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Eurogroupe : Jeroen Dijsselbloem dérape et refuse de s’excuser

Par Romaric Godin  La tribune

Le président de l’Eurogroupe qui cherche à s’accrocher à son siège a déclaré que les pays du sud ont « dépensé leur argent pour de l’alcool et des femmes » puis ont demandé de l’aide. Des propos qui reflètent toutes les erreurs de la crise de la zone euro.

Jeroen Dijsselbloem a apparemment bien du mal à se remettre de la lourde défaite de son parti travailliste qui a perdu 27 sièges sur 36 lors des élections néerlandaises du 15 mars. Dans un entretien avec le quotidien allemand Frankfurter Allgemeine Zeitung (FAZ), celui qui est encore ministre des Finances des Pays-Bas et président de l’Eurogroupe – et qui entend rester à ce dernier poste selon ses dires – a défendu sa position de fermeté face aux pays du sud.

Pas d’excuses

« Durant la crise de l’euro, les pays du nord ont montré de la solidarité avec les pays touchés par la crise. En tant que social-démocrate, je donne beaucoup d’importance à la solidarité. Mais vous avez aussi des obligations. Vous ne pouvez pas dépenser tout l’argent dans l’alcool et les femmes et ensuite demander de l’aide », avait ainsi déclaré Jeroen Dijsselbloem. Des propos d’une grande violence pour lesquels le Néerlandais a refusé catégoriquement de s’excuser devant le parlement européen ce mardi 21 mars.

Interpelé par le député européen des Verts catalans Ernest Urtasun, Jeroen Dijsselbloem a pris un ton docte : « l’idée qu’il s’agit d’une attaque lorsque je suis sérieux sur les règles et que je les prends au sérieux est une erreur », a-t-il indiqué. Avant d’ajouter : « ce que vous devez comprendre c’est que si vous voulez maintenir le soutien politique et public dans toute l’Union européenne pour la solidarité, vous devez toujours parler des engagements et des efforts qui doivent être faits par chacun pour maintenir cette solidarité ». Bref, la métaphore de Jeroen Dijsselbloem ne visait donc qu’à faire accepter aux peuples du nord de l’Europe le « soutien » (sous forme de prêts associés à de l’austérité) à leurs « partenaires » du sud.

Prendre acte pour rester en place ?

L’explication n’a guère convaincu Ernest Urtasun qui a jugé qu’il ne l’a pas jugé « drôle » et s’est interrogé s’il s’agissait du « premier acte de la candidature du Néerlandais à la poursuite de son poste ». Et de fait, Jeroen Dijsselbloem, dans la même interview, a affirmé que son départ plus que probable du ministère des Finances du royaume ne lui interdit pas de poursuivre son mandat jusqu’en janvier 2018. En prenant un ton rude, à la limite de l’insulte, il confirme au véritable maître de l’Eurogroupe, Wolfgang Schäuble, le ministre fédéral allemand des Finances, sa détermination à se montrer ferme envers la Grèce.

Excès de zèle

Sur la Grèce, l’Eurogroupe ne cesse de se montrer ferme et d’ajouter de nouvelles exigences à Athènes pour faire entrer le FMI dans un troisième mémorandum qui est plus que jamais un échec.  Cette exigence de faire entrer le FMI dans le programme, ce qui suppose un durcissement de ce programme, est une demande germano-néerlandaise, donc une demande de Jeroen Dijsselbloem et de Wolfgang Schäuble. Dernière trouvaille en ce sens de l’Eurogroupe : les ministres des Finances pourraient demander un feu vert de l’opposition grecque pour s’assurer que les engagements du gouvernement grec soient maintenus en cas d’élections. Une nouveauté qui réduit encore la capacité d’action des autorités helléniques. Dans cette fermeté renouvelée et sans fin, Jeroen Dijsselbloem semble vouloir faire preuve d’un certain excès de zèle afin de conserver un poste que la logique, la décence et la démocratie voudraient qu’il rende.

Xénophobie

Au-delà de cet élément de contexte (qui explique aussi en partie l’indignation espagnole puisque le ministre des Finances espagnol Luis de Guindos est candidat non déclaré à la présidence de l’Eurogroupe), cette déclaration de Jeroen Dijsselbloem est un révélateur des erreurs et des aveuglements de ceux qui dirigent l’Eurogroupe. La narration que ces dirigeants soutiennent et qu’ils présentent à leurs peuples est celle de peuples du sud indolents et dépensiers. Et ce serait pour cette raison que la crise de l’euro a éclaté et que les peuples du nord ont dû mettre la main à la poche pour les aider. Ce faisant, contrairement à ce qu’il affirme, Jeroen Dijsselbloem ne défend pas la solidarité, il défend une vision ethnique de l’Europe avec des peuples de fourmis travaillant pour des cigales. Il attise la xénophobie, entretient l’incompréhension mutuelle et flatte les égoïsmes nationaux. Il tue ce qui fait l’idée européenne.

Controuver les faits

Surtout, il controuve les faits. Les Grecs sont ceux qui travaillent le plus en Europe, les Allemands et les Néerlandais étant plutôt en queue de peloton. Enfin, la crise de l’euro doit autant à la hausse des dépenses publiques grecques qu’à l’entrée de la Grèce dans l’euro, à la dérégulation financière et aux maintiens d’excédents courants immenses de l’Allemagne et des Pays-Bas. Dans une union monétaire, il n’y a pas de « bons » et de « mauvais » élèves, il y a des actes individuels de certains Etats qui ont des conséquences pour tous. La modération salariale unilatérale de l’Allemagne a été sans doute la principale force, avec la crise de 2007, du déclenchement de la crise de la zone euro. La Grèce a ainsi toujours eu un niveau de dépenses sociales inférieur à celui de la moyenne européenne.

Arrogance

Enfin, ce mot désastreux de Jeroen Dijsselbloem est une preuve de ce sentiment de supériorité et d’arrogance des pays du nord de l’Europe qui ont voulu imposer leur modèle coûte que coûte aux pays du sud, déclenchant une aggravation de la crise en rajoutant de l’austérité à l’austérité. Une logique que la Grèce paie encore… En attendant, des députés espagnols ont réclamé la démission du ministre néerlandais. Ils risquent d’en être pour leurs frais. Le favori pour remplacer Jeroen Dijsselbloem, le Slovaque Petr Kazimir avait, en juillet 2015, fait polémique en se félicitant d’avoir brisé le « printemps d’Athènes »…

http://www.latribune.fr/economie/union-europeenne/eurogroupe-jeroen-dijsselbloem-derape-et-refuse-de-s-excuser-668111.html

La lettre de Peter Koenig au peuple grec

Lettre au peuple grec : vous êtes sacrifiés devant les yeux du monde de Peter Koenig (en anglais) citée par Panagiotis Grigoriou dans sa chronique Ni piéton ni phoque

Open Letter to the People of Greece: You Are Being Slaughtered before the World’s Eyes

By Peter Koenig

Dearest and Esteemed People of Greece,

You are being slaughtered right in front of the world’s eyes and nobody says beep. Least the Greek elite. Your Government. A few, but a few too many, allow the slaughter because it doesn’t concern them. They are blinded by the false glamour of the euro and of belonging to the ‘elite class’ of the noble Europeans (sic!).

They apparently live well enough, including the caviar socialists of Syriza. They let their country bleed to death literally, morally, socially and psychologically. Medical care is no longer available or privatized and unaffordable. Pensions were reduced five times. They were never more than a survival kit. By now they have been slashed in some cases by over 50%. Hordes of people live on food handouts. Most social services, including to a large extent education have been sold out, privatized. Gone with a flicker. Gone, by order of Germany – and the holy troika – the criminal gang of three, IMF, European Central Bank (EIB) and the European Commission (EU); the latter a mere bunch of unelected corrupt puppets, deciding the fate of some 800 million Europeans – with YOU, the Greek people, accepting carrying the brunt end of the stick.

In September 2016, the unelected European Commission sent Greece a Brussels-drafted legislation of over 2,000 pages, in English, to be ratified by the Greek Parliament within a few days – or else. – Nobody asked: ‘What is else’?

Brussels didn’t even bother translating this unreadable legalistic heap of paper into Greek, nor did they allow the Parliament enough time to read, digest and debate the new fiscal legislation. Most parliamentarians could not read them, either because of language or due to the imposed time limit. The Parliament ratified the legislation anyway.

Under this new law, Greece is transferring all public assets (public infrastructure, airports, ports even public beaches, natural resources, etc.), unconditionally, for 99 years, to the European Stability Mechanism (ESM) which is free to sell (privatize) them at fire sales prices to whomever is interested – supposedly to pay back the Greek debt. The fund was originally estimated, certainly under-estimated – at about 50 billion euros. In the meantime, the value of the Greek assets has been further downgraded by the troika to between 5 and 15 billion euros, as compared to Greece’s debt of more than 350 billion euros. The ESM is a supranational undemocratic apparatus, accountable to no one.

With this legislation, the Greek Parliament – YOUR Parliament, Esteemed People of Greece! – has annulled itself. It is no longer allowed to pass any budget or fiscal (tax) legislation. Everything is decided in Brussels in connivance with the IMF and the ECB. The last time a similar situation happened was in 1933, when the German “Reichstag” (Parliament) transferred all of its legislative power to Chancellor Adolf Hitler.

This, Dear People of Greece – is sheer economic fascism, right in front of your eyes, the world’s eyes, but nobody wants to see it. The worst blind is the one who doesn’t want to see.

This asset seizure was confirmed when the last hope for at least some debt relief was dashed at the end of February this year. Even the IMF initially recommended and today still privately recommends debt relief. However, Germany without mercy announced the final pillage of Greece, requesting Greece to surrender gold, utilities and real estate to the ESM – largely managed by Germany. The next ‘bailout’ amount, if Greece goes to her knees and surrenders everything, might be 86 billion euros, meaning NEW DEBT. In exchange of what? More interest, a higher debt service (interest and debt amortization) — and an even bleaker outlook to ever, and I mean ever, getting out of this US-European fascism imposed process of killing of a nation.

Chancellor Angela Merkel is reported to have said, “Berlin’s stance on Greece’s bailout program remained unchanged”, after she met with IMF chief Christine Lagarde a few days ago (http://russia-insider.com/en/greece-surrender-gold-public-utilities-and-real-estate-exchange-pieces-paper-printed-brussels).

Some facts about Greece’s debt, as of 9 March 2017 :

Population 10.8 million.

Debt: 352 billion euros (interest per second: 617 euros; debt per citizen: 32,580 euros).

Interest per year: 19.5 billion euros.

Total Greek bailout funds from 2010 to end 2016: in excess of 250 billion euros – none of which went to Greece for the benefit of the people, but to pay debt service to the troika and pay off mostly German and French private banks.

Debt as a percentage of GDP: 181% (GDP 195 billion euros);
2008 Debt to GDP: 109% (less than today’s US debt to GDP ratio of 109.63%).

Greece’s GDP amounts to less than 2% of EU’s GDP.

Greek GDP has collapsed by more than 25% since 2008.

Unemployment is rampant – with an average of 26% – and close to 50% for young people (18 to 35).

Greece’s debt in 2008 would have been totally manageable internally, without outside interference, or so-called ‘bailouts’ – which are really not bailouts but forced debt accumulation.

Greece’s debt was NEVER a threat to the European Union, as the FED / ECB / WS bankster propaganda made you believe. The Greek and subsequent “European Crisis” was entirely fabricated by the banksters for their benefit, at the detriment of Greece and Europe. It had nothing to do with the Greek or European debt. But nobody questioned it. Those European and international top economists and politicians who knew, didn’t dare to speak out. The voices of those who did dare to speak the truth were muffled. The people of Europe were lied to, including the Greek, as usual by the presstitute media.

Let’s put the Greek debt in perspective.

In September 2011, without warning, the Swiss National Bank (SNB) devalued the Swiss franc by about 12% against the euro to protect its economy. This was an unfair move – to say the least, since none of the euro-zone bound countries has the liberty to re-or devalue its currency, as deemed necessary by their economy, i.e. Greece. While Switzerland is not a direct member of the EU, Switzerland is nevertheless bound to the EU by more than 120 bilateral contracts, thereby de facto a EU member.

During the 3 ¼ years of locking the exchange rate into a fixed rate of at least CHF 1.20 per euro, the SNB amassed more than 500 billion francs in extra foreign currency, mostly in euro. This is about 150% of Greece’s current debt.

Switzerland, a country of 8 million people, in theory, could bail out Greece’s full debt, say, at no interest, by a 50-year loan (World Bank IDA terms) – in solidarity; and to compensate a bit for the SNB’s questionable ethics vis-à-vis EU members. Switzerland would not suffer. To the contrary, such a move would help stem the risk of a Swiss currency inflation, due to the huge amounts of Swiss francs that needed to be ‘printed’ to maintain the artificial exchange rate against the euro. Would Switzerland be prepared to engage in such a solidary rescue action? –Probably not.

People of Greece! – Wake up.

Take things in your own hands! Don’t believe you politicians, your media! Get out of this criminal organization called the European Union, and this fraudulent western monetary system that is strangling you to death. Take back your sovereignty, your own currency. Default on your debt – the west can do nothing about it. Not if you run your country with your own public banks, and your own money, gradually but surely rebuilding a destroyed economy. Debt repayment is negotiable. Cases abound around the world. Argentina is one of the more recent ones. Even Germany renegotiated its foreign debt in 1952 (see London Agreement of German External Debt).

Germany, the leader of this economic massacre of Greece, owes Greece huge WWII reparation payments. On 8 February 2015, PM Tsipras requested Germany to pay up her full reparation debt to Greece of an equivalent of 279 billion euros, in today’s terms. Germany replied in April 2015 that the reparation issue was resolved in 1990 – which, of course, it wasn’t. It cannot be excluded that much of the German pressure on Greece today is a means of deviating the world’s attention of the reparation debt Germany owes to Greece.

People of Greece, be aware of what is going on. Do NOT ACCEPT what your government, Brussels and the troika are doing to YOU and YOUR country. To the contrary, request the full reparation payment from Germany – and demand GREXIT, as a fully legitimate follow-up to YOUR July 2015 overwhelming NO vote to more austerity-imposing troika ‘rescue’ packages.

If you do, you will soon see the light at the end of the tunnel — a light that has been blacked-out for too long by Germany and the gangsters of the troika and your own government.

Threats of Expulsion from the Euro Zone

German Finance Minister, Wolfgang Schaeuble still is attempting bluffing the Greeks and impressing the rest of the world by threatening Greece with expulsion from the Euro. Any sane government would turn that threat into its own initiative and abandon this putrefied monster called European Union, along with its fake and fraudulent common currency, called euro. But that’s the problem, Greece is reigned by insanity.

So, the Greek Government responds to insanity (from the troika) with insane submissiveness, namely with meek compliance – to the detriment of millions of their already deprived and enslaved compatriots.
Among those (still) influential Greek highflyers is Former Greek Finance Minister Yanis Varoufakis; the legendary and charming, ‘radical’, Motorcycle Minister. Though he resigned in apparent protest of the Syriza compliance with the troika’s requests despite the NO vote, today he is nothing more than a conformist, who is seeking few nominal ‘reforms’ in Brussels, but by no means wants Grexit, let alone the collapse of the EU – which, by the way, is fortunately imminent. As Greek Minister of Finance, Varoufakis never even had the ‘Option Grexit’ as a Plan ‘B’

(http://www.defenddemocracy.press/greece-disaster-capitulation/).

Nobody screams, yells, revolts, takes to the streets, blocks streets, bridges, railways, for days, weeks, interrupts the still ongoing commerce of the foreign owners of what’s left of YOUR country’s public assets. Nobody. This is not to blame the Greek who have to fight for sheer survival, who have to find ways to feed their kids and families, but the j’accuse goes to the Tsipras- Syriza clan and all those Greek elitists, the media (are they all bought like in Germany by the CIA?) and parliamentarians, who just watch in awe – but stand by. No action. Watching Greece – YOUR country, People of Greece! – bleeding to death.

Be aware, this is in fact not about debt and bailouts. If they tell you that the European ‘debt crisis’ is Greece’s fault, and that a new crisis is brewing, depending on how well Greece will conform to the rules of the next bail out – it is an outrageous lie. This crisis is manufactured by the very European, their elite, the FED-led Goldman Sachse’s of this world, who run the European Central Bank through Mario Draghi, a former GS executive – who de facto runs the European economy.

Why do they want Greece under their boots? – They, the scum of Brussels and ‘swamp’ of Washington (as President Trump used to call the Washington Deep State ‘establishment’), want a submissive Greece. Because Greece is in a highly strategic geographic location, at the cross-roads of west and east. Greece is a NATO country. Maybe the second most important NATO country (after Turkey), because of its strategic position. They don’t want Greece to be run by a ‘left-wing’ government. Syriza, of course, is everything but left-wing. It is as neoliberal as they come. The masters of the universe want ‘Regime Change’ – the good old regime change that threatens all those who do not bend to the rules of the west. Right now, the Syriza government is bending backwards over to please the money masters and to let her people be miserably humiliated and ruined.

Were Greece to hold new elections and let a right-wing party and Prime Minister win, à la New Democracy or even the fascist Golden Dawn, or a coalition of the two – the debt problem would go away, almost overnight. What Washington wants, and Brussels by (puppet) extension, is a compliant Greece that will never ever question its role in NATO, never question the EU, never question its shackles to the euro, and never question the US access to the Mediterranean Sea – rich in deep off-shore minerals and hydrocarbons. The same applies, by the way, also to Italy, Spain and Portugal – also riparian states of the Mediterranean Sea. Their governments have already been changed by outside (US / EU) interference to right-wing neoliberal compliant stooges.

The Greek elite and government inaction is inexcusable. This is Stockholm syndrome at its worst. Submissive to their hangman, until death do us part. And death in the form of total destruction, total pillage, total slavery, is not far away.

Do you, People of Greece, want to continue this path to slavery by a predatory empire, that will eventually call the shots on every move you make?

Or do you want to get your sovereignty back, your own currency – and be unshackled from the dictate of Brussels – and start afresh – as the noble and wise Greek people, who brought Democracy to the world some 2500 years ago? – Surely, Greece still has visionaries and the wisdom to remake Democracy. Remember, while we cannot change our geographic location – the future is irrefutably in the EAST.

Let’s live again Greece!

Long live the People of Greece!

Peter Koenig is an economist and geopolitical analyst. He is also a former World Bank staff and worked extensively around the world in the fields of environment and water resources. He lectures at universities in the US, Europe and South America. He writes regularly for Global Research, ICH, RT, Sputnik, PressTV, The 4th Media, TeleSUR, TruePublica, The Vineyard of The Saker Blog, and other internet sites. He is the author of Implosion – An Economic Thriller about War, Environmental Destruction and Corporate Greed – fiction based on facts and on 30 years of World Bank experience around the globe. He is also a co-author of The World Order and Revolution! – Essays from the Resistance.

The original source of this article is Global Research
Copyright © Peter Koenig, Global Research, 2017

http://www.globalresearch.ca/open-letter-to-the-people-of-greece-you-are-being-slaughtered-before-the-worlds-eyes/5579023

Ni piéton ni phoque : la rubrique de Panagiotis Grigoriou

Panagiotis  Grigoriou est Ethnologue et historien, chroniqueur, analyste, initiateur d’un concept de tourisme alternatif  et solidaire en Grèce. Le regard de l’historien et de l’anthropologue sur l’actualité et le vécu de la crise grecque .

Ni piéton ni phoque

Le beau temps revient au pays en case. Il faut bien dire que la pluie soutenue tombant sur Athènes devient rapidement gênante. C’est connu, les rues et les avenues se transforment aussitôt en ruisseaux et il ne fait pas bon d’être piéton dans pareils cas. De toute manière, les Grecs préfèrent le soleil. Lui seul, il attenue les souffrances de la crise, il amoindrit les esprits, comme il doit sans doute nous faire éviter… certains suicides. Alors soleil !

Par ce temps, on redécouvre l’histoire. Athènes, Parc d’Histoire maritime

Et par cette météo entre soleil et orages, on redécouvre parfois notre histoire lorsque le temps nous le permet. Par exemple, les navires de guerre au Parc d’Histoire maritime accueillent alors les curieux, autochtones ou hétérochtones. Un passé présenté comme toujours glorieux au beau milieu d’un présent alors si gluant. On visite par exemple le croiseur cuirassé Geórgios Avéroff ayant servi comme navire amiral de la marine royale grecque durant la première moitié du XXe siècle, et c’est le seul navire de ce type existant encore des nos jours au monde, désormais exposé comme navire musée dans ce port de Phalère.

Les années passent, et ainsi certaines traces demeurent. Photos exposées, réalisées par son équipage de ce jadis d’entre-deux-guerres (de l’autre siècle), l’uniforme de l’Amiral Kountouriotis, et bien en face, l’autre navire célèbre, le légendaire contre- torpilleur Velos II.

Il ne fait pas bon d’être piéton. Athènes, mars 2017

Ce dernier est entré dans l’histoire en 1973, lorsque son équipage, sous le commandement du capitaine Nikólaos Pappás avec six officiers et 25 sergents, se retire d’un exercice de l’OTAN, et part se réfugier en Italie pour demander l’asile politique, en réaction de taille, face à la dictature des Colonels (1967-1974).

L’ex USS CHARETTE DD-581 de la classe ‘Fletcher’ construit en 1942, avait été offert par les États-Unis à la marine grecque en 1959 et a servi jusqu’en 1991, quand il a été désarmé. Mais pour les Grecs, pour ceux déjà qui n’ont pas la mémoire courte, Velos demeurera l’exact synonyme de ce geste extraordinaire contre la junte d’alors.

Photo exposée à bord du Croiseur cuirassé Avéroff. Athènes, mars 2017
L’uniforme de l’Amiral Kountouriotis. Croiseur cuirassé Avéroff, Athènes, mars 2017
Le légendaire contre- torpilleur Velos II. Athènes, mars 2017

Sauf que du côté des… autres petites histoires bien grecques, et fort actuelles, rien ne change. D’après la presse du moment, les dettes des Grecs envers l’État (non acquittées) ont augmenté de 1,6 milliards, rien qu’en janvier 2017. Il faut en outre comprendre que sur dix millions d’habitants que compte encore ce pays, exactement sous le soleil, plus de 4,7 millions de Grecs sont redevables (contributions impayées) envers l’État (fisc), et plus de 850.000 de citoyens… se sont vus saisir leurs biens ou leurs revenus par l’administration, quotidien “Kathimeriní”.

Dans le même registre, avec seulement 50% versé du montant total des cotisations sociales des indépendants (professions libérales) en ce début 2017, c’est alors la consternation pour le “gouvernement”. Le nouveau calcul initié en 2016… oblige les indépendants à verser entre 60% et 80% de leur chiffre d’affaires (en impôts, taxes et cotisations, par l’obligation faite d’avancer l’impôt de l’année suivante), et c’est ainsi que la date limite des paiements vient d’être repoussé une deuxième fois par le “gouvernement”. “L’effondrement c’est pour bientôt”, croit savoir le voisin Chrístos, tout comme le voisin Kóstas, ou encore, le voisin Petros. Nous sentirions la fin arriver… nous l’espérerions même.

En attendant, les gens se baladent, les jeunes surtout, et ce 25% à 30% de la société s’en sort encore bien ou difficilement, tandis que le grand corps mourant de l’ex-classe moyenne s’enfonce davantage. Rien que les cas (repérés) de branchements illégaux au réseau électrique ont dépassé les 10.000 en 2016 d’après la Régie… record absolu d’après les reportages. Cela, au moment où les premières fraises ont fait leur apparition à Athènes, au même titre que le drapeau national… accompagné de celui de l’occupation européiste, et de celui enfin, de l’équipe du Pirée, le légendaire Olympiakós. Donc circulons !

Les gens sortent. Athènes, mars 2017
Fraises, bananes et autres fruits. Athènes, mars 2017
Les trois drapeaux. Athènes, mars 2017

En attendant, et même si certains se baladent encore, Peter Koening (économiste et analyste géopolitique) vient d’adresser son accablante et émouvante “Lettre ouverte au peuple de Grèce: Vous êtes abattus sous les yeux du monde entier” (en anglais sur le site canadien d’analyse “Global Research”).

L’auteur, dénonce entre autres et à très juste titre, les “socialistes caviar de SYRIZA pour avoir laissé leur pays saigner à mort littéralement, moralement, socialement et psychologiquement. (…) Prenez votre situation en vos mains. Ne croyez pas vos politiciens, ni vos médias ! Quittez cette organisation criminelle appelée Union européenne, de même que ce système monétaire criminel de l’Occident, et qui vous étrangle jusqu’à la mort. Récupérez votre souveraineté, votre monnaie. Cessez de payer la dette, et le système occidental ne pourra rien faire contre votre décision. Et il ne pourra rien faire, parce que vous ferez tourner votre pays via vos propres banques publiques et votre monnaie, en y allant progressivement mais sûrement, en reconstruisant toute une économie dévastée. Le paiement de la dette est d’ailleurs négociable. Les exemples abondent dans ce monde. L’Argentine en est un, et d’ailleurs récent. Même l’Allemagne avait renégocié sa dette internationale en 1952 lors des Accords de Londres sur la dette extérieure allemande”.

Ô peuple de Grèce, réveille-toi devant l’évidence. N’acceptez pas ce que le gouvernement, Bruxelles et la Troïka vous imposent, à vous, comme à votre pays. Exigez le Grexit en suite fort logique et légale à votre vote triomphant du ‘NON’ à tout nouveau ‘plans de sauvetage’ passant par l’austérité imposée par la Troïka. Si vous le faites, vous verrez rapidement la lumière au bout du tunnel – une lumière ayant a été trop longtemps dissimulée par l’Allemagne, par ces gangsters de la Troïka et par votre propre gouvernement”.

En librairie, nouveau siècle ? France, 2016
L’Union européenne, “Quotidien des Rédacteurs”, Athènes, mars 2017
L’Union européenne allemande, “Quotidien des Rédacteurs”, Athènes, mars 2017

Le ministre allemand des Finances, Wolfgang Schäuble, essaye toujours de duper les Grecs, et d’impressionner le reste du monde, en menaçant de la Grèce de sortie de la zone euro. Tout gouvernement sain d’esprit, saurait pourtant transformer cette menace en initiative propre, afin de quitter ce monstre pétrifié que vous appelez l’Union européenne, ainsi que sa fausse et illusoire monnaie commune nommée euro. Sauf qu’en Grèce, c’est la morbidité qui y règne, et c’est tout le problème. Ainsi, à la morbidité de la Troïka, le gouvernement grec répond par sa propre et totale servitude morbide, en se conformant entièrement à la destruction de millions de compatriotes dépossédés et réduits en esclavage”.

Le beau temps qui revient au pays comme à sa case, les gens fréquentant les cafés en bord de mer comme si de rien n’était, notre théâtre est si ambiant… L’acteur et metteur en scène Alexandre Kollatos m’avait invité cette semaine à la première répétition privée de sa nouvelle pièce de théâtre. Elle est intitulée “Yanis et Alexis”, une fiction… d’amour, imaginée entre Yanis Varoufákis et Alexis Tsipras dont l’histoire bien brève relate de manière tragi-comique la (première) terrible période Syriziste, entre janvier et juillet 2015.

Ma photo est certes floue, sauf que la pièce ne l’est pas du tout. Nous n’étions que quatre spectateurs invités à cette première avant l’heure et nous avons tous bien pu rire. C’est alors si important par les temps qui courent et qui ne rigolent alors plus en Grèce depuis 2015, et c’est autant vrai que nous ne rions pratiquement plus.

Le pays en case. Grèce, déjà en 2012
Les gens qui fréquentent les cafés en bord de mer. Athènes, mars 2017
“Yanis et Alexis” d’Alexandre Kollatos. Athènes, mars 2017

Alexandre, comme son “Yanis et Alexis” sont à la recherche d’une salle à Athènes, puis, qui sait peut-être plus tard à Paris, à Londres, à Bruxelles ou à Berlin. Nous le lui souhaitons ardemment.

En attendant, le beau temps revient au pays où il ne fait pas toujours bon d’être piéton, la mesure se perd et c’est pour que l’hybris triomphe. L’inexplicable tient de l’insupportable (comme son contraire). Car en cette… belle Cyclade d’Ios, Théodosis, le phoque connu et aimé (presque) de tous, a été retrouvé inanimé… Une mort causée par balle alors tirée d’une arme à feu que l’on dira toujours “humaine”. Sur l’île, d’après les reportages de la presse locale c’est la consternation. Pays où il ne fait pas bon d’être piéton ni phoque.

Maigre consolation… maritime, les archéologues pensent avoir découvert les vestiges de la base navale de la flotte grecque menée par Eurybiade et Thémistocle face à celle des Perses de Xerxès Ier pendant la bataille de Salamine en 480 av. J.-C.. Autres temps ?

L’assassinat de Théodosis, île d’Ios. Cyclades, mars 2017
Maigre consolation… Vestiges de la bataille de Salamine, mars 2017 (presse grecque)

Sauf qu’en Grèce, c’est la morbidité qui y règne, et c’est toujours tout le problème. L’esclavage c’est encore la nouvelle convention en interne que la direction des magasins H&M entend imposer aux salariés. Ces derniers devraient accepter (entre autres), d’être mutés temporairement à n’importe quelle boutique de l’enseigne à travers toute la Grèce, le tout, en supportant les coûts des déplacements et de l’hébergement… pour quelques centaines d’euros par mois de salaire seulement. C’est aussi cela la politique de la Troïka, et autant celle de… SYRIZA caviar au pays où il ne pleut pas, sauf seulement l’été.

Manifestants devant un magasin H&M. Athènes, mars 2017 (presse grecque)

Le beau temps reviendra un jour au pays en case… et c’est l’animal (à peu près) adespote (sans maître) de ‘Greek Crisis’ qui nous le dit. Pour les piétons, pour les employés des magasins H&M, et peut-être même pour les phoques.

L’animal de Greek Crisis. Athènes, mars 2017

* Photo de couverture: Le croiseur cuirassé Geórgios Avéroff. Athènes, mars 2017

mais aussi pour un voyage éthique “De l’image à l’imaginaire: La Grèce, au-delà… des idées reçues !” http://greece-terra-incognita.com/

L’Espagne- L’Ecosse et l’UE

L’Espagne veut fermer la porte de l’Union européenne à l’Ecosse par Cécile Thibaud

Madrid veut éviter que l’ouverture de négociations séparées avec l’Ecosse ne serve d’exemple aux indépendantistes catalans.

Madrid veut bloquer toutes les tentatives de l’Ecosse de rester dans l’Union européenne après le Brexit. Discret d’habitude sur la scène européenne, le gouvernement espagnol marque cette fois énergiquement sa position. Il veut couper court à toutes les possibilités d’ouvrir à Bruxelles des négociations différentes pour l’Ecosse du reste du Royaume-Uni.

« Si, de mutuel accord et conformément avec les règles applicables au Royaume-Uni, l’Ecosse devenait indépendante, notre thèse est qu’elle ne peut pas rester dans l’Union européenne, parce qu’elle n’est pas membre en tant que telle mais appartient au Royaume-Uni », assure le ministre des Affaires étrangères, Alfonso Dastis, considérant que l’Ecosse devrait dans ce cas repartir de zéro et postuler comme nouvel Etat pour entrer dans l’Union.

Les intentions de Madrid sont claires. Il s’agit de ne pas créer de précédent qui pourrait faciliter la route vers une sécession de la Catalogne. La perspective d’une sortie inéluctable de l’Union européenne est l’un des principaux arguments de Madrid pour contrer les aspirations souverainistes à Barcelone : une Catalogne indépendante serait automatiquement expulsée du club européen et n’aurait aucun passe-droit pour le réintégrer, et elle serait obligée d’ entreprendre un long processus d’adhésion. Les difficultés de l’Ecosse post-Brexit pourraient en être une démonstration éclatante.

« Transition »

Le président du gouvernement espagnol, Mariano Rajoy, cherche activement à obtenir l’appui des Vingt-Sept contre le défi séparatiste, avec notamment l’introduction dans la déclaration de l’UE, à l’occasion de l’anniversaire du traité de Rome le 25 mars prochain, d’un rappel de « l’obligation de tous » de respecter les lois de leurs Etats.

Ces mouvements ont lieu alors qu’à Barcelone les partis indépendantistes qui ont la majorité au Parlement (mais pas en votes directs) tentent d’accélérer le processus de séparation d’avec l’Espagne. « Le hamster est sorti de sa roue » , affirmait il y a quelques jours le président régional, Carles Puigdemont, alors que le Parlement catalan a l’intention d’ approuver les lois préparant la « transition » vers un nouvel Etat d’ici l’été. Il a déjà changé son règlement pour permettre de voter les textes rapidement et sans débats préalables, afin d’éviter notamment d’être contré par la Cour constitutionnelle. L’objectif du gouvernement catalan est la tenue, d’ici septembre prochain, d’un référendum sur la sécession de la région, qui aurait cette fois « valeur légale », selon Barcelone, et permettrait d’amorcer une « déconnexion » d’avec le reste de l’Espagne.

Cécile Thibaud

@CecileThibaud
En savoir plus sur https://www.lesechos.fr/monde/europe/0211891828327-lespagne-veut-fermer-la-porte-de-lunion-europeenne-a-lecosse-2073453.php#lXxdYSX7sAO8Y0Lp.99

Collectif Grenoble : 2 dates d’actions à retenir

Soutenez les prochaines actions du collectif en retenant ces 2 dates : 29 mars (VioMe)  et 10 avril 2017 (Film Débat Aube dorée)

Le 29 mars à 20h à la MDA de Grenoble : soirée de soutien aux VioMe

Le 10 avril à 19h45 au cinéma Le club de Grenoble : « Aube Dorée : une affaire personnelle »

  • projection du film sur ce parti d’extrême droite en Grèce,
  • débat en présence de la réalisatrice Angélique Kourounis sur la montée de l’extrême droite en Grèce et sur la situation en France et en Europe.

Affiche :

29 mars 2017  Soirée soutien VioMe

10 avril 2017

 

Convoi solidaire Isère Savoie

Convoi solidaire vers la Grèce

De la nourriture, des produits d’hygiène, des jouets, des friandises, des dessins d’enfants … venant de St Martin d’Uriage, Barraux, Grenoble, du Trièves, l’Ecole de Vaulnaveys le Bas ont été acheminées à Pontcharra le 14 mars et ont rempli une bonne partie du fourgon savoyard qui partira le 25 mars 2017 vers la Grèce. Ils seront 23 fourgons à se diriger vers Athènes, Thessalonique et plusieurs iles, venant de France, de Belgique, de Suisse et d’Espagne.

Les besoins en Grèce sont immenses, que cela soit pour les réfugiés qui vivent dans des conditions inhumaines, mais aussi pour les Grecs jetés de plus en plus nombreux dans la précarité par les politiques austéritaires imposées par l’ Union Européenne et mises en œuvre avec zèle par le gouvernement grec.

Cette action solidaire à l’initiative du collectif artistique ANEPOS, a mobilisé en Isère des associations locales (St Martin d’Uriage, Barraux, Pontcharra, le Trièves) et notre collectif ainsi que de nombreux citoyens qui se sont sentis concernés par la situation en Grèce.

Si vous n’avez pas eu le temps de participer à cette collecte vous pouvez toujours envoyer des fonds à l’ordre ANEPOS en déposant vos chèques dans la boite aux lettres d’Attac 38 à la Maison des associations 6 rue Berthe de Boissieux à Grenoble ou en envoyant à l’adresse suivantes ANEPOS, BP 10 81 540 Sorèze en précisant convoi savoyard du 25 mars. Une somme de 500€ a déjà été récoltée et envoyée. 

Grèce: Non au 4e mémorandum

Grèce: « Non au 4e mémorandum. Monnaie nationale et programme révolutionnaire citoyen MAINTENANT « . Par Dimitris Stratoulis

Traduction Vanessa de Pizzol

Gouvernement et représentants des créanciers préparent au Hilton le 4e mémorandum impliquant notamment des mesures anti-populaires en surnombre et aucun nouveau financement pour le pays après 2018.

Mais avant le quatrième mémorandum, ils vont trouver un compromis dans le cadre de ce qu’on appelle l’accord technique sur les conditions préalables de la 2e évaluation, lesquelles sont à la fois antisociales pour le peuple et catastrophiques pour le pays. Ces dernières comprennent l’accélération des privatisations et l’achèvement du bradage des biens publics, la démolition plus importante encore des relations du travail, la facilitation des licenciements collectifs, la réduction du syndicalisme et du droit de grève, la dissolution du secteur public énergétique et notamment de la DEI[1] ainsi que leur cession pour une bouchée de pain à des intérêts économiques étrangers essentiellement spéculatifs.

Concernant le quatrième mémorandum, il comprendra des mesures meurtrières, sur lesquelles on va prélégiférer dès maintenant pour une application après 2018, en particulier l’abaissement drastique du plafond des revenus non imposables, une nouvelle réduction – un véritable carnage – de 10 à 45 % des principales retraites aujourd’hui versées, avec suppression de la fameuse différence individuelle de traitement entre anciens et nouveaux retraités, tout ceci conduisant à une paupérisation encore plus grande de la population dont les revenus et les retraites sont modestes.

Le gouvernement, pour faire passer la pilule et endormir le peuple, promet d’encourager les contre-mesures positives, qui ne pourront suppléer, ne serait-ce que de façon minime, aux pertes qui affecteront surtout les revenus populaires les plus modestes, et qui ne seront appliquées que si notre pays, après 2019, va au-delà d’excédents annuels primaires monstrueux (3,5% du PIB) qu’il faudra malheureusement envisager sur une période longue, comme l’a déjà établi le gouvernement.

Toutes ces mesures barbares antisociales et régressives qui vont accompagner la deuxième évaluation, ainsi que les excédents primaires d’un niveau intolérable exigés jusqu’en 2028, conduiront non seulement à un appauvrissement encore plus important de la société, mais aussi à une impasse économique irrémédiable.

Il existe cependant une autre voie que celle de la misère engendrée par les mémorandums et de la transformation de notre pays en colonie et protectorat des créanciers, notamment de la zone euro allemande. Cette voie alternative passe par la sortie de la prison « zone euro », par l’adoption d’une monnaie nationale, qui s’accompagnera d’une interruption du remboursement et d’une remise en cause de la dette publique, ainsi que par un programme de reconstruction de la production du pays, un programme révolutionnaire, populaire, anti-mémorandaire et de développement.

Avec la monnaie nationale, nous pouvons renforcer la base de production de notre pays en injectant les nécessaires et suffisantes liquidités (financement) dans l’économie et la société grâce à des conditions favorables et des taux faibles, possibilité actuellement inexistante dans l’euro.

Nous voulons destiner ces fortes liquidités (financement) à l’économie pour réaliser des investissements productifs et à la société pour lutter contre la pauvreté, satisfaire les besoins sociaux, soutenir et fortifier les principaux secteurs économiques.

La monnaie unique sera mise en place par un financement via la Banque de Grèce, qui repassera sous contrôle du secteur public et du gouvernement, via les banques qui seront deux fois plus nationalisées par rapport au programme actuel d’investissement public, mais aussi via le soutien des petites et moyennes entreprises et des agriculteurs pour améliorer la production primaire et la transformation.

C’est dans ce cadre qu’aura lieu la politique prioritaire pour la reconstruction des entreprises sous contrôle public et le soutien aux entreprises coopératives et aux clusters, mais aussi à celles qui créeront des emplois, respecteront la législation en matière de travail et d’environnement et contribueront au développement de la recherche, de l’innovation et des nouvelles technologies, au plan de développement démocratique et à la transformation de la production dans l’économie.

Le but de cette transformation de la production vise à une amélioration productive et technologique du pays, une augmentation des emplois et par conséquent la lutte contre le chômage, le soutien et l’élargissement des conquêtes des travailleurs.

La monnaie nationale sera dans le même temps mise à profit pour améliorer les politiques sociales, recapitaliser les fonds d’assurance, soutenir et renforcer les salaires et les retraites, notamment le salaire minimum et la retraite minimum. Également, pour aider les personnes handicapées, les chômeurs, lutter contre le chômage et la pauvreté et favoriser les dépenses publiques et sociales.

Le passage à la monnaie nationale et l’application d’un programme en faveur du peuple et anti-mémorandaire de sortie de crise n’aura rien d’une promenade de santé. Mais il s’agit de la seule voie possible pour empêcher que le peuple grec ne continue de s’enfoncer dans la misère et pour récupérer la souveraineté nationale et populaire.

Affronter les difficultés, qui seront cependant bien moindres que celles que nous connaissons aujourd’hui dans le cadre des mémorandums installant une austérité éternelle, suppose une volonté politique forte, un projet structuré et un soutien combatif porté par un peuple bien informé et la solidarité entre les peuples de l’UE.

La constitution d’un large « front » politique et électoral des forces de gauche, anti-mémorandaires, révolutionnaires, patriotiques, et la désignation d’un gouvernement analogue, constitue la seule garantie de la promotion réussie d’un programme anti-mémorandaire au bénéfice du peuple et particulièrement des nouvelles générations.

*Dimitris Stratoulis est membre du bureau politique de l’Unité Populaire – ancien ministre chargé de la Sécurité sociale.

**Cet article a été publié sur Kontra News (édition dominicale du 5/03/2017)

[1] Entreprise Nationale d’Électricité.

https://unitepopulaire-fr.org/2017/03/19/grecenon-au-4e-memorandum-monnaie-nationale-et-programme-revolutionnaire-citoyen-maintenant-par-dimitris-stratoulis/

Fleurs de ruines : lieux de création alternatifs dans la Grèce des mémorandums

Intervention de Dimitris Alexakis au Nouveau théâtre de Montreuil lors de la table ronde «Alternatives et Solidarités en Grèce»  samedi 4 mars

À partir de 2010, des dizaines de lieux de création alternatifs commencent à apparaître dans les ruines laissées par le retrait et la faillite de l’État grec. Dans le même temps, des fondations privées aux moyens colossaux ouvrent leurs portes ou sont mises en chantier. À partir de notre expérience propre (la création de l’Atelier de réparation de télévisions par Fotiní Banou et moi-même en novembre 2012), ce texte [1] a pour objet d’esquisser un tableau du paysage culturel apparu à Athènes dans le contexte de crise, d’offensive néo-libérale et de «résistance créatrice» que connaît le pays depuis 2008.

1 Tout commence entre 2010 et 2011 avec l’éclatement de la crise des comptes publics grecs, l’imposition des premiers plans d’austérité et la fin des politiques d’aide à la création. En quelques années, tout s’arrête : fin des subventions aux compagnies reconnues et aux théâtres les plus prestigieux (Théâtre d’Art), gel de la production cinématographique locale, fermeture de formations musicales emblématiques (Orchestre des couleurs) et du CNL grec, abandon de fonds d’archives d’intérêt national. Pour de nombreux artistes, la question se résume à peu près à ceci : comment continuer d’avancer au-dessus de ce vide?

À l’initiative de collectifs ou de groupes d’amis, des dizaines de lieux de création de petite taille (studios ou ateliers de danse contemporaine, théâtres, espaces de musique improvisée) commencent à apparaître dans les ruines laissées par le retrait et la faillite de l’État grec : théâtre occupé et autogéré Embrós, studios de danse contemporaine Kinitíras et Faux Mouvement, lieux de création Baumstrasse et Vyrsodepsío (La Tannerie), Studio 9 (musiques improvisées), immeuble du Synergío (quartier de Metaxourgío) et occupation du Green Park en bordure du Champ de Mars, parmi (beaucoup) d’autres.

Ces lieux de création étaient (voire sont encore) des appartements, des ateliers de réparation de télévisions, des hangars, d’anciens cafés municipaux ; plutôt que de les convertir en salles de spectacle conventionnelles (avec leurs sièges en rang, leur scène séparée du public), les artistes choisissent de les laisser en l’état: chaque projet sera ainsi appelé à s’adapter aux conditions spécifiques de l’endroit.

Les spectacles qui y sont présentés sont moins des représentations que des prises de parole, au milieu ou à quelques centimètres du public, des rencontres et des vis-à-vis (entre un comédien et un seul spectateur) ; la représentation crée d’autres fois les conditions d’une parole partagée, se mue en conversation. Ce sont aussi des projets hors les murs : tel groupe théâtral organise une rencontre avec un quartier, son histoire et ses habitants, la représentation devient déambulation dans les rues et les lieux fermés par la crise (Omáda 7, UrbanDig Project, Caravan Project, Alèxandros Mistriótis, dont la Visite convoque la mémoire historique d’Athènes).

Le public devient partie prenante d’une action, d’une recherche ; les visiteurs ne sont plus là exactement des spectateurs et moins encore, dans une ville dont un grand nombre d’habitants ne consomment plus que le strict nécessaire, des consommateurs de culture.

Les conditions de ces lieux alternatifs sont marquées par la polyvalence [2] et ne cessent pas d’être précaires (il n’y a pas en Grèce de statut d’intermittent) ; les marges économiques, toujours asphyxiantes, n’assurent dans le meilleur des cas que la pure et simple reproduction de la force de travail (ne gagner jamais que ce qui permettra de continuer à faire vivre le lieu) mais offrent la satisfaction que l’on retire à sauvegarder un talent, un métier, un art, à continuer d’avoir une voix, à faire quelque chose qui en vaut la peine dans un contexte où de plus en plus de jeunes diplômés des Beaux-Arts, des conservatoires et des écoles d’art dramatique se voient contraints pour survivre d’accepter n’importe quel emploi (dans la restauration, les centrales d’appel de téléphonie mobile, le bâtiment ou les services de livraison) ou poussés à l’exil (Allemagne, Suède, Angleterre…): le passage du Welfare State au Workfare à quoi se réduit pour partie la «crise grecque» laisse de fait sur le carreau des milliers de jeunes artistes précaires.

S’ils demeurent eux-mêmes particulièrement fragiles et ne se développent qu’à petite échelle, ces lieux ont cependant des effets non négligeables : ils constituent souvent le seul foyer d’activité culturelle dans des quartiers désertés par l’initiative municipale, régionale ou étatique, et offrent un toit aux artistes débutants.

2 Cette réponse est, si l’on y pense, du même ordre que celle qui voit, à partir de l’occupation de la place Sýntagma (été 2011), la multiplication en Grèce des structures de solidarité, de production et de distribution alternatives dans des domaines aussi divers que la santé (dispensaires sociaux), l’éducation (écoles ou garderies autogérées), l’alimentation (cantines sociales), la production (coopérative Vio.me), l’agriculture (parcelles mises en culture sur des terrains occupés, à Thessalonique ou en bordure d’Athènes) et l’aide aux réfugiés, à partir de l’été 2015. La nécessité de répondre aux besoins les plus immédiats conduit un grand nombre de personnes à passer de la contestation traditionnelle (manifestations, grèves) à une forme de «résistance créatrice» [3] souvent aux marges de la légalité. Il s’agit toujours de jeter des passerelles ou des ponts au-dessus du vide: au lieu de continuer à se référer aux structures antérieures, désormais fantômes, faire émerger de nouvelles structures, de nouvelles institutions.

Ces lieux tiers commencent ainsi, à partir des quartiers, à élaborer les prémices de ce qui pourrait devenir une nouvelle politique culturelle — et se heurtent tantôt à l’hostilité des pouvoirs publics (fermeture de nombre d’entre eux par la municipalité de Giórgos Kamínis en 2013), tantôt à leur indifférence. Après l’espoir déçu de janvier 2015, il apparaît clairement que la culture de la gauche reste oblitérée par l’imaginaire étatique ; les ministères de la Culture de Sýriza s’intéresseront ainsi davantage aux alliances entre État et grandes fondations privées qu’au soutien qu’ils pourraient apporter à cet espace alternatif.

Dans le même temps, cet espace tiers devient un enjeu crucial de la période, entre paradigme démocratique du mouvement des places, des comités populaires de quartiers, et paradigme libéral de la Big Society de David Cameron, porté par les grandes fondations privées. Nouvellement créées, celles-ci (Onassis, Niarchos et Neon) commencent à certains égards à fonctionner depuis le champ culturel à la manière de think tanks ou de laboratoires d’un capitalisme en train de se réinventer, en recherche d’issues et qui, après avoir investi dans l’art contemporain, s’intéresse à présent de très près à toutes les manifestations du spectacle vivant et des arts éphémères.

3 Car la crise ne voit pas seulement fleurir les lieux de création alternatifs. Dans le même laps de temps, des fondations privées aux moyens colossaux ouvrent leurs portes ou sont mises en chantier en se positionnant aux frontières de la politique culturelle (dans des domaines aussi cruciaux que l’aide à la création, l’accueil de compagnies étrangères, la création d’une nouvelle Bibliothèque nationale et d’un nouvel Opéra), du mécénat d’entreprise (promotion d’un capitalisme soucieux, à travers les artistes, de «l’intérêt général»), de la politique de la ville (grand projet d’urbanisme Rethink Athens, impulsé par la Fondation Onassis et ayant pour objet de redessiner le centre de la capitale) et de la politique tout court (campagne en faveur du «oui» au référendum de juillet 2015 soutenue là aussi par la Fondation Onassis).

Le paysage culturel athénien est donc aujourd’hui marqué par trois phénomènes : la disparition des politiques d’aide à la création et la réduction drastique du soutien à la préservation du patrimoine, l’hollowing out of the State décrit par un certain nombre d’analystes anglo-saxons («évidement» depuis l’intérieur de fonctions-clés de l’État social), la montée en puissance des fondations privées (comme dans le reste de l’Europe : Fondations Louis Vuitton au bois de Boulogne, Prada à Milan, Pinault à Venise, etc. [4]) et la multiplication de ces lieux de culture, entre occupations sauvages ou négociées, associations à but non lucratif et fabriques de culture sur le mode de la coopérative : un État en faillite, des fondations rappelant les paquebots éclairés traversant la nuit les films de Fellini, et des radeaux [5] en ordre dispersé.

Ce qui distingue ces radeaux faits de bric et de broc de ces transatlantiques lumineux n’est pas seulement leur taille, la disproportion radicale des moyens dont ils disposent (la fondation Onassis dont le siège se trouve à Vaduz, Liechtenstein, s’adosse à un empire industriel et financier ; de même pour la fondation Niarchos, qui siège en Suisse, et pour la fondation Neon, établie à New York et Londres aussi bien qu’à Athènes et dont le créateur, Dimítris Daskalópoulos, est l’ancien patron de la Confédération des industries grecques et a dirigé le plus important conglomérat de l’industrie alimentaire locale).

Ce qui les distingue, c’est aussi l’inscription dans un quartier, le positionnement dans la ville, le lien au voisinage : la fondation Onassis est située au bord d’une voie rapide, sur un axe décentré (le long de l’avenue Syngroú, vers la mer [6]), de même que la fondation Niarchos (qui abrite la nouvelle Bibliothèque nationale et le nouvel Opéra). Les possibilités de créer un lien vivant et authentique avec le quartier sont là à peu près nulles, malgré les efforts déployés : la taille même des bâtiments (et leur architecture) rendent cet espoir vain. Ce sont des lieux structurellement coupés de leur habitat et qui ont en général plutôt vocation à entraîner un remodelage du quartier, voire une destruction de sa dimension populaire (grands projets d’urbanisme visant à redessiner le centre-ville — Rethink Athens —, investissements immobiliers, notamment dans le quartier de Metaxourgío).

Dans un contexte où la politique, comme en Grèce, s’est effondrée, le travail artistique, condensateur d’un réel, d’une situation, revêt une importance accrue, d’où la pertinence de s’interroger sur les conditions et les lieux dans lesquels il s’exerce. Dans ce contexte de crise organique du capitalisme marqué par une rupture franche entre État et société civile — en Grèce, cette rupture est consommée entre 2008 et 2010, donc avant l’apparition officielle sur les agendas européens de la «crise de la dette» —, le capitalisme lui-même paraît être à la recherche d’issues et semble quelquefois les trouver dans la récupération, l’appropriation des formes de contestation portées par les mouvements sociaux. C’est le paradoxe apparent de la politique de certaines grandes Fondations, qui s’inscrivent dans le droit fil du processus néo-libéral en s’efforçant d’y intégrer les formes mêmes de sa remise en question. L’art devient le biais par lequel un discours critique ou une pratique activiste peuvent être réintégrés et captés par le système dominant. L’exemple de Julie Mehretu, artiste picturale travaillant notamment sur le «mouvement des places» et dont une œuvre ornait le hall d’entrée de Goldman Sachs, à New York, est à cet égard éclairant [7].

Car ces fondations privées développent souvent une politique culturelle libérale et ouverte (aux droits des minorités ethniques ou sexuelles, des handicapés) tout en envisageant le démembrement des politiques publiques comme une occasion de refonder l’ensemble du champ politique, de reformuler la question de la «gouvernance» en termes proches de ceux qui animaient la campagne de David Cameron [8], d’impulser de grands projets urbanistiques et / ou immobiliers et d’intervenir de manière non équivoque dans le cours de la vie publique. Ces mêmes Fondations se plaisent également, dans le droit fil du mécénat traditionnel, à soutenir projets caritatifs, humanitaires voire scientifiques liés aux conséquences de la crise : la Fondation Niarchos a par exemple contribué à la fondation d’un «Observatoire de la crise» [9].

Ruines publiques, fondation privées: leur puissance financière leur permet en outre de devenir «partenaires privilégiés» du Théâtre national de Grèce [10] ou de voler au secours d’un Théâtre d’Art menacé de faillite.

4 Malgré le fait qu’ils aient tout, et que nous n’ayons rien, nous parvenons cependant à nous faire entendre et à exister. Pour combien de temps ?

Notre souci quotidien : est-ce que les gens viendront, aujourd’hui ? Après plus de 4 ans de lutte pour faire exister l’endroit, l’année 2016-2017 est à la fois, pour nous, celle d’une certaine reconnaissance, et la plus difficile : si les Athéniens ont longtemps tenu bon à la crise en continuant (notamment) d’aller au théâtre, les quelques économies qui avaient permis à beaucoup de tenir sont maintenant épuisées et de nombreux espaces accusent depuis septembre une baisse de fréquentation sévère [11].

Le désir et la curiosité sont aussi touchés par la crise : sans horizon politique visible, dans l’impasse à laquelle semble se résoudre la période de gouvernement Sýriza depuis la «capitulation» de juillet 2015, le renoncement finit souvent par l’emporter sur le désir (de sortir, de rencontrer des gens, de discuter, de découvrir autre chose, d’écouter une histoire).

Dans ce contexte, de plus en plus de lieux, de compagnies, d’artistes (dans tous les domaines : performance, vidéo, documentaire, théâtre) se tournent assez logiquement vers ces fondations pour faire financer leurs projets.

Ce n’est pas notre cas, malgré les difficultés et la précarité à laquelle nous sommes confrontés : nous nous appuyons sur la trésorerie, en partageant les recettes avec les compagnies invitées (le risque est commun, l’aventure est commune) et en essayant de développer des collaborations avec des troupes et des théâtres de l’étranger. Si nous ne pensons pas que l’intervention de l’État soit le fin mot de tout, il nous serait impossible de recevoir certains artistes (la compagnie Scarface Ensemble, de Strasbourg, ou la performer et chorégraphe Jasmin İhraç) sans l’aide de lieux subventionnés et / ou de fonds régionaux, à Reims, Rennes, dans la région parisienne, à Berlin. D’autres projets associant des artistes étrangers se fondent simplement sur la débrouille de collectifs autogérés qui, par le biais d’une collecte de fonds ou l’organisation d’un festival, parviennent à financer leur venue sans passer par la case État.

L’espoir que nous formions en janvier 2015 était notamment lié à la possibilité de repenser l’articulation entre puissance publique et espace tiers, et, au-delà du champ culturel, entre initiatives venues d’en bas (santé, alimentation, éducation, etc.) et État. Cet espoir a été déçu — ou, plus exactement, s’est fracassé contre les diktats de la troïka et l’absence à peu près totale de réflexion sur ces enjeux de la part de la gauche de gouvernement (Sýriza), qui doit pourtant son ascension à ces initiatives d’en bas, mais pour laquelle la question du pouvoir continue de se réduire à la question de l’État : coquille vide, dans la Grèce de 2017, privée de tout pouvoir d’agir sur le réel (sauf de façon catastrophique). Le seul but des gens de pouvoir est de se maintenir au pouvoir, même lorsque ce pouvoir-là est sans pouvoir aucun.

Nous persistons cependant dans notre projet en insistant de plus en plus sur l’ancrage du lieu et sa position dans la ville, en nous efforçant de répondre à la réalité sociale immédiate, par exemple au travers d’ateliers de jeu théâtral avec de jeunes mineurs étrangers non accompagnés, et en préservant notre autonomie — autonomie qui nous permet de faire entendre un point de vue proprement politique, que ce soit sur la fermeture en 2013 de la radio-télédiffusion grecque, sur la dite «crise des réfugiés» à partir de 2015 ou sur les négociations du gouvernement grec avec les instances européennes et le FMI.

À titre d’exemples concrets, pour donner une image de notre programmation :

– Un festival d’improvisation musicale permettant de collecter des fonds pour l’un des collectifs d’avocats ayant intenté une action en justice contre «Aube Dorée» (organisation criminelle se revendiquant explicitement du nazisme et représentée au Parlement hellénique).

– Des ateliers d’expression théâtrale avec de jeunes migrants non accompagnés.

Tchernobyl, une création théâtrale au terme de laquelle les spectateurs parlent et discutent entre eux, quelquefois plus d’une heure.

– Le festival Multiversal, organisé avec un collectif européen autogéré (noise, performance, électronique).

Babel, es-tu là ?, un atelier international avec les Ateliers du vent aboutissant à une performance de 24h (nouvelle façon d’habiter l’espace, d’y circuler et surtout d’y passer du temps).

Temps Zéro, installation visuelle et sonore (avec le photographe Stéphane Charpentier et des dizaines d’artistes, européens, américains, japonais, russes).

– Des collectes de denrées alimentaires et de vêtements pour une structure de solidarité du quartier (les spectateurs, au lieu d’acheter des tickets de théâtre, déposent à l’entrée des sacs de riz, de pâtes, des conserves, etc.).

– Un programme de documentaires créatifs sur la «crise de la dette» dans le monde et en Grèce (Alcyons, de Laure Vermeersch, Matière première de Chrístos Karakèpèlis…).

– Une performance théâtrale et musicale autour de la mémoire de la guerre civile, Guerre des paysages, avec la metteuse en scène Irène Bonnaud et l’artiste Ilías Poúlos (printemps 2017).

(Exemples seulement indicatifs : une des clés de la survie du lieu tient au fait qu’il demeure ouvert 5, 6 ou 7 jours sur 7, une grande partie de l’année.)

Piste à suivre (mais difficile à mettre sur pied étant donné que nous sommes déjà requis à temps plein par le travail dans l’espace) : créer un réseau et des collaborations avec des lieux équivalents au nôtre et œuvrant dans d’autres quartiers, de façon à ce que ce champ autonome apparaisse mieux et se renforce de coopérations et d’échanges.

Projet immédiat : accueillir des rencontres de structures de solidarité désireuses de refonder le maillage d’initiatives venues d’en bas, qui a pour partie volé en éclats après le crash de juillet 2015, avec, notamment, d’anciens membres fondateurs de Solidarity For All [12].

5 La contestation artistique des politiques d’austérité et de l’ordre néo-libéral ne saurait provenir de l’intérieur des grandes fondations privées, structurellement liées au monde de la finance, que leur capital se soit constitué (comme en Grèce) dans la marine marchande ou l’industrie alimentaire, ou (comme en France et en Italie) dans l’industrie du luxe (LVMH, Prada) ; le spectacle que nous accueillons actuellement, Pénélopes, fondé sur un travail avec des immigrées géorgiennes et syriennes, ne pourrait être entendu de la même façon et n’aurait en définitive pas le même sens, présenté dans une fondation privée.

Le tiers espace dans lequel nous nous inscrivons constitue à nos yeux un enjeu politique majeur : l’initiative par le bas n’est pas politiquement ni socialement neutre (le fait que nous travaillions et vivions à Kypsèli, dans un quartier de retraités grecs frappés de plein fouet par la crise, d’immigrés et d’artistes précaires et non, par exemple, dans un quartier branché n’est pas neutre non plus). Depuis le mouvement des places de 2011, ces initiatives, qu’elles relèvent de la coopérative, de l’autogestion, de l’association à but non lucratif ou soient sans statut juridique, sont au contraire investies de significations politiques et doivent faire entendre leur différence, vis-à-vis de l’État comme des puissances privées.

Entre le monde de la finance et le monde financé (dans l’école maternelle de notre fille, même les repas sont financés par des programmes européens), un troisième monde est apparu en Grèce à la faveur du big bang [13] de la place Sýntagma, en mai 2011 : celui des comités de quartiers, de l’auto-organisation populaire, des marchés sans intermédiaires, des parcelles occupées et cultivées au cœur des villes, un monde de territoires à défendre, de biens à produire et à distribuer autrement, d’habitudes et de formes de vie nouvelles, de liens, un autre imaginaire où le collectif répond à l’atomisation.

La gauche n’est plus depuis longtemps le lieu où la société se réinvente en répondant (notamment) à ses besoins les plus urgents. Après l’effondrement de la «gauche radicale» grecque, aucune politique sociale ne saurait à nos yeux être mise en œuvre sans reconnaître d’abord le rôle de premier plan joué par les mouvements et les initiatives par le bas [14]. Cela implique de redéfinir en profondeur la place, la nature et la forme de cet échelon ou de ce relais politiques. Les initiatives évoquées ici constituent dans la société, dans des domaines aussi divers que l’agriculture, la santé, l’éducation, la production, la culture, les conditions mêmes d’un pouvoir d’agir réel. L’auto-organisation populaire radicalement décentralisée telle qu’elle apparaît en Grèce à partir de l’événement inaugural de Sýntagma [15] et qui a essaimé entre 2011 et nos jours à travers plus de 250 structures de solidarité est l’unique base effective possible d’un changement politique de plus grande ampleur. Il nous semble donc que la question de l’auto-organisation, de l’auto-institution (pratique autant qu’imaginaire) de la société devrait être posée préalablement à tout autre débat (sur la sortie de l’euro et la monnaie, par exemple). Resterait à la «gauche de gouvernement» de cesser de l’être : de se dessaisir de ce fétiche de pouvoir auquel se réduit désormais le projet social-démocrate et de se laisser guider par les réponses, les initiatives et les inventions venues d’en bas.


Dimitris Alexakis, 8 mars 2017, Athènes


[1] Tiré d’une intervention au Nouveau théâtre de Montreuil lors de la table ronde «Alternatives et Solidarités en Grèce» animée par Alexis Cukier, avec Marie-Laure Coulmin-Koutsaftís, Pános Angelópoulos et Yánnis Youloúntas, le samedi 4 mars 2017. Le titre de ce texte reprend celui d’un roman de Patrick Modiano, Fleurs de ruines.

[2] «Directeurs artistiques» ou «programmateurs» appelés dans le même temps à s’occuper de photographie, de graphisme, de médias sociaux, du DJ set, de comptabilité, du nettoyage de l’espace, du déplacement des décors et des sièges pour la représentation du lendemain, de la rédaction des communiqués de presse, du bar : la polyvalence du précariat est là mobilisée en permanence, comme une condition de survie.

[3] L’expression est empruntée à Chrístos Giovanópoulos, ancien membre fondateur de la structure de solidarité Solidarity For All, dans un entretien à paraître prochainement.

[4] Voir le récent essai d’Arundhati Roy qui évoque le cas des fondations privées en Inde : Le Capitalisme, une histoire de fantômes, Gallimard, 2016.

[5] L’expression est empruntée à Sophie Wahnich, Le Radeau démocratique, Lignes éd., 2017.

[6] La Fondation Onassis et le Centre culturel de la Fondation Niarchos sont tous deux situés le long de l’avenue Syngroú, en direction du front de mer. Voir à ce sujet les articles (en grec) publiés dans le mensuel Unfollow par Èffi Yannopoúlou et Thèóphilos Tramboúlis : https://left.gr/news/politismos-ton-idrymaton-i-eggrafi-tis-istorias

[7] http://www.newyorker.com/magazine/2010/03/29/big-art-big-money

[8] De nombreuses tables rondes organisées par la Fondation Onassis évoquent ainsi le passage d’un État social et interventionniste à un État réduit au rôle de régulateur, voire de simple intermédiaire entre «société civile» et secteur privé.

[9] http://crisisobs.gr/en/

http://www.eliamep.gr/en/about-us/funding/

[10] Et d’y avoir le cas échéant un droit de regard sur la programmation ; voir le scandale récent lié à la déprogrammation subite de la représentation L’Équilibre de Nash, au motif que les textes d’un membre incarcéré de l’organisation d’extrême-gauche armée 17 Novembre y étaient rapportés : http://www.humanite.fr/en-grece-la-democratie-en-joue-600230 Il est également intéressant de noter que la Fondation Louis Vuitton était en 2016 partenaire du Théâtre de l’Odéon, à Paris, comme de s’interroger sur les raisons poussant l’Odéon, en 2015, à devenir «le premier théâtre public à se lancer dans le crowdfunding».

[11] Parfois de l’ordre de 50 ou de 60% des entrées.

[12] Structure originale, fondée en 2012 par d’anciens activistes du parti Sýriza, d’appui et de mise en réseau des initiatives de solidarité à travers la Grèce.

[13] L’expression est utilisée par Chrístos Giovanópoulos, ancien membre fondateur de Solidarity For All, dans un entretien à paraître prochainement.

[14] C’est tout l’intérêt des travaux de la sociologue chilienne Marta Harnecker.

[15] Assemblées populaires des places, mai – septembre 2011.

 

CR réunion collectif du 13 mars 2017

Réunion du collectif « Citoyens de Grenoble contre l’austérité en Grèce et en Europe » du 13/3/2017

Présents : Christine R., Lucienne L., Bernard L., Liliane C., Béatrice R., François C., Catherine S., Nicole C., Isabelle R., Michèle M, Max F. Excusés : Jojo, M Claude.

1) Rencontre nationale des collectifs à Paris le 25/2/2017

Le compte rendu n’a pas encore été reçu et dans l’attente un retour succinct :

Environ 21 personnes. Collectifs représentés : Paris, Avec les grecs 56, Bretagne, Poitiers, Lyon, Anepos Tarn (collectif artistique et solidaire), Marseille, Grenoble mais beaucoup de collectif étaient absents ( Rennes, Nîmes…)

Retour sur la caravane solidaire vers la Grèce qui a eu lieu en octobre 2016 :
Chaque participant a livré son ressenti sur la caravane et a expliqué ses actions depuis la dernière réunion des collectifs. D’une façon générale la partie de la caravane en France n’a pas posé de problème et la caravane a été bien accueillie en Grèce, avec cependant un manque de coordination et d’objectifs clairement identifiés.

Mais il n’y a pas eu de véritable bilan avec listage des aspects positifs et négatifs et pas de bilan financier.
Un groupe spécifique de coordination sera à créer pour facilité l’organisation d’une prochaine caravane.

Charte de fonctionnement du collectif national :
Pour essayer d’organiser au mieux la vie de la structure nationale, un projet a été élaboré par les collectifs de Grenoble, Lyon, Anepos et soutenu par Rennes et Aubagne. Un groupe spécifique organisé par Lyon se réunira pour affiner la charte.

En attendant une déclaration reprenant les grands principes de la charte a été adoptée :
« Les membres des collectifs et comités solidaires du peuple grec, réunis à Paris ce 25 février 2017 :

  • appellent à poursuivre la résistance contre les politiques d’austérité et leurs conséquences dramatiques sur les populations, en Grèce, en France et ailleurs ;
  • réitèrent leur refus de collaborer avec ceux qui appliquent ou prônent ces politiques dévastatrices ;
  • rappellent que l’action de nos collectifs est sur un axe politique et solidaire, pas humanitaire, pour une entraide sans intermédiaire entre les mouvement sociaux qui développent des initiatives solidaires autogérées et/ou auto-organisées ;
  • proposent une information publique sur ces thèmes, notamment sur la situation réelle en Grèce, en distinguant une liste électronique d’information accessible à tous et une autre liste réservée aux discussions entre collectifs ; un groupe de travail est chargé de cette mise en œuvre ;
  • décident d’élaborer une charte de principes pour le bon fonctionnement du réseau des collectifs (qui restent totalement autonomes), sur la base de l’appel parisien de février 2013, de la déclaration commune du 20 février 2016 et d’un projet de charte porté ce jour par cinq collectifs ; un groupe de travail est chargé de préparer cette charte qui sera discutée dans les collectifs et adoptée avant l’été 2017.

Rien n’est fini, tout commence. L’austérité n’est pas une fatalité. La destruction croissante du bien commun, de la santé et de la vie, nécessite que nous redoublions d’efforts pour lutter, dans la solidarité et la fraternité entre les peuples. »

2) Rencontre avec nos voisins lyonnais

La rencontre prévue le 11 février n’a pas pu se tenir, une nouvelle date est à programmer, cela sera un samedi après-midi à La Tour du Pin., Christine prépare un Framadate.

3) Convoi solidaire vers la Grèce organisé par Anepos

Le 25 mars, une vingtaine de fourgons partiront de France, 1 de Belgique, 1 de Suisse et 1 d’Espagne partirons vers la Grèce. Ils seront remplis de nourriture, de produits d’hygiène, de jouets … de tout ce qui manque à de nombreux Grecs et Réfugiés. En Isère des produits collectés à Grenoble, dans le Trièves, à St Martin d’Uriage, à Barraux, à Pontcharra, des dessins d’enfants de Vaulnaveys le bas, partiront dans 2 fourgons savoyards.

Le collectif de Grenoble coordonne la récolte et donne rendez-vous le 14 mars de 13h à 14h sur le parking de la MC2 pour charger toutes les fournitures récoltées et se rendre à 15h au point de rendez-vous à Pontchara avec Nicolas le chauffeur du véhicule et l’association La Bassine.

4) Soirée de soutien aux travailleurs de VIOME le 29 mars à la MDA de Grenoble

– recensement des envois d’annonce déjà faits et repérage des manques (CCFD, Nuit debout …)relancer l’annonce vers le 23 mars,

– le CADTM apportera des panneaux sur les VIOME et sur la Grèce, ainsi que des textes informatifs sur la situation en Grèce.
– Max tirera des bons de commande, des listes des produits disponibles et la pétition de soutien lancée par Lyon.
– nous essaierons de rentrer en communication vers 21h30 ( 22h30 en Grèce) avec un des travailleurs de VIOME pour qu’il nous explique la situation présente en complément du film (Next stop: Utopia) diffusé en début de soirée. Un ou deux traducteurs ou traductrices seront sollicités par Christine.

– préparer des questions à envoyer dès maintenant par l’intermédiaire de Nicolas de Lyon pour connaître la situation actuelle afin de pallier à un problème technique de liaison et pouvoir répondre au public.
– la clôture des commandes a lieu le 5 avril, Béatrice récupèrera les dernières quelques jours plus tard dans la boite d’Attac. La commande sera envoyée à Thessalonique aux alentours du 10 avril, le camion de livraison devrait partir le vendredi 21 avril, pour un distribution aux alentours du 27 avril. Confirmer ces dates au PG qui a donné son accord pour la mise à disposition des locaux (Christine).

5) Film d’Angélique Kourounis « Aube dorée : une affaire personnelle » le 10 avril au cinéma Le Club

– un petit buffet (chacun d’entre nous apporte quelque chose à manger) sera organisé pour le repas avec Angélique, il aura lieu dans la petite salle à côté du Club avant la projection
– le modérateur de la soirée sera Gérard Collet prévoir un temps de rencontre avec Angélique avant le buffet
– il est à prévoir l’hébergement d’Angélique ( 2p) avec possibilité de parking sécurisé pour son fourgon

6) Prochaine réunion du collectif

jeudi 20 avril 2017 de 17h à 19h salle 210.

L’austérité pousse les Grecs vers la dépression collective

par Fabien Perrier

L’Eurogroupe qui se réunit ce lundi 20 février réclame de nouvelles mesures d’austérité à la Grèce. Le spectre du « Grexit » refait surface alors que l’économie du pays est exsangue.

Athènes doit rembourser 7 milliards d’euros à ses créanciers avant l’été. Or, comme depuis 2011, elle ne pourra pas honorer ses dettes sans toucher au préalable la dernière tranche de crédit que le FMI et les membres de la zone euro lui ont promise en juillet 2015 (86 milliards d’euros). Les créanciers réclament de nouvelles mesures… alors que la population est à bout.

« Tous les ans, la situation scolaire se dégrade. Je n’ai plus d’espoir d’amélioration ! » La mine de Dimitris Panogiotakopoulos s’allonge dès qu’il parle de l’école primaire qu’il dirige, à Elefsina, à une vingtaine de kilomètres d’Athènes. « Entre 2009 et aujourd’hui, le budget a diminué de 70%, confie-t-il. Nous n’avons même pas de quoi acheter les craies. Nous avons dû organiser une collecte sur la place centrale de la ville pour nous procurer les fournitures scolaires ». Kostas Vamvakas, professeur de sport, fait le même constat : la situation est identique dans son lycée. Face à l’urgence, les deux hommes ont monté un réseau de solidarité. « Certains gamins n’ont même pas un blouson à se mettre sur le dos cet hiver ! Ils en pleurent avec ce froid », témoigne l’enseignant. Dans le bureau du directeur, tous sont couverts : le chauffage est en marche mais au minimum.

Une ville industrielle naguère prospère

Kostas Vamvakas est amer : « En 2015, nous espérions qu’Alexis Tsipras [l’actuel premier ministre] et son parti, Syriza [la gauche grecque] stoppent la descente aux enfers ». Pour Dimitris Panogiotakopoulos, seule une sortie de l’euro mettra un terme aux problèmes.
Pour se justifier, il décrit « sa ville » avant la crise. Dans cette banlieue ouvrière en bord de mer, les cheminées des raffineries crachaient leurs fumées noires de jour comme de nuit. Les chantiers navals tournaient à plein régime. Deux entreprises métallurgiques et deux cimenteries bordaient une route nationale souvent embouteillée. Les commerces étaient florissants.

Mais, avec la crise, des réformes drastiques sont exigées. Les trois « mémorandums » signés par les gouvernements grecs avec les créanciers en échange de prêts pour éviter au pays le défaut de paiement dictent un programme impitoyable : baisses des salaires et des pensions, suppression des conventions collectives remplacées par des contrats individuels, hausses d’impôts et des taxes, privatisations, coupes dans les dépenses publiques…

Aujourd’hui, « l’industrie est ruinée », souligne le directeur de l’école, par ailleurs élu de l’agglomération d’Elefsina-Aspropyrgos. Sur la route nationale, toutes les entreprises sont fermées. Les devantures de nombreux magasins affichent « à vendre » ou « à louer ». Dans cette ville qui sera capitale européenne de la culture en 2021, un tiers des 30 000 habitants sont au chômage.

Des salaires coupés en deux

« Depuis 2009, mon chiffre d’affaires a baissé de plus de 60% », se désole Giorgia Fratzeskaki. Cette coiffeuse à Aspropyrgos se demande combien de temps son salon restera ouvert. Elle vit sur la pension de son mari, qui a pourtant fondu de moitié. A 58 ans, elle « espère tenir encore deux ans… mais ce n’est pas gagné ! La fiscalité augmente et maintenant, nous versons même certaines taxes par anticipation. Cela pousse à travailler au noir », dénonce-t-elle.

Maria Papada, 50 ans, renchérit : « Mon salaire annuel est moitié moins qu’en 2017, 830 euros par mois, mais je dois bosser quatorze heures par jour. Les heures supplémentaires, ils ne nous les payent plus. Les primes de Noël et de Pâques ont disparu. » La discussion s’anime. La tante de Giorgia souligne : « Mon fils est chercheur en cancérologie. A l’université à Athènes, il n’y avait même pas de papier dans les toilettes ! Il est parti en novembre 2015. En Arabie Saoudite. » Et toutes proclament : « Avec l’euro et les mémorandums, la Grèce ne peut pas survivre. »

« Les Grecs ne font plus de projet d’enfant, de vie… »

Seule certitude : le pays connaît une véritable paupérisation. Chercheur à l’Institut du Travail, Christos Triandafilou précise que plus d’un tiers des Grecs sont aujourd’hui en risque de pauvreté ou d’exclusion sociale ; 21,4% vivent déjà sous le seuil de pauvreté. Et il souligne qu’avec les baisses successives des salaires, le seuil de pauvreté a baissé. « Il était de 6120 euros en 2007 pour une personne seule, il est désormais de 4512 euros. » Dans ce contexte, le découragement est généralisé : le nombre de chômeurs longue durée a explosé « et eux n’ont aucune indemnité ni couverture sociale. »

« L’instabilité et l’insécurité sont les deux mots qui décrivent l’état psychologique actuel des Grecs », selon Christos Koutsaftis. Psychologue et psychanalyste, il exerce, lui, à Glyfada, un quartier huppé en bord de mer. « Les Grecs ne peuvent plus faire de projet d’enfant, de vie… Sur trois ou quatre mois, c’est le maximum. » Pourquoi ? « Il est impossible de construire quand on ne sait même pas si l’on aura encore son emploi dans six mois. » Après sept années de crise et trois mémorandums (un quatrième est évoqué avec insistance), la société grecque est en dépression collective.

Source : Le Temps

http://www.cadtm.org/L-austerite-pousse-les-Grecs-vers

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