Le trafic d’êtres humains en Grèce : une course sans fin (Part 1)
Par Marie Vansteenkiste
Avant toute chose, il existe une différence entre la traite et le trafic d’êtres humains. Même si ces deux termes sont proches, il existe une importante différence entre les deux. La traite, elle, se dirige plus vers un côté économique. C’est une exploitation d’individus à des fins lucratives. L’exploitation porte sur la mendicité, le travail ou services dans des conditions contraires à la dignité humaine, le prélèvement d’organes ou de matériel corporel humain et le fait commettre un crime ou un délit contre son gré.
C’est malheureusement la forme d’esclavage d’aujourd’hui. L’exploitation peut également être sexuelle, prostitution mais pas seulement. Les exploiteurs de main d’œuvre pas cher et illégale dans le bâtiment, hôtel, restaurants, cafés ou encore le travail domestique et de plus en plus fréquent.
Quant au trafic des êtres humains, celui-ci se définit par le fait de faire passer illégalement une frontière à des individus pour des fins lucratives.
Du cas par cas
Sur les 193 pays recensés sur la planète, 137 connaissent un esclavage dit moderne. En Grèce, le trafic humain commence sous vos yeux sans que vous en ayez la moindre idée. Les vendeurs de roses, de bracelets, des enfants qui jouent de la musique devant vous, tout commence là. Mi-juin à Thessalonique, la police a arrêté un couple bulgare et un complice. Ce trio a été accusé de traite d’êtres humains, d’exposition et d’exploitation de mineurs en danger.
Ce sont en général des mineurs ou des très jeunes enfants qui mendient ou aident à la mendicité toute la journée sans avoir un suivi scolaire, et qui rapportent de l’argent aux parents en fin de journée. Des enfants qui passent leurs nuits sur les trottoirs, « vivant une vie qui n’est pas conforme à leur activité de mendiants » explique le communiqué de presse de la police. Ce sont les plus marginalisés et les plus fragiles de la société qui se retrouvent dans ce genre de trafic. Les chiffres officiels évoquent 1000 à 2000 femmes et enfants victimes de ce trafic chaque année.
Ces estimations sont largement inférieures à celles des organisations non gouvernementales grecques, reprises par Amnesty International, qui font état de milliers de victimes non reconnues. Amnesty International cite l’exemple caractéristique de l’année 2000, où 90 000 personnes auraient transité par le territoire grec dans le cadre de ce trafic.
Pour le cas des femmes, c’est généralement dans le domaine de la prostitution qu’elles sont « employées ». Toutes ses victimes ne sont donc pas protégées et ne peuvent pas l’être puisque ce sont elles-mêmes qui sont poursuivies pour prostitution illégale et absence de visa ou de carte de séjour. Ces femmes sont souvent emprisonnées avant d’être reconduites à la frontière, toujours sans aucun droit.
Les victimes ne sont pas considérées comme des êtres humains et le manque de considération envers elles empêche la police d’investigation d’intervenir et de mettre un terme à cela. Selon les ONG, sur le millier d’arrestations annoncées par la police ces quatre dernières années, seuls dix ou quinze cas ont fait l’objet d’une enquête judiciaire.
Plus grand trafic au monde, gentiment puni
Un trafic qui pèse plus de 32 milliards de dollars, mais qui n’est que très peu puni par la loi. Les répressions de la traite des êtres humains sont punies de sept ans d’emprisonnement et de 150 000 euros d’amende, sans circonstances aggravantes. Pas de quoi effrayer les trafiquants. Avec les circonstances, la peine peut tripler, s’il est question de criminalité ou délinquance organisée.
Pas de quoi effrayer les trafiquants. Même si des peines nationales existent, de nombreux traités internationaux sont également mis en place afin d’éviter tout trafic d’humains confondus. Tel que
– La Convention complémentaire des Nations unies relative à l’abolition de l’esclavage, de la traite des esclaves et des institutions et pratiques analogues à l’esclavage.
– La Convention des Nations unies sur l’élimination de toutes les formes de discriminations à l’égard des femmes demande à toutes les parties de supprimer toutes les formes de trafic des femmes et l’exploitation de la prostitution des femmes.
Chacun des pays qui ont signé ces conventions intègrent petit à petit des engagements dans leur législation nationale, mais malgré cela les chiffres de trafic ne cessent d’augmenter. Depuis le passage d’une « législation mondiale contre le trafic des personnes, le protocole additionnel à la Convention des Nations unies contre la criminalité transnationale organisée, visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants » a été adopté par l’Assemblée générale de l’ONU en l’an 2000.
Le trafic des êtres humains n’est plus reconnu comme un problème primordial international. La lutte contre le trafic implique une énorme coopération et demande de la coordination aux niveaux national et international entre les ONG. La coordination est le fruit des bons résultats pour ce genre de trafic. Malheureusement aujourd’hui, la corruption détient encore un rôle trop important pour mettre un terme au trafic.
Pour la première fois en deux décennies, le nombre d’enfants mis au travail a augmenté – pour atteindre 160 millions dans le monde, soit une augmentation de 8,4 millions en quatre ans – tandis que des millions d’autres sont menacés par la pandémie de COVID-19, selon un nouveau rapport des Nations Unies
Le rapport, intitulé Child Labour : Global estimates 2020, trends and the road forward, publié par l’Organisation internationale du travail (OIT) et le Fonds des Nations unies pour l’enfance (UNICEF), exhorte les gouvernements et les banques internationales de développement, a déclaré la directrice générale de l’UNICEF Henrietta Fore, « à donner la priorité aux investissements dans des programmes qui peuvent sortir les enfants de la main-d’œuvre et les ramener à l’école »
Source https://lepetitjournal.com/athenes/le-trafic-detres-humains-en-grece-une-course-sans-fin-part-1-317767
Le trafic d’êtres humains en Grèce : une course sans fin (Part 2)
Par Marie Vansteenkiste
Publié juste avant la Journée mondiale contre le travail des enfants, le 12 juin, le rapport avertit que les progrès réalisés pour mettre fin au travail des enfants ont marqué le pas pour la première fois en 20 ans, inversant la tendance à la baisse qui avait vu le nombre d’enfants mis au travail diminuer de 94 millions entre 2000 et 2016.
Le rapport souligne, aussi, une augmentation significative du nombre d’enfants âgés de 5 à 11 ans qui travaillent, soit un peu plus de la moitié du total mondial.
Et ceux âgés de 5 à 17 ans effectuant un travail dangereux, susceptible de nuire à leur santé, leur sécurité ou leur bien-être moral, a augmenté de 6,5 millions depuis 2016, pour atteindre 79 millions.
« Ces nouvelles estimations sont un signal d’alarme. Nous ne pouvons pas rester sans rien faire alors qu’une nouvelle génération d’enfants est mise en danger », a déclaré le Directeur général de l’OIT, Guy Ryder.
L’impact du COVID
En Afrique subsaharienne, la croissance démographique, les crises récurrentes, l’extrême pauvreté et l’inadéquation des mesures de protection sociale ont conduit à ce que 16,6 millions d’enfants supplémentaires travaillent au cours des quatre dernières années, selon le rapport.
Le COVID-19 met en péril les progrès réalisés dans les régions Asie et Pacifique, et Amérique latine et Caraïbes.
Le rapport prévient qu’à l’échelle mondiale, neuf millions d’enfants supplémentaires risquent d’être poussés vers le travail des enfants d’ici à la fin de 2022 en raison de la pandémie, chiffre qui pourrait atteindre 46 millions sans accès à une couverture de protection sociale essentielle.
Les chocs économiques supplémentaires et les fermetures d’écoles provoqués par le COVID-19 signifient que les enfants déjà obligés ou forcés de travailler, peuvent travailler plus longtemps ou dans des conditions plus difficiles, tandis que les pertes d’emplois et de revenus parmi les familles vulnérables peuvent pousser beaucoup plus d’enfants vers les pires formes de travail.
Inverser la tendance
Pour inverser la tendance à la hausse, l’OIT et l’UNICEF appellent à une protection sociale adéquate, y compris des allocations familiales universelles ; à une augmentation des dépenses pour une éducation de qualité et le retour de tous les enfants à l’école, y compris ceux qui ont été forcés de quitter l’école avant COVID-19 ; et à des investissements dans les systèmes de protection de l’enfance, les services publics ruraux et les moyens de subsistance.
Dans le cadre de l’Année internationale pour l’élimination du travail des enfants, le partenariat mondial Alliance 8.7, dont l’UNICEF et l’OIT sont partenaires, encourage les Etats membres, les organisations régionales et internationales et d’autres acteurs à redoubler d’efforts dans la lutte mondiale contre le travail des enfants en prenant des engagements d’action concrets.
Trafic d’êtres humains en Grèce
La traite des êtres humains en Grèce est devenue au fil des ans le crime le plus important du pays, et ce pour de nombreuses raisons. Tout d’abord, les données relatives à la traite ont considérablement augmenté grâce à la normalisation de la collecte et de la communication des données. En outre, la Grèce possède le 11e plus long littoral au monde, ce qui la rend populaire auprès des groupes criminels organisés.
La côte bordée de nombreuses régions d’Europe, d’Asie et d’Afrique constitue un lieu de transit et de destination approprié. En 2018, l’organisation A21 a estimé qu’il y avait 89 000 victimes de la traite des êtres humains en Grèce et que plus de la moitié étaient des victimes du commerce du sexe.
La majorité des trafiquants en Grèce sont grecs. Pendant ce temps, la plupart des victimes du trafic sexuel sont des femmes et des enfants, et les victimes du travail sont des hommes et des enfants. Les victimes de la traite en Grèce sont le plus souvent des migrants et des demandeurs d’asile qui dépendent de la contrebande et du travail forcé.
La traite des êtres humains est illégale et punissable aux niveaux étatique, fédéral et international. La réponse de la Grèce à la traite des êtres humains se classe actuellement au niveau 2.
Selon le Département d’État américain, un pays qui se classe dans la catégorie 2 ne respecte pas les normes minimales de lutte contre la traite des êtres humains. Le Département d’État américain a demandé, il y a déjà plusieurs mois à la Grèce d’appliquer au plus vite les recommandations qui leur ont été faites, afin de stopper ce trafic.
Malgré cela et les aides financières le gouvernement Grec ne satisfait toujours pas aux normes minimales pour l’élimination de la traite des êtres humains. La Grèce est donc restée au niveau 2.
Après une deuxième mise en garde, la Grèce a commencé à faire des efforts avec l’unité de lutte contre la traite en déployant de solides efforts d’investigation, tels que des inspections conjointes avec les inspecteurs du travail et les travailleurs sociaux.
Le gouvernement a aussi officiellement lancé un mécanisme national d’orientation multidisciplinaire doté de procédures opérationnelles standard et de directives écrites appropriées. Le bureau du rapporteur national sur la traite des êtres humains a mené des efforts de lutte contre la traite à l’échelle du gouvernement, notamment un projet visant à éliminer le travail forcé dans les chaînes d’approvisionnement du gouvernement local.
Cependant, le gouvernement n’a pas respecté les normes minimales dans plusieurs domaines clés. La lenteur des procédures de filtrage et la surpopulation des installations, notamment des camps de migrants et de réfugiés et des abris pour mineurs non accompagnés, ont exacerbé les vulnérabilités et ont parfois conduit à une nouvelle victimisation des survivants.
En outre, le gouvernement n’a pas déployé d’efforts proactifs pour identifier le travail forcé et les enfants non accompagnés, et certaines autorités ont officieusement renvoyé de force certains migrants et demandeurs d’asile en Turquie, décourageant fortement les victimes de s’identifier ou de coopérer. L’aide spécialisée aux victimes restait inadéquate ou inaccessible, et les procédures judiciaires durent souvent de deux à six ans, ce qui entrave la coopération des victimes et des témoins clés, et entraîne l’acquittement des trafiquants présumés.
Profil de la traite inhumaine
Au cours des cinq dernières années, les trafiquants d’êtres humains exploitent des victimes nationales et étrangères en Grèce, et les trafiquants exploitent des victimes de Grèce à l’étranger. Les trafiquants opérant en Grèce sont principalement des Grecs et d’autres Européens de l’Ouest et de l’Est, mais certains sont également originaires d’Asie centrale.
Les trafiquants soumettent des femmes et des enfants d’Europe de l’Est et du Sud, d’Asie centrale et du Sud, de Chine, de Géorgie, du Nigeria et de Russie à la traite sexuelle dans des maisons closes non autorisées, dans la rue, dans des clubs de strip-tease, dans des salons de massage et dans des hôtels.
Les victimes du travail forcé en Grèce sont principalement des enfants et des hommes originaires d’Europe de l’Est, d’Asie du Sud et d’Afrique. Les travailleurs migrants du Bangladesh, du Pakistan et de l’Afghanistan sont susceptibles d’être soumis à la servitude pour dettes, notamment dans le secteur agricole.
Les enfants roms marginalisés d’Albanie, de Bulgarie et de Roumanie sont contraints de vendre des marchandises dans la rue, de mendier ou de commettre de petits vols. L’augmentation du nombre d’enfants migrants non accompagnés en Grèce a augmenté le nombre d’enfants susceptibles d’être exploités. Les enfants non accompagnés, principalement originaires d’Afghanistan, pratiquent le sexe de survie et sont vulnérables au trafic.
Les femmes réfugiées et migrantes, en particulier celles qui vivent dans les CIR des îles, sont très vulnérables à la traite. Belgrade joue le rôle d’un carrefour entre plusieurs axes (aussi bien pour les prostituées que pour les migrants clandestins), d’Europe orientale vers le nord de l’Italie par les pays de l’ancienne Yougoslavie (où interviennent des trafiquants bosniaques, croates et slovènes), de Turquie vers l’Europe centrale par la route des Balkans, enfin d’Europe orientale vers le sud de l’Italie par les ports monténégrins ou albanais.