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Convoi solidaire mai appel urgent

Le collectif de Grenoble qui a participé à la collecte pour le prochain convoi solidaire organisé par le collectif Anepos relaie l’appel de Yannis Youlountas qui alerte sur le niveau faible de remplissage des camions et des dons.

Grèce : appel urgent à solidarité

 A quelques jours du départ, le taux de remplissage des 17 fourgons atteint péniblement 60% et, pire encore, les dons ne sont qu’à 30% de l’objectif nécessaire. Alerte rouge.

GRÈCE : APPEL URGENT À SOLIDARITÉ

Le tri et chargement de la collecte dans le sud-est de la France a été effectué ce mercredi près de Marseille (photo). Celui du sud-ouest vient de commencer ce week-end près d’Albi.

Le bilan est le même : alors que les billets de ferry ne sont plus échangeables, les 17 fourgons peinent à se remplir ! Le taux de remplissage vient seulement de dépasser la moitié de la capacité totale et approche lentement des deux tiers. Nous attendons les toutes dernières collectes pour en savoir plus.

Côté dons, c’est l’alerte rouge : ils sont beaucoup plus bas que précédemment (30% de l’objectif) alors que les besoins sont encore plus importants, tant la situation est difficile : cuisines sociales gratuites, dispensaires médicaux autogérés, squat de réfugiés, collectifs solidaires et de luttes, etc.

La raison est simple. Elle est logique et légitime. Cette année, en France, vous avez été très sollicités par d’autres actions de solidarité, nombreuses et importantes, telles que :
– caisses de grève (cheminots, postiers, etc.) ;
– soutien aux victimes des violences policières ;
– collectes pour la ZAD ;
– collectes pour les migrants (à la frontière italienne et ailleurs).

On comprend très bien et on vous en félicite. Mais la Grèce reste la ligne de front principale contre le durcissement du capitalisme en Europe, ainsi que le grand piège à ciel ouvert des migrants. Beaucoup de nos lieux autogérés sont exsangues. Les collectifs de luttes sont écrasés de procès (parfois des dizaines, comme pour Rouvikonas). Les stocks de vivres sont au plus bas, six mois après le convoi de novembre 2017.

Les 45 camarades prêts à partir (de France et de Belgique) partent bénévolement et se déplacent à leurs frais. Ils prennent également le risque d’être harcelés par les autorités policières et inquiétés par les groupes fascistes (qui la dernière fois n’avaient pas manqué de nous menacer et de titrer à notre sujet dans leurs journaux en Grèce).

Nous comptons donc sur vous pour un petit coup de pouce, aussi modeste soit-il. La somme des petits (ou grands) gestes nous permettra peut-être d’atteindre l’aide nécessaire ou, au moins, de s’en rapprocher.

SI VOUS NE DEVEZ DONNER QU’UNE SEULE FOIS EN 2018 POUR NOS LIEUX ET ACTIONS EN GRÈCE, C’EST MAINTENANT QU’IL EST ESSENTIEL DE LE FAIRE.

Vu l’urgence et la proximité du départ, choisissez le soutien par virement ou par Paypal plutôt que par chèque (temps d’envoi postal + temps de traitement + temps d’encaissement).

Iban pour virement et bouton Paypal sur cette page :
http://lamouretlarevolution.net/spip.php?rubrique15

Merci de ne pas oublier la Grèce, première ligne de front contre le durcissement du capitalisme en Europe et grand piège à ciel ouvert des migrants.

Yannis Youlountas et les 44 autres camarades prêts à partir
Collectif artistique et solidaire ANEPOS

PS : principaux destinataires déjà aidés :
http://lamouretlarevolution.net/spip.php?rubrique14

[Mise à jour à 13h00] Si vous choisissez Paypal, sachez que ce site demande désormais d’ajouter aussi les chiffres après la virgule : ne vous trompez pas (une camarade qui voulait donner 200 euros tout à l’heure a donné 2,00 euros avant de s’en rendre compte par hasard).

Réfugiés : solidarité et luttes contre la menace raciste et fasciste

« La lutte continue pour que les réfugiéEs ne soient pas isolés dans des camps de rétention dans les îles »

NPA : Les articles de la rubrique Idées n’expriment pas nécessairement le point de vue de l’organisation mais de camarades qui interviennent dans les débats du mouvement ouvrier. Certains sont publiés par notre presse, d’autres sont issus de nos débats internes, d’autres encore sont des points de vue extérieurs à notre organisation, qui nous paraissent utiles.

Entretien. Alors que 35 migrantEs sont jugés par la justice grecque en raison de leur participation à une manifestation contre leurs conditions de détention sur l’île de Lesbos, nous avons rencontré Petros Constantinou, coordinateur de la Keerfa (Mouvements unis contre le racisme et la menace fasciste), et conseiller municipal Antarsya à Athènes.

Avec la Keerfa, vous dénoncez notamment « l’Europe forteresse ». Concrètement, de quoi s’agit-il ?

Les gouvernements des pays de l’UE appliquent des politiques racistes envers les immigréEs, en fermant les frontières, en abolissant les droits des réfugiéEs et l’asile, transformant l’Europe en une forteresse remplie de barrières et de camps de concentration, et la Méditerranée en tombe pour des milliers qui fuient l’Asie, le Moyen-Orient et l’Afrique. Ces politiques ouvrent la voie à une nouvelle montée de l’extrême droite et des partis fascistes en Europe.

Des interventions impérialistes, comme la dernière attaque de l’alliance États-Unis-France-Grande-Bretagne contre la Syrie, déracinent encore plus de personnes de leur pays. Les gouvernements eux-mêmes qui se présentent comme les sauveurs du peuple syrien, ferment leurs frontières aux réfugiéEs et renforcent les discriminations envers eux. Soixante-dix ans après la signature de la Convention de Genève, le droit à l’asile est miné au nom de politiques de loi, d’ordre et de sécurité et des choix ouvertement racistes avec l’islamophobie en tant qu’expression dominante. Les accords UE-Turquie-Libye depuis mars 2016 tentent de bloquer les réfugiés hors de l’UE en finançant des camps sur le territoire de la Turquie et la Libye, où réapparaît le commerce d’esclaves. Ils militarisent la garde des frontières avec Frontex et l’OTAN. En Grèce, ils imposent l’isolement des réfugiés dans les îles.

Ils désorientent les travailleurEs en accusant les immigrés d’être responsables de la pauvreté et du chômage.

Comment se manifeste la solidarité avec les migrantEs en Grèce ?

La résistance en Grèce est massive. En 2015, les réfugiéEs, avec un énorme mouvement de solidarité dans un pays de travailleurEs appauvris par les mémorandums et la troïka, ont réussi à briser les frontières et arriver partout en Europe. En 2016, les gouvernements de l’UE, notamment avec les accords avec la Libye et la Turquie, se sont retournés contre ce mouvement.

Des milliers de travailleurEs et de jeunes, avec leurs syndicats et leurs collectifs, ont soutenu les réfugiéEs. Aucun n’est resté sans nourriture ni sans toit. Ils ont revendiqué et imposé au gouvernement que les enfants des réfugiéEs soient inscrits dans les écoles publiques.

Comment réagit l’extrême droite ? 

Les néonazis d’Aube dorée, derrière le masque du parent indigné, ont essayé d’organiser une réaction à l’inscription des enfants dans les écoles. Ils ont échoué quand les syndicats d’enseignantEs, les associations de parents d’élèves, mais aussi tous les partis de la gauche, le Parti communiste, Antarsya, Unité populaire, ainsi que des gens de Syriza, ont défendu les écoles et fait plier les fascistes.

Le mouvement en Grèce après l’assassinat de Pavlos Fyssas en 2013 par les néonazis d’Aube dorée, avec un soulèvement massif et une grève générale, a imposé le procès d’Aube dorée et l’emprisonnement de plusieurs de ses cadres.

Les fascistes sont isolés et les attaques contre les immigréEs provoquent la colère. Le gouvernement Syriza-Anel fait face à d’importantes critiques en raison de la poursuite des politiques racistes. Le 17 mars des milliers de gens ont manifesté à Athènes avec les réfugiéEs, exigeant l’abolition de l’accord raciste UE-Turquie. Dans les îles de Lesbos, Chios et Samos, des réfugiéEs entament des grèves de la faim et organisent des manifestations pour gagner la liberté de circulation ; la police attaque les mobilisations et des réfugiéEs se retrouvent en procès. La lutte continue pour que les réfugiéEs puissent s’installer dans les villes et non dans des lieux-ghettos hors des villes, et pour qu’ils ne soient pas isolés dans des camps de rétention dans les îles.

Comment s’articulent les luttes de solidarité avec les migrantEs et le reste des mobilisations sociales ?

Le mouvement ouvrier, avec ses luttes et ses revendications, construit le front contre le racisme et contre les fascistes. Les travailleurEs municipaux, les écoles, les hôpitaux revendiquent des fonds et le renforcement des services de santé, d’éducation et de protection sociale, avec plus de personnel afin de pouvoir prendre soin de tous, locaux et immigrés. Ils demandent le droit à l’hébergement pour touTEs, ainsi que le droit au travail sans discriminations.

En mai 2017, des travailleurEs immigrés d’une usine de plastique ont fait grève pendant 19 jours quand le patron a frappé un des ouvriers qui demandait ses droits. Ils ont créé un syndicat et ont eu le soutien de toute la gauche. En bravant les intimidations racistes du patron, ils l’ont obligé à accepter un accord.

Et quand à nouveau les fascistes ont commencé à organiser des pogroms et des attaques contre des travailleurs agricoles à Aspropyrgos, des manifestations massives ont été organisées dans la région, obligeant la police à cesser de couvrir les fascistes qui ont été ensuite envoyés en prison et les attaques ont cessé.

Quel rôle pour la Keerfa ? 

Unis dans l’action commune de toute la gauche et des syndicats, la Keerfa mobilise beaucoup de monde qui peut barrer la route au racisme et aux fascistes. Cela a une importance énorme pour que les fascistes ne puissent pas profiter du mécontentement et gagner des gens à cause des compromis du gouvernement Syriza avec les capitalistes, avec son implication dans les antagonismes militaires dans la région, avec l’accord avec Israël et l’Égypte pour le contrôle de nouveaux gisements d’hydrocarbures. La voie reste ouverte pour que les gens qui se sont battus contre les mémorandums continuent de s’orienter vers la gauche même si cette lutte a été trahie par Syriza.

Propos recueillis par la rédaction

Source https://npa2009.org/idees/international/la-lutte-continue-pour-que-les-refugiees-ne-soient-pas-isoles-dans-des-camps-de

SOS Méditerranée : le rôle du médiateur culturel à bord du bateau

Médiateur culturel, trait d’union entre rescapés et sauveteurs

 Le 23 avril, 537 personnes ont été débarquées dans le port de Trapani, en Sicile, après avoir été sauvées par les équipes de SOS MEDITERRANEE. S’ils s’en sont sortis, c’est en partie grâce au médiateur culturel présent à bord de l’Aquarius. [Lire le communiqué sur le sauvetage]  Seraina, une jeune femme de 24 ans, a occupé cette fonction dont on ne parle pas beaucoup, et qui a pourtant une importance capitale dans la réussite des opérations de sauvetage. Elle a choisi de nous décrire ici son rôle et son expérience à bord. 

« Restez calme, n’ayez pas peur. Tout va bien se passer. Nous allons vous amener en sécurité à bord du bateau orange ». Tels sont les premiers mots entendus par les naufragés lorsque les canots de sauvetage de SOS MEDITERRANEE approchent une embarcation en détresse. Ils sont prononcés par le médiateur culturel, un membre de l’équipe de Médecins Sans Frontières (MSF). Véritable interface entre les personnes en détresse et les sauveteurs, son rôle est primordial. Lors de la première approche d’une embarcation en détresse, chaque mot et chaque geste comptent pour éviter qu’un mouvement de foule ne fasse chavirer le canot.

Le médiateur culturel accompagne les rescapés de la première minute du sauvetage jusqu’au débarquement dans un port sûr. Etudiante en sécurité internationale et résolution des conflits, Seraina parle couramment six langues. Elle conçoit son rôle comme « un pont » entre les équipes et les naufragés d’une part, et entre les équipes de MSF et SOS MEDITERRANEE d’autre part.

« La panique est contagieuse ! »

Dès la première rencontre visuelle avec une embarcation en détresse, elle essaie de discerner l’origine géographique et la langue des personnes afin d’établir une relation de confiance le plus rapidement possible. Personne d’autre ne communique avec les naufragés lors de la première approche. « Parfois, je ne sais pas, alors je demande ‘English ? Français ? Arabi ?’  Il faut discerner la langue dominante dès les premières secondes. C’est parfois un mélange de trois langues », raconte Seraina. Dans ce cas, pour ne pas perdre l’attention des personnes qui ne comprennent pas l’une des langues, le médiateur culturel doit faire des phrases très courtes et alterner les langues toutes les 5 secondes.

Seraina cherche d’abord et avant tout le calme avant de parler. Puis, elle se met debout sur le canot de sauvetage près de l’embarcation en détresse et donne le premier message : « nous sommes une organisation humanitaire. Nous allons vous amener à bord de notre bateau. Il y aura assez de place pour tout le monde. Vous êtes sains et saufs. N’ayez pas peur. Restez bien calmes. Nous allons vous donner des instructions. Il faudra bien les suivre pour que tout se passe bien. Nous allons venir vous chercher un par un ». Enfin, elle explique pourquoi et comment enfiler les gilets de sauvetage, prêts à être distribués.

Un message essentiel pour établir un lien de confiance duquel dépend en grande partie le bon déroulé de l’opération de sauvetage et, surtout, pour éviter la panique. « La panique est contagieuse. La situation peut très vite devenir critique, avec des gens qui tombent à l’eau, et qui peuvent se noyer et mourir ».

« J’ai très vite appris l’importance d’être constamment en contact avec les rescapés »

Le médiateur culturel représente l’équipe des marins-sauveteurs : son regard, son comportement, son calme, la lenteur de ses gestes, son sourire reflètent la confiance que les naufragés peuvent placer dans l’équipe. « Les personnes qui nous font face nous observent. Elles ont toutes appris à observer, à interpréter chaque fait et geste. C’est comme ça qu’elles ont survécu jusque-là. Elles voient si on a l’air inquiet, si on ne les regarde pas droit dans les yeux. Il s’est souvent passé des années avant qu’elles aient pu faire confiance à quelqu’un. Hocher de la tête, faire un signe de la main pour dire bonjour : cela fait une très grande différence pour rassurer les gens ».

Et si le contact est perdu ne serait-ce qu’une seconde avec les naufragés ? « Si je regarde vers le bas, les gens s’agitent, commencent à parler entre eux. J’ai très vite appris l’importance d’être constamment en contact avec eux. Leur parler pour les occuper, pour qu’ils évitent de penser à leur situation actuelle qui est très dangereuse ».

Le médiateur culturel doit s’adapter à la variété d’émotions auxquelles il fait face : incertitude, peur, panique, enthousiasme, excitation, joie. « Parfois l’une domine, mais c’est généralement un mélange. Il faut être prêt à tout ». Pour se préparer, Seraina doit « se stabiliser » elle-même, se maintenir dans « un calme d’acier ». « Je me rends compte de la responsabilité énorme qui m’incombe. Dans ces moments-là, si je laissais place à mes émotions, elles nuiraient au succès de l’opération. Il faut attendre que le sauvetage se termine pour les digérer ». Une fois le premier message passé et la situation stabilisée, le médiateur culturel ne communique plus verbalement avec les personnes en détresse. Il passe le relais au coordinateur adjoint des sauvetages qui leur donne les instructions pour débuter l’opération.

« Un petit ange qui s’avance vers nous »

Le médiateur culturel se transforme alors en véritable sauveteur. Grâce aux gestes de premiers secours répétés à bord, Seraina a sauvé plusieurs vies. Elle raconte que lors d’un sauvetage critique, elle a effectué un massage cardiaque à une personne retrouvée sans vie dans l’eau. A son retour à bord de l’Aquarius, alors qu’elle pensait que cela n’avait pas suffi : « l’infirmier s’est avancé vers moi, en me souriant. « Regarde ce monsieur là-bas, c’est celui qu’on a sorti de l’eau ». Je vois un homme par terre avec les yeux ouverts. Je le regarde, il me regarde et il cligne des yeux, comme pour me dire bonjour et merci. Je me suis rendu compte qu’il avait survécu ».

Seraina avoue avoir été touchée plusieurs fois par les mots des rescapés après un sauvetage à bord de l’Aquarius : « vous étiez comme un petit ange qui s’avançait vers nous. On se souviendra toujours de vous », lui a-t-on dit.

Comprendre les parcours, recueillir les témoignages, préparer à « l’après »

Après un sauvetage, le planning du médiateur culturel ne désemplit pas : il recueille des témoignages tout au long du trajet entre la zone de sauvetage et le port de débarquement pour comprendre le parcours des rescapés et les souffrances subies. « C’est le moment le plus difficile. Les témoignages malheureusement se ressemblent tous beaucoup. Parmi les centaines de personnes que j’ai interrogées pendant six mois à bord, une seule m’a dit qu’elle n’avait pas été torturée. J’ai appris plus tard qu’elle ne m’avait en fait pas tout dit ».

Ces informations sont primordiales car elles sont à la base du rôle de témoin que se donnent MSF et SOS MEDITERRANEE. « On espère que la communauté internationale agisse face à ces témoignages. » 

En fin de traversée, réunissant les rescapés en groupe, le médiateur culturel donne le dernier message qui les prépare à l’arrivée, à ce qu’on leur demandera quand ils arriveront sur le quai. Il les informe également des difficultés qui les attendent après la parenthèse de sérénité à bord de l’Aquarius. Ce moment est important : pour la première fois depuis longtemps, les rescapés se projettent sur ce qui les attend.

Après six mois d’une rare intensité, Seraina a dû se résoudre à débarquer. Lorsqu’elle en parle autour d’elle, elle décrit une « indignation qui a grandi avec le temps, contre le manque d’empathie » envers les histoires individuelles, toutes uniques et semblables à la fois, qu’elle a tant de fois écoutées… en français, en anglais ou en arabe.

Propos recueillis par Laura Garel

Photo : Anthony Jean / SOS MEDITERRANEE

Source http://www.sosmediterranee.fr/journal-de-bord/mediateur-culturel-trait-d-union-entre-sauveteurs-et-rescapes

Lesbos des réfugiés attaqués par un groupe d’extrême droite

A Lesbos (Grèce) 35 réfugiés blessés lors d’une violente attaque par un groupe d’extrême droite

La nuit de la honte à la place Sappho de Mytilène, à Lesbos.

Pendant toute la nuit du dimanche au lundi un groupe d’extrême droite avait attaqué des réfugiés, femmes et enfants compris, principalement des afghans qui occupaient la place Sappho pour protester contre la lenteur des procédures administratives et  contre leur confinement prolongé sur l’île.

Un  groupe d’extrême droite composé principalement des membres du Mouvement Patriotique de Lesbos et de l’Aube Dorée (néonazis grecs), avait attaqué les familles de réfugiés, femmes et enfants de bas âge compris, en leur lançant de fusées de détresse, des pétards, de pierres et de pavés.   En hurlant « Brulez-les vifs », « , « Jetez-les à la mer », « Ils veulent islamiser le pays », le groupe déchaîné balançait contre les réfugiés même des bancs arrachés de la place. Les réfugiés avaient formés un groupe compact, en encerclant d’une triple chaîne humaine les femmes et les enfants qu’ils essayaient de protéger de pierres et des fusées, par des bâches improvisées. Plusieurs solidaires sont accourus sur place pour leur porter secours. La violence des attaques était telle, que, selon le témoignage d’un témoin oculaire, même les secouristes n’osaient pas s’approcher pour évacuer les blessés, car ils étaient pris à partie par les attaquants, de sorte que c’était les solidaires qui transportaient les blessés sur des brancards improvisés vers les ambulances.

Selon le reportage du quotidien grec Journal des Rédacteurs (Efimerida tôn Syntaktôn)  la police s’est interposée, mais sans  procéder à l’interpellation et l’arrestation du groupe d’extrême droite et sans faire le nécessaire pour le dissoudre à temps leur regroupement. Les agents  de police auraient eu comme  consigne d’encercler les réfugiés sans pour autant arrêter les attaquants.

Après des heures de heurt, le groupe d’extrême droite s’en pris à n’importe quel réfugié qu’il croisait dans d’autre quartier en ville.  Bilan incertain, selon le Journal des Rédacteurs, probablement quelques 35 blessés dont certains graves, parmi les réfugiés.

Tôt le matin, vers 5.30 la police a évacué la place obligeant les réfugiés de monter à des cars qui les ont conduits au camp de Moria. Ceux d’entre eux qui ont refusé de  retourner au hot-spot de Moria,  ont été arrêtés : il s’agirait de 120 réfugiés et de deux ressortissants grecs, faisant probablement partie du groupe de solidaires qui ont accouru sur place pour assister les réfugiés.

La place Sappho est vide, les réfugiés rentrés au hot-spot ou pire en prison, le groupe d’extrême droite continue à nuire en toute impunité. L’Europe est sauve….

 Jusqu’à présent, la police n’a pas détenu un seul attaquant, bien que ce soit une communauté plutôt petite, où tout le monde connaît tout le monde.

Source http://www.efsyn.gr/arthro/astynomiki-epiheirisi-meta-ta-epeisodia-akrodexion

Au Col de l’Échelle, impunité pour les identitaires

Au Col de l’Échelle, impunité pour les identitaires d’un côté, prison ou tabassage pour les soutiens pacifiques des migrants de l’autre… Jusqu’où iront le gouvernement, la police et la justice pour décourager la solidarité ?

Alors que des citoyen·ne·s, associations et collectifs locaux se mobilisent depuis de longs mois pour organiser l’accueil de personnes exilées sur leur territoire face aux pratiques irrégulières des forces de l’ordre, les évènements de ce week-end à Briançon montrent bien que le délit de solidarité a encore de beaux jours devant lui.

Dans le cadre d’une mise en scène médiatique au col de l’Échelle à la frontière franco-italienne, le groupe d’extrême-droite Génération Identitaire a bloqué la frontière entre le 21 et 22 avril, étalant des messages haineux en pleine montagne, barrant la route à des personnes épuisées par un trajet en montagne, les mettant ainsi potentiellement en danger, puis relayant les photographies de leurs faits d’armes sur les réseaux sociaux à grand renfort de commentaires xénophobes. Ainsi, à l’instar de ce qui s’est passé lors de l’action organisée en Méditerranée à l’été 2017 pour saborder les sauvetages de personnes migrantes, des militant⋅e⋅s d’extrême droite de plusieurs pays européens sont venues bloquer symboliquement la frontière sans que les forces de l’ordre interviennent ou que les autorités condamnent clairement cette action, se bornant à évoquer des « gesticulations ».

Le dimanche 22 avril, une manifestation pacifique composée de plus de 150 personnes exilées et de leurs soutiens est partie de Clavière en Italie pour rejoindre Briançon à pieds et ainsi protester contre la militarisation de la frontière et la non prise en charge des personnes mineures ou en demande d’asile par les autorités françaises. Les organisations locales et régionales alertent depuis 2015 sur les atteintes systématiques aux droits des personnes migrantes à la frontière franco-italienne, de Menton à Briançon sans qu’elles soient entendues par les responsables politiques.

A l’issue de cette manifestation spontanée, six personnes ont été interpellées par les forces de l’ordre. Trois ont finalement été relâchées mais trois autres sont toujours en détention provisoire, enfermées à Gap et à Marseille. Poursuivies pour « avoir par aide directe ou indirecte, facilité ou tenté de faciliter l’entrée irrégulière en France de plus d’une vingtaine d’étrangers, avec cette circonstance que les faits ont été commis en bande organisée », elles risquent selon la loi française jusqu’à 10 ans de prison assortie de 750 000 euros d’amende. Le jugement ayant été renvoyé au 31 mai 2018, ces trois personnes originaires de Suisse et d’Italie resteront donc potentiellement enfermées jusqu’à cette date.

En marge de la manifestation, cinq participant·e·s attablé·e·s à la terrasse de l’Hôtel de la Gare à Briançon vont faire l’objet d’un contrôle d’identité. Les policiers demandent à l’une des personnes de les suivre, refusant d’en donner la raison. « On va pas te le répéter deux fois » lance un policier. La personne sort son téléphone pour prévenir un avocat, les policiers le lui arrachent et la projettent au sol, lui sautent dessus. Face contre terre, coups de matraque, clef de bras, coup de genoux, pouces enfoncés dans les yeux, étranglement, la personne est finalement traînée par les pieds dans les escaliers, toujours face contre terre, puis jetée sur le goudron deux mètres plus loin. Alertés par les cris, des gens arrivent, les policiers gazent tout le monde, y compris la personne gisant au sol, visage tuméfié, en sang, la mâchoire gonflée, respirant difficilement et aveuglée par les gaz lacrymogènes. Souffrant de multiples contusions, d’un énorme hématome à la mâchoire, d’une entorse aux cervicales, et de douleur au niveau de la trachée, cette victime de la violence policière est amenée aux urgences. Résultat : 10 jours d’interdiction totale de travail.

Il est inadmissible que ces personnes soient actuellement privées de liberté ou violentées alors qu’elles ont été interpellées dans le cadre d’une manifestation pacifique. En outre, ces militant·e·s de la solidarité ont participé à de nombreuses opérations de sauvetage en montagne, se rendant juste « coupables » d’assistance à personne en danger. Un cas de plus de dissuasion de la solidarité.

Le collectif Délinquants solidaires s’inquiète du peu de cas qui est fait par les pouvoirs publics de l’expression sans complexes d’une xénophobie et du blocage des frontières par des militant·e·s d’extrême-droite, qui a pour conséquences immédiates la mise en danger des personnes migrantes parmi lesquels des mineur·e·s, ainsi que le déni pur et simple du droit d’asile, qui est encore une obligation conventionnelle de la France.

Le collectif Délinquants solidaires condamne fermement la détention de soutiens des exilé⋅e⋅s et appelle à leur libération immédiate. Par ailleurs, il répète que la solidarité et l’accueil sur nos territoires manifestés par des milliers de citoyens et citoyennes doivent être encouragés au lieu d’être systématiquement dénigrés ou réprimés. Si les député·e·s ont raté l’occasion d’abroger le délit de solidarité, nous restons mobilisé·e·s et solidaires des personnes exilées pour réclamer un accès aux droits effectifs pour toutes et tous et le droit de s’organiser collectivement.

26 avril 2018
source Le Gisti (Groupe d’information et de soutien des immigré·e·s) http://gisti.org/spip.php?article5902

La Grèce maintient le confinement des demandeurs d’asile sur les îles

AFP 23/04/2018

Le gouvernement grec va maintenir le confinement sur les îles de la mer Égée des demandeurs d’asile arrivés de Turquie, en contournant une décision de justice qui levait cette mesure, a indiqué lundi le ministère à la politique migratoire.

Ce maintien du confinement est permis par une nouvelle décision du service d’asile, justifiant cette mesure par un autre motif que celui retoqué par la justice mercredi, a précisé le ministère.

« Les demandeurs d’asile arrivant sur les îles se verront remettre une note précisant qu’ils doivent rester sur place pour faciliter le suivi de leur demande », a précisé à l’AFP une source du ministère.

A la suite d’un recours du Conseil grec des réfugiés, le Conseil d’État, plus haute juridiction administrative, s’était prononcé mercredi contre les limitations à la libre circulation imposées aux arrivants sur les îles grecques depuis l’entrée en vigueur en mars 2016 du pacte UE-Turquie visant à couper la route migratoire en Égée.

Mais le Conseil s’était prononcé en jugeant infondée la justification alors apportée, soit des « motifs sérieux d’intérêt public ». Sa décision ne porte donc pas sur la nouvelle règle mise en place par le service d’asile, selon le ministère.

Le Conseil grec des réfugiés a dénoncé un « coup porté à l’État de droit », mettant en cause des pressions exercées par la Commission européenne. Le maintien du confinement « va continuer à exposer les réfugiés à des souffrances » et à alimenter les tensions avec les habitants des îles, a-t-il déploré dans un communiqué, se réservant de saisir à nouveau la justice.

La décision du Conseil d’Etat avait été salué par les ONG de défense des droits de l’homme, dont Amnesty international, qui s’alarment depuis des mois des conditions de vie des quelques 15.000 demandeurs d’asile parqués sur les îles.

L’annonce du gouvernement intervient alors que plus d’une dizaine de migrants et réfugiés ont été blessés dans la nuit de dimanche à lundi sur l’île de Lesbos lors d’affrontements avec des militants d’extrême droite. Ces derniers avaient attaqué près de 200 Afghans campant devant la place centrale de Mytilène, chef-lieu de l’île, depuis mardi dernier pour protester contre leur confinement

Loi immigration en France : ils ont osé voter la rétention des enfants

Loi immigration: les députés LREM refusent d’interdire la rétention des enfants

Par Mathilde Mathieu

Les députés LREM ont voté, samedi 21 avril, le doublement de la durée légale de rétention des sans-papiers. Ils ont aussi repoussé tous les amendements visant à interdire l’enfermement des enfants, en annonçant un groupe de travail.

En prime, elle pouvait suivre à distance les « exploits » d’une centaine de militants d’extrême droite qui se sont improvisés gardes-frontière pour tout le week-end dans les Alpes, où ils ont déroulé 500 mètres de grillage dans la neige pour repousser les migrants, qui ont souvent risqué leur vie dix fois pour arriver jusque-là.

En guise d’anniversaire, surtout, les députés de la majorité ont voté samedi la mesure « phare » du texte de Gérard Collomb, qui allonge de 45 à 90 jours la durée légale d’enfermement des étrangers en centre de rétention administrative (les CRA), sorte de « sas » où les sans-papiers sont confinés sur décision des préfets en vue d’un embarquement en avion plus ou moins rapide, bien souvent hypothétique (absence de « laissez-passer » du pays d’origine, libération par un juge des libertés, etc.). Le plafond légal sera ainsi 7,5 fois plus long qu’en avril 2002.

Plus symbolique encore ? Samedi, les bancs LREM ont renoncé, sous la pression du ministre de l’intérieur, à prohiber le placement d’enfants dans ces centres de rétention, rejetant trois amendements successifs venus de leur gauche (PS, France insoumise et PCF), qui prétendaient en finir avec cette pratique en augmentation.

Les suppliques n’ont pourtant pas manqué. « Monsieur le ministre, trois mots : pas les enfants ! Plus les enfants ! a lancé Hervé Saulignac (PS). Ils sont par essence innocents. Un centre de rétention, c’est parfois des barbelés, des caméras, du mobilier scellé, des verrous, un univers carcéral qu’on réserve aux individus dangereux. » Du côté des communistes, Elsa Faucillon a interpellé tous les bancs : « C’est pour nous un moment grave, insupportable. Je vous en conjure, votez contre ! »

L’an dernier, sur 26 000 étrangers placés en CRA (hors outre-mer), le Défenseur des droits a encore comptabilisé 134 familles avec 275 enfants, un chiffre en augmentation – sachant qu’un mineur isolé n’est jamais enfermé. Dans une décision récente, il a surtout demandé aux autorités « de faire évoluer la législation pour proscrire [la rétention d’enfants] dans toutes les circonstances », avec une « préoccupation » particulière pour Mayotte où plus de 4 000 mineurs (venus des Comores) ont été privés de liberté l’an dernier.

« Ne tournons pas autour du pot, a résumé Jean-Luc Mélenchon, pour sa première prise de parole de la semaine sur le projet de loi. Nous sommes ici un certain nombre à être absolument, totalement, radicalement opposés à la rétention des enfants. (…) Nous allons être condamné à tour de bras par toutes les instances internationales ! »

À plusieurs reprises déjà (encore cinq fois en 2016), la France a en effet été condamnée par la Cour européenne des droits de l’homme, qui n’a certes pas sanctionné la rétention d’enfants en elle-même. Mais elle a constaté que « les conditions inhérentes à ce type de structures [avaient] un effet anxiogène sur les enfants en bas âge », et jugé que « seul un placement de brève durée » pouvait « être compatible » avec l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme, qui prohibe les « traitements inhumains et dégradants ». À la clé, des milliers d’euros de préjudice moral versés aux familles (tchétchènes, arméniennes, etc.).

Samedi, le PS était toutefois mal à l’aise pour donner des leçons à La République en marche. Alors que le candidat Hollande s’était engagé en 2011 à mettre fin à la rétention des enfants pour privilégier l’assignation à résidence, une circulaire de 2012 de Manuel Valls l’a seulement encadrée, provoquant certes une chute momentanée des statistiques, mais qui ont vite remonté.

En 2016, surtout, le gouvernement Valls a bel et bien inscrit, cette fois dans la loi, la possibilité de placer des familles en CRA, non seulement lorsqu’elles ont fui une première fois (ou fait échouer un embarquement), mais aussi lorsque les préfectures estiment qu’une courte rétention (« 48 heures avant un départ programmé ») sera moins brutale qu’une interpellation de la famille la nuit du départ. En ce 21 avril 2018, les socialistes ont trouvé la parade : haro sur Manuel Valls.

« Le premier ministre de l’époque, que vous avez longuement soutenu, a recouru allègrement à toutes les dérogations existantes ! » a ainsi lancé Valérie Rabault (PS), à l’adresse des bancs LREM. « Nous pouvons aujourd’hui les uns et les autres réparer ce qui ne l’a pas été jusqu’ici », a pour sa part déclaré Olivier Faure, le patron du PS.

Côté LREM, la quasi-totalité du groupe souhaitait arriver, il y a encore quelques semaines, à une prohibition. Le responsable du texte lui-même, Florent Boudié, nous confiait sa volonté de « l’interdire en tout cas en métropole », pour contourner les difficultés propres à Mayotte. Samedi, changement de pied : « Pourrions-nous nous permettre d’interdire la rétention des mineurs sur le territoire métropolitain et la maintenir sur les territoires ultramarins ? Au nom de quelle égalité républicaine ? » Un groupe de travail va plutôt se réunir, au sein du groupe LREM, pour plancher sur une future éventuelle proposition de loi… Au sein de la majorité, on explique réfléchir, entre autres voies, à des bâtiments dédiés à l’accueil des familles, en dehors des CRA mais tenus par les forces de l’ordre, à un plafonnement restreint du nombre de jours, etc

C’est qu’entre-temps, Gérard Collomb a dégainé quelques promesses : « Nous allons aménager de manière prioritaire certains CRA dans lesquels seront placées les familles » (c’est déjà le cas), « Nous investirons dans les conditions matérielles et sociales », « Nous ferons en sorte que la durée soit la plus brève possible », etc.

Mais sur le fond, le ministre en a fait un enjeu d’« efficacité ». « Si même les personnes qui fuient le droit, on ne peut pas les expulser », celles notamment « qui se sont déjà soustraites à une procédure d’éloignement », « alors on n’expulsera plus personne, a-t-il prévenu. La situation deviendra inextricable ». Son obsession ? Les familles albanaises et géorgiennes, autorisées à venir sans visa pendant trois mois, qui obtiennent rarement une protection, mais « font une demande d’asile à peine arrivées ». Et de glisser : « En Allemagne, la situation de ces familles est examinée en moins d’une semaine, nous devons nous aligner… »

À l’arrivée, seules trois députées LREM (dont Delphine Bagarry) et trois Modem ont voté les amendements d’interdiction, auxquels on peut ajouter onze abstentionnistes, tandis que le gros des troupes suivait Gérard Collomb, en compagnie de 70 LR, 2 UDI et 6 frontistes, dont Marine Le Pen.

Sur l’allongement du délai de rétention, le ministre n’a guère rencontré plus de résistance dans son camp. « La problématique qui existe est que nous ne revoyons pratiquement personne », a plaidé le ministre, rappelant que moins de 20 % des « obligations de quitter le territoire français » (OQTF) sont exécutées. Même une fois placées en CRA, 40 % « seulement » des étrangers sont renvoyés, notamment parce qu’ils restent au sol tant que leur consulat n’a pas signé un « laissez-passer ». Or celui-ci n’arrive parfois jamais, pour cause de lenteurs ou d’obstructions administratives dans les pays d’origine.

Mais comme Mediapart l’a déjà expliqué (voir notre analyse), une fois passés douze jours (durée moyenne de rétention), la probabilité de voir arriver des laissez-passer chute drastiquement. En 2017, 635 personnes seulement ont été libérées au bout de 45 jours en CRA, faute de laissez-passer. Le passage à 90 jours prévu par Gérard Collomb a paru tellement peu efficace au groupe LR que même ce dernier s’est abstenu, avec le FN. La majorité l’aura donc adoptée toute seule.

Source : https://www.mediapart.fr/journal/france/220418/loi-immigration-les-deputes-lrem-refusent-d-interdire-la-retention-des-enfants

SOS Méditerranée : Sauveteurs et témoins en Méditerranée

Chers amis,

Le contexte des opérations en mer est toujours plus complexe avec notamment une confusion grandissante dans la coordination des sauvetages. Comme ce fut le cas pour nos dernières opérations en mer où 292 personnes ont été accueillies à bord de l’Aquarius, les ONG sont désormais contraintes de négocier chaque sauvetage de personnes en détresse, blessées, épuisées, en pleine mer.

Alors que les moyens en mer pour sauver des vies sont insuffisants, cette confusion tend à retarder les opérations, mettant chaque fois en péril la vie de centaines de personnes. A la confusion s’ajoute l’horrible sort réservé aux embarcations interceptées par les garde-côtes libyens qui sont reconduites en Libye et non vers un port « sûr » comme le prévoit la loi.

SOS MEDITERRANEE, association européenne et citoyenne, intervient avec son navire ambulance, l’Aquarius, pour secourir celles et ceux qui sont en danger de mort en Méditerranée dans le respect du droit maritime international et des principes d’humanité et de solidarité, qui ont fondé l’Europe, et sont l’ADN des gens de la mer.

Nous demandons instamment aux plus hautes autorités européennes et internationales de clarifier le cadre d’intervention des différents acteurs dans cette zone maritime. Si ce cadre a changé récemment nous estimons que nous, sauveteurs et citoyens européens, devrions en être les premiers informés.

Sauveteurs et témoins : notre présence est plus que jamais nécessaire en Méditerranée.

Merci d’être à nos côtés.

Francis Vallat
Président de SOS MEDITERRANEE France

Journal de Bord

Interceptions par les garde-côtes libyens : le déni des valeurs d’humanité et de solidarité

Présent sans interruption en Méditerranée pendant tout l’hiver, l’Aquarius a été témoin de la recrudescence des interceptions d’embarcation en détresse dans les eaux internationales par les garde-côtes libyens. Ces interceptions s’accompagnent souvent d’une confusion totale sur les transferts de responsabilités des opérations de sauvetage, augmentant leur dangerosité. Retour sur deux récentes opérations à haut risque, dans les eaux internationales, en pleine mer Méditerranée.

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Le collectif et le convoi solidaire vers la Grèce de mai 2018

Convoi solidaire vers la Grèce de mai 2018

Un convoyeur de Grenoble participera au convoi

Tout comme pour le convoi de mars et novembre 2017 notre collectif organise sur Grenoble une collecte des fournitures qui seront transportées en Grèce par Christophe qui participera à ce convoi organisé par le collectif Anepos.

Rappel des besoins et modalités de récupération des fournitures

Les besoins sont urgents en :

Fournitures bébés : lait infantile en poudre (tous âges) petits pots, mixers de type babycook, soins bébés, sérum, vitamines, couches ( surtout 3, 4 et 5)

Jouets : petites tailles tels que figurines, ballons, cordes à sauter, légos, jeu d’échecs ( ni peluches ni encombrants),

Produits d’hygiène et paramédicaux : gels douches, protections périodiques, dentifrice, brosses à dents, lessives, pansements, désinfectant, chevillères/genouillères, ( ni attelles, ni médicaments) Biafine, Cicatryl,

Base alimentaire : légumes secs, fruits secs, biscuits, céréales, pâtes,riz, lentilles, thé, café, autres. La date de péremption minimale recommandée est juin 2018.

et n’oubliez pas des messages de soutien : avec dessins, photos, affiches,autocollants, infos sur vos luttes….des confiseries fermées et non fragiles peuvent être ajoutées.

Matériel spécifique pour la résistance : photocopieuses( en état de marche) ramettes papiers, ordinateurs, appareils photos/vidéos ( pour les contre- médias), disjoncteurs, dominos, câbles électrique 3G ( 1,5mm et 2,5mm), outils de bricolage.

Important : la place dans les fourgons n’étant pas extensible, merci de vous en tenir à cette liste.

Vous pouvez aussi  envoyer des chèques libellés à l’ordre d’ANEPOS en indiquant au dos « Convoi Isère-Savoie de mai 2018 »

soit directement à l’adresse suivante : ANEPOS « Action Solidarité Grèce » BP10 81540 Sorèze,

soit par l’intermédiaire du collectif de Grenoble lors des rendez-vous  ou dans la boite aux lettres (n° 86) d’Attac 38 à la MDA rue Berthe de Boissieux à Grenoble.

Rendez-vous pour la récupération des fournitures sur Grenoble :

le samedi 21 avril de 15h à 17 h Rue Félix Poulat à Grenoble (barnum rouge à côté de l’église)

le lundi 23 avril à partir de 19h avant la projection du film l’Amour et la Révolution à l’Espace Aragon 19 Boulevard Jules Ferry 38190 Villard-Bonnot

le mercredi 25 avril de 17h à 19h devant le MIN (marché de gros) 117 rue des Alliés à Grenoble

le mercredi 2 mai de 17h à 19h devant le MIN (marché de gros) 117 rue des Alliés à Grenoble.

L’appel de novembre d’Anepos qui reste d’actualité

Pas question de baisser les bras,
pas question de laisser faire…

En soutenant notre convergence de luttes, par-delà les frontières, entre mouvements sociaux, vous épaulez les initiatives solidaires autogérées qui, en Grèce, font face au durcissement des politiques austéritaires (forte hausse de la mortalité infantile, baisse de 50% de la retraite complémentaire pour les plus pauvres, expulsion de milliers de personnes de leur logement, nombreuses familles qui ne survivent que grâce à la solidarité) et au drame de la crise des réfugiés (dont beaucoup d’enfants, parfois orphelins, qui ont traversé la mer Égée et ont échappé aux camps indignes et inhumains).

Notre action n’est pas humanitaire, mais politique et solidaire, sans intermédiaire : nous soutenons directement nos camarades grecs et les encourageons à continuer à résister et à s’entraider. La liste des principaux besoins est à votre disposition, préparée avec eux pour des livraisons à Exarcheia (Athènes), Thessalonique et plusieurs îles. A vous de participer, si vous le désirez et comme vous le désirez.

Pas question de baisser les bras, ni ici, ni là-bas. Pas question de laisser faire. Pas question de rester chacun dans notre coin d’Europe face à la violence du pouvoir qui nous opprime, détruit le bien commun et nous vole nos vies. Pas question de subir sans agir de toutes les façons possibles : insoumission, résistance, création, solidarité…

Cette action n’est peut-être pas grand-chose face à l’ampleur du désastre, mais elle encourage à poursuivre nos luttes qui convergent vers un même but : reprendre nos vies en mains et montrer ce dont nous sommes capables ensemble.

Hauts les cœurs !

Le collectif artistique et solidaire Anepos
Les conducteurs des fourgons des convois
Les organisateurs de la collecte

Compte rendu des convois de mars et novembre 2017 http://lamouretlarevolution.net/spip.php?rubrique15

L’UE et l’aide à la Turquie contre les réfugiés

L’Europe paye des équipements militaires à la Turquie pour refouler les réfugiés

Par John Hansen (Politiken), Emilie Ekeberg (Danwatch) et Sebnem Arsu (The Black Sea)

Mediapart et l’EIC révèlent que l’argent de l’Union européenne a permis à la Turquie de s’équiper en véhicules blindés afin d’empêcher le passage de réfugiés à sa frontière avec la Syrie. Cette opération pourrait avoir causé de nombreuses victimes parmi les Syriens tentant de fuir la guerre, alors que la prise d’Afrin par l’armée turque va pousser encore des milliers de personnes sur la route de l’exil

Enquête menée par Politiken et Danwatch avec Mediapart et ses partenaires du réseau European Investigative Collaborations (EIC).– Quand les soldats turcs ont ouvert le feu, Ibrahim Khaled a pris sa mère par la main et s’est mis à courir. Il a entendu le cliquetis des armes à feu, entendu les cris des réfugiés frappés par les balles, et a été projeté à terre. Khaled ne s’est pas retourné. « J’ai senti que si je m’arrêtais là, je serais tué ou arrêté », dit-il.

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Pendant des heures, Khaled et sa mère ont couru dans la direction que le passeur leur avait indiquée. Ils ont marché à travers des champs d’oliviers, ont rampé sur des pierres jusqu’à atteindre un village turc. De la soixantaine de réfugiés qui avaient quitté le camp près de Darkush, dans la province syrienne d’Idlib, seule une poignée a traversé la frontière. Khaled ne sait pas ce qui est arrivé aux autres. Ils sont probablement morts ou de retour en Syrie, pense-t-il. « Nous avons eu de la chance. »Khaled est assis dans un appartement nouvellement construit en périphérie de Mersin, dans le sud-est de la Turquie, où lui et sa mère ont trouvé refuge après leur fuite à l’automne dernier. Il porte un jean déchiqueté et un pull qu’un voisin lui a donnés. Ses yeux sont fatigués, son front est plissé de rides. Khaled s’est longtemps posé la question de savoir s’il devait parler avec des journalistes des violences à la frontière turco-syrienne. Il a peur que les autorités turques ne se vengent sur lui. Dernièrement, il a accepté de nous accorder une interview à la condition que son nom soit changé. « Je veux que le monde sache ce qui nous arrive à nous, Syriens », dit-il.

Des réfugiés syriens qui attendent de passer en Turquie, près de la frontière, le 7 février 2016. © Reuters Des réfugiés syriens qui attendent de passer en Turquie, près de la frontière, le 7 février 2016. © Reuters

La guerre civile en Syrie entre dans sa huitième année. Plus de 350 000 personnes ont été tuées à ce jour, des millions ont été déplacées. Et bien qu’il n’y ait toujours pas de paix en vue, les pays voisins de la Syrie ont fermé les voies d’échappatoire. Le Liban, la Jordanie et la Turquie, qui accueillent ensemble plus de cinq millions de Syriens, refusent d’accepter davantage de demandeurs d’asile. La Turquie a construit sur sa frontière avec la Syrie un mur de trois mètres de haut et long de plusieurs centaines de kilomètres.

Khaled raconte que des soldats turcs ont ouvert arbitrairement le feu sur des réfugiés. Les détails de son témoignage sont difficiles à vérifier, mais ils sont cohérents et coïncident avec les déclarations de plus d’une douzaine de témoins avec lesquels le Spiegel s’est entretenu. L’ONG Human Rights Watch a révélé des cas similaires début février : des soldats turcs ont forcé des réfugiés à retourner en Syrie et ont tiré de manière indiscriminée, selon l’organisation.

Il y a précisément deux ans, le 18 mars 2016, l’Union européenne et Ankara concluaient un accord selon lequel les Européens allaient verser 3 milliards d’euros à la Turquie en échange du maintien des réfugiés sur son sol (en attendant un deuxième volet de 3 milliards d’euros). Les dirigeants européens ont prétendu que cet accord avait permis de contenir la « crise des réfugiés ». En réalité, la crise s’est simplement déplacée. À présent, les gens meurent moins fréquemment dans la mer Égée, où le nombre d’embarcations traversant vers la Grèce s’est réduit drastiquement une fois l’accord passé. Mais ils meurent sur la frontière turco-syrienne.

Officiellement, les milliards de l’Europe servent exclusivement à aider la Turquie à gérer les réfugiés sur son sol et à les empêcher d’entrer en Europe. C’est faux. Mediapart et ses partenaires du réseau European Investigative Collaborations (EIC) révèlent que l’Union européenne a payé à la Turquie pour 83 millions d’euros de véhicules militaires et d’équipements de surveillance afin de traquer les réfugiés. Y compris à la frontière turco-syrienne, pourtant officiellement ouverte.

Les journalistes de l’EIC se sont plongés dans les centaines de contrats européens. L’un d’entre eux montre que l’Union européenne a financé à 75 % l’achat par la Turquie de 82 véhicules blindés Cobra II, dont le coût total est de 47,5 millions d’euros. Ces engins, équipés de périscopes, peuvent patrouiller le long du mur côté turc tout en localisant les réfugiés approchant de l’autre côté. Produits par Otokar, l’un des plus gros industriels turcs de l’armement, ces véhicules ont été livrés aux forces armées turques au printemps 2017.

Le Cobra II, de l'industriel turc Otokar. 82 de ces véhicules blindés ont été payés par l'UE, qui prétend pourtant ne pas financer d'équipements militaires à la Turquie. © Otokar Le Cobra II, de l’industriel turc Otokar. 82 de ces véhicules blindés ont été payés par l’UE, qui prétend pourtant ne pas financer d’équipements militaires à la Turquie. © Otokar

Ils font aujourd’hui partie de l’infrastructure de surveillance de ce qui va devenir bientôt le troisième mur le plus long du monde : 900 km de béton équipés de drones, de caméras thermiques, et de tours de tir télécommandées et automatisées de manière « intelligente ». Des haut-parleurs diffusent des messages, avertissant les gens, en turc et en arabe, de ne pas s’approcher davantage. De l’artillerie lourde ouvre le feu si ces avertissements sont ignorés. Les caméras thermiques sont capables, par temps clair, de repérer trois personnes debout d’une taille de 1,80 m à une distance de dix kilomètres. En d’autres termes, l’équipement financé par l’Union européenne aide à repérer des réfugiés qui essaient de traverser le mur frontalier et risquent d’être touchés par des tirs… et tués.

Le mur construit par Ankara maintient par ailleurs des centaines de milliers de réfugiés syriens coincés dans une zone de guerre. On estime que plus de 200 000 personnes ont été déplacées dans le nord de la Syrie depuis la mi-décembre, et il faut s’attendre à ce que la prise par l’armée turque, ces derniers jours, de la ville kurde d’Afrin provoque de nouveaux flux de réfugiés.

La Turquie assure que la frontière est toujours ouverte pour les demandeurs d’asile, ce qui est contredit par différentes sources turques et syriennes proches de la frontière. L’Institut international pour les études stratégiques (IISS) notait déjà en juin 2017 que la Turquie avait rendu « pratiquement impossible pour les réfugiés syriens le passage de la frontière légalement ». « La Turquie assure que sa politique de la “porte ouverte” est toujours en vigueur, mais dans la réalité, elle est presque fermée », estimait alors l’institut.

Depuis septembre dernier, 42 civils ont été tués alors qu’ils tentaient de passer de Syrie en Turquie, selon Rami Abdulrahman, directeur de l’Observatoire syrien des droits de l’homme. Le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (UNHCR) confirme qu’il est devenu pratiquement impossible de traverser la frontière (excepté pour les personnes gravement blessées ou malades), alors que le nombre de réfugiés fuyant la Syrie est en hausse.

On assiste à une violation des droits humains, selon Thomas Gammeltoft-Hansen, directeur de recherche à l’Institut danois des droits de l’homme et du droit humanitaire Raoul-Wallenberg. « Si des balles mortelles sont tirées sur des réfugiés essayant de traverser la frontière, c’est une violation pure et simple des droits humains, rappelle-t-il. Si le mur frontalier enlève aux Syriens toute possibilité de demander l’asile, c’est une autre violation du droit international, en particulier du principe de non-refoulement. »

La fourniture de matériel à la Turquie par l’Union européenne pourrait rendre cette dernière complice de violation des droits humains à la frontière turco-syrienne. « S’ils savent que l’équipement est utilisé d’une façon qui viole les droits des réfugiés, les membres de l’UE sont par principe complices », ajoute Thomas Gammeltoft-Hansen.

309 millions d’euros côté français

Interrogée par l’EIC, la Commission européenne nous a répondu que « l’Union européenne ne fournit pas d’équipements militaires ou létaux à la Turquie ». Les Cobra II sont pourtant bien des engins militaires. La Commission ajoute que l’accord avec la Turquie prévoit que les véhicules soient « exclusivement affectés à la surveillance des frontières et que toute modification ou changement d’affectation des équipements requiert l’autorisation écrite de la commission ».

Sauf que Bruxelles n’a pas les moyens de contrôler ce que fait le régime autoritaire d’Erdogan de ses armes. Plusieurs experts des droits de l’homme craignent d’ailleurs que la Turquie n’utilise cet équipement financé par les fonds européens pour les opérations militaires menées actuellement dans les zones kurdes de Syrie, ou pour la répression visant sa propre population. Des photos de l’invasion par l’armée turque de la province kurde d’Afrin depuis fin janvier montrent que des véhicules Cobra II ont été utilisés. Mais au lieu de périscopes avec des caméras thermosensibles, ils ont été équipés d’armes.

Le caractère problématique des financements européens ne se limite pas à la frontière turco-syrienne. Pour aider la Turquie à surveiller sa portion de frontière terrestre avec la Grèce, l’Union européenne a financé des véhicules militaires plus monstrueux encore que les Cobra II, selon l’enquête de l’EIC.

En mai 2017, Aselsan, une société détenue à 84 % par l’armée turque, a remporté un contrat à hauteur de 30 millions d’euros avec l’Union européenne pour fournir à la Turquie 50 véhicules pour patrouiller à la frontière grecque, dont 20 sont dotés d’un blindage extrêmement épais afin de protéger les véhicules des mines et grenades. Selon les documents européens consultés par l’EIC, ces engins sont des contributions de l’Europe à « la prévention de l’immigration illégale, du trafic humain, des crimes de passage des frontières [« cross-border crimes »], et du système des passeurs ».

L’un des industriels qui a étudié l’appel d’offres s’est retrouvé perplexe devant la disproportion apparente entre l’objectif affiché et les spécifications techniques de ces véhicules, « clairement exagérées » pour des engins censés être utilisés à la frontière de la Turquie avec l’Union européenne. Mais l’UE a été ferme : le blindage lourd est absolument requis, dit-elle dans sa réponse, sans en expliquer les raisons.

Le monstrueux véhicule militaire turc Hizir, dont 50 exemplaires ont été commandés par l'UE pour traquer les réfugiés à la frontière gréco-turque. © Katmerciler Le monstrueux véhicule militaire turc Hizir, dont 50 exemplaires ont été commandés par l’UE pour traquer les réfugiés à la frontière gréco-turque. © Katmerciler

On comprend que Bruxelles soit très discret sur la question. Aselsan, qui a remporté l’appel d’offres, ne fournira en réalité que l’équipement électronique. Selon l’enquête de l’EIC, les véhicules sont des Hizir, d’impressionnants engins de guerre (notre photo ci-dessus) fabriqués par Katmerciler, un industriel appartenant à un ancien député de l’AKP, le parti de Recep Tayyip Erdogan. Le président turc est un grand fan de l’Hizir, dont il a dévoilé le prototype en novembre 2016 lors d’un salon militaire, six mois avant que l’UE n’en finance 50 exemplaires.

L’appel d’offres de Bruxelles stipulait pourtant que les véhicules devaient avoir été mis sur le marché depuis un an. Ce n’est pourtant pas le cas des Hizir, dont les premiers exemplaires sont récemment sortis de l’usine, et qui sont toujours en cours de test avant leur livraison prochaine à l’armée turque.

Lorsque, en 2016, l’Union européenne a promis à Erdogan 3 milliards d’euros en échange de son accord pour reprendre tous les réfugiés syriens arrivant sur les îles grecques, il était pourtant statué que cet argent serait uniquement utilisé pour aider à l’accueil des plus de 3,5 millions de réfugiés syriens vivant en Turquie.

Or sur ces 3 milliards d’euros qui ont été collectés auprès des États membres de l’UE (la quote-part de la France dans ce programme s’élève à 309 millions d’euros), une partie a été utilisée pour financer six bateaux de patrouille à destination des gardes-côtes turcs. Lesquels, selon plusieurs ONG opérant dans ces zones maritimes, arrêtent agressivement les réfugiés tentant de quitter la Turquie, mettant parfois les embarcations de réfugiés en danger.

« Juste après que l’accord avec la Turquie a été mis en place, il était évident que les gardes-côtes turcs faisaient tout pour arrêter les gens qui traversaient la mer, explique Ruben Neugebauer, porte-parole de Sea-Watch, l’une de ces organisations. Il y a différentes tactiques. Parfois nous voyons des bateaux turcs naviguer autour des canots pneumatiques, provoquant des vagues, les mettant en danger de telle sorte que parfois les réfugiés décident de rentrer par eux-mêmes. Parfois, ils chassent les bateaux et frappent même les gens à coups de bâton afin de les faire repartir. »

En réponse à cette interpellation, les gardes-côtes turcs ont publié une déclaration disant qu’ils étaient mandatés pour arrêter les bateaux de réfugiés avant qu’ils ne pénètrent dans les eaux européennes. Les bâtons, expliquent-ils, sont utilisés pour tenter d’endommager les moteurs et les hélices de façon à attacher les petites embarcations aux plus gros bateaux des gardes-côtes pour les tirer vers les côtes turques.

Entre la Turquie et la Grèce, mars 2016. © Enough is Enough TV
Entre la Turquie et la Grèce, août 2017. © Epoca Libera

Mais ce n’est pas le seul cas d’abus présumé commis à bord de ces bateaux financés par l’argent européen. L’ONG Lighthouse Relief a publié une déclaration commune avec le UNHCR pour exprimer sa préoccupation au sujet d’un incident survenu en novembre dernier, assurant que les gardes-côtes turcs avaient tiré en l’air et dans la mer, ce qui a provoqué le saut dans l’eau de plusieurs réfugiés.

Ces six bateaux de patrouille ont été commandés à un constructeur naval néerlandais, Damen, pour la somme de 18 millions d’euros – une somme qui vient pour partie du fonds danois d’aide au développement. Ils ont été livrés aux gardes-côtes turcs l’année dernière. Le dernier a été livré juste avant Noël. D’après la société navale, ces bateaux peuvent transporter jusqu’à 120 réfugiés et migrants en mer.

Ces fournitures d’équipement pour le contrôle des frontières à la Turquie font partie d’une tendance croissante au sein de l’Union européenne : « L’UE utilise de plus en plus le principe de la pleine concurrence et externalise le contrôle frontalier à des pays tiers au lieu d’effectuer son propre contrôle, fait valoir le chercheur danois Thomas Gammeltoft-Hansen. Vous financez le contrôle des frontières, mais vous ne voulez pas être là vous-mêmes car vous risquez de mettre en jeu votre responsabilité en termes de droits humains. » Une stratégie qui rappelle étrangement ce qui se passe aujourd’hui entre l’Italie et la Libye.

Un porte-parole de la Commission européenne a répondu par écrit aux questions de l’EIC en affirmant que l’Union européenne suivait « attentivement » la situation à la frontière turco-syrienne et qu’elle était consciente de l’existence de violences à la frontière, « mais n’a pas été capable d’obtenir de confirmation indépendante par ses sources ou par les autorités turques ». Sollicités depuis une semaine, l’ambassade turque à Copenhague et le gouvernement turc à Ankara n’ont pas donné suite aux sollicitations de l’EIC.

Mercredi 14 mars, l’Union européenne a donné son feu vert pour le versement du deuxième volet de l’aide promise à la Turquie. Trois nouveaux milliards d’euros vont être versés à Ankara.

Source Mediapart

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