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Point de situation par SOS MEDITERRANEE

La société civile reste mobilisée malgré les obstacles, pendant que les États regardent ailleurs

Cette publication de SOS MEDITERRANEE a pour but de faire le point sur les évènements qui se sont déroulés en Méditerranée centrale au cours des deux dernières semaines. Il ne s’agit pas de livrer une revue exhaustive des faits, mais plutôt de fournir des informations sur l’actualité de la recherche et du sauvetage dans la zone où nous opérons depuis 2016, sur la base de rapports publiés par différentes ONG et organisations internationales ainsi que par la presse internationale.

Un nombre de morts important, des centaines de personnes disparues ou ramenées de force en Libye

Cette année encore, le mois d’août a été particulièrement meurtrier sur la route maritime migratoire la plus dangereuse du monde. Selon plusieurs rapports des ONG œuvrant dans ce domaine, de nombreuses embarcations de fortune ont été signalées en détresse en Méditerranée centrale, et leurs messages de détresse n’ont reçu que très rarement des réponses des autorités maritimes, ou bien des réponses extrêmement tardives. Selon l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), 69 personnes sont mortes en tentant la traversée au mois d’août. Les témoignages et informations collectés la semaine du 17 août indiquent que la ligne d’urgence Alarm Phone a reporté beaucoup d’autres disparitions et certainement des morts au cours d’au moins quatre naufrages. Plusieurs corps ont été rejetés sur la côte libyenne. L’agence des Nations-Unies pour les réfugiés -UNHCR- et l’OIM ont appelé à une action d’urgence, annonçant la perte de 45 vies humaines le 17 août dans « le plus grand naufrage de l’année au large des côtes libyennes ». Les circonstances entourant cet événement dramatique ont été révélées par les témoignages de survivants ramenés en Libye : le bateau a pris feu et plusieurs personnes ont été brûlées.

Le 28 août, le navire de sauvetage Louise Michel a récupéré un corps sans vie dans un canot pneumatique en détresse. Selon le récit des 130 rescapés, trois personnes sont mortes pendant la traversée, en plus de la personne décédée qui a été transférée plus tard à Lampedusa par les garde-côtes italiens.

Selon l’OIM, au moins 700 personnes ont été interceptées en mer et ramenées de force en Libye au cours de la dernière quinzaine d’août.

De nouveaux bateaux civils de sauvetage en Méditerranée centrale

Les navires civils de recherche et de sauvetage Sea Watch 3 et l’Ocean Viking de SOS MEDITERRANEE sont toujours retenus par les autorités italiennes à Porto Empedocle, en Sicile. Le Alan Kurdi de l’ONG Sea Eye et l’Aita Mari de Salvamento Maritimo Humanitario (SMH) ne peuvent toujours pas reprendre leur mission de sauvetage, à la suite des inspections réalisées par les autorités italiennes au printemps. Pendant ce temps, la société civile européenne reste mobilisée pour assurer présence et disponibilité pour la recherche et le sauvetage (SAR) en Méditerranée centrale. La seconde moitié du mois d’août a vu l’arrivée de deux nouvelles ressources SAR :

  • le Sea-Watch 4, un navire acheté par Sea-Watch et le groupement United4Rescue, dirigé par l’Eglise protestante allemande. Médecins Sans Frontières (MSF) fournit l’assistance médicale et humanitaire à bord ;
  • le navire Louise Michel, acquis grâce au produit de la vente d’œuvres de l’artiste de rue Banksy.

A eux seuls, ces navires ont porté secours à plus de 400 personnes en détresse en mer.

De plus, les deux navires de l’ONG de secours en mer Proactiva-Open Arms, l’Astral et l’Open Arms, sont revenus en Méditerranée centrale après plusieurs mois d’absence, principalement grâce aux réparations techniques réalisées par l’Open Arms.

Des bateaux de commerce et d’ONG immobilisés : les survivants abandonnés en mer

Le mois dernier, les Etats ont franchi un nouveau cap dans le mépris de leurs obligations en terme de droit maritime en ce qui a trait à la recherche et au sauvetage en Méditerranée centrale. Les difficultés subies en mer par les navires ayant secouru des personnes en détresse et ne pouvant pas débarquer les rescapés se multiplient depuis plus de deux ans. Elles touchent aussi bien les ONG que les navires de commerce. Des rescapés vulnérables sont abandonnés pendant des jours ou des semaines dans des conditions précaires : un bateau ne peut pas être considéré comme un lieu sûr durable pour les personnes secourues.

Le 4 août, le pétrolier Maersk Etienne a secouru 27 personnes, répondant à l’appel de détresse d’une petite embarcation et, selon la compagnie de transport maritime Maersk, sur les instructions du Centre de coordination des secours de Malte. Depuis, le navire subit le plus long blocage jamais documenté à ce jour en Méditerranée centrale. Aucune solution n’a encore été trouvée pour le débarquement des personnes secourues vers un lieu sûr, comme l’impose le droit maritime. Appelant à un débarquement immédiat le 29 août, l’OIM et l’UNHCR ont déclaré qu’« il est vital que [les navires de commerce] soient autorisés à débarquer promptement les rescapés secourus car, sans traitement rapide, les capitaines de navires de commerce pourraient hésiter à répondre aux appels de détresse de peur d’être ensuite bloqués en mer pendant des semaines ». Une préoccupation partagée par SOS MEDITERRANEE, car plus de vies seraient perdues à l’avenir si des navires pouvant aider dans cette zone étaient dissuadés de remplir leur devoir de porter secours.

Le Sea Watch 4 a vécu une situation similaire, devant attendre plusieurs jours en mer sans solution en vue pour le débarquement de plus de 350 personnes secourues. Certaines d’entre elles étaient en mer depuis plus de onze jours quand elles ont finalement été informées de l’organisation de leur transfert vers un bateau de quarantaine à Palerme, prévu le 2 septembre.

Les derniers chiffres de l’OIM sur les décès de migrants en Méditerranée centrale à ce jour.

Crédit photo : Yann Levy / SOS MEDITERRANEE

Source https://www.sosmediterranee.fr/journal-de-bord/regards-sur-la-mediterranee-centrale-2-septembre

Rescapés débarqués en Italie

Réunis sur le navire de l’ONG allemande, les quelque 350 rescapés du Sea Watch 4 et du Louise Michel pourront débarquer au port de Palerme en Sicile après une période de quarantaine en raison de la pandémie de Covid-19, a-t-on appris auprès d’une porte-parole.

Onze jours après son tout premier sauvetage, le Sea Watch 4 de l’ONG allemande éponyme a été autorisé, mardi 1er septembre, à débarquer ses 353 rescapés présents à bord au port de Palerme en Sicile. Covid oblige, tous – y compris l’équipage – devront d’abord passer par une quarantaine de deux semaines sur un bateau amarré à quai et mis à disposition par les autorités italiennes.

« Nous sommes très soulagés car la situation à bord se détériorait de jour en jour. Tout le monde était épuisé à commencer par l’équipage, mais aussi les rescapés qui sont vraiment poussés dans leurs retranchements pour tenir le coup », commente une porte-parole de Sea-Watch, jointe par InfoMigrants.

L’objectif est désormais de retourner en mer « aussi vite que possible », poursuit-elle. « Mais nous craignons que le navire ne soit immobilisé comme le Sea Watch 3 ou l’Ocean Viking. Cela serait un vrai désastre pour nous, d’autant plus que nous faisons en sorte de respecter toutes les instructions et les mesures sanitaires imposées par les autorités. »

Parmi les rescapés, plus de 200 ont été secourus par le Sea Watch 4 entre les 22 et 24 août. Les 150 autres ont été récupérés lors de deux sauvetages la semaine dernière effectués par le Louise Michel, un nouveau navire humanitaire affrété grâce à l’aide du célèbre graffeur britannique Banksy.

Surpeuplé de rescapés entassés dans de mauvaises conditions, le Louise Michel avait rapidement lancé un appel de détresse pour la prise en charge des migrants, déplorant même un mort à bord. Le Sea Watch 4 a alors proposé d’accueillir les rescapés du Louise Michel. Peu avant ce transfert, les garde-côtes italiens avaient également évacué 49 passagers particulièrement fragiles pour les emmener à Lampedusa.

  Selon l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), plus de 20 000 migrants ont perdu la vie en Méditerranée depuis 2014. Les départs depuis les côtes libyennes n’ont jamais été aussi nombreux : pour la seule période du 24 au 31 août, 650 personnes sont arrivées en Italie et plus de 400 ont été interceptées et ramenées en Libye par les garde-côtes. Au moins 359 personnes sont par ailleurs décédées ou ont été portées disparues cette année après avoir emprunté la route de la Méditerranée centrale.

https://www.infomigrants.net/fr/post/26981/les-rescapes-du-sea-watch-4-et-du-louise-michel-autorises-a-debarquer-en-italie

Grèce : les migrants du camp de Malakasa dans l’impasse

Dans le camp de Malakasa situé près d’Athènes, les migrants ont tout le mal du monde à entamer une procédure de demande d’asile. Un Gambien arrivé au mois de mars a accepté de raconter par SMS sa situation à InfoMigrants.

Robert* n’a que 33 ans mais sa vie semble à l’arrêt. Depuis six mois, le Gambien vit dans le camp de Malakasa près d’Athènes. Peu après son arrivée, le camp a été placé en quarantaine après qu’une personne y a été testée positive au coronavirus.

Malakasa est divisé en deux nouvelles sections. Robert se trouve à Malakasa 2, un terrain militaire qui longe Malakasa 1. Les deux sites sont officiellement gérés par les autorités grecques, avec le soutien de l’OIM, l’Organisation internationale pour les migrations.

Les migrants vivent dans des conteneurs et dans des tentes sous lesquelles il fait actuellement très chaud. Robert craint que ces tentes n’offrent pas suffisamment de protection en hiver. « La Croix-Rouge fait de son mieux pour assurer des soins médicaux… Les autorités nous ont donné des masques et du savon. Mais la nourriture est très mauvaise, à tel point que l’on ne prend que ce qu’ils nous donnent les dimanches et les mercredis », a-t-il confié à InfoMigrants.

« Le mercredi c’est du poulet et du riz. Autrement, c’est des haricots tous les jours, alors les gens ne les prennent pas. On a faim la plupart du temps. »

« Nous leur avons demandé de nous donner l’argent, on peut se faire à manger nous-mêmes. Reste que nous n’avons pas de cuisine et ils nous empêchent de cuisiner parce que nous sommes sur un terrain militaire. Au début, l’OIM était responsable de la nourriture et c’était beaucoup mieux. Le gouvernement a coupé les dépenses, alors l’OIM a décidé de ne plus payer de nourriture avec l’argent que le gouvernement dépense chaque jour par migrant. C’était dix euros, puis ils ont réduit à cinq euros. »

Prises de rendez-vous par Skype 

Le principal défi pour les migrants de Malakasa est de pouvoir s’enregistrer. Quand Robert a contacté InfoMigrants, il a expliqué que les autorités avaient informé le camp que chacun devait s’occuper lui-même de son rendez-vous pour informer le service d’asile grec (GAS) de sa volonté de faire une demande d’asile.

Pour cela, il fallait passer un appel avec son smartphone via l’application de vidéoconférence Skype.

L’appel ne peut se faire uniquement à certaines heures avec un identifiant Skype. Ce créneau horaire disponible dépend de la langue que parle la personne et selon le lieu où elle se trouve, que ce soit Thessalonique, Athènes ou en Crète. (Sur les autres îles grecques, la procédure est différente)

« Cela a empêché beaucoup de personnes de faire leur demande d’asile. Les jours et les créneaux horaires prévus n’étaient pas suffisants. Par exemple, les migrants parlant le français et l’anglais ne peuvent appeler que les mercredis de 8 à 9 heures du matin. Se frayer un chemin pour déposer une demande d’asile est difficile ».

« C’est très frustrant. Seule une poignée de personnes savent comment se servir d’internet. Il y ici a beaucoup de gens vulnérables qui ont besoin d’être protégés. J’ai déjà tenté trois fois de prendre un rendez-vous sur Skype mais la ligne est toujours occupée. Je vais encore devoir essayer mercredi prochain. »

Pour trouver de l’aide et des information concernant l’enregistrement : https://www.mobileinfoteam.org/skype

C’était en juillet. Depuis, trois mercredis supplémentaires sont passés et Robert n’a toujours pas réussi à joindre quelqu’un. Fin juillet, il n’avait toujours pas rempli un seul document en lien avec la procédure d’asile. Alors le sentiment de frustration s’empare de plus en plus du camp et les migrants demandent une réaction de l’OIM.

« Quand j’ai demandé à l’avocate de l’OIM, elle a dit que le gouvernement était encore supposé faire quelque chose concernant notre cas et qu’il fallait laisser les gens prendre leur rendez-vous via Skype. Si les autorités nous aidaient à faire nos demandes, nous pourrions trouver du travail. Mais en attendant, nous sommes ici à attendre, sans aucune annonce des autorités. »

« En tant qu’organisation d’aide aux migrants, qu’a fait l’OIM pour persuader le ministère de la migration d’envoyer une équipe à Malakasa pour accélérer nos procédures d’asile ? Ça devient frustrant. Ça fait presque six mois que nous sommes ici. Rien n’a été fait et il y a des personnes vulnérables qui ont besoin d’assistance. »

InfoMigrants a soumis les questions de Robert à l’OIM. Voici la réponse d’un porte-parole de l’agence onusienne datant du 24 juillet :

« Il y a quelques mois, le gouvernement grec a voté une loi dont le but était entre autres d’accélérer les procédures d’asile. Selon de récentes annonces du ministère de la Migration et de l’Asile, le nombre de demandes d’asile traitées a augmenté en 2020 comparé à 2019. A cause du grand nombre de demandes en suspens, des délais persistent, mais des avancées pour accélérer les procédures ont été réalisés. »

Sur recommandation de l’OIM, nous avons posé la même question au service d’asile grec, mais nous n’avons pas reçu de réponse à ce jour, jeudi 13 août 2020.

Concernant le système de pré-enregistrement via Skype, le porte-parole de l’OIM nous a redirigés vers un système d’enregistrement en ligne lancé par le GAS en avril. L’application est disponible en anglais et en grec et l’OIM dit mettre à disposition du Wi-Fi et un soutien juridique dans les camps. Néanmoins, avant de soumettre son dossier en ligne, il faut être pré-enregistré et disposer d’un numéro d’identifiant, ce qui veut dire qu’il est toujours nécessaire de prendre un rendez-vous via Skype.

Nous avons aussi demandé à l’OIM de réagir aux craintes concernant le manque de nourriture à Malakasa 1 et 2. Le porte-parole a confirmé que c’est bien l’armée grecque qui s’occupe de la distribution de repas dans la section Malakasa 2, tout en ajoutant :

« A Malakasa 1, le nombre de demandeurs d’asile non enregistrés et de réfugiés a considérablement augmenté ces dernières semaines. L’OIM fait de son mieux pour aider un maximum de familles vulnérables qui vivent dans des tentes improvisées. L’OIM distribue plus de 700 paniers de nourriture par semaine et coordonne d’autres distributions avec des organisations bénévoles. »

* Son prénom a été modifié

Traduction : Marco Wolter

Source https://www.infomigrants.net/fr/post/26757/grece-les-migrants-du-camp-de-malakasa-dans-l-impasse?fbclid=IwAR1yy6o5vqAKFhfHCuYxP5SpvrAJe-EYsCOIcRn79Cn_6Xm6812-YcK1Ba8

Expulsions de demandeurs d’asile

Expulsions de demandeurs d’asile : la Grèce « a profité du Covid pour durcir sa politique migratoire »

Par Julia Dumont

Dans une récente enquête, le New York Times affirme que la Grèce a expulsé illégalement plus de 1 000 demandeurs d’asile hors des frontières européennes au cours des derniers mois. Interrogé par InfoMigrants, Matthieu Tardis, chercheur au Centre migrations et citoyennetés de l’IFRI, ne se dit pas particulièrement surpris par ces faits.

L’enquête publiée par le New York Times vendredi 14 août confirme les témoignages recueillis ces derniers mois par InfoMigrants sur des refoulements d’embarcations de migrants par des garde-côtes grecs en mer Égée.

Le quotidien américain a pu interroger plusieurs personnes ayant été victimes de ces refoulements illégaux alors même que certains se trouvaient déjà sur le sol grec. C’est le cas d’une demandeuse d’asile syrienne qui affirme avoir été interpellée fin juillet dans le centre de détention de Rhodes, en compagnie de 22 autres personnes, dont 2 bébés. Elle explique qu’ils ont été abandonnés en mer sur une embarcation de fortune sans moteur et secourus par les garde-côtes turcs.

Selon cette enquête, des migrants ont également été contraints de monter dans des canots de sauvetage percés et laissés à la dérive à la frontière entre les eaux turques et grecques, tandis que d’autres ont été laissés à la dérive dans leurs propres embarcations après que des fonctionnaires grecs ont débranché leurs moteurs.

Le New York Times a également recueilli le témoignage de Amjad Naim. Cet étudiant palestinien de 24 ans a raconté au quotidien qu’en mai dernier, alors qu’il approchait des côtes de Samos avec un groupe de 30 personnes, leur embarcation a été interceptée par des garde-côtes grecs. Ces derniers ont transféré les migrants à bord de deux petits canots gonflables, incapables de supporter le poids d’une quinzaine de personnes, puis les ont tractés en direction de la Turquie.

Selon des experts, interrogés par le New York Times, ces pratiques illégales auraient pris de l’ampleur durant la période de confinement en Europe liée à la pandémie de coronavirus.

Le Premier grec Kyriakos Mitsotakis a catégoriquement réfuté les accusations formulées dans le quotidien et a affirmé qu’il s’agissait de « désinformation » orchestrée par la Turquie. « La Grèce est un pays qui respecte l’État de droit, nous avons accordé l’asile à des dizaines de milliers de personnes », a-t-il déclaré mercredi soir à la chaîne américaine CNN.

Matthieu Tardis, chercheur au Centre migrations et citoyennetés de l’IFRI (Institut français des relations internationales) a répondu aux questions d’InfoMigrants sur ces refoulements.

InfoMigrants : Que disent les lois européennes et grecques sur ces refoulements ?

Matthieu Tardis : Les refoulements, au sens juridique du terme, qui concernent les réfugiés et les demandeurs d’asile, sont interdits en droit international selon la Convention de Genève de 1951, et aussi en droit européen selon la Convention européenne des droits de l’Homme. Ils le sont encore plus dans les conditions décrites dans l’enquête du New York Times. Toute personne qui souhaite une protection en Europe doit pouvoir en faire la demande.

Est-ce la première fois que la Grèce adopte ce genre de pratiques ?

Non, j’ai le souvenir, dans les années 2000, d’un rapport de l’association allemande Pro Asyl sur des pratiques similaires de refoulements de bateaux qui arrivaient en mer Égée et des cas de mauvais traitements, y compris de la part de personnes dont on ne savait pas si elles étaient des officiers grecs parce qu’elles étaient masquées. Donc, [les faits rapportés par le New York Times] ne m’étonnent qu’à moitié.

C’est ce rapport-là qui avait contribué à lancer un débat au niveau du Parlement européen sur la suspension des renvois Dublin vers la Grèce parce qu’il n’y avait pas de bonnes conditions d’accueil des demandeurs d’asile dans le pays. Dans un arrêt de 2011, la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH) avait décidé qu’on ne pouvait plus renvoyer les demandeurs d’asile en Grèce. Cela a duré jusqu’en 2016-2017.

La CEDH pourrait certainement condamner la Grèce pour ces pratiques de ‘push-backs’ démontrées par le New York Times.

Le gouvernement conservateur du Premier ministre Kyriakos Mitsotakis affiche volontiers sa fermeté vis-à-vis des demandeurs d’asile. Est-ce que ces refoulements font partie d’une stratégie politique ?

Ce que l’on voit aujourd’hui est lié au gouvernement actuel qui est pratiquement populiste. Beaucoup des politiques coercitives mises en œuvre contre les migrants sont en réalité destinées à l’opinion publique.

Le gouvernement grec a profité de la pandémie pour durcir sa politique migratoire. Aujourd’hui, la question de l’état de droit en Europe se pose vraiment. Les contre-pouvoirs sont affaiblis parce qu’il y a une prééminence de l’idée que pour la survie de l’Europe, il faut arrêter l’immigration dite irrégulière, que tout est permis pour cela. C’est la même chose en Italie.

Il est sans doute aussi temps de faire le bilan de l’investissement financier européen pour l’accueil des réfugiés en Grèce. La Grèce a reçu des centaines de millions d’euros ainsi que de l’aide humanitaire, sans parler des milliers de bénévoles d’associations internationales. Qu’est-ce qu’il reste de tout cela ? Pas grand chose j’ai l’impression.

Source https://www.infomigrants.net/fr/post/26723/expulsions-de-demandeurs-d-asile-la-grece-a-profite-du-covid-pour-durcir-sa-politique-migratoire

Migrants repoussés vers la Turquie

Des soldats de l’armée allemande ont assuré que des embarcations se dirigeant vers la Grèce avaient été repoussées vers les eaux territoriales turques. Ils ont ainsi confirmé les accusations portées par différentes associations et ONG qui viennent en aide aux migrants.

L’information a fait surface lors d’une séance de questions au Parlement allemand. Le député Andrej Hunko, du parti de gauche Die Linke, cherchait à savoir si des navires allemands avaient observé la garde-côtière grecque ou des bateaux de l’opération de l’agence européenne de protection des frontières Frontex faire barrage à des embarcations de migrants.

Le député avait alors expliqué qu’il voulait avant tout savoir si des migrants étaient « repoussés vers les eaux turques ». En réponse, le gouvernement a affirmé que le 19 juin dernier, le navire allemand « Berlin », actuellement à la tête d’une force navale multinationale de l’OTAN, avait bien observé ce genre de refoulements.

Le « Berlin » a pour mission de surveiller la mer et de coordonner les opérations avec les pays riverains dans le cadre de son mandat au sein de Frontex. Le navire supervise aussi des centres de recherche et de sauvetage dans la région. « Le gouvernent allemand est en permanente communication avec le gouvernent grec et rappelle les règles édictée par le droit international », explique l’exécutif allemand.Selon des informations de l’agence de presse dpa, au moins trois cas d’embarcations repoussées vers les eaux turques auraient été documentées par les autorités allemandes.

Dans le même temps, alors que des allégations circulent sur les réseaux sociaux au sujet d’un incident au large de l’île de Lesbos, la garde-côtière grecque a répondu ne pas être au courant.

D’autres medias rapportent que des migrants seraient morts apès avoir été repoussés illégalement dans les eaux de la mer Égée, mais ces informations ne sont pas confirmées.

Andrej Hunko a appelé l’Union européenne à « réagir immédiatement sur ces incidents désormais documentés par le gouvernement allemand ». Le député voudrait par ailleurs que l’agence Frontex suspende ses opérations alors que des soupçons pèsent sur le gouvernement grec qui fermerait les yeux lorsque des bateaux sont repoussés. Une inaction qui violerait la Convention européenne des droits de l’homme.

Traduction : Marco Wolter

Retour de migrants économiques

La Grèce débute les « retours volontaires » de « migrants économiques

Par Charlotte Oberti

Un premier vol transportant des « migrants économiques » retournant « volontairement » dans leur pays d’origine, est parti d’Athènes jeudi, dans le cadre d’un programme de l’Union européenne. Au total, 5 000 personnes se verront proposer des incitations au départ de 2 000 euros.

Quelque 134 migrants irakiens  (dont 38 enfants – dont deux non accompagnés). ont « volontairement » quitté Athènes jeudi 6 août pour rejoindre leur pays d’origine. Des photos de leur embarquement dans l’avion montrent des hommes aux visages masqués. Certains brandissent fièrement leur passeport et agitent les bras en guise d’adieu.

Il s’agit du « plus important retour sur une base volontaire de migrants économiques jamais mis en œuvre dans notre pays, et le plus important en Europe cette année », a déclaré à la presse le porte-parole du gouvernement Stelios Petsas. Ces retours ont lieu dans le cadre d’un programme mis en place en mars par l’Union européenne dans le but de soulager la Grèce qui abrite 120 000 migrants et réfugiés. Ce programme était jusque-là resté en suspens à cause de la pandémie de coronavirus.

Au total, 5 000 migrants, originaires de différents pays, se verront proposer des incitations au départ volontaire de 2 000 euros (2 400 dollars) par personne pour retourner dans leur pays d’origine. Une aide censée leur permettre un nouveau départ, avait expliqué en mars la commissaire européenne aux affaires intérieures Ylva Johansson.

Pour faire partie de ce programme, les candidats doivent être entrés en Grèce avant le 1er janvier 2020, et être toujours présents sur les îles de Leros, Samos, Lesbos, Kos et Chios en mer Egée. Ils disposent d’un mois pour faire leur demande. Ce délai peut être prolongé d’un mois supplémentaire pour atteindre le nombre requis de candidatures si celles-ci sont peu nombreuses, a expliqué le ministère des Migrations.

« Le gouvernement grec leur mène la vie dure »

À l’image de ces 134 Irakiens, les migrants des camps grecs sont de plus en plus nombreux à envisager, résignés, un retour au pays, observe Yonous Muhammadi, le directeur de l’association Greek forum of refugees qui oeuvre aux côtés de migrants. « Jeudi, je me suis rendu au camp de Ritsona [à une heure au nord d’Athènes, NDLR] et j’ai dû répondre à beaucoup de questions de la part des migrants qui voulaient savoir comment faire pour rentrer chez eux », raconte-t-il, évoquant des personnes venues d’Afghanistan, du Pakistan et de pays africains.

« Il est pourtant clair que la situation dans leurs pays d’origine ne sera certainement pas meilleure qu’ici et, même, pour certains, qu’ils y seront en danger, mais ces personnes sont en souffrance. Elles envisagent le départ car le gouvernement grec leur mène la vie dure », poursuit-il affirmant que l’immense majorité des migrants continuent à vouloir rester en Europe.

Outre les conditions de vie effroyables dans les camps des cinq îles de la mer Égée, où s’entassent plus de 25 000 demandeurs d’asile pour 6 000 places et où le confinement ne cesse d’être prolongé, Athènes a récemment annoncé l’expulsion de 11 000 réfugiés de leur logement. Résultat : des migrants n’ont d’autres choix que de dormir dans les parcs du centre-ville ou entassés dans des appartements.

 »Parfois, on trouve 30 ou 40 personnes dans un seul appartement. Les propriétaires peuvent leur prendre 10 euros par personnes et par jour. Et la police, que nous avons prévenue, s’en moque », dénonce Yonous Muhammadi qui pointe le cynisme de l’État.  »Les autorités n’expulsent pas les migrants du pays mais elles rendent leur quotidien impossible. C’est une stratégie pour dissuader ceux qui prévoient de venir, même s’ils envisagent de toute façon cette option en dernier recours. »

« Je connais beaucoup d’Irakiens sur les îles et aucun ne veut retourner en Irak »

Malgré les difficultés du quotidien, un retour au pays semble pour certains être une décision inimaginable. Ce programme européen laisse ainsi Karim, un père de famille irakien demandeur d’asile depuis deux ans, très dubitatif. « Si des personnes veulent rentrer dans leur pays, c’est uniquement parce que c’est très compliqué de vivre de manière digne quand on est demandeur d’asile en Grèce », confie-t-il à InfoMigrants.

De son côté, le choix est fait. « Rentrer, ça voudrait dire mourir », explique Karim, qui a été menacé dans son pays par des milices après avoir vendu de l’alcool dans son magasin de la ville de Bassora. « Je connais beaucoup d’Irakiens sur les îles grecques et aucun d’entre eux ne veut retourner en Irak. »

En parallèle du programme de l’Union européenne, des « retours volontaires » sont également mis en place sous l’égide de l’Organisation internationale pour les migrations en coordination avec les autorités locales. En juillet, un groupe de Pakistanais avait déjà quitté Athènes par avion. Sur place, le décollage avait été suivi d’un regard attentif par le ministre grec des Migrations.

Source https://www.infomigrants.net/fr/post/26504/la-grece-debute-les-retours-volontaires-de-migrants-economiques

SOS Méditerranée Communiqué

L’Ocean Viking détenu en Italie

SOS MEDITERRANEE condamne un harcèlement administratif cynique qui entrave sa mission de sauvetage.

Aujourd’hui, après une inspection de 11 heures menée par les garde-côtes italiens dans le port de Porto Empedocle en Sicile, l’Ocean Viking est détenu par les autorités italiennes. SOS MEDITERRANEE condamne une flagrante manipulation visant à entraver la mission vitale des navires humanitaires.  

  Le principal motif de détention notifié par les garde-côtes italiens s’énonce comme suit : « le navire a transporté plus de personnes que le nombre autorisé par le certificat de sécurité pour navire de charge”. Plus d’un an après avoir été affrété et exploité par SOS MEDITERRANEE, l’Ocean Viking a déjà prouvé qu’il répondait à des normes de sécurité élevées, plus que ce qui est habituellement demandé à un navire. Nous ne comprenons pas pourquoi des remarques mettant en cause la sécurité du navire sont faites maintenant, alors que rien de tel n’a été notifié à ce sujet au cours de quatre inspections, dont deux récentes, effectuées par la même garde-côte italienne, et qu’il n’y a eu aucun changement dans les règlements de sécurité sur ce qui est aujourd’hui mis en cause.

 « L’armateur norvégien de l’Ocean Viking, ainsi que SOS MEDITERRANEE en tant qu’affréteur, ont toujours respecté et garanti un niveau de sécurité maximum pour l’équipage et les rescapés à bord du navire. Ce qui est clair pour nous maintenant, c’est qu’au cours des trois derniers mois, le même argument sur la sécurité a été systématiquement utilisé par les autorités italiennes pour arrêter quatre navires d’ONG menant des opérations de recherche et de sauvetage en Méditerranée centrale. En parallèle, on se demande pourquoi la sécurité n’a pas davantage préoccupé les autorités maritimes alors que, au début du mois, l’Ocean Viking a dû attendre 11 jours pour qu’un port sûr lui soit assigné et qu’un état d’urgence a dû être déclaré à bord« , indique Frédéric Penard, directeur des opérations de SOS MEDITERRANEE.

 Opérer en Méditerranée centrale implique par nature d’être confronté à des situations de détresse répétées avec à chaque fois un nombre potentiellement important de personnes en situation de danger immédiat à secourir (généralement de 50 à 200 personnes). Au cours de la dernière décennie, les garde-côtes italiens ont eux-mêmes secouru plusieurs centaines de personnes à la fois, parfois en quelques heures seulement. C’est bien la réalité de la crise humanitaire de grande ampleur qui se déroule en Méditerranée. En effet, en menant des opérations de sauvetage, conformément à l’obligation qu’a tout capitaine de navire de porter assistance aux personnes en détresse en mer, l’Ocean Viking se retrouve dans la situation de devoir transporter plus de personnes que le nombre spécifié dans les documents de sécurité du navire. Ceci est lié à la nature même des situations d’urgence et de détresse. Cependant, il est très important de rappeler que ces personnes mises en sécurité à bord de l’Ocean Viking doivent, selon le droit maritime, être considérées comme des rescapés, des personnes secourues d’une situation de détresse extrême, et en aucun cas comme des passagers. Les définir comme passagers est une interprétation disproportionnée du cadre juridique maritime dans lequel nous opérons, et constitue un grave mépris pour la situation des multiples embarcations impropres à la navigation que nous avons dû secourir de situations périlleuses au cours des quatre dernières années. Cette interprétation est très préoccupante pour une organisation professionnelle et civile de recherche et de sauvetage telle que SOS MEDITERRANEE.  En effet, les règlements maritimes internationaux qui précisent les normes minimales de construction, d’équipement et d’exploitation des navires, comme la Convention SOLAS, établissent que les naufragés qui se trouvent à bord, conformément à l’obligation  du capitaine de porter assistance, ne doivent pas être comptabilisés dans la vérification de la conformité du navire à la disposition prévue dans la Convention  (article IV (b) de la convention SOLAS)1.

La conséquence du harcèlement administratif systématique auquel sont soumises les ONG est qu’il n’y a actuellement que très peu de navires de sauvetage en capacité de mener des opérations de recherche et de sauvetage en Méditerranée centrale. Pendant ce temps, des personnes continuent de fuir la Libye, surtout l’été lorsque les conditions météorologiques le permettent, et des embarcations se retrouvent en détresse en Méditerranée centrale.  Des corps flottant au milieu de la mer ont été repérés.

« Il y a une tendance claire à exercer de manière excessive et abusive un harcèlement administratif continu envers les ONG, dont le seul but est d’empêcher leurs activités de sauvetage qui comblent le vide laissé par les États européens en la matière. Mais stopper l’ambulance n’empêchera pas la blessure de saigner« , ajoute Frédéric Penard.

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1.   « Les personnes qui se trouvent à bord d’un navire en raison d’un cas de force majeure ou par suite de l’obligation faite au capitaine de transporter des naufragés ou d’autres personnes ne sont pas prises en compte pour déterminer si des dispositions de la présente Convention s’appliquent à un navire ». Article IV de la Convention SOLAS. 

Note aux éditeurs 

  • Trois contrôles de l’État du port (PSC)  pour l’Ocean Viking en un an – seules des anomalies mineures ont été détectées. 

L’Ocean Viking a précédemment été reconnu comme navire de secours/sauvetage et a opéré en tant que tel dans le cadre juridique strict de l’industrie maritime norvégienne et britannique. À l’époque, le navire, comme tout autre navire de sauvetage opérant dans l’un des secteurs maritimes exigeant les normes de sécurité les plus strictes, n’était pas tenu de remplir certaines des caractéristiques que les garde-côtes italiens considèrent aujourd’hui comme des motifs d’immobilisation.

  Depuis son affrétement par SOS MEDITERRANEE, soit un an, l’Ocean Viking a subi et passé trois contrôles de l’État du port (PSC) – une inspection permettant aux pays de contrôler les navires immatriculés à l’étranger dans des ports autres que ceux de l’État du pavillon – y compris une inspection en Pologne avant de commencer sa mission en Méditerranée centrale en juillet 2019. Selon le profil de risque du navire (Ship Risk Profile) – un système d’évaluation du  niveau de priorité d’inspection du navire, de l’intervalle requis entre les inspections et de l’étendue de ces dernières – l’Ocean Viking est  évalué à risque “standard”. De ce fait, il devrait normalement être soumis à des contrôles périodiques tous les 10 à 12 mois suivant la dernière inspection menée dans la zone européenne du Mémorandum d’entente de Paris sur le contrôle des navires par l’État du Port (Memorandum de Paris) – un accord signé par 26 États européens et le Canada, afin de mettre en oeuvre un système harmonisé de contrôle par l’État du port. En dépit de cela, l’Ocean Viking avait déjà été inspecté par le régime PSC des garde-côtes italiens à deux reprises (en septembre et novembre 2019), avant ce contrôle mené à Porto Empedocle aujourd’hui.

Les deux premiers contrôles par l’État du port effectués en Italie, au cours desquels le navire a été soumis à une inspection approfondie pendant environ 9 heures, n’ont permis de déceler que quelques anomalies mineures qui ont été rapidement corrigées et qui ne constituaient pas un motif d’immobilisation. Étonnamment, malgré ces précédentes inspections approfondies, les autorités maritimes italiennes ont considéré, à la suite de l’inspection d’aujourd’hui, que certains des certificats et dispositifs du navire – qui n’ont pas changé depuis la première inspection – constituaient cette fois-ci des motifs d’immobilisation.

  • Récapitulatif de la dernière mission en mer de l’Ocean Viking au cours de laquelle un état d’urgence a dû être déclaré – une étape sans précédent pour SOS MEDITERRANEE :  

Après avoir effectué quatre sauvetages dans les régions italiennes et maltaises de recherche et de sauvetage les 25 et 30 juin, l’Ocean Viking a déclaré l’état d’urgence suite à huit jours durant lesquels les autorités maritimes compétentes ont refusé d’attribuer un lieu sûr pour le débarquement de 180 survivants qui pour certains étaient dans une détresse psychologique insupportable. Onze jours après le premier sauvetage et trois jours après la déclaration de l’état d’urgence, l’Ocean Viking a reçu l’ordre de débarquer les rescapés à Porto Empedocle, en Sicile. L’équipage a ensuite été mis en quarantaine pendant 14 jours à bord de l’Ocean Viking, au large de la Sicile. Après la désinfection du navire, les autorités italiennes ont procédé à un contrôle par l’État du port, qui a conduit à l’immobilisation administrative du navire.

Source https://www.sosmediterranee.fr/journal-de-bord/CP-22-07-2020-sequestreOV

Voir aussi la pétition  » Libérez l’Océan viking » https://www.grece-austerite.ovh/petition-liberez-locean-viking/

Réfugies et migrants confinés

Réfugiés et migrants seront toujours en confinement pendant deux semaines de plus 

Malgré le cri de détresse des ONG et d’organismes internationaux de santé, le gouvernement grec renouvelle les mesures discriminatoires et, sous prétexte de pandémie, prolonge encore une fois les restrictions de mouvement dans toutes les structures d’hébergement des demandeurs asile en Grèce. Par décision conjointe des ministres de la Protection civile, de la Santé, et de l’Immigration et de l’Asile, les mesures dans les centres d’accueil et d’identification (les hot-spots) et dans les structures d’accueil du continent sont prolongées jusqu’au 2 août 2020.

L’objectif, selon une annonce du ministère de l’Immigration, « est d’empêcher l’apparition et la propagation de cas de coronavirus », un argument qui ne repose sur aucune donnée scientifique mais qui révèle uniquement une volonté de discrimination sociale qui ne semble pas être absente de la pensée politique centrale du parti au pouvoir.

Hier, dans un communiqué conjoint, 26 organisations ont appelé le gouvernement à mettre un «frein» aux restrictions de circulation, mais sans se faire entendre.

Source efsyn.gr

Pétition libérez l’Océan Viking

Chers amis,

Depuis hier soir, l’Ocean Viking est détenu par les autorités italiennes. Nous lançons aujourd’hui une pétition en ligne
« Libérez l’Ocean Viking ».

LES FAITS

Notre bateau et l’équipage étaient en quatorzaine dans le port de Porto Empedocle, en Sicile, suite au débarquement de 180 rescapés. Mercredi 22 juillet, à la fin de la quatorzaine, les garde-côtes italiens sont montés à bord du navire pour un contrôle. Après une inspection qui a duré 11 heures, les autorités italiennes ont annoncé l’immobilisation de l’Ocean Viking.

Le principal motif de détention notifié par les garde-côtes italiens s’énonce comme suit : « Le navire a transporté plus de personnes que le nombre autorisé par le certificat de sécurité pour navire de charge”. Plus d’un an après avoir été affrété par SOS MEDITERRANEE, l’Ocean Viking a déjà prouvé qu’il répondait à des normes de sécurité élevées, plus que ce qui est habituellement demandé à un navire. Nous ne comprenons pas pourquoi des remarques qui mettent en cause la sécurité du navire sont faites maintenant, alors que rien de tel n’a été notifié à ce sujet au cours des quatre inspections, dont deux récentes, effectuées par les garde-côtes italiens, et qu’il n’y a eu aucun changement dans les règlements de sécurité sur ce qui est aujourd’hui mis en cause.

SOS MEDITERRANEE condamne une flagrante manipulation visant à entraver la mission vitale des navires humanitaires.

Opérer en Méditerranée implique par nature d’être confronté à des situations de détresse répétées avec un nombre potentiellement important de personnes en situation de danger immédiat à secourir à chaque fois (généralement de 50 à 200 personnes). En menant des opérations de sauvetage, l’Ocean Viking se retrouve dans la situation de devoir transporter plus de personnes que le nombre spécifié dans les documents de sécurité du navire. Ceci est lié à la nature même des situations d’urgence et de détresse.

Il est très important de rappeler que les personnes mises en sécurité à bord de l’Ocean Viking doivent, selon le droit maritime, être considérées comme des rescapés, c’est-à-dire des personnes secourues d’une situation de détresse extrême. Les définir comme passagers est une interprétation disproportionnée du cadre juridique maritime dans lequel nous opérons.

Le harcèlement administratif systématique auquel sont soumises les ONG a des conséquences dramatiques. Actuellement, très peu de navires de sauvetage sont en capacité de mener des opérations de recherche et de sauvetage en Méditerranée centrale, alors que des personnes continuent de fuir la Libye, surtout l’été lorsque les conditions météorologiques le permettent.

COMMENT AGIR

Nous, citoyens européens, ne pouvons accepter ce harcèlement administratif continu envers les navires de sauvetage, dont le seul but est d’empêcher les activités de secours en mer.

Sans bateau humanitaire pour secourir les naufragés, le nombre de morts aux portes de l’Europe augmentera encore cet été.

Ce bateau, c’est le vôtre. Signez et partagez la pétition pour demander la libération de l’Ocean Viking !

L’équipe de SOS MEDITERRANEE
#FreeOceanViking

Source https://www.sosmediterranee.fr/

 

COVID-19 et migrants dans les camps de Kos et Leros

Les îles invisibles : comment COVID-19 a affecté les migrants dans les camps de Kos et Leros

On a beaucoup écrit sur la situation dans les camps surpeuplés des îles grecques de Lesbos, Samos et Chios, mais on ne s’est pas beaucoup intéressé aux migrants vivant dans les camps fermés de Kos et Leros. Refugee Rights Europe a levé le voile sur les conditions qui y règnent dans un rapport approfondi intitulé « Les îles invisibles ». Ce rapport documente les conditions que certains utilisateurs d’InfoMigrants sur facebook ont confirmées.

« Je vis dans un camp fermé en Grèce. La situation est très mauvaise », a écrit récemment l’un des utilisateurs de Facebook d’InfoMigrants. L’homme a ensuite demandé aux médias de sensibiliser davantage les gens à la situation des personnes vivant dans des situations comme la sienne. « Beaucoup de gens sont fous d’être emprisonnés dans ces camps fermés sans aucun motif. Aucun droit de l’homme, pas même les droits d’un prisonnier ne sont respectés ici », a-t-il déclaré. L’homme a déclaré qu’il était dans le camp de Pili sur l’île de Kos depuis « plus de trois ans ».

Il a affirmé qu’il y avait « une oppression en coulisses » dans le camp et que les téléphones avec appareil photo étaient interdits « afin que les sinistres secrets de ceux-ci ne soient pas révélés ». Dans une conversation sur Facebook, il a déclaré que l’appareil photo de son téléphone avait été « cassé avant d’entrer dans le camp ». Il a accusé les responsables du camp d’avoir cassé le téléphone. Il a déclaré qu’aucun résident du camp n’avait vu les avocats qu’on leur avait promis, et que les fonctionnaires « vous ont pris de l’argent et sont partis sa ns faire leur travail ».
Un autre utilisateur de Facebook d’InfoMigrants avait une histoire similaire à raconter sur un camp de Kos. Il a dit qu’il était arrivé en décembre 2019 et qu’il avait vécu à l’extérieur du camp dans une tente. Il a dit qu’il était étudiant en médecine mais que lorsqu’il a écrit en mars, il était « malade depuis un mois ». Il a dit que sa grippe et sa fièvre étaient dues au fait qu’ils n’avaient pas de « bonne nourriture » dans le camp, qu’il faisait froid et qu’il pleuvait, et que leur tente était pleine d’eau.

Des conditions de surpeuplement

Refugee Rights Europe RRE rapporte que les résidents vivant en dehors des camps de Kos et de Leros ont été forcés de se rendre dans les camps officiels pendant la fermeture. Au moment de la rédaction du présent rapport, ils ont déclaré qu’en avril 2020, « le RIC de Leros accueille actuellement 1 997 personnes dans un espace pouvant en accueillir 860, et le RIC de Kos accueille 2 594 personnes dans un espace pouvant en accueillir 816 ». Ils ont noté que « 87 personnes supplémentaires » sont hébergées dans un PIKPA (centre pour personnes vulnérables) « qui a une capacité de 120 personnes » et que le « Centre de pré-départ et d’éloignement (PDDC) sur Kos est proche de sa capacité, avec 447 personnes détenues dans un espace de 474 personnes ».

Plus récemment, début juillet, l’étudiant en médecine a recontacté InfoMigrants, en envoyant des vidéos de ce qui semblait être une manifestation dans le camp. Un homme a brandi une pancarte sur laquelle on pouvait lire « Je ne suis pas un criminel », alors que d’autres frappaient des bouteilles d’eau sur le sol en signe de protestation. Plusieurs hommes sont entrés et sortis pieds nus.

Il a demandé à InfoMigrants d' »écrire un article », disant que « depuis deux jours, personne n’a rien mangé, et il y a des protestations pour la liberté ». Il a dit que les gens voulaient pouvoir déménager à Athènes mais qu’ils avaient tous été rejetés. Il a ajouté que l’Agence des Nations unies pour les réfugiés, l’OIM et les services d’asile étaient les seules organisations officielles autorisées à entrer dans le camp.

Les deux hommes ont laissé entendre que leur sort était ignoré au profit des problèmes des camps plus grands et plus importants sur des îles comme Lesbos.

Les îles invisibles

Dans le dernier rapport de la RRE, « Les îles invisibles » [voir document ci-joint], les conditions dont les hommes témoignent sont confirmées :

Les centres d’accueil de Kos et Leros ne parviennent pas à offrir aux réfugiés et aux personnes déplacées un niveau de vie qui favorise leur santé physique et mentale, fondé sur le respect de la dignité humaine. Le dernier rapport de Refugee Rights Europe : https://t.co/nEO72i7tJm #refugeesGr pic.twitter.com/AnJIMzAOUA
– Refugee Rights Europe (@Refugee_RE) 2 juillet 2020

Depuis que le rapport a été rédigé, de nombreux camps de migrants en Grèce sont restés en état de fermeture semi-permanente ou permanente, malgré l’assouplissement des restrictions dans une grande partie du reste du pays. La RRE a signalé que dans hotspots de l’île, les mesures restrictives dues au confinement ont été introduites le 18 mars. Elles ont été prolongées jusqu’en mai et sont restées en grande partie en place depuis lors.

Les différentes îles ont adopté les mesures de manière légèrement différente, mais la directive gouvernementale stipulait que les personnes ne pouvaient quitter les camps « en petits groupes de moins de dix personnes » qu’entre 7h et 19h.

Restrictions en matière d’argent et de nourriture

Les paiements par carte de crédit, qui fournissent une allocation mensuelle aux demandeurs d’asile en Grèce, n’ont pas été effectués fin mars parce que le gouvernement était occupé à installer des distributeurs automatiques de billets près des camps « pour empêcher les gens d’aller dans les villes et villages voisins et de créer des files d’attente », indique le rapport. Cela signifie que les résidents des camps n’ont pas pu compléter la nourriture qui leur était donnée dans le camp.

Un professeur d’anglais appelé « A. » a déclaré aux chercheurs du RRE : « La nourriture qui nous est fournie est immangeable et 90% de la nourriture qui nous est donnée est jetée… Nous étions bien dans cette situation avant le confinement, mais maintenant que le confinement est en place, nous ne pouvons plus sortir et acheter de la nourriture pour nous cuisiner. Maintenant, nous dépendons de leur nourriture qui ne peut pas être consommée à 100% ».

Lorsque les paiements en espèces ont finalement été autorisés à nouveau, « les gens étaient devenus si désespérés », notent les auteurs du rapport, qu’ils « se sont précipités pour partir. Cela a provoqué la panique dans le camp qui a été brutalement réprimé par la police, comme en témoigne « M. », diplômé universitaire et peintre et décorateur indépendant », qui vit dans le hotspot de Kos depuis un an.

La police a battu les hommes et les femmes pour les séparer

« M. » a déclaré aux auteurs du rapport que seules 65 personnes étaient autorisées à quitter le camp à la fois. « Ici, nous sommes plus d’un millier. C’est devenu un désordre. La police a battu les femmes et les hommes pour les séparer », a-t-il dit.

Les hotspots de Kos et Leros sont censés être transformés en sites fermés de façon plus permanente, bien qu’en avril les travaux de construction n’aient pas encore commencé, selon un volontaire d’Echo100Plus.

Les installations médicales et d’isolement promises, dit le rapport, « n’ont pas encore vu le jour ».

Lointain et oublié

Un autre problème du hotspot sur Kos est sa localisation, note le rapport de la RRE. Il se trouve à 15 kilomètres du centre de Kos, et est situé sur une ancienne base militaire. Le professeur d’anglais « A. » a déclaré aux chercheurs du rapport : « C’est presque au milieu de la forêt. Il est éloigné de tout, des supermarchés et des hôpitaux par exemple. En fait, nous sommes détenus dans un camp militaire qui est entouré de barbelés, donc il est difficile pour nous d’aller en ville car cela coûte très cher de prendre le bus ici à Kos ».

Beaucoup de gens vivent dans des habitations de fortune construites en bambou, avec des couvertures, des bâches en plastique et tout ce qu’ils peuvent trouver.

L’accès à l’eau est également limité. L’eau est coupée pendant « presque 18 heures par jour », selon le rapport. Les habitants doivent faire la queue pendant des heures autour des bornes-fontaines à l’extérieur des conteneurs pour remplir les bouteilles et les seaux. Les résidents ont déclaré ne pas se sentir en sécurité dans le camp parce qu’ils « vivaient près des ordures » et qu’il y avait « des bagarres entre les réfugiés presque tous les jours qui se produisent parce qu’ils sont détenus ici depuis trop longtemps ». Les résidents se sont également plaints de « l’oppression et des mauvais traitements que nous recevons de la part de l’administration et de la police ».

Sur l’île de Leros, les migrants sont logés dans une autre ancienne base militaire, transformée en hôpital psychiatrique en 1957. Bien que l’établissement psychiatrique ait fermé en 1995, le rapport de la RRE note qu' »environ 200 patients sont toujours présents ». Cela signifie essentiellement, selon eux, que « deux populations vulnérables  [ont été] placées ensemble, presque invisibles depuis la ville la plus proche Lepida ».

La détention s’est poursuivie ?

Catharina Kahane, l’un des membres fondateurs de l’organisation humanitaire Echo100Plus, a déclaré aux auteurs du rapport qu’ils craignaient que le confinement signifie que la situation de détention fermée pourrait devenir « normale », et resterait en place même après que le reste du pays se soit détendu.

Les auteurs ont également critiqué l’utilisation continue des centres de détention sur les deux îles pendant la pandémie, qui, selon eux, viole l’article 5 de la Convention européenne des droits de l’homme. Comme tous les voyages ont été interrompus pendant les restrictions imposées par la pandémie COVID-19, les gens n’ont pas pu partir – ce qui signifie qu’ils n’auraient pas dû être détenus avant un départ qui ne pouvait pas avoir lieu.

Le rapport a également noté que les entretiens d’asile pour les demandeurs d’asile sur Kos étaient de « mauvaise qualité », « marqués par le type de questions posées, et les personnes qui ont du mal à les joindre en premier lieu car la ligne est toujours occupée et la réception est mauvaise ».

Parce que le service d’asile grec a refusé d’accepter des preuves imprimées ou par téléphone dans le cadre du processus d’entretien, ils ont déclaré que les demandeurs d’asile potentiels sur Kos avaient du mal à soumettre des preuves et ne bénéficiaient pas de pauses pendant leur entretien, ce qui était également contraire à la « pratique standard établie par le Bureau européen d’appui en matière d’asile ».

Les nouveaux arrivants pendant le confinement

Ceux qui sont arrivés de Turquie pendant la période de fermeture ont été immédiatement placés dans un centre de détention à Leros. Ils y ont été détenus pendant plus de trois semaines. Les détenus, originaires de « pays à faible reconnaissance » (c’est-à-dire de pays où il est peu probable que vous puissiez obtenir l’asile) ont déclaré n’avoir nulle part où recharger leur batterie de téléphone, « ne leur laissant aucun moyen de communiquer ». Ils ne pouvaient pas non plus se laver « ce qui a entraîné des infections cutanées ». Ceux qui se trouvaient dans le centre de détention fermé n’ont pas eu la possibilité de demander l’asile.

En fait, il est prévu de construire de nouveaux centres de détention à Kos et à Leros, bien que le rapport de la RRE indique qu’il est difficile de déterminer ce qui sera construit, le cas échéant. Cependant, l’UE a déjà promis de l’argent pour la construction de ces installations en 2020.

Un total de 280 millions d’euros sera mis à disposition pour la création de cinq nouveaux centres d’accueil et d’identification « polyvalents » sur les îles grecques en 2020″, a annoncé la commissaire européenne aux affaires intérieures Ylva Johansson en mai de cette année.

En attendant, les résidents continuent de vivre dans des conditions de semi-fermeture. Cela a un impact à long terme sur leur santé mentale et leur bien-être ; un résident, « M, a déclaré que lui et sa femme, qui est également diplômée de l’université et ancienne ambassadrice de la paix, n’avaient reçu « aucune aide » de personne dans le camp, et qu’il n’y avait « ni sécurité ni protection pour les familles ».

Il a ajouté que « la police ne peut pas nous protéger ». Il a dit aux auteurs du rapport que sa femme et lui avaient été « menacés et battus par des personnes appartenant au terrorisme », et qu’après un an dans le camp, il était dans un « état psychologique de fatigue ».

Un état de désespoir

Les auteurs affirment en outre que des habitants se sont également plaints de mauvais traitements par la police, soulignant « des gifles, des coups de poing et de pied ainsi que des coups de matraque et d’objets métalliques sur le corps et la tête ». En outre, ils disent avoir reçu des allégations de « coups de bâton sur la plante des pieds et d’application d’un sac en plastique sur la tête lors d’interrogatoires de police, apparemment dans le but d’obtenir des aveux ou une déclaration signée ».

Les personnes qui allèguent avoir été maltraitées, selon le rapport, n’ont pas pu passer un coup de téléphone ou contacter un avocat lors de leur premier interrogatoire par la police. Lorsqu’ils n’ont pas été battus, de nombreux habitants ont déclaré que la police faisait fréquemment des remarques racistes ou xénophobes à leur égard. Et que les enquêtes sur toute détention ou expérience de mauvais traitement étaient insuffisantes ou « retardées ».

Même sans coups ni violations spécifiques, la vie quotidienne peut vous broyer dans ces camps. « M. » a terminé sa déclaration en disant aux auteurs du document qu’il avait « atteint un stade de désespoir ».

RRE déclare en conclusion que « les conditions matérielles de vie dans les hot spots de Kos et de Leros sont clairement contraires à l’article 119, qui stipule que les conditions matérielles d’accueil doivent assurer aux demandeurs d’asile un niveau de vie adéquat qui garantisse leur subsistance et favorise leur santé physique et mentale, sur la base du respect de la dignité humaine ».

Ils continuent à réclamer une « forte amélioration » de ces conditions dans toutes les installations de ces « îles invisibles ».

Source https://www.infomigrants.net/en/post/26070/invisible-islands-how-covid-19-has-affected-migrants-in-camps-on-kos-and-leros

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