fonctionnement dans les trois ans à venir.

Malgré les dénégations du gouvernement Tsipras, les services municipaux de l’eau d’Athènes et de Thessalonique, qui desservent à eux deux plus de 80% de la population grecque, doivent être mis en vente par le Super Fonds de privatisation, après que 40 millions de bénéfices aient été distribués aux actionnaires, dont 4 millions d’euros à J. Paulson, au lieu de servir une politique sociale pourtant cruciale. À ce titre, la présence de conseillers français issus de l’ambassade de France en Grèce au conseil d’administration du Super Fonds de privatisation devrait favoriser le bon placement des sociétés françaises lors des mises aux enchères (avec ce fameux « savoir-faire en matière de partenariat public-privé » tant vanté par François Hollande lors de sa visite de VRP à Athènes en octobre 2015.)

Enfin, le « sécateur » (koftis), voté en mai 2016, permet désormais d’imposer de nouvelles mesures d’austérité sans passer par une décision ministérielle ou un vote préalable du parlement grec, en cas de non-respect de l’objectif d’un excédent primaire (hors service de la dette) de 3,5% en 2018 : « La pleine mise en œuvre des dispositions pertinentes du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance au sein de l’Union économique et monétaire, notamment en rendant opérationnel le conseil budgétaire avant la finalisation du protocole d’accord et en introduisant des réductions quasi automatiques des dépenses en cas de dérapages par rapport à des objectifs ambitieux d’excédents primaires, après avoir sollicité l’avis du conseil budgétaire et sous réserve de l’accord préalable des institutions. |6| »
« Pour éviter d’avoir recours à ce mécanisme-sécateur, le gouvernement grec devra de toutes façons poursuivre la baisse de ses dépenses. Toute richesse grecque sera donc ponctionnée tant qu’il faudra rembourser la dette. |7| »

Toute richesse grecque sera donc ponctionnée tant qu’il faudra rembourser la dette

Tassos Yiannitsis, ancien conseiller du Premier ministre PASOK Costas Simitis et ministre du Travail du gouvernement nommé de Papademos |8|, qu’à ce titre on ne saurait accuser d’être anti-mémorandaire, avait déjà conclu l’étude menée avec Stavros Zografakis en mars 2015 par les mots suivants :
« Les analyses de cette étude combinent les données sur le chômage et les revenus et recourent à un “indice de désespoir” qui reflète la pression ressentie par les foyers touchés par les chutes de salaire et le chômage. Les conclusions suggèrent que la paupérisation a frappé de larges pans de la société grecque, que les politiques d’austérité ont eu des effets très divers en fonction des groupes sociaux et que, de ce fait, les valeurs moyennes dissimulent des nuances dans les inégalités en fonction des sous-groupes particuliers, le fait que pendant la crise il y a eu des gagnants et des perdants dans toutes les catégories de revenus et que finalement, de nombreuses variables macro-économiques ou indicateurs sociaux ont été le résultat d’une approche inefficace dans la gestion de la crise et d’un manque de souplesse idéologique associé à des intérêts politiques bien établis, rendant difficile et douloureuse toute sortie de crise. Les conclusions de ce rapport devraient être réexaminées à la lumière de la sévère dépression économique causée par la politique imposée par la troïka. |9| »

Surtout, comme le souligne Romaric Godin dans un article indigné de La Tribune du 15 juillet 2015, « On l’a souvent oublié sous la montagne de propos moralisateurs qui se sont déversés sur ce débat, mais le problème de la dette grecque n’est pas son stock nominal, qui a reculé par rapport à 2011, notamment après la restructuration de la dette privée en 2012 (le « PSI »), c’est son rapport à la richesse nationale grecque qui s’est effondré plus rapidement. Les créanciers estiment que cette baisse s’explique par un « manque de réformes. » C’est une position intenable au regard de la trajectoire des finances publiques grecques qui se sont redressées très rapidement, le pays dégageant même un excédent primaire structurel record. La réalité, c’est que ce sont ces « réformes » (en réalité des coupes aveugles) qui ont réduit le PIB et rendu la dette insoutenable. Une preuve suffira : toutes les projections d’impact de la consolidation budgétaire sur la croissance depuis 2010 ont été des erreurs grossières. Bref, c’est la logique à l’œuvre en zone euro qui a échoué. Raison de plus, pour les dirigeants européens, de la poursuivre en l’intensifiant. |10| »

Pour un paysage plus détaillé de « La Grèce des memoranda », cf. Les Grecs contre l’austérité. Il était une fois la crise de la dette.
Éd. Le Temps des Cerises, Novembre 2015, Paris.

http://www.cadtm.org/Grece-Apres-deux-memoranda-et-au

Notes

|1| Excédent primaire : excédent des recettes totales de l’État grec sur ses dépenses, hors service de la dette.

|2| Loi N.4389 (ΦΕΚ Α’ 94/27-05-2016) « Επείγουσες διατάξεις για την εφαρμογή της συμφωνίας δημοσιονομικών στόχων και διαρθρωτικών μεταρρυθμίσεων και άλλες διατάξεις. »

|3| A/HRC/31/60/Add.2 (« Rapport de l’Expert indépendant chargé d’examiner les effets de la dette extérieure et des obligations financières internationales connexes des États sur le plein exercice de tous les droits de l’homme, en particulier des droits économiques, sociaux et culturels » / on the effects of foreign debt and other related international financial obligations of States on the full enjoyment of human rights, particularly economic, social and cultural rights -Mission to Greece, 29/02/2016.)

|4| in http://cadtm.org/L-expert-des-Nations-Unies-sur-la

|5| http://www.latribune.fr/economie/un…

|6| Extrait du IIIe Memorandum of Understanding (MoU) paru dans L’Humanité du 16/07/2015, »Yanis Varoufakis met en lumière les appétits des liquidateurs de la Grèce« .

|7| Romaric Godin in http://www.latribune.fr/economie/un…

|8| Lucas Papademos est un ancien président de la Banque nationale de Grèce et ancien vice-président de la BCE. En novembre 2011, pour évincer Papandréou, il est nommé premier ministre de la Grèce par la Troïka et chargé de former un gouvernement « d’union ».

|9| Tassos Yiannitsis, Stavros Zografakis : « Note de présentation », in Greece : solidarity and adjustment in times of crisis, Institut für Makroökonomie und Konjunkturforschung Macroeconomic Policy Institute.

|10| http://www.latribune.fr/economie/un…

Encore une baisse pour les retraités aux faibles revenus

Le gouvernement grec bafoue les retraités aux faibles revenus en leur donnant les «miettes»

Article de Dimitris Stratoulis publié sur Kontra News. (Traduction Vanessa de Pizzol)

Le gouvernement, en amputant l’ ΕΚΑΣ[1], a pris aux retraités aux faibles revenus plus que ce qu’il leur avait donné avec l’aide exceptionnelle

Le gouvernement, après avoir, dans un premier temps, bafoué les retraités aux faibles revenus  en leur donnant les « miettes » de tout ce qu’il avait par ailleurs réussi à leur arracher, des « miettes » en comparaison de tout ce que les nouvelles mesures vont leur supprimer, leur a souhaité une bonne année… avec la principale annonce de janvier : la dégringolade de l’EKAS qui rétrograde le versement mensuel fixé entre 57,20 et 230 euros à une fourchette comprise entre 28,75 et 115 euros.

Le gouvernement Tsakalotos, par l’intermédiaire de ce courrier destiné aux créanciers et dégradant pour le peuple et le pays, s’est engagé à ne verser qu’une seule fois ce dividende social en affirmant « qu’on ne l’y reprendrait plus ». Il a ainsi avoué qu’il s’agit d’une aide exceptionnelle et non d’un treizième mois, comme c’était la règle jusqu’alors. Il s’est en outre engagé auprès des créanciers en annonçant que si un écart important se faisait jour par rapport aux objectifs budgétaires, il serait alors compensé en pratiquant une coupe dès 2017 des principales pensions versées.

Dans le même temps, le gouvernement a réduit de façon drastique (soit environ 50%) l’EKAS pour une part importante des retraités aux faibles revenus (240 000). C’est-à-dire qu’il leur a donné 300 euros en une fois pour les priver en moyenne de 1 140 euros sur l’année 2017, davantage en 2018, tandis qu’avec sa suppression définitive en 2019 ils perdront irrémédiablement et en une seule fois 2 380 euros sur l’année.

Le gouvernement continue donc son processus de radiation progressive de l’EKAS jusqu’à la date du 31/12/2019 où plus personne n’y aura droit parmi les 376 000 retraités aux faibles revenus qui en bénéficient encore jusqu’au 30/06/2016. De cette manière, il applique l’engagement qu’il a pris avec le 3e mémorandum concernant les économies à réaliser pour le compte des créanciers grâce à l’abolition définitive de l’EKAS qui débutera le 1/07/2016 et prendra fin en 2019 rapportant ainsi 2,24 milliards d’euros.

La suppression progressive de l’EKAS a débuté en juillet dernier [2016], lorsqu’elle a été accordée à 231 279 retraités aux faibles revenus, répondant aux nouveaux critères de revenus qui se sont encore durcis, tandis que le mois précédent, 376 230 retraités avaient pu encore la toucher. Ce qui signifie que pour 144 951 retraités, l’EKAS a disparu à jamais depuis le 1/03/2016. La perte se monte de 30 à 230 euros par mois. Sur les 231 279 personnes qui ont continué à la percevoir, environ 20 000 ont reçu une somme inférieure : au lieu des 230 euros versés jusqu’en mai 2016, ils n’ont cette fois reçu que 175, 115 ou 57,5 euros.

Cette coupe sombre a permis d’économiser pour le compte des créanciers plus de 330 millions d’euros en 2016, soit bien plus que l’engagement mémorandaire du gouvernement fixé à 220 millions d’euros.

La nouvelle coupe de l’EKAS concerne environ 240 000 retraités aux faibles revenus qui ont échappé à la radiation de juillet 2016.

La confrontation politique entre le ministère du Travail et le tandem Vroutsis-Mitarakis de Nouvelle Démocratie pour l’attribution de la responsabilité de la coupe de l’EKAS, représente un défi pour les retraités aux faibles revenus qui savent que ceux qui pratiquent des coupes et qui suppriment cette aide, de concert et distinctement, ne sont autres que les gouvernements SYRIZA-ANEL et ND-PASOK.

Le gouvernement Samaras-Vénizélos a signé avec les créanciers la radiation de l’EKAS conjointement à la mise à jour du 2e mémorandum à l’été 2013 et a confirmé son engagement avec le mail de Hardouvelis en décembre 2014. Le gouvernement SYRIZA-ANEL a réaffirmé l’engagement du précédent gouvernement en signant le 3e mémorandum qu’ils avaient voté ensemble (SYRIZA-ND-ANEL-PASOK-POTAMI) le 14 août 2015. Sur la base de cet engagement mémorandaire des 5 partis, l’EKAS a commencé à connaître des coupes depuis juillet 2016 dans le processus de sa radiation progressive qui deviendra définitive le 31/12/2019.

La diminution et la radiation de l’EKAS sont une mesure inhumaine, elle conduit au Kaiadas social des centaines de milliers de retraités en état de pauvreté. Elle augmente le désespoir dans les familles comportant des chômeurs et se maintenant grâce à la retraite des parents et des grands-parents. Les retraités de notre pays, avec leurs manifestations massives et combattives, en particulier lors du 15 décembre, ont informé le gouvernement, tout l’establishment politique mémorandaire ainsi que les créanciers qu’ils ne s’accommodent et qu’ils ne sont pas dupes des politiques caritatives, mais qu’ils luttent pour la défense et l’amélioration des retraites, de l’EKAS, des salaires et des politiques sociales. Ils ont également fait savoir que leur lutte se poursuivra avec le peuple tout entier pour renverser les trois mémorandums de l’austérité, funestes aux retraites, et pour contrer le 4e mémorandum en préparation par les créanciers et le gouvernement.

[1] « prime de solidarité pour les petites retraites inférieures à 700 euros par mois », http://www.lefigaro.fr/conjoncture/2015/06/26/20002-20150626ARTFIG00179-grece-le-systeme-de-retraite-enjeu-des-negociations.php

Publié sur Unité populaire https://unitepopulaire-fr.org/2017/01/17/le-gouvernement-grec-bafoue-les-retraites-aux-faibles-revenus-en-leur-donnant-les-miettes/

 

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