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Qui veut gagner des millions de Soros ? La rubrique de Panagiotis Grigoriou

Panagiotis  Grigoriou est Ethnologue et historien, chroniqueur, analyste, initiateur d’un concept de tourisme alternatif  et solidaire en Grèce. Le regard de l’historien et de l’anthropologue sur l’actualité et le vécu de la crise grecque.
Qui veut gagner des millions de Soros ?

Couleurs d’automne. Les feuilles tombent des arbres, tandis que des millions tombent paraît-il sur les Balkans… des caisses du financier et spéculateur George Soros. Á Athènes, le Ministère des Affaires étrangères et fanfaron attitré Nikos Kotziás vient de démissionner. En Conseil des Ministres, Kotziás a eu une altercation verbale très violente avec son homologue à la Défense, l’autre fanfaron Pános Kamménos. Ce dernier, d’après les medias grecs, a entre autres reproché à Kotziás d’avoir reçu 50 millions d’euros du financier Soros dans le but de faire avancer coûte que coûte l’accord Macédonien de Tsípras-Zaev, lequel est autant celui de Berlin, de Bruxelles, de l’OTAN et surtout, celui du spéculateur Soros. Les feuilles… tombent, couleuvres d’automne, avalées parfois comme les ministres !

Couleurs d’automne à Ágrafa, octobre 2018

La presse évoque largement ces faits et d’abord gestes, à l’instar du quotidien “Ta Néa” du 19 octobre au sujet du financement présumé de Kotziás via les ONG du spéculateur George Soros. En plus, Kotziás est aussi montré du doigt car il aurait utilisé des fonds du Ministère des Affaires Étrangères, plus exactement 19 millions d’euros d’après la presse, pour rémunérer une certaine presse en Albanie et en Ex-République Yougoslave de Macédoine, toujours dans le but de promouvoir l’accord signé en juin entre Tsípras et Zaev (radio 90.1 FM et “Ta Néa” du 19 octobre).

En cet automne décidément, les feuilles, celles des arbres… et pas seulement, elles tombent. On sait qu’à leur base, une sorte de petit bouchon se forme, qui empêche la sève de circuler. La feuille se dessèche, devient fragile et tombe, autant on dirait que le contenu réel des régimes supposés politiques qui sont encore les nôtres. Dans nos pays, comme l’écrit ailleurs Dimitri Orlov, “l’effondrement social et culturel est en grande partie déjà bien avancé mais qu’il est actuellement dissimulé par le fait que les systèmes financiers, commerciaux et politiques fonctionnent encore à un certain niveau, ou du moins prétendent fonctionner en utilisant de l’argent injecté ex nihilo, avec de graves déséquilibres commerciaux, des statistiques falsifiées, des systèmes électoraux trafiqués”.

En Thessalie très profonde, les habitués de la gastronomie réellement existante avant même le véganisme intégral et d’ailleurs intégré aux finalités du système des globalistes, dégustent pour l’instant les traditionnelles soupes à la viande et aux tripes. Celles que les tavernes spécialisées proposent uniquement dans la matinée, le tout, sous la sonorité parfois parasitée des radios branchées sur les informations du moment. “C’est une autre soupe aux tripes…ces politiques”, commenteront alors volontiers les clients entre deux cuillerées bien remplies. Le pays avalé… à la petite, ou de préférence à la grande cuillère.

En Thessalie toujours, derrière la vitrine d’une petite échoppe, les passants y découvrent alors cette affiche photographiée ailleurs et reproduite en place et lieu d’Instruction civique populaire: “Les parasites de l’homme sont les sangsues et les tiques qui sucent son sang pour s’en détacher un fois assouvies. Les autres parasites de l’homme que sont les banquiers et les politiques ne cessent jamais de pomper le sang de leurs victimes.” Verdict… populaire, la presse autorisée dirait sans doute “populiste”.

Soupes de tradition. Thessalie, octobre 2018
Petits restaurants du matin. Thessalie, octobre 2018
Les… parasites de l’homme. Façade en Thessalie, octobre 2018

Les affaires trop courantes des marionnettes politiques grecques sont de plus en plus dépravantes et autant dépravées, et l’on note que pour l’instant en tout cas, Kotziás ne dépose pas plainte par exemple pour diffamation, bien au contraire, c’est le Procureur qui ordonne une enquête, déjà sur le financement de certains médias en Albanie et en Ex-République Yougoslave de Macédoine par le Ministère des Affaires Étrangères sous le règne de Kotziás, d’après la presse grecque du 19 octobre. Le grec de la rue comme du café forcément amer, à l’instar du garagiste du quartier se demande alors de manière fort logique: “Si Kotziás a vraiment touché 50 millions de la part de Soros, alors Tsípras combien de millions aurait-il touché pour faire passer l’accord Macédonien ?” Question très populaire et interrogation sans doute “populiste” !

Il y a une semaine, j’évoquais l’Europe, la Grèce et même Soros, en la bonne compagnie de mon ami Olivier Delorme en visitant Salamine et les lieux de mémoire de sa bataille qui est alors et toujours la nôtre. Ensuite, nous avons partagé un autre moment lettré et attachant, lors de la présentation de son livre, “Tigrane l’Arménien”, rencontre animée par Marie-Mai Corbel à Lexikopoleío à Athènes le 11 octobre.

Il a été donc question de Salamine, des Arméniens, de leur Génocide de la part de la Turquie, de la géopolitique en gestation, de notre piètre nouveau siècle, comme des limites et des frontières que les mondialisateurs veulent détruire pour tous les autres sauf pour leur caste évidemment. Enfin, maigre et néanmoins consolation, tout le monde aura remarqué la présence de Léxi (le “Mot”), le chat d’Odile et de Yánnis de Lexikopoleío, nouvelle âme féline et digne gardienne des lieux. Et depuis, voilà que l’actualité nous rattrape une fois de plus, pour ne pas dire qu’elle nous dépasse.

Le journaliste, ouvertement pro-Étatsunien et pro-britannique Yórgos Trángas dans son émission sur 90,1 FM du 19 octobre, expose alors très volontiers sa version des faits: “Kotziás, c’est l’idiot utile et c’est aussi pour cette raison qu’il n’a pas été soutenu par Tsípras. Ce dernier préfère obligatoirement et de loin son Ministre de la Défense Kamménos, et pour cause. Kamménos est depuis un moment lié au cercle de Donald Trump, et aussi à Israël, et il ne fait rien sans au préalable téléphoner aux Américains, comme lors de son récent voyage officiel aux États-Unis. Lorsque tout le monde à Athènes et de manière il faut dire imprudente avaient ouvertement soutenu verbalement Hilary Clinton, Tsípras compris, Pános Kamménos était le seul homme politique grec s’exprimant publiquement en faveur du candidat Trump.”

Salamine, mémoire de la bataille, octobre 2018
Salamine, octobre 2018
Olivier Delorme, Marie-Mai Corbel et… Léxi. Athènes, le 11 octobre 2018
Léxi de Lexikopoleío. Athènes, octobre 2018

“C’est ainsi que Kamménos a déjà obtenu le feu vert américain pour son futur voyage officiel à Moscou accompagnant Tsípras chez le Président Poutine, cette visite officielle est programmée pour la fin de cette année. Tandis que Kotziás, il avait été d’emblée déclaré comme étant indésirable à Moscou, car il est à l’origine de l’extradition frappant deux diplomates Russes l’été dernier, d’où cette dégradation finalement nuisible dans les relations entre la petite Grèce et la grande Russie. Accessoirement, Kotziás avait été davantage l’homme de Berlin ou plutôt de Soros, comme finalement de leur politique dans les Balkans, ce que Russes et Américains peuvent ne pas disons-nous, trop apprécier. Je sais que Kamménos suit de très près les agissements et les magouilles de Soros en Grèce et il prend des notes, de même que sur les affaires relatives aux millions qu’il distribue ici ou là, et notamment, à certains journalistes et médias, dont le très Syrizíste ‘Quotidien des Rédacteurs’, toujours d’après Kamménos, et c’est à se demander ce que Soros aurait fait… pour que la télévision publique ERT lui consacre récemment un documentaire, encensant principalement les supposés bienfaits des structures et ONG à la Soros à travers le vaste monde.”

“Lors d’une rencontre entre nous un peu plus tard, c’est d’ailleurs Kamménos en personne qui m’a raconté qu’au moment des douloureuses négociations finales entre l’équipe Tsípras et Bruxelles c’est-à-dire Berlin en juillet 2015, Tsípras l’a sollicité le convoquant à Bruxelles pour trouver enfin une issue. Dépêché à Bruxelles, Kamménos a d’abord averti Tsípras que la salle attribuée à la délégation grecque était en réalité truffée de micros allemands et qu’ensuite, Varoufákis est franchement un agent, voire, un employé de Soros. Une partie de la délégation grecque s’est ainsi réunie dans un restaurant à poisson, et c’est Kamménos qu’a téléphoné aux Américains de l’administration Obama à l’époque, laquelle a réagit quelque temps plus tard en indiquant aux Grecs qu’ils devaient attendre l’appel imminent de François Hollande ainsi que l’arrivée dans l’urgence, d’une délégation françaises, porteuse des propositions à adopter pour ainsi… clore les négociations.”

Lors de sa visite la semaine dernière aux États-Unis, Kamménos a informé ses interlocuteurs des agissements de Soros, comme il en a été informé autant de leur côté par les Américains. D’ailleurs Tsípras en était informé des intentions de Kamménos avant son départ. En réalité, le vaniteux Kotziás a été dévoré et limogé par Kamménos, au moment même où ce dernier montait dans l’avion à destination des États-Unis. Inutile de dire que Kamménos a obtenu le feu vert pour attaquer Soros et les siens en Grèce, depuis ceux de l’équipe de Donald Trump, car on sait combien le Président des États-Unis est en guerre contre le financier et spéculateur Soros”, Yórgos Trángas, 90,1 FM au 19 octobre, cité de mémoire. Voilà ce que les Grecs peuvent entendre parfois à la radio. Alors info, et/ou intox ? Certes, le “Quotidien des Rédacteurs” attaque très violemment Kamménos, sauf qu’à ce jour, il ne porte pas plainte contre lui, étrange non ? Au pays… très occupé, on sait encore s’amuser dans un sens entre nos maux et leurs mots, nos actualités et autres analyses géopolitiques, c’est à la fois du Thucydide et d’Agatha Christie ainsi réunis !

En Thessalie comme ailleurs, on suit les nouvelles et on reste assez perplexe. Deux ministres du même gouvernement qui s’accusent mutuellement et qui se déchirent, un financier spéculateur du trop vaste monde qui intervient dans les affaires des pays, des sociétés et des nations pour en faire de la bouillie sans la moindre légitimité et même dans l’illégalité, puis, des faits présumés rapportés si graves, que la Justice devrait alors intervenir. Mais non. Le Président de la République n’intervient guère pour provoquer des élections anticipées, même… au moyen d’un système électoral trafiqué. On reste perplexe, sauf celles et ceux qui ne se nourrissent que grâce aux repas distribués par l’Église Orthodoxe par exemple et non pas d’actualités jugées inutiles. Petit pays… soigné aux petits ognons !

Montagne en Thessalie, octobre 2018
Repas distribué par l’Église. Thessalie, octobre 2018
Bois de chauffage. Thessalie, octobre 2018
Petits ognons. Thessalie, octobre 2018

Couleurs d’automne donc. Le seul pays grec qui se dresse disons… au-dessus de la mêlée, c’est peut-être celui des montagnes. Les feuilles tombent des arbres, ses contrées sont belles mais quasiment vidées de leurs habitants. On y rencontre surtout les animaux, leurs bergers, puis, ici ou là, quelques visiteurs consciemment égarés. Les derniers gardiens des lieux comme à Agrafa, village et autant massif montagneux en Eurytanie, près de la Thessalie voisine, ne font pas dans le folklore, sauf que l’esprit rebelle et résistant des ancêtres n’est pas mort.

Il faut préciser qu’un projet pharaonique germano-compatible d’installation d’éoliennes menace cette région montagneuse dont l’autonomie et l’autogestion furent même respectées sous les Ottomans, c’est pour dire. La décision date d’avril 2018, et c’est un décret du ministrion de l’Énergie, ayant en son temps prolongée, provoqué déjà l’indignation des habitants à Ágrafa.

Le décret impose sans la moindre consultation préalable, la construction de deux immenses parcs d’éoliennes. Faisant suite à plusieurs ajournements et rejets, le ministère de l’Environnement et de l’énergie, a finalement accordé la licence d’installation aux deux projets éoliens géants dans cette région d’Ágrafa, ces décisions ont été émargées par le ministre par simple ordonnance, destinée au… Gestionnaire des Énergies, un certain Alexópoulos.

De leur côté, ceux du Mouvement des citoyens pour la protection de l’environnement de la région Evritanía/Ágrafa rappellent d’abord, que pour ce qui est du grand ensemble montagneux du Pinde, son cœur se situe très exactement à Ágrafa. Ainsi, une économie viable et surtout intelligente dans la région, n’est alors possible qu’en mettant l’accent entre autres, sur le tourisme alternatif, sur l’agriculture et sur des activités traditionnelles. Seule une telle option viable peut redonner vie et ainsi espoir aux réalités humaines de la région, pour la maintenir même dans la mesure du possible au sein d’une économie nationale ayant enfin du sens. Pauvre pays, dévasté durant la décennie 1940 entre l’Occupation et la Guerre Civile, Grèce des montagnes alors vidée de plus de 700.000 habitants et dont le coup de grâce se concrétise actuellement sous les escrocs politiques actuels.

NON aux éoliennes. Agrafa, octobre 2018
NON aux éoliennes. Ágrafa, octobre 2018
Ágrafa, octobre 2018

Ces derniers, largement contrôlés, et très probablement… concrètement et correctement “remerciés” par les constructeurs des éoliennes, Allemands d’après le reportage disponible; marionnettes politiques grecques faisant alors de leur… mieux. Deux grandes installations éoliennes devraient être construites aux sommets vierges de la région d’Ágrafa et cela à une altitude d’ailleurs inhabituelle en Grèce comme dans le reste monde, se situant entre 1600 et 2100 mètres. Là où les routes n’existent souvent pas, et lorsqu’elles existent, elles ne sont pas capables de supporter le transport d’énormes éoliennes ainsi que les matériaux nécessaires à la réalisation de l’installation. Des kilomètres de routes devront ainsi voir le (mauvais) jour à travers forêts de sapins et alpages, qui abritent encore une flore rare ainsi que l’essentiel pour ce qui est des grands mammifères et d’oiseaux sauvages du pays, et il s’agit d’une zone très protégée, classée NATURA 2000. L’Hybris et la démesure… qui atteignent des sommets jusque-là inimaginables.

Il est encore souligné par la “petite” presse engagée, souvent sur Internet, qu’en plus des éoliennes, tout un réseau de transport d’électricité devrait également être mis en place pour que les parcs des éolienne puisse être interconnecté au réseau existant plus bas en altitude. Cela signifie que les pylônes et les câbles de haute tension sur de nombreux kilomètres… “embelliront” autant le paysage, et ceci jusqu’au Lac Plastiras situé à 1000 mètres d’altitude en Thessalie voisine. En ce qui concerne le lac, il n’est pas exclu même, que ce projet entraîne également la privatisation de sa centrale hydroélectrique. Les parcs éoliens ne sont pas stables en termes de production d’énergie, ce qui oblige à compléter les charges en électricité par l’utilisation de l’énergie hydroélectrique. Et voilà comment les “investisseurs” iraient également prendre le contrôle des ressources en eau, lesquelles jusqu’à présent, elles sont aussi destinées à l’irrigation.

Pour les défenseurs de la… dernière intégrité de la région, “il y a aussi de quoi dénoncer le tristement célèbre lobbyiste pseudo-écologiste de Greenpeace, lequel s’adonne depuis peu à travers les médias, à une propagande sans pareil contre l’utilisation du charbon lignite dans la production d’énergie en Grèce et pour l’utilisation des énergies dites renouvelables, tandis qu’au même moment, la Banque européenne d’investissement (BEI) qui est la banque de l’Union européenne (UE), financera l’ensemble du projet, ceci afin d’augmenter le chiffre d’affaires du constructeur allemand des éoliennes”, articles sur Internet grec, dont par exemple sur le site Alfavita, datant de juillet 2018.

Ágrafa, octobre 2018
En Thessalie, octobre 2018
Petite taverne. Thessalie des montagnes, octobre 2018

Le berger rencontré près des alpages à Agrafa est naturellement très inquiet. “Nous avons été abandonnés et trahis par les politiciens et par les élus locaux, tous ces gens sont vendus aux Allemands. Nous ne voulons pas de cette catastrophe ici, regardez le sommet d’en face, ils ont déjà installé des instruments pour prendre toute la mesure du vent, de notre vent, mais comment alors les arrêter ?”

Trois sommets plus loin, des habitants et habitués de la petite taverne au village situé dans les montagnes d’Athamania et sur le cours supérieur de la rivière Achéloos à environ 800 mètres d’altitude, ont vu arriver un beau matin d’octobre les élus locaux et régionaux, en même temps que les gros engins. Travaux publics en vue, les élections auront lieu au mois de mai comme on sait. Couleurs toujours d’automne !

Les feuilles tombent des arbres tandis que des millions tombent paraît-il sur les Balkans. La nuit dernière, l’accord macédonien de Tsípras et de Zaev a été ratifié au Parlement de l’Ex-République Yougoslave de Macédoine, huit élus de l’opposition ont voté contre leur camp et contre d’ailleurs la volonté du peuple voisin, lequel, a largement boycotté et ainsi invalidé le referendum proposé par Zaev sur la question. L’opposition à Skopje dénonce ouvertement la corruption des élus de son camp. D’après ces accusations, ils auraient reçu jusqu’à deux millions d’euros pour changer d’avis, presse grecque du 20 octobre. Pános Kamménos bien d’ici, ne dit par autre chose dans un Twitter…bien nocturne.

Porte du passé. Thessalie, octobre 2018

L’Hybris et la démesure… qui atteignent des sommets encore inimaginables, et pas seulement à Ágrafa. Entre les… portes du passé et celles du futur en pleine gestation il n’y a qu’un laps de temps humain ainsi bien bref.

Les Grecs observent finalement la situation en Italie, cela, en dépit de la propagande déployée par les médias Euro-berlinois et Soros-compatibles de la Grèce soumise. La clef de l’avenir elle est peut-être dans la main des amis Italiens. Comme le souligne Jacques Sapir, “l’Italie sera donc soumise à une forte pression, tant des autorités de l’Union européenne qu’en interne, la presse se déchaine actuellement contre le gouvernement, et en provenance des marchés financiers. Mais, le gouvernement italien semble s’être préparé à y résister. Il peut s’appuyer sur les présidents des deux commissions économiques de l’Assemblée et du Sénat, Claudio Borghi et Alberto Bagnai, dont les convictions eurosceptiques sont bien connues, sur des membres du gouvernement, de Salvini à Savona, mais aussi sur des soutiens extérieurs et, plus important encore, sur une majorité des italiens.”

“Le fait que la réunion annuelle du centre de recherche de l’Université de Pescara que dirigeait Alberto Bagnai jusqu’à son entrée en politique, qui aura lieu les 10 et 11 novembre s’annonce très suivie, plus de 600 participants payants se sont déjà inscrits en 5 jours, est une bonne indication aussi du soutien que rencontre le gouvernement italien dans son bras de fer avec l’Union européenne. Le fait que Stefano Fassina, un dirigeant historique de la gauche italienne, qui avait démissionné du gouvernement et rompu avec le PD de Matteo Renzi et qui élu à l’Assemblée sous la bannière de Liberi et Uguali, ait annoncé sa participation à cette réunion est aussi un signe que ce soutien pourrait bien transcender les divergences politiques.”, Jacques Sapir, le 12 octobre 2018.

Mais alors dans les Balkans, certaines divergences politiques ont déjà été transcendées, et les millions du spéculateur Soros avec, paraît-il.

Couleurs et couleuvres d’automne, en Grèce et dans ses régions montagneuses dont l’autonomie et l’autogestion furent même respectées sous les Ottomans. Trois sommets plus loin et non loin d’Ágrafa, la vie comme ses expressions les plus essentielles, viennent toujours d’ailleurs, à l’instar de cette vielle femme qui brode assise dans la cour de sa maison: “C’est un petit chat adespote mais nous l’avons adopté, il n’y avait rien d’autre à faire.” Thessalie alors profonde. Rien d’autre à faire !

Nous l’avons adopté. Thessalie, octobre 2018

* Photo de couverture: Figure des lieux. Tríkala, Thessalie, octobre 2018

Grèce: l’austérité tue

La clinique métropolitaine de Helliniko a ouvert ses portes en décembre 2011. Depuis lors, il est devenu évident que les mesures d’austérité résultant du 1 er mémorandum signé par le Premier ministre de l’époque, George Papandreou, ont provoqué une catastrophe dans la société grecque. Depuis lors, nous avons dénoncé (et enregistré) les effets de l’austérité sur la santé publique et savions que ces résultats seraient visibles dans les indicateurs de santé.

Sept ans plus tard, avec la signature du troisième mémorandum et les obligations de  l’État qui se poursuivront jusqu’en 2060, une étude de la célèbre revue médicale britannique «The Lancet» montre exactement cela. L’étude est intitulée https://www.thelancet.com/journals/lanpub/article/PIIS2468-2667(18)30130-0/fulltext « Charge de morbidité en Grèce, perte en matière de santé, facteurs de risque et financement de la santé, 2000-2016: analyse de l’étude 2016 sur la charge de morbidité dans le monde ».

Pour résumer leurs conclusions:

  • Augmentation de la mortalité dans la population générale de 997,8 pour 100 000 habitants en 2010 à 1 174,9 en 2016 – une augmentation de la mortalité de 17,8%
  • Les cas de tuberculose ont augmenté parmi les citoyens grecs.
  • Les cas de VIH ont presque doublé entre 2010 et 2012, du fait que le programme de distribution de seringues gratuites aux toxicomanes a été abandonné pour réduire les coûts.
  • Augmentation des cas de dépression sévère et de suicide

L’étude analyse l’augmentation des décès dans la population en général par âge (la Grèce est indiquée en bleu) et note que l’augmentation des décès «coïncidait» avec les réductions des dépenses dans le secteur de la santé publique à partir de 2010.

En outre, il y a eu une augmentation des effets secondaires des médicaments, des actes d’automutilation et de nombreux types de cancer rencontrés à tous les âges. Les nouveau-nés et les enfants de moins de 5 ans décèdent de maladies traitables telles que la maladie hémolytique néonatale et la septicémie néonatale. Il y a eu une augmentation significative des cas d’automutilation chez les adolescents et les jeunes adultes. Mortalité accrue chez les personnes âgées de 15 à 49 ans due au VIH, à plusieurs néoplasmes pouvant être traités, à tous les types de cirrhose, à des troubles neurologiques (par exemple, la sclérose en plaques, une maladie du motoneurone), à ​​une maladie rénale chronique et à la plupart des types de maladie cardiovasculaire, à l’exception de la cardiopathie ischémique et accident vasculaire cérébral.

Pour résumer:

  • Les nouveau-nés meurent à cause de maladies traitables
  • Les adolescents et les jeunes adultes ont des taux de suicide plus élevés
  • Les adolescents et les jeunes adultes meurent de maladies liées à une mauvaise alimentation, à l’alcoolisme, au tabagisme et à des maladies traitables.

“Forzes” dans un article sur l’étude Lancet a commenté:

«L’augmentation du nombre de décès dus à l’automutilation chez les jeunes adultes est particulièrement frappante. C’est le coût humain du taux de chômage effroyablement élevé chez les jeunes en Grèce. Au plus fort de la crise, en 2013, il était de 58,21%, soit plus de la moitié des jeunes adultes. Même à l’heure actuelle, malgré le départ d’un demi-million de jeunes du pays, ce chiffre dépasse les 40%. Les jeunes adultes grecs sont confrontés à un choix difficile: partir ou faire face au chômage pendant toute leur vie. Il n’est pas étonnant que l’automutilation et le suicide aient augmenté. « 

«Mais malgré cette épidémie de désespoir, les augmentations de mortalité les plus importantes ne concernent pas les jeunes adultes, mais les bébés et les personnes très âgées. Cela témoigne d’une crise des soins de santé . « 

L’étude Lancet indique clairement qu’entre 2008 et 2014, les dépenses consacrées au système de santé publique grecque sont passées de 9,8% du PIB en 2008 à 8,1% en 2014, et se situent actuellement à 6%! De plus, le PIB a diminué de plus de 25% au cours de la même période (ce qui signifie que les dépenses publiques sont de 4,5%, contre 9,8% en 2008!).

L’étude Lancet indique en outre:

«Depuis la mise en œuvre du programme d’austérité, la Grèce a réduit son ratio de dépenses de santé par rapport au PIB, l’un des plus bas de l’UE, avec un financement des hôpitaux publics 50% inférieur à celui de 2009. Cette réduction a laissé les hôpitaux avec un déficit de fournitures de base, tandis que les consommateurs sont confrontés à des pénuries transitoires de médicaments. « 

Tout ce qui précède est la meilleure explication de la raison pour laquelle les hôpitaux publics grecs ont littéralement été dissous, avec d’immenses pénuries de matériel, de médicaments et de personnel. La seule raison pour laquelle les hôpitaux ne se sont pas complètement effondrés est le dévouement des médecins et des infirmières qui travaillent sans relâche jusqu’à l’épuisement et au-delà pour couvrir les déficits en personnel et en fournitures.

Cette évidence témoigne du fait que l’austérité tue. Et cela tue sur la base des politiques mises en œuvre par tous les gouvernements depuis 2010.

Qui répondra du ministère grec de la santé et qui justifiera?

  • La liste de milliers de personnes qui attendent jusqu’à quatre mois pour commencer leurs traitements contre le cancer alors qu’elles fondent littéralement.
  • Pour les pénuries inexcusables de médicaments, obligeant les hôpitaux publics à rechercher, mendier et emprunter afin de couvrir les besoins de leurs patients.

Et pour déterminer le véritable accès des patients non assurés au service de santé publique grec, nous aimerions que le ministre de la Santé dise :

  • Combien d’argent a été dépensé pour l’hospitalisation et les tests de diagnostic des patients non assurés ?
  • Combien de prescriptions électroniques (prescriptions reconnues dans le système de santé et subventionnées par le système) de tomodensitogrammes, d’IRM ou de scintigraphie ont été émises à des patients non assurés et combien d’examens ont finalement été effectués

Publié http://www.mkiellinikou.org/en/2018/10/04/austerity-kills-these-are-the-results-austerity-kills-there-is-proof/

Xénocratie bavaroise La rubrique de Panagiotis Grigoriou

Panagiotis  Grigoriou est Ethnologue et historien, chroniqueur, analyste, initiateur d’un concept de tourisme alternatif  et solidaire en Grèce. Le regard de l’historien et de l’anthropologue sur l’actualité et le vécu de la crise grecque.

Xénocratie bavaroise

Nouvel automne au vieux pays. Zorbá, le cyclone subtropical méditerranéen qui s’est engouffré dans la mer Égée s’est éteint certes, sauf que le pays réel s’incruste comme jamais dans sa tourmente finale C’est bien connu, la seule météo ne suffit plus pour faire, et encore moins pour défaire un pays. Cela, contrairement à la “gouvernance”… de Tsípras et des mondialisateurs réunis. Pour ceux qui ne l’auraient pas remarqué, nous subissons alors une guerre sans précédant, probablement ultime et déjà totale, à la manière inique et unique de ce siècle du technologisme féodal. Au pays des symboles et des remparts surannés, nous entrerions on dirait parfois dans la mer comme pour toujours. Tropismes d’automne ?

Remparts surannés. Nauplie, octobre 2018

Nos touristes éblouis visitent toujours Mycènes et Épidaure sous le vent d’automne. L’ambiance y est… comme pour l’archéologie funéraire devant les restes matériels de sépultures ou d’ensembles funéraires… et c’est du pays réel qu’il s’agit. Il y a aussi nos… retraités importés et fiers de l’être, à l’instar de ce Français, rencontré dans le Péloponnèse forcément mythique, ayant à ses dires tout laissé derrière lui. “J’ai quitté la France, c’est impossible d’y vivre avec une retraite même normale, j’ai vendu ma maison sur la Côte d’Azur car l’ambiance même, elle devenait insupportable, ici c’est le Paradis, le calme, la beauté. Je viens d’acheter une maison au village d’en face au dixième du prix pratiqué en France, et je suis en train de m’installer.”

Heureux qui… contrairement à Ulysse et à l’instar du retraité ayant quitté sa Côte d’Azur, ignore alors pratiquement tout de la géopolitique, voire, de la situation sociale et politique, ainsi que de la détresse réelle des habitants de son pays d’après. Grèce ainsi méta-moderne, dont les soins palliatifs pour de pas dire le coup de grâce, ont été confiés aux (presque) derniers des salopards, à savoir, la bande criminelle de la Gauche à la SYRIZA, en attendant d’ailleurs leur remplacement par l’autre clan criminel, celui des Mitsotákis et de sa supposée Droite de la Nouvelle Démocratie. En même temps, de nombreux retraités bien d’ici aux 400€ mensuel après l’énième diminution du montant des retraites, abandonnent alors la Grèce pour la Bulgarie, rien que pour survivre. En réalité ces Grecs subissent un véritable Pogrom, et quittent ainsi leur pays à contrecœur.

De nombreuses familles bulgares dont les membres ont travaillé par le passé aux domiciles des Grecs, mais restés désormais sans travail et revenus au pays, ils proposent aux Grecs qu’ils connaissent l’hébergement chez eux en Bulgarie en échange d’un… loyer mensuel dont le montant est beaucoup plus bas que le coût de la vie en Grèce, presse grecque, octobre 2018. Notons que la Bulgarie a perdu plus de 20 % de sa population en 20 ans, une véritable hémorragie, la jeunesse émigre massivement vers l’Ouest pour trouver du travail tandis que la dite “intégration” dans l’Union européenne a facilité ce déclin démographique.

Visiteurs à Mycènes. Octobre 2018
Fouilles à Épidaure. Octobre 2018
Fouilles à Épidaure. Octobre 2018

Les Européens, retraités ou pas, se… baladent alors et s’installent de pays en pays, ou plus exactement, de cercueil en cercueil, pendant que le remplacement programmé, en tout cas partiel, de la population européenne par de nombreux migrants essentiellement Musulmans issus de tant d’autres pays transformés aussi en cercueils par la géopolitique, notamment sous l’emprise de l’Occident des métanthropes financiers à la Soros, suit son cours. En Grèce, les vérités qui courent les rues sont alors exprimées par certains médias, étant donné que la dictature du politiquement correct, autrement-dit, la… pseudologie des faits infligée par les mondialisateurs a du mal à s’imposer.

Comme il a été rappelé lors de l’émission du soir de Lámbros Kalarrýtis sur la radio 90.1 FM (12 octobre 2018), “contrairement aux dires des gouvernants et de la propagande des mondialisateurs européistes, cette immigration, qui plus est musulmane vers la Grèce, est un fait construit, voulu et accompagné par tout un programme parallèle de déshellénisation et de déchristianisation de la Grèce. Ce n’est pas par hasard qu’au même moment, les nouveaux programmes de l’école annoncés par le Ministre SYRIZA de l’Éducation Gavrlóglou, font disparaître, l’histoire de la Démocratie et de l’Antiquité grecques, les guerres Médiques, Thémistocle et Périclès, Antigone, Thucydide, autant que la Révolution nationale contre les Turcs de l’Empire Ottoman et par la même occasion, on diminue drastiquement l’enseignement du grec ancien et on supprime celui du latin. Enfin, l’enseignement de la langue grecque est de plus en plus apparenté à celui d’une langue enseignée à une population dont le grec n’est pas la langue maternelle, étrange, non ? Donc on peut supposer que toute une… préparation est en cours pour convertir l’école grecque en une structure du seul accueil des populations allogènes.”

“Gavrlóglou et les autres de SYRIZA, d’abord fidèles à l’agenda interventionniste et totalitaire des institutions visibles et invisibles à la Soros, agissent dans le but de détruire les nations de la vielle Europe, ceci même en flagrante opposition à ce que notre Constitution explicite en termes d’Éducation Nationale pour ce qui est des buts et du contenu. On remarque que ces derniers temps, le cynisme de l’UE et des autres, gouvernement grec compris, consiste à laisser gonfler la population les Hot Spots à Lesbos comme ailleurs sur les îles, à ne pas contrôler les frontières et finalement, à rendre la situation explosive et pour tout dire les conditions atroces pour les migrants et autant pour la population grecque des îles.”

ONG profiteuses et crise migratoire. Quotidien ‘Kathimeriní’, le 10 octobre 2018
Migrants à Athènes et monument… investi par eux. Octobre 2018
Manifestants communistes photographiés par les touristes. Athènes, octobre 2018

“Les médias internationaux et d’ailleurs allemands, s’en émeuvent comme par hasard en ce moment, puis, le gouvernement et les ONG à Soros, sous prétexte de crise dite humanitaire, installent désormais ces migrants en Grèce continentale via entre autre, le programme Hestia, au moyen de loyers entièrement pris en charge. La désignation même, Hestia, n’est pas choisie par hasard, car en bon grec le terme renvoie à une installation alors durable pour ne pas dire définitive. Rappelons-le une fois pour toutes, le problème migratoire n’est pas un problème humanitaire, c’est d’abord un problème géopolitique, et dans la géopolitique il y a généralement la guerre. Accessoirement, c’est un gros commerce au profit des trafiquants passeurs et des ONG largement subventionnées. Notons enfin, qu’une fois les migrants installés à l’intérieur du pays, ils se sont plus concernés par l’accord certes difficile de leur supposé retour en Turquie”, (Lámbros Kalarrýtis et ses invités sur la radio 90.1 FM le 12 octobre 2018, cité de mémoire).

Les migrants nouveaux, investissent alors le centre d’Athènes et de Thessalonique, autant que… certains monuments commémoratifs de l’histoire de la ville défaite (à la fois l’histoire et la ville). Migrants qui visiblement sont autant sceptiques et accablés de leur sort que les Grecs. Et à quelques mètres seulement, des touristes photographient les retraités communistes lesquels tout autant enfoncés, ils manifestent alors pour la forme, et pour dénoncer la suite… logique dans la poursuite des coupes sobres de leurs pensions, même si, le gouvernement des criminels de SYRIZA/ANEL prétend le contraire.

C’est autant hélas de notre temps du tropisme européen d’automne, ainsi, Vassílis Kaloússis, chanteur de la variété populaire connu des années 1980, s’est suicidé en se jetant sous une rame du métro à Athènes. Il avait été paupérisé et d’après ses proches, sa dernière dignité ne pouvait que de le conduire vers un tel… dénouement. D’ailleurs, son corps est resté à la morgue près de dix jours avant que l’on puisse l’identifier, presse grecque du 12 octobre.

Manifestants retraités et communistes. Athènes, octobre 2018
Manifestants retraités et communistes. Athènes, octobre 2018
Journalistes de la très systémique ERT devant le Palais du Premier ministre. Athènes, octobre 2018

Dans la même série des faits sombres, un autre grec alors âgé de 84 ans a été retrouvé inanimé dans son bateau amarré dans le port de Vólos en Thessalie. Il est mort, parce que le système dit de Santé, ne pouvait plus prendre à charge à temps son besoin cruel de dialyse, (presse grecque du 11 octobre 2018). Et du côté des migrants, le bilan est également lourd ces derniers jours. D’abord, il y a eu les corps d’une femme de 35 ans et de deux filles respectivement d’environ de 18 et de 15 ans ; ils ont été retrouvés près de la frontière entre la Grèce et la Turquie en Thrace. Ces pauvres femmes, elles ont été assassinées de manière particulièrement sauvage à l’arme blanche, tandis qu’elles portaient encore leurs bijoux, donc le vol n’est visiblement pas un des motifs du crime.

D’après le reportage, les enquêteurs de la Police grecque, pensent d’abord à un probable différent entre elles et leurs passeurs, et/ou sinon, à une signature de type islamiste dans ce crime, (presse grecque du 14 octobre 2018). Sans oublier enfin, ces onze migrants ayant trouvé la mort alors terrible… carbonisés, lorsque le véhicule des passeurs qui les transportait et qui ne s’est pas arrêté aux signaux des policiers, a finalement heurté un camion pour prendre alors feu, (presse grecque du 11 octobre 2018). Tropismes… d’automne. Les médias très autorisés, à la manière de l’ERT radiotélévision des népotistes SYRIZA/ANEL, dont les journalistes payés pour la propagande, resteront longtemps postés devant le Palais Maxímou, résidence du Premier ministre, au lieu d’informer réellement les… névrotiques d’en bas sans jamais évoquer les vrais sujets, c’est bien connu et dire que nous avions tant lutté pour que cette ERT fermée par le gouvernement Samarás en 2013 puisse renaître.

Le vrai monde depuis l’île de Póros. Octobre 2018
Le vrai monde. Póros, octobre 2018
Au pays des agrumes. Póros, octobre 2018

Dans la même série noire du dit journalisme, rares sont ceux qui nous informent par exemple des pratiques népotistes des laquais dorés du Quatrième Reich européiste très actuel. Rappelons déjà Junker de l’administration coloniale de Berlin et de Bruxelles lequel en accordant des cadeaux aux Commissaires, fait ainsi nommer Martin Selmayr secrétaire général de la Commission. Ceux qui n’ont pas peur de la vérité écriront alors que Martin Selmayr, accompagné des autres Allemands de service (et d’asservissement pour tous les autres), à savoir Helga Schmid au Secrétariat général du Service européen pour l’action extérieure, et Klaus Welle, secrétaire général du Parlement européen. Tous les trois, ils vont alors diriger cette armée composée de 33.000 mandarins de la Commission, payés pour alors servir les intérêts des seuls oligarques du bloc occidental.

Tous ces faits du jour sont alors liés aux yeux des Grecs, et depuis Athènes comme depuis Mycènes et Épidaure, on observe avec effroi ces agissements de la caste des valets de l’Allemagne, à l’instar de Jacques Julliard lorsque ce dernier signe un papier intitulé “Pour sauver l’Europe, osons la Françallemagne !”.

Nous observons pareillement combien par exemple Angela Merkel intervient directement auprès de la marionnette Zaev, Premier ministre de l’Ex-République fédérale Yougoslave de Macédoine, lui demandant expressément d’ignorer la décision des Slavomacédoniens, lesquels ont invalidé par leur boycott la question et autant le référendum sur l’accord macédonien de Tsípras – Zaev. Non, Angela Merkel, souhaite publiquement que cet accord soit au plus vite validé au Parlement de Skopje. En ce moment, la presse du pays voisin et aussi la presse grecque, font état des très probables transactions et “des valises remplies de billets qui circulent pour ainsi faire changer d’avis certains députés de l’opposition”, radio 90.1 par exemple, semaine du 8 octobre.

Le Macédonisme nationaliste et ouvertement agressif qui règne pour l’instant chez nos voisins Slaves de l’autre côté de la Macédoine géographique grecque lorsque par exemple ces derniers distribuent aux visiteurs de leurs pays des cartes de l’ensemble de la Macédoine géographique qui devraient ainsi… designer leur futur État agrandi, ne nous fait pas oublier qu’en dépit de leurs agissements si néfastes pour nos affaires balkaniques communes, le verdict de leur peuple ne doit pas être piétiné de la sorte par le néocolonialisme de l’Allemagne actuelle. Pour le reste, nous savons qu’un jour, sans interventions extérieures, les deux peuples finiront par trouver un accord, et en tout cas, pas celui imposé par Berlin, par Bruxelles et par l’OTAN.

Enfin, deux mois avant l’accord Macédonien entre Tsípras et Zaev du mois de juin, la Régie de l’Électricité grecque DEI, endettée et… suffisamment agonisante financièrement, a racheté à Skopje et pour 4,8 millions d’euros, la société d’électricité EDS (Energy Delivery Solutions), une société plutôt problématique, appartenant au Vice-président au gouvernement Zaev et ami très personnel du Premier ministre du pays voisin. L’accord avait été tenu secret, sauf que l’information a pu être finalement révélée en septembre dernier. Le… détail de l’histoire, c’est que le montant de la transaction a été directement versé sur le compte personnel de Kocho Angjushev, l’ami très personnel de Zoran Zaev, (presse grecque, septembre et octobre 2018). . Mafieux de tous les pays, unissez-vous !

Macédonisme agressif. Souvenir de Skopje, (Internet grec)
Automne. Péloponnèse, octobre 2018
Vie très quotidienne. Nauplie, octobre 2018

Tropismes ainsi d’automne, pour ne pas dire d’un hiver européiste alors sans fin. Entre Grecs et Italiens par exemple à Nauplie, nous évoquons ces agissements de la caste des castes à Bruxelles et à Berlin, aussi contre l’Italie actuelle et contre son gouvernement très démocratiquement élu. Quel que soit le pays et la sensibilité politique, toute politique favorable au maintient des droits des peuples et des nations souveraines en cette Europe, elle deviendra toujours suspecte et condamnable aux yeux des… lobbyistes de la mort. D’où d’ailleurs la nécessité de faire comprendre que les peuples de cette Europe soumise doivent dans un premier temps boycotter les dites élections européennes, un processus d’ailleurs factice, servant à valider par la propagande les institutions impériales et colonisatrices à l’intérieur de la dite UE, sous contrôle d’ailleurs très largement allemand.

Signe des temps, de son côté… obscur de la force, Horst Seehofer, chef de la CSU bavaroise et ministre de l’Intérieur au sein du gouvernement Merkel, a déclaré la semaine dernière que “les Bavarois lesquels ont alors gouverné la Grèce par le passé durant une certaine période, ils auraient dû alors la gouverner de manière plus durable”. La presse grecque a largement reproduit ces déclarations et cela pour cause. C’est une allusion à la période de la Bavarocratie absolue en Grèce, indépendante depuis peu, entre 1833 et 1843 sous le jeune Othon, fils cadet de Louis Ier de Bavière, imposé par les Puissances, notamment par l’Angleterre et par la France lesquelles ont rappelons-le, largement… sollicité l’assassinat du premier Gouverneur de la Grèce Jean Kapodístrias ancien chef de la diplomatie du Tsar, et jugé déjà trop pro-russe, pratiquement deux siècle avant Vladimir Vladimirovitch Poutine.

L’histoire, encore l’histoire. Comme le note à très juste titre mon ami Olivier Delorme dans son ouvrage, cette Bavarocratie est “une manière de corseter étroitement l’indépendance et de justifier les innombrables ingérences des Puissances qui vont hypothéquer à la fois la cohérence interne et la politique extérieure du nouvel État”, Olivier Delorme, “La Grèce et les Balkans”. Tel est d’ailleurs tout le fond du raisonnement de l’Eurocratie germaniste actuelle et c’est même une attitude encore plus dangereuse pour l’existence même de la Grèce actuelle. Grèce, beau pays, toujours visité !

Beau pays visité. Póros, octobre 2018
Péloponnèse, octobre 2018
Coin d’Italie. Nauplie, Péloponnèse, octobre 2018
Hôtel du Roi Othon. Nauplie, octobre 2018

Car au-delà des ingérences des Puissances, dont la période de la Troïka et du mémorandum depuis 2010, ayant hypothéqué comme on sait à la fois la cohérence interne et la politique extérieure de la Grèce avec l’aimable collaboration des forces politiques “grecques”, il y a de cette planification historiquement perceptible de l’Allemagne et peut-être aussi des États-Unis, allant jusqu’à affaiblir la Grèce en la découpant, donnant dans un futur pas si lointain ainsi le Nord, la Macédoine grecque aux voisins Slaves, (comme durant l’Occupation allemande des années 1940), et la Thrace (Occidentale), où vit une minorité musulmane (120.000 personnes sur une population totale de 360.000 habitants pour l’ensemble de la Thrace grecque) à la Turquie. Non ce n’est pas de l’hallucination, mais de l’observation participante des faits et gestes très actuels des acteurs géopolitiques en Europe et bien au-delà.

La tectonique des plaques géopolitiques sont alors en plein mouvement. Ce dernier temps, un nombre inconnu de migrants essentiellement Afghans et Pakistanais d’après des estimations que la presse évite d’évoquer trop souvent, passent ainsi illégalement la frontière en Thrace, entre la Grèce et la Turquie. Les trois femmes sauvagement assassinées ainsi que les onze victimes de l’accident de route… géopolitique, en faisaient d’ailleurs partie. Les internationalistes des tiroirs-caisses à la Tsípras, ne contrôlent visiblement pas cette frontière (tout comme les frontières maritimes), et ces populations musulmanes que le gouvernement SYRIZA/ANEL installe déjà en Macédoine et Thrace grecques, feraient tôt ou tard de manière volontaire ou pas, le jeu de la Turquie, avec ou sans Erdogan d’ailleurs. Accessoirement, l’Allemagne et/ou l’OTAN, contrôleront les Balkans jusqu’à la dernière montagne la plus reculée, lorsque tous les pays seront petits et affaiblis, Grèce comprise, sans oublier que de monter les uns contre les autres, c’est un jeu comme on sait diachronique. Sous cet angle déjà, le problème des migrants est géopolitique et non pas humanitaire, et depuis les Balkans, cette réalité est suffisamment perçue.

Pour ceux qui ne l’auraient pas remarqué, nous subissons alors une guerre sans précédant, probablement ultime et déjà totale, à la manière inique et unique de ce siècle aussi du technologisme féodal. Pourtant, nos touristes observent par exemple à Épidaure les fouilles en cours et s’en réjouissent. La vie semble belle, et c’est un beau spectacle, celui de la Grèce des vestiges, et autant on dirait des animaux majestueux, surtout, et d‘abord adespotes.

Animal adespote. Nauplie, octobre 2018
Épidaure en mer. Octobre 2018
Animal adespote. Nauplie, octobre 2018
Aspect local. Péloponnèse, octobre 2018

La Grèce des vestiges, c’est pourtant aussi la grève des archéologues et du personnel des musées et des sites archéologiques durant la journée du 11 octobre. Ce… pauvre personnel s’est ainsi mis en grève pour exiger du Ministère de la Culture la publication de la liste exacte des monuments, musées et sites archéologiques dont la propriété et la gestion sont transférées aux mains des rapaces Troïkans de la Treuhand à la grecque (le fameux “Ypertameío”, littéralement “Hyper-Caisse”) dirigée depuis l’étranger, comme visiblement tous les biens de l’État Grec et cela pour une durée de 99 ans. Ce qui n’était pas encore concevable sous Othon de Bavière et de Grèce, vient d’être accompli sous les criminels d’Aléxis Tsípras et de SYRIZA/ANEL. Myrsíni Zorba, fraîchement nommée Ministre de la Culture (et très compatible Soros) s’en offusque… et ne publie rien. Au même moment, lorsque les membres de l’Ordre des Avocats de la ville de la Canée en Crète ont voulu initier une procédure urgente pour réaliser certains travaux d’entretien au Palais de Justice de leur ville à la hauteur d’un montant de 190.000€, ils ont soudainement découvert que d’après les documents officiels récents mais jamais communiqués, que la propriété du Palais de Justice avait été transférée aux étrangers de l’Ypertameío, et que désormais, l’État Grec a même le devoir de verser un loyer aux nouveaux maîtres des lieux comme du pays. D’après le reportage de la presse locale et nationale, 417 biens, immeubles et sites, dont le célèbre site archéologique de Cnossos… auraient été ainsi offerts aux rapaces internationaux, la Troïka, presse grecque de la semaine.

Nos touristes, ainsi que les retraités des autres pays accueillis chez nous, ignorent alors largement ces faits et ne comprennent pas vraiment le désarroi des Grecs. Ils raisonnent encore en termes politiques hérités du siècle, passé, de gauche comme de droite, ils évoquent les banques, la dette, les impôts, l’Europe et j’en passe, tandis que vu d’ici, c’est à la fois le siècle nouveau, les Balkans historiques, la fracture entre la Russie et l’Occident… et enfin, les Bavarois du dix-neuvième siècle alors tous réunis. D’ailleurs, la première loi “grecque” promulguée par les Bavarois, ancêtres visiblement inoubliables pour Horst Seehofer de la CSU, avait été celle abolissant l’autonomie dans une certaine autogestion dont bénéficiaient les communautés locales des Grecs, y compris, sous la domination Ottomane. Nikos, mon ami Crétois joint par téléphone, me dit que “les politiciens très actuels devraient tout simplement être pendus sur la place publique.”

Nous honorons nos marins de jadis. Péloponnèse, octobre 2018
Olives ramassées. Péloponnèse, octobre 2018
Café italien… Péloponnèse, octobre 2018
Oliviers. Péloponnèse, octobre 2018

Décidément, au pays des agrumes, les oranges sont de plus en plus amères. La gauche Syrizíste… accouplée aux autres arrivistes des Grecs Indépendants, le parti de Kamménos, et aux PASÓKiens réellement existants, a alors accouché du pire monstre politique depuis je dirais la période de la xénocratie bavaroise (c’est-à-dire le gouvernement des étrangers). Affairistes, cyniques, menteurs et pour tout dire criminels, ils font triompher l’ordre métapolitique de l’oligarchie financière et visiblement prédatrice de l’ultime planète. Au pays des symboles et des remparts surannés, nous entrerions on dirait parfois volontiers dans la mer… comme pour toujours

Nouvel automne au vieux pays. Nous honorons nos marins de jadis, nous ramassons nos olives de toujours, nous buvons du café italien, et quant au blog Greek Crisis, c’est toujours sa case survie, pourtant, sous le regard attentif et bien courageux de Mimi comme du jeune Hermès, dit parfois le Trismégiste. C’est bien connu, la seule météo ne suffit plus pour faire, et encore moins pour défaire un pays.

Mimi et Hermès. ‘Greek Crisis’, octobre 2018
* Photo de couverture: Dans l’eau. Péloponnèse, octobre 2018

Le virage répressif du gouvernement Syriza

Grèce : le virage répressif du gouvernement Syriza par Stathis Kouvélakis et Costas Lapavitsas

Certain.e.s dans les rangs de la gauche européenne persistent à croire que la situation en Grèce va en s’améliorant, et que le gouvernement Syriza reste une force de gauche qui protège les intérêts des travailleurs et des défavorisés, dans des conditions très difficiles. Parmi eux, Iñigo Errejon, l’un des principaux dirigeants de Podemos, qui a déclaré dans un récent entretien que « compte tenu de ces contraintes, le bilan [de Tsipras] est plutôt satisfaisant »[1]. Pour ceux qui partagent ce point de vue, le tour que prennent les événements apparaîtra comme une mauvaise surprise.

La réalité est que, depuis leur capitulation en juillet 2015 à la Troïka des créanciers de la Grèce (UE, Banque centrale européenne, FMI), Tsipras et son gouvernement ont appliqué de façon inflexible les mêmes politiques néolibérales de choc que tous les gouvernements grecs qui se sont succédé depuis 2010, date du premier Mémorandum signé avec la Troïka. Le gouvernement Syriza a ainsi procédé à une réduction drastique des dépenses publiques, à la poursuite de la déréglementation et à une vague sans précédent de privatisations[2]. Les salaires stagnent au niveau atteint après plusieurs années de chute drastique, les retraites et des aides sociales de nouveau amputées. L’investissement public (et privé) s’est effondré, tandis que les impôts indirects et directs ont atteint des niveaux sans précédent, frappant impitoyablement les ménages à revenus faibles et moyens.

La seule différence avec les prédécesseurs est que Tsipras et son parti ont été élus en janvier 2015 précisément dans le but de renverser ces politiques. Leur revirement de l’été 2015 – survenu quelques jours seulement après un référendum au cours duquel 61% des électeurs ont rejeté l’imposition d’un plan d’austérité – fût un choc traumatique pour la société grecque. Au cours des trois années qui ont suivi, le cynisme de Syriza a entraîné une profonde démoralisation qui imprègne tous les domaines de la vie publique. La passivité et le découragement ont été les principaux facteurs qui ont permis la mise en œuvre de nouvelles mesures d’austérité sans rencontrer d’opposition majeure.

Tsipras a de la sorte rendu d’excellents services à la Troïka, qui lui valent de chaleureux compliments de la part des Moscovici, Juncker et de leurs semblables[3]. Mais la poursuite de telles politiques, qui écrasent la majorité de la population, est impossible sans recourir à la répression et à la mise en place un cadre coercitif. Les coupes dans les services publics, les baisses de pensions et dépenses sociales, les augmentations d’impôts et la surexploitation des salariés ne peuvent s’appliquer sans mettre au pas les oppositions et intimider celles et ceux qui refusent de se soumettre.

L’expérience de l’Europe occidentale, des États-Unis et de plusieurs autres pays au cours des quatre dernières décennies confirme amplement ce constat. De 2010 à 2015, lorsque les gouvernements successifs du PASOK et de la droite mettaient en œuvre les plans d’austérité, la Grèce a connu une avalanche de mesures répressives. Lentement, sûrement – et inexorablement – le gouvernement d’Alexis Tsipras s’est engagé dans la même voie.

Ce qui a accéléré cette évolution au cours des derniers mois renvoie aux difficultés auxquelles sont confrontées les banques grecques. Si le slogan « aucune maison entre les mains des banques » était naguère scandé dans les meetings de Syriza, c’est désormais un gouvernement Syriza qui réprime celles et ceux qui tentent d’empêcher les ventes aux enchères des logements.

Serrer les vis

Pour comprendre l’importance politique croissante de la lutte contre les saisies immobilières, il faut se pencher sur la situation critique des banques et ses répercussions sur le gouvernement et la société grecque. Car c’est justement pour éviter un nouveau cycle de déstabilisation des banques que le gouvernement recourt à des méthodes de plus en plus répressives.

Suite à la crise du début des années 2010, le secteur bancaire grec est passé entre les mains de quatre banques dites « systémiques », qui contrôlent plus de 90% des dépôts et des actifs. Pour éviter leur propre faillite et se prémunir d’une éventuelle nationalisation, ces banques sont devenues les plus fervents défenseurs des plans d’austérité. Elles ont utilisé leur énorme pouvoir économique et social pour contraindre les gouvernements grecs successifs, y compris celui de Syriza, à se conformer aux exigences de la Troïka.

Depuis 2010, deux recapitalisations majeures des banques ont été engagées, la dernière sous un gouvernement Syriza. Le coût total a dépassé les 45 milliards d’euros. Il a été entièrement financé par des emprunts publics, remboursés par les contribuables grecs. Pourtant, en dépit de ce monstrueux fardeau imposé à la population, les banques grecques détiennent actuellement le record européen des « créances douteuses » et ont de fait cessé de soutenir l’activité économique. Les dites créances comprennent des « prêts non performants » (NPL), qui enregistrent un retard de remboursement de plus de 90 jours, mais aussi des « fonds non performants » (NPE), une catégorie plus large qui inclut les prêts dont on pense qu’ils ne seront pas intégralement remboursés, même si aucun retard formel n’a été enregistré[4].

La réduction de l’exposition des banques grecques aux NPE et aux NPL est depuis des années une priorité absolue pour la Banque centrale européenne. Depuis 2016, le gouvernement Tsipras a docilement obéi à ses injonctions en facilitant une vague de saisies de propriétés, y compris de logements principaux, ainsi que la vente à des fonds vautours de « packages » de créances douteuses à des prix bradés. Les ventes aux enchères de logements sont à cet égard à cet égard d’une importance stratégique.

L’incapacité des banques à résoudre ce problème n’a rien de surprenant, elle découle du dispositif mis en place par le gouvernement de Tsipras. En résumé, les banques grecques devaient progressivement assainir leurs bilans du poids des créances douteuses par le biais de ventes aux enchères et de pratiques de recouvrement des prêts plus rigoureuses. Ce processus prendra certainement plusieurs années. Dans le même temps, les banques étaient censées soutenir l’activité économique en fournissant de nouveaux crédits. Toutefois, comme c’était entièrement prévisible, les banques ont eu tendance à réduire l’octroi de nouveaux prêts tout en essayant de nettoyer leur bilan des créances douteuses. Cette limitation drastique du crédit a en fait compromis la reprise, aggravant le problème des créances irrécouvrables pour l’économie. La baisse globale du crédit signifie également que les créances douteuses représentent un ratio plus élevé du total. Il s’agit d’un exemple parfait de l’absurdité des plans de « sauvetage » mis en œuvre par le gouvernement Syriza.

L’échec des banques grecques à réduire le poids des « créances douteuses » a entraîné un effondrement de la valeur de leurs actions à la bourse d’Athènes depuis le début de l’été 2018, effondrement qui s’est accéléré au cours du dernier mois. En réalité, l’ensemble du secteur bancaire grec a été considérablement dévalué depuis la signature du plan de « sauvetage » de Tsipras. Des rumeurs circulent sur la nécessité d’une nouvelle recapitalisation, ou de formes de prise en charge des créances douteuses par l’Etat[5]. Si une telle perspective se concrétisait, ce serait un désastre complet pour le gouvernement, qui doit faire face à de multiples échéances électorales en 2019.

L’accélération du programme de liquidation des créances douteuses est ainsi devenue l’une des priorités de la Troïka et de leurs dociles serviteurs dans l’actuel gouvernement. Comme le problème semble être plus aigu pour les crédits immobiliers et les crédits à la consommation, des objectifs extrêmement ambitieux, et sans doute irréalistes, ont été fixés en matière de saisies et de vente aux enchères : 8 à 10 000 logements pour 2018, chiffre porté à 50 000 pour 2019.

Cibler les actions de protestation

Depuis la capitulation de l’été 2015, la question des saisies et des ventes aux enchères est devenue l’un des problèmes les plus épineux pour Tsipras et son parti. L’accélération du processus sous la pression des banques et de la Troïka a conduit à un affrontement majeur entre le gouvernement et un mouvement dynamique qui s’oppose aux ventes aux saisies et aux ventes enchères de logement. Ce mouvement a pris un nouvel élan après la relance des ventes aux enchères à l’automne 2016. La mobilisation continue de groupes d’activistes déterminés dans les salles d’audience des tribunaux a réussi à annuler des centaines de ventes, ce qui a considérablement ralenti l’ensemble des procédures[6]. C’est sans doute l’une des raisons pour lesquelles les banques n’ont pas réussi à atteindre leurs objectifs.

La réaction du gouvernement, obtempérant aux instructions de la Troïka, a consisté à transférer à partir l’été 2017 la procédure de vente aux enchères vers une plate-forme électronique, activée par des notaires à l’intérieur de leur cabinet, plutôt que d’organiser les ventes dans les tribunaux. Cela a certainement rendu les actions de protestation plus difficiles à organiser. De nouvelles dispositions législatives, votées en décembres 2017, ont créé un délit spécifique qui prévoit des peines d’emprisonnement de trois à six mois pour celles et ceux qui tentent d’entraver le processus de vente aux enchères[7]. Les actions se sont toutefois poursuivies, même si leur ampleur a été affectée, empêchant de nombreuses ventes aux enchères et rendant les notaires moins enclins à prêter leur concours[8].

Au cours de cette période, les affrontements avec la police devant les bureaux des notaires se sont multipliés. Des militants filmés et identifiés pendant les actions ont été systématiquement inculpés. Depuis le début de l’année, des dizaines de militants à travers le pays font face à des poursuites judiciaires. Parmi eux, citons Spiros Milios, conseiller municipal d’Ambelokipi-Menemeni, dans la région de Thessalonique, et militant d’Antarsya, la coalition d’organisation d’extrême-gauche. Dans la petite ville de Volos, pas moins de 20 militants sont le coup de poursuite, de même que 15 autres à Argos et Nauplie[9]. Le procès de trois militants anti-saisies a débuté à Athènes le 21 septembre.

Les poursuites à l’encontre des activistes anti-saisies ne sont que l’exemple le plus patent des pratiques autoritaires dont fait preuve le gouvernement de Tsipras. La répression a également touché les militants mobilisés contre le projet minier d’exploitation à ciel ouvert par le géant canadien Eldorado Gold à Skouries, dans le nord de la Grèce. Plus généralement, le gouvernement a eu recours à la force pour réprimer les manifestations contre sa politique, en particulier lorsqu’elles paraissent susceptibles de s’étendre. L’utilisation de la police anti-émeute contre les retraités n’en est que l’exemple le plus flagrant. Une tendance de fond a commencé ainsi à se dessiner : pour faire face aux réactions que suscite sa politique, le gouvernement s’appuie sur les mécanismes répressifs de « l’État profond ».

Les poursuites à l’encontre de Panagiotis Lafazanis

Un seuil symbolique dans cette escalade répressive a été franchi le 26 septembre, quand Panagiotis Lafazanis, une figure respectée de la gauche radicale, a reçu une convocation pour répondre à des accusations concernant sa participation à des actions de protestation hebdomadaires contre les saisies et les ventes aux enchères[10]. Lafazanis était ministre de l’énergie au sein du premier gouvernement Syriza (janvier à juillet 2015) et la figure de proue de la « Plate-forme de gauche», qui regroupait à l’époque la majeure partie de l’aile gauche de Syriza. Il est maintenant secrétaire national d’Unité Populaire, un front politique créé l’été 2015, principalement par les forces de la Plateforme de gauche, qui ont quitté Syriza et ont été rejointes par d’autres organisations de la gauche radicale.

C’est la première fois depuis la chute de la dictature (1974) – au cours de laquelle Lafazanis a été persécuté pour ses activités clandestines au sein du mouvement étudiant et de l’organisation de jeunesse du parti communiste – qu’un dirigeant d’un parti de gauche fait l’objet de poursuites pour son activité politique. Les chefs d’accusation à son encontre concernent des infractions présumées à pas moins de 15 articles du code pénal, sanctionnées par des peines de prison pouvant aller jusqu’à deux ans. S’il est reconnu coupable de toutes les accusations, la peine pourrait aller jusqu’à neuf ans.

Ce qui est également remarquable, c’est que la procédure émane non du procureur mais du « Département pour la protection de l’État et du régime démocratique », une branche spéciale des services de sécurité censée investiguer les activités liées au terrorisme et qui menacent la démocratie. Ce département a été créé en 2000, par les gouvernements « modernistes » du PASOK, alors que la Grèce s’apprêtait à rejoindre l’Union monétaire. Il a été modernisé en 2011, suite à la mise en place des plans d’austérité, et transformé en service de surveillance des actions de protestation. Des dispositions législatives adoptées en février sous l’impulsion du gouvernement Syriza ont encore élargi son éventail d’activités. Il est à noter que, depuis sa création, le département n’a développé aucune activité à l’encontre des néonazis d’Aube Dorée, ni d’aucune autre organisation d’extrême droite ou terroriste.

Lafazanis n’est pas le seul militant à être ciblé par les services de sécurité. Quatre autres activistes, parmi lesquels un membre d’Unité Populaires et deux personnalités connues du réseau « Je ne paie pas », Leonidas et Elias Papadopoulos, ont également été convoqués pour répondre à une longue liste de chefs d’accusation. La nature des pièces incluses dans son dossier ont permis de mettre en lumière le fait que Lafazanis était sous surveillance depuis des mois par une équipe de policiers déguisés en journalistes filmant des actions devant les bureaux de notaires. Ce matériel a été complété par des photos et des vidéos que les services de sécurité ont demandé aux chaînes de télévision. Des publications Facebook ont également été utilisées pour identifier ces militants lors de diverses actions de protestation.

Quelles suites ?

La vague de poursuites judiciaires, et en particulier celles l’encontre de Lafazanis, a forcé les médias grecs à parler de la répression. Elle a également provoqué certaines réactions dans les milieux politiques, notamment une question au parlement adressée au ministre de la Justice par 43 députés de Syriza. Cependant, la position officielle du gouvernement est que cette question relève entièrement du pouvoir judiciaire et de la police et qu’il n’est en rien concerné.

Il n’en reste pas moins que l’initiative des poursuites n’a pas été prise par la justice mais par un service appartenant à l’« État profond », à savoir le « Département de la protection de l’État et du régime démocratique ». Or ce département est placé sous l’autorité du ministre de l’ordre public. Il existe donc une implication et une complicité de la part du gouvernement, qui renvoie aux mesures prévues par le troisième Mémorandum signé en juillet 2015 et à la crise actuelle des banques grecques.

La mise en œuvre des plans d’austérité et des politiques néolibérales exige la répression et le gouvernement Syriza ne saurait faire exception à cette règle. La démocratie en Grèce est déjà en lambeaux et la situation risque de s’aggraver dans les mois à venir. A l’approche des élections, les problèmes des banques vont sans doute occuper une place centrale. Le désastre économique et social causé par la capitulation de Tsipras est devenu évident pour de larges couches de l’électorat et le dégoût se généralise dans la population. Un gouvernement qui a déjà vendu son âme en se faisant l’exécutant de la Troïka n’hésitera pas à faire monter d’un cran la répression à l’encontre de tou.te.s celles et ceux qui s’opposent à sa politique. La solidarité internationale est indispensable pour mettre fin à cette évolution extrêmement préoccupante de la situation en Grèce. C’est une question de défense de la démocratie.

Cet article a été mis en ligne le 6 octobre 2018 par Jacobin magazine[11]

[1] lemonde.fr/europe/article/2018/03/22/europe-les-courants-populistes-ont-cesse-d-etre-des-exceptions-pour-devenir-la-regle_5274743_3214.html

[2] jacobinmag.com/2018/08/greece–tsipras-memoranda-austerity-odyssey

[3] lemonde.fr/idees/article/2018/06/22/le-courage-des-grecs-et-de-tsipras_5319456_3232.html et euractiv.fr/section/affaires-publiques/news/juncker-praises-tsipras-following-weber-jibe/

[4] bankofgreece.gr/BogEkdoseis/Sept18_Report_Operational_Targets_for_NPEs_EN_Final.pdf

[5] reuters.com/article/us-piraeusbank-capital-ceo-exclusive/piraeus-bank-says-debt-plan-on-track-as-shares-drop-30-percent-idUSKCN1MD0TZ

[6] theguardian.com/world/2017/mar/11/greek-activists-target-sales-of-homes-seized-over-bad-debts

[7] thepressproject.gr/article/121452/Perase-i-tropologia-gia-tous-pleistiriasmous

[8] ft.com/content/e7a5732c-3db0-11e8-b7e0-52972418fec4

[9] epitropi3den.blogspot.com/2018/09/blog-post_24.html

[10] ekathimerini.com/232997/article/ekathimerini/news/ex-minister-panayiotis-lafazanis-denounces-government-persecution

[11] jacobinmag.com/2018/10/syriza-repression-foreclosure-banks-tsipras

A propos de l’auteur

Stathis Kouvelakis enseigne la théorie politique au King’s College de Londres. Il a fait partie du comité central de Syriza.

Costas Lapavitsas est professeur d’économie à SOAS et ancien membre du Parlement grec.

Zorba le Grec La rubrique de Panagiotis Grigoriou

Panagiotis  Grigoriou est Ethnologue et historien, chroniqueur, analyste, initiateur d’un concept de tourisme alternatif  et solidaire en Grèce. Le regard de l’historien et de l’anthropologue sur l’actualité et le vécu de la crise grecque.

Dans cette rubrique il évoque le medicane qui frappe la Grèce mais dont on a peu parlé en France car supplanté par le le tsunami en Indonésie, le durcissement de la politique gouvernementale et le non respect du choix des peuples concernés par le référendum sur l’accord Macédonien de Tsípras et de Zaev.

Zorba le grec

Notre sérénité ultime se cacherait-elle dans les théâtres antiques ? Le pays en a vu certes d’autres tempêtes, mais cette fois c’est décidément une météo inhabituelle. Le Péloponnèse, Athènes et les îles de la mer Égée ont subi ces derniers jours les dégâts du passage de… “Zorbás”, nom donné par euphémisme au medicane qui frappe encore la Grèce. Dépression subtropicale ayant évolué depuis quelques heures en medicane, contraction de “mediterranean” et “hurricane”. La météorologie, le temps seulement de quelques heures, elle a effacé alors tous nos autres… bouleversements “climatiques”, voire, l’amertume contemporaine généralisée. Pluie et vent !

Sous les effets de Zorbás. Péloponnèse, septembre 2018

Temps triste comme on dit, et le peuple se pénètre bien de la misère de notre synchronie interminable entre chômage et naufrage. Déjà tant de talents avariés sont dépréciés au même titre que l’espoir. Le régime de la escroquerie politique nommée SYRIZA se durcit, sans doute pour préparer le terrain aux prochains “bravoures” des présumés futurs “gouvernants” de la Nouvelle Démocratie de Kyriákos Mitsotákis, somme toute variante de la même… tromperie politique. Le système politique grec est mort, plus exactement la politique est morte… et le système, qui se passe désormais ouvertement des ajustements et des recouvres “démocratiques”, se porte il faut dire de mieux en mieux en apparence… sauf qu’il est plus pressé que jamais d’en finir, avec nous tous.

Naomi Klein avait déjà souligné combien le principe systémique fondamental est simple: pour les pays en “crise” ayant désespérément besoin d’une “aide” urgente. Entre les politiques de privatisation et de libre-échange promues en même temps que le dit “sauvetage financier”, tout forme alors un ensemble complet, les pays n’ont d’autre choix que d’accepter le paquet dans la série: “Voulez-vous sauver votre pays? Vendez-le.”

Et le pillage se met en place. Pour le cas grec, la période préliminaire à la liquidation finale, celle de la dite austérité et de la Troïka a d’abord étranglé l’économie et pour tout dire, la nation. Les rapaces installés aux commandes ont écrasé les salaires, les pensions, et ainsi brisé l’entrepreneuriat grec, ainsi le pouvoir d’achat de la population a sombré. Cela se nomme aussi une dévaluation interne “justifiant” au demeurant les emprunts exorbitants à faire payer au peuple grec.

Tempête. Péloponnèse, septembre 2018
Vieux naufrage et cimetière de bateaux. Péloponnèse, septembre 2018
Oiseau marin. Péloponnèse, septembre 2018

Le programme de la Troïka suivi par le mémorandum des gouvernements, dont le plus terrible a été signé par l’escroc politique Aléxis Tsípras, ont abouti à une “société des deux tiers”. Ainsi, la majorité de la population vit en dessous du seuil de pauvreté et la richesse, elle est collectée pour rester entre les mains de seulement quelques-uns. Naufrages, tempêtes et beaux oiseaux marins au pays si visité d’après un imaginaire touristique de plus en plus distant, entre les “réalités” fréquentées et le pays réel.

Ce dernier temps, on observe également un durcissement de la politique gouvernementale, perceptible depuis le remaniement effectué en aout dernier. Une autocratie qui ne se cache plus et une présence plus forte de l’État policier pour ce qui tient du contrôle des opinions et des résistances. Et en même temps, un chaos attisé, sinon provoqué, entre les agissements des néonazis pseudo-patriotes de l’Aube dorée, et de ceux issus de l’éventail anarchisant et de l’extrême supposée gauche largement compatible de la Sorosphère. Et enfin, l’explosion de la criminalité de toute sorte, sans oublier le poids du problème migratoire, tout pèse de son poids insupportable sur les événements et sur les mentalités.

Le corps social grec doit être surtout, démembré, poltron, haineux, désuni, cloisonnée et de surcroît, luttant pour sa survie au jour le jour, histoire de ne plus pouvoir exister politiquement autrement qu’à travers ce simulacre de la représentativité des partis zombis, au demeurant interchangeables si besoin. Le régime tient aussi par le biais d’un “Parlement” politiquement pornographique, et d’une caste politique “se prostituant” volontairement aux mains des “proxénètes” visibles et invisibles des Puissances étrangères.

On dirait que la… météorologie historique se répète depuis l’assassinat du premier Gouverneur des Grecs, Ioánnis Kapodístrias à Nauplie et en 1831. Puis, vint le temps du Roi Othon de Bavière, “Otto von Griechenland”, choisi par les Grandes Puissances. Comme Othon était mineur, le début de son règne avait été marqué par cette période politiquement absolutiste où Joseph Ludwig comte von Armansperg, diplomate et homme d’État bavarois assurait la présidence de la régence du Royaume de Grèce durant la minorité du roi Othon Ier avec deux autres régents: Carl Wilhelm von Heideck et Georg Ludwig von Maurer. C’est-à-dire, une première Troïka. Nauplie… et l’Europe en direct.

Lieu de l’assassinat de Kapodístrias. Nauplie, septembre 2018
Lieu de l’assassinat de Kapodístrias. Nauplie, septembre 2018
Statue du Roi Othon. Nauplie, septembre 2018
Présidence de la régence sous Armansperg. Nauplie, septembre 2018

Notons, que d’après même de récentes études historiques, l’assassinat de Kapodístrias a été fomenté par des agents anglais et français et que les archives britanniques sur cet assassinat restent inaccessibles aux historiens depuis près de 190 ans.

La politique étrangère pour un État Grec si possible indépendant menée par Kapodístrias, Gouverneur grec et ancien ministre des affaires étrangères du tsar Alexandre Ier de Russie et surtout, l’éventualité de voir naître en Méditerranée orientale un nouvel état maritime qui ne serait pas contrôlé par les Grandes Puissances, voilà ce qui dérangeait les deux pays “protecteurs” qui expérimentaient en fait la création d’un petit État grec totalement sous contrôle. En cette année 2018, on revient de la sorte… aux fondamentaux, climat ou pas !

Et pour revenir au climat du moment, celui de la météorologie, Nauplie et l’Argolide, régions de la Vieille Grèce, elles ont été parmi les contrées les plus touchées par cette dépression subtropicale devenue medicane au nom de Zorbás. Samedi, Zorbás abordait le sud de la Grèce, avec des vents d’une intensité correspondant à une tempête tropicale dont le centre du système s’est clairement entouré d’une ceinture convective rendant visible ce qui s’apparente à un œil.

Après avoir touché le Péloponnèse entre vendredi soir et samedi, puis les îles des Sporades et de l’Eubée, les intempéries ont aussi concerné Athènes avec plus de 50 mm en 24h et de violentes rafales de vent dépassant les 100 km/h, occasionnant inondations et coulées de boue. Par ailleurs, des vagues de 5 à 8 mètres sont observées sur le littoral, causant d’importantes submersions marines. Grèce tropicale !

L’Europe en direct. Nauplie, septembre 2018
Péloponnèse tropical. Septembre 2018

Dimanche matin sur le port d’Épidaure et sous ses eaux même on évaluait les dégâts. Quatre voiliers coulés et bien d’autres endommagés lorsque ce terrible vent du samedi et du cyclone venait alors de l’Est. Les experts des assureurs, ceux de la compagnie… anglaise de yachting ayant loué ces voiliers et qui en a perdu quatre, les réparateurs maison, les grues, tout ce petit monde était déjà sur place.

“Heureusement il n’y a pas eu de morts ni de blessés, pour le reste, nous avons perdu quatre voiliers… et c’était notre dernière semaine de la saison. Une fois sortis de l’eau, les bateaux vont être réparés sur place par nos propres équipes, alors…vivement 2019”, nous disent-ils les experts de la compagnie. Touristes comme habitants réalisaient des selfies sous une pluie alors fine, décidément, notre dernière sérénité résiderait-elle plutôt dans les théâtres antiques, surtout à Épidaure. Zorba le Grec.

Au port d’Épidaure. Septembre 2018
Au port d’Épidaure. Septembre 2018
Au port d’Épidaure. Septembre 2018
Les experts sur place. Port d’Épidaure, septembre 2018

Semaine alors fort… cyclonique en Grèce au point de faire oublier le durcissement de la politique gouvernementale, perceptible depuis le remaniement effectué en août dernier. Autocratie et présence plus forte de l’État policier et voilà que le chef du parti de l’Unité Populaire, Panagiótis Lafazánis a été convoqué à la Direction centrale de la Police à Athènes pour s’expliquer sur ses actions sur le terrain des Tribunaux, en opposant à la vente aux enchères forcée de l’habitat populaire. Pourtant homme politique ex-SYRIZA et ex-Ministre ayant quitté ce parti des balivernes historiques en août 2015, son interpellation a provoqué un certain mécontentement exprimé publiquement même chez les députés SYRIZA actuels. C’est le dernier honneur des cyniques arrivistes… joué dans les jeux d’aventure.

Sauf que l’aventure c’est autant celle du pays. Car dans cette affaire, il est fondamental de comprendre que Lafazánis a été interpellé de la sorte pour rendre compte devant un service lequel ne faisait pas vraiment parler de lui jusque là. Il s’agit de la “Direction de la Protection du Régime et de la Démocratie”. Ce n’est ni plus ni moins, une administration sinistre, digne des temps… cycloniques nouveaux, très réactionnaire et profondément anachronique et qui fait référence à d’autres temps bien obscurs. La dystopie techno-féodale se dessine alors déjà dans nos rétroviseurs, il y a urgence.

Cette administration a été mise en place sous le gouvernement du PASOK et du pion de l’Allemagne Simítis en 2000, et dont les prérogatives ont été confirmées et actualisées sous la Troïka et le Mémorandum, sous le gouvernement Papandréou en 2011. Notons-le à l’époque, sous le Ministre de l’Ordre public Chrístos. Papoutsís. Ce dernier, rappelons-le, il est issu de ce personnel politique… alors mûri et macéré dans les fonts baptismaux des intrigues du pouvoir des colonisateurs depuis son poste de Commissaire européen à l’Énergie entre 1995 et 1999.

La dystopie dans le rétroviseur. Athènes, septembre 2018
Siècle cyclonique. Athènes, septembre 2018
Modernité. Athènes, septembre 2018

Enfin, cette “Direction de la Protection du Régime et de la Démocratie” a été confirmée et “modernisée” dans ses fonctions en 2017 par le gouvernement Tsípras, lequel laisse en même temps volontairement, car il s’agirait alors et visiblement d’un plan, la criminalité diverse et variée ronger ce qui reste du pays réel et autant des dernières certitudes. Le pouvoir criminalise ainsi les opinions à la carte mais il favorise le crime si ce n’est que par la négligence.

Et sur Internet grec, on estime même, à l’instar de l’analyse proposée par le site des Ingénieurs Civils (issus des rangs de la gauche), que cette dite “Direction de la Protection du Régime et de la Démocratie”, “serait-elle alors largement contrôlée par le gouvernement et autant liée aux Services secrets étrangers des pays”… faiseurs comme on sait de la dernière pluie cyclonique à la géopolitique actuelle comme passée, site des Ingénieurs Civils, le 26 septembre 2018.

D’après les textes officiels reproduits pour les besoins de l’analyse publiée sur ce site, la mission de ce service au sein de la Division de la sécurité de l’État, “c’est la prévention et la répression des actes de violence ou des menaces graves dirigés contre la sécurité de l’État et contre le système démocratique. Dans ce contexte, elle recherchera, collectera, traitera et exploitera les informations et les renseignements nécessaires recueillis au sujet d’actes individuels ou de groupes organisés qui agissent contre la sécurité de l’État et du gouvernement démocratique ou d’actes de violence à l’égard des personnes ou des biens, tout en surveillant ces activités, œuvrant conjointement avec la Direction de la sécurité de l’État, la Police anti-criminelle, ainsi que la Direction de la gestion et de l’analyse de l’information”.

Commerce… charitable. Athènes, septembre 2018

Au même moment, et c’est du jamais vu en Grèce depuis la chute du régime des Colonels si l’on croit certaines analyses, des compagnies pétrolières s’apprêtant à exploiter le pétrole découvert dans la belle région montagnarde de l’Épire au Nord-Ouest du pays, feraient preuve de comportement et d’agissements inhabituels, pour tout dire criminels, et le “gouvernement” et l’État avec sa “Direction de la Protection du Régime et de la Démocratie” se limitent à un rôle d’observateurs.

“Car les promoteurs des projets pétroliers seraient en train depuis quelques semaines de criminaliser le droit de manifester afin de pouvoir détruire l’environnement assez intact de l’Épire. Ceux donc des compagnies privées de gardiennage, engagés par les pétroliers, sillonnent alors les villages concernés, jetant la lumière de leurs phares depuis leurs véhicules 4X4 au beau milieu de la nuit sur les habitations des citoyens ouvertement opposés à l’exploration et à l’extraction des hydrocarbures en Épire. Une équipe même issue des compagnies privées de gardiennage composée d’une vingtaine de personnes a pénétré dans le domicile des opposants à l’exploitation pétrolière. Jours de terrorisme en Épire”, article de Yánnis Perákis publié sur le site Internet du mouvement du Plan-B daté du 28 septembre 2018. Appel aux journalistes, enquêtez sur cette question !

On s’éloigne alors de cette Grèce photographiée et même caressée dans le sens du poil par les touristes à Épidaure… avant comme après le cyclone au pays où même l’hôtellerie figure parfois parmi les lieux de mémoire, heureusement dans un sens que l’on vend encore du tabac d’Orient et depuis peu, de la marchandise… devenue disons solidaire !

Antiquités. Péloponnèse, septembre 2018
Épidaure. Septembre 2018
Épidaure. Septembre 2018

Sur ces faits la grande presse ne dira pas un seul mot, tandis que toute la presse s’est emballée sur la dramatique affaire d’un toxicomane ayant pénétré la semaine dernière dans une bijouterie d’Athènes, éventuellement pour commettre un vol et ensuite décédé suite à son passage à tabac par le bijoutier et par un passant, sans que les médecins légistes dont celui désigné par les proches de la victime puissent déterminer les causes exactes de sa mort. Il faut préciser que la victime, Zacharías Kostópoulos avait été un militant LGTB+, et drag queen connu(e) sous le nom de Zackie Oh

Depuis cette mort tragique de Kostópoulos âgé de 33 ans, les pseudo-anarchistes et les militants LGBT+, compatibles Sóros ils ont manifesté devant les lieux du drame, tandis qu’une bonne… grappe d’universitaires défenseurs de la mondialisation techno-féodale contre les peuples et les nations, a cru bon signer une pétition. Parmi ces signatures il y a celle d’Antónis Liákos, universitaire, bras droit de Simítis sous le PASOK et de Tsípras actuellement, et accessoirement, compagnon de la nouvelle ministre de la Culture, la très PASÓKienne et SYRIZA Myrsíni Zorbá.

La question ici, ce n’est pas de ne pas juger et surtout de ne pas punir les assassins de Kostópoulos si les faits sont prouvés. La question, ce n’est pas non plus celle des préférences et les autres idiomes sexuels des uns comme des autres historiquement attestés d’ailleurs, mais plutôt cette conversion orchestrée par le système de certaines “luttes et causes”, vers la dissection du corps social et vers la destruction du cadre historique culturel et démocratique, souvent étatique et national des peuples et pour tout dire, de la personne humaine. Car c’est d’abord à partir de la personne humaine et de la société justement, qu’il est encore possible de s’organiser et de résister. Comme le souligne ailleurs Nicolas Bonnal au sujet parallèle de la figure de la Jeune-Fille et de l’idéologie transgenre ; ceci j’ajouterais en préparation du transhumanisme alors totalitaire et intégral, “l’Occident est sous contrôle psychiatrique-pathologique, belliciste-humanitaire, féministe-antiraciste, androphobe-russophobe et sociétal-transgenre” (…)

La violence avec laquelle la féminitude est administrée dans le monde de la marchandise autoritaire rappelle comme la domination se sent libre de malmener ses esclaves, quand bien même elle aurait besoin d’eux pour assurer sa reproduction.” (…) “L’important est la soumission. Contrairement à son ancêtre, la Jeune-Fille bio n’affiche plus l’élan d’une quelconque émancipation, mais l’obsession sécuritaire de la conservation. C’est que l’Empire est miné à ses fondements et doit se défendre de l’entropie. Après on fait du Merkel. On aime les LGTBQ ou les migrants, c’est les hommes et les Allemands qu’on déteste. La Jeune-Fille bio sera donc responsable, ‘solidaire’, écologique, maternelle, raisonnable, ‘naturelle’, respectueuse, plus auto-contrôlée que faussement libérée, bref: bio-politique en diable”, “Le contrôle social par la Jeune-Fille en occident” de Nicolas Bonnal, publié le 14 septembre 2018.

Hôtel, lieu de mémoire. Nauplie, septembre 2018
Hôtel, lieu de mémoire. Péloponnèse, septembre 2018
Hôtel, lieu de mémoire. Péloponnèse, septembre 2018
Tabac d’Orient. Nauplie, septembre 2018

Lundi matin, premier jour d’octobre. Automne grec et balkanique sous un temps cyclonique. Les médias grecs analysent le résultat du referendum de la veille organisé à l’Ex-République Fédérale de Macédoine. Le peuple voisin des Slavomacédoniens a largement rejeté par son abstention, l’accord Macédonien de Tsípras et de Zaev, chefs de gouvernement et marionnettes des Puissances étrangères respectives. Comme durant le référendum grec, les maîtres de la géopolitique forcement interventionniste, ils ont multiplié les déclarations, voire, ils se sont déplacés à Skopje pour dicter aux habitants et citoyens du pays tout le sens de “leur” vote, se prononçant c’est-à-dire en faveur de l’accord préalable.

Dans le désordre, il y a eu l’intervention des dignitaires impériaux de Bruxelles et de Berlin, de Donald Trump, des patrons de l’OTAN, d’Emmanuel Macron, en passant par des acteurs régionaux, à l’instar du Premier ministre de l’Albanie Edi Rama lequel a invité la minorité albanaise (30% de la population) de se rendre aux urnes et de voter en faveur de l’accord, plus exactement, la question posée évoquait également l’approbation ou pas d’une future adhésion de ce pays au sein de l’OTAN et de l’UE

Visiblement, les peuples des Balkans comprennent très bien ce que l’Europe des colonisatrices de Berlin et de l’UE veut dire, l’époque du dépeçage germano européiste de la Yougoslavie et de la haine ainsi attisée entre les peuples n’est guère loin, les peuples donc, seuls grand perdants de l’histoire. Ainsi, avec près de 65% d’abstention, la consultation annule d’après les conditions requises au pays voisin, toute la portée supposée du OUI, donné largement gagnant par les médias habituels.

Temps cyclonique. Péloponnèse, septembre 2018

Et voilà que depuis Bruxelles on annonce maintenant que le referendum n’a qu’une portée consultative et que l’accord doit être ratifié par les deux Parlements, d’ailleurs en Grèce, la marionnette Tsípras s’est obstiné pour ne pas organiser un referendum analogue. L’Occident sous contrôle psychiatrique-pathologique, méta-démocratie comprise. Ainsi à Athènes, certains élus du parti des Grecs Indépendants de Kamménos, Ministre de la Défense et allié de Tsípras, quittent en moment leur parti pour ainsi se prononcer finalement en faveur de l’accord, puisque Kamménos déclare qu’il retirera sa confiance au gouvernement lorsque l’accord va arriver devant la Chambre des députés. De même, les élus du “parti de la Rivière” To Potámi de Stávros Theodorákis, parti engendré entre Berlin et Bruxelles sont pressentis pour servir “comme il faut”, à chaque fois que les grands partis et autant principales marionnettes n’y parviennent pas.

Ainsi le système verrouille et renforce son dernier euphémisme démocratique… avant sans doute le grand formatage ! A moins de pouvoir créer de bien nouvelles conditions de représentativité réellement démocratique et souveraine, les peuples, à commencer par ceux de l’UE, devrait s’abstenir de participer aux élections prépayées et pré-payantes pour seulement certains, et ceci si possible très largement. Déjà, les dites Élections européennes devraient connaître une abstention de plus 95%.

Temps cycloniques… Zorbá le Grec et Macédoine de légumes ! Les décisions sont prises ailleurs, et les peuples sont violés. Si cet accord est finalement ratifié, les relations entre les deux peuples vont être davantage empoisonnées, car il est rejeté par une très large majorité des citoyens des deux côtés de la frontière. C’est bien dommage, d’autant plus que les deux signataires de l’accord préalable, Tsípras et Zaev ne seront plus aux commandes dans quelques mois.

Macédoine, 784 kms. Péloponnèse, septembre 2018
Derrière la vitrine. Athènes, septembre 2018
Institut français d’Athènes. Septembre 2018

Sur un mur de l’Institut français d’Athènes, on y discerne certaines figures de la culture et autant de la gloire de la France et de la République. Pour combien de temps encore ?

Notre dernière sérénité se cacherait-elle dans les théâtres antiques ou même derrière la vitrine politique de fait brisée ? Le pays en a vu certes d’autres tempêtes mais cette fois c’est décidément un mauvais temps bien inhabituel. Quatre personnes sont portées disparues en Eubée et en Thessalie, Zorba… quitte alors la Grèce, tout le symbole y est on dirait.

Sauf que nos matous habituels sont toujours là, scrutant le temps, tout comme les âmes. Athènes en octobre, pluie et vent !

Matou d’Athènes. Septembre 2018
* Photo de couverture: Sérénité à Épidaure, septembre 2018

Amère Patrie La rubrique de Panagiotis Grigoriou

Panagiotis  Grigoriou est Ethnologue et historien, chroniqueur, analyste, initiateur d’un concept de tourisme alternatif  et solidaire en Grèce. Le regard de l’historien et de l’anthropologue sur l’actualité et le vécu de la crise grecque.

Dans cette rubrique il évoque la destruction des petits bateaux de pêche traditionnels contre subvention de l’Union européenne mais aussi le dernier scandale de transfert de monuments historiques et de sites archéologiques à  l’Agence chargée de la privatisation des biens de la Grèce.

Amère Patrie

Bonne année pour le tourisme d’après les médias, nos plaisanciers restent ainsi longtemps à flotter entre les îles grecques, forcément à la surface de l’eau. Beau pays et cependant coquille de plus en plus vidée. Le gouvernement de l’indescriptible Aléxis Tsípras, fait semblant de découvrir qu’avec le reste des biens publics, il a également transféré la jouissance des sites archéologiques et des musées à la Treuhand à la grecque, c’est-à-dire aux mains des rapaces planétaires de l’Agence chargée de la privatisation des biens de la Grèce. Et pendant ce temps, on détruit à la chaîne les bateaux de pêche, de préférence traditionnels. Culture morte.

Destruction d’un bateau de pêche. Péloponnèse, septembre 2018

La scène se déroule dans le Péloponnèse présumé authentique. La destruction d’un bateau de pêche. Plus authentique que jamais, c’est autant la subvention de l’Union européenne laquelle le plus souvent dépasse largement la valeur marchande du bateau détruit. Le contexte s’y prête d’ailleurs mieux qu’avant, “c’est de l’argent très frais par les temps qui courent”, comme on aime se dire sur place. Donc on accepte, aussi dans la mesure où le métier de pêcheur est de plus en plus malmené et surveillé. D’acculturation en acculturation, sans oublier le départ de la dernière jeunesse grecque à l’étranger, les vocations ne sont plus.

Notons qu’en terre étrangère, les enfants grecs ne connaîtront plus le réseau des écoles que l’État grec avait si naturellement financé durant tant d’années. Comme le rappelle même la presse bien… autorisée, en 2011 une décision ministérielle grecque fait baisser de mille à une centaine seulement, le nombre d’unités pédagogiques officiellement reconnues disposant l’enseignement de la langue grecque à l’étranger, quotidien “Kathimeriní” du 10 septembre 2018. Novembre 2011, c’est également, rappelons-le, le… grand moment du Premier ministre et d’abord banquier, Loukás Papadémos, imposé par les Puissances, suite “logique” au limogeage du déjà funeste Yórgos Papandréou par le tandem Merkel – Sarkozy.

En 2018, les parents expatriés malgré eux, reconnaissent que la bataille avait été perdue, ainsi ils ont été obligés de suivre le chemin de l’exil économique. Seulement, toute la bataille actuelle c’est que leurs enfants ne perdent pas le lien avec la langue grecque et pour tout dire avec le pays. Durant cette même année, et sous la gouvernance des déconstructeurs arrivistes de SYRIZA, comme on sait ouvertement adeptes de l’effacement de notre culture, de notre mémoire, voire de l’effacement du pays tout court, lorsque certains parents installés à Poitiers (France) se sont adressés au Consul grec, exprimant leur désarroi devant la disparition des écoles grecques, le représentant officiel de… l’amère Patrie, leur a tout naturellement suggérer de faire appendre une autre langue à leurs enfants, par exemple la langue italienne, quotidien “Kathimeriní” du 10 septembre 2018.

Bateau en son dernier jour. Péloponnèse, septembre 2018
La destruction… déconstruction commence. Péloponnèse, septembre 2018
Le moteur est enlevé en premier. Péloponnèse, septembre 2018

De retour au pays pour l’été, les enfants de la nouvelle Diaspora ne verront même plus d’ailleurs les beaux bateaux traditionnels, d’après la Confédération de la Protection des bateaux traditionnels en bois, sur 14.500 bateaux de ce type et en 20 ans, près de 12.500 bateaux ont été détruits, “c’est l’apogée de la folie grecque actuelle”, et j’ajouterais que la destruction des bateaux tient autant et savamment de la déconstruction culturelle organisée. Accessoirement, les Grecs ne pourront plus se tourner vers la mer par temps de crise et d’effondrement disons ultimes, et ils demeureront dépendants des chalutiers et des multinationales agroalimentaires qui entre autres mondialisateurs, sont les maîtres de l’Eurocontrol depuis Bruxelles et depuis Berlin.

Ainsi, 12.500 bateaux ont été détruits. “Jeudi après-midi, dans la zone balnéaire de Néos Pýrgos, sur l’île d’Eubée. La scène à laquelle j’ai assisté avait quelque chose d’un cauchemar. Le soleil avait presque atteint le milieu du ciel et il brûlait fort comme pour nous punir. Deux chiens attachés aux bateaux déposés à proximité sur le chantier de réparation aboyaient continuellement. Devant nous, le caïque ‘Pános-Maria’, construit en 1983, longue de huit mètres, reposait à peine sur le sol au moyen de quatre troncs d’arbres tronqués. Le temps était venu, celui de son exécution, de sa mise à mort. Derrière lui, une pelleteuse. Le conducteur tenait une cigarette dans la bouche et les mains sur les leviers. La fumée sortait des vitres étroites de l’engin, on dirait les narines d’une bête immonde. Dès que l’agent de la Garde côtière grecque a donné le signal, le machiniste a aussitôt manié le marteau-piqueur, ce bras en fer vissé au bout du compresseur à la pince si épaisse. Il a attaqué la coque avec rage.”

“Bois brisé comme on brise alors les os d’un animal encore vivant. Comme si le bateau avait du souffle et de la voix. Pendant une demi-heure je voyais le caïque perdre sa belle forme, se perçant et se brisant, se lamentant même. Le marteau-piqueur qui se dressait dans les airs soulevait les morceaux de la coque brisée, et qui retombaient au sol. À côté de moi se trouvait Maria, l’épouse du pêcheur Panagiótis Livanós, le propriétaire du caïque. Ils pêchaient ensemble. Son mari, malade, ne pouvait plus poursuivre dans le travail, ainsi, il a décidé d’abandonner leur bateau à la destruction, et de recevoir en échange, l’indemnité de 83 000 euros que lui a accordée l’Union européenne. Montant excessif Si cette même coque était construite aujourd’hui, cela coûterait au total 40 000 euros”, quotidien “Kathimeriní” du 15 juillet 2018.

Caïques encore vivants. Péloponnèse, septembre 2018
Dystopie imposée et illustrée ! Athènes, septembre 2018
Beauté imposante. Péloponnèse, septembre 2018

J’ai assisté à une scène analogue qui s’est déroulée dans le Péloponnèse, surtout présumé authentique. Le conducteur de l’engin est arrivé le premier sur les lieux, et il a attendu les autres acteurs de la mise à mort durant près d’une heure. Le mécanicien pour bateaux et chalutiers du coin y était également convié, il a ainsi et d’abord œuvré pour la récupération des parties mécaniques avant… l’exécution. Je l’avais rencontré la veille. “C’est ignoble, toute notre tradition se perd, notre capacité de prise sur nos ressources halieutiques en cas de besoin, toute cette culture et en même temps art populaire de la construction navale de proximité. L’Union européenne paye bien pour en finir avec nous, en réalité, elle nous distribue les dernières miettes alors trompeuses”, m’avait-il dit. Péloponnèse authentique.

Ce même jour au café du coin, un jeune homme fustigeait à sa manière note piètre modernité. “Ceux de SYRIZA et de l’UE veulent nous déchristianiser, nous faire enlever la croix de notre sol, puis, faire interdire les cloches des églises, c’est la guerre”. Les autres au café ont fait un signe d’abrogation de la tête. Il n’y a pas vraiment à redire et ce n’est pas du populisme comme le diraient les propagandistes et les politiciens autorisés, les faits sont là et surtout ils sont palpables à travers le pays réel. On sait par exemple que toute une série d’actions très sournoises sont en cours pour faire disparaître à terme la Croix du drapeau hellénique sans oser le dire ouvertement. Cela est visible déjà à travers bon nombre de campagnes publicitaires, tout comme à travers même certaines recompositions disons “esthétiques”, servant de décor aux réceptions officielles en Grèce. Sans oublier cette ONG à Lesbos qui vient d’exiger à que l’on enlève une Croix d’une plage de l’île, “car elle porte atteinte au sentiment religieux des migrants”, presse grecque du 15 septembre 2018.

Au même moment, la presse grecque comme étrangère, elle découvrent seulement à présent combien et comment le quotidien que vivent les migrants dans le Camp de Mória à Lesbos est alors apocalyptique, tandis que près de deux milliards d’euros très européistes, auraient été répartis d’abord pour engraisser le clientélisme des ONG, et ensuite que celui de SYRIZA, plutôt que de faire face aux besoins plus que primaires des migrants, presse grecque et internationale du moment. .

Petite chapelle. Péloponnèse, septembre 2018
Petite chapelle. Péloponnèse, septembre 2018
Sur un mur ‘Bonne chance’. Athènes, septembre 2018

Finalement, les éditorialistes de la presse très autorisée, s’insurgent finalement de l’idéologie des frontières ouvertes, à l’instar de Tákis Theodorópoulos dans Kathimeriní cette semaine:
“La partie difficile c’est d’assumer la responsabilité des frontières ouvertes. Sinon, les ‘frontières ouvertes’ c’est une notion décousue, une idéologie faisant dans l’euphémisme, sans lien pertinent avec la réalité. Car la responsabilité des ‘frontières ouvertes’ signifie assumer d’abord la responsabilité des personnes qui croisent ces frontières pour se réfugier sur notre territoire. Il faut donc s’en occuper, les nourrir, les loger, leur apporter tous les soins médicaux nécessaires, plus la sécurité, et peut-être même les faire travailler. Surtout si en plus notre État veut être désigné comme démocratique, il doit également protéger ses propres citoyens pour que la cohabitation avec les migrants ne devienne pas contrainte, sachant que les migrants sont des gens qui n’ont pas vécu ni la paix dont ils jouissent ici et ils ne connaissent, ni la démocratie, et encore moins son fonctionnement, tandis que leur perception des droits sont plutôt inexistants.”

“Il est évident que l’Union européenne était non seulement mal préparée à assumer les ‘frontières ouvertes’, mais après tant d’années comme d’expériences, elle n’est même pas en mesure de mener l’une des notions centrales de sa constitution. L’UE montre du doigt et elle condamne Orban, sans tenir compte du fait que des sociétés et pays qui ne sont pas sous le gouvernement Orban, réagissent alors de plus en plus par la négative face aux ‘frontières ouvertes’. Le didactisme du politiquement correct est ainsi et de fait annulé par une réalité politique qui lui tourne de plus en plus le dos.”

“Aux antipodes d’Orban de la Hongrie, se situe alors la politique de notre pays en la matière. L’Europe se montre préoccupée par le nationalisme et le populisme de droite, sauf qu’elle n’est pas en mesure de voir le populisme de gauche. Probablement, parce que ce dernier utilise la rhétorique et les impératifs moraux justement issus du politiquement correct. Ainsi, l’Europe découvre soudainement que les migrants à Mória, pour la plupart, ils vivent dans des conditions bien pires que celles laissées dans leur pays natal. Aujourd’hui, nous venons d’apprendre que quatre cents enfants sont littéralement sans-abri. D’autres enfants sont portés disparus. Ce sont les victimes de la politique des ‘frontières ouvertes’. Tous ceux qui sont empilés de la sorte dans les conteneurs et dans les camps, ne peuvent alors que haïr le pays qui leur a promis l’hospitalité et qui les a dupés. Notons que le corps social à Lesbos a également subi un viol et compte parmi les victimes de la politique des frontières ouvertes.”, quotidien “Kathimeriní” du 22 septembre.

L’éditorialiste de “Kathimeriní” ne dit pas pourtant combien, les migrants et les mondialisateurs à la Troïka, partagent au fond le même mépris pour la démocratie et pour les droits des citoyens, et j’ajouterais, la même perception de la terre, du terrain conquis, dont ils ont été d’abord les victimes chez eux, lorsque leurs pays ont été et le sont toujours, piétinés par les intérêts… des “humanistes” affalés des conclaves mondiaux et mondains. La recette n’est pas nouvelle. On utilise alors les victimes d’ailleurs… pour achever ainsi les victimes d’ici. C’est une forme de guerre totale à la manière de notre siècle ultime. Et c’est exactement cette dimension du problème qui est désormais perçue par le mécano du coin ou par le jeune au café du Péloponnèse… authentique, que l’analyste de la grande presse ne veut surtout pas discerner.

Hommes de la Marine nationale russe. Île de Póros, septembre 2018
Hommes de la Marine nationale russe. Île de Póros, septembre 2018
Hommes de la Marine nationale russe. Île de Póros, septembre 2018

Le bateau de pêche a été détruit dans les… règles. Son propriétaire, ses proches, le mécano, ils ont d’abord évoqué des sujets d’actualité comme si de rien n’était et ce bavardage… bien psychanalytique, a duré près d’une heure. Puis soudainement, une voix a pour ainsi dire a déchiré l’atmosphère: “En route, les gars, on y va.” Aussitôt, les visages se sont crispés car on passait à l’acte, comme pour commettre alors un crime.

Et comme pour l’autre bateau, le temps était venu, celui de son exécution, de sa mise à mort. Derrière lui, une pelleteuse. Coque brisée comme on brise alors les os d’un animal encore vivant. Comme si le bateau avait du souffle et de la voix. Pendant une petite heure, je voyais le bateau perdre sa belle forme, se perçant et se brisant, se lamenter même. Ceux du Péloponnèse cette fois authentique, ils ont été visiblement émus. Un vieux pêcheur s’est rapproché à vélo observant déjà la scène de loin: “Salopards, ils l’on eu. Encore un. La Grèce est morte.

Marins russes. Póros, septembre 2018

Beau pays et cependant coquille de plus en plus vidée. L’endroit a été nettoyé et les débris chargés. Au départ du camion, parmi les participants… à la cérémonie, il y en a qui ont donné rendez-vous à Póros, à l’occasion de l’arrivée très officielle et pour tout dire rarissime d’un navire de la Marine nationale russe. Cette visite de la frégate AMIRAL ESSEN de la classe de l’amiral Grigorovitch, s’inscrit dans le cadre de la commémoration du moment inaugural des relations diplomatiques entre la Grèce contemporaine sous le Gouverneur Ioánnis Kapodístrias, et la Russie. Il y a tout juste 190 ans, ces documents historiques avait été signés dans une demeure justement, de l’île de Póros, très exactement à la date du 17 septembre 1828.

Il faut dire qu’aussitôt sur l’île, les marins russes… ont été très positivement remarqués par la population, et autant on dirait par certains touristes. Après la cérémonie en présence des Russes, le navire a levé l’ancre, depuis, l’avion militaire russe a été abattu en Syrie suite à la… gestion des cieux par les F-16 israéliens, et l’histoire très prochaine ne nous est pas encore connue bien entendu.

Le navire AMIRAL ESSEN à Póros. Septembre 2018
Il y a 190 ans à Póros. Septembre 2018
Il y a 190 à Póros. Septembre 2018
Cérémonie grecque et russe. Póros, septembre 2018

C’est donc dans ce contexte géopolitique et interne tendu, que le gouvernement de la marionnette Aléxis Tsípras, fait semblant de découvrir qu’avec le reste des biens publics, il a également transféré la jouissance des sites archéologiques et des musées à la Treuhand à la grecque, c’est-à-dire, aux mains des rapaces planétaires de l’Agence chargée de la privatisation des biens de la Grèce. Et pendant ce temps, on détruit à la chaîne les bateaux de pêche, de préférence traditionnels. Culture morte.

L’affaire avait été fort heureusement récemment dévoilée par un communiqué de l’Association des Archéologues Grecs, daté du 18 septembre, avant que la nouvelle ne soit reprise à travers la presse du pays. D’après le communiqué, “l’Association des Archéologues Grecs souligne une nouvelle fois que les monuments historiques sont protégés par la Constitution et de ce fait, ils sont toujours de propriété publique et ne peuvent faire l’objet d’aucune transaction. Nous dénonçons ainsi, la tentative de transfert de la gestion de tous les monuments anciens comme plus récents, à la Compagnie de Gestion des Biens de l’État, Société Anonyme (ET.A.D. SA), d’après la décision 2018-0004586, en vertu de la loi. 4389 de 2016, et de la décision gouvernementale 86 du 18.06.2018, Journal Officiel 2320 du 19 juin.”

“Cette décision ahurissante a été repérée à l’occasion de la publication d’une liste des monuments ainsi ‘transférés’, relevant du Service archéologique de Région de la Canée en Crète. Sur cette liste y figurent notamment, une grande partie Est des fortifications vénitiennes, le fossé du mur byzantin, le fossé Sud des fortifications vénitiennes, vestiges qui se sont révélés autant importants car on y a découvert des restes de la période minoenne, les traces du chantier naval vénitien, ainsi que les tours vénitiens Monigo, le bastion Lando, la forteresse Firka et le bain turc. Biens et surfaces déjà expropriés à des fins archéologiques par le Ministère de la culture et parfois monument et qui sont également en cours de restauration. Sur cette liste sont encore inclus, les musées archéologiques (!), dont celui établi au sein de l’église de San Francesco, le nouveau Musée archéologique de la ville, le Musée national d’Elefthérios Venizélos, de même que les Archives historiques de la Crète.”

“C’est alors un processus qui ne trouve pas de précédent dans l’acception de ce qui tient habituellement de la bonne gestion en matière de patrimoine culturel. Ainsi, et à juste titre, cette décision gouvernementale ne peut que susciter les plus vives réactions en cascade au niveau national, comme autant international. L’exclusion des monuments et des sites archéologiques, conformément à l’article 196, paragraphe 4 de la loi. 4389 de 2016, n’est que de la poudre aux yeux, dans la mesure où elle est contredite par le paragraphe suivant. Le paragraphe 5 de ce même article stipule que les propriétés exemptées demeurent pourtant inclus dans le portefeuille de la gestion de la Compagnie de Gestion des Biens de l’État. La possession donc, l’utilisation et la gestion des monuments les plus importants de la Canée n’appartiennent plus au ministère de la Culture, ni à ses Services régionaux, en violation de l’esprit de l’article 24 de la Constitution de la Grèce.”

L’Acropole. Athènes, septembre 2018
Travaux. Immeuble classé. Athènes, septembre 2018
Bar datant des années 1930. Athènes, septembre 2018

“Les monuments et les antiquités sont des objets et des réalités qui doivent rester hors toute transaction ou opération de transfert, et ceci de façon comme on dit inaliénable. Toute tentative de transfert à des tiers de leur gestion nous trouve ainsi opposés. Ceci est une position ferme de notre Association, et nous allons nous battre par tous les moyens légaux afin de maintenir le caractère d’antiquités comme étant un bien social public. L’Association des Archéologues Grecs ne permettra pas l’utilisation des sites archéologiques et des monuments comme une sorte de gage, lié à la dette et ceci même pour une durée d’un siècle, au demeurant, aux résultats largement inconnus en fin de compte.”

“Cette action inacceptable, même si elle se produit en temps de paix, elle ne peut être comparée qu’aux vandalismes des monuments et le pillage des antiquités durant les années pétrifiées de l’Occupation allemande, ou au moment où les antiquités était largement pillées au 19ème siècle. Il s’agit enfin de la phase ultime dans l’aberration politique actuelle, étant donné qu’au même temps, nous nous attendions plutôt à une action coordonnée pour le retour des antiquités volées, et pour une compensation légitime liée à leur destruction en temps de guerre. Pour ces raisons importantes, l’Association des Archéologues Grecs, appelle les dirigeants politiques du ministère de la Culture et le gouvernement à annuler immédiatement le transfert de la propriété et la gestion des monuments de La Canée et des autres régions du pays inclus dans cette liste des 10 119 biens à transférer à la Compagnie de Gestion des Biens de l’État (…).”,communiqué de l’Association des Archéologues Grecs sur leur site Internet.

L’entrée du port du Pirée. Septembre 2018
Réception. Péloponnèse, septembre 2018
Roue volée. Póros, septembre 2018

“C’est le site de l’Acropole même qui est menacé par un tel processus”, fustige alors Míkis Theodorákis dans une déclaration communiquée à la presse grecque. Le “gouvernement” dément dans un premier temps, et finalement du bout des lèvres, la nouvelle Ministre de la Culture, la PASÓKienne Myrsíni Zorbá, admet que “c’est dommage que de ne pas délier les monuments de la liste (…) je suppose que Madame Koniórdou qui occupait ce poste il y a peu, avait trouvé une formule adéquate en concertation avec le Ministère des Finances lors de la constitution de cette liste des biens transmis en 2016, cela-dit, je l’ignore”, presse grecque du 21 septembre 2018.

Pendant ce temps, on vole désormais les roues des motos, même sur l’île de Póros, tandis qu’à deux pas des lieux du martyre du caïque brisé, les élus très locaux organisent réception sur réception pour accueillir les potentiels “investisseurs” forcement étrangers qui convoitent hôtels et autres bâtiments désormais relevant ou presque, de la gestion de la fameuse Compagnie de Gestion des Biens de l’État.

D’ailleurs, sur cette fameuse liste longue aux 10.119 biens, figurent d’après les Archéologues, la Tour Blanche de Thessalonique, le monument de la Rotonde, ainsi que l’Église de la Sainte Sophie, presse grecque de la semaine. D’autres sources font état d’une situation dangereuse et analogue pour ce qui est des Îles Ioniennes. Sur l’île de Céphalonie par exemple, ce serait le périmètre du monument dédié à la mémoire des Italiens de la division ACQUI, massacrés comme on sait par les troupes allemandes en septembre 1943, qui passerait sous contrôle… de la Treuhand à la grecque. Retour… de l’histoire ? Je pense alors autant, aux émouvants messages que des Italiens ont laissés sur les murs de l’ancienne prison située au deuxième sous-sol de l’immeuble pour un temps historique que la Gestapo avait transformé en prison entre 1943 et 1944. Serait-il peut-être à vendre ?

Message italien de 1944. Athènes, septembre 2018
Drapeau national. Message de la Résistance grecque de 1944. Athènes, septembre 2018
Navette italienne. Le Pirée, septembre 2018
Baigneurs. Le Pirée, septembre 2018

Bonne année pour le tourisme d’après les médias. Au Pirée, on se baigne entre les fortifications antiques et les évidences du temps présent, signe aussi des temps. Parfois, on y distingue même certaines navettes italiennes qui croisent près des côtes, vraisemblablement en direction du Canal de Corinthe.

La semaine dernière, le journaliste Yórgos Trángas, ami des Ambassades des États-Unis et du Royaume Uni, d’après ses propres affirmations, a-t-il publiquement et fermement souhaité… “l’essor du tourisme en Grèce, c’est-à-dire, d’arriver à plus de 60 millions de visiteurs par an, au lieu de presque 30 millions actuellement”, Radio 90.1 FM, zone matinale. Autrement-dit, le cauchemar, la gestion du patrimoine et les bateaux de pêche en moins si le crime actuel alors se perpétue entre SYRIZA et les marionnettes d’en face, chez les Mitsotákis.

Beau pays marin, derrière sa vitrine.

Beau pays marin, derrière sa vitrine. Athènes, septembre 2018
* Photo de couverture: Nos plaisanciers visiteurs. Île de Póros, septembre 2018

Monuments historiques et musées transférés au Fonds de privatisation de la Grèce

Les archéologues et les gardes des sites sont en colère après que le ministère grec des Finances eut rendu une décision ordonnant  le transfert de plusieurs sites historiques,  musées, monuments et bâtiments historiques au Fonds de super privatisation.

Ils appartiennent de facto à l’Etat et ne peuvent être vendus, a déclaré l’Association des archéologues grecs dans un communiqué intitulé « Non à la vente des monuments du pays » publié mercredi.

Selon les archéologues, 10 119 sites archéologiques, musées et bâtiments historiques ont été transférés au Fonds de privatisation, dont beaucoup proviennent de la région de La Canée et de la Crète.

«Les monuments sont protégés par la Constitution, ils ne peuvent être ni transférés ni vendus», a déclaré l’Association, ajoutant que ce transfert sans précédent connu lorsque le catalogue des monuments de La Canée et des environs est devenu public.

Parmi les monuments et musées de La Canée figurent le nouveau musée archéologique, le musée archéologique situé dans l’église Saint-François, le musée national Eleftherios Venizelos, les archives historiques de Crète, plusieurs douves vénitiennes et byzantines, des fortifications et des bastions ainsi que des propriétés importantes. Des vestiges architecturaux minoen ont été découverts.

«L’Acropole est-elle le prochain?», a déclaré jeudi l’Association des gardes sur les sites archéologiques, également en colère, dans une déclaration  ajoutant que des terrains avaient également été transférés.

La menace de grèves.

«Notre réponse sera très dure. Notre patrimoine culturel appartient à tous les Grecs, aucun gouvernement n’a le droit de négocier à ce sujet ou de transférer la propriété », ont-ils déclaré dans leur déclaration.

Comment cela peut-il arriver?

Le comité chargé de transférer les biens de l’État au Fonds de privatisation est libre d’agir à sa guise.

Apparemment, le ministère des Finances n’a pas pris les mesures nécessaires à temps pour exempter tous ces sites, musées et monuments.

Négligence? Volontairement ? Dans l’espoir que le transfert illégal ne sera pas expulsé?

Le fait est que le transfert a lieu avec la décision ministérielle.

Dans un communiqué publié jeudi, le ministère des Finances a déclaré que «le décret ministériel sur le transfert ne signifie pas que le transfert est automatique car les contrôles doivent être effectués en premier».

Dans le même temps, il est expliqué qu’ont été exemptés du transfert des rivages maritimes, des plages, des zones sous protection naturelle, des sites archéologiques et des zones de forêts pures, des places, des rues, des ports * et une liste d’autres biens de l’État ayant peu à voir avec le problème.

Le ministère des Finances a indiqué entre autres que le transfert de biens publics au Fonds de privatisation était l’une des conditions préalables des créanciers à la conclusion de la 4ème revue du programme grec.

Je me souviens que le ministre des Finances, Euclid Tsakalotos, avait émis un ordre de transfert de biens appartenant à l’Organisation nationale du tourisme. La décision de juin 2016 avait également ordonné le transfert en vue de la privatisation du tombeau de l’éminent politicien Eleftherios Venizelos .

Pendant ce temps, les médias à La Canée exhortent les autorités locales à demander des explications au gouvernement central et à prendre des mesures.

Vendredi matin, le ministre de la Culture, Myrsini Zorba, a admis le trasnfert et a blâmé celle qui l’a précédé, Lydia Koniordou, pour une éventuelle négligence.

« C’était une erreur de ne pas exclure les monuments en 2016, je suppose que Mme Koniordou avait fait des arrangements avec le ministère des Finances, mais je ne sais pas », a déclaré Zorba aux médias.

« C’est la loi de 2016 qui a donné aux fonds de privatisation toutes les propriétés de l’État à l’exception des sites archéologiques déclarés, des régions Ramsar, etc. Je n’ai aucune raison de remettre en cause l’ordre juridique du ministère des Finances », a ajouté Zorba.

La veille, le ministre de la Culture a tenté de réprimander les archéologues, mais il a finalement dû reconnaître l’amère vérité.

sources: plusieurs médias

* La Grèce a été forcée par les prêteurs à privatiser ses plus grands ports du Pirée et de Thessalonique.

Dix ans après la crise, les financiers se portent toujours bien, les autres beaucoup moins

 15 septembre par CADTM Belgique

Action du collectif ByebyeTina du 15 septembre 2018 devant la Bourse de Bruxelles – Photo Collectif Krasnyi

Il y a dix ans, le 15 septembre 2008, Lehman Brothers s’effondrait. Cette faillite retentissante marquait le déclenchement d’une crise financière et économique aux contours encore obscures et dont la sortie semble encore fort éloignée. Par la suite, d’autres faillites se sont succédé, des faillites gérées par la plupart par des États selon le fameux principe de socialisation des pertes, un mantra toujours d’actualité. Sans réelles poursuites des responsables, sans réelles conditions pour la suite. Dix ans après, les dettes globales, privées et publiques, sont plus élevées qu’en 2008 et ne sont pas moins risquées malgré les annonces optimistes des « responsables » politiques. Les populations se saignent aux quatre veines, à coup d’augmentations d’impôts et de coupes budgétaires dans des services publics pourtant essentiels, pour rembourser des dettes responsables de l’austérité qu’on leur impose.

Un monde vulnérable aux secousses financières

Les causes structurelles de la débâcle de 2008 sont toujours présentes. Rien n’a été accompli pour réglementer sérieusement les activités spéculatives, l’utilisation des dérivés ou même pour limiter l’effet de levier pratiqué par les banques (celles-ci ont très peu de fonds propres par rapport à tous les crédits qu’elles octroient). Aucune démarche non plus pour protéger nos dépôts des activités de trading à haute fréquence, pour assainir profondément le bilan des banques ou pour en diminuer radicalement la taille.

Tout le monde ne pâtit pas de la crise de la même façon. En 2015, on découvre ainsi que le FMI fait 2,5 milliards d’euros de profits sur ses prêts à la Grèce depuis 2010 [1]. Plus récemment, on apprend que la BCE, via son programme d’assouplissement quantitatif (en anglais QE – quantitative easing), a réalisé 7,8 milliards d’euros de bénéfices grâce aux titres grecs [2]. Rappelons que cette politique d’assouplissement quantitatif a permis aux grandes banques européennes de se débarrasser des bonds d’États en difficulté sans tenir compte de leurs pratiques spéculatives. Hormis quelques rares banquiers jugés au pénal en Islande, les cadres supérieurs du système financier, celui même qui a engendré cette crise financière transformée en une grave crise sociale dans toute l’Europe, sont restés impunis (les deux tiers des cadres de Lehman se sont d’ailleurs recyclés dans d’autres grandes banques).

Par ailleurs, la diminution des taux d’intérêt dans les économies dites « avancées », provoquée par l’injection massive d’argent de la part des banques centrales des pays riches, a poussé les investisseurs à prêter massivement aux pays du Sud. Environ 12 000 milliards de dollars ont été injectés dans le système financier depuis l’effondrement de Lehman Brothers [3].

Ces flux financiers ont provoqué une augmentation de la dette externe de ces pays libellée en dollars, une dépendance économique accrue vis-à-vis des créanciers occidentaux avec, in fine, le risque d’une nouvelle crise de la dette dans les pays appauvris.

L’augmentation des taux d’intérêt déjà à l’œuvre aux États-Unis détourne aujourd’hui l’attention des investisseurs des économies du Sud à vers les économies du Nord et en particulier vers les États-Unis. Le danger pour les pays du Sud deviendra plus important encore avec l’arrêt du programme du QE de la BCE et de la FED prévu depuis longtemps mais repoussé plusieurs fois vu les risques qu’il fait peser de tous les côtés. Leurs dettes en devises fortes, déjà difficilement soutenables, deviendront insurmontables. Sans doute le FMI, l’éternel pompier pyromane, viendra t-il à la rescousse tel un prêteur en dernier ressort ?

Le recours à l’endettement est devenu la règle plutôt que l’exception

La dette globale sans tenir compte de la dette des entreprises financières (principalement du secteur bancaire) est passé de 97 000 milliards au début de la crise en 2007 à 169 000 milliards de dollars au milieu de l’année 2017, soit une augmentation de 74 % [4]. Les entreprises privées non financières ont poursuivi le recours à l’emprunt de manière intensive et leur dette est passée de 37 000 milliards de dollars à 65 000 milliards de dollars mi 2017. Cette augmentation faramineuse est en grande partie due aux entreprises chinoises, désormais parmi les acteurs les plus importants du panorama global, dont la dette a augmenté de 15 000 milliards de dollars depuis 2007. En pourcentage du PIB, celle-ci est passée de 97 % à 163 % du PIB chinois en 2017, l’un des ratios les plus élevés au monde.

Aux États-Unis, la dette des étudiant-e-s a plus que doublé durant ces dix années de crise : de 600 milliards de dollars il y a dix ans, elle dépasse dorénavant les 1 500 milliards de dollars début 2018. La financiarisation de l’accès aux études représente une bulle spéculative susceptible d’exploser.

Les droits sociaux dépouillés par l’austérité

Alors que les banques et assurances ont été en grande partie recapitalisées par les États, les populations, elles, n’en ont pas fini de payer. Mais pourquoi les peuples devraient se priver de leurs droits fondamentaux pour des faillites privées dont la responsabilité incombe à leurs dirigeants et aux agences en charge de leur contrôle ? Pourquoi les laisserait-on répéter encore les mêmes erreurs ?

Alors que les grandes plus entreprises payent de moins en moins d’impôts, une diminution importante des services publics et une casse de la sécurité sociale ont contribué à l’émergence d’une crise sociale réelle. En Grèce, une récente étude universitaire a démontré les liens évidents entre mesures d’austérité et accroissement spectaculaire du taux de mortalité dans le pays, un taux dont la croissance a dépassé de cinq fois celle de la moyenne européenne durant la même période. [5] De plus, les États européens dans l’application des mesures d’austérité, n’hésitent à diminuer l’accès aux soins, à réduire le plafond du salaire minimum, à démanteler les droits des travailleurs, les allocations sociales, etc. alors que le taux de chômage ne finit pas d’augmenter. De plus, l’âge de la retraite a été retardé et le montant des pensions largement réduit, alors que dans certains pays ces revenus représentent la seule chance de survie de milliers de ménages.

Dettes liées à l’hypothèque

Le droit au logement est plus que jamais menacé par cette crise. L’insolvabilité des ménages (dont les moyens ont été diminués et les frais augmentés) a eu des conséquences sur le droit fondamental que constitue l’accès au logement. Les milliers de ménages qui ne pouvaient pas rembourser leurs prêts, se sont retrouvés attaqués par les banques à coups de ventes aux enchères ou d’expulsions. En Espagne, on estime à 800 000 les familles qui ont perdu leur logement pour cause d’insolvabilité alors qu’au même moment, le gouvernement grec s’est engagé face à ses créanciers à vendre aux enchères 135 000 logements d’ici 2021.

Une décennie d’approfondissement des inégalités
Les entreprises privées contribuent de moins en moins à renflouer l’État via l’impôt sur les sociétés qui leur est attribué. En effet, quand les capitaux ne s’évadent pas dans les paradis fiscaux, ils sont, en toute légalité, de moins en moins taxés. Cette baisse de contribution des entreprises équivaut à un manque à gagner pour l’État qui à son tour est obligé de s’endetter. Un rapport publié mercredi 5 septembre par l’OCDE, nous apprend que « le taux moyen de l’impôt sur les sociétés dans la zone OCDE a reculé de 32,5 % en 2000 à 23,9 % en 2018 ». Parmi les dernières mesures en date, les États-Unis ont approuvé l’année dernière une forte chute du taux d’imposition des entreprises qui est passé de 35 à 21 % et la France prévoit d’abaisser progressivement l’impôt sur les sociétés de 33 à 25 % pendant le quinquennat d’Emmanuel Macron.
Action du collectif ByebyeTina du 15 septembre 2018 devant la Bourse de Bruxelles – Photo Collectif Krasnyi

Moins ponctionnées, ces sociétés engrangent des profits faramineux. Au niveau mondial, les dividendes qu’elles versent à leurs actionnaires ont atteint le niveau record de 244,7 milliards de dollars au premier trimestre 2018. Oxfam nous rappelle que ce vol organisé se déroule dans un monde toujours plus injuste où seules 62 personnes possèdent autant que la moitié de la population mondiale.

Face à ce délabrement persistant de la finance dérégulée, à l’heure où se profile une nouvelle crise financière, nous continuons de nous mobiliser. Nous soutenons le mouvement « Byebyetina » à Bruxelles et à Liège ainsi que la mobilisation européenne pour fêter à sa manière les 10 ans de la crise : actions de rue, manifestations, conférences, débats pour notre avenir à tous et toutes. Seule la conscientisation de la population peut la mobiliser face aux injustices.

Cet article a été publié (dans sa version courte) pour la première fois sur Politis

Notes

[4Données extraites de l’étude Rising Corporate debt, Peril or promise ?, McKinsey Global Institute, juin 2018.

Source http://www.cadtm.org/10-ans-apres-l-eclatement-de-la-crise-les-financiers-se-portent-bien-les

L’Europe est au bord de l’abîme Entretien avec J Stiglitz

Par Mathieu Magnaudeix

Dans un entretien à Mediapart, le célèbre prix Nobel d’économie Joseph Stiglitz s’inquiète de la poursuite de l’austérité dans la zone euro. Il s’alarme aussi des politiques de Donald Trump et de l’explosion des inégalités, dix ans après la crise financière de 2008. Plus que jamais, il plaide pour « augmenter les salaires », réguler la finance et lutter contre les « monopoles ».

Lui aussi membre de l’ICRICT, le célèbre prix Nobel d’économie Joseph Stiglitz, professeur à l’université Columbia et ancien chef économiste de la Banque mondiale, a répondu aux questions de Mediapart.

 Panama Papers, Paradise Papers, Swiss Leaks, LuxLeaks, Malta Files, etc. Depuis la crise de 2008, de grandes enquêtes internationales ont prouvé l’ampleur de l’évasion fiscale dans le monde. Mais la situation a-t-elle vraiment changé ?

Joseph Stiglitz. La crise financière de 2008 n’a pas été provoquée par les paradis fiscaux, mais il est assez remarquable de constater la lumière crue qu’elle a projetée sur eux. Et c’est une bonne chose ! Grâce au travail d’investigation de journalistes du monde entier, on s’est rendu compte de la magnitude de l’évasion fiscale, mais aussi de l’évitement fiscal, qui privent les États de ressources cruciales. Les restrictions budgétaires qui ont suivi la crise ont d’ailleurs accru cette prise de conscience et rendu l’opinion très sensible à ces questions.

Plus récemment, je pense que l’élection de Donald Trump a aussi aidé à cette prise de conscience. Le président américain est un expert incontesté du blanchiment d’argent. Avec lui, l’opinion a découvert ce marché obscur où toutes sortes de gens miteux blanchissent de l’argent sale en achetant et revendant des appartements de luxe. C’est exactement le modèle de Trump ! (Il regarde par la fenêtre, au 34e étage d’une tour de Manhattan, qui donne sur des gratte-ciel sur la 3e Avenue).

Tout cela a fini par renforcer le sentiment que dans une ville comme celle-ci, il y a quelque chose qui ne tourne pas rond. Les gens ordinaires ne peuvent plus acheter de biens immobiliers. Les plus pauvres habitent à l’extérieur et doivent chaque jour faire de longs trajets. Mais au cœur de la ville, il y a des milliers et des milliers de mètres carrés vides, propriété de riches spéculateurs, qui s’en servent souvent à des fins de blanchiment. Ce genre de choses renforce la colère des citoyens.

Y a-t-il eu des progrès depuis dix ans pour réduire les paradis fiscaux et réguler les marchés financiers ?

Sur la transparence du système financier international et l’évasion fiscale, il y a eu certains progrès. Mais c’est loin d’être suffisant. Le verre reste aux trois quarts vide. Quant au système financier, est-il plus stable qu’il y a dix ans ? Je dirais probablement. Les seuils de capitaux minimums exigés [des banques – ndlr] ont été augmentés, il y a davantage de supervision. Mais ce n’est clairement pas suffisant. Au cours des trois ou quatre dernières années, il y a même eu d’importantes rechutes, avec la remise en cause de régulations financières adoptées après la crise. La pression des grandes banques américaines a été couronnée de succès. À l’instar de Citigroup, elles ne se cachent pas de faire pression au travers d’amendements législatifs écrits par leurs lobbyistes.

La différence avec le monde de 2008, n’est-ce pas que l’urgence est encore plus grande ? Il y a le défi climatique, l’émergence d’énormes entités monopolistiques comme Apple et Amazon (dont les capitalisations boursières dépassent désormais les 1 000 milliards de dollars), l’explosion des inégalités. Le sénateur socialiste américain Bernie Sanders cite souvent ce fait frappant : aux États-Unis, la fortune cumulée de trois milliardaires, Warren Buffett, Bill Gates et Jeff Bezos, est supérieure au bas de laine de la moitié des Américains les plus modestes…

L’urgence de la question des inégalités est en effet la grande différence. En mars 2011, lorsque j’ai fait paraître un article sur la captation par 1 % des Américains du quart des revenus, il n’y avait pas encore de prise de conscience globale. Désormais, on sait qu’au cours des trois ou quatre dernières décennies, presque tous les bénéfices de la croissance sont allés aux plus aisés. Le capitalisme est en échec. Malgré les progrès fantastiques de la recherche médicale, l’espérance de vie aux États-Unis est en train de décliner, c’est inouï. De plus en plus de gens se disent que le rêve américain est un mythe. L’élection de 2016 est la preuve que l’explosion des inégalités a désormais des conséquences politiques et sociales majeures.

Garantir l’emploi

Justement, Donald Trump, le héraut du « Make America great again », a été élu il y a deux ans. Il se vante souvent d’un taux de chômage au plus bas depuis dix-huit ans et des records de la bourse, autant de preuves, dit-il, de son succès. Que penser de ses politiques économiques ?

D’abord, elles ne marchent pas pour la plupart des Américains. Le marché des actions monte parce que les salaires sont faibles et les taux d’intérêt sont bas. En baissant les salaires et en transférant l’argent vers les profits, il n’est pas difficile de faire monter les marchés d’action, a fortiori si vous baissez les impôts des entreprises !

La réforme fiscale de Trump, une baisse d’impôt massive pour les milliardaires et les grandes entreprises, a substantiellement creusé le déficit budgétaire américain [il pourrait atteindre mille milliards de dollars en 2020 selon le Congrès américain – ndlr] mais la croissance supplémentaire créée par ce cadeau fiscal massif est en réalité très faible. C’était une très mauvaise réforme fiscale, dont l’impact ne sera que de très court terme et minime. Rajoutons à ça le protectionnisme de Trump, qui plonge le monde dans l’incertitude…

Que pensez-vous des « guerres commerciales » lancées par Trump avec la Chine, l’Europe, etc. ?

Dans les guerres commerciales, tout le monde perd. Donald Trump s’est donné comme objectif de réécrire les règles du commerce international pour donner un avantage significatif aux États-Unis et réduire le déficit commercial américain. Mais ce sont des fadaises. Ce qui détermine les déficits commerciaux, c’est la macroéconomie, et quoi qu’il fasse, le déficit commercial américain va s’aggraver. Derrière la rhétorique et ses rugissements, il récolte des cacahuètes.

Regardez l’accord avec le Mexique, récemment annoncé en fanfare. Les États-Unis ont en réalité obtenu une concession mineure sur la part de voitures construites en Amérique du Nord : c’est peu et cela risque in fine d’augmenter les coûts de production et donc de détruire des emplois. L’accord avec la Corée du Sud n’aura pas non plus beaucoup d’effet : la Corée a accepté de faire entrer davantage de voitures américaines qui ne respectent pas forcément leurs critères de sécurité. Mais les Coréens ne les achètent pas ! Qu’il y en ait davantage sur le marché ne changera pas la donne.

Dans la presse américaine, on lit fréquemment des analyses qui annoncent une nouvelle crise financière. Certains pointent les excès de la finance, d’autres la bulle énergétique aux États-Unis, d’autres encore le caractère insoutenable de l’endettement des ménages américains. Doit-on craindre une nouvelle crise ?

Pour la Turquie et l’Argentine, on y est déjà. On se doutait que les politiques d’« assouplissement quantitatif » mises en place par les banques centrales après la crise allaient poser un problème pour les économies émergentes lorsque les taux d’intérêt allaient remonter, à cause de leurs déficits et de leurs dettes. C’est ce qui est en train de se passer et on ne connaît pas le degré de contagion. D’un point de vue global, c’est le risque le plus imminent.

Après, il y a ce que vous mentionnez, notamment la dette étudiante des Américains qui atteint 1 500 milliards de dollars. L’effet négatif sur notre économie est déjà là. De très nombreux Américains ne peuvent plus acheter de bien immobiliers, ils retardent leurs projets familiaux, cela affaiblit l’économie. Le problème, c’est que passé son effet cosmétique, la réforme fiscale de Trump va commencer à avoir un impact négatif sur l’économie. On peut donc s’attendre à un ralentissement économique significatif en 2019 ou en 2020. À ce moment-là, les dettes pourraient accélérer les problèmes.

Vous avez depuis longtemps mis en garde contre l’absence de réforme de l’euro et les politiques d’austérité. L’Europe est-elle en train de sombrer ?

Il est décevant de constater qu’alors que le risque grec a diminué, les efforts pour réformer l’euro et la zone euro ont aussi diminué, tandis que les politiques d’austérité ont continué. La Grèce est toujours en dépression avec des objectifs de surplus budgétaires qui risquent de l’étouffer, les jeunes Grecs continuent de fuir leur pays, et l’Europe semble fermer les yeux. Avec son nouveau gouvernement qui envisage une sortie de l’euro, l’Italie est un risque de crise potentielle. Si l’Europe ne réforme pas l’euro, je pense qu’il faut anticiper une crise. Des pays quitteront l’euro, réellement ou de facto en créant des monnaies parallèles.

L’Europe est au bord de l’abîme. Et quand vous restez au bord de l’abîme, il y a une bonne chance que vous tombiez.

Le président français Emmanuel Macron affiche son intention de réformer l’Europe. À domicile, il mène des politiques orthodoxes.

Il a une vision de l’Europe mais elle ne semble pas convaincre l’Allemagne et d’autres pays. Encore une fois, à part une réforme de l’eurozone et de l’euro, la possibilité de politiques expansionnistes est très limitée. En attendant, l’Europe pratique la dévaluation interne, ce qui cause la récession, affaiblit l’économie, compresse les salaires. L’autre piste, c’est une taxe carbone qui stimulerait l’économie.

En France, en Europe, aux États-Unis, les progressistes recherchent des politiques pour résoudre la question des inégalités, répondre aux défis du changement climatique, lutter contre l’autoritarisme et l’extrême droite. Que leur suggérez-vous ?

Une des sources des inégalités, c’est le déséquilibre croissant entre d’un côté le pouvoir toujours plus grand des monopoles, et de l’autre l’affaiblissement du pouvoir de négociation des salariés. Il faut donc renforcer les syndicats et attaquer les monopoles, à la fois en les régulant et en renforçant la concurrence. Par ailleurs, il faut davantage de redistribution – songez qu’aux États-Unis nous avons un système fiscal non pas progressif, mais régressif ! –, augmenter les salaires des travailleurs, renforcer l’éducation publique, réduire le poids des transferts intergénérationnels avec une taxe sur l’héritage, améliorer la santé, le logement, avoir l’objectif d’un emploi pour tous.

Aux États-Unis, plusieurs figures émergentes du Parti démocrate proposent une « garantie d’emploi » pour les salariés. Ce pourrait même être une des idées phares du candidat opposé à Trump à la présidentielle de 2020. Qu’en pensez-vous ?

C’est une des idées que je soutiens. Pour les classes les plus populaires, et les minorités, le marché ne fonctionne pas comme il devrait. D’un côté, il y a d’énormes besoins, par exemple pour entretenir les villes et apporter des soins aux personnes âgées. De l’autre, plein de gens n’ont pas de travail. Faire se rencontrer les deux réduirait les inégalités, stimulerait l’économie et bénéficierait à toute la société.

Trump est au pouvoir, l’Europe est rongée par l’extrême droite et pourtant vous restez optimiste…

Je n’ai jamais vu les jeunes Américains aussi motivés. Ils réalisent que leur futur est en jeu. Notre démocratie prend l’eau, l’économie est défaillante, mais ils ont encore confiance dans nos processus démocratiques. Ils ont compris que la direction dans laquelle nous entraîne le Parti républicain est un trou noir. Quand je voyage, je sens cela aussi en Europe et dans d’autres parties du monde. Voilà mon espoir.

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