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Des fraises grecques « fabriquées au Bangladesh »

Des fraises grecques « fabriquées au Bangladesh

Jusqu’à 10 000 travailleurs agricoles migrants vivent dans des camps de fortune dans les champs de fraises d’Ilia, qui produisent « l’or rouge » générant des dizaines de millions d’euros d’exportations. Alors que l’État grec reste indifférent, le nombre de travailleurs devrait augmenter, car la production devrait monter en flèche d’ici 2025, couvrant environ 6 200 acres.
par Stavros Malichudis
4 juin 2021

Photographies : Thodoris Nikolaou (découvrez notre reportage photo sur Manolada)
Vidéo : Fanis Kollias
Reportage supplémentaire : Nasruddin Nizami
Rédaction : Iliana Papangeli
Traduction : Gigi Papoulias

Les magasins situés le long de la route principale de Lappa, un petit village du nord-ouest du Péloponnèse, diffèrent des magasins que l’on trouve dans d’autres régions provinciales de Grèce. Les enseignes des quelques magasins – cafés, stands de souvlaki, boulangeries – écrites en grec, se mêlent à d’autres enseignes de magasins écrites en bengali.

Il y a un restaurant qui sert des plats bangladais et un magasin de vêtements. Il y a un mini-marché où l’on trouve de tout, de l’épicerie aux nattes, couvertures, ventilateurs, en passant par les produits emballés, tous fabriqués au Bangladesh. Les propriétaires du magasin, qui sont originaires du Bangladesh, sont bien conscients des besoins de leurs consommateurs : la communauté de milliers de leurs collègues travailleurs terrestres migrants, qui vivent dans la région et travaillent dans les champs de fraises.

Parfois, ils répondent à ces besoins des consommateurs de manière imaginative, en combinant divers produits et services. Le magasin de vêtements vend également des outils et des pièces détachées. À l’intérieur de la supérette, un espace séparé a récemment été créé derrière une structure en bois – un salon de coiffure. Une coupe de cheveux coûte 5 € et un rasage 2 €, ce qui procure au propriétaire un revenu supplémentaire. « Quand j’ai dit à mon comptable ce que je voulais faire, il a ri, mais il m’a dit que c’était possible », dit-il.

Deux annonces de décès en bengali

Trois hommes sont assis sur des chaises en plastique devant la boutique. L’un regarde un dessin animé sur son téléphone, un autre sirote une boisson énergisante avec une paille. À côté d’eux, sur un poteau à côté de la façade du magasin, deux annonces de décès en bengali ont été affichées.

Le premier indique qu’Odan Mahmad Rajun s’est suicidé le 21 mars 2021. Le second annonce que vingt jours plus tôt, Amin Mia (amin signifie bien-aimé) est mort d’une crise cardiaque. Amin Mia était récemment venu en Grèce pour travailler, comme tous ses compatriotes. Et comme la plupart de ses compatriotes, il était sans papiers.

On estime que quatre à cinq Bangladais meurent ici chaque année. À chaque fois, les membres de la communauté et l’ambassade à Athènes organisent le rapatriement des corps – un voyage de plus de 6 500 kilomètres.

La « distorsion » de la population à Manolada

Certaines personnes, dans toutes les régions de Grèce, craignent que les populations locales ne soient « déformées » par l’arrivée de réfugiés et d’immigrants. Il y a cependant une région où cette « distorsion » s’est déjà produite, mais c’est un changement bienvenu et, depuis des années, il est devenu nécessaire. Cette zone est Manolada.

« Manolada » fait référence à la zone plus large de la préfecture d’Ilia dans le Péloponnèse, à environ 40 kilomètres à l’ouest de Patras, qui comprend les villages de Manolada, Nea Manolada, Neo Vouprasio, Lappa et Varda. Le dernier recensement en Grèce a eu lieu en 2011. À cette époque, Manolada comptait 844 habitants, Lappas 1 000 et Neo Vouprasio 128. Mais le nombre réel de personnes vivant dans la région est bien plus élevé.

En roulant sur la route qui relie les villages, nous arrivons à Nea Manolada. Bien que ce soit dimanche matin, il n’y a pas beaucoup de circulation à l’église située au centre du village. Toute l’activité se déroule plutôt à l’extérieur de la boutique de paris voisine, où un groupe d’hommes d’origine indienne est rassemblé, des bulletins de paris à la main.

À côté des boutiques grecques, des maisons de village abandonnées et des habitations à deux étages avec de grandes cours – une communauté s’est développée, des gens qui vivent dans des fermes délabrées et des camps de fortune, bien cachés des rues principales.

La plupart d’entre eux vivent sans papiers, invisibles pour l’État grec. Comme Ali.

L' »or rouge » de Manolada

Bien que sa voix douce, les traits de son visage et sa morphologie laissent penser qu’il pourrait être beaucoup plus jeune, Ali dit à Solomon qu’il a 17 ans. En 2004, quand Ali est né, les fraises de Manolada faisaient partie des nombreux produits cultivés dans la région et il y avait 1 200 stremmata (environ 300 acres) de champs de fraises.

La raison pour laquelle l’adolescent du Bangladesh et jusqu’à 10 000 travailleurs migrants sont venus dans la région est qu’au cours des dernières décennies, la production de fraises a augmenté rapidement. En 2012, elle couvrait 12 000 stremmata (environ 3 000 acres) et on estime qu’elle a actuellement dépassé les 15 000 stremmata (environ 3 750 acres).

Manolada cultive plus de 90% de la production totale de fraises en Grèce, qui est presque entièrement destinée à l’exportation. Dans un rapport récent, l’un des principaux producteurs de la région, Giannis Arvanitakis, parle d’un « produit exclusivement exportable », ajoutant que « seulement 4 % de la production » est destinée au marché grec.

L' »or rouge » – terme inventé par le Premier ministre grec de l’époque, George Papandreou – désigne une industrie de plusieurs dizaines de millions d’euros, en croissance constante. Selon l’Union of Fruit & Produce Exporters, chaque année, les exportations de fraises de la région battent le record de l’année précédente.

En 2020, malgré la pandémie, lorsque les producteurs ont été contraints de jeter une partie de leur produit, car il ne pouvait pas être exporté, les exportations de fraises ont généré 54 967 tonnes (d’une valeur de 71,7 millions d’euros), soit une augmentation par rapport à 2019, avec 45 178 tonnes (55,4 millions d’euros).

En 2021, la production et les exportations devraient dépasser celles de l’année précédente. Et les producteurs estiment que d’ici 2025, les champs de fraises de la région couvriront 25 000 stremmata (environ 6 200 acres).

Des fraises grecques par des travailleurs bangladais

On estime que la raison intégrale du succès de l’industrie de la fraise est le barrage sur la rivière Pineios, qui rend le sol de Manolada si fertile. Un autre élément clé est la main-d’œuvre bon marché.

Jusqu’à il y a une quinzaine d’années, à Manolada, la main-d’œuvre était composée d’ouvriers agricoles albanais, roumains, bulgares et égyptiens. Depuis lors, si un petit nombre de Bulgares et de Roumains, pour la plupart, arrivent encore au début de chaque saison, la grande majorité des travailleurs de la terre sont des Bangladais et, dans une moindre mesure, des Pakistanais.

https://youtu.be/r_vOOCp_WnQ

La relation qui s’est établie entre la production de fraises et la main-d’œuvre qui l’assure, est devenue si bien ficelée que la majorité des travailleurs fonciers bangladais de Manolada viennent de la même ville, Sylhet, qui est située dans le nord-est du Bangladesh.

Ces dernières années, Solomon s’est rendu à plusieurs reprises à Manolada et a abordé, entre autres sujets, les défis auxquels des milliers de travailleurs de la terre ont été confrontés pendant la pandémie.

Au cours de nos visites, nous avons découvert l’existence de travailleurs de la terre de « deuxième génération ». Par exemple, des jeunes hommes qui sont venus à Manolada pour rejoindre leurs pères qui travaillent dans la région depuis des années, ou des cas comme celui d’Ali qui est venu pour retrouver son oncle, après que celui-ci lui ait dit qu' »il y a du travail à trouver ici » (mais Ali ne l’a finalement pas rencontré, car l’oncle est parti en Italie).

Les Bangladais sont beaucoup moins chers que leurs prédécesseurs des Balkans, puisqu’ils se contentent d’un salaire journalier de 24 euros pour une journée de travail de sept heures, contre 35 à 40 euros pour les autres nationalités.

En outre, leur morphologie et leur taille relativement courte sont considérées comme idéales pour semer et récolter les fraises. Un autre facteur est leur tempérament doux et leur statut dans le pays : ils sont considérés comme « calmes » et ne « créent pas de problèmes ». Comme la plupart sont sans papiers, leur crainte d’être expulsés ou arrêtés les amène à ne pas réagir en tant que communauté.

L’industrie de la fraise emploie à la fois des travailleurs terrestres hautement qualifiés, qui peuvent avoir plus de dix ans d’expérience, et des nouveaux venus qui se rendent à Manolada dès qu’ils franchissent la frontière. La saison commence à la fin du mois de septembre et se termine à la fin du mois de juin. Au plus fort de la saison, après décembre, on estime que jusqu’à 9 000 travailleurs terrestres travaillent six jours par semaine dans les serres. Les conditions de logement dans lesquelles vivent la plupart d’entre eux ne sont pas différentes de celles des serres où ils travaillent.

Les camps de Manolada

Les camps sont dispersés dans de vastes champs de fraises. Ils consistent en une douzaine d’abris de fortune construits à l’aide de roseaux pour la base et la charpente. Les « murs » sont faits avec les mêmes feuilles de plastique (utilisées pour les serres), renforcées par des couvertures.

Les travailleurs agricoles bangladais parlent peu le grec, seulement ce qu’ils ont appris en travaillant. Cependant, ils ont appris le mot grec qui décrit l’endroit où ils vivent : parāges ou « cabanes ».

Dans le camp que nous avons visité, plus de 100 personnes vivaient dans des dizaines d’abris de fortune. La plupart dorment sur des palettes, en deux rangées de part et d’autre de l’espace. Avec autant de personnes vivant dans un si petit espace, il est impossible de respecter les règles de distanciation sociale. Au printemps, la chaleur à l’intérieur des cabanes est étouffante, et les ventilateurs, qui fonctionnent en permanence, sont alimentés par des connexions de fortune à des sources d’énergie.

Dans la plupart des parties du camp, l’odeur est également suffocante, car les toilettes sont simplement un trou dans le sol. Il n’y a pas d’eau courante et ceux qui vivent dans le camp doivent se laver à l’extérieur ; ainsi, en hiver, ils sont souvent malades, et s’ils ne peuvent pas travailler, ils ne reçoivent pas leur salaire quotidien.

Deux étals font office de cuisines et il y a quatre réservoirs d’eau abrités sous un auvent. Il y a une mosquée de fortune, où certains des travailleurs se rendent chaque après-midi après le travail, en vêtements propres, pour prier.

Le nécessaire système des « masturs »

Kasef est en Grèce depuis un an. Il a traversé la frontière gréco-turque au niveau de la rivière Evros, et alors qu’il se déplaçait vers l’intérieur des terres, il a été attrapé par les autorités et détenu pendant 15 jours dans un poste de police. Il a ensuite été détenu pendant trois mois à Drama, au centre de détention avant éloignement de Paranesti.

Il a reçu une lettre l’invitant à quitter le pays dans un délai d’un mois et a demandé l’asile. Kasef dit qu’il porte le même pantalon depuis son arrivée dans le pays et se plaint que, parce qu’il est pakistanais, il est moins bien payé que les autres.

« Il y a très peu de travail », dit-il. Si Kasef se trouvait en Grèce il y a quelques décennies, il aurait passé ses journées à errer dans les champs pour demander du travail. S’il se trouvait dans un pays d’Europe du Nord, il se serait peut-être adressé à une agence pour l’emploi.

Mais pas à Manolada. Ici, les travailleurs de la terre n’ont pas de liens étroits avec leurs employeurs. Souvent, ils ne connaissent même pas le nom complet de leur employeur, peut-être seulement leur prénom, s’il s’agit de leur nom réel. Les travailleurs de la terre de Manolada établissent plutôt des relations avec les masturs, qui servent de médiateurs entre les travailleurs et les producteurs, et dans les camps où vivent les travailleurs.

Les masturs ou commanda sont leurs compatriotes. En général, ce sont des personnes qui vivent à Manolada depuis des années, qui ont commencé comme ouvriers agricoles, qui parlent un peu le grec et qui ont gagné la confiance des producteurs. Ils ne travaillent plus dans les champs. Pendant la journée, on les trouve dans les supérettes du village en train de siroter des boissons énergisantes ou de commander des fournitures pour le camp, qui sont achetées à crédit et toujours payées en totalité à la fin de chaque mois.

« Sans le mastour, c’est impossible ».

Les mastours entretiennent des liens étroits avec les producteurs locaux. Lorsque la saison est terminée, ils ne se rendent pas dans d’autres régions comme les autres travailleurs, mais ils restent à Manolada pour aider à d’autres travaux.

Un petit producteur de la région, qui a accepté de parler à Solomon sous le couvert de l’anonymat, a déclaré que le mastour est crucial pour le fonctionnement de l’industrie, « sans le mastour, on ne peut tout simplement pas le faire », a-t-il dit.

Il emploie environ 20 ouvriers agricoles dans ses champs, a-t-il expliqué, et il peut reconnaître environ la moitié d’entre eux. Il ne connaît que quelques-uns de leurs noms. Et il est incapable de coordonner et de communiquer avec eux par lui-même. Il dit simplement au mastur combien de personnes il a besoin, et le mastur s’occupe du reste – il va au camp et rassemble les travailleurs nécessaires.

Le mastour reçoit tous les salaires des travailleurs et à la fin du mois, il leur distribue l’argent, gardant 1 € par jour sur les 24 € par jour que chaque personne reçoit. Cependant, ces dernières années, certains masturateurs de Manolada demandent à leurs compatriotes 100 à 200 € en début de saison pour leur trouver un emploi, ce qui provoque leur indignation.

Il est extrêmement rare que les travailleurs de la terre vivant dans le même camp travaillent pour le même employeur. Pendant la saison, en fonction des besoins et des salaires journaliers disponibles, ils peuvent être employés par plusieurs producteurs – toujours par l’intermédiaire du mastour.
40 € de loyer pour une tente en plastique

Les travailleurs de la terre sont obligés de payer un loyer de 30 à 40 euros par mois au mastour, argent qui va généralement au propriétaire du champ. Cependant, lorsque nous avons dit au petit producteur qui nous a parlé que chaque migrant vivant dans le camp sur son champ payait un loyer chaque mois, il a répondu qu’il n’avait reçu aucun paiement à ce titre.

« Qu’ils me donnent juste de l’argent pour couvrir la facture d’électricité et je ne veux rien d’autre », a-t-il dit.

Pour les propriétaires de champs, où jusqu’à 100 personnes sont logées dans des camps, il existe un revenu mensuel non imposable de 3 000 euros. Nous avons visité une ferme où 65 personnes au total vivaient dans un espace commun partagé. Les résidents y paient 30 à 40 € chacun par mois – soit un total d’environ 2 000 € par mois pour vivre dans des conditions horribles.

L’incident de tir en 2013

Les conditions de vie et de travail dans la zone ont été largement connues en 2007, lorsqu’un incendie s’est déclaré dans un camp, exposant les structures grossièrement construites. Mais l’événement qui a attiré l’attention internationale sur la situation à Manolada s’est produit en 2013.

En avril de cette année-là, environ 150 travailleurs bangladais, employés dans les champs de fraises, se sont mis en grève et ont exigé le paiement de leurs arriérés de salaire. Leur employeur, Nikos Vangelatos, qui était dans la région depuis quelques années mais possédait un pourcentage important de la production totale par le biais de l’agriculture contractuelle, a refusé de les payer.

Lorsque l’employeur a tenté d’embaucher d’autres travailleurs de la terre pour les remplacer, 150 des travailleurs migrants non payés se sont réunis pour protester. Leurs superviseurs ont d’abord fui, avant de revenir avec des fusils de chasse. L’un des superviseurs a ouvert le feu, blessant 30 Bangladais

L’incident a fait la une des journaux internationaux, et les rapports ont décrit l’industrie de Manolada comme des « fraises de sang ». Un boycott international a suivi. Depuis lors, les fraises cultivées dans la région ne sont plus présentées comme provenant de « Manolada » (ce qui était autrefois un signe de qualité) mais plutôt d' »Ilia » (la préfecture où se trouve Manolada).

L’absence de l’État

Le 30 avril 2013, au lendemain de l’attaque des travailleurs de la terre, le Conseil régional de la Grèce occidentale s’est réuni. Après avoir condamné l’incident et demandé une enquête sur les autorités étatiques responsables, le chef régional adjoint de la préfecture d’Ilia, Haralambos Kafiras, a évoqué ces « trois conditions essentielles pour rétablir la loi et la dignité humaine dans la région » :

la délivrance de documents appropriés aux immigrants, afin qu’ils puissent vivre et travailler légalement
créer des conditions de vie sûres et hygiéniques
protéger les droits du travail et les droits individuels des travailleurs.

Vassilis Kerasiotis est l’avocat qui a représenté les travailleurs terrestres lésés. En 2017, l’affaire a été entendue par la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH), et le superviseur accusé a été condamné, en 2019, à une peine réduite de huit ans d’emprisonnement, qui peut être remboursée à raison de 5 € par jour.

Kerasiotis entretient toujours des liens étroits avec la région. Nous lui avons demandé s’il pense que les choses ont changé en ce qui concerne les trois conditions essentielles, au cours des huit années qui se sont écoulées depuis l’incident.

« Ces trois conditions essentielles sont liées entre elles. Il est clair que la question principale est de réglementer leur statut d’emploi, dans un cadre de travailleurs terrestres migrants saisonniers légaux. Les droits des immigrants légaux sont plus facilement protégés que ceux des sans-papiers », a-t-il déclaré à Solomon.

« Cependant, cela permettra de créer un système plus transparent, sans avoir recours à des médiateurs dans le recrutement des travailleurs de la terre nécessaires à la production agricole. »
« Illégalité » de l’État

Suite à la décision de la CEDH, qui a rendu un jugement contre la Grèce pour violation de l’interdiction de la traite des êtres humains et du travail forcé dans le secteur agricole, l’État grec a été obligé de se conformer et d’assurer des conditions de vie décentes aux milliers de travailleurs fonciers migrants.

Afin de se conformer à l’arrêt de la CEDH, le gouvernement a créé l’article 13A de la loi 4251/2014, une disposition qu’Apostolos Kapsalis, (chercheur à l’Institut du travail, créé par la Fédération générale des travailleurs grecs), qualifie d' »illégale ».

L’article 13A de la loi 4251/2014 comprend des dispositions concernant « l’emploi de ressortissants de pays tiers en séjour illégal dans le secteur agricole », qui sont autorisés à travailler légalement et à être assurés via les contrôles des travailleurs.

Toutefois, comme l’explique Apostolos Kapsalis à Solomon, « la seule façon pour un immigrant de travailler en vertu de l’article 13A et d’être assuré au moyen d’un chèque de travailleur, est d’être « expulsable ». S’il ne l’est pas, il doit recevoir un ordre d’expulsion à son encontre. »

Qu’est-ce que cela signifie en pratique ?

« Par exemple, explique Kapsalis, une personne se trouve dans le pays de manière illégale. Un employeur veut l’embaucher, alors l’immigré reçoit un ordre d’expulsion contre lui de la part du commissariat de police. Mais une suspension de l’expulsion est délivrée parce que l’employeur l’engage pour travailler pendant six mois en vertu de l’article 13A. Cependant, après six mois, dès que son travail est terminé, l’immigrant fait toujours l’objet d’un ordre d’expulsion. »

Le paradoxe créé par l’article 13A est que, jusque-là, l’immigrant n’avait pas d’ordre d’expulsion en suspens qu’il était obligé d’obtenir pour pouvoir travailler légalement pendant six mois.

« Bien que l’article 13A ait été soi-disant introduit dans le cadre de la lutte contre le travail forcé, ce qui reste, c’est encore une forme d’obligation et de dépendance absolue de l’employé vis-à-vis de l’employeur », déclare Kapsalis.

Une charge salariale ou un engrais ?

Certes, les travailleurs ont intérêt à être employés et assurés via un chèque ouvrier, et il n’en va pas autrement pour les producteurs.

Depuis 2015, date à laquelle le code des impôts a été modifié, les dépenses liées à la paie des travailleurs de la terre étaient déduites des impôts d’un producteur. Il est rare, cependant, qu’il y ait suffisamment de travailleurs de la terre pouvant travailler légalement, des sources crédibles estimant que seul un travailleur sur vingt dans la grande région de Manolada est employé avec une assurance.

Ce qui est le plus courant, c’est que les travailleurs bangladais en situation régulière sont assurés à l’aide d’un chèque de travailleur et reçoivent également les salaires des autres travailleurs, recueillant ainsi des milliers d’euros sur leur compte, qu’ils distribuent ensuite à leurs collègues.

« Eux-mêmes ne travaillent pas, c’est leur travail, mais un jour, le bureau des impôts les rattrapera », a déclaré le petit producteur. Il ajoute que le fait de ne pas établir de cadre pour que les travailleurs de la terre puissent être employés légalement a diverses conséquences – évasion fiscale, manque à gagner pour les caisses d’assurance – et que chaque année, son comptable est obligé de chercher une solution pour ses charges salariales.

En 2020, une enquête menée par Lighthouse Report en collaboration avec Der Spiegel, Mediapart et Euronews, a mis en lumière la façon dont les producteurs de la région ont inscrit leurs charges salariales sous la rubrique « engrais » dans leurs bilans annuels.

Selon les bilans des plus grands producteurs de la région, sur le papier, les producteurs semblaient n’avoir employé qu’environ six à dix personnes pour chaque champ. Mais en cohérence avec les travailleurs et compte tenu de la taille des terres, plusieurs centaines de travailleurs sont nécessaires pour cultiver chaque champ.

La Convention qui n’a jamais été ratifiée

On pourrait penser que l’État devrait intervenir dans le cas de Manolada, mais la vérité est que l’État, (en plus d’une singulière tolérance pour le maintien des terribles conditions de vie et de travail dans la région), ne dispose pas du cadre juridique qui lui donnerait réellement la capacité d’agir.

Bien que la Grèce soit un pays doté d’une importante industrie agricole, l’État n’a pas créé de législation spécialisée pour effectuer des inspections du travail dans les régions agricoles.

En 1955, la Grèce a ratifié la 81e convention de l’Organisation internationale du travail sur « l’inspection du travail dans l’industrie et le commerce » et l’a effectivement utilisée pour créer et faire fonctionner le corps des inspecteurs du travail (ΣΕΠΕ) en Grèce.

Cependant, depuis 1969, l’Organisation internationale du travail (OIT) a reconnu que l’inspection du secteur agricole avait ses propres caractéristiques et exigences spécifiques, et a en général séparé l’industrie de l’inspection du travail, avec une convention signée en juin 1969 à Genève.

La 129e convention de l’OIT sur « l’inspection du travail dans l’agriculture » fournit le cadre général avec 35 articles, qui stipulent que chaque pays qui ratifie la convention doit avoir un système d’inspection du travail dans l’agriculture, qui fonctionnera sous la direction d’un département spécial d’inspecteurs du travail-fonctionnaires, dont la tâche principale sera d’inspecter les conditions de travail dans le secteur agricole.

Cependant, à l’heure actuelle, la Grèce n’a toujours pas ratifié la 129e convention qui offre l’arsenal juridique nécessaire pour lutter contre les problèmes d’exploitation du travail dans le secteur agricole. Ainsi, jusqu’à présent, les inspections n’ont pas été effectuées dans les champs, mais principalement à l’intérieur (usines de conditionnement), car la 81e convention (que la Grèce a ratifiée) stipule que les inspections doivent être effectuées dans des zones couvertes.

Les deux gouvernements précédents avaient exprimé leur intention de ratifier la 129e convention. Le 14 juillet 2017, le ministre du Travail de l’époque, Efi Achtsioglou, a déclaré que  » nous entrons dans les dernières étapes pour l’achèvement des procédures d’inspection des régions agricoles « . La législation peu claire et l’inaction qui ont permis et toléré des situations de type Manolada sont terminées. » Cependant, quatre ans plus tard, et la 129e convention n’a toujours pas été ratifiée.

C’est soit Manolada, soit un centre de détention

Pour la majorité des Bangladais de Manolada, la réalité est très différente de ce que les trafiquants leur avaient promis avant leur arrivée en Grèce : la plupart n’ont toujours pas les papiers promis, les salaires sont nettement inférieurs et beaucoup n’ont l’intention que de rester ici jusqu’à ce qu’ils décident de leur prochaine étape.

Souvent, ceux qui obtiennent des papiers quittent la région ; certains ouvrent leur propre boutique dans une ville ou travaillent comme plongeurs dans des restaurants. Mais en attendant d’obtenir leurs papiers, ils préfèrent rester ici, où ils savent que la police – qui est tolérante à l’égard des travailleurs qui assurent la production de l' »or rouge » de la région – ne les dérangera pas.

Ils ne connaissent peut-être pas grand-chose de la Grèce, mais ils savent que s’ils se font attraper par la police quelque part en dehors de la région de Manolada, ils risquent de se retrouver dans un centre de détention avant départ et ils savent qu’ils peuvent y être détenus jusqu’à 18 mois.

Les 65 Bangladais que nous avons rencontrés et qui partageaient la petite ferme nous ont montré des vidéos sur leurs téléphones d’un tel centre de détention à Corinthe, lors du soulèvement qui a suivi le suicide d’un détenu kurde en mars dernier.

Dans la vidéo, on peut voir des jeunes hommes crier aux gardes, derrière les barbelés qui limitent leur vie pendant d’interminables mois.

Les Bangladais nous disent : « Non, c’est mieux ici ».

Cet article est publié dans le cadre de la série de reportages approfondis de Salomon sur « Les travailleurs migrants en Grèce à l’époque du COVID-19 ″ et bénéficie du soutien du bureau de Rosa Luxemburg Stiftung en Grèce.

Traduit avec www.DeepL.com/Translator (version gratuite)

Source https://wearesolomon.com/mag/on-the-move/greek-strawberries-made-in-bangladesh/?mc_cid=cf88b966bc&mc_eid=3444239cea

Réfugiés mais pas intégrés

La grande majorité des personnes ayant obtenu le statut de réfugié en Grèce ne parviennent pas à construire leur vie dans le pays. L’absence de politique d’intégration pousse les réfugiés à partir pour tenter leur chance dans un autre État de l’Union européenne, où ils déposent une nouvelle demande d’asile.

« J’ai obtenu le statut de réfugié mais je suis toujours bloqué dans le camp de Samos ». Comme Franck*, un père de famille congolais de 42 ans qui avait témoigné pour InfoMigrants début avril, de nombreux réfugiés ne parviennent pas à quitter les camps des îles de la mer Égée ou du continent. Bien que détenteurs d’une protection, leurs conditions de vie précaires perdurent et empêchent leur intégration dans le pays.

Selon Franck, « l’enfer commence quand on obtient le statut ». En Grèce, lorsqu’un demandeur d’asile devient réfugié, il a en théorie un mois pour trouver un hébergement par ses propres moyens et quitter le centre d’accueil ou le camp dans lequel il vit. Mais beaucoup n’ont d’autres choix que d’y rester, faute d’alternatives. « Comment puis-je avoir un logement sans argent ? En plus, personne ne me louera son appartement ici », croit savoir le père de famille, qui ne trouve pas de travail sur la petite île de Samos.

Ceux qui arrivent à rejoindre la Grèce continentale n’ont pas moins de difficultés à s’insérer dans la société. Loïc* en a fait l’amère expérience. Avec son statut de réfugié en poche, le jeune Congolais d’une vingtaine d’années a quitté le camp de Lesbos, à Moria, en septembre dernier pour tenter de s’installer dans la région d’Athènes. Mais la réalité l’a frappé de plein fouet : sans travail et donc sans revenus, Loïc arrivait péniblement à joindre les deux bouts. « On souffre en Grèce, il n’y a pas d’avenir pour nous », explique-t-il à InfoMigrants.

« Je recevais une aide d’une centaine d’euros chaque mois via le programme Helios mais après avoir payé le loyer et les factures, il ne me restait plus rien pour manger ». Loïc a essayé plusieurs fois de trouver un emploi mais la barrière de la langue et l’absence d’opportunités économiques dans un pays lourdement touché par la crise financière à freiner ses ambitions.

« Il n’y a pas de politique nationale d’intégration des réfugiés »

Helios, le programme d’intégration de l’Organisation internationale des migrations (OIM)débuté en juillet 2019, permet de bénéficier de cours de langue, d’une aide au logement ou encore d’une préparation à un emploi. Mais il est peu accessible, provisoire et en nombre limité. Helios ne profite qu’à une minorité de réfugiés. Actuellement, 8 158 réfugiés, dont 3 159 personnes en famille, bénéficient du programme Helios, selon les chiffres de l’OIM.

« Des programmes existent mais ils sont dérisoires et ne s’inscrivent pas dans une politique nationale d’intégration. En Grèce, on reçoit mais on n’intègre pas », analyse Lefteris Papagiannakis, chef de plaidoyer de l’ONG Solidarity now et ancien vice-maire d’Athènes en charge des réfugiés, joint par InfoMigrants.

La politique grecque en matière migratoire s’est durcie ces dernières années. Les autorités ont notamment réduit un peu plus les aides attribuées aux réfugiés. En 2019, sur décision du gouvernement, les réfugiés ayant obtenu leur statut depuis plus de six mois devaient quitter leur hébergement octroyé dans le cadre d’un programme de l’Union européenne (UE) réservé aux demandeurs d’asile uniquement. En 2020, ce délai a été de nouveau raccourci, passant à seulement un mois. Des centaines de personnes, chassées de leur logement, se sont donc retrouvées dans la rue.

Pour Lefteris Papagiannakis, le but de cette politique est de « se débarrasser des gens au plus vite ». « Le gouvernement veut rendre la vie des réfugiés la plus compliquée possible afin qu’ils rentrent chez eux ou qu’ils aillent dans un autre pays ».

Des milliers de réfugiés tentent de s’installer dans un autre pays de l’UE

Une stratégie qui semble fonctionner. Les réfugiés quittent en masse le territoire grec pour tenter de s’installer dans d’autres pays de l’UE. C’est le cas de Loïc, arrivé en France en début d’année, quelques mois seulement après avoir obtenu son statut de réfugié en Grèce. « J’ai préféré venir ici même si je dois redéposer l’asile. Je veux reprendre les études et c’est impossible là-bas de construire quoi que ce soit », dit l’ancien étudiant en médecine de Kinshasa.

Ce phénomène, appelé mouvement secondaire, inquiète les États membres. La France, l’Allemagne, la Belgique, le Luxembourg et les Pays-Bas ont envoyé une lettre le 1er juin à la Commission européenne pour demander que la Grèce récupère plus facilement ces réfugiés.

Selon le règlement Dublin, un réfugié statutaire ne peut pas redéposer un dossier d’asile dans un autre pays : les personnes venues de Grèce sont donc généralement déboutées.

Rien qu’en Allemagne « 17 000 personnes bénéficiant d’une protection internationale en Grèce ont déposé des demandes d’asile supplémentaires depuis juillet 2020 », indique la note, rédigée par les ministres de l’Intérieur de chaque pays. « Une infrastructure illégale a été mise en place et utilisée spécifiquement » pour permettre ces mouvements, affirment ces pays.

Certains États, comme l’Islande ou l’Allemagne, acceptent exceptionnellement les dossiers d’asile de seconde intention, considérant que la Grèce ne garantit pas un logement convenable et un niveau minimum de subsistance à ces réfugiés.

La Grèce se défend de se « débarrasser » de ses réfugiés, et assure respecter « pleinement ses obligations en matière de contrôle des frontières, d’enregistrement des arrivées irrégulières, d’accueil, de procédure d’asile et de programmes d’intégration », et ne pas être « responsable des flux secondaires ‘irréguliers' ».

*Les prénoms ont été modifiés.

Source https://www.infomigrants.net/fr/post/32869/en-grece-on-recoit-les-refugies-mais-on-ne-les-integre-pas

Grèce Refoulements illégaux en Mer Egée

En Grèce, les « pushbacks » ou refoulements illégaux de potentiels demandeurs d’asile par les garde-côtes grecs vers les eaux turques, se sont systématisés depuis un an. 

Le gouvernement grec se félicite d’avoir réussi à tenir une de ses promesses électorales : réduire le flux de migrants.

La pratique est en infraction avec le droit maritime et l’obligation de porter assistance aux personnes en détresse en mer, mais aussi au regard du droit européen et international dont l’article 3 de la Convention des Droits de l’Homme stipule l’interdiction du refoulement des réfugiés.

Informés, le Haut-Commissariat aux Réfugiés de l’ONU et des commissaires européens se disent “alarmés” mais semblent jusqu’à présent bien impuissants à faire respecter le droit d’asile par Athènes. Documentés et dénoncés par des avocats et des ONG internationales, ces refoulements illégaux révèlent des pratiques cruelles et cyniques. Mais rares sont les voix en Grèce à s’élever la voix contre ces renvois aux frontières de l’Europe.

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https://www.arte.tv/fr/videos/102791-000-A/grece-refoulements-illegaux-en-mer-egee/

Durée : 25 min  Disponible : Du 10/06/2021 au 08/06/2024

Turquie considérée comme « pays tiers sûr »

Le ministère grec des Migrations a annoncé, lundi, qu’Athènes reconnaissait désormais la Turquie comme « pays tiers sûr » pour les demandeurs d’asile originaires de Syrie, d’Afghanistan, du Pakistan, du Bangladesh et de Somalie. Une décision qui pourrait avoir de graves conséquences pour les exilés originaires de ces pays. Explications de Matthieu Tardis, chercheur au centre Migration et citoyenneté de l’Ifri.

La Grèce a annoncé lundi 7 juin qu’elle allait reconnaître la Turquie comme « pays tiers sûr » pour les demandeurs d’asile originaires de Syrie, d’Afghanistan, du Pakistan, du Bangladesh et de Somalie.

« La désignation de la Turquie comme pays tiers sûr est une étape importante dans la lutte contre les flux migratoires illégaux et l’activité criminelle des réseaux de passeurs », a déclaré le ministre grec des Migrations Notis Mitarakis sur son compte Twitter.

Matthieu Tardis, chercheur au centre Migration et citoyenneté de l’Institut français des relations internationales (Ifri) a répondu aux questions d’InfoMigrants sur cette décision qui risque d’avoir de graves conséquences pour les demandeurs d’asile.

InfoMigrants : La Grèce peut-elle prendre la décision de déclarer la Turquie « pays tiers sûr » pour les demandeurs d’asile syriens, afghans, pakistanais, bangladais et somaliens qui se trouvent sur son territoire sans demander l’avis de l’Union européenne ?

Matthieu Tardis : Oui, car les questions d’asile et d’immigration relèvent encore des États membres. Donc un État membre peut décider quel pays constitue un « pays tiers sûr ». En revanche, il y a des critères harmonisés au niveau européen par une directive qui pose la définition minimale de ce que doit être un « pays tiers sûr ».

C’est important car il y a en Turquie beaucoup de questions concernant la réalité de la vie des réfugiés mais aussi l’adhésion de la Turquie à la Convention de Genève de 1951. La Turquie a adhéré au texte mais n’a pas levé la réserve géographique.

Autrement dit, en tant que Français je pourrais demander en Turquie une protection au titre de la Convention de Genève mais pas un Afghan.

Les Turcs ont une législation nationale assez alignée sur le standard européen, qui permet de reconnaître le statut de réfugié mais sans les mêmes garanties [que la Convention de Genève].

Les Syriens – qui constituent la majorité des migrants en Turquie – ont un statut de protection temporaire.

On observe aussi beaucoup de cas de refoulements vers l’Afghanistan, vers l’Iran.

IM : Quelles vont être concrètement les conséquences de cette décision pour les demandeurs d’asile ?

M.T : Un demandeur d’asile passé par un « pays tiers sûr » avant d’arriver sur le territoire d’un état membre de l’UE, peut être renvoyé dans ce pays.

Sa demande d’asile va être jugée irrecevable, il n’y aura pas d’examen de fond. On considère que cette personne aurait dû demander l’asile dans ce pays tiers.

Donc, cela voudrait dire que les Grecs ne vont même pas examiner le fond des demandes d’asile émanant de personnes venant de Turquie.

IM : Est-ce que l’accord conclu en 2016 entre l’Union européenne (UE) et la Turquie ne prévoyait pas déjà cela ?

M.T : Toute l’architecture de l’accord UE-Turquie de 2016 repose sur la notion de « pays tiers sûr ». L’accord prévoyait que la Grèce reconnaisse la Turquie en tant que « pays tiers sûr ». Mais la justice grecque, à l’époque, n’a pas suivi. Elle n’a pas reconnu la Turquie comme « sûre ». Beaucoup de migrants ont par la suite demandé l’asile en Grèce.

>> À (re)lire : La Grèce veut accélérer les expulsions

Aujourd’hui, le gouvernement grec va inscrire dans la loi que la Turquie est un « pays tiers sûr » : il n’y aura plus de marge de manœuvre pour les juges grecs.

IM : La Turquie peut-elle accepter cette décision – et ainsi ré-accepter sur son sol les migrants partis en Grèce ?

Il y a des chances que la Turquie ne réadmette pas aussi facilement des migrants sur son sol.

Les Turcs vont pouvoir se servir de cette décision grecque pour instaurer une forme de chantage aux Européens [comme en février 2020, lorsque la Turquie avait ouvert sa frontière et incité des migrants à se rendre en Grèce NDLR].

Source  https://www.infomigrants.net/fr/post/32808/les-grecs-pourront-renvoyer-les-demandeurs-d-asile-vers-la-turquie-consideree-comme-pays-tiers-sur

La Grèce ne devrait pas avoir à intégrer les réfugiés

La Grèce ne devrait pas avoir à intégrer les réfugiés, selon le ministre
Par NIKOLAJ NIELSEN BRUXELLES, 28. MAI
La Grèce a déclaré qu’elle ne devrait pas être obligée d’intégrer les réfugiés reconnus, suggérant qu’ils devraient plutôt être libres de se rendre dans d’autres États membres de l’UE.
Ces propos ont été tenus jeudi (27 mai) par le ministre grec de la migration, Notis Mitarachi.
« Les pays de premier accueil ne devraient pas eux-mêmes participer à l’intégration des réfugiés, car nous assurons déjà la protection des frontières, la capacité d’accueil et le traitement des demandes d’asile », a-t-il déclaré.
Mitarachi a fait ces commentaires lors d’une audition au Parlement européen, notant que la Grèce accueille quelque 54 000 demandeurs d’asile.

« L’Union ne peut pas attendre des États membres de première ligne qu’ils assument seuls la tâche d’intégrer un nombre disproportionné de bénéficiaires », a-t-il ajouté.

La Grèce demande une option au niveau de l’UE pour permettre aux bénéficiaires de s’installer dans le pays de leur choix.

L’idée risque de se heurter à une certaine résistance, car les États membres de l’UE se battent contre les propositions de la Commission européenne en matière de migration et d’asile.

Certaines de ces propositions sont politiquement chargées, notamment les plans de partage et de répartition des demandeurs d’asile.

Parmi ces propositions figure un mécanisme dit de solidarité, qui vise à sortir d’une impasse dans laquelle se trouve le Conseil depuis cinq ans.

Ce mécanisme exigerait des États membres de l’UE qu’ils relocalisent les demandeurs d’asile, qu’ils les renvoient chez eux ou qu’ils leur apportent un soutien opérationnel.

Mais l’ONG bruxelloise Conseil européen sur les réfugiés et les exilés (Ecre) a jeté un froid sur les efforts de la Commission, lors de la même audition au Parlement européen.

« La proposition de la Commission tente de résoudre des positions politiques irréconciliables », a noté Catherine Woollard, secrétaire générale de l’Ecre. Cela conduit à une législation très complexe et probablement inapplicable », a-t-elle déclaré aux députés européens.

Le Grec Mitarachi a fait écho aux commentaires de Mme Woollard.

« La procédure proposée est bureaucratique. Elle manque d’automaticité », a-t-il déclaré.

L’Allemagne, également présente à l’audition, est intervenue.

Si elle est d’accord avec la Grèce sur la nécessité de relocaliser les migrants, elle a également des divergences. La Grèce veut continuer à se concentrer sur la prévention de l’arrivée des personnes, connue sous le nom de « mouvement primaire ».

Pour cela, elle doit autoriser l’agence européenne Frontex à opérer en dehors des eaux territoriales européennes et dans le cadre d’accords conclus avec les pays de transit.

Mais Berlin veut empêcher les migrants irréguliers de quitter leur nouveau pays d’accueil, ce que l’on appelle les « mouvements secondaires ».

« Il n’est pas possible de considérer la solidarité indépendamment du phénomène des mouvements secondaires », a déclaré Stephan Mayer, secrétaire d’État parlementaire au ministère allemand de l’intérieur.

« Moralement en faillite »

 Les réflexions sur la Grèce et l’Allemagne sont probablement le reflet de divisions plus importantes et de scissions parmi les autres États de l’UE.

La Commission avait également proposé de mettre en place un système permettant de mieux coordonner les opérations de recherche et de sauvetage.

Mais certains États membres de l’UE ont catégoriquement rejeté cette idée.

Une autre idée de la Commission, qui consiste à étendre le champ d’application du regroupement familial aux frères et sœurs, s’est également heurtée à une forte résistance de la part des capitales européennes.

Sophie in ‘t Veld, une libérale néerlandaise exaspérée, a déclaré que les États membres étaient à blâmer pour les problèmes persistants liés aux réformes de l’immigration.

« Peut-être devrions-nous simplement les enfermer dans une pièce avec de l’eau et du pain jusqu’à ce qu’ils parviennent à un accord », a-t-elle déclaré.

« En attendant, les gens disent que l’Europe a échoué. Non, l’Europe n’a pas échoué. Les gouvernements nationaux ont échoué. Ils ont fait de ce continent une faillite morale », a-t-elle ajouté.

Traduit avec www.DeepL.com/Translator (version gratuite)

Source https://euobserver.com/migration/151968

L’Europe renforce son dispositif de surveillance de la frontière gréco-turque

L’Union européenne va ériger d’ici la fin de l’année un mur d’acier entre la Grèce et la Turquie. Un camion blindé équipé d’un canon sonore tirant des rafales de bruits assourdissants, comparables au volume d’un moteur à réaction, sera également déployé à la frontière gréco-turque pour empêcher les migrants d’atteindre le territoire européen.

L’Europe se mure un petit peu plus. Après avoir équipé et formé les garde-côtes libyens pour intercepter un maximum d’embarcations de migrants, puis signé un nouvel accord avec la Tunisie pour contenir le flux d’exilés traversant la Méditerranée en échange d’aides financières, l’Union européenne (UE) se dote d’un nouvel arsenal de protection.

Cette fois, l’union investit du côté de la frontière gréco-turque, avec la mise en service d’un canon sonore tirant des rafales de bruits assourdissants et pouvant atteindre le volume d’un moteur à réaction, depuis un camion blindé. Un mur d’acier bloquera les points de passages utilisés par les exilés pour rejoindre la Grèce en traversant la frontière Evros.

Les tours d’observation de la zone seront par ailleurs équipées de caméras à longue portée, d’une vision nocturne et de plusieurs capteurs de mouvements. Les données seront ensuite envoyées aux centres de contrôle et traitées par une intelligence artificielle afin de signaler les mouvements suspects.

Un nouveau dispositif lancé d’ici la fin de l’année

Ce réseau de surveillance automatisé en cours de construction à la frontière gréco-turque vise à détecter rapidement les migrants et les dissuader de traverser, avec des patrouilles fluviales et terrestres utilisant des projecteurs et le canon sonore.

Le fleuve Evros est une frontière naturelle entre la Grèce et la Turquie. De nombreux migrants tentent de la traverser pour entrer sur le sol grec. Crédit : InfoMigrants
Le fleuve Evros est une frontière naturelle entre la Grèce et la Turquie. De nombreux migrants tentent de la traverser pour entrer sur le sol grec. Crédit : InfoMigrants

Les principaux éléments de ce nouveau dispositif seront lancés d’ici la fin de l’année, a déclaré à l’agence de presse AP Dimonsthenis Kamargios, chef des garde-frontières grecs de la région. « Notre tâche est d’empêcher les migrants d’entrer illégalement dans le pays. Nous avons besoin d’équipements et d’outils modernes pour y parvenir », a-t-il affirmé.

Cet arsenal a été développé par des chercheurs, travaillant avec des entreprises privées à travers toute l’Europe. Plus d’une douzaine de projets ont été testés à la frontière gréco-turque, mais également en Hongrie et en Lettonie, durant les mois d’accalmie liée à la crise sanitaire.

>> À (re)lire : La Grèce renforce sa frontière terrestre avec la Turquie

Les experts ont ainsi expérimenté d’autres technologies parmi lesquelles des détecteurs de mensonges, des scanners de la paume des mains utilisés comme identifiant biométrique ou encore un meilleur échanges d’informations entre les données satellitaires et les images provenant des drones sur terre, dans les airs, en mer et sous l’eau.

Cependant, l’ensemble des programmes de surveillance testés ne seront pas tous inclus dans le nouveau système de détection.

« Criminaliser, expérimenter et déshumaniser les personnes en mouvement »

Ce nouveau dispositif inquiète les organisations humanitaires et certains députés européens. C’est le cas de Patrick Breyer, membre du Parti des pirates allemands. « Force est de constater que le traitement des ressortissants étrangers est souvent un terrain d’essai pour des technologies utilisées ensuite sur les Européens. C’est pourquoi tout le monde devrait s’en soucier, dans son propre intérêt », a prévenu l’eurodéputé, joint par AP.

>> À (re)lire : Frontières de l’UE : les premiers garde-côtes européens armés déployés

Pour Ella Jakubowska, du groupe de défense des droits numériques EDRi, « il est profondément troublant que, à maintes reprises, les fonds de l’UE soient investis dans des technologies coûteuses qui sont utilisées de manière à criminaliser, expérimenter et déshumaniser les personnes en mouvement ».

L’UE a débloqué trois milliards d’euros dans la recherche sur les technologies de sécurité à la suite de la crise des réfugiés de 2015, lorsque plus d’un million de personnes sont entrées en Europe à la recherche d’une protection.

Source https://www.infomigrants.net/fr/post/32687/l-europe-renforce-son-dispositif-de-surveillance-de-la-frontiere-greco-turque?fbclid=IwAR3wIKembU6pr0PIwp0zcbTpom5jEI166Mi3AL-IjYJqq4a6cvKjOHSLJNI

Le principe de fraternité en procès à Grenoble

Le principe de fraternité en procès à Grenoble

Devenus le symbole de l’aide envers les réfugiés à la frontière franco-italienne, les « sept de Briançon » comparaissaient devant la cour d’appel de Grenoble, jeudi 27 mai, deux ans après leur condamnation. Des peines de trois à huit mois de prison avec sursis ont été requises. Au cœur du procès, le « principe de fraternité ».

Grenoble (Isère), reportage

Accolades chaleureuses et messages de soutien attendaient les sept prévenus à leur arrivée au palais de justice de Grenoble. Autour de leurs familles et de leurs amis, entre 200 et 300 personnes avaient fait le déplacement pour les soutenir. Un rituel désormais, à chaque procès intenté à l’encontre des militants solidaires avec les personnes exilées dans les Hautes-Alpes.

En décembre 2018, les Suisses Théo Buckmaster et Bastien Stauffer, ainsi que les Français Benoît Ducos, Lisa Malapert et l’Italienne Eleonora Laterza avaient été condamnés en première instance à six mois de prison avec sursis. Les deux autres prévenus, Mathieu Burellier et Jean-Luc Jalmain, avaient été sanctionnés d’une peine de douze mois de prison, dont quatre mois ferme. Tous ont été reconnus coupables « d’aide à l’entrée irrégulière » d’étrangers sur le territoire français.

Plus de deux ans après, ils ont de nouveau dû raconter à la barre leur participation à une manifestation organisée le 22 avril 2018 en réaction à la venue du groupuscule d’extrême droite Génération identitaire, dissous depuis. Selon le parquet, cette marche aurait permis l’entrée sur le territoire français de personnes en situation irrégulière.

Rassemblement et prises de parole en soutien aux « sept de Briançon » devant la cour d’appel de Grenoble, le 27 mai 2021.

Âgés de 25 à 55 ans, les sept, ou plutôt les six — Eleonora Laterza n’ayant pas assisté au procès — se sont remémoré en détail cette journée de 2018, au cours de laquelle près de 150 personnes s’étaient mobilisées pour exprimer leur indignation face à la chasse aux migrants orchestrée par le groupuscule. Un à un, ils sont revenus sur le contexte et le « climat de peur » qui régnait dans le Briançonnais à leur arrivée. « Quand on a appris que les Identitaires organisaient une action, on a immédiatement eu peur qu’ils s’en prennent aux exilés. Nous avons barricadé les portes et les fenêtres des lieux d’accueil », a raconté Mathieu Burellier.

Lisa Malapert, charpentière de 25 ans, a affirmé avoir ressenti de la colère face à l’inaction de l’État. Benoît Ducos, lui, a dit avoir été inquiet en constatant qu’aucune force de police n’avait été déployée pour assurer la sécurité des exilés.

Les « sept de Briançon » sont devenus le symbole de l’aide humanitaire envers les réfugiés.

Les limites françaises du principe de fraternité

Tout au long du procès, la cour et l’avocat général ont surtout cherché à savoir si les prévenus avaient sciemment emmené des exilés pour les aider à traverser la frontière franco-italienne. Depuis la reconnaissance par le Conseil constitutionnel du principe de fraternité en juillet 2018, « l’aide au séjour irrégulier » et « l’aide à la circulation », dans un but exclusivement humanitaire, ne sont plus considérés comme des délits à partir du moment où cette aide s’exerce de façon désintéressée. En revanche, il en est tout autre pour l’aide à l’entrée sur le territoire, toujours passible de cinq ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende.

C’est d’ailleurs sur cette question du passage de la frontière que les avocats de la défense ont demandé de déposer une « question préjudicielle » devant la Cour de justice de l’Union européenne. La défense aimerait saisir l’institution juridique européenne pour clarifier si une entrée sur le territoire européen peut être considérée comme irrégulière pour les demandeurs d’asile à l’intérieur de l’espace Schengen.

« Une frontière intérieure sur laquelle des contrôles auraient été rétablis ne peut pas être considérée comme une frontière extérieure », a affirmé Me Vincent Brengarth, en référence au rétablissement des frontières de certains pays européens, comme la Hongrie ou l’Autriche, lors de la « crise migratoire » de 2015. « Il s’agit pour nous de clarifier si une condamnation pour “l’aide à l’entrée” est réellement valable concernant les frontières internes de l’Union européenne. »

Philippe de Botton, président de Médecins du monde France, avant le début du jugement en appel : « Depuis septembre dernier, 584 personnes ont été mises à l’abri à la frontière, dont dix-sept ont dû être hospitalisées en urgence. »

Des peines revues à la baisse

« Avez-vous eu connaissance de la présence de personnes d’origine étrangère, lors de cette manifestation ? » posera à chaque prévenu la présidente de la cour d’appel, Hélène Pirat. « Oui, de moi-même », a répondu Théo Buckmaster, un brin de malice dans la voix, rappelant qu’en tant que Suisse, il est considéré comme un étranger.

Un malaise a alors flotté dans la salle d’audience : « Parlons, alors, de personnes d’origine africaine, à la peau noire, susceptibles d’être en situation irrégulière », a précisé la présidente, devant un public sidéré, peu nombreux en raison du Covid-19. « Dire que toute personne de couleur noire est susceptible d’être une personne irrégulière, c’est du racisme et c’est puni par le Code pénal », répondra Me Zia Oloumi, avocat de la défense, affirmant que ce n’est pas à des citoyens d’établir si une personne est en situation irrégulière ou non dans le droit français.

« Rien n’arrête la solidarité, pas même les frontières. Pour les paysan·nes, travailleur·euses, la solidarité n’a pas de frontières », a écrit la Confédération paysanne.

Le représentant du parquet a requis des peines moins lourdes qu’en première instance : trois mois d’emprisonnement avec sursis pour six d’entre eux. Mais huit mois d’emprisonnement, intégralement assortie d’un sursis probatoire sur deux ans, pour Mathieu Burellier, lui, considéré comme étant le « plus actif dans cette manifestation ».

Les quatre avocats de la défense ont plaidé la relaxe en raison de l’absence de preuve que cette manifestation ait bien eu pour but de faire entrer des exilés sur le territoire national. Ils ont insisté sur l’engagement humanitaire des prévenus. « Ils incarnent quelque chose qui doit être une source de fierté dans notre pays, à savoir la solidarité et la fraternité, a insisté William Bourdon, avocat de Théo Buckmaster, Bastien Stauffer, Mathieu Burellier, Lisa Malapert et Benoît Ducos. Ils font face aux forces de la déshumanisation, qui veulent qu’un migrant ou qu’un pauvre soit forcément un délinquant ou une menace. » La cour a annoncé que la décision de justice serait dévoilée le 9 septembre prochain.

Source https://m.reporterre.net/Le-principe-de-fraternite-en-proces-a-Grenoble?__twitter_impression=true&s=09

Grèce: Appel international pour les 6 de Moria

Nous relatons cet appel de Migreup

Merci de soutenir et de partager le plus largement possible cette initiative internationale pour la défense de 6 jeunes Afghans accusés d’avoir incendié le camp de Moria et qui ont été déclarés ‘coupables’ par les autorités bien avant leur procès. 

L’appel en anglais, français, allemand, espagnol, grec, italien,  est l’ligne sur Change.org  Pour signer https://www.change.org/FreeTheMoria6

L’appel en Français :

# FreeTheMoria6 – Après l’incendie au camp de Moria : Appel pour un procès équitable et transparent pour l’accusé Moria 6 sur la base de la présomption d’innocence!

Le 11 juin 2021, le procès de quatre des six adolescents migrants accusés d’avoir incendié le camp de Moria aura lieu sur l’île grecque de Chios. Dès leur arrestation et avant toute procédure légale, ils ont été présentés au public comme étant les coupables. Deux mineurs co-accusés ont déjà été condamnés à des peines de prison en mars, malgré un manque de preuves et un procès riche en irrégularités.

Nous sommes profondément préoccupés par le fait que leur droit à un procès juste et équitable fondé sur la présomption d’innocence ne soit pas garanti, et que les accusés servent davantage de boucs émissaires à la politique migratoire inhumaine de l’UE. Nous sommes solidaires de la Moria 6 et contre le régime frontalier européen meurtrier!

Le 8 septembre 2020, le tristement célèbre camp de réfugiés de Moria sur l’île grecque de Lesbos a brûlé dans un incendie attisé par un vent fort. Les incendies généralisés et durables, bien documentés et presque diffusés en direct via les médias sociaux, ont remis la politique de dissuasion qui se déroule dans des conditions inhumaines dans les camps européens les plus sous tensions, i.e. dans la région égéenne, sous les projecteurs des médias internationaux. 

Plutôt que de considérer l’incendie comme une catastrophe inévitable dans une infrastructure de camp meurtrière, l’État grec a arrêté six jeunes afghans et les a présentés comme coupables et uniques responsbales de l’incendie, tentant d’étouffer la poursuite du débat public sur les conditions de vie à l’intérieur du camp et la responsabilité politique. Les incendies ont eu lieu à un moment où le nombre de personnes vivant dans le camp avait atteint 12 000, des restrictions de mouvement avaient été mises en place depuis près de six mois et une peur croissante du Covid-19 se propageait à l’intérieur du camp. Une semaine avant l’incendie, la première personne avait été testée positive. Au lieu de déplacer les personnes infectées hors du camp et d’améliorer les conditions de vie des personnes cloîtrées à l’intérieur, le gouvernement avait prévu de fermer complètement le camp avec une double clôture de haute sécurité câblée de l’OTAN et réprimé violemment toute manifestation. 

Non seulement les autorités nient toute responsabilité, mais il y a aussi des raisons de supposer que les accusés ne peuvent pas s’attendre à un procès juste et équitable. Ils ont été présentés par les autorités comme coupables dès le moment de leur arrestation. Le ministre grec de la migration et de l’asile a déclaré – une semaine seulement après l’incendie – que « le camp avait été incendié par six réfugiés afghans qui avaient été arrêtés », violant par là leur droit à un procès équitable sous la présomption d’innocence. Cinq des Moria 6 étaient mineurs au moment de leur arrestation, mais seuls deux d’entre eux ont été reconnus comme tels par l’État grec et traités par conséquent conformément au Code pénal des mineurs.

Des inquiétudes se sont déjà manifestées lorsque les deux personnes officiellement reconnues mineures ont été jugées en mars 2021. À ce moment-là, les deux avaient déjà été maintenues en détention provisoire pendant près de six mois, la période maximale légale pour les mineurs, et auraient donc dû été publié bientôt. Lors d’une audience convoquée à la hâte qui a bafoué les normes procédurales fondamentales d’équité, ils ont été reconnus coupables malgré le manque de preuves et condamnés à cinq ans de prison.
Le cas de la Moria 6 n’est pas le premier où des migrants sont arbitrairement arrêtés et inculpés en Grèce (voir Moria 35). Cette pratique fait depuis longtemps partie du régime inhumain des frontières de l’UE. Cependant, dans l’environnement politique actuel, la criminalisation de la migration a atteint un nouveau niveau, tout comme les refoulements illégaux des migrants par les autorités.

Nous appelons à un procès équitable et transparent le 11 juin !

Nous sommes solidaires de la Moria 6 et contre le régime frontalier européen meurtrier !

Nous appelons l’UE et l’État grec à assumer la responsabilité des camps inhumains qu’ils ont délibérément créés et des souffrances humaines qui en résultent !

– Arrêtez le confinement des personnes en marge de l’UE !
– Mettez fin à l’accord UE-Turquie !
– Plus de Morias !
– Libérez les Moria 6 !

Des collectifs et des organisations  merci d’envoyer les signatures au plus tard jusqu’au 5 juin au freethemoria6@riseup.net

La république Saint Marin et l’accueil de mineurs étrangers

Saint-Marin approuve une loi visant à accueillir des mineurs étrangers non accompagnés provenant de camps de réfugiés
12.05.2021 – Still I Rise

Le projet permettra à des familles et à des personnes seules résidant dans la République de Saint-Marin de prendre en charge des mineurs, y compris ceux provenant des îles grecques. Still I Rise a pris part à ce projet dès le début.

La République de Saint-Marin a approuvé à l’unanimité le projet de loi qui permettra aux personnes seules et aux familles d’accueillir des mineurs étrangers non accompagnés résidant dans des centres pour migrants ou des centres d’accueil. Il s’agit de la base légale pour entamer un processus d’accueil dans des foyers, y compris pour les mineurs venant des îles grecques. La nouvelle a été accueillie avec enthousiasme par Still I Rise, qui, en tant qu’organisation à but non lucratif, a suivi l’histoire de ce projet de loi dès le début. Après l’approbation de l’ordre du jour, présenté par la conseillère Sara Conti le 1er juillet 2020, le projet de loi a été présenté en session plénière le 27 avril dernier.

“Cette loi est née d’un sentiment partagé par plusieurs personnes, sentiment qui s’est développé à partir de la réunion publique que Nicolò Govoni a tenue à Saint-Marin il y a plus de deux ans”, explique Paolo Berardi, porte-parole du comité d’organisation.” L‘ été suivant, Antonella Mularoni, une chère amie, m’a contacté après un voyage à Samos pour me suggérer une idée merveilleuse; et c’est cette idée qui est devenue loi il y a quelques jours. Nous avons immédiatement commencé à travailler à l’ébauche du projet : D’abord, avec Nicolò Govoni et Riccardo Geminiani de Still I Rise, puis avec les associations de Saint-Marin et d’autres associations. Le travail de collaboration des groupes du conseil et la contribution des bureaux publics ont été essentiels pour atteindre ce résultat historique.”

Avec la loi numéro 79 du 30 avril 2021 la République de Saint-Marin réglemente le statut juridique des mineurs étrangers non accompagnés, qui auront la possibilité d’être placés et de grandir dans un contexte familial qui peut leur donner tout le soutien dont ils ont besoin : moral, matériel, et en matière d’éducation et de formation.

Accueillir un mineur est autorisé aux personnes célibataires ou aux couples, citoyens ou résidents de Saint-Marin qui ont au moins 25 ans et sont en mesure d’éduquer les mineurs et de subvenir à leurs besoins. Les conditions requises comprennent la nécessité pour les accueillants de favoriser – dans la mesure du possible – le maintien des contacts entre l’enfant et sa famille d’origine. Les citoyens et résidents peuvent ensuite accueillir d’autres enfants, en donnant la priorité à d’éventuels frères et sœurs.

Un mécanisme de “solidarité interne” a également été prévu; les personnes qui ne sont pas en mesure d’accueillir des enfants dans leur famille, mais qui désirent participer au projet, peuvent décider de soutenir financièrement un ou plusieurs mineurs qui seront confiés à des familles ou à des personnes seules qui peuvent s’occuper des enfants, mais ne sont pas en mesure de les soutenir financièrement.

Afin de faciliter et encourager le placement en familles d’accueil, la République de Saint-Marin prévoit qu’il est possible qu’un fonds de soutien économique aux familles d’accueil soit créé.

Sous la direction du département des affaires juridiques du ministère des Affaires étrangères, le service des mineurs et l’office pour les adoptions et accueils internationaux géreront toutes les étapes du placement en famille d’accueil avec la coopération des organisations et associations accréditées de Saint-Marin.

“Ce projet ajoute à ce que nous faisons un élément fondamental, qui manquait jusqu’à présent”, déclarent Nicolò Govoni et Riccardo Geminiani, président et vice-président de Still I Rise. “Grâce à la nouvelle loi, les mineurs non accompagnés qui se trouvent dans nos écoles dans des contextes d’urgence (comme Mazì à Samos) pourront continuer leur quête d’un avenir meilleur dans un environnement protégé, au sein de familles qui prendront soin d’eux et leur apporteront le soutien nécessaire à leur épanouissement. Nous sommes très heureux et profondément reconnaissants envers la République de Saint-Marin d’entreprendre une démarche aussi importante.“

Traduit de l’anglais par Evelyn Tischer

À propos de l’Auteur

Still I Rise est une organisation à but non lucratif internationale et totalement indépendante fondée en 2018. Grâce à la création de centres éducatifs et d’écoles internationales, l’objectif est de fournir une éducation, une  sécurité et une protection aux enfants réfugiés, défavorisés, orphelins et oubliés dans les points les plus chauds de la migration mondiale.

Source https://www.pressenza.com/fr/2021/05/saint-marin-approuve-une-loi-visant-a-accueillir-des-mineurs-etrangers-non-accompagnes-provenant-de-camps-de-refugies/

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