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Grèce: Non au 4e mémorandum

Grèce: « Non au 4e mémorandum. Monnaie nationale et programme révolutionnaire citoyen MAINTENANT « . Par Dimitris Stratoulis

Traduction Vanessa de Pizzol

Gouvernement et représentants des créanciers préparent au Hilton le 4e mémorandum impliquant notamment des mesures anti-populaires en surnombre et aucun nouveau financement pour le pays après 2018.

Mais avant le quatrième mémorandum, ils vont trouver un compromis dans le cadre de ce qu’on appelle l’accord technique sur les conditions préalables de la 2e évaluation, lesquelles sont à la fois antisociales pour le peuple et catastrophiques pour le pays. Ces dernières comprennent l’accélération des privatisations et l’achèvement du bradage des biens publics, la démolition plus importante encore des relations du travail, la facilitation des licenciements collectifs, la réduction du syndicalisme et du droit de grève, la dissolution du secteur public énergétique et notamment de la DEI[1] ainsi que leur cession pour une bouchée de pain à des intérêts économiques étrangers essentiellement spéculatifs.

Concernant le quatrième mémorandum, il comprendra des mesures meurtrières, sur lesquelles on va prélégiférer dès maintenant pour une application après 2018, en particulier l’abaissement drastique du plafond des revenus non imposables, une nouvelle réduction – un véritable carnage – de 10 à 45 % des principales retraites aujourd’hui versées, avec suppression de la fameuse différence individuelle de traitement entre anciens et nouveaux retraités, tout ceci conduisant à une paupérisation encore plus grande de la population dont les revenus et les retraites sont modestes.

Le gouvernement, pour faire passer la pilule et endormir le peuple, promet d’encourager les contre-mesures positives, qui ne pourront suppléer, ne serait-ce que de façon minime, aux pertes qui affecteront surtout les revenus populaires les plus modestes, et qui ne seront appliquées que si notre pays, après 2019, va au-delà d’excédents annuels primaires monstrueux (3,5% du PIB) qu’il faudra malheureusement envisager sur une période longue, comme l’a déjà établi le gouvernement.

Toutes ces mesures barbares antisociales et régressives qui vont accompagner la deuxième évaluation, ainsi que les excédents primaires d’un niveau intolérable exigés jusqu’en 2028, conduiront non seulement à un appauvrissement encore plus important de la société, mais aussi à une impasse économique irrémédiable.

Il existe cependant une autre voie que celle de la misère engendrée par les mémorandums et de la transformation de notre pays en colonie et protectorat des créanciers, notamment de la zone euro allemande. Cette voie alternative passe par la sortie de la prison « zone euro », par l’adoption d’une monnaie nationale, qui s’accompagnera d’une interruption du remboursement et d’une remise en cause de la dette publique, ainsi que par un programme de reconstruction de la production du pays, un programme révolutionnaire, populaire, anti-mémorandaire et de développement.

Avec la monnaie nationale, nous pouvons renforcer la base de production de notre pays en injectant les nécessaires et suffisantes liquidités (financement) dans l’économie et la société grâce à des conditions favorables et des taux faibles, possibilité actuellement inexistante dans l’euro.

Nous voulons destiner ces fortes liquidités (financement) à l’économie pour réaliser des investissements productifs et à la société pour lutter contre la pauvreté, satisfaire les besoins sociaux, soutenir et fortifier les principaux secteurs économiques.

La monnaie unique sera mise en place par un financement via la Banque de Grèce, qui repassera sous contrôle du secteur public et du gouvernement, via les banques qui seront deux fois plus nationalisées par rapport au programme actuel d’investissement public, mais aussi via le soutien des petites et moyennes entreprises et des agriculteurs pour améliorer la production primaire et la transformation.

C’est dans ce cadre qu’aura lieu la politique prioritaire pour la reconstruction des entreprises sous contrôle public et le soutien aux entreprises coopératives et aux clusters, mais aussi à celles qui créeront des emplois, respecteront la législation en matière de travail et d’environnement et contribueront au développement de la recherche, de l’innovation et des nouvelles technologies, au plan de développement démocratique et à la transformation de la production dans l’économie.

Le but de cette transformation de la production vise à une amélioration productive et technologique du pays, une augmentation des emplois et par conséquent la lutte contre le chômage, le soutien et l’élargissement des conquêtes des travailleurs.

La monnaie nationale sera dans le même temps mise à profit pour améliorer les politiques sociales, recapitaliser les fonds d’assurance, soutenir et renforcer les salaires et les retraites, notamment le salaire minimum et la retraite minimum. Également, pour aider les personnes handicapées, les chômeurs, lutter contre le chômage et la pauvreté et favoriser les dépenses publiques et sociales.

Le passage à la monnaie nationale et l’application d’un programme en faveur du peuple et anti-mémorandaire de sortie de crise n’aura rien d’une promenade de santé. Mais il s’agit de la seule voie possible pour empêcher que le peuple grec ne continue de s’enfoncer dans la misère et pour récupérer la souveraineté nationale et populaire.

Affronter les difficultés, qui seront cependant bien moindres que celles que nous connaissons aujourd’hui dans le cadre des mémorandums installant une austérité éternelle, suppose une volonté politique forte, un projet structuré et un soutien combatif porté par un peuple bien informé et la solidarité entre les peuples de l’UE.

La constitution d’un large « front » politique et électoral des forces de gauche, anti-mémorandaires, révolutionnaires, patriotiques, et la désignation d’un gouvernement analogue, constitue la seule garantie de la promotion réussie d’un programme anti-mémorandaire au bénéfice du peuple et particulièrement des nouvelles générations.

*Dimitris Stratoulis est membre du bureau politique de l’Unité Populaire – ancien ministre chargé de la Sécurité sociale.

**Cet article a été publié sur Kontra News (édition dominicale du 5/03/2017)

[1] Entreprise Nationale d’Électricité.

https://unitepopulaire-fr.org/2017/03/19/grecenon-au-4e-memorandum-monnaie-nationale-et-programme-revolutionnaire-citoyen-maintenant-par-dimitris-stratoulis/

Fleurs de ruines : lieux de création alternatifs dans la Grèce des mémorandums

Intervention de Dimitris Alexakis au Nouveau théâtre de Montreuil lors de la table ronde «Alternatives et Solidarités en Grèce»  samedi 4 mars

À partir de 2010, des dizaines de lieux de création alternatifs commencent à apparaître dans les ruines laissées par le retrait et la faillite de l’État grec. Dans le même temps, des fondations privées aux moyens colossaux ouvrent leurs portes ou sont mises en chantier. À partir de notre expérience propre (la création de l’Atelier de réparation de télévisions par Fotiní Banou et moi-même en novembre 2012), ce texte [1] a pour objet d’esquisser un tableau du paysage culturel apparu à Athènes dans le contexte de crise, d’offensive néo-libérale et de «résistance créatrice» que connaît le pays depuis 2008.

1 Tout commence entre 2010 et 2011 avec l’éclatement de la crise des comptes publics grecs, l’imposition des premiers plans d’austérité et la fin des politiques d’aide à la création. En quelques années, tout s’arrête : fin des subventions aux compagnies reconnues et aux théâtres les plus prestigieux (Théâtre d’Art), gel de la production cinématographique locale, fermeture de formations musicales emblématiques (Orchestre des couleurs) et du CNL grec, abandon de fonds d’archives d’intérêt national. Pour de nombreux artistes, la question se résume à peu près à ceci : comment continuer d’avancer au-dessus de ce vide?

À l’initiative de collectifs ou de groupes d’amis, des dizaines de lieux de création de petite taille (studios ou ateliers de danse contemporaine, théâtres, espaces de musique improvisée) commencent à apparaître dans les ruines laissées par le retrait et la faillite de l’État grec : théâtre occupé et autogéré Embrós, studios de danse contemporaine Kinitíras et Faux Mouvement, lieux de création Baumstrasse et Vyrsodepsío (La Tannerie), Studio 9 (musiques improvisées), immeuble du Synergío (quartier de Metaxourgío) et occupation du Green Park en bordure du Champ de Mars, parmi (beaucoup) d’autres.

Ces lieux de création étaient (voire sont encore) des appartements, des ateliers de réparation de télévisions, des hangars, d’anciens cafés municipaux ; plutôt que de les convertir en salles de spectacle conventionnelles (avec leurs sièges en rang, leur scène séparée du public), les artistes choisissent de les laisser en l’état: chaque projet sera ainsi appelé à s’adapter aux conditions spécifiques de l’endroit.

Les spectacles qui y sont présentés sont moins des représentations que des prises de parole, au milieu ou à quelques centimètres du public, des rencontres et des vis-à-vis (entre un comédien et un seul spectateur) ; la représentation crée d’autres fois les conditions d’une parole partagée, se mue en conversation. Ce sont aussi des projets hors les murs : tel groupe théâtral organise une rencontre avec un quartier, son histoire et ses habitants, la représentation devient déambulation dans les rues et les lieux fermés par la crise (Omáda 7, UrbanDig Project, Caravan Project, Alèxandros Mistriótis, dont la Visite convoque la mémoire historique d’Athènes).

Le public devient partie prenante d’une action, d’une recherche ; les visiteurs ne sont plus là exactement des spectateurs et moins encore, dans une ville dont un grand nombre d’habitants ne consomment plus que le strict nécessaire, des consommateurs de culture.

Les conditions de ces lieux alternatifs sont marquées par la polyvalence [2] et ne cessent pas d’être précaires (il n’y a pas en Grèce de statut d’intermittent) ; les marges économiques, toujours asphyxiantes, n’assurent dans le meilleur des cas que la pure et simple reproduction de la force de travail (ne gagner jamais que ce qui permettra de continuer à faire vivre le lieu) mais offrent la satisfaction que l’on retire à sauvegarder un talent, un métier, un art, à continuer d’avoir une voix, à faire quelque chose qui en vaut la peine dans un contexte où de plus en plus de jeunes diplômés des Beaux-Arts, des conservatoires et des écoles d’art dramatique se voient contraints pour survivre d’accepter n’importe quel emploi (dans la restauration, les centrales d’appel de téléphonie mobile, le bâtiment ou les services de livraison) ou poussés à l’exil (Allemagne, Suède, Angleterre…): le passage du Welfare State au Workfare à quoi se réduit pour partie la «crise grecque» laisse de fait sur le carreau des milliers de jeunes artistes précaires.

S’ils demeurent eux-mêmes particulièrement fragiles et ne se développent qu’à petite échelle, ces lieux ont cependant des effets non négligeables : ils constituent souvent le seul foyer d’activité culturelle dans des quartiers désertés par l’initiative municipale, régionale ou étatique, et offrent un toit aux artistes débutants.

2 Cette réponse est, si l’on y pense, du même ordre que celle qui voit, à partir de l’occupation de la place Sýntagma (été 2011), la multiplication en Grèce des structures de solidarité, de production et de distribution alternatives dans des domaines aussi divers que la santé (dispensaires sociaux), l’éducation (écoles ou garderies autogérées), l’alimentation (cantines sociales), la production (coopérative Vio.me), l’agriculture (parcelles mises en culture sur des terrains occupés, à Thessalonique ou en bordure d’Athènes) et l’aide aux réfugiés, à partir de l’été 2015. La nécessité de répondre aux besoins les plus immédiats conduit un grand nombre de personnes à passer de la contestation traditionnelle (manifestations, grèves) à une forme de «résistance créatrice» [3] souvent aux marges de la légalité. Il s’agit toujours de jeter des passerelles ou des ponts au-dessus du vide: au lieu de continuer à se référer aux structures antérieures, désormais fantômes, faire émerger de nouvelles structures, de nouvelles institutions.

Ces lieux tiers commencent ainsi, à partir des quartiers, à élaborer les prémices de ce qui pourrait devenir une nouvelle politique culturelle — et se heurtent tantôt à l’hostilité des pouvoirs publics (fermeture de nombre d’entre eux par la municipalité de Giórgos Kamínis en 2013), tantôt à leur indifférence. Après l’espoir déçu de janvier 2015, il apparaît clairement que la culture de la gauche reste oblitérée par l’imaginaire étatique ; les ministères de la Culture de Sýriza s’intéresseront ainsi davantage aux alliances entre État et grandes fondations privées qu’au soutien qu’ils pourraient apporter à cet espace alternatif.

Dans le même temps, cet espace tiers devient un enjeu crucial de la période, entre paradigme démocratique du mouvement des places, des comités populaires de quartiers, et paradigme libéral de la Big Society de David Cameron, porté par les grandes fondations privées. Nouvellement créées, celles-ci (Onassis, Niarchos et Neon) commencent à certains égards à fonctionner depuis le champ culturel à la manière de think tanks ou de laboratoires d’un capitalisme en train de se réinventer, en recherche d’issues et qui, après avoir investi dans l’art contemporain, s’intéresse à présent de très près à toutes les manifestations du spectacle vivant et des arts éphémères.

3 Car la crise ne voit pas seulement fleurir les lieux de création alternatifs. Dans le même laps de temps, des fondations privées aux moyens colossaux ouvrent leurs portes ou sont mises en chantier en se positionnant aux frontières de la politique culturelle (dans des domaines aussi cruciaux que l’aide à la création, l’accueil de compagnies étrangères, la création d’une nouvelle Bibliothèque nationale et d’un nouvel Opéra), du mécénat d’entreprise (promotion d’un capitalisme soucieux, à travers les artistes, de «l’intérêt général»), de la politique de la ville (grand projet d’urbanisme Rethink Athens, impulsé par la Fondation Onassis et ayant pour objet de redessiner le centre de la capitale) et de la politique tout court (campagne en faveur du «oui» au référendum de juillet 2015 soutenue là aussi par la Fondation Onassis).

Le paysage culturel athénien est donc aujourd’hui marqué par trois phénomènes : la disparition des politiques d’aide à la création et la réduction drastique du soutien à la préservation du patrimoine, l’hollowing out of the State décrit par un certain nombre d’analystes anglo-saxons («évidement» depuis l’intérieur de fonctions-clés de l’État social), la montée en puissance des fondations privées (comme dans le reste de l’Europe : Fondations Louis Vuitton au bois de Boulogne, Prada à Milan, Pinault à Venise, etc. [4]) et la multiplication de ces lieux de culture, entre occupations sauvages ou négociées, associations à but non lucratif et fabriques de culture sur le mode de la coopérative : un État en faillite, des fondations rappelant les paquebots éclairés traversant la nuit les films de Fellini, et des radeaux [5] en ordre dispersé.

Ce qui distingue ces radeaux faits de bric et de broc de ces transatlantiques lumineux n’est pas seulement leur taille, la disproportion radicale des moyens dont ils disposent (la fondation Onassis dont le siège se trouve à Vaduz, Liechtenstein, s’adosse à un empire industriel et financier ; de même pour la fondation Niarchos, qui siège en Suisse, et pour la fondation Neon, établie à New York et Londres aussi bien qu’à Athènes et dont le créateur, Dimítris Daskalópoulos, est l’ancien patron de la Confédération des industries grecques et a dirigé le plus important conglomérat de l’industrie alimentaire locale).

Ce qui les distingue, c’est aussi l’inscription dans un quartier, le positionnement dans la ville, le lien au voisinage : la fondation Onassis est située au bord d’une voie rapide, sur un axe décentré (le long de l’avenue Syngroú, vers la mer [6]), de même que la fondation Niarchos (qui abrite la nouvelle Bibliothèque nationale et le nouvel Opéra). Les possibilités de créer un lien vivant et authentique avec le quartier sont là à peu près nulles, malgré les efforts déployés : la taille même des bâtiments (et leur architecture) rendent cet espoir vain. Ce sont des lieux structurellement coupés de leur habitat et qui ont en général plutôt vocation à entraîner un remodelage du quartier, voire une destruction de sa dimension populaire (grands projets d’urbanisme visant à redessiner le centre-ville — Rethink Athens —, investissements immobiliers, notamment dans le quartier de Metaxourgío).

Dans un contexte où la politique, comme en Grèce, s’est effondrée, le travail artistique, condensateur d’un réel, d’une situation, revêt une importance accrue, d’où la pertinence de s’interroger sur les conditions et les lieux dans lesquels il s’exerce. Dans ce contexte de crise organique du capitalisme marqué par une rupture franche entre État et société civile — en Grèce, cette rupture est consommée entre 2008 et 2010, donc avant l’apparition officielle sur les agendas européens de la «crise de la dette» —, le capitalisme lui-même paraît être à la recherche d’issues et semble quelquefois les trouver dans la récupération, l’appropriation des formes de contestation portées par les mouvements sociaux. C’est le paradoxe apparent de la politique de certaines grandes Fondations, qui s’inscrivent dans le droit fil du processus néo-libéral en s’efforçant d’y intégrer les formes mêmes de sa remise en question. L’art devient le biais par lequel un discours critique ou une pratique activiste peuvent être réintégrés et captés par le système dominant. L’exemple de Julie Mehretu, artiste picturale travaillant notamment sur le «mouvement des places» et dont une œuvre ornait le hall d’entrée de Goldman Sachs, à New York, est à cet égard éclairant [7].

Car ces fondations privées développent souvent une politique culturelle libérale et ouverte (aux droits des minorités ethniques ou sexuelles, des handicapés) tout en envisageant le démembrement des politiques publiques comme une occasion de refonder l’ensemble du champ politique, de reformuler la question de la «gouvernance» en termes proches de ceux qui animaient la campagne de David Cameron [8], d’impulser de grands projets urbanistiques et / ou immobiliers et d’intervenir de manière non équivoque dans le cours de la vie publique. Ces mêmes Fondations se plaisent également, dans le droit fil du mécénat traditionnel, à soutenir projets caritatifs, humanitaires voire scientifiques liés aux conséquences de la crise : la Fondation Niarchos a par exemple contribué à la fondation d’un «Observatoire de la crise» [9].

Ruines publiques, fondation privées: leur puissance financière leur permet en outre de devenir «partenaires privilégiés» du Théâtre national de Grèce [10] ou de voler au secours d’un Théâtre d’Art menacé de faillite.

4 Malgré le fait qu’ils aient tout, et que nous n’ayons rien, nous parvenons cependant à nous faire entendre et à exister. Pour combien de temps ?

Notre souci quotidien : est-ce que les gens viendront, aujourd’hui ? Après plus de 4 ans de lutte pour faire exister l’endroit, l’année 2016-2017 est à la fois, pour nous, celle d’une certaine reconnaissance, et la plus difficile : si les Athéniens ont longtemps tenu bon à la crise en continuant (notamment) d’aller au théâtre, les quelques économies qui avaient permis à beaucoup de tenir sont maintenant épuisées et de nombreux espaces accusent depuis septembre une baisse de fréquentation sévère [11].

Le désir et la curiosité sont aussi touchés par la crise : sans horizon politique visible, dans l’impasse à laquelle semble se résoudre la période de gouvernement Sýriza depuis la «capitulation» de juillet 2015, le renoncement finit souvent par l’emporter sur le désir (de sortir, de rencontrer des gens, de discuter, de découvrir autre chose, d’écouter une histoire).

Dans ce contexte, de plus en plus de lieux, de compagnies, d’artistes (dans tous les domaines : performance, vidéo, documentaire, théâtre) se tournent assez logiquement vers ces fondations pour faire financer leurs projets.

Ce n’est pas notre cas, malgré les difficultés et la précarité à laquelle nous sommes confrontés : nous nous appuyons sur la trésorerie, en partageant les recettes avec les compagnies invitées (le risque est commun, l’aventure est commune) et en essayant de développer des collaborations avec des troupes et des théâtres de l’étranger. Si nous ne pensons pas que l’intervention de l’État soit le fin mot de tout, il nous serait impossible de recevoir certains artistes (la compagnie Scarface Ensemble, de Strasbourg, ou la performer et chorégraphe Jasmin İhraç) sans l’aide de lieux subventionnés et / ou de fonds régionaux, à Reims, Rennes, dans la région parisienne, à Berlin. D’autres projets associant des artistes étrangers se fondent simplement sur la débrouille de collectifs autogérés qui, par le biais d’une collecte de fonds ou l’organisation d’un festival, parviennent à financer leur venue sans passer par la case État.

L’espoir que nous formions en janvier 2015 était notamment lié à la possibilité de repenser l’articulation entre puissance publique et espace tiers, et, au-delà du champ culturel, entre initiatives venues d’en bas (santé, alimentation, éducation, etc.) et État. Cet espoir a été déçu — ou, plus exactement, s’est fracassé contre les diktats de la troïka et l’absence à peu près totale de réflexion sur ces enjeux de la part de la gauche de gouvernement (Sýriza), qui doit pourtant son ascension à ces initiatives d’en bas, mais pour laquelle la question du pouvoir continue de se réduire à la question de l’État : coquille vide, dans la Grèce de 2017, privée de tout pouvoir d’agir sur le réel (sauf de façon catastrophique). Le seul but des gens de pouvoir est de se maintenir au pouvoir, même lorsque ce pouvoir-là est sans pouvoir aucun.

Nous persistons cependant dans notre projet en insistant de plus en plus sur l’ancrage du lieu et sa position dans la ville, en nous efforçant de répondre à la réalité sociale immédiate, par exemple au travers d’ateliers de jeu théâtral avec de jeunes mineurs étrangers non accompagnés, et en préservant notre autonomie — autonomie qui nous permet de faire entendre un point de vue proprement politique, que ce soit sur la fermeture en 2013 de la radio-télédiffusion grecque, sur la dite «crise des réfugiés» à partir de 2015 ou sur les négociations du gouvernement grec avec les instances européennes et le FMI.

À titre d’exemples concrets, pour donner une image de notre programmation :

– Un festival d’improvisation musicale permettant de collecter des fonds pour l’un des collectifs d’avocats ayant intenté une action en justice contre «Aube Dorée» (organisation criminelle se revendiquant explicitement du nazisme et représentée au Parlement hellénique).

– Des ateliers d’expression théâtrale avec de jeunes migrants non accompagnés.

Tchernobyl, une création théâtrale au terme de laquelle les spectateurs parlent et discutent entre eux, quelquefois plus d’une heure.

– Le festival Multiversal, organisé avec un collectif européen autogéré (noise, performance, électronique).

Babel, es-tu là ?, un atelier international avec les Ateliers du vent aboutissant à une performance de 24h (nouvelle façon d’habiter l’espace, d’y circuler et surtout d’y passer du temps).

Temps Zéro, installation visuelle et sonore (avec le photographe Stéphane Charpentier et des dizaines d’artistes, européens, américains, japonais, russes).

– Des collectes de denrées alimentaires et de vêtements pour une structure de solidarité du quartier (les spectateurs, au lieu d’acheter des tickets de théâtre, déposent à l’entrée des sacs de riz, de pâtes, des conserves, etc.).

– Un programme de documentaires créatifs sur la «crise de la dette» dans le monde et en Grèce (Alcyons, de Laure Vermeersch, Matière première de Chrístos Karakèpèlis…).

– Une performance théâtrale et musicale autour de la mémoire de la guerre civile, Guerre des paysages, avec la metteuse en scène Irène Bonnaud et l’artiste Ilías Poúlos (printemps 2017).

(Exemples seulement indicatifs : une des clés de la survie du lieu tient au fait qu’il demeure ouvert 5, 6 ou 7 jours sur 7, une grande partie de l’année.)

Piste à suivre (mais difficile à mettre sur pied étant donné que nous sommes déjà requis à temps plein par le travail dans l’espace) : créer un réseau et des collaborations avec des lieux équivalents au nôtre et œuvrant dans d’autres quartiers, de façon à ce que ce champ autonome apparaisse mieux et se renforce de coopérations et d’échanges.

Projet immédiat : accueillir des rencontres de structures de solidarité désireuses de refonder le maillage d’initiatives venues d’en bas, qui a pour partie volé en éclats après le crash de juillet 2015, avec, notamment, d’anciens membres fondateurs de Solidarity For All [12].

5 La contestation artistique des politiques d’austérité et de l’ordre néo-libéral ne saurait provenir de l’intérieur des grandes fondations privées, structurellement liées au monde de la finance, que leur capital se soit constitué (comme en Grèce) dans la marine marchande ou l’industrie alimentaire, ou (comme en France et en Italie) dans l’industrie du luxe (LVMH, Prada) ; le spectacle que nous accueillons actuellement, Pénélopes, fondé sur un travail avec des immigrées géorgiennes et syriennes, ne pourrait être entendu de la même façon et n’aurait en définitive pas le même sens, présenté dans une fondation privée.

Le tiers espace dans lequel nous nous inscrivons constitue à nos yeux un enjeu politique majeur : l’initiative par le bas n’est pas politiquement ni socialement neutre (le fait que nous travaillions et vivions à Kypsèli, dans un quartier de retraités grecs frappés de plein fouet par la crise, d’immigrés et d’artistes précaires et non, par exemple, dans un quartier branché n’est pas neutre non plus). Depuis le mouvement des places de 2011, ces initiatives, qu’elles relèvent de la coopérative, de l’autogestion, de l’association à but non lucratif ou soient sans statut juridique, sont au contraire investies de significations politiques et doivent faire entendre leur différence, vis-à-vis de l’État comme des puissances privées.

Entre le monde de la finance et le monde financé (dans l’école maternelle de notre fille, même les repas sont financés par des programmes européens), un troisième monde est apparu en Grèce à la faveur du big bang [13] de la place Sýntagma, en mai 2011 : celui des comités de quartiers, de l’auto-organisation populaire, des marchés sans intermédiaires, des parcelles occupées et cultivées au cœur des villes, un monde de territoires à défendre, de biens à produire et à distribuer autrement, d’habitudes et de formes de vie nouvelles, de liens, un autre imaginaire où le collectif répond à l’atomisation.

La gauche n’est plus depuis longtemps le lieu où la société se réinvente en répondant (notamment) à ses besoins les plus urgents. Après l’effondrement de la «gauche radicale» grecque, aucune politique sociale ne saurait à nos yeux être mise en œuvre sans reconnaître d’abord le rôle de premier plan joué par les mouvements et les initiatives par le bas [14]. Cela implique de redéfinir en profondeur la place, la nature et la forme de cet échelon ou de ce relais politiques. Les initiatives évoquées ici constituent dans la société, dans des domaines aussi divers que l’agriculture, la santé, l’éducation, la production, la culture, les conditions mêmes d’un pouvoir d’agir réel. L’auto-organisation populaire radicalement décentralisée telle qu’elle apparaît en Grèce à partir de l’événement inaugural de Sýntagma [15] et qui a essaimé entre 2011 et nos jours à travers plus de 250 structures de solidarité est l’unique base effective possible d’un changement politique de plus grande ampleur. Il nous semble donc que la question de l’auto-organisation, de l’auto-institution (pratique autant qu’imaginaire) de la société devrait être posée préalablement à tout autre débat (sur la sortie de l’euro et la monnaie, par exemple). Resterait à la «gauche de gouvernement» de cesser de l’être : de se dessaisir de ce fétiche de pouvoir auquel se réduit désormais le projet social-démocrate et de se laisser guider par les réponses, les initiatives et les inventions venues d’en bas.


Dimitris Alexakis, 8 mars 2017, Athènes


[1] Tiré d’une intervention au Nouveau théâtre de Montreuil lors de la table ronde «Alternatives et Solidarités en Grèce» animée par Alexis Cukier, avec Marie-Laure Coulmin-Koutsaftís, Pános Angelópoulos et Yánnis Youloúntas, le samedi 4 mars 2017. Le titre de ce texte reprend celui d’un roman de Patrick Modiano, Fleurs de ruines.

[2] «Directeurs artistiques» ou «programmateurs» appelés dans le même temps à s’occuper de photographie, de graphisme, de médias sociaux, du DJ set, de comptabilité, du nettoyage de l’espace, du déplacement des décors et des sièges pour la représentation du lendemain, de la rédaction des communiqués de presse, du bar : la polyvalence du précariat est là mobilisée en permanence, comme une condition de survie.

[3] L’expression est empruntée à Chrístos Giovanópoulos, ancien membre fondateur de la structure de solidarité Solidarity For All, dans un entretien à paraître prochainement.

[4] Voir le récent essai d’Arundhati Roy qui évoque le cas des fondations privées en Inde : Le Capitalisme, une histoire de fantômes, Gallimard, 2016.

[5] L’expression est empruntée à Sophie Wahnich, Le Radeau démocratique, Lignes éd., 2017.

[6] La Fondation Onassis et le Centre culturel de la Fondation Niarchos sont tous deux situés le long de l’avenue Syngroú, en direction du front de mer. Voir à ce sujet les articles (en grec) publiés dans le mensuel Unfollow par Èffi Yannopoúlou et Thèóphilos Tramboúlis : https://left.gr/news/politismos-ton-idrymaton-i-eggrafi-tis-istorias

[7] http://www.newyorker.com/magazine/2010/03/29/big-art-big-money

[8] De nombreuses tables rondes organisées par la Fondation Onassis évoquent ainsi le passage d’un État social et interventionniste à un État réduit au rôle de régulateur, voire de simple intermédiaire entre «société civile» et secteur privé.

[9] http://crisisobs.gr/en/

http://www.eliamep.gr/en/about-us/funding/

[10] Et d’y avoir le cas échéant un droit de regard sur la programmation ; voir le scandale récent lié à la déprogrammation subite de la représentation L’Équilibre de Nash, au motif que les textes d’un membre incarcéré de l’organisation d’extrême-gauche armée 17 Novembre y étaient rapportés : http://www.humanite.fr/en-grece-la-democratie-en-joue-600230 Il est également intéressant de noter que la Fondation Louis Vuitton était en 2016 partenaire du Théâtre de l’Odéon, à Paris, comme de s’interroger sur les raisons poussant l’Odéon, en 2015, à devenir «le premier théâtre public à se lancer dans le crowdfunding».

[11] Parfois de l’ordre de 50 ou de 60% des entrées.

[12] Structure originale, fondée en 2012 par d’anciens activistes du parti Sýriza, d’appui et de mise en réseau des initiatives de solidarité à travers la Grèce.

[13] L’expression est utilisée par Chrístos Giovanópoulos, ancien membre fondateur de Solidarity For All, dans un entretien à paraître prochainement.

[14] C’est tout l’intérêt des travaux de la sociologue chilienne Marta Harnecker.

[15] Assemblées populaires des places, mai – septembre 2011.

 

L’austérité pousse les Grecs vers la dépression collective

par Fabien Perrier

L’Eurogroupe qui se réunit ce lundi 20 février réclame de nouvelles mesures d’austérité à la Grèce. Le spectre du « Grexit » refait surface alors que l’économie du pays est exsangue.

Athènes doit rembourser 7 milliards d’euros à ses créanciers avant l’été. Or, comme depuis 2011, elle ne pourra pas honorer ses dettes sans toucher au préalable la dernière tranche de crédit que le FMI et les membres de la zone euro lui ont promise en juillet 2015 (86 milliards d’euros). Les créanciers réclament de nouvelles mesures… alors que la population est à bout.

« Tous les ans, la situation scolaire se dégrade. Je n’ai plus d’espoir d’amélioration ! » La mine de Dimitris Panogiotakopoulos s’allonge dès qu’il parle de l’école primaire qu’il dirige, à Elefsina, à une vingtaine de kilomètres d’Athènes. « Entre 2009 et aujourd’hui, le budget a diminué de 70%, confie-t-il. Nous n’avons même pas de quoi acheter les craies. Nous avons dû organiser une collecte sur la place centrale de la ville pour nous procurer les fournitures scolaires ». Kostas Vamvakas, professeur de sport, fait le même constat : la situation est identique dans son lycée. Face à l’urgence, les deux hommes ont monté un réseau de solidarité. « Certains gamins n’ont même pas un blouson à se mettre sur le dos cet hiver ! Ils en pleurent avec ce froid », témoigne l’enseignant. Dans le bureau du directeur, tous sont couverts : le chauffage est en marche mais au minimum.

Une ville industrielle naguère prospère

Kostas Vamvakas est amer : « En 2015, nous espérions qu’Alexis Tsipras [l’actuel premier ministre] et son parti, Syriza [la gauche grecque] stoppent la descente aux enfers ». Pour Dimitris Panogiotakopoulos, seule une sortie de l’euro mettra un terme aux problèmes.
Pour se justifier, il décrit « sa ville » avant la crise. Dans cette banlieue ouvrière en bord de mer, les cheminées des raffineries crachaient leurs fumées noires de jour comme de nuit. Les chantiers navals tournaient à plein régime. Deux entreprises métallurgiques et deux cimenteries bordaient une route nationale souvent embouteillée. Les commerces étaient florissants.

Mais, avec la crise, des réformes drastiques sont exigées. Les trois « mémorandums » signés par les gouvernements grecs avec les créanciers en échange de prêts pour éviter au pays le défaut de paiement dictent un programme impitoyable : baisses des salaires et des pensions, suppression des conventions collectives remplacées par des contrats individuels, hausses d’impôts et des taxes, privatisations, coupes dans les dépenses publiques…

Aujourd’hui, « l’industrie est ruinée », souligne le directeur de l’école, par ailleurs élu de l’agglomération d’Elefsina-Aspropyrgos. Sur la route nationale, toutes les entreprises sont fermées. Les devantures de nombreux magasins affichent « à vendre » ou « à louer ». Dans cette ville qui sera capitale européenne de la culture en 2021, un tiers des 30 000 habitants sont au chômage.

Des salaires coupés en deux

« Depuis 2009, mon chiffre d’affaires a baissé de plus de 60% », se désole Giorgia Fratzeskaki. Cette coiffeuse à Aspropyrgos se demande combien de temps son salon restera ouvert. Elle vit sur la pension de son mari, qui a pourtant fondu de moitié. A 58 ans, elle « espère tenir encore deux ans… mais ce n’est pas gagné ! La fiscalité augmente et maintenant, nous versons même certaines taxes par anticipation. Cela pousse à travailler au noir », dénonce-t-elle.

Maria Papada, 50 ans, renchérit : « Mon salaire annuel est moitié moins qu’en 2017, 830 euros par mois, mais je dois bosser quatorze heures par jour. Les heures supplémentaires, ils ne nous les payent plus. Les primes de Noël et de Pâques ont disparu. » La discussion s’anime. La tante de Giorgia souligne : « Mon fils est chercheur en cancérologie. A l’université à Athènes, il n’y avait même pas de papier dans les toilettes ! Il est parti en novembre 2015. En Arabie Saoudite. » Et toutes proclament : « Avec l’euro et les mémorandums, la Grèce ne peut pas survivre. »

« Les Grecs ne font plus de projet d’enfant, de vie… »

Seule certitude : le pays connaît une véritable paupérisation. Chercheur à l’Institut du Travail, Christos Triandafilou précise que plus d’un tiers des Grecs sont aujourd’hui en risque de pauvreté ou d’exclusion sociale ; 21,4% vivent déjà sous le seuil de pauvreté. Et il souligne qu’avec les baisses successives des salaires, le seuil de pauvreté a baissé. « Il était de 6120 euros en 2007 pour une personne seule, il est désormais de 4512 euros. » Dans ce contexte, le découragement est généralisé : le nombre de chômeurs longue durée a explosé « et eux n’ont aucune indemnité ni couverture sociale. »

« L’instabilité et l’insécurité sont les deux mots qui décrivent l’état psychologique actuel des Grecs », selon Christos Koutsaftis. Psychologue et psychanalyste, il exerce, lui, à Glyfada, un quartier huppé en bord de mer. « Les Grecs ne peuvent plus faire de projet d’enfant, de vie… Sur trois ou quatre mois, c’est le maximum. » Pourquoi ? « Il est impossible de construire quand on ne sait même pas si l’on aura encore son emploi dans six mois. » Après sept années de crise et trois mémorandums (un quatrième est évoqué avec insistance), la société grecque est en dépression collective.

Source : Le Temps

http://www.cadtm.org/L-austerite-pousse-les-Grecs-vers

Grèce Répression policière squats de réfugiés et migrants

Tsipras attaque à nouveau les squats, cette fois à Athènes ! par Yannis Youlontas 13/3/17

La tension monte à Athènes depuis l’aube, suite à une nouvelle agression du pouvoir contre le mouvement social et les réfugiés.
 
Huit mois après l’attaque surprise et simultanée de trois squats à Thessalonique le 27 juillet 2016*, Tsipras vient de recommencer ce matin à l’aube, mais cette fois au centre de la capitale.
 
C’est à nouveau un squat de réfugiés et de migrants qui a été la victime principale de sa répression policière : le squat « Scholeio » (École) de la rue Alkiviadou (Alcibiade), dans le quartier d’Acharnon, à 500 mètres d’Exarcheia .
Les 126 réfugiés et migrants, pour la plupart des familles syriennes (une cinquantaine d’enfants), ont été malmenés, effrayés et parfois trainés sur le sol dans la rue selon des témoins, avant d’être envoyés au centre d’identification des étrangers de Petrou Ralli. Ils rejoindront par la suite les indignes camps de rétention de l’Attique, pour la plupart conçus à l’initiative des dirigeants de l’Union européenne. Début 2016, Bernard Cazeneuve (alors ministre de l’intérieur) s’était déplacé en personne, accompagné par plusieurs dizaines de techniciens français pour faire ce sale boulot en Attique et dans plusieurs îles dont Lesbos.
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Simultanément, une deuxième attaque a été planifiée, à l’aube également, contre le squat « Villa Zografou », au cœur d’un parc tranquille de l’autre côté du Lycabette, qui était pourtant occupé depuis 2012 et offrait de nombreuses activités gratuites ou à prix libres à tous les habitants du quartier : projections de films, débats, activités sportives et artistiques, jardins partagés… 7 camarades anarchistes et antiautoritaires ont été arrêtés et transférés à la Division générale de la police de l’Attique (GADA) et le parc est bouclé par une armada de CRS (MAT).
Préparée en secret, l’ensemble de l’opération a été coordonnée par le sinistre Nikos Toskas, ministre de l’ordre public, homme de main de Tsipras et ancien général de l’armée à la retraite.
 
Alors que la journée avance, une forte présence policière vient d’être déployée dans plusieurs secteurs du centre d’Athènes, principalement autour d’Acharnon, Exarcheia, Zografou et derrière le parlement.
 
Parmi les premières ripostes du mouvement social, en ce moment même, des rassemblements ont commencé : place Gardenias à Zografou, place Exarcheia, mais aussi dans d’autres villes en solidarité avec les expulsés.
 
Le rassemblement de la place Exarcheia vient maintenant de se déplacer devant le nouveau squat « Gare » situé 74 rue Kalidromiou à Exarcheia. Une grande manif « Pas touche aux occupations » est prévue ce soir à Athènes, à 18 heures locales, au départ de la place Gardenias. Demain, il y aura également une manif à motos et d’autres actions (dont probablement plusieurs mauvaises surprises pour le pouvoir).
 
Une rumeur évoque un risque d’attaque dans les prochains jours au cœur même d’Exarcheia. Des assemblées ont prévu, dès ce soir, de débattre et de s’organiser pour parer à cette éventualité. Une attaque qui ne serait pas sans dommages collatéraux, quand on connait l’énorme capacité de résistance d’Exarcheia, qui plus est à quelques jours de l’arrivée du convoi solidaire** (avec son soutien politique, financier et matériel, et la présence dans le quartier des 57 camarades venus de France, Suisse, Espagne et Belgique).
 
A suivre…
 
Yannis Youlountas
 
* L’attaque des trois squats à Thessalonique le 27 juillet 2016 et les suites :

Les calculs dangereux de Tsipras

Le Premier ministre veut affaiblir coûte que coûte la Nouvelle Démocratie.

Analyse d’ Angélique Kourounis Correspondante à Athènes

Alexis Tsipras jouerait­-il aux apprentis sorciers avec le parti néonazi grec Aube Dorée dans le but de limiter la casse lors des prochaines élec­tions ?

La question peut surprendre mais au regard des événements de ces six derniers mois elle mé­rite d’être posée. Tout a com­mencé en septembre dernier,lorsque la télévision nationale, la fameuse ERT, retransmit en di­rect et pour la première fois la cé­rémonie de Nuremberg, version locale, d’Aube Dorée. Autrement dit la cérémonie qui commé­more la bataille des Thermopy­les, l’un des plus célèbres faits d’armes de l’Antiquité lors du­quel le roi Leonidas et ses 300 Spartiates ont tenu tête à la grande armée perse du roi Xe­rxès. Aube Dorée commémore cette date chaque année avec une mise en scène virile, pleine de drapeaux et d’uniformes noirs où tous les noms des spartiates morts en héros sont lus. Soit presque trois heures de discours haineux, nationalistes, éclairés au flambeau, au pied de la statue de Leonidas à quelque 200 kilo­mètres d’Athènes. Rien n’obli­geait ERT à une telle retransmis­sion, in extenso de surcroît, puis­que sa seule obligation vis­à­vis du Parlement est de retransmet­tre les déclarations des partis sur une question donnée. Même le Gouvernement conservateur d’Antonis Samaras dont le con­seiller personnel Panagiotis Bal­takos était très proche d’Aube Dorée n’avait osé le faire.

Aube Dorée mis en avant

Puis ce fut la déclaration du fondateur d’Aube Dorée, Nikos Michaloliakos, qui a endossé, en novembre dernier, la responsabi­lité politique des attaques contre les réfugiés à l’île de Chios. Tout comme lorsqu’il a revendiqué, le 17 septembre 2015, la responsa­bilité politique de l’assassinat durappeur antifasciste Pavlos Fys­sas, aucune conséquence politi­que ou juridique n’a suivi. Le 5 décembre c’est le ministre de la justice Paraskevopoulos qui sou­lève un tollé en déclarant“que l’on doit essayer d’inclure AubeDorée dans le débat démocratique plutôt que de l’affronter constam­ment” . Certes, il a été remercié,mais depuis cette sortie, Aube Dorée se sent pousser des ailes.

Ainsi, alors que durant toute la crise migratoire de l’année der­nière, Aube Dorée s’était plutôt montrée discrète, le 12 décem­bre, Yiannis Lagos, député in­culpé dans le procès d’Aube Do­rée qui se déroule depuis 130 jours, fit irruption avec ses sbires dans les locaux de l’association des journalistes lors d’une dis­cussion sur la question migra­toire, menaçant et insultant les journalistes présents. Quelques semaines plus tard, le 18 janvier 2017, il est passé à la vitesse su­périeure en frappant professeurs et parents d’élèves dans une réu­nion scolaire ou l’on discutait surcomment accueillir 20 petits ré­ fugiés. Si on ajoute à tout cela les différentes visites officielles con­jointes de députés du Syriza aux côtés de leurs collègues d’Aube Dorée, on ne peut que s’interro­ger sur les raisons de ce compor­tement. D’autant que lorsque le Syriza était dans l’opposition, il n’hésitait pas à s’affronter dans les rues avec Aube Dorée.

“Le ministre de la justice est un bon professeur mais pas un politicien. Il a été mal compris” tente d’expliquer Ilias Nikolacopoulos, analyste politi­que. “D’ailleurs, il a été remercié. Le Syriza s’en est éloigné.”Même son de cloche chez Thanos Dokos, po­litologue marqué à droite pour qui une alliance entre Syriza et une Aube Dorée démocratisée relève “de la science­fiction”.

En fait, il semble qu’Alexis Tsi­pras, conscient qu’il risque fort de perdre les prochaines élections, tente de limiter la victoire de son adversaire conservateur donné gagnant dans tous les sondages par plus de 35 % des voix.

Un jeu dangereux

La logique qu’il applique est la logique de Mitterrand en 85 : les voix qui vont au Front National sont autant de voix qui n’iront pas au RPR. Ici en Grèce, les voix qui iront à Aube Dorée sont autant de voix qui n’iront pas à la Nouvelle Démocratie. D’où la nécessité de donner une plus grande visibilité à ce parti qui reste la troisième force politique du pays depuis 5 ans,donc la seule capable de couper les ailes aux conservateurs. Pour preuve, la nouvelle retransmission en direct de ERT le 1erfévrier, de la manifestation d’Aube Dorée en commémoration des événements d’Imia en 96, lorsque la Grèce et la Turquie ont frôlé l’affrontement militaire. Avec un bonus: une lon­gue interview, en direct, le lendemain, du “Führer” Michaloliakos comme il aime lui-­même se faire appeler.

Le seul problème, c’est que dans le scénario mitterrandien de 1985, il n’y avait pas l’extrême droite en embuscade dans la majorité des pays européens, il n’y avait pas la crise financière qui sévissait un peu partout et il n’y avait pas non plus la crise migratoire qui sévit actuellement. Le calcul politicien d’Alexis Tsipras est tactiquement compréhensible, mais il est haute­ment risqué et pas que pour la Grèce.

 

Vidéo de la conférence de Stathis Kouvelakis :

 Que faire d’une victoire électorale ? A la lumière de l’expérience grecque.

Dans cette conférence du 20 février 2017 Stathis Kouvelakis introduit ses propos en partant de l’expérience amère payée par le peuple grec mais dont l’impact dépasse largement les frontières de la Grèce .

A l’heure actuelle toute proposition politique où que ce soit en Europe et au delà, qui affiche une volonté de vouloir rompre avec l’ordre néolibéral actuel et qui n’explique pas en quoi elle ne reproduira pas ce qui produit en Grèce, n’a aucune crédibilité et n’a pas le droit d’être pris au sérieux si elle ne tire pas les leçons de ce qui s’est passé en Grèce.

Cette défaite va se répéter sous des formes différentes mais avec les mêmes caractéristiques fondamentales . Si quelqu’un se présente comme voulant proposer une alternative politique de rupture avec cette barbarie néolibérale, ce capitalisme sanglant et qui ne dit pas  en quoi il ne fera pas comme Tsipras ne peut pas être pris au sérieux.

Il présente ensuite une analyse de la situation politique en Grèce depuis l’arrivée au pouvoir de Syriza, l’attitude de l’UE avant la capitulation de Tsipras en juillet 2015, le niveau de résistance des grecs, la dynamique des assemblées générales populaires,…

 

https://www.youtube.com/watch?v=R4_mZR2ljhY

Regard sur la crise grecque

 Panagiotis  Grigouriou est Ethnologue et historien, chroniqueur, analyste, initiateur d’un concept de tourisme alternatif  et solidaire en Grèce. Le regard de l’historien et de l’anthropologue sur l’actualité et le vécu de la crise grecque .

Salle d’attente

Bas monde, beau meuble rongé par la vermine. Elle, qui domine encore jusqu’aux derniers anicroches démocratiques subsistants, à deux secondes historiques près avant leur suppression. Cette “vermine” de l’élitocratie totalitaire mondialiste n’a pas encore tout osé. En attendant, elle servira aux prétendus électeurs son ultime (?) vermicelle, vomissure alors rejetée depuis les entrailles du système déjà suffisamment hybrique. Ce vermicelle politique justement, il avait été savamment servi en Grèce au moment des dernières élections de l’avant la Troïka (2009) sous le nom de Yórgos Papandréou. En France par exemple et en 2017, cette même pitance se nomme (d’abord) Emmanuel Macron. En Espagne ce serait du… jeûne Mariano Rajoy jusqu’au bout. Comme diraient les Italiens, “sordidezza”.

Propagande européiste. Salle d’attente d’un cabinet médical, Athènes, janvier 2017

Durant ces deux dernières semaines en Grèce, c’est l’incertitude qui sévit et alors la grippe, plus les scenarii requinqués sur le GREXIT et sur le retour… annoncé de la drachme. Les supposées négociations avec la Troïka seraient gelées, les cyniques hybridocrates du “gouvernement” SYRIZA/ANEL ne savent plus que faire pour persister au pouvoir… lorsque le quatrième mémorandum et la mort se profilent si clairement à l’horizon du naufrage.

Le ministrion (Finances) Tsakalotos se montre visiblement irrité, et finalement même contre son propre camp (séance au “Parlement” du 01/02). Il quittera peut-être… cette arche de la nausée avant le mémorandum 4. Peu importe en réalité. Tout semble suspendu à la décision du FMI. “Rester ou pas dans le programme grec”. “Programme grec” comme jadis “solution finale” toute proportion gardée, d’après la novlangue, celle que les journalistes “autorisés” boivent et régurgitent déjà avec leur tout premier lait.

Dans une salle d’attente d’un cabinet médical… bien fréquentée en ce moment par obligation grippale, un téléviseur reste allumé, le son est réglé bas. On y découvre pour une énième fois la propagande européiste sous forme de pseudo-documentaire consacré “aux institutions démocratiques de l’UE”, le film est évidemment produit et financé par ces mêmes “nazis bleus” de Bruxelles et de Strasbourg. Les patients, déjà malades de la grippe de saison suivent ainsi l’émission sous un œil ironique.

Revue actuelle. Cabinet médical, Athènes, janvier 2017
Façade à Athènes. Temps de crise 2010-2017
“Le plafond… a été atteint”. Cabinet médical, Athènes, janvier 2017

Ensuite, vint le moment des… actualités, la présentatrice-journaliste au look imposé de la bimbo-prostituée (et ce n’est pas un hasard non plus), sous un timbre fort dramatique, montre, images à l’appui, les “premières bourdes de l’administration Trump, ainsi que la mobilisation des démocrates aux États-Unis et ailleurs contre le nouveau Président US”. La salle d’attente se réveille, un jeune homme lance: “Salopards, laissez-le faire ce qu’il a dit. Bouffons de manifestants financés par Soros !”. La salle approuve, fièvre ou non. Par la suite, c’est l’habituel (depuis 2010) matraquage journalistique (et mitraillage psychologique d’abord visant à miner la résistance des citoyens), déversant l’annonce en cascade de nouvelles mesures dans la mise-à-mort (“d’austérité” d’après la novlangue).

Taxes et impôts galopants, obligation faite de payer par CB (voir également mon intervention à ce sujet sur le site “Insolentiae” ici ), déremboursement accru en cascade sur les médicaments et sur les dépenses de santé, “car sinon, le programme ne passera pas et nos créanciers nous couperont les liquidités nécessaires au remboursement des prochaines échéances”. Les scénaristes du journal télévisé ont ensuite enchainée sur un reportage, issu de la commémoration à Athènes de l’Holocauste et des 6 millions de victimes. “Tiens, encore les Allemands. Ils ont brûlé nos Israelites, comme tous les autres. À présent ils nous brûlent ici par l’économie et avec l’euro”. Europe… immense salle d’attente !

Les peuples… même affectés de grippe, n’ont pas forcément la mémoire courte. Et dans la salle d’attente d’un médecin grec, les psychotropes journalistiques auront resté sans grand effet. Tout comme les arguments des revues consultables, par exemple sur la prétendue “Good Life”. Sur la table basse ; une simple page format A4 placée en évidence, informe les patients du jour (comme de chaque jour) que “le plafond en nombre de patients que la Sécurité Sociale rembourse a été atteint. Toute consultation au-delà de ce plafond, elle sera alors encaissée (non remboursée)”.

Rue de la Théorie. Athènes, janvier 2017
La vie des Durrell à Corfou. Série télévisée. Revue. Athènes, janvier 2017
La… NASA grecque sous SYRIZA. Quotidien “Kathimeriní”, janvier 2017

Décryptage: en Grèce, chaque médecin conventionné (depuis le mémorandum II/III) ne peut recevoir qu’un nombre très restreint de “patients remboursables” (3 à 5 par jour dans la pratique). Au-delà ; les autres patients, ceux qui auront pris leurs rendez-vous après le… basculement et alors même “assurés” et cotisants, ils doivent régler la consultation et ils ne seront pas remboursés. Leur cas sort ainsi du cadre de la Sécurité Sociale… pour cause de quotas, ils devront tout simplement payer ou sinon… ne plus être examinés par un médecin.

Et quant aux autres (plus de 3 millions de Grecs tout de même) ceux non-assurés, c’est également sauve qui paye ! À l’ouverture de la porte, la… patiente sortante quitte le médecin alors sceptique. Nous pensions tous dans cette salle d’attente que c’était à cause de notre bien commune grippe. “Madame, lui dit-il le praticien, le système informatique indique qu’à partir du mois de mars la Sécurité Sociale vous… jettera”. “Que se passera-t-il, je suis au chômage docteur… Allons-nous être pris en charge d’une manière ou d’une autre ?” “Je suis désolé Madame, Dieu seul le sait !

Nouvelle pauvreté. Athènes années 2010-2017

Pas de commentaire dans la salle d’attente. Il n’y a plus rien à commenter en Grèce dans pareils cas… globaux et plus du tout théoriques. Dans la rue en sortant, sur les trottoirs on y découdrait de petits tracts du parti de l’Aube Dorée et du néonazisme grippal avéré: “Indépendance Nationale”. Aspiration d’un tout un peuple, exprimée si largement lors du référendum du “NON” à 62% en 2015 sous… la trahison programmée des Syrizistes.

En ce moment, l’Aube Dorée espère… visiblement capitaliser les suites. Les sondages la placent durablement à la troisième place (5,6% !) dans les attentions de vote (SYRIZA 15% et Nouvelle démocratie 25%), ce qui en dit long de la putréfaction du système politique grec.

Tract de l’Aube Dorée. Athènes, janvier 2017
Le “Parlement”… comme une île. Presse grecque, temps de crise (2010-2017)
“Urne”. Athènes, temps de crise, 2010-2017

Pourtant, sous l’Acropole le sentier de la Théorie en honneur à nos philosophes semble toujours praticable, sauf que nos pratiques se délitent. Les patients du mouroir économique (et mouroir tout court) grec en sont conscients, il y a que les médiocrates et les politiciens qui poursuivent en orbite… caste humaine alors devenue de plus en plus… hors-sol.

Dans une revue comme dans l’attente, le reportage consacré sur la série télévisée inspirée de la vie des Durrell à Corfou, se focalisant surtout sur la biographie de l’écrivain britannique Lawrence Durrell “amoureux inconditionnel de la Grèce”. Pas une ligne pourtant sur le rôle de Lawrence Durrell, agent de renseignement britannique au service de la répression coloniale à Chypre dans les années 1950. Pourtant, tout est clairement conté (et argumenté) à la lecture du carnet personnel de son ex-ami (déjà), le grand poète Yórgos Seféris (première édition en grec en 1986).

La salle d’attente, comme d’ailleurs partout en Grèce, l’opinion commune a si bien rigolé de la décision gouvernementale présentée à maintes reprises aux informations sur l’annonce faite par le gouvernement, celle de la mise en place… d’une Agence Spatiale grecque. Depuis, toute la Grèce ironise sur cette “NASA grecque”. “C’est pour que SYRIZA et les autres puissent quitter le Parlement au moment de l’effondrement”, peut-on entendre parfois lorsque les messages des auditeurs passent en direct à la radio. Du moins par moment, nous avons toujours conservé une certaine capacité à fabriquer le rire… c’est toujours signe de vie.

Dimítris Christoúlas au matin du 4 avril 2012. Athènes, Place de la Constitution
Monument du Soldat Inconnu. Place de la Constitution à Athènes
Au… Citoyen Inconnu. Sur l’arbre de Dimitri. Athènes, Place de la Constitution, 2014

Le vermicelle politique pourtant, est toujours là, prêt à être servi. Après la série de suicides politiques entre 2012 et 2014, dont celui du retraité-pharmacien Dimítris Christoúlas Place de la Constitution en 2012 en est depuis le symbole, le calendrier de la Resistance avait été savamment “électoralisé”. Une fois le premier vermicelle Papandréou avalé, les Grecs estomaqués remplirent aussitôt les rues et les places par de manifestations très dynamiques contre l’Occupation germano-troïkanne. Et le système a su de son côté trouver comment transformer l’attente et surtout la suite logique SYRIZA… en couloir de la mort, avec toute la complicité active des principaux intéressés, les autres partis – même de l’opposition – ayant joué leur propre rôle.

Ce couloir de la mort dans lequel nous nous trouvons toujours, a déjà causé en Grèce la mort de la Gauche (de toute la Gauche), ainsi que le discrédit final du système politique, voire, celui du système à la Démocratie hémorragique généralisé presque à tous les étages. Bas monde, beau meuble rongé par la vermine, la parodie en plus.

Manifestants et indignés. Athènes, 2011

Alexis Tsipras dont l’épouse Peristéra aurait enfin trouvé un poste universitaire non sans un coup de pouce, et dont l’ami proche, le rebelle-bohème sans profession Karanikas deviendra son conseiller embauché, au style certes inimitable, voilà pour la parodie, hélas payante. Parodie toujours, ces piètres dizaines d’individus issus des décombres des organisations de jeunesse SYRIZA, ayant manifesté l’autre soir devant l’Ambassade des États-Unis… contre Donald Trump.

En Grèce il faut dire, les partisans les plus fervents des mondialisateurs n’ont pas trouvé grand monde pour manifester de la sorte, hormis ceux des ONG et autres structures sponsorisées (ouvertement ou pas) par le financier Soros, les organisateurs ont même mobilisé les migrants des campements d’Attique, Parodie toujours.

Karanikas, ami et conseiller d’Alexis Tsipras. Presse grecque, janvier 2017
Jeunesse SYRIZA devant l’Ambassade des États-Unis. Athènes, janvier 2017, presse grecque
Athènes… sous l’européisme. Temps actuel

L’hiver finira par s’adoucir et la grippe passera. En mer Égée, l’aviation et la marine de la Turquie multiplient les violations de l’espace maritime et aérien grecs. Il y a quelques jours, une corvette turque embarquant la crème l’État-major des forces armées du pays d’Erdogan a fait le tour de l’îlot grec Imia que l’élite turque revendique (comme pratiquement la moitié des Balkans, de la Syrie, de l’Irak… et du Caucase). Les forces armées grecques sont aussi en état d’alerte. Tétanisés par le RCO (Régime de la Crise Obligatoire), les Grecs pourtant observent cette situation et mesurent (si possible) le danger.

L’élitocratie totalitaire mondialiste n’a pas encore tout osé, sauf qu’elle ambitionne clairement la mise-à-mort pure et simple des pays, des États, des nations, des souverainetés et des démocraties. En ce temps de la grippe et du vermicelle politique, la vraie fracture ne sera même plus celle entre nos gauches et nos droites. Au risque calculé (?) de faire exploser (ou imploser) tous les systèmes politiques. Comme diraient nos amis Italiens, “sordidezza”, mais nous y sommes.

Se remettant lentement de… sa grippe authentique, Greek Crisis reprend ses textes comme il le peut, dont l’écriture est d’ailleurs… étroitement surveillée. Vivement le Printemps.

Greek Crisis, dont l’écriture… est étroitement surveillée. Athènes, février 2017

* Photo de couverture: Athènes, temps de crise, 2010-2017

 

Total : lancement de forages gaziers en Grèce

La découverte d’importantes ressources naturelles en Israël et en Egypte a motivé les grandes entreprises à s’intéresser à la Méditerranée orientale proche. La société d’exploration pétrolière française Total débute son forage exploratoire marin au large de Chypre.

Suite à la première découverte du gisement Zohr (gisement de gaz en mer méditerranée) en Egypte, les experts estiment que les chances pour découvrir des gisements similaires à Chypre sont considérables.

3 entreprises ont bénéficié, par Chypre, de licences d’exploitation : Total, Exxonmobil et Eni.

Total prévoit également de lancer des activités de forage similaires en Grèce en mer Ionienne. Une délégation a été reçue il y a quelques semaines par les membres du gouvernement grec pour évoquer ces opérations. .

Cependant, l’impact de Zohr pourrait aller bien au-delà des frontières de l’Egypte, en raison de son emplacement et son infrastructure géographique.

Zohr est situé à seulement 90 kms d’Aphrodite, à seulement 7 km au large de Léviathan. Cette proximité pourrait permettre un développement coordonné et ouvrir de substantielles économies pour la réalisation d’une infrastructure d’exportation de gaz compétitive.

La création d’un nouveau pôle d’échange gazier en Méditerranée orientale présenterait des avantages pour tous les acteurs impliqués, mais également une belle opportunité pour l’Europe  où les importations de gaz indexées sur les besoins vont croître à compter de 2020 en raison de la baisse de la production nationale et l’expiration des contrats à long terme avec la Norvège et la Russie.

L’UE se prépare à soutenir un programme de coopération visant à développer une plate-forme de gaz en Méditerranée orientale, pour des considérations de politique énergétique mais aussi de politique étrangère.

 En terme de politique énergétique, cette initiative pourrait ouvrir une  stratégie de diversification dans l’approvisionnement de l’UE. En terme de politique étrangère, cela permettra une collaboration internationale dans un domaine qui présente actuellement très peu de possibilité de coopération.

Zohr en langue arabe signifie « prospérité ». 

http://www.lepetitjournal.com/athenes/economie/actu-economie/269716-total-lance-ses-forages-gaziers-en-grece

Athènes-Chypre : Tous les démocrates d’Europe sont concernés

Panagiotis Grigoriou  » Ce qui s’y joue à propos de Chypre actuellement, n’est que l’expérience en réel de ce qui demeure programmé à court et moyen terme, s’agissant de la mise à mort (voulue par les mondialisateurs) des États et des nations, (autant) autrement que par la guerre classique »

Son analyse en 3 parties intitulées :

Chypre embrassée par les vagues – I  http://www.greekcrisis.fr/2017/01/Fr0579.html#deb

Chypre embrassée par les vagues – II  http://www.greekcrisis.fr/2017/01/Fr0580.html#deb

Chypre embrassée par les vagues – III  http://www.greekcrisis.fr/2017/01/Fr0581.html#deb

 

Encore une baisse pour les retraités aux faibles revenus

Le gouvernement grec bafoue les retraités aux faibles revenus en leur donnant les «miettes»

Article de Dimitris Stratoulis publié sur Kontra News. (Traduction Vanessa de Pizzol)

Le gouvernement, en amputant l’ ΕΚΑΣ[1], a pris aux retraités aux faibles revenus plus que ce qu’il leur avait donné avec l’aide exceptionnelle

Le gouvernement, après avoir, dans un premier temps, bafoué les retraités aux faibles revenus  en leur donnant les « miettes » de tout ce qu’il avait par ailleurs réussi à leur arracher, des « miettes » en comparaison de tout ce que les nouvelles mesures vont leur supprimer, leur a souhaité une bonne année… avec la principale annonce de janvier : la dégringolade de l’EKAS qui rétrograde le versement mensuel fixé entre 57,20 et 230 euros à une fourchette comprise entre 28,75 et 115 euros.

Le gouvernement Tsakalotos, par l’intermédiaire de ce courrier destiné aux créanciers et dégradant pour le peuple et le pays, s’est engagé à ne verser qu’une seule fois ce dividende social en affirmant « qu’on ne l’y reprendrait plus ». Il a ainsi avoué qu’il s’agit d’une aide exceptionnelle et non d’un treizième mois, comme c’était la règle jusqu’alors. Il s’est en outre engagé auprès des créanciers en annonçant que si un écart important se faisait jour par rapport aux objectifs budgétaires, il serait alors compensé en pratiquant une coupe dès 2017 des principales pensions versées.

Dans le même temps, le gouvernement a réduit de façon drastique (soit environ 50%) l’EKAS pour une part importante des retraités aux faibles revenus (240 000). C’est-à-dire qu’il leur a donné 300 euros en une fois pour les priver en moyenne de 1 140 euros sur l’année 2017, davantage en 2018, tandis qu’avec sa suppression définitive en 2019 ils perdront irrémédiablement et en une seule fois 2 380 euros sur l’année.

Le gouvernement continue donc son processus de radiation progressive de l’EKAS jusqu’à la date du 31/12/2019 où plus personne n’y aura droit parmi les 376 000 retraités aux faibles revenus qui en bénéficient encore jusqu’au 30/06/2016. De cette manière, il applique l’engagement qu’il a pris avec le 3e mémorandum concernant les économies à réaliser pour le compte des créanciers grâce à l’abolition définitive de l’EKAS qui débutera le 1/07/2016 et prendra fin en 2019 rapportant ainsi 2,24 milliards d’euros.

La suppression progressive de l’EKAS a débuté en juillet dernier [2016], lorsqu’elle a été accordée à 231 279 retraités aux faibles revenus, répondant aux nouveaux critères de revenus qui se sont encore durcis, tandis que le mois précédent, 376 230 retraités avaient pu encore la toucher. Ce qui signifie que pour 144 951 retraités, l’EKAS a disparu à jamais depuis le 1/03/2016. La perte se monte de 30 à 230 euros par mois. Sur les 231 279 personnes qui ont continué à la percevoir, environ 20 000 ont reçu une somme inférieure : au lieu des 230 euros versés jusqu’en mai 2016, ils n’ont cette fois reçu que 175, 115 ou 57,5 euros.

Cette coupe sombre a permis d’économiser pour le compte des créanciers plus de 330 millions d’euros en 2016, soit bien plus que l’engagement mémorandaire du gouvernement fixé à 220 millions d’euros.

La nouvelle coupe de l’EKAS concerne environ 240 000 retraités aux faibles revenus qui ont échappé à la radiation de juillet 2016.

La confrontation politique entre le ministère du Travail et le tandem Vroutsis-Mitarakis de Nouvelle Démocratie pour l’attribution de la responsabilité de la coupe de l’EKAS, représente un défi pour les retraités aux faibles revenus qui savent que ceux qui pratiquent des coupes et qui suppriment cette aide, de concert et distinctement, ne sont autres que les gouvernements SYRIZA-ANEL et ND-PASOK.

Le gouvernement Samaras-Vénizélos a signé avec les créanciers la radiation de l’EKAS conjointement à la mise à jour du 2e mémorandum à l’été 2013 et a confirmé son engagement avec le mail de Hardouvelis en décembre 2014. Le gouvernement SYRIZA-ANEL a réaffirmé l’engagement du précédent gouvernement en signant le 3e mémorandum qu’ils avaient voté ensemble (SYRIZA-ND-ANEL-PASOK-POTAMI) le 14 août 2015. Sur la base de cet engagement mémorandaire des 5 partis, l’EKAS a commencé à connaître des coupes depuis juillet 2016 dans le processus de sa radiation progressive qui deviendra définitive le 31/12/2019.

La diminution et la radiation de l’EKAS sont une mesure inhumaine, elle conduit au Kaiadas social des centaines de milliers de retraités en état de pauvreté. Elle augmente le désespoir dans les familles comportant des chômeurs et se maintenant grâce à la retraite des parents et des grands-parents. Les retraités de notre pays, avec leurs manifestations massives et combattives, en particulier lors du 15 décembre, ont informé le gouvernement, tout l’establishment politique mémorandaire ainsi que les créanciers qu’ils ne s’accommodent et qu’ils ne sont pas dupes des politiques caritatives, mais qu’ils luttent pour la défense et l’amélioration des retraites, de l’EKAS, des salaires et des politiques sociales. Ils ont également fait savoir que leur lutte se poursuivra avec le peuple tout entier pour renverser les trois mémorandums de l’austérité, funestes aux retraites, et pour contrer le 4e mémorandum en préparation par les créanciers et le gouvernement.

[1] « prime de solidarité pour les petites retraites inférieures à 700 euros par mois », http://www.lefigaro.fr/conjoncture/2015/06/26/20002-20150626ARTFIG00179-grece-le-systeme-de-retraite-enjeu-des-negociations.php

Publié sur Unité populaire https://unitepopulaire-fr.org/2017/01/17/le-gouvernement-grec-bafoue-les-retraites-aux-faibles-revenus-en-leur-donnant-les-miettes/

 

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