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Jugement des conditions de détention dans les hotspots grecs

La Cour européenne des droits de l’homme va juger les conditions de détention dans les hotspots grecs

La Cour européenne des droits de l’homme vient d’annoncer qu’elle allait examiner la requête déposée voici plus d’un an par 51 personnes, demandeuses d’asile, de nationalités afghane, syrienne et irakienne (parmi lesquelles de nombreux mineurs) alors qu’elles étaient maintenues de force dans une situation de détresse extrême dans le hotspot de l’île de Chios, en mer Egée. [1]

Dans leur requête, ces personnes ont mis en évidence l’insuffisance et le caractère inadapté de la nourriture, les conditions matérielles inhumaines et dégradantes, voire dangereuses auxquelles elles étaient soumises, les grandes difficultés d’accès aux soins, la non prise en compte de situations de particulière vulnérabilité – femmes enceintes, enfants en bas âge, mineurs isolés -, mais aussi l’arbitraire administratif et le maintien dans un état d’incertitude angoissante dont elles étaient victimes. Et cela, alors qu’elles étaient interdites de quitter l’île de Chios, devenue prison à ciel ouvert.Tous ces éléments sont documentés dans le rapport rendu public par le Gisti après la mission qu’il a effectuée dans les hotspots de Chios et de Lesbos, au mois de mai 2016, au cours de laquelle il a rencontré les 51 plaignants : Accord UE-Turquie : la grande imposture.

Cette annonce de la Cour intervient au moment même où, dans un rapport du 26 septembre 2017, dont les observations convergent avec celles du rapport du Gisti, le Comité pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT) du Conseil de l’Europe critique sévèrement la façon dont sont traités les ressortissants étrangers dans les hotspots sur les îles de la mer Egée, pointant notamment la « surpopulation combinée à un niveau accru de violence entre personnes retenues, à des soins de santé de base insuffisants, à une aide aux personnes vulnérables non appropriée et à des garanties juridiques déficientes », qui, selon le CPT, « a créé une situation hautement explosive ».

Elle coïncide également avec le terme de l’opération de « relocalisation », dans les différents États membres de l’Union européenne (UE), des demandeurs d’asile arrivés dans les hotspots de Grèce et d’Italie depuis le mois de septembre 2015. Une opération dont l’échec patent (moins du quart de l’objectif fixé a été atteint), faute de volonté politique et de solidarité au sein de l’UE, renvoie la Grèce et l’Italie, qu’elle était censée soulager, à leur rôle de gardes-frontières de l’Europe, avec toutes les conséquences dramatiques que cette situation entraîne pour les personnes qui se trouvent bloquées dans ces deux pays.

Dans sa communication sur le cas des 51 demandeurs d’asile de Chios, la Cour européenne des droits de l’homme interroge les conditions matérielles de leur détention et leur conformité avec les règles posées par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme (CEDH) (pas de détention arbitraire, droit d’être informé des raisons de sa détention, droit de former un recours pour qu’il y soit mis fin). Elle a en revanche écarté les risques invoqués par les requérants pour leur droit à la vie, également protégé par la CEDH. On peut certes considérer que dans leur cas, ce droit n’était pas violé à la date de la requête. Cependant, le caractère chronique des très mauvaises conditions d’« accueil » des personnes confinées dans les hotspots grecs, qui s’est confirmé au fil des mois, a entraîné le décès de plusieurs d’entre elles, soit de froid, soit de maladie, soit par suicide. Des morts qu’on ne saurait imputer à la fatalité ou la malchance, mais bien aux effets directs, bien que discrets, d’une politique inhumaine.

Voir le rapport de mission du Gisti dans les hotspots de Lesbos et Chios « Accord UE-Turquie, la grande imposture », juillet 2016

Version en anglais : mission report in the Greek hotspots in Lesvos and Chios « EU-Turkey statement : the great deception », july 2016

[1Requête n° 34215/16, AK et autres contre la Grèce

27 septembre 2017 http://www.gisti.org/spip.php?article5739

Sur les réfugiés semaine 39

29/9/17 État d’urgence en Turquie : menaces sur les réfugiés :La Turquie est de moins en moins sûre pour les réfugiés et les demandeurs d’asile depuis la tentative de coup d’État du 15 juillet 2016. /Reportage.

https://www.amnesty.fr/refugies-et-migrants/actualites/etat-durgence-en-turquie-menaces-sur-les-refugies

26/9/17 Deux ans après, quel bilan pour « les quotas » de migrants dans l’UE ?   Alors que la question migratoire reste l’une des plus actuelles, quel pays a respecté ses engagements européens ? Jade Toussay Journaliste

RÉFUGIÉS – Deux ans de mise en application, de menaces et d’encouragements. Ce mardi 26 septembre marque l’échéance du plan voté par la Commission Européenne pour la relocalisation de 120.000 réfugiés dans les 28 pays membre de l’Union Européenne. Prévu sur deux ans, l’heure est maintenant au bilan. Et il n’est vraiment pas glorieux.

En septembre 2015, le plan a été établi comme suit: 120.000 réfugiés hébergés dans les centres d’accueil de Grèce et d’Italie devaient être transférés dans les pays membres de l’UE. Cette répartition, dite des « quotas d’accueil », se fait en fonction de la taille de la population et du PIB du pays (à hauteur de 40%), moins le nombre de demandes d’asiles au cours des quatre dernières années et le taux de chômage (à hauteur de 10%).

Les Etats devaient recevoir 6000 euros par personne accueillie, tandis que que l’Italie et la Grèce recevaient 500 euros par personne relocalisée pour couvrir les frais de transport. Le profil des personnes à relocaliser avait également été défini: en grande majorité, des Erythréens, des Irakiens et des Syriens, pour qui le taux moyen de reconnaissance à la protection internationale dépasse les 75%.

Voilà pour la théorie. Dans la pratique, ça s’est avéré (beaucoup) plus délicat.

Pas facile tout d’abord de faire accepter à l’ensemble des pays membres de l’UE l’idée d’un quota de réfugiés sur son sol. Ainsi, il a fallu recourir au vote à la majorité pour faire passer le texte. La Finlande s’est abstenue, tandis que la Hongrie, la Slovaquie, la République Tchèque et la Roumanie ont voté contre. Un recours en justice a même été déposé par la Hongrie et la Slovaquie, sans succès. Le 6 septembre dernier, la Cour de Justice a rejeté les recours « dans leur intégralité ».

Selon les chiffres publiés par la Commission Européenne, l’objectif de 120.000 réfugiés a finalement été revu à la baisse, pour ne concerner que 98.255 réfugiés. Mais le résultat n’est pas meilleur pour autant: au 6 septembre 2017, date du dernier rapport de la Commission sur le sujet, seulement 27.695 réfugiés avaient été relocalisés (19.244 arrivaient de Grèce et 8451 d’Italie), soit 28% des objectifs totaux. Et si certains pays ont tenu leurs promesses, d’autres ont brillé par leur absence.

Fin du programme, fin de la relocalisation?  Dans son quinzième rapport, publié le 6 septembre dernier, la Commission Européenne a souligné la tendance positive enregistrée en 2017, par rapport à 2016.

Après deux ans de mise en pratique certains pays ont réussi (ou presque) à atteindre les objectifs fixés: c’est le cas de Malte (+12% par rapport aux quotas de l’UE) et de la Finlande ou l’Irlande qui sont en passe d’y parvenir. Cependant, les prises en charge sont inégales: la plupart des migrants relocalisés arrivent de Grèce, alors que l’Italie doit parallèlement faire face à des arrivées toujours plus importantes.

De même, la Commission s’est également félicitée des premiers balbutiements de pays jusqu’alors peu enclins à accueillir les réfugiés: c’est par exemple le cas de l’Autriche et de la Slovaquie, qui ont relancé leur processus de relocalisation.

Quid des pays qui refusent d’appliquer l’accord? Après moult rappels à l’ordre, la Commission Européenne a engagé mi-juin une procédure d’infraction à l’encontre de la République Tchèque, la Hongrie et la Pologne et saisi la Cour de Justice de l’UE, qui a débouté les pays réfractaires. Le 8 septembre, le premier ministre hongrois Viktor Orban a reconnu que la Hongrie « doit respecter les traités et reconnaître les décisions de la Cour », sans pour autant s’engager à respecter son quota d’accueil, toujours à 0.

Que se passera-t-il à compter de ce mardi 26, où le programme touche à son terme? Dans son rapport, la Commission précise que ses décisions « s’appliquent à toutes les personnes admissibles qui arriveront en Grèce ou en Italie jusqu’au 26 septembre 2017, ce qui signifie que les demandeurs admissibles devront encore être relocalisés après cette date. » Elle encourage donc tous les états membres à redoubler d’efforts.

Malgré tout, espérer que les quotas de 98.255 relocalisés seront atteints dans des délais raisonnables reste illusoire.

http://www.huffingtonpost.fr/2017/09/25/deux-ans-apres-quel-bilan-pour-les-quotas-de-migrants-dans-lue_a_23214522/

26/9/17 Revue de presse hellénique : Sous le titre « les demandeurs d’asile resteront en Grèce » Kathimerini relève que dans le cadre de nouvelles corrélations politiques au sein de l’UE la solidarité européenne envers la Grèce au sujet de la crise des réfugiés prend fin alors que les flux de réfugiés vers les îles grecques augmentent. Le journal souligne que le programme de relocalisation des demandeurs d’asile depuis la Grèce et l’Italie vers d’autres pays
européens s’achève officiellement aujourd’hui sans aucune décision de l’UE concernant ses prochaines initiatives dans ce domaine. Sans nouveau programme de relocalisation et sans réforme du règlement Dublin II tous les demandeurs d’asile arrivant en Grèce resteront dans le pays, souligne le journal.

22/9/17 Feu vert du Conseil d’État grec au renvoi de réfugiés syriens en Turquie

 Le Conseil d’État grec a débouté deux réfugiés syriens qui contestaient leur renvoi en Turquie en vertu du pacte migratoire UE-Ankara, ce qui ouvre la voie aux premiers renvois forcés de réfugiés dans le cadre de cet accord, a indiqué vendredi une source judiciaire.

Les deux Syriens avaient déposé un recours en dernière instance devant le Conseil d’État contre la décision de commissions grecques d’asile de les renvoyer en Turquie au motif qu’ils seraient en sécurité dans ce pays puisqu’ils y ont développé des liens lors de précédents séjours. 

En les déboutant, le Conseil d’État, la plus haute juridiction administrative grecque, établit une jurisprudence en faveur des renvois forcés en Turquie de demandeurs d’asile notamment syriens arrivés sur les îles grecques depuis le 20 mars 2016.

« C’est une décision qui viole le droit des réfugiés, et qui tombe à pic pour servir l’accord conclu entre les Etats de l’UE et la Turquie », a commenté pour l’AFP Dimitris Christopoulos, président de la Fédération internationale des droits de l’homme.

Plus de 750 exilés syriens en attente d’une décision sur leur sort sur les îles grecques sont concernés dans l’immédiat par la perspective de tels renvois forcés, selon une source proche du dossier.

Ces renvois, prévus par le pacte UE-Ankara dans les cas où la Turquie est jugée « sûre » pour les requérants, avaient été gelés en pratique dans l’attente de la décision du Conseil d’État, saisi en plénière de l’affaire vu son importance.

Les avocats et ONG soutenant les requérants, dont la grecque Metadrasi et l’allemande Pro Asyl, avaient prévenu dès avant l’annonce de la décisdion qu’ils déposeraient un recours si nécessaire devant la Cour européenne des droits de l’homme.

Les requérants déboutés sont deux jeunes hommes de 29 et 22 ans. Ils ont plaidé l’absence de garanties concernant leur sécurité en Turquie, affirmant y avoir notamment dans un premier temps été victimes de refoulements.

Fortement contesté par les humanitaires, le pacte UE-Turquie a considérablement réduit le flux migratoire en Méditerranée orientale après le pic de 2015.

Les arrivées sur les îles grecques en provenance des côtes turques toutes proches sont toutefois reparties à la hausse depuis le mois d’août, à plus d’une centaine par jours.

Selon une autre source judiciaire, les juges du Conseil d’Etat avaient débattu lors de l’examen de l’affaire de la possibilité de demander une interprétation du cadre légal s’appliquant à la Cour de justice de l’UE, mais cette option a été rejetée par 13 juges contre 12.

https://www.lorientlejour.com/article/1074106/feu-vert-du-conseil-detat-grec-au-renvoi-de-refugies-syriens-en-turquie.html

SOS Méditerranée : Nous sommes les yeux d’une Europe qui ne veut pas voir

Chaque jour, un membre de SOS MEDITERRANEE vous donne sa vision des opérations de sauvetage et des événements depuis l’Aquarius

« Nous sommes les yeux d’une Europe qui ne veut pas voir »

Alessandro Porro, membre italien de la SAR Team de SOS MEDITERRANEE raconte son expérience à bord de l’Aquarius dans un texte publié le 22 août par le Corriere della Sera. (Traduction: Benedetta Collini)

« A bord de l’Aquarius, Méditerranée Centrale. Malte à l’horizon. Nous accompagnons en Italie 112 personnes secourues le jour de l’Assomption par nos collègues de l’ONG MOAS. 112 personnes dans un seul bateau pneumatique. Comme d’habitude : il y a des femmes, des enfants, des blessés, mais pour la plupart des jeunes hommes, quelques-uns plus âgés. Sur le pont, crayons de couleurs et feutres en main, ils racontent en dessin leur voyage de l’Afrique au « fleuve Méditerranée ». Ils l’appellent comme ça. Avant de partir on leur dit qu’ils vont traverser un fleuve, qu’il n’y a pas de danger.

Moi aussi je suis un migrant. Du Piémont, transplanté en Ombrie puis en Toscane, par amour et pour le travail. Quelques années passées à goûter à l’Europe, comme étudiant et saisonnier. J’ai passé la moitié de ma vie à bord des ambulances de la Croix Rouge, bénévole d’abord, salarié ensuite. Accidents de voiture, blessures par arme à feu, personnes âgées en détresse, violences familiales. C’était le quotidien. Mais pas seulement. Aussi les secours en mer, et sur le lac Transimeno, sur le fleuve Arno avec les collègues OPSA (operatori polivalenti di salvataggio in acqua – ouvriers polyvalents du sauvetage aquatique). Je suis secouriste, c’est ce qui me réussit dans la vie. Cela ne relève pas du courage, juste de l’entraînement et de la pratique.

L’an dernier, alors qu’en Italie on ne parlait pas encore des ONG de sauvetage en mer, j’ai vu dans le magazine « Internazionale » la photo d’un sauvetage de migrants en Méditerranée. Rien à voir avec les baigneurs fatigués sur les plages de Toscane, là des personnes étaient littéralement extraites des avagues. J’ai envoyé une candidature, SOS Méditerranée m’a fait confiance, j’ai embarqué sur l’Aquarius. Ma première mission : six semaines au mois de juillet, au large de Tripoli, dans les eaux internationales. Trente équipiers, parmi lesquels l’équipage maritime, l’équipe médicale et le SAR team, l’équipe de recherche et sauvetage. Plus de mille-quatre-cents personnes sauvées et accompagnées en Italie, avec dignité.

Nous sommes les yeux d’une Europe qui ne veut pas voir. On nous a appelés des « extrémistes humanitaires », mais être humanitaires n’est pas un choix, pas un métier, pas un chef d’accusation. Extrémiste est un terme exagéré, un raccourci. Un mensonge même, dans ce cas précis. Nous sommes, nous et nos collègues des autres ONG, des techniciens du sauvetage, nous faisons la différence entre les naufragés et les rescapés. En mer, nous recueillons des vies et des histoires. Parfois des cadavres (3 août), parfois des enfants encore attachés par le cordon ombilical (11 juillet). Dès qu’ils se sentent en sécurité, nos passagers nous racontent leur voyage. Ils parlent des réseaux très puissants de passeurs qui les ont achetés puis revendus. De prisons légales et illégales en Lybie, d’enlèvements et de violences. Plusieurs d’entre eux ont été séquestrés sur la route, forcés à travailler. Payée la rançon, revendus aux passeurs. Une autre rançon à payer pour la fuite en mer. Nous avons vu des hommes avec des balles dans l’abdomen, des marques de fouet sur leur dos, des brûlures sur la peau.

À bord de l’Aquarius, j’ai découvert une Université autogérée du sauvetage. Des professionnels – médecins, infirmiers, plongeurs, sapeurs-pompiers, marins – tous concentrés à perfectionner les différentes techniques de secours, chronomètre en main. Neuf secondes pour ramener de la mer à la clinique une personne en arrêt cardiaque. Sur le navire, même les journalistes doivent mettre de côté leur caméra pour aider si besoin. Et il y a souvent besoin. Nous venons de toute l’Europe, d’Amérique, d’Australie. A nos côtés, il y a le personnel médical de Médecins sans Frontières. Calmes, pragmatiques, diplomates. Pas des héros, juste des grands professionnels, préparés, méticuleux.

Prendre la mer est dangereux. Porter secours à un bateau fait d’une planche de bois et d’une bâche gonflée, avec 200 personnes à bord, comporte des risques. Mais nous sommes équipés et formés. Notre priorité est toujours notre propre sécurité. Parfois il y a un silence surréel quand on approche un bateau en détresse. 400 yeux nous regardent, et pas un mot. Ils ne savent pas si notre arrivée est signe de salut ou de retour en enfer. Le premier à briser ce silence, c’est le médiateur culturel à bord de nos zodiacs. Le sauvetage est un art zen, il faut qu’une idée précise passe : « vous êtes en sécurité ». Nous avons avec nous des sacs pleins de gilets de sauvetage qui sont distribués à tout le monde. Puis, lentement, douze par douze, on amène les gens vers l’Aquarius. Un kit avec de l’eau, de la nourriture, des couvertures, des habits propres. Premier triage sanitaire, changement de vêtements. Les cas les plus graves sont amenés à la clinique, souvent les violences physiques sont récentes. Puis commence la première nuit sur le pont, ils s’endorment tous, épuisés. Avec le temps, les corps reprennent des forces. La vue des côtes italiennes déchaîne des danses et des chants : c’est l’allégresse du naufragé.

Mes amis me demandent si ce qu’on dit à la télé est vrai, si nous sommes les taxis de la mer. Non, nous sommes les ambulances de la mer. Et comme des ambulances, nous sommes coordonnés par un SAMU (le MRCC à Rome) qui reçoit des appels de détresse et décide qui envoyer pour le sauvetage : nous, ou les Garde-Côtes italiens, ou la Marine, ou des navires marchands, ou d’autres ONG. Nos routes sont suivies à la trace, nos appels enregistrés. Sur l’Aquarius, comme sur les autres navires, nous avons conscience de ne pas être la solution au problème, un grand problème. Nous sommes un pansement provisoire qui tamponne l’absence d’un plan européen de recherche et sauvetage en mer depuis la suspension de l’opération Mare Nostrum de la Marine Nationale italienne. Un pansement qui pourtant sauve des vies, qui fait la différence. En tant que piémontais, j’ai vu des oliviers commencer à pousser sur des terres et sous des climats autrefois hostiles. Le changement climatique déplace les arbres, comment imaginer empêcher les gens de migrer ? En ce moment l’Italie est rongée par l’inquiétude. Il sera intéressant, dans dix ans, de relire les évènements qui ont marqué cette période. Moi, à bord l’Aquarius, je suis déjà certain d’avoir été du bon côté de l’Histoire. »

Texte : Alessandro Porro

Traduction : Benedetta Collini

http://www.sosmediterranee.fr/journal-de-bord/alessandro-porro-290817

 

Sur les réfugiés migrants semaine 36

7/9/17 https://alencontre.org/europe/union-europeenne-migration-la-cour-de-justice-deboute-le-recours-de-la-hongrie-et-de-la-slovaquie.html

1/9/17 https://alarmphone.org/fr/2017/09/01/38-personnes-en-situation-de-detresse-urgente-laissees-pres-de-24-heures-en-mer-les-gardes-cotes-nont-pas-reagi/

31/8/17  Orban veut que l’UE règle 50% de ses clôtures frontalières BUDAPEST (Reuters) – Le Premier ministre hongrois, Viktor Orban, va demander à l’Union européenne de financer la moitié du coût des mesures de protection des frontières prises par Budapest pour empêcher l’arrivée de migrants, a déclaré jeudi un de ses collaborateurs.

Le chef du gouvernement comptait écrire ce jeudi au président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, pour demander à l’exécutif européen de contribuer à hauteur de 400 millions d’euros, a déclaré le secrétaire général du gouvernement hongrois, Janos Lazar.

La Hongrie, qui a érigé des clôtures à ses frontières avec la Serbie et la Croatie, « protège tous les Européens d’un flux de migrants illégaux » et il est temps que l’UE aide la Hongrie comme elle l’a fait avec l’Italie, la Grèce et la Bulgarie, a ajouté Janos Lazar.

« On ne peut pas faire deux poids deux mesures », a dit Lazar au cours d’une conférence de presse.

Ces revendications sont formulées quelques jours avant la décision attendue de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) sur le rejet par la Hongrie des quotas de répartition des migrants décidés par l’UE.

Il y a actuellement moins de 700 migrants en Hongrie, dont 430 sont maintenus dans deux camps de rétention étroitement surveillés à la frontière serbe.

(Krisztina Than; Eric Faye pour le service français)

https://www.challenges.fr/monde/orban-veut-que-l-ue-regle-50-de-ses-clotures-frontalieres_496407

29/8/17 De l’Europe aux Etats-Unis, ces villes qui s’opposent à leurs gouvernements pour mieux accueillir les migrants

Aux Etats-Unis, des centaines de municipalités ont fait le choix de ne pas contribuer à la chasse aux sans-papiers lancée par Donald Trump. En Europe, des communes s’engagent pour un accueil digne des migrants. « Villes sanctuaires », « villes refuges »… De l’Italie à la Grande-Bretagne, de Barcelone à Grande-Synthe, ces communes tentent de se constituer en véritables contre-pouvoirs face aux politiques indignes et xénophobes.

A peine élu président des États-Unis, Donald Trump adoptait un décret pour couper les fonds fédéraux aux centaines de municipalités qui ont critiqué sa politique anti-migrants. Face au programme de Trump, à sa volonté d’expulser manu militari les sans-papiers quel que soit le nombre d’années de résidence, et à son souhait d’ériger un mur à la frontière mexicaine, de nombreuses villes se sont rapidement déclarées « villes sanctuaires ». Ces municipalités « ont adopté des politiques qui promettent de protéger et de servir tous leurs résidents, quel que soit leur statut migratoire »explique la puissante association American Civil Liberties Union (l’Union américaine pour les libertés civiles, ACLU).

Dans les faits, ces villes refusent de coopérer avec les forces de l’ordre fédérales, lorsque celles-ci leur demandent de mettre des sans-papier en détention. Elles n’exigent pas forcément de leurs habitants de produire un certificat de naissance ou de séjourner légalement pour accéder aux services publics locaux. Certaines municipalités sanctuaires décident même de reconnaître comme valables sur leur territoire des papiers d’identité non états-uniens ou de distribuer leurs propres papiers d’identité municipaux à tous leurs résidents, quelle que soit leur nationalité.

De New York à Milan, en passant par Barcelone

Les métropoles parmi les plus importantes des États-Unis, comme New York, Los Angeles, Chicago, Boston ou Washington, ont adopté cette position. Et n’ont pas perdu la bataille face à Donald Trump, puisqu’un juge fédéral a bloqué en avril dernier le décret du président qui voulait leur couper les vivres [1].

En Europe aussi, confrontée à une crise historique de la gestion des migrations, des collectivités locales prennent le contrepied de la politique de fermeture menées par les États de l’Union européenne. Quand la plupart des gouvernements européens misent sur une gestion sécuritaire et des accords avec des pays aussi peu démocratiques que la Libye et la Turquie, (lire notre article Les envoyer en détention ou les livrer à une dictature : voilà comment l’Europe « délocalise » ses réfugiés), à Milan, le 20 mai dernier, 100 000 personnes ont manifesté à l’initiative du maire de gauche de la ville pour promouvoir l’accueil des migrants.

En février, c’était la maire de Barcelone Ada Colau, alliée du parti Podemos, qui appelait à une manifestation pour l’accueil des migrants. Là aussi, plus de 100 000 personnes ont répondu présentes. La capitale catalane a aussi initié un réseau international de villes engagées dans l’aide et l’accueil des migrants, Solidarity Cities(villes solidaires). Une impulsion également destinée à pousser le gouvernement espagnol à accélérer l’accueil des réfugiés arrivés en Europe, et qui devaient être relocalisés vers l’Espagne.

Crise du modèle d’accueil italien

« Il faut faire la différence entre les réseaux de villes solidaires en Europe et le mouvement de villes sanctuaires aux États-Unis, souligne cependant Filippo Furri, cherchceur membre du réseau Migreurop et doctorant à l’université de Montréal. En Europe, les municipalités se constituent en ville-refuge sur la question de l’asile. Aux États-Unis, le mouvement s’est plutôt construit pour protéger des personnes qui retombent dans l’irrégularité administrative après avoir déjà vécu un moment dans le pays. »

Filippo Furri connaît bien le cas italien, en particulier celui de Venise : « Avec les guerre des Balkans dans les années 1990, il y a eu une vague de réfugiés. À Venise, un élan de solidarité citoyenne et associative s’est joint à une volonté politique pour organiser un accueil digne. Un système d’accueil organisé s’y est mis en place dans la foulée, au début des années 2000. Venise est devenue une sorte de prototype du système d’asile qui s’est développé ensuite en Italie, et qui est en train de péricliter avec la situation d’urgence actuelle. »

Aux côtés de la Grèce, l’Italie est l’un des deux principaux pays d’arrivée pour des centaines de milliers de personnes qui débarquent chaque année en Europe par la mer, pour y chercher l’asile et la sécurité. Plus de 360 000 personnes sont arrivées par la mer Méditerranée en Europe en 2016. Plus de 98 000 depuis le début de l’année 2017 (plus de 2000 personnes migrantes sont déjà mortes en mer Méditerranée cette année [2]). L’Italie est donc l’un des pays qui doit gérer en urgence et en grand nombre l’accueil des migrants, en plus des sauvetages en mer. Début juillet, son gouvernement a appelé à l’aide les autres pays européens pour faire face aux nécessité de prise en charge des nouveaux arrivants. Mais loin de prendre le parti de l’hospitalité, Rome a aussi menacé dans le même temps de fermer ses ports aux migrants.

Aide au développement face à des États défaillants

« L’Italie, comme la Grèce, est en train de devenir un véritable territoire de rétention, déplore Filippo Furri. Il y existe des formes d’hospitalité et d’accueil dans la société civile. C’est une réponse face à une gestion de la part des États qui vise avant tout à contrôler les flux, à trier les gens, et à disperser les centres d’accueil en les imposant aux collectivités locales. Il y a conflit entre l’accueil local des municipalités, et le contrôle étatique. » De la même manière que des ONG prennent le relais des États et des autorités européennes pour sauver des vies en mer Méditerranée, des communes italiennes s’organisent pour faire ce que l’État italien refuse : organiser un accueil digne, et favoriser les échanges entre la population locale et les nouveaux arrivants.

Le réseau des « Communes de la terre pour le monde », fondé en 2003 en Italie, réunit aujourd’hui plus de 300 municipalités de tout le pays. L’association organise par exemple un festival interculturel à Riace, village de Calabre devenu l’un des points d’entrée de nombreux migrants dans l’UE (voir notre article Ces villages qui choisissent tant bien que mal d’accueillir les migrants). L’association de communes mène aussi des projets de solidarité internationale, comme un projet de développement de l’énergie solaire au Sahel. « Le réseau Recosol est organisé sur une logique de solidarité qui dépasse la question des migrations, précise Filippo Furri. C’est un réseau d’entraide entre communautés locales. »

Se constituer en associations de solidarité, au delà du seul objectif de gérer l’urgence, voilà ce qui fait sûrement la spécificité des réseaux des villes-refuges face aux politiques migratoire des États. « L’État laisse en partie seules les municipalités italiennes pour l’organisation de l’accueil des migrants. Ce sont les municipalités qui organisent le logement, les cours de langue et l’intégration locale, expliquent les coordinateurs du réseau de communes Recosol. La politique du gouvernement italien souffre de l’absence d’une vision globale et d’un plan national pour l’accueil et l’intégration des migrants. Ce sont donc les associations et les citoyens, sur le territoire, qui font la différence. »

City of Sanctuary au Royaume-Uni

En Grande-Bretagne aussi, des citoyens et des communes prennent le contrepied de la politique xénophobe du gouvernement conservateur. « Le réseau City of Sanctuarya été créé à Sheffield, en 2005, par un petit groupe de personnes qui voulaient mieux accueillir les réfugiés », explique Forward Maisokwadzo, porte-parole de ce réseau britannique. Le maire de cette ville de 500 000 habitants du nord de l’Angleterre avait pleinement soutenu l’initiative, et pris l’engagement public d’accueillir les demandeurs d’asile et réfugiés dans sa ville. « Puis le mouvement est devenu très important, en terme de nombre de personnes et de communes impliquées. Il compte aujourd’hui une centaine de municipalités. L’idée est de travailler avec tout le monde : les citoyens, les associations, les autorités locales. »

Pour le mouvement City of Sanctuary, la clé de l’accueil est dans ce travail collectif. « Les actions menées par le mouvement varient selon les endroits. Elles peuvent par exemple consister à sensibiliser les gens à la question de l’accueil des demandeurs d’asile, précise Forward Maisokwadzo. À Bristol, la ville s’est attaquée au problème du dénuement des demandeurs d’asile, qui reçoivent très peu de soutien financier et n’ont pas le droit de travailler pendant l’étude de leur demande. Une douzaine d’autres villes se sont engagées sur la question. Leur travail est aussi de pousser le gouvernement à se pencher sur ce problème. »

« La France n’est pas dans une démarche d’accueil »

Et en France ? Il y a bien l’exemple de Grande-Synthe, une ville du Nord de 20 000 habitants, où la municipalité a pris le parti de l’accueil des migrants en route vers l’Angleterre (voir notre article Conjuguer accueil des migrants, écologie et émancipation sociale : l’étonnant exemple de Grande-Synthe), notamment en construisant avec Médecin sans frontières un centre d’accueil permettant des conditions de vie décentes (repris en main par la préfecture, le centre a été détruit par un incendie en avril dernier). Des citoyens s’engagent aussi évidemment, de Calais à la frontière italienne, et se trouvent parfois traîné en justice pour « délit de solidarité » (lire notre article À la frontière franco-italienne, les habitants de la vallée de la Roya risquent la prison pour avoir aidé les migrants).

À Paris, où des milliers de migrants débarqués dans la capitale se retrouvent à la rue sans aucune prise en charge et harcelés par la police, la maire Anne Hidalgo a annoncé l’ouverture d’un premier centre d’accueil en mai. Le centre a ouvert six mois plus tard. Prévu pour 500 personnes, il est pourtant sous-dimensionné et saturé en permanence. Selon l’association France Terre d’asile, plus de 1000 personnes migrantes dormaient encore à la rue début juillet à proximité du centre d’accueil. L’association Gisti (Groupe d’information et de soutien aux immigrés) a aussi dénoncéles violences policières dont sont victimes les migrants dans les files d’attentes du centre. Malgré des initiatives bien réelles mais dispersées (lire ici notre article), « la France n’est pas dans une démarche d’accueil », regrette Filippo Furri. Les villes française prendront-elles le relais d’un État défaillant ?

Rachel Knaebel

https://www.bastamag.net/De-l-Europe-aux-Etats-Unis-ces-villes-qui-s-opposent-a-leurs-gouvernements-pour

Sur les réfugiés-migrants semaine 33-34

24/8/17 En vidéo. À Rome, la police chasse des réfugiés à coups de canon à eau http://www.courrierinternational.com/video/en-video-rome-la-police-chasse-des-refugies-coups-de-canon-eau

24/8/17 En Libye, la guerre aux migrants et la compétition entre l’Italie et la France par Salvadore Palidda Professeur de sociologie à l’université de Gênes (Italie) https://blogs.mediapart.fr/salvatore-palidda/blog/240817/en-libye-la-guerre-aux-migrants-et-la-competition-entre-l-italie-et-la-france

23/8/17 Des réfugiés à l’épreuve de l’intégration en Bulgarie https://www.ladepeche.fr/article/2017/08/23/2632449-des-refugies-a-l-epreuve-de-l-integration-en-bulgarie.html

19/8/17 Un total de 9.000 migrants et réfugiés rejoignent l’Espagne par la Méditerranée depuis début 2017, selon l’OIM : Au total 9.000 migrants et réfugiés sont arrivés en Espagne en traversant la mer Méditerranée depuis le début de l’année, a déclaré vendredi le porte-parole de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), Joel Millman, lors d’un point de presse à Genève.

Le porte-parole a précisé qu’en prenant compte des quelque 600 migrants secourus en début de semaine dans les eaux du détroit de Gibraltar et la mer d’Alboran, « le nombre d’arrivées en Espagne a atteint 9.000 personnes » , un chiffre qui dépasse déjà le nombre total d’arrivées (8.162 personnes) enregistrées sur le territoire espagnol sur toute l’année 2016.

Si les chiffres notés en Espagne restent loin de ceux enregistrés en Italie, l’OIM estime toutefois que les autorités de Madrid pourraient faire face à davantage d’arrivées de migrants et de réfugiés que celles d’Athènes.

« L’Espagne est actuellement dans la situation qu’a connue la Grèce en 2015, avec des arrivées quotidiennes importantes » , a indiqué M. Millman, soulignant que les personnes arrivent en Espagne dans des navires plus petits et dans des canots pneumatiques qui sont vraiment difficiles à repérer en mer.

Le porte-parole a souligné que les autorités espagnoles agissaient seules et de manière responsable face à ces nouvelles arrivées de migrants et réfugiés. « Si le nombre d’arrivées augmente, l’Espagne aura besoin d’un soutien supplémentaire » , a-t-il toutefois prévenu.

Au 16 août, l’OIM a enregistré l’arrivée par mer de 119.069 personnes en Italie, en Grèce, en Espagne et à Chypre, quatre pays méditerranéens membres de l’Union européenne.

Avec près de 83% des arrivés, l’Italie à elle seule continue de recevoir la très grande majorité des réfugiés et migrants. Elle est suivie de la Grèce, de l’Espagne et de Chypre.

http://news.abidjan.net/h/620827.html

19/8/17 Bucarest propose d’accueillir près de 2.000 réfugiés :  Le ministre des Affaires étrangères roumain a annoncé samedi que son pays était prêt à accueillir près de 2.000 migrants. @ ATTILA KISBENEDEK / AFP

La Roumanie a proposé d’accueillir près de 2.000 nouveaux réfugiés de Grèce et d’Italie, a annoncé le ministre roumain des Affaires étrangères Teodor Melescanu cité samedi par les médias locaux. « Nous avons fait récemment une offre pour 1.942 réfugiés de Grèce et d’Italie, que nous pouvons relocaliser en Roumanie. Nous avons déjà sur notre territoire environ 700 réfugiés » arrivés de ces pays, a précisé le ministre dans une interview à la chaîne d’information en continu Realitatea TV.

La Roumanie prête à accueillir hors quotas. « Nous avons affirmé qu’il n’est pas normal d’avoir des quotas fixes mais nous avons dans le même temps montré notre disponibilité à accueillir un certain nombre de réfugiés », a souligné Teodor Melescanu. Par ailleurs, le ministère roumain des Affaires étrangères a signalé samedi que Bucarest allouait en 2017 un total de 5,3 millions d’euros en assistance humanitaire aux Syriens réfugiés dans la région avoisinante de leur pays.

Le pays épargné pas l’afflux migratoire. Deuxième pays le plus pauvre du bloc européen, la Roumanie s’était opposée dans un premier temps aux quotas obligatoires de migrants répartis entre les membres de l’UE mais avait fini par accepter ce mécanisme européen. Seuls quelques centaines de migrants ont jusqu’ici accepté d’être transférés dans ce pays. Située aux frontières de l’Union européenne, la Roumanie a été épargnée par la crise migratoire, car contournée par les principaux itinéraires des demandeurs d’asile vers l’Europe.

18/08/2017 Situation explosive en mer Egée du nord avec 10 327 personnes en attente, alors que 1421 sont arrivés en 17 jours : Au total, 1421 réfugiés et les migrants ont traversé les îles de la mer Égée du 1er Août au jeudi 17 Août matin. Parmi ceux-ci, 394 sont allés à Lesbos, 458 à Chios et 569 passés à Samos.
Selon les données de la Garde côtière turque publié sur son site officiel, elle est intervenue dans 32 incidents et 1265 personnes sont revenues sur la côte turque alors qu’elles se dirigeaient vers les îles grecques.
Selon le Centre national de contrôle de la politique frontalière , de l’immigration et de la coordination de l’asile du ministère de l’Intérieur, et selon la Direction générale de la police de la mer Égée du Nord au jour du 17 août, et selon leurs données concernant les réfugiés et les immigrants pour l’ensemble des îles de la mer Egée du Nord,( Centre d’accueils, les centres d’identification et autres structures) , il y aurait au total 10 327 personnes en attente d’examen de leur demande d’asile, dont 4780 à Lesbos, 2,924 à Chios et 2,623 à Samos.
Les autorités s’inquiètent de la situation explosive ainsi créée notamment au camp de Moria ( Lesbos) et à Samos: Pour Moria on compte 3502 personnes pour une capacité de 2330; et à Samos, 1984 personnes pour une capacité de 700 places ! Au centre de Halkios de Chios, qui peut accueillir 1100 personnes, one compte que 838 résidents.
Par ailleurs, dans le camp municipal de Kara Tepe à Mytilène il reste 742 personnes , alors que celui de Souda est en instance de fermeture, et que vivent maintenant officiellement 330 personnes dans les douves du château de la ville, pendant le démantèlement a commencé.

18/8/17 Le ministre bulgare de la défense appelle à l’utilisation de la force contre les migrants aux frontières : Sur le site Keep Talking Greece , on peut lire :
« Krasimir Karakachanov, Ministre bulgare de la Défense incite l’union européenne à utiliser des moyens militaires pour défendre ses frontières extérieures face aux migrants… Dans une interview au quotidien allemand Die Welt traduit par Politico, Kasimir Karakachanov, dont le parti d’ extrême droite Patriots Unis est un partenaire junior de la coalition dans le gouvernement du Premier ministre bulgare Boyko Borisov, a déclaré: « Nous ne pouvons pas permettre aux immigrants clandestins de venir en Europe comme un ensemble, » …« Nous devons déployer des forces de l’OTAN ou de l’UE en Italie et en Grèce et défendre les frontières extérieures de l’Union européenne par la force des armes si nécessaire. » Karakachanov a dit qu’il voulait tripler le nombre de troupes stationnées sur sa frontière bulgare avec la Turquie, de 140 à 600 soldats pour réduire l’immigration. « Nous avons pas résolu le problème des migrations », a t-il ajouté. « Les grands réseaux de contrebande bien organisés tentent toujours d’amener les gens dans notre pays. » Il a affirmé que « la majorité de ceux qui traversent la Méditerranée ne sont pas en besoin de protection, ne sont pas persécutés, ils veulent juste vivre dans le riche Occident. »
La Bulgarie partage une frontière avec la Turquie. Au cours de la crise des réfugiés européens ces dernières années, un nombre important de demandeurs d’asile et de migrants sont passé dans le pays.
Mais les chiffres ont chuté de manière spectaculaire; le nombre d’arrestations pour les migrations illégales en Bulgarie dans la première moitié de 2017 a chuté de 80 % par rapport aux six premiers mois de 2016, selon le Globe Sofia .
Mais alors que certaines politiques pan-européennes, comme l’accord entre Bruxelles et la Turquie pour contenir les migrants dans les pays du Moyen-Orient, ont diminué le nombre de personnes qui viennent en Europe sur certaines routes, beaucoup de gens font encore le voyage.
L’Organisation internationale pour les migrations dénombre 119,047 personnes qui sont arrivées en Europe par voie maritime jusqu’à présent en 2017. Mais l’organisation, comme la plupart des experts en migration, recommande plutôt que de chercher à dissuader de force les réfugiés et les migrants, que l’Europe se concentre sur la création de systèmes faciles à gérer et efficaces pour les déplacer à travers le continent et les intégrer dans leurs nouvelles sociétés. En Janvier, elle a appelé à « un système de relocalisation solide, le soutien aux retours volontaires et le renforcement de voies alternatives aux déplacements juridiques dangereux, y compris la réinstallation et le regroupement familial. » (Selon Politico & Newsweek) »

 

Le risque d’esclavage moderne en Europe

Le risque d’esclavage moderne est au plus haut en Europe, selon une étude par Cécile Andrzejewski sur Médiapart

Le risque d’esclavage moderne augmente dans l’Union européenne. C’est le constat d’une étude publiée par une société d’analyse de risque américaine. En cause, la vulnérabilité des migrants qui arrivent sur les côtes européennes et leur exploitation par des trafiquants.

De toutes les régions du monde, c’est l’Union européenne qui a enregistré la plus forte hausse de recours à l’esclavage moderne en 2017. D’après une étude parue le 10 août, le risque d’esclavage moderne concernerait désormais 20 pays de l’Union européenne. « Il a augmenté dans les trois quarts des 28 pays membres de l’UE l’année dernière », affirme cette enquête publiée par l’agence Verisk Maplecroft, principale société américaine d’analyse de risques.

Définissant l’esclavage moderne comme « un terme parapluie recouvrant l’esclavage, la servitude, la traite des personnes et le travail forcé ou obligatoire », l’index publié par l’organisation compare la situation de 198 pays.

L’index de l’esclavage moderne en 2017. En orange
                les pays où les risques augmentent, en rouge les cinq
                pires pays de l’UE © Verisk Maplecroft L’index de l’esclavage moderne en 2017. En orange les pays où les risques augmentent, en rouge les cinq pires pays de l’UE © Verisk Maplecroft

La hausse constatée en Europe serait due à l’arrivée de plus de 100 000 migrants, « dont la plupart sont extrêmement vulnérables face au risque d’exploitation », insiste la Fondation Thomson Reuters. Selon les chiffres de l’Organisation internationale pour les migrations, sur près de 115 000 migrants et réfugiés arrivés en Europe par la mer en 2017, plus de 80 % ont accosté en Italie. Et si les entrées en Grèce ont diminué à la suite de l’accord de 2016 entre l’UE et la Turquie, le pays accueille toujours un nombre important de migrants et reste donc une destination clé pour le trafic d’êtres humains. L’étude de Verisk Mapecroft révèle que la présence de ces personnes vulnérables participe à l’augmentation de l’esclavage dans de nombreux secteurs de la région, et notamment l’agriculture, la construction et les services.

« La crise des migrants a augmenté le risque d’esclavage dans les chaînes d’approvisionnement des entreprises en Europe, a commenté Sam Haynes, analyste spécialiste des droits de l’homme pour l’organisation. Lorsqu’elles évaluent leurs fournisseurs et leurs produits, les sociétés ne doivent plus seulement faire attention aux points d’approvisionnement dans les économies émergentes. » L’étude pointe notamment la Roumanie, la Grèce, l’Italie, Chypre et la Bulgarie comme les pays avec le plus grand taux de travail forcé de l’UE. « Tous sont des points d’entrée pour les migrants dans la région. »

Alexandra Channer, analyste chez Verisk Maplecroft, a également réagi auprès de CNN : « Les migrants sont déjà vulnérables lorsqu’ils se lancent dans leur traversée – ils fuient généralement des pays violents ou dans une extrême pauvreté. La plupart du temps, ils sont entre les mains de passeurs et sont ensuite rapidement piégés entre celles de trafiquants. Il est probable qu’avant même de pénétrer sur leur lieu de travail, ils sont déjà dans des conditions d’esclavage moderne. »

Le Guardian explique que la plus forte hausse du risque d’esclavage concerne la Roumanie, seul pays de l’UE classé comme « à haut risque ». La Turquie est également devenue un État à « haut risque ». « L’afflux de centaines de milliers de Syriens fuyant la guerre, combiné avec le système de permis de travail restrictif de la Turquie, a conduit des milliers de réfugiés à devenir une main-d’œuvre informelle. Le gouvernement, qui se concentre sur la répression politique, ne donne pas la priorité aux violations du droit du travail, ce qui augmente les risques. Au cours de la dernière année, plusieurs grandes marques des usines textiles turques ont été associées au travail des enfants et à l’esclavage. »

L’agence Verisk Maplecroft travaille à partir d’informations en sources ouvertes et de renseignements obtenus auprès du Département d’État américain et d’ONG comme Human Rights Watch ou Amnesty International. Cependant, Alexandra Channer reconnaît que l’accès aux preuves peut être compliqué. « L’énorme problème, pour quiconque essaie d’évaluer le risque d’esclavage moderne, est que cela constitue une activité criminelle. C’est caché, bien qu’il s’agisse d’un business de milliards de dollars. »

En tête de ce triste classement des pays extrêmement exposés à l’esclavage moderne : la Corée du Nord, la Syrie, le Soudan du Sud, le Yémen, la République démocratique du Congo, le Soudan, l’Iran, la Libye, l’Érythrée et le Turkménistan.

Médiapart : Entretien avec le président de SOS Méditerranée

Migrants en mer: «A un moment donné, quand quelqu’un coule, vous le sauvez»

Par Cécile Andrzejewski Mediapart

En Méditerranée, plusieurs ONG interviennent pour sauver de la noyade des migrants embarqués à bord de rafiots de fortune. Ce que leur reprochent les autorités italiennes et européennes : par leurs actions, les associations favoriseraient l’immigration illégale. Une « erreur d’analyse », répond Francis Vallat, président de SOS Méditerranée.

Accusées de favoriser le travail des passeurs et de créer un « appel d’air » migratoire, les ONG intervenant en mer Méditerranée se sont vu imposer un code de conduite par le gouvernement italien. La plupart des associations refusent pour le moment de le signer. Et si les négociations continuent, les sauvetages ne s’arrêtent pas non plus, loin s’en faut.

Francis Vallat, ancien armateur, est le président de SOS Méditerranée, qui intervient en mer pour secourir les naufragés à l’aide de son bateau, L’Aquarius. Créée au printemps 2015, l’association, financée à 76 % par les dons de particuliers, est directement confrontée à l’ampleur de la crise migratoire et à la détresse des réfugiés, comme le raconte son président.

Quelle est la situation en mer Méditerranée en ce moment ?

Francis Vallat : Elle n’a malheureusement pas changé par rapport aux autres années. On devrait même avoir environ 20 % de passages en plus sur l’axe Libye-Italie. Au total, 200 000 personnes devraient passer par cette route sur l’exercice 2017. Il y a toujours un certain nombre de morts, probablement 5 000 cette année, ou un peu plus. Depuis le début, nous avons pu sauver 23 000 personnes. Selon les périodes de l’année, les ONG réalisent autour de 25 % des passages, le reste étant fait par la garde-côte italienne, les navires italiens, les bateaux de commerce…Comment opère SOS Méditerranée en mer ? 

Nous avons un bateau, L’Aquarius, qui mesure un peu moins de 80 mètres de long. Il dispose d’une partie d’accueil des réfugiés, avec, d’un côté, les hommes et, de l’autre, les femmes. Quand on peut les répartir, bien sûr, car les interventions sont intenses. Une autre partie est aménagée en petit hôpital avec des médecins et des infirmiers, sur laquelle on travaille avec Médecins sans frontières (MSF). Au total, on tourne autour de 26 personnes sur L’Aquarius, entre l’équipage de conduite du bateau, les sauveteurs, le personnel médical, les responsables communication et les journalistes qui suivent les opérations. Toutes les trois semaines, on fait escale à Catane, en Sicile, et on repart.

Pour les sauvetages, quand un bateau coule, nous sommes informés par le MRCC, le Centre de coordination des sauvetages en mer, dont le quartier général est à Rome. Nous sommes en liaison permanente avec eux, ils nous donnent l’ordre d’aller sauver les bateaux. Enfin, si on peut appeler ça des bateaux… Ils se dégonflent, des bouts de planche sortent, c’est une catastrophe. Dès qu’on arrive, on récupère les personnes. C’est très difficile parce que les réfugiés sont terrorisés, ils paniquent, la plupart ne savent pas nager. Il y a des gens parmi eux qui ont été torturés, des femmes souvent violées, parfois des enfants sont à bord. La semaine dernière, on a trouvé huit personnes mortes au fond du bateau parce qu’ils étaient trop nombreux, elles ont été asphyxiées avec les vapeurs d’essence. Ce n’est pas le cas le plus fréquent, mais même les cas « normaux » demandent beaucoup de compétences. Il faut calmer les réfugiés, les rassurer, certains se jettent à l’eau.

Et ensuite ?

Ensuite ils viennent sur le bateau. On peut normalement accueillir jusqu’à 500 personnes, mais il nous est arrivé d’en avoir près de 1 000 à bord. Les premières 24 heures sont terribles. C’est là où on les calme, on les soigne, on les rassure. On parle avec eux de leurs vies, de ce par quoi ils sont passés. Ces échanges-là sont plus humains, à la fois très touchants, mais aussi très durs. L’atmosphère à bord du bateau s’avère absolument formidable. C’est indispensable car la pression morale reste très forte, il a pu arriver que nos propres sauveteurs soient traumatisés par ce qu’ils ont vu. Puis on va en Italie, à Lampedusa ou à Trapani. Comme on a un gros bateau, parfois, sur ordre du MRCC, on transborde sur L’Aquarius des gens sauvés par d’autres, pour les amener en Italie. C’est-à-dire qu’on embarque à bord des réfugiés qui ont été sauvés par d’autres bateaux.

 © Narciso Contreras/SOS Méditerranée

© Narciso Contreras/SOS Méditerranée

Ces derniers temps, on entend beaucoup parler « d’appel d’air », une théorie selon laquelle, en intervenant en Méditerranée, les ONG encourageraient finalement les migrants à prendre la mer sur des rafiots de fortune et favoriseraient donc l’immigration illégale…

D’abord, en Libye, beaucoup de personnes sont extraordinairement maltraitées [lire à ce sujet les récits de migrants rescapés de l’horreur libyenne publiés en avril dernier sur Mediapart – ndlr]. Ces gens vivent un véritable enfer en Libye. Selon les périodes, nous sauvons 20 % à 25 % d’enfants. 80 % d’entre eux sont sans leurs parents. Ce qui signifie que la désespérance est telle qu’en dépit de tout, les parents se sont sacrifiés, ils ont économisé pour payer un passage, pour qu’au moins leur enfant soit sauvé. Le désespoir reste absolu, donc ils partiront.

Cette histoire d’« appel d’air » est une erreur d’analyse : lorsqu’en 2014, l’opération Mare Nostrum a été arrêtée, lorsque cette force a été enlevée d’un seul coup, ça n’a absolument pas tari le flux de départs en mer. La seule chose qui a augmenté, c’est le nombre de morts. La théorie de l’« appel d’air » constitue une sorte de fausse excuse qui camoufle la crainte ou le refus des sauvetages. On dépasse le cap des 50 000 morts depuis le début de la crise des migrants. Ces chiffres sont certainement sous-évalués car ils sont calculés uniquement sur la base des morts qu’on peut constater. Mais ils disent tout : ce drame se déroule à nos portes.

La Méditerranée, on peut s’y baigner, pêcher, y passer du bon temps, mais on ne peut pas non plus regarder ailleurs, on ne peut pas laisser mourir ces gens sans les aider. On peut discuter pendant des heures de la politique migratoire, le problème n’est pas celui-là, il est de dire qu’on ne peut pas laisser des gens mourir à nos portes, que le sauvetage ne se discute pas.

Cet argument de « l’appel d’air » est utilisé par l’extrême droite, les populistes, qui ne vont pas assez loin dans l’analyse. Ils se servent d’un rapport de Frontex [l’agence européenne de surveillance des frontières extérieures de l’UE – ndlr] qui aurait pointé cet effet. Mais on a rencontré le directeur général de Frontex. D’après lui, les responsables de l’agence ne sont pas dans cette conviction. Il nous a paru sincère. Après, il y a les pressions politiques… La meilleure des preuves : Frontex [qui coordonne désormais l’opération Triton, laquelle a pris le relais de Mare Nostrum, mais dont l’objectif premier est le contrôle des frontières – ndlr] participe aux opérations de sauvetage. Si les ONG sont coupables d’un appel d’air, alors c’est le cas de tous ceux qui sont là, y compris les navires étatiques ou européens. À un moment donné, quand quelqu’un coule, vous le sauvez.

« Nous, on essaie de sauver notre âme, celle de l’Europe »

Y a-t-il une réelle volonté politique face à cette crise ?

Nous, on s’occupe exclusivement de sauvetage. Notre seule action politique consiste à dire aux responsables nationaux et européens : votre boulot, c’est de travailler sur les solutions. Nous, on essaie de sauver notre âme, celle de l’Europe. À l’heure actuelle, il n’existe aucune stratégie. Que fait-on à court terme, à moyen terme, à long terme ? On sait que trouver des solutions va prendre du temps, mais c’est essentiel. Où est en France le groupe de travail qui réfléchit à ces problèmes ? Il y a un refus de voir le problème en face. Ce refus est irresponsable vis-à-vis des réfugiés et aussi vis-à-vis de nos enfants. On n’a pas le choix, il faut y réfléchir. On ne peut pas dire que rien n’est fait, mais les solutions sont loin d’être à la dimension du problème.

L’objectif final n’est-il pas que les garde-côtes libyens prennent le relais ?

Ça fait partie des choses discutées, des solutions proposées. Si ça peut permettre de les rendre plus responsables… Parce qu’aujourd’hui, quand on croise des gens en uniforme, on ne sait pas à qui on a affaire. Mais si ça consiste à prendre les réfugiés et à les ramener dans l’enfer qu’ils viennent de quitter, là on est clairement contre, ce n’est pas acceptable. Pour l’instant, tout ça n’est pas encore très clair, mais on se méfie beaucoup de cette histoire.

 © Narciso Contreras/SOS Méditerranée

Le 25 juillet dernier, le gouvernement italien a présenté un code de conduite destiné aux ONG qui interviennent en Méditerranée. Cinq des huit ONG l’ont refusé, dont SOS Méditerranée ?

Nous sommes en discussion. Cette histoire est sortie il y a deux semaines. Il a d’abord fallu comprendre ce code. Nous avons eu, comme d’autres ONG, des discussions avec le gouvernement italien. Elles se poursuivent encore, avec une nouvelle rencontre à la fin de la semaine. Nous ne sommes pas contre un code de conduite en soi. Il y a déjà des règles extrêmement strictes : notre bateau a interdiction de se rendre dans les eaux territoriales libyennes ; il ne peut agir qu’à la demande du MRCC ; si L’Aquarius croise un bateau en difficulté, l’équipage doit prévenir le centre de coordination ; nous avons interdiction de tout contact avec les passeurs. Mais pour ce nouveau code de conduite, nous voulons discuter de certains points.

Lesquels ?

Premièrement, il faut qu’il soit clair que les transbordements entre navires seront autorisés. C’est-à-dire qu’on doit pouvoir accueillir des personnes sauvées par d’autres bateaux pour qu’ils puissent continuer les recherches, on ne doit pas être obligés de retourner au port entre chaque sauvetage. À l’heure actuelle, on a sauvé autant de gens car on a pu en recueillir en transbordement, ce qui a permis à d’autres de continuer les sauvetages. C’est essentiel, si on ne le fait pas, on perd des vies. S’il faut effectuer l’aller-retour sur les côtes, on perd une trentaine d’heures. On refuse également que toute action soit réalisée vis-à-vis des réfugiés dans les premières 24 heures. Parce que les gens sont dans un état de choc incroyable durant cette période, ils ont besoin de temps.

Enfin, il est hors de question qu’il y ait des personnes armées à bord [le code de conduite impose en effet la présence d’officiers de police dans les bateaux – ndlr]. La présence de gens armés constitue un facteur de tension et un facteur de risque. Dans ce cas précis, ça ne nous paraît pas justifié. Cette disposition nous inquiète. Il ne faut pas oublier que les réfugiés viennent de pays où ils ont vécu des événements violents.

Nous discutons de ces trois points, qui représentent des points de blocage pour nous, avec les autorités italiennes. Notre position est très claire mais nous avons bon espoir d’ouvrir un dialogue. Nous sommes très fermes, mais très équilibrés. Simplement, nous restons intransigeants sur le sauvetage, car c’est de ça qu’on s’occupe. La garde-côte italienne travaille très efficacement au sauvetage, c’est d’ailleurs le gouvernement italien qui assure la majeure partie du sauvetage, à hauteur de 40 % ces dernières années. Mais la pression des populistes reste très forte.

[Cet entretien a été réalisé par téléphone le jeudi 10 août. Le lendemain, vendredi 11 août, SOS Méditerranée a signé une version modifiée du code de conduite au cours d’une rencontre avec le ministère à Rome, ses demandes ayant été prises en compte. Voir Boîte noire – ndlr]

D’où viennent les réfugiés que vous secourez ?

Ils viennent de partout. De pays en guerre ou dans une crise politique qui ressemble à une guerre. Dans le nord du Nigeria, avec Boko Haram, à la place des habitants, vous fileriez aussi. Ils viennent de l’Érythrée, du Soudan, du nord du Nigeria donc, du Niger, de la Syrie. Par ailleurs, oui, il y a des réfugiés économiques, en particulier d’Afrique de l’Ouest, mais qui sommes-nous pour dire « toi, tu es politique, je te ramasse, toi non parce que tu es économique » ? Si vous n’avez aucune solution, c’est normal que vous partiez chercher un avenir ailleurs. Au sud du Sahara, dans la zone sahélienne, les conditions économiques sont très difficiles, les habitants cherchent des solutions. Pour la plupart, ce ne sont pas des gens qui arrivent en Libye et d’un seul coup vont chercher un bateau. Le pays employait énormément de ces gens, mais il est depuis tombé dans le chaos, des gangs les traitent de manière épouvantable.

Un bateau financé par des militants d’extrême droite s’est récemment lancé dans une tentative de navigation en Méditerranée pour empêcher les ONG d’agir…

Leur épopée a surtout consisté en une opération de communication. Ils ont été empêchés d’entrer dans des ports. Ces gens sont totalement marginaux. Ils tiennent du groupuscule. En parler, c’est leur donner une importance qu’ils n’ont pas du tout. Voilà pourquoi SOS Méditerranée s’est très peu exprimé à leur sujet. Il s’agit d’un épiphénomène qui est, à certains égards, ridicule. D’abord, ils ont imité notre modèle, en réalisant une levée de fonds. Or, ça demande un travail énorme : notre bateau coûte entre 11 000 et 12 000 euros par jour, nous devons lever 4 millions d’euros par an. Eux ont à peu près réuni 80 000 euros [76 000 exactement – ndlr], ils ne vont pas tenir très longtemps.

Il faut qu’on soit très vigilants parce qu’on ne peut pas se permettre de mettre en danger notre équipage et les réfugiés à bord. Ils nous ont suivis au début. Ils sont venus nous trouver et nous ont dit : « Nous vous sommons de quitter cette zone, vous mettez en danger l’Europe ! » Nous n’avons pas réagi et au bout d’un moment ils ont changé de route pour aller dire la même chose à un autre… Ce que l’on craignait, ce n’était pas qu’ils reprennent les réfugiés et les ramènent en Libye, ce n’est pas possible, on craignait surtout qu’ils leur fassent peur et que ceux-ci paniquent sur le bateau. Parce qu’eux sont réellement en état de choc.

Sur les réfugiés semaine 32

10/8/17 L’Espagne pourrait dépasser la Grèce en arrivées de migrants par mer http://www.lexpress.fr/actualites/1/monde/l-espagne-pourrait-depasser-la-grece-en-arrivees-de-migrants-par-mer_1934562.html

9/8/17  Les réfugiés afghans en Allemagne ne seront plus renvoyés dans leur pays pour des raisons de sécurité http://french.china.org.cn/foreign/txt/2017-08/09/content_41381158.htm

9/8/17 Les regroupements familiaux des réfugiés freinés en Grèce https://www.euractiv.fr/section/migrations/news/les-regroupements-familiaux-des-refugies-freines-en-grece/

Grèce : À Tilos, un îlot d’humanité dans un continent cadenassé

5/8/17 Par PAVLOS KAPANTAIS Humanité Dimanche

Meisoun, Mohamed et leurs enfants sont arrivés de Syrie en février. Aujourd'hui, Meisoun travaille, souriante et ravie.Meisoun, Mohamed et leurs enfants sont arrivés de Syrie en février. Aujourd’hui, Meisoun travaille, souriante et ravie.

C’est l’histoire d’une petite île grecque perdue quelque part dans la mer Égée. Avec à peine 500 habitants, Tilos a décidé de devenir le havre de ceux qui ont dû quitter leur patrie pour rester en vie. Reportage.

Maria Kamma, 47 ans, est la maire et l’âme de Tilos. Débordante d’énergie, enthousiaste et pleine d’humour, elle dégage une impression de volonté inébranlable. Élue en 2014, elle a déjà laissé une trace indélébile sur la vie de l’île. Encartée au Pasok (parti socialiste grec) depuis plus de vingt-cinq ans, elle force le respect de tous, même ceux qui pourraient la voir comme une adversaire politique. Les quelques militants de Syriza qui vivent sur l’île la saluent d’un simple « camarade ». Mais tout ce que fait Maria s’inscrit dans la tradition de solidarité des habitants de Tilos.
 

Cela fait maintenant sept ans que l’île reçoit un flux de réfugiés plus ou moins constant. Les premiers arrivent en 2010. Parmi eux, Nima, un Afghan de 15 ans à l’époque. Aujourd’hui âgé de 22 ans, il habite toujours à Tilos. C’est Maria qui l’a invité pour qu’il raconte son histoire. En arrivant, ils s’embrassent comme deux membres d’une même famille. Nima a tout de quelqu’un d’heureux. Sourire aux lèvres, il raconte son histoire : en 2010, il arrive à Lesbos depuis la Turquie, puis part pour Athènes. Là, tandis qu’il se cache dans des taudis, il rencontre un autre Afghan qui lui parle d’une île où il « sera accueilli comme s’il était un d’entre eux ».

Au début, Nima voulait aller en Norvège ou en Suède. Mais il a préféré Tilos, « un endroit magique » .

Au début, Nima voulait aller en Norvège ou en Suède. Mais il a préféré Tilos, « un endroit magique » .
 
Jusque-là, Nima rêvait d’aller en Suède ou en Norvège. Mais, épuisé par son voyage et coincé à Athènes dans une chambre qu’il partage avec 18 autres personnes, il se laisse convaincre et décide de tenter sa chance à Tilos. Les deux compagnons de route y partent le jour même. Dès leur arrivée, ils y rencontrent une autre famille de réfugiés afghans logés chez des locaux. « Au début, je leur demandais de me cacher. Je n’arrivais pas à croire que ma présence ne posait problème à personne. » Quelques jours plus tard, Nima ose enfin sortir et se balader dans le village. Il sera immédiatement pris en charge. Pendant un an, il suivra des cours de grec intensif tout en assistant à quelques cours avec les autres enfants du village.

Maria n’était pas encore la maire, mais son prédécesseur, Tasos Aliferis, aujourd’hui décédé, était dans la même logique. Nima nous raconte : « Pendant l’année scolaire, deux fois par semaine, le maire venait me chercher après l’école pour me faire rencontrer les habitants de l’île. Au bout de quelques mois, je connaissais déjà tout le monde. Une fois l’année scolaire terminée, je parlais déjà assez bien le grec. On m’a proposé de travailler dans un des restaurants du village. J’ai accepté. » Son travail est déclaré et rémunéré normalement. Il vient d’avoir 16 ans et fait désormais pleinement partie de la société locale. On est en 2011. Jusqu’à aujourd’hui, il ne partira de l’île que pour trois mois, le temps de passer par Athènes et de se « rendre compte à quel point Tilos est unique ». Dans la capitale, il reçoit une offre d’emploi d’une ONG pour être interprète auprès de réfugiés et d’immigrés fraîchement arrivés en Grèce. Mais il choisit l’île. « Tilos est un endroit magique », lance-t-il avec un large sourire.

Quatre ans après l’arrivée de Nima, le flux de réfugiés va s’intensifier du jour au lendemain. C’est désormais Maria qui doit tout organiser pour que l’île puisse y faire face sans y perdre son âme. Le challenge est de taille : en 2014, comme en 2015, Tilos va à plusieurs reprises accueillir le double de sa population en l’espace de quelques jours…
Parmi ceux qui seront en première ligne, il y a aussi Eleni Pissa, aujourd’hui responsable du « centre d’accueil pour familles vulnérables » de l’île. Regard pétillant et sourire malicieux, Eleni se souvient. Tout a commencé un matin de printemps en 2014. Se rendant à son magasin, elle a « vu un grand groupe de Syriens qui venaient d’arriver. Ils avaient le regard de ceux qui ont longtemps côtoyé la mort. Ça m’a fait froid dans le dos. Tout de suite avec Maria, on a créé un groupe de volontaires pour voir comment les nourrir, les loger, leur expliquer leurs droits…. Les jours suivants, le flux augmentait, mais de plus en plus d’habitants venaient se déclarer volontaires pour aider »…
Ils décident de transformer un vieux camp militaire abandonné en centre d’accueil. Le conseil municipal approuve à l’unanimité. « On a d’abord organisé l’essentiel : mettre l’eau courante, l’électricité, remettre en état deux bâtiments abandonnés. Au départ, on ne disposait que de notre travail et des maigres moyens de la municipalité. » Quelques mois plus tard, l’ONG Solidarity Now, ayant entendu parler de leur initiative, leur rend visite et propose de les financer. Dix conteneurs sont installés et transformés en habitations autonomes. « À l’époque, nous fonctionnions en tant que centre de premier accueil. Mais, une fois que l’accord entre l’UE et la Turquie a été mis en place, le flux vers notre île s’est quasiment arrêté. Ce n’est pas pour autant qu’on ne voulait plus aider ! »
Dans le camp, on apprend le chant et la musique, les langues, on fait du dessin et parfois aussi du yoga.
 
Les habitants de Tilos se portent alors volontaires pour accueillir d’autres réfugiés. Maria Kamma nous raconte : « Quand j’ai appelé le ministère pour leur dire que l’on souhaitait qu’on nous envoie des familles réfugiées, ils ne m’ont pas vraiment crue, ajoutant que notre île était tellement petite que cela n’était pas nécessaire ! Mais on a insisté. » L’idée est lancée de transformer le camp de premier accueil en camp pour les « cas vulnérables », c’est-à-dire les familles avec de nombreux enfants en bas âge et sans moyens. Idée acceptée avec enthousiasme par les locaux, et approuvée de nouveau par le conseil municipal à l’unanimité. Le camp est placé sous l’égide du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés.
C’est ainsi que les premières familles arrivent des quatre coins de la terre à la fi n du printemps 2016. « Dès le début, notre but a été de les intégrer, pas juste de les nourrir et de les loger », explique Eleni. Sont mis en place immédiatement des cours de grec et d’anglais pour les enfants et les adultes. « S’ils restent en Grèce, à Tilos ou ailleurs, le grec leur sera nécessaire, et l’anglais plus qu’utile. S’ils partent vers d’autres pays européens, au moins, ils auront appris l’anglais, ce sera pour eux un atout. » C’est dit avec une facilité déconcertante, mais tous les habitants du camp le savent : s’ils veulent rester sur l’île pour toujours, ils sont les bienvenus ! Cette attitude unique amènera de nombreux volontaires de passage ainsi que le soutien officiel du gouvernement.
Entrer dans le centre d’hospitalité de Tilos, c’est un peu rentrer dans une colonie de vacances où les tentes seraient remplacées par des conteneurs. Des enfants souriants courent à droite et à gauche et s’amusent d’un rien. Outre les langues, dans le camp, on enseigne le chant et la musique, on fait du dessin, de la peinture et parfois aussi du yoga. Les enfants jouent aussi au foot avec ceux de l’équipe locale. Une grande partie de ces activités sont spécialement conçues pour aider enfants et adultes à dépasser les traumatismes parfois très profonds qu’ils portent en eux. Et puis, aussi, on essaie de trouver un travail à tous ceux qui le désirent.
 

En tout, 46 Syriens sont logés dans le camp, dont 26 enfants de moins de 15 ans. Certaines familles ont déjà reçu l’asile, d’autres l’attendent. Meisoun, son mari Mohamed et leurs cinq enfants âgés de 3 à 11 ans sont arrivés en Grèce, début 2016, et au camp de Tilos en février 2017. Ils ont quitté la région de Dara en Syrie où ils vivaient pour échapper à la guerre, comme toutes les familles du camp. Candidats à l’asile à leur arrivée, ils ont reçu le statut de réfugiés il y a quelques semaines et savent, désormais, qu’ils ne seront pas expulsés.

«Il faut trouver un travail pour ceux qui veulent. Pour les femmes, c’est une émancipation.» Eleni, responsable du centre d’accueil

En Syrie, Meisoun avait toujours été femme au foyer. À Tilos, elle a décroché son premier travail rémunéré : femme de chambre dans un hôtel local. Eleni lui a demandé si elle voulait travailler et gagner ainsi de l’argent. Après en avoir discuté avec son mari pendant deux jours, elle a accepté. « Cela a été extrêmement difficile pour moi au tout début. Mais, en fait, ça va ! C’est même très bien ! » dit-elle avec un large sourire. En tout, 7 adultes sur 20 ont un travail sur l’île.
Pour la plupart des femmes, c’est la première fois. « C’est très important de trouver un travail à ceux qui le veulent, explique Eleni. Pour les hommes, c’est un peu un retour à la normalité. Pour les femmes, une émancipation et une introduction aux mœurs européennes. »
Trois des huit familles du camp pensent très sérieusement s’installer à Tilos. Comment trouver des emplois à tous ? Maria a déjà une solution. « Notre île est réputée pour son fromage traditionnel de chèvre. Il faut qu’on ouvre une coopérative et que tous ceux parmi les réfugiés qui veulent en devenir membres/actionnaires puissent le faire. Cela donnera du travail à tous et on produira assez de fromage pour que vous autres (tous ceux qui ne vivent pas à Tilos ­ NDLR) puissiez en profiter aussi ! » conclut-elle, en s’esclaffant.

 Quand on lui fait remarquer à quel point son attitude et celle de toute l’île sont exceptionnelles, elle soupire. « Nous ne sommes pas des êtres exceptionnels. Nous avons juste fait le strict nécessaire que nous impose notre humanité commune. » Dans le climat européen actuel, c’est déjà une révolution.

 
LA RENOMMÉE D’UNE ÎLE
 
Peuplée d’à peine 500 habitants, l’île de Tilos défraie la chronique depuis longtemps. Pendant la Seconde Guerre mondiale, elle est une des très rares à pouvoir encore nourrir sa population malgré l’occupation allemande. Elle va accueillir nombre de réfugiés locaux, venus des îles voisines où régnait la famine. Au lieu de voir ces nouveaux venus comme un danger, les habitants de Tilos vont utiliser les bâtiments vides pour les accueillir et les intégrer. En 2007, le maire y a célébré le premier mariage homosexuel de l’histoire de la Grèce. Il sera annulé par les tribunaux, un mariage entre personnes du même sexe n’étant alors pas reconnu par la législation. Mais cet acte va lancer le débat qui amènera au changement de la loi en 2015. En juin 2017, Tilos a reçu deux prix de la part de la Commission européenne : le premier prix dans la catégorie « îlots énergétiques » des prix européens de l’énergie durable, ainsi que le prix du public. Elle est à deux doigts de devenir la première île grecque indépendante énergétiquement, après avoir fortement investi dans les énergies renouvelables, solaire et éolienne ces dernières années.

SOS Méditerranée publie son 1er rapport d’activité

Chers amis,

SOS MEDITERRANEE publie son premier rapport d’activité dont le résumé est disponible ici.

L’occasion pour nous de revenir sur 17 mois d’opérations en mer, de mobilisation citoyenne à terre, ainsi que de vous présenter nos perspectives pour l’année 2017.

Que de chemin parcouru, grâce à vous, donateurs, grâce à toutes celles et ceux qui bénévoles ou membres de l’équipe s’investissent sans compter pour secourir ceux qui se noient en Méditerranée et sensibiliser nos concitoyens!

Depuis le départ de l’Aquarius du port de Marseille le 26 février 2016, ce sont 21 792 hommes, femmes et enfants qui ont été secourus par nos équipes lors de 127 opérations de sauvetage au large des côtes libyennes. Cinq bébés sont même venus au monde à bord de notre navire et parfois dans des conditions extrêmes. C’est le cas de Christ, né le 11 juillet dernier. L’enfant était encore relié à sa mère par le cordon ombilical lorsqu’il a été secouru et transporté à bord de l’Aquarius.

L’année 2017 ne sera pas moins intense que 2016. A la fin juillet, SOS MEDITERRANEE a déjà secouru plus de 10 000 personnes, soit presque autant que sur toute l’année 2016 où 11 260 personnes ont été sauvées de la noyade par nos équipes.

C’est pourquoi nous avons besoin de vous et comptons sur votre soutien. Grâce à vos dons, nous poursuivrons notre mission urgente et vitale de sauvetage.

Pour suivre les activités de cette association http://www.sosmediterranee.fr

et la soutenir https://don.sosmediterranee.org/b/mon-don?utm_source=sitesosmediterranee&utm_medium=site&utm_campaign=don_site_je_donne

 

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