7 amères vérités au sujet du 4e mémorandum signé par le gouvernement Tsipras
Par Despina Charalambidou (1)
Les mesures prévues dans l’accord concernant la clôture de la deuxième évaluation, constituent de manière essentielle le corps principal du 4e mémorandum. Il s’agit d’un paquet de mesures insupportable, anti-populaire et antisocial, résultant d’une politique néolibérale.
Le démantèlement institutionnel du travail et des dispositions institutionnelles se poursuit, les charges continuent de peser avec une partialité de classe cohérente sur les épaules des travailleurs et des retraités, tandis que les fameuses « contre-mesures » doivent attendre la réalisation des super-excédents au-dessus de 3,7% du PIB pour voir le jour et fonctionnent fondamentalement comme mécanisme de redistribution de la pauvreté au sein de la classe ouvrière.
Les objectifs principaux de ces nouvelles attaques cruelles menées contre les franges populaires des travailleurs sont les suivants :
- Retraites
Les premières grandes victimes du 4e mémorandum s’élèvent à 1,1 million de retraités. Il a été établi que soient diminués, à compter du 01/01/2019 :
Α) La prestation familiale des retraités du Public ainsi que l’allocation du conjoint.
Β) La différence personnelle (2) qui avait été prévue pour les principales retraites versées, selon la loi 4387/2016.
C) Les différences personnelles pour tous ceux qui ont procédé à leur demande de pension depuis le 01/01/2016 et pour tous ceux qui la feront jusqu’au 31/12/2018, conformément à cette même loi (Katrougalos).
Selon les éléments de l’inspection générale des finances, les pertes cumulées pour les retraités depuis toutes ces interventions sont de 7,8 milliards d’euros et non de 1,8 milliard d’euros comme le soutient le gouvernement. Le gouvernement soutient de façon mensongère que cette baisse moyennement équilibrée ne sera que de 9%.
Mais la réalité est cruelle, car l’écrasante majorité des retraités va subir une perte de revenu pouvant équivaloir jusqu’à 2 pensions par an ! Il s’agit de la 23e mesure mémorandaire en 7 années de coupes budgétaires touchant les retraites. Au moment même où, en termes de politique un tant soit peu économique, ce sont précisément ces mesures de récession qui nuisent à la durabilité et à la mise en perspective du système de protection sociale, en liaison avec le chômage très élevé, la flexibilité, et le travail « au noir » comme alternative, qui tendent à devenir la règle.
- Allocations
Conformément à l’article 57 du projet de loi de la cohabitation Syriza-Anel, dans le cadre de la 2e évaluation, les allocations suivantes sont IMMÉDIATEMENT supprimées :
- a) l’aide financière pour les familles à bas revenus, qui ont des enfants en âge de scolarisation (loi 3016/2002, article 27, paragraphe 3).
- b) l’allocation des nouveaux arrivants sur le marché du travail, des jeunes de moins de 29 ans, en cas de licenciement (loi 1545/85, article 2).
- c) l’allocation de providence pour les enfants non protégés (loi 4051/1960, article 2, paragraphe 3).
- d) l’aide financière des personnes en situation d’extrême pauvreté (décret de loi 57/1973, article 1, paragraphe 1)
Les coupes budgétaires exposées ci-dessus permettraient, d’après l’inspection générale des finances, de réaliser des économies d’un montant de 8,8 millions d’euros cette année et de 11,8 millions d’euros pour 2018.
- Impôts
À compter du 01/01/2020 (ou 2019 si les objectifs ne sont pas atteints) la déduction fiscale devrait être abaissée de 1 900 euros, soit le niveau actuel, à 1 250 euros. Le seuil de non- imposition sera également abaissé, passant de 8 636 euros à 5 681 euros. Une charge fiscale lourde est directement prévue pour l’ensemble des travailleurs salariés, au point que le nouveau revenu non imposable concerne un salaire mensuel de 405 euros. Le prélèvement de l’impôt sur le salaire va augmenter d’environ 50 euros par mois, en tenant compte de l’abrogation de la déduction spécifique en place (1,5% actuellement).
Le gouvernement soutient de façon mensongère que cette charge fiscale va être amortie en baissant d’environ 2% le taux d’imposition (au moment même où on promeut pour les entreprises une baisse de 3%) et en supprimant le prélèvement de solidarité pour les revenus de moins de 30 000 euros. Toutefois, tout cela ne s’appliquera que si leur objectif concernant l’excédent est atteint. Tandis que l’ΕΝFΙΑ (Impôt foncier unique) restera fondamentalement inchangé pendant toute la durée du nouveau programme mémorandaire.
- Travail
La fameuse « bataille au sujet des accords par branches » a abouti à l’extension du cadre juridique existant, propice à la dissolution, tel qu’il a été défini par les premiers mémorandums. Sans compter la législation du cumul et de l’extensibilité qui renvoient régulièrement ces accords aux calendes grecques et, dans tous les cas, à l’achèvement du programme.
Par conséquent, les obstacles concernant les négociations collectives sont maintenus et amplifiés, dans la mesure où ils ont conduit à l’extinction des conventions collectives sectorielles, qui ne se comptent déjà plus que sur les doigts d’une main. La position de la SEV (Fédération hellénique des Entreprises et des Industries) est adoptée solennellement : la suprématie des accords d’entreprise sur les branches est soi-disant « dans l’intérêt de l’économie et du développement ».
Pour tout ce qui concerne les licenciements collectifs, il se pourrait que leur seuil mensuel (5%) ne soit pas relevé, la suppression de leur approbation obligatoire par le ministère compétent a cependant été décidée, et le contrôle de la procédure se voit quant à lui conféré au conseil supérieur du travail, un organisme à caractère non politique et non gouvernemental.
- Ouverture des établissements commerciaux le dimanche
L’ouverture des établissements commerciaux est étendue à 32 dimanche par an, par rapport aux 8 dimanches actuels. Cette mesure sera adoptée non par l’intermédiaire d’une nouvelle loi, mais par deux simples modifications de la loi existante. D’une part, l’ouverture des commerces 32 dimanches par an sera libéralisée dans les zones touristiques, d’autre part, Athènes, la zone côtière de l’Attique et de Thessalonique ainsi que d’autres endroits entreront dans ce découpage géographique. Grâce à cet expédient, la libéralisation concernera un nombre incalculable de commerces, un phénomène qui va très rapidement gagner les entreprises qui s’établissent dans les communes non qualifiées. La voie vers l’abolition universelle de la pause dominicale est désormais ouverte.
- Privatisations
Lors de sa première déclaration après l’accord conclu au Hilton, Tsakalotos a qualifié de « positif » le fait qu’« un certain nombre d’entreprises venant du HRADF (Fonds de développement des actifs de la République hellénique) entrent à l’ΕDIS (Superfund de dénationalisation), où règne une tout autre logique, comme ce fut le cas pour les aéroports ». En l’espèce, le processus de privatisation violente de tout ce qui reste s’accélère. Avec pour modèle « d’accélération » le cas des aéroports pour lequel l’intervention du Parlement européen s’est même avérée nécessaire.
La première entreprise dans le viseur est la DEI (Entreprise publique d’électricité), qui doit vendre 40% de ses unités au lignite et 17% de son capital social. Ce qui fait encore davantage pencher la balance en faveur de la concurrence montante sur le « marché » des biens publics qu’est l’énergie, engendrant des conséquences incalculables pour les ménages populaires qui font déjà face à des difficultés pour payer leurs factures d’énergie en hausse constante.
- Mesures institutionnelles et budgétaires
Un « plafond » est nécessaire concernant le nombre d’agents contractuels du Public, chose que le gouvernement n’a de cesse de dépasser en réajustant les promesses de recrutement à 1 nouvel employé pour chaque départ de 3 personnes, au lieu de 4 tel que c’est le cas actuellement. L’avenir de ceux qui « sont en trop » reste incertain, quel que soit le calcul effectué.
Le fameux scalpel financier reste manifestement en vigueur, jusqu’à « garantir » les excédents approuvés. Au-delà, des mesures financières d’un montant de 447 millions d’euros sont prévues pour 2018, tandis que le récit du gouvernement préconisait l’absence de nouvelles mesures. La manière dont elles seront précisées n’est pas encore accessible.
La pleine application du compromis extrajudiciaire, avec la mise en place d’enchères électroniques, devrait faciliter et accélérer les procédures de subtilisation des garanties de logement pour les ménages populaires.
Traduction:Vanessa de Pizzol
(1) Despina Charalambidou est ancienne députée et vice-présidente du Parlement, membre de l’Unité Populaire.
(2) « La différence personnelle est le terme qu’a « inventé » le ministère du Travail pour désigner le montant-« différence » qui ressort du nouveau calcul des anciennes retraites sur la base des nouveaux taux de remplacement permettant d’atteindre le niveau des nouvelles retraites ».