Grèce : riche ou pauvre, le point de non-retour.

Avec 3,7 millions de personnes, soit 34,8% de sa population sous le seuil de pauvreté, la Grèce se positionne de plus en plus haut dans le classement des pays où les inégalités sont les plus élevées. Des inégalités fruits de nombreux domaines négligés depuis des années par les gouvernements successifs.

Des riches toujours plus riches et des pauvres toujours plus pauvres… C’est le triste constat de la Grèce d’aujourd’hui. Le pays est même actuellement en lice pour le triste trophée du pays européen où la pauvreté a le plus progressé. Bien que de nombreuses actions de solidarité ont été mises en place à Athènes, notamment avec la structure d’accueil d’urgence Kyada, sorte de pharmacie sociale, ou encore le programme d’aide alimentaire et médicale, « Help at home », la misère ne cesse de progresser.

Depuis les mesures plus que drastiques imposées par l’Union européenne et le FMI (fonds monétaire international) depuis plus de 10 ans, dans le cadre d’un plan de sauvetage des fonds publics, la Grèce est plongée dans une austérité effrayante.

Plus d’un tiers de la population vit sous le seuil de pauvreté (aux alentours de 370 euros par mois), et un nombre alarmant de personnes sont sans abris. Seules la Bulgarie et la Roumanie rivalisent avec la Grèce dans ce domaine-là. Ces inégalités de richesse creusent un fossé de plus en plus grand entre les personnes riches et les pauvres. Et comme si cela ne suffisait pas, la pandémie de Covid-19 frappant l’Europe depuis le début de l’année dernière, a encore plus aggravé les différences de richesses…le coronavirus en grave accélérateur de pauvreté.

Des riches encore plus riches
Le seul domaine non touché par l’épidémie est le transport de marchandises maritime. Les confinements successifs et les restrictions de déplacement imposés à la population ont permis aux armateurs grecs de voir leurs chiffres d’affaires doubler voire tripler pendant la pandémie.

D’autant que la Grèce compte les compagnies parmi les plus importantes du monde dans le domaine du transport maritime. Quatre hommes tiennent aujourd’hui le haut du pavé en matière de nombre de bateaux : J.Angelicoussis, G.Procopiou, P. Livanos et G.Economou. Le quatuor contrôle une fortune combinée de 8,6 milliards de dollars avec une augmentation de leurs revenus de 40 pc dans la dernière année, selon l’indice Bloomberg Billionaires.

Des résultats qui démontrent clairement que les armateurs qui possédaient déjà une activité très lucrative, s’enrichissent de plus en plus grâce au virus, mais aussi à l’aide des lois fiscales permissives du gouvernement autour de leurs activités.  Ces armateurs ne se montrent pas particulièrement préoccupés par la situation de la Grèce « En Grèce il n’y a rien à faire ou à transporter », confie même l’un d’eux. Ils refusent, même, comme d’un seul bloc que l’on revienne sur le statut fiscal (statut des armateurs protégé par l’article 107 de la Constitution) dont ils bénéficient dans le pays, sinon, ils brandissent la menace de la délocalisation.

Le pays possède l’une des plus grandes flottes marchandes du monde, totalisant un tonnage de 173 Mt de jauge brute. Le pays précède Singapour (136 Mt), le Japon et la Chine (chacun à 120 Mt). Une activité représentant plus de 6% du PIB (produit intérieur brut) de la Grèce.

La Grèce, une usine à pauvreté ?

Une telle question ne devrait pas être soulevée, et pourtant, il est désormais légitime de la poser. Cependant même si les conditions de vie et de santé des Grecs sans domicile, et des personnes vivant sous le seuil de pauvreté en général, sont très peu connues, faute de chiffres et d’études menées par le gouvernement et les instituts de recherches du pays, il est clair que celles-ci vont se dégrader inexorablement. Depuis une dizaine d’années, ce n’est pas moins de 80% des ménages qui ont subi une baisse importante de leurs revenus.    Les moins aisés continuent de s’enfoncer continuellement et sans bruit dans la détresse.

Plusieurs instances européennes et internationales comme l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques) ont d’ores et déjà invité Athènes à se concentrer en priorité à la lutte contre la pauvreté.

Un point de non-retour ?

Alors bien sûr que la Grèce n’a pas encore atteint un point de non-retour, seulement si rien ne change, le pays court droit à une hécatombe sociale. Les responsables politiques l’ont bien compris comme en atteste la déclaration du maire d’Athènes, Kostas Bakoyannis, lors de la Journée Internationale pour l’élimination de la pauvreté :

« La lutte pour éradiquer la pauvreté est un marathon. Il faut avoir la foi dans les valeurs de solidarité et d’humanité. (…). Tout cela nous donne la force de continuer, de tout faire pour faire d’Athènes une ville humaine. Pour que personne ne soit jamais laissé seul ».

Cependant le défi reste malgré tout immense pour les responsables politiques, surtout dans un pays où le taux de chômage (16,5%) est le plus élevé d’Europe et où l’économie a chuté de plus de 8% en 2020.

Texte : Thibeault Segalar

Source https://lepetitjournal.com/athenes/grece-riche-ou-pauvre-le-point-de-non-retour-298995

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