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Grèce : encore plus d’agressivité envers les petits créanciers

Les informations que donnent les médias grecs sur la politique à venir de l’État grec envers les citoyens endettés démontrent une agressivité sans précédent vis à vis des petits créanciers, et tout cela pour plaire aux créanciers dans le cadre de l’évaluation du 3 ème mémorandum! Ainsi 1,8 millions d’emprunteurs ayant des difficultés à rembourser leurs dettes de plus de 500 euros sont ciblés par l’administration fiscale. 2,3 millions d’ autres vont vivre chaque mois avec la peur de dépasser cette limite, en fonction des diverses tranches de paiement d’impôt.
Cette situation est unique : jamais auparavant autant ont été confrontés à des ventes aux enchères. Près d’ un contribuable sur trois (soit un ménage sur trois) va connaitre en 2018 des situations sans précédent.

L’accord conclu avec les prêteurs pour fermer la troisième évaluation est à la source de cette situation. En effet, avant le 20 Janvier, le gouvernement aura adopté « dans la douleur »… des centaines de nouvelles dispositions, parmi lesquelles les modifications du code de recouvrement des recettes publiques (KEDE), ouvrant la voie à des ventes aux enchères de masse par l’administration fiscale et les fonds de sécurité sociale.
Le gouvernement a déjà démontré sa détermination à mettre en œuvre le plan avec l’amendement adopté vendredi dernier et mettra immédiatement en application les poursuites d’ office en arrêtant tous ceux qui entravent les ventes aux enchères. De même, il est prévu que les propriétaires soient exclus même par la force de leur maison mise en vente.
Le cocktail des nouvelles mesures est le suivant :
– Les enchères électroniques vont proliférer ( trois fois par semaine au lieu de une actuellement) et vont remplacer le processus traditionnel des tribunaux du comté.
– Bien que souvent reporté par peur des manifestations (après celle du 30 Novembre et les graves incidents au sein du tribunal du comté devant les caméras et pour les beaux yeux de la Troïka afin de finaliser l’évaluation) les ventes aux enchères seront à nouveau organisées, une fois la nouvelle loi adoptée, immédiatement après les vacances.

Les dispositions de la même loi étendent à l’État les dispositions du Code de procédure pénale de sorte que les mêmes règles s’appliquent aux ventes aux enchères qu’aux individus. À partir de seulement 500 euros de dette, le gouvernement exercera nécessairement une action de recouvrement contre les débiteurs.
– Il n’y a pas de protection pour la première résidence prévu par le KEDE, et le gouvernement n’y a pas apporté de modifications au cours des derniers jours pour distribuer un dividende à partir de la surpopulation.
– Dorénavant, la valeur objective ne sera pas entravée afin de vendre aux enchères une propriété pour dettes envers l’État. Basé sur le KEDE, si la propriété n’avait pas obtenu l’objet, il était interdit de vendre, donc toutes les ventes aux enchères étaient pratiquement stériles. Maintenant, l’immobilier ira aux ventes pour les dettes à l’État et la valeur commerciale (c’est-à-dire, sous l’objectif).
– Les temps d’avertissement et de réponse pour le débiteur rétrécissent considérablement. Avec un courrier électronique informatif du Département du Trésor, les délais commenceront à courir sans perdre de temps pour effectuer ou reporter les saisies, étant donné qu’il est automatiquement considéré que le débiteur a pris connaissance du jour de l’envoi (et non reçu) de l’avis.
– À compter du 1er janvier 2018, la mort subite est également prévue pour ceux qui utilisent le régime des  » 100 doses ». Le règlement sera perdu si le débiteur ne paie pas toutes ses nouvelles dettes à temps (en plus des versements qu’il paie). C’est-à-dire, même pour un jour de retard, il va perdre le règlement, sans la moitié ou un mois de marge pour l’empêcher de payer.

Et les personnes qui sont à risque sont nombreuses lorsque l’on sait que sur 4,1 millions de contribuables qui avaient des dettes à l’administration fiscale en Octobre, huit sur 10 (3,5 millions au total) sont aux prises avec de petites dettes d’environ 3 000 euros en moyenne. On sait que près de 2,35 millions d’ emprunteurs doivent , mais ne peuvent pas payer les dettes de seulement 1 à 500 euros. Les 1,75 millions d’ emprunteurs restants doivent plus de 500 euros, mais seulement 400 000 ont des dettes de plus de 10.000 euros.

Source : journal Protothema.

Grèce : Visa et enchères immobilières

Visa d’or et enchères immobilières en ligne attirent l’intérêt russe et chinois

Le malheur de l’un est la fortuité de l’autre. Les investisseurs russes et chinois montrent un grand intérêt pour l’acquisition de propriétés en Grèce, surtout maintenant que les banques grecques se débarrassent de leurs prêts non performants avec des enchères de propriétés en ligne. Il y a une forte demande pour le programme Golden Visa car il ouvre la voie aux citoyens non-européens pour un billet vers l’Europe.

Il existe un intérêt international croissant pour l’acquisition de propriétés en Grèce via des enchères en ligne, en particulier des pays qui pourraient bénéficier du programme Golden Visa , car la Grèce accorde des visas aux non-ressortissants de l’UE s’ils achètent des propriétés d’au moins 250 000 euros.

Les bas prix et la perspective de futures plus-values, ainsi que le calendrier de la sortie prévue du plan de sauvetage de la Grèce, ont accru l’attrait du marché immobilier local, non seulement aux yeux des fonds d’investissement étrangers, mais aussi des investisseurs étrangers. Russie et Chine.

George Kachmazov, directeur général de la plate-forme immobilière russe Tranio , a déclaré à Bloomberg la semaine dernière: «Nous souhaitons participer aux enchères immobilières grecques et acquérir des propriétés directement auprès des banques.

Il a déjà acheté un immeuble à Athènes et prévoit d’en acheter cinq autres dans le but de revendre les appartements à des investisseurs étrangers intéressés par l’obtention d’un permis de séjour grec grâce au programme Golden Visa. Étant donné que les prix du marché se sont stabilisés, les acheteurs peuvent s’attendre à des gains en capital grâce à l’intérêt croissant du tourisme pour la Grèce et à la hausse de la location à court terme via des plateformes de partage de logements.

Les investisseurs chinois regardent également le pays: Carrie Law, PDG du site immobilier chinois Juwai, a déclaré à Bloomberg: «Nous avons des acheteurs qui sont très intéressés par le processus d’enchères électroniques en Grèce. Ils croient qu’il offrira des opportunités d’achat au bas du marché. « 

Selon Kachmazov, le faible seuil d’un Visa d’Or en Grèce est un avantage supplémentaire: en Grèce, les investisseurs doivent dépenser au moins 250 000 euros, alors qu’au Portugal, par exemple, 500 000 euros (soit 350 000 euros pour les 30 ans).

Citant des données d’Enterprise Greece, l’agence d’État chargée de promouvoir les investissements et les exportations, Bloomberg note que la Grèce a attribué 2 053 visas d’or entre 2013 et octobre 2017, les investisseurs chinois représentant 43% d’entre eux. Les Russes arrivent en deuxième position avec 18,6% et les investisseurs de la Turquie voisine arrivent en troisième position avec 8,4%. La Grèce a levé plus de 513 millions d’euros d’investissements étrangers dans le programme de visas.

Les citoyens turcs ont également un grand intérêt à acquérir des biens en Grèce et obtenir un visa d’or néanmoins en raison de l’instabilité politique en Turquie et de la proximité géographique.

Spitogatos: Cette année, les recherches sur les biens grecs ont augmenté de la Chine (203%), de la Turquie (90%), de l’Allemagne (68%) et des États-Unis. Émirats arabes unis (50%).

Fiascos La rubrique de Panagiotis Grigoriou

Panagiotis  Grigoriou est Ethnologue et historien, chroniqueur, analyste, initiateur d’un concept de tourisme alternatif  et solidaire en Grèce. Le regard de l’historien et de l’anthropologue sur l’actualité et le vécu de la crise grecque.

Dans cette rubrique il revient sur le mensonge de la  » sortie de la tutelisation mémorandaire en 2018″ et sur la visite en Grèce du Président turc Tayyip Erdoğan.

Fiascos

Nous naviguons au milieu de cette mer semée de fiascos. En ces temps apocalyptiques, nos mots deviennent pesants, en comparaison avec ce que nous avions pu parfois si gentiment formuler par le passé. Le temps même ne compte plus, et nous avec. Oui le temps, car après tout, Balzac avait raison: “Le temps est le seul capital des gens qui n’ont que leur intelligence pour fortune.” D’ailleurs nos attitudes, déjà reformulées et reformatées en témoignent.

“Tout est possible”, et local MSF fermé. Athènes, décembre 2017

“Tout est possible”, peut-on lire en ce décembre 2017 sur le mur d’un ancien local des Médecins Sans Frontières à Athènes, fermé depuis un moment. “Tout est possible”… et d’abord le fiasco. Aux apories et autres dyslexies existentielles de la dernière Grèce contemporaine, s’y ajoutent les dystopies réellement existantes d’une certaine géopolitique (économie comprise) de notre monde supposé moderne, nous voilà… rassurés.

Dans son remarquable essai, “La fin du progrès ?” , l’historien et écrivain Canadien Ronald Wright, fait très justement rappeler certaines vérités visiblement très contemporaines… pour ne pas dire intemporelles: “Utilisant leur arithmétique avancée pour établir un calendrier qu’ils ont appelé ‘compte long’, les Mayas ont étudié les mystères du temps, transcrit les événements astronomiques et formulé des calculs mythologiques loin dans le passé et dans l’avenir – parfois sur des millions d’années. Les calendriers sont une forme de pouvoir ; Jules César, qui a donné son nom au mois de juillet, le savait bien.” (“La fin du progrès ?”, p. 99).

Dans les tristes affaires grecques, c’est alors le contrôle (même relatif) du calendrier prévisionnel des affaires privées comme publiques qu’il devient ainsi impossible, car en réalité volé. Entre la paupérisation touchant de près ou de loin les deux tiers de la population, le survivalisme étendu, le non versement des salaires à près d’un million de salariés du secteur privé, les lois mémorandaires qui tombent du ciel pollué de l’occupation Troïkanne, les lois et réglementations fiscales qui changent dix fois par an ainsi que celle concernant la Sécurité prétendument sociale et les retraites, déjà lorsqu’on n’est pas malade dans ce pays, la visibilité s’arrête au bout du nez ; quelques jours, quelques semaines, la fin du mois.

S’y ajoutent, les mensonges à répétition de la bande à Tsipras et des autres para-politiciens que la colonie jardine encore et hélas. Le dernier mensonge officiel, c’est la prétendue “sortie de la tutelisation mémorandaire en 2018”, lorsqu’on sait par exemple que le mémorandum Tsipras offre potentiellement le contrôle de l’ensemble des biens publics grecs aux prétendus “créanciers” pour 99 ans et que le dépeçage de l’économie grecque et des biens aussi privés, au profit bien entendu d’un nombre alors croissant de rapaces internationaux, ainsi que d’une clique bien locale, largement liée au système mafieux et népotiste des partis supposés politiques.

Toutes les dimensions de la temporalité de la crise grecque ont été ainsi balayées: non seulement les effets immédiats sur chacun, mais aussi les conséquences à long terme, sur les structures du pays, ses institutions, etc. Sous nos yeux, on voit le pays se transformer en un nouveau “cabinet des curiosités” de la vie et de la mort sous un régime en somme novateur, la métadémocratie achronique.

Les municipalités décorent les rues. Athènes, décembre 2017
“Biscuits – 40 jours de carême”. Athènes, décembre 2017
“Épreuve”. Théâtre, Athènes, novembre-décembre 2017

On conviendra que finalement… “innovation” et “embellie” ne sont pas forcément synonymes, notamment dans les affaires humaines. On y observe mieux que nul part ailleurs la mutation de nos régimes oligarchiques-libéraux du monde occidental, autrement-dit nos démocraties “complaisantes”, en des régimes oligarchiques-dictatoriaux et pour le cas grec (et chypriote), l’annulation violente de toute forme (même déjà incomplète) de souveraineté populaire, nationale et étatique. L’évolution aura pris moins d’une décennie, sinon bien moins de temps. Il fallait y penser.

Dans Athènes, on vit le plus souvent au jour le jour, même les coupures calendaires traditionnellement festives apparaissent comme étant bien aberrantes aux yeux du plus grand nombre, disons pour 75% de la population. Les municipalités décorent certes les rues devant les immeubles inachevées depuis 2010, ou devant les boulangeries qui proposent toujours des sucreries et biscuits compatibles… “40 jours de carême”, ou enfin devant les théâtres de quartier passablement désertés, peut-être parce que la pièce du moment se nomme (encore) “Épreuve”.

Question de calendrier toujours, sauf pour les initiés peut-être, personne n’a vraiment compris les raisons ayant motivé cette la visite officielle du président de la Turquie en Grèce la semaine dernière, une visite annoncée la dernière minute et présentée par la presse comme déjà mal préparée par le “gouvernement grec”.

Cela faisait certes soixante-cinq ans qu’un chef d’État turc ne s’est pas rendu en Grèce. Comme le remarque Apostolos Doxiadis, “la dernière a eu lieu avant que Chypre ne devienne indépendante et avant le pogrom d’Istanbul de septembre 1955, événement dramatique qui a marqué le début de la fin pour l’ancienne minorité grecque de la cité turque. Depuis, il s’est passé beaucoup de choses entre la Grèce et la Turquie. Du côté négatif: l’invasion turque du nord de Chypre en 1974 et son occupation, et, plus récemment, l’influx constant de réfugiés arrivant de Turquie pour rentrer en Europe, et d’abord en Grèce. Du côté positif des relations gréco-turques… il n’y a pas grand-chose à en tirer, si ce n’est que les deux gouvernements communiquent de façon civilisée et qu’ils ont tenté de résoudre l’imbroglio de Chypre – sans toutefois y parvenir. Si l’on prend en compte la politique de plus en plus répressive d’Erdogan depuis le coup d’État manqué de juillet 2016, on peut s’étonner de l’invitation par le Premier ministre grec, qui se veut défenseur des droits de l’homme.”

Recep Tayip Erdogan et Prokópis Pavlópoulos (Président grec). Quotidien “Kathimeriní”, décembre 2017
Nos médias… autodérision. “Quotidien des Rédacteurs”, décembre 2017
Un certain calme dans les quartiers d’Athènes. Décembre 2017
De l’inachevé… devenu durable. Athènes, décembre 2017

“Nul doute que Tsipras, malgré sa popularité en baisse, surestime sa propre importance sur la scène internationale. Entre le fait qu’il choisisse de se ridiculiser en parlant un mauvais anglais lors de ses visites à l’étranger (les interprètes professionnels abondent pourtant) et son effort pathétique d’essayer de passer pour un grand homme d’État européen – il a ‘conseillé’ à Martin Schulz de former un gouvernement avec Angela Merkel -, Tsipras surjoue son propre rôle dans une mesure qui frise le ridicule. Il est difficile de pénétrer l’esprit d’un homme d’État à ce point dominé par son orgueil, mais on peut supposer que Tsipras pense qu’en invitant Erdogan il agit comme un médiateur entre la Turquie et le reste du monde – ce qui est, là encore, une illusion. Il est évident qu’il existe des questions importantes à régler entre les deux pays: le sort crucial de l’île de Chypre et celui des réfugiés.” , (“Libération” du 6 décembre 2017).

Ce que remarque Apostolos Doxiadis n’est, comme toujours dans la presse… autorisée, qu’une vérité à minima. D’abord, il n’y aurait peut-être pas grand-chose à en tirer, si ce n’est que les deux gouvernements communiqueraient normalement de façon civilisée, sauf que devant les cameras, les deux présidents se sont violement affrontés verbalement au sujet du Traité de Lausanne. Le climat de la rencontre avait été très lourd au palais présidentiel et le dialogue entre les deux hommes politiques ont même échappé à tout protocole. Recep Tayip Erdogan insistant sur sa volonté de renégociation du Traité de Lausanne, évidemment à la carte (d’après les fantasmes ottomans de l’élite turque) , ce qui est inadmissible pour la Grèce (et pour bien d’autres pays il faut dire). Disons encore à ce propos, qu’accessoirement, Recep Tayip Erdogan fait semblant d’oublier que Traité de Lausanne est autant l’acte de naissance de la Turquie moderne, et il garantie par la même occasion (si ce n’est que du point de vue du Droit international) ses propres frontières.

Dans les quartiers (encore si possible paisibles) d’Athènes, le commun des mortels aura compris que cette visite officielle était au mieux inutile, et au pire, nuisible. Dans les cafés on murmure toute l’amertume devant (et sous) ce “gouvernement” alors cynique, “Quisling”, largement hostile aux intérêts du pays, des travailleurs, de la grande masse des petits et moyens entrepreneurs et parfois même grands, et même à la démocratie. Le 3/4 décembre 2017, le “gouvernement” a tenté à faire voter au “Parlement” la reforme no 69, sur les 113 nouvelles mesures exigées par la Kommandantur Troïkanne, s’agissant bien entendu de la restriction du droit de grève, ainsi que de la (non) indemnisation des travailleurs en cas d’accident sur le lieu de travail ou durant son exercice. L’amendement avait été rajouté au projet de loi relatif au… satellite grec de télécommunication… alors voyons (presse grecque du 4 décembre 2017) .

Une pratique alors généralisée depuis les mémoranda et qui en dit long sur l’aspect criminel (et en déjà inconstitutionnel et illégal) des “gouvernances” (d’abord) économiquement génocidaires sous les escrocs de SYRIZA/ANEL. Le “gouvernement”, craignant la défection de certains députés (majorité de 153 “parlementaires” sur 300) a retiré ces deux amendements pour évidemment revenir de manière impromptue, le jour de Noël par exemple ou pendant une autre période fériée. C’est (autant) pour cette raison que les Grecs ne veulent plus entendre parler de gauche… dans ce pays, la… grande illusion SYRIZA a été inscrite dans l’inconscient collectif et à travers les mentalités comme celle de toute la gauche. C’est ainsi…

Friche industrielle. Patras, décembre 2017

Et pour revenir aux affaires gréco-turques, et… quant “à régler entre les deux pays (Grèce – Turquie): le sort crucial de l’île de Chypre”, la traduction exacte de cette façon de reformuler les réalités, c’est tout simplement que le but des… manœuvres, n’est ni plus, ni moins le retour de Chypre dans sa situation de colonie britannique (en réalité occidentale et des puissances maritimes), par une forme de Putsch en cours de exécution, auquel Alexis Tsipras et Nikos Anastasiádis (président de la République de Chypre) sont les marionnettes alors complices (voir l’article précédent sur ‘Greek Crisis’ à ce sujet).

Dans l’autre vraie vie… géopolitique, les vendeurs ambulants de petits pains quotidiens préféreront le dialogue avec les animaux adespotes des lieux, plutôt que le prétendu dialogue gréco-turc. Et de leur bon côté, nos animaux adespotes (sans maître) alors imperturbables, autant que ceux de la Turquie voisine comme le démontre si bien le réalisateur turc Ceyda Torun , adespotes imperturbables devant la géopolitique, nous regarderont souvent d’en haut, ou sinon, ils attendront devant le paillasson du pâtissier Konstantinidis, une maison fondée en Asie Mineure, avant justement le Traité de Lausanne et la Guerre gréco-turque en Asie mineure de 1919-1922. Et c’est par les sucreries entre autres, que certains rapports culturels entre les Grecs et les Grecs s’avèreront ainsi indéniables, tandis que pour l’essentiel, les conflits ayant dégénéré en guerres ouvertes entre les deux pays au 20e siècle, ils ont été initiés par les puissances occidentales maritimes. Ce qui laisse alors un goût amer, sucreries ou pas.

Vendeur ambulant et ‘son’ animal adespote. Athènes, décembre 2017
Nos adespotes nous regardent d’en haut. Athènes, décembre 2017
Maison fondée en Asie Mineure. Athènes, décembre 2017
Chatons et chats à donner. Athènes décembre 2017

Sauf que la synchronie lourde s’imposera encore longtemps sur nos adespotes, et d’abord sur nos… sucreries parallèles gréco-turques. Certains analystes estiment en Grèce à l’instar du général à la retraite Yannis Baltzois sur son blog, “qu’à la question ayant prévalu en Grèce lors de l’annonce de la visite – Pourquoi donc recevoir Recep Tayip Erdogan en ce moment et dans quel but précis ? – la réponse n’est certes pas très claire, cependant, nos estimations, ainsi que certaines informations fiables dont nous disposons, indiquent que cette visite avait été encouragée (et peut-être bien imposée) en réalité par les États-Unis, plus précisément au cours de la récente visite du Premier ministre grec à Washington (mi-octobre 2017), au moment où ce dernier avait été reçu par le président Donald Trump.”

“La raison est ainsi liée à l’évolution géopolitique complexe dans l’Est méditerranéen et au Moyen-Orient, et autant à l’attitude et au comportement de la Turquie, ce pays a noué comme on sait des alliances avec la Russie et l’Iran, alliances ‘inacceptables’, si l’on tient compte des objectifs géostratégiques des États-Unis. Enfin, une telle invitation officielle ainsi initiée par la Grèce à l’encontre du président de la Turquie, aurait également reçu l’aval de l’Union européenne et cela pour des raisons géopolitiques similaires.” (Yannis Baltzois sur son blog de géopolitique) .

De même que pour l’analyste en géopolitique Dimitris Konstantakópoulos, “le gros problème aujourd’hui c’est qu’il n’y a pas de gouvernement grec, et encore moins de politique étrangère grecque. Dans le domaine de l’économie, l’Allemagne, l’UE et le FMI gouvernent déjà le pays. Dans le domaine de la politique étrangère, ce sont les États-Unis et l’OTAN qui le gouvernent, tandis qu’Israël joue également un rôle important. Ils décident, et ‘la Grèce’ alors elle exécute. Athènes ne s’autorise la moindre action sans l’autorisation ou l’encouragement des Américains, et ce n’est certainement pas une coïncidence si la visite Erdogan avait été programmée à la suite de la visite à Washington d’Alexis Tsipras, au cours de laquelle le Premier ministre grec a tout offert aux Américains, ce qui expose le pays à de très gros risques. Et le but réel enfin de la visite Erdogan, c’est en effet la question chypriote.”

“Interrogé par l’agence (turque) ‘Anatolie’, M. Tsipras, dit qu’il espère que les deux dirigeants vont envoyer le message commun, depuis Athènes, s’agissant de la poursuivre de leurs efforts pour trouver enfin une ‘solution au problème chypriote’. Le Premier ministre grec semble être si heureux d’avoir fait… face au problème de la dette grecque, à celui des mémoranda et des emprunts, qu’il désire désormais offrir et appliquer à Chypre… toute son expertise ainsi inégalée! Disons enfin que les expérimentations économiques (dictées par la Troïka aux politiciens grecs), elles ont entraîné le plus grand désastre économique et social de l’histoire du capitalisme en une période de paix. Ces mêmes expériences, ayant comme prévu désormais atteint avec le noyau dur de la souveraineté comme de la démocratie, risquent de conduire, non plus seulement à une catastrophe économique mais in fine, à une catastrophe militaire.” (Dimitris Konstantakópoulos sur son blog de géopolitique) .

Ravitaillement d’un ferry en carburant. Patras, décembre 2017
Métiers du port. Igoumenítsa, décembre 2017

Dans l’autre vraie vie toujours, entre friches industrielles et commerciales, navires avitailleurs et ouvriers des ports, nous nous posons ainsi le problème entier… du futur pays comme autant du futur travail dans un temps alors pleinement désoccupé. Il conviendrait d’ajouter non sans amertume, que le factice (numérique et numéraire) s’est alors (définitivement ?) emparé du réel en le dominant, et en le modifiant dans un remodelage ne connaissant plus de bornes, géopolitique du bas monde d’ailleurs ou pas.

Exception faite des dernières limites de l’espèce humaine et dans une autre mesure, des ressources de la planète par exemple, car au-delà, c’est le chaos, le néant. Mais nous en sommes presque. Sans doute même que ce néant serait précédé par la fin voulue des régimes “micro-démocratiques” du monde occidental, et que nous l’observons sans réagir pour l’instant. L’abolition des souverainetés et en dernier lieu, des peuples eux-mêmes, serait mutatis mutandis, un retour “à l’essentiel”, c’est à dire à la prédation des ressources, y compris “humaines”.

Nous observons nos frontières… Entre Corfou et l’Albanie. Décembre 2017

Nous contemplons ainsi nos frontières… pour goût de l’histoire et par besoin de survie, entre Corfou et l’Albanie par exemple, pendant que nous naviguons au milieu d’une mer semée de fiascos et qu’à bord de notre radeau, nous faisons alors feu de tout bois.

Fiascos, épiphénomènes et épiphonèmes. Pour une fois, la presse grecque (dont Internet) aura symboliquement voulu retenir de la visite de Recep Tayip Erdogan en Grèce ce regard qualifié de glacial, que le garde Evzone grec (c’est la Garde Présidentielle) a jeté sur le chef de la Turquie actuelle. “Une photo c’est alors autant explicite que mille mots”. Pour le reste, les heureux citoyens parfois sportifs, peuvent souffler si ce n’est qu’épisodiquement, s’exerçant sur la montagne du mont Hymette par exemple, notamment sans plus dire un seul mot de politique. Les badauds s’y promèneront également sous l’étroite surveillance des chiens adespotes, animaux toutefois pris en charge par les associations du coin. Donc tout ne serait pas encore perdu.

De la relaxation sur le Mont Hymette. Athènes, décembre 2017
Sous le regard des chiens adespotes. Mont Hymette, décembre 2017

En ces temps apocalyptiques, nos mots deviennent de plus en plus pesants en comparaison avec ce que nous avions pu parfois si naïvement formuler par le passé y compris sur ce blog en ces débuts au moment même où le temps ne compte plus, et nous avec.

“Le temps est le seul capital des gens qui n’ont que leur intelligence pour fortune.” En attendant, et dans le “compte long” ou les calculs mythologiques, les nôtres chez ‘Greek Crisis’ et non plus ceux des Mayas, notre Mimi vieillit tandis que notre Hermès grandit.

Mimi de ‘Greek Crisis’. Athènes, décembre 2017

Dans Athènes, on vit le plus souvent au jour le jour, et alors même ces coupures calendaires traditionnellement festives, elles deviennent aberrantes aux yeux du plus grand nombre, disons pour 75% de la population. Les municipalités décorent ainsi les rues devant les immeubles inachevées.

Nous aspirons à un peu de repos, nous espérons que le blog sera toujours lu et soutenu par son public ; les fêtes passeront, nous ferons feu de tout bois, enfin pas grand-chose, laissant les fiascos et les paroles creuses aux politiques et aux journalistes.

Hermès de Greek Crisis. Athènes, décembre 2017
* Photo de couverture: Le président de la Turquie et le regard de l’Evzone. Athènes, 7 décembre 2017 (photo presse grecque)

mais aussi pour un voyage éthique, pour voir la Grèce autrement “De l’image à l’imaginaire: La Grèce, au-delà… des idées reçues !”   http://greece-terra-incognita.com/

Qu’en est-il aujourd’hui de la protection sociale et de la santé en Grèce?

Publié le 14/12/17 sur Mediapart blog d’ Emmanuel Kosadinos. Psychiatre d’adultes d’enfants et de jeunes, psychothérapeute, syndicaliste, militant politique et associatif Paris – France 

La prétendue amélioration de la situation sociale et sanitaire en Grèce est une fiction du gouvernement SYRIZA-ANEL, avalisée par les créanciers. Derrière les déclarations fallacieuses se cache la mise à mort de l’état social et la pérennisation de la précarité. Budget social au rabais et politique de santé sans lendemain

Introduction

Il y a aujourd’hui beaucoup de confusion dans les opinions publiques sur la situation en Grèce. Les créanciers de la Grèce et les dirigeants de l’Union Européenne veulent faire accepter, contre toute évidence, le message que les mesures draconiennes d’austérité qu’ils ont imposé à la Grèce ont sauvé le pays d’un désastre, et même qu’elles ouvriraient la voie vers une relance économique et la résorption de la crise. C’est la fiction de « l’histoire réussie » (« success story ») rabâchée par les politiciens de la coalition Droite-PASOK, démentie par les mobilisations massives du peuple grec sur les places et les rues pendant les années de 2010 à 2013. La moralité de cette fiction est destinée aux opinions des autres pays européens, sommées d’accepter l’application de politiques de dérégulation des rapports au travail, de réduction du service public et de la protection sociale, sous prétexte de favoriser la relance  et la diminution du chômage.

Aujourd’hui ce discours est relayé en Grèce par des forces politiques qui, lorsqu’elles étaient dans l’opposition dénonçaient verbalement le néolibéralisme et l’austérité, mais qui sont celles qui, aujourd’hui au gouvernement, les appliquent en pérennisant et en approfondissant le désarroi des classes populaires en Grèce. Il s’agit, bien entendu, de SYRIZA et de son allié de Droite ANEL, de Tsipras et de son gouvernement. 

Les 23 et 24 octobre s’est tenue à Paris le Colloque « Une protection sociale pour tous les peuples » organisé par la Fondation Gabriel Péri.

Clé de voûte de la République sociale, la protection des travailleu-se-r-s contre ce qu’on appelle « les risques sociaux » est aussi un maillon important du filet républicain permettant un rééquilibrage du pouvoir au bénéfice des plus faibles matériellement. Parmi les intervenants de ce Colloque le Secrétaire général à la Santé Publique du gouvernement grec actuel, Yannis Baskozos, médecin, ancien syndicaliste de la Santé et membre du parti SYRIZA. Le but de ce Colloque étant de présenter des points de vue différents sur la question, issus de réalités de pays et de formes institutionnelles divers, la présence du représentant du gouvernement grec était censée apporter l’expérience de la défense et promotion de la protection sociale et de la Santé publique par un gouvernement dit « de gauche ».

Or l’exercice à échoué et pour cause : le gouvernement grec en question va dans le sens strictement opposé, celui du démantèlement de la protection sociale et de la Santé publique dans le pays. La démonstration du contraire serait obtenue seulement à l’aide d’une prouesse dialectique inégalée et par l’administration de doses efficaces de stupéfiants aux auditeurs. La situation s’est aggravée du fait que cette présentation avait lieu le lendemain du dépôt du projet de budget social au Parlement grec par la majorité Syriziste. Nous présenterons dans le contexte les principaux traits de ce budget antisocial afin de mettre en garde contre les contrefaçons de discours prétendument anti-néolibéraux. Quand au représentant du gouvernement grec il a cru bon s’acquitter en s’abritant derrière l’aporie socratique « je sais seulement que je ne sais rien » et… à bon entendeur salut !

Nous aborderons aussi le deuxième volet présenté dans cette intervention, celui de la situation de la Santé publique en Grèce et des mesures (non) prises pour la rendre à sa mission de soulagement de la souffrance des citoyen-ne-s sans discriminations.      

Contexte historique

 La protection sociale a été dans le viseur de la Troïka (UE, FMI, BCE) dès le début de l’imposition des mémorandums à la Grèce.

Au principe de solidarité sociale, exprimé par l’adage « de chacun-e selon ses moyens à chacun-e selon ses besoins » les néolibéraux opposent celui d’un système inégalitaire de prestations, attribuées en fonction des cotisations versées par les assurés individuels, « de chacun-e selon sa capacité à cotiser à chacun-e selon sa contribution financière à la caisse d’assurance ».

Dans le système néolibéral les organismes de protection sociale fonctionnent comme des fonds de placement. Ils doivent enregistrer des excédents ou au moins présenter des bilans totalement équilibrés et placer leurs bénéfices. Ils adaptent par la suite le niveau des prestations (retraites, allocations, couverture santé) aux bilans annuels des caisses, aux montants des cotisations (et autres recettes) enregistrés dans l’année. Loin du principe de solidarité, ce système propose une couverture fluctuante, aléatoire, tributaire de la situation du marché et de l’économie capitalistes. Ainsi la « redistribution » se fait parmi les assuré-e-s alors que les revenus du capital sont exonérés de l’effort de solidarité nationale.

 Les « mémorandums d’entente » (MoU) imposés à la Grèce depuis 2010 se sont particulièrement acharnés sur le système de protection sociale et de Santé publique, décriés comme gros contributeurs à l’inflation de la dette publique du pays. En réalité, le but des mesures imposées était l’harmonisation avec les pratiques néolibérales décrites.

Entre 2010 et 2015 les retraité-e-s grec-que-s ont perdu autour de 30% de leurs revenus, l’âge de départ à la retraite est passé de 60 à 67 ans, les allocations chômage ont baissé de près de 25% (avec 90% de chômeurs non indemnisés). Le restant à charge pour l’achat de médicaments a augmenté, de nombreux médicaments ont été déremboursés, près de 30% des citoyen-ne-s ont perdu leur couverture sanitaire.

En janvier 2015 le parti SYRIZA a gagné la majorité aux élections législatives sur la base d’un programme qui annonçait le renversement de l’austérité et le rétablissement des droits des salarié-e-s et de la protection sociale. Après 6 mois de négociations avec les représentants des créanciers et de l’UE, et malgré la condamnation des politiques d’austérité par 61,3% des élect-eur-rice-s grec-que-s lors du référendum de juillet 2015, les dirigeants du gouvernement grec ont signé un 3e mémorandum d’austérité ratifié en procédure accélérée par le Parlement pendant les vacances d’août. Ce retournement radical de politique des dirigeants de SYRIZA a produit la scission du parti et le départ ou la démobilisation de la majorité de ses militants.

Nouvelles vagues d’attaques contre les droits sociaux        

Depuis août 2015 à ce jour de nouvelles mesures d’austérité sont imposées au peuple grec par le gouvernement de SYRIZA et de son allié de Droite ANEL.

Ainsi les retraites ont été davantage abaissés et l’âge de départ relevé. Les salaires minimaux et les allocations chômage gelées. L’imposition des foyers modestes a été intensifiée et le marché du travail dérégulé. Les saisies des résidences principales des foyers surendettés ont commencé à être mises en œuvre. Les lois de réforme de la protection sociale (4336/2015 et 4387/2016) surnommées lois-guillotines, ont appliqué la baisse des prestations et la hausse des cotisations. La clause de déficit zéro des caisses d’assurance complémentaire, tellement décriée par SYRIZA lors de la campagne électorale de janvier 2015, a été appliquée sous une forme renforcée, la clause de l’excédent. A tout cela il faut ajouter la privatisation des infrastructures du pays et la revente scandaleuse des banques grecques à un prix dérisoire.

Budget social 2018

 Monsieur Yannis Baskozos, membre du gouvernement grec affirmait le 24/10 sous la coupole de Colonel Fabien que : « aucune nouvelle mesure de réduction de l’Etat social ne sera appliquée par le gouvernement SYRIZA jusqu’à la fin de la mandature, au contraire des allocations exceptionnelles seront attribuées aux citoyen-ne-s dans le besoin ».

Mais, dans la soirée du 21/10, la majorité SYRIZA déposait au Parlement grec le projet de budget social pour l’année 2018 qui va dans une tout autre direction. Peut-être Monsieur Baskozos, trop occupé à préparer son voyage à l’étranger, ne s’est pas rendu compte. D’ailleurs il nous a bien répété « qu’il fallait l’excuser de ne pas être au courant de tout ».

Pour saisir la mesure des chiffres exposés je vous propose la règle de multiplication par 6, ratio approximatif de la population de la France par rapport à celle de la Grèce.

Dans le sillage de toutes les précédentes contre-réformes antisociales, le projet de budget social 2018 diminue davantage les retraites et augmente l’âge de départ, réduit à néant (35 euros mensuels) l’Allocation de Solidarité Sociale des Retraités (EKAS), diminue les avantages sociaux et augmente les cotisations des salariés  et retraités.

Le financement public alloué aux caisses d’assurance, à l’Organisme National d’Offre de Services de Santé (EOPYY) et aux hôpitaux est diminué de 616 millions pour l’année 2018. En particulier, les transferts budgétaires réguliers de l’Etat vers les caisses, EOPYY, les hôpitaux et l’Organisme pour l’Emploi (OAED) passent de 17,911 milliards d’euros à 17,273 milliards d’euros (-3,56%).

En même temps, le «budget social» affiche un excédent de 1,929 milliards d’euros, contre un excédent de 1,560 milliards d’euros pour l’année 2017, un décollage supplémentaire de 369 millions d’euros, qui correspond à des charges supplémentaires pour les classes travailleuses, notamment par l’augmentation des cotisations des salarié-e-s et retraité-e-s, des restants à charge pour les soins , etc.

Il est significatif que, même si il est annoncé par le gouvernement qu’enfin seront payées en 2018  les retraites en retard (principales, auxiliaires, allocations forfaitaires de départ), malgré cela, les dépenses totales pour les retraites seront réduites dans la nouvelle année de 174 millions d’euros par rapport à 2017.

Rappelons ici la précédente réduction des retraites et autres avantages de 1,076 milliards d’euros de plus de ce qui était prévu par le plan d’application du mémorandum, dans le budget 2017. Les retraites principales avaient été réduites de 446 millions d’euros, les retraites auxiliaires de 115 millions d’euros, et les autres prestations de 515 millions d’euros par rapport aux prévisions.

D’après le budget (anti)social 2018, l’Organisme grec pour l’emploi (OAED)  doit afficher des excédents budgétaires. Ceci est choquant compte tenu que  seulement 10% des chômeurs sont indemnisés et que les allocations chômage stagnent depuis 2012, année où elles avaient été diminuées.

Il s’agit d’un excédent budgétaire de 586 millions d’euros,  sur un budget global de 2,993 milliards d’euros provenant essentiellement des cotisations des salarié-e-s. De ce budget seulement 986 millions d’euros (33%) seront alloués à l’indemnisation du chômage.

En même temps, le budget 2018 prévoit des subventions aux entreprises de 450 millions d’euros (contre 350 millions en 2017) « pour tout premier recrutement de salarié-e, pour financer les salaires, et les autres coûts occasionnés par une embauche, pendant 12 mois ». Elles seront aussi accordées aux entreprises pour « les aider à sortir des situations bloquées », les situations où des patrons ont cessé de payer les salarié-e-s alors qu’ils les obligent toujours à travailler.

De leur côté les retraité-e-s verront leur retraites, déjà fortement diminuées, amputées d’une somme globale de 623 millions d’euros !

L’Organisme des Assurances des agriculteurs et éleveurs (OGA), dont la compétence a été réduite à l’octroi d’allocations spécifiques, souffrira aussi d’une baisse de financement à hauteur de 60 millions, ce qui préfigure de nouvelles coupes aux allocations sociales dont il est prestataire.

Au total le budget grec 2018 alloue à la protection sociale et à la Santé 19,4 milliards d’euros contre 21 milliards du budget 2017, soit une baisse de 1,6 milliards d’euros.

L’allocation extraordinaire prévue pour foyers à faibles revenus, dite dividende sociale de SYRIZA, est à hauteur environ de 700 millions d’euros, moins de la moitié des coupes dans le budget social.

Nouvelles coupes dans le budget de la Santé

Voilà les déclarations que nous avons entendues : «Le gouvernement de SYRIZA a autorisé l’accès aux soins de toutes les personnes non assurées. Nous mettons en place un nouveau système de soins primaires de santé. Nous avons recruté de nouveaux personnels médicaux et paramédicaux et nous en recruterons davantage »

La vérité si je mens !

Voici alors le tableau réaliste de la situation de la Santé publique en Grèce et de son financement.

De nouvelles coupes drastiques dans le financement de la Santé Publique sont inscrites dans le budget de l’État.

Ainsi le financement d’EOPYY (Organisme National d’Offre de Services de Santé) par l’Etat sera réduit en 2018 de 214 millions d’euros, alors que déjà en 2017 il avait été réduit de 200 millions (-38%)  par rapport à 2016. En raison de l’augmentation des cotisations santé imposées aux retraité-e-s, il est prévu qu’EOPYY présente un excédent de 333 millions d’euros en 2018. Le financement de l’Organisme par l’État (limité à 100 millions) sera utilisé « pour couvrir les coûts de soins de santé des citoyens non assurés ». C’est-à-dire que la couverture des personnes non assurées sera financée essentiellement par les cotisations  des salarié-e-s et retraité-e-s, sans subvention sérieuse par l’Etat. En 2017 les cotisations représentaient 82,3% du budget d’EOPYY, contre 79,2% en 2016. Cela signifie la continuation dans relâche de la politique de sous-financement de la Santé et de la protection sociale par le gouvernement, alors que ne cessent d’augmenter les contributions des salarié-e-s et retraité-e-s. Selon « Rizospastis », quotidien du Parti Communiste grec (KKE), il s’agit là d’une politique « d’excédents ensanglantés » !

Par ailleurs, le budget des hôpitaux publics et du Réseau National Public de Soins primaires (PEDY) va diminuer de 363 millions d’euros par rapport à 2017. Cette coupe brutale vient se rajouter  à la réduction du financement des hôpitaux publics de 22,8% en 2015, une réduction qui a ensuite été maintenue. De plus, en 2017, le financement des structures du PEDY avait été diminué de 7 millions par rapport à 2016.

Au total les coupes dans le budget de la Santé sont à hauteur de 616 millions d’euros.

La mise en application de l’accès aux soins des personnes non assurées est une avancée importante dans la direction d’une politique humaniste de Santé. Il faudrait cependant rappeler le retard avec lequel cette disposition à été adoptée, huit mois après l’accès de SYRIZA au gouvernement, alors que la ratification du 3e mémorandum s’est faite en quelques jours. Les retards dans la mise en application du décret est le résultat des renvois successifs par le Ministère vers la commission Santé du Parlement et de la volonté politique de certains membres du premier gouvernement SYRIZA de rendre la loi plus restrictive. La bataille a été finalement gagnée grâce à l’insistance du mouvement des Dispensaires Sociaux Solidaires et des député-e-s de l’ancienne aile gauche de SYRIZA. 

En application de ce décret les patient-e-s non assuré-e-s ont obtenu l’accès aux examens diagnostiques et aux traitements, la possibilité de consulter un médecin et de se faire prescrire des médicaments, mais la mesure n’a pas été financée. Comme il a été démontré, EOPYY ne dispose pas de crédits suffisants pour faire appliquer la mesure. Par conséquent, ni même les grandes structures telles que les hôpitaux universitaires « Attiko » et « Laïko » ne disposent des médicaments nécessaires pour les chimiothérapies programmées. C’est donc toujours aux Dispensaires Solidaires Sociaux (supposés être des structures provisoires) tel le Dispensaire Social Métropolitain d’Elliniko (MKIE)  de trouver les moyens pour faire face aux pénuries du système hospitalier officiel.

 En ce qui concerne la réforme des Soins primaires de santé, force est de constater qu’elle a bien mal démarré. À peine la moitié des postes annoncés dans les Groupes locaux de santé (TOMY) a fait l’objet de candidatures. Et pour cause la précarité des contrats proposés (maximum 4 ans) et les faibles rémunérations peu incitatifs même pour des jeunes professionnels de Santé. Ici aussi ce sont les diktats des créanciers, auxquels SYRIZA reste toujours docile, qui empêchent la création de postes de professionnels titulaires. Tout cela repose d’ailleurs sur des financements non pérennes et ceci est un frein essentiel à l’élaboration de projets durables.

Le discours du gouvernement grec fait une utilisation sélective des chiffres.

Quelle est aujourd’hui la situation sanitaire en Grèce en termes de mortalité (notamment des nourrissons), de morbidité somatique et psychique, de suicides?

Quel est le rapport patients/ soignants dans les hôpitaux ? Des questions simples et précises, en réponse auxquelles les apories socratiques des dirigeants sont pour le moins déplacées.

Car il existe des données qui démontrent que le taux de suicide continue à augmenter et tout comme la mortalité des nourrissons qui est passée de 2015 à 2016 de 4 à 4,2 sur mille naissances.

Selon les militants du Dispensaire Social d’Elliniko le discours du gouvernement grec est éminemment dangereux car, en occultant la crise sociale et sanitaire qui sévit toujours dans le pays, il prive les patient-e-s et les soignant-e-s grec-que-s des soutiens internationaux pour continuer leur juste combat. Nous avons entendu circuler en France dans les cercles militants la rumeur « de source non identifiée » qu’il n’y aurait plus besoin d’acheminer de médicaments vers la Grèce (…)

C’est aussi un discours politiquement nocif car il dédouane les dirigeants de l’Union Européenne et des instances créancières de la responsabilité pour les souffrances, les infirmités, les décès, occasionnés dans les pays de la périphérie par l’application des politiques néolibérales dont ils ont été les instigateurs.

Et il décrédibilise au passage tout discours politique de gauche…

Et donc…

Nous affirmons avec conviction qu’il est impossible de faire une politique favorable à la protection sociale et la Santé publique dans le cadre de l’austérité néolibérale, notamment le cadre des traités européens. Le cas de la Grèce et les turpitudes de la gouvernance SYRIZA-ANEL démontrent clairement cette thèse qui est valable pour tout autre pays européen.

Asymétries La rubrique de Panagiotis Grigoriou

Panagiotis  Grigoriou est Ethnologue et historien, chroniqueur, analyste, initiateur d’un concept de tourisme alternatif  et solidaire en Grèce. Le regard de l’historien et de l’anthropologue sur l’actualité et le vécu de la crise grecque.

Dans cette rubrique il évoque notamment la colère que suscite la mise aux enchères électroniques de biens, procédé mis en place à la demande de la troika pour contrer les actions militantes devant les tribunaux . Il rappelle aussi  ce Putsch (dont personne ne parle) qui vise à mettre fin à l’existence de la République de Chypre.

Asymétries

 

Pluies et vents. Dans l’ancien temps nous croyions préparer Noël. La semaine dernière, les administrateurs coloniaux de la Troïka étaient de leur déplacement habituel à Athènes, afin de recevoir les ministrions locaux à l’hôtel Hilton. Histoire surtout de surveiller l’exacte poursuite du programme d’anéantissement de leur proie. 2018, sera l’année où le processus de déshellénisation de l’économie, (et) qui passe autant par la saisie des biens privés et publics des Grecs, s’accélérera. Les para-ministres à Tsipras sourient sans cesse devant les cameras, et les Grecs les haïssent. Oui, la haine, c’est-à-dire, la disparition absolue du geste politique.

Vente aux enchères après saisie. Tribunal d’Athènes, novembre 2017 (presse grecque)

La vente aux enchères, désormais électroniques des biens immobiliers saisis par les banques et par le “fisc grec” ont ainsi pu reprendre, une exigence… historique et insistante de la Troïka. Les médias rapportent que plus de 18.000 biens seront liquidés, rien que dans un premier temps. Il faut préciser que ceux qui perdent leurs biens (le plus souvent, appartements et maisons sous forme de résidences principales), ils n’auront pas le droit à les “racheter” au 5% de leur valeur (en passant par un arrangement avec “leurs” banques par exemple), ni en règle générale, les autres citoyens du pays. Car les acquéreurs (ceux seulement autorisés à “acheter” ces biens au 5% de leur valeur), sont exclusivement issus de ces fameux funds étrangers, ou dans certains cas leurs associés grecs, triés sur le volet.

En effet, tout nous laisse penser que 2018 sera l’année où le processus de déshellénisation de l’économie (saisie des biens privés et publics des Grecs comprise), s’accélérera. Les biens publics et privés passeront ainsi progressivement aux mains des nouveaux propriétaires du pays. On touche alors à l’épine dorsale économique et symbolique de la société grecque, car perdre son bien immobilier dans un pays où ce n’est guère (et à juste titre) l’État qui est historiquement considéré comme l’ultime protecteur, mais son propre toit, comme autant sa propre structure familiale. En même temps, c’est ce même processus qui fera des travailleurs grecs, les esclaves des patrons restants au pays, voire, de ceux de la probable prochaine et future industrie allemande ou autre, à moins que la robotisation en décide autrement (et cela) plus tôt que prévu.

Les résidences secondaires des Grecs près des côtes et sur les îles, deviendront avec le temps les résidences quasi-principales des retraités Européens, tandis que les résidences principales des Grecs déjà saisies seront perdues à jamais. Ainsi, et c’est dès lors et autant perceptible, certaines activités liées à la mer, le tourisme, le secteur agricole entre autres, sont déjà en phase de passer également sous contrôle étranger. On nous dira peut-être que “tel est alors le résultat d’une faillite globale, d’une dette publique et privée alors énormes qui plus est sous le… soleil brûlant de la globalisation”, raisonnement intentionnellement simplifié et réducteur, car il constitue autant un élément essentiel dans la guerre psychologique et en somme asymétrique que la Grèce, ou bien d’autres pays, peuples et sociétés, subissent et subiront.

Vente aux enchères de biens immobiliers. Athènes, novembre 2017 (presse grecque)
Vente aux enchères de biens immobiliers. Athènes, novembre 2017 (presse grecque)
Tsipras en “Créature Frankenstein”. Quotidien “Kathimeriní”, le 2 décembre 2017

On sait donc, qu’à travers ce processus certains Grecs en profiteront du butin, d’ailleurs, sans la moindre vergogne d’après nos observations. Ces mêmes gens en profitent déjà en tant que conseillers, liquidateurs (à l’instar de la société Qualco appartenant au cousin Orestis, du ministre des Finances Tsakalotos par exemple) et collaborateurs aux multiples cabinets d’avocats spécialisés, engagés sur place par les funds acquéreurs, pour ainsi… liquider le travail final avec l’aimable participation des institutions grecques, censées protéger les citoyens (forces de l’ordre, Justice, notaires). Il faut préciser que la loi dite “loi Katséli”, du nom de la ministre d’alors, au début des mémoranda, qui protégeait la résidence principale des saisies est largement amendée pour devenir pratiquement inopérante.

Nous avons ainsi l’impression que si ce “gouvernement” n’est pas renversé, si les citoyens ne réagissent pas… ou si une guerre civile n’éclate pas (pour ainsi imaginer un scenario terrible et extrême), finalement, une certaine croissance économique, celle tant évoquée par nos ministrions, pourrait enfin se concrétiser. Naturellement… la classe moyenne grecque sera entièrement détruite bien avant, et les Grecs n’en profiteront guère de ce retour à la croissance, hormis cette nouvelle “élite” en gestation, d’ailleurs en partie liée aux anciennes castes du népotisme politico-financier et pour tout dire mafieux… au pays des Éphialtès sans cesse renouvelés.

Les Grecs n’en profiteront guère de ce retour à la croissance, ni des investissements qui finiront alors par arriver, puisque les biens publics et privés ne seront plus grecs. Ainsi, certains capitaux arrivent déjà, par exemple pour acquérir des appartements et d’immeubles proposés par lots. Et cette nouvelle “élite”, elle habitera dans de quartiers de plus en plus protégés, éloignée des… plébéiens et des migrants, à l’image d’autres pays aux Amériques et en Asie, et ainsi, nous pouvons même parier que l’économie de la colonie finira par dégager des “excédents” à répétition. Comme le dirait sans doute Racine en son temps: “Et pour nous rendre heureux, perdons les misérables”, c’est toute une… méthode.

Tsipras, virtuose de la galipette, primé à Paris. Quotidien “Kathimeriní”, novembre 2017
Habitants de Mandra en colère face à Rena Doúrou. Conseil Régional, Athènes, novembre 2017 (presse grecque)
La désolation à Mandra après les inondations. Novembre 2017 (presse grecque)

Et encore, un réaménagement de la dette grecque deviendra sans doute enfin évident aux yeux des nouveaux maîtres du pays, une manière aussi à faire payer pour le supposé redémarrage de l’économie grecque les citoyens des autres pays de la funeste Union européenne, étant donné que depuis 2012, les banques privées françaises et allemandes ont été sauvées… de la dette grecque (tel a été entre autres le but du “jeu”, et non-pas le “sauvetage de la Grèce”, d’après même les déclarations récentes d’un certain Jeroen Dijsselbloem sur le départ).

Cette nouvelle situation est déjà passablement acquise, les salaires pratiqués sont divisés par quatre comparés à ceux de l’avant 2010, les Conventions collectives sont abolies, et depuis la semaine dernière, les administrateurs coloniaux de la Troïka élargie, ont (entre autres mesures et en passant par le doublement du montant des contraventions liées au code de la route) enfin… obtenu des pantins Tsiprosaures, la restriction considérable du droit de grève des salariés, rien que par la modification du processus décisionnel au sein des entreprises et encore, en rendant illégale toute grève initié uniquement par les centrales syndicales et non pas par les syndicats au sein de l’entreprise au cas par cas.

Les Grecs auront déjà compris que “leurs” centrales syndicales auront parfaitement incarné le rôle de soupape à la cocotte-minute sociale durant surtout les premières années de l’Occupation (troïkanne). Cela, après avoir organisé entre 2010 et 2013, de nombreuses grèves et de manifestations très disparates, le plus souvent dans la désunion réellement existante car programmée, le tout, derrière un langage historico-révolutionnaire. Ces “syndicats”, au demeurant financés également par les fonds de l’Union européenne, peuvent désormais disparaître après mission accomplie, depuis en réalité plus de trente ans de réformisme, et leurs récentes manifestations d’une journée à Athènes et à Thessalonique ne changeront d’ailleurs plus la situation.

Le « Parlement – WC ». Quotidien “Kathimeriní”, décémbre2017
Débat sur l’avenir de Chypre et de la Grèce. Athènes, 29 novembre 2017
Débat, Dimitris Belandís (à gauche) et Dimitris Konstantakópoulos. Athènes, le 29 novembre 2017

Au même moment… de la fin des grèves, après ceux qui manifestent leur ultime colère dans les salles d’audience après la saisie et la mise aux enchères de leurs biens, il y a également ces habitants de Mandra (après les inondations subies de novembre dernier), ayant fait irruption en pleine séance du Conseil Régional sous la présidence de la très Syriziste Rena Doúrou ; les altercations ont été encore bien animées.

Et pour nous rendre heureux, perdons les misérables… et leurs pays avec. En Grèce, il y règne désormais une ambiance de colère sourde, de haine, comme de désespoir. S’y ajoute à ce contexte, le si triste théâtre d’ombres des événements régionaux et internationaux, et que nous percevons désormais clairement.

Dans un débat public auquel j’ai assisté récemment à Athènes, il était question de la liquidation en cours de la République de Chypre, ainsi voulue par les puissances maritimes (États-Unis et Grande Bretagne avec l’aimable collaboration de l’ONU et de l’UE). Un processus (presque) sans précédant, dont il a été question ici sur ce blog en décembre 2016 (trois articles consacrés à la pseudo-pacification de Chypre en cours via les “négociations” à Genève, décembre 2016-janvier 2017).

L’actualité de ce débat avait été motivée par la récente publication de l’essai de l’analyste en géopolitique et journaliste Dimitris Konstantakópoulos, consacrée à ce sujet. Parmi les participants à ce débat, Dimitris Belandís, juriste, avocat et membre démissionnaire du Comité central SYRIZA en juillet 2015, il a notamment insisté sur la parfaite anticonstitutionnalité des faits qui se déroulent sous nos yeux, comme sur la violation flagrante de la Charte de l’ONU, et ce n’est qu’un début.

Barbelés au port de Patras. Décembre 2017
Autorité portuaire et drapeau grec. Port de Patras, décembre 2017
Transports… pacifiques. Port de Patras, décembre 2017

Rappelons rapidement que ce Putsch (dont personne ne parle) est en plein développement (depuis 2016), il vise à mettre fin à l’existence de la République de Chypre, sous prétexte de trouver une “solution” au problème Chypriote. Sans façon, il s’agit du ‘plan Annan’ (ONU 2004) réchauffé, et il faut ici rappeler que la surreprésentation politique de la population chypriote turque par rapport à son poids démographique (18% avant l’invasion de l’armée turque en 1974 et l’occupation de la partie Nord de l’île), prévue par ce plan Annan, fut l’un des motifs de rejet de la part des Chypriotes grecs lors du référendum de 2004.

En cas d’application, ce plan créera une entité bien étrange, une tératogenèse de plus, semblable à aucun autre état dans le monde (sauf probablement la Bosnie ou le Timor oriental). Le plan prévoit la création (dans une île relativement petite) de diverses chambres, Parlements et Sénats, avec un système de vetos continus, qui garantira des emplois à de milliers d’avocats et l’impossibilité de ce nouvel ‘État’ de fonctionner.

Le nouvel État ne disposera pas d’armée propre, mais d’une sorte de police internationale pour discipliner les habitants. Ce projet constitue une violation majeure de toutes les dispositions importantes de la Charte des Nations Unies, du droit européen, international et constitutionnel. Ce monstre juridique puise sa légitimité… d’abord dans sa propre logique, et cette logique prétend résoudre le conflit entre la majorité et la minorité à Chypre pour transformer un État indépendant, souverain et démocratique, en une sorte de protectorat postmoderne.

Les exécutants, Alexis Tsipras et surtout Nikos Anastasiádis (Président Chypriote) sont depuis janvier 2017 “fortement invités” à signer cet accord. Comme à Chypre il y a déjà de nombreuses réactions qui rejettent cette “Confédération”, le Coup d’État consiste à doter de ce premier accord (qui n’a pas pour l’instant abouti) d’une valeur juridique (ce que le Président Anastasiádis n’a pourtant pas car il s’agit de la dissolution de l’État qu’il préside), le tout, en évitant et en court-circuitant la tenue d’un nécessaire referendum à Chypre.

Ravitaillement en carburant. Port de Patras, décembre 2017
Camions fouillés à la recherche de migrants. Port de Patras, décembre 2017
Conducteur surveillant son camion. Port de Patras, décembre 2017

Sauf que Chypre et Grèce sont ces deux pays davantage épuisés par la Troïka, aux populations fatiguées, à la psychologie suffisamment “travaillée” par l’ingénierie sociale, et cela en accélérée depuis l’installation de l’austérité… en tant que régime politique. Le livre de Konstantakópoulos, ainsi que le débat conduisent alors à l’évidence, celle que les Grecs reconnaissent à présent et cependant sans pouvoir réagir: Sous ces programmes de la Troïka, s’y loge de fait un implacable agenda géopolitique.

C’est exactement cet aspect des réalités que Dimitris Belandís a également illustré, en précisant au passage son point de vue politique: “SYRIZA, ce n’est pas la gauche”, c’est vrai mais désormais, c’est même accessoire, pour ne pas dire insignifiant que de démystifier la teneur politique exacte de SYRIZA de Tsipras, ou de la Nouvelle Démocratie de Mitsotakis, nous n’en sommes plus là… pour ne pas dire, nous ne sommes plus.

Ce que la gauche (avant même la société grecque) n’avait pas saisi (ou n’a pas voulu comprendre), c’est qu’il ne s’agissait pas seulement d’une austérité financieriste et néolibérale (ou ordolibérale) dont il fut et il est d’ailleurs toujours question, et cela, bien dès le début du processus. Il faut remarquer que la dite austérité infligée à la Grèce l’a privé du 27% de son PIB en sept ans (ce qui dépasse la proportion du PIB français perdu durant la Première guerre mondiale par exemple), et que cette même saignée n’a pas été imposée à d’autres pays troïkanisés, comme le Portugal.

En réalité, cet affaiblissement alors complet de la Grèce (habitants, richesses, institutions, culture, démographie, capacité de réaction comme de renouvèlement/remplacement démocratique de sa classe politique), ne relève plus de la simple “correction néolibérale”, car ce processus, après huit années de totalitarisme troïkan, prive désormais les Grecs du noyau dur et central de leur souveraineté, en même temps qu’il les prive de leurs biens publics et privés, et in fine, il les prive de leur régime démocratique. On comprend désormais, combien ces indépendances, grecque (depuis 1830) et chypriote (depuis 1960) qui n’ont d’ailleurs jamais été entièrement admises par les puissances “gérantes” maritimes et occidentales (Grande Bretagne et États-Unis), eh bien, elles devraient désormais s’effacer complètement.

Patras et la première neige sur ses montagnes. Décembre 2017
Fin novembre 2017 près d’Athènes. Embellies révolues
En mer Adriatique. Décembre2017

Tel est donc l’agenda réel et géopolitique de l’austérité, et non pas seulement une affaire de lutte des classes, hélas. C’est d’autant vrai dans la mesure où la géopolitique actuelle des élites de la globalisation financieriste devient essentiellement celle du chaos, et non-pas celle de la stabilité, y compris en Europe. Les derniers accords passés entre le pantin Tsipras et les États-Unis sur le renforcement accéléré du rôle des bases militaires étatsuniennes en Crète (et bientôt au nord de la Grèce), dont leur armement potentiellement nucléaire (sans parler des accords tenus secrets que même les députés cosmétiques du “Parlement” grec ignorent autant que nous), ne présagent rient de très apaisant dans un futur alors aux faits très probablement imminents.

Nous voilà donc à la fin d’un processus et autant au début d’un autre, le tout, dans un contexte de guerre asymétrique, de guerre larvée, de guerre même à venir, impliquant les puissances maritimes occidentales, l’Iran, voire, la Russie et la Chine. On comprend donc mieux. La… préparation Tsipras (et de Tsipras) est justement celle qui fait passer la Grèce dans la phase-II du programme d’anéantissement, la phase-I étant celle allant de 2010 (et de la marionnette initiale de Papandréou) à 2015. On se souviendra de l’arrivée de SYRIZA au pouvoir pour prétendument mettre fin aux mémoranda, à travers l’idée globale “de la dignité retrouvée, de l’espoir qui revient et du triomphe de la démocratie”. Pauvres citoyens.

Le choc fut comme prévu énorme, et le deuil n’en finit plus. Depuis ce crime du siècle, ainsi commis par les escrocs Syrizistes (telle est en tout cas l’avis de la majorité des Grecs), les citoyens ainsi lamentablement trompés se méfient alors de l’ensemble de “leur” personnel politique et médiatique. Le climat devient plus délétère que jamais, les services secrets (et moins secrets) des puissances étrangères contrôlent les médias, autant que certains barons locaux du népotisme de la politiques comme de l’économie, dont SYRIZA et son allié des “Grecs Indépendants” devenant ainsi les nouveaux champions en la matière. Pendant ce temps, la marionnette Mitsotakis attendra son heure à la minute près, c’est-à-dire, au moment où Washington, Berlin et Bruxelles jugeront que le pantin Tsipras ne sera plus utilisable. Récemment (il y a deux semaines), un scandale politico-financier et diplomatique a éclaté depuis que tout le monde a appris qu’un certain matériel militaire (des munitions), était en phase d’être vendu par la Grèce à l’Arabie Saoudite. Dans la foulée, un certain Papadópoulos (inconnu du grand public), et proche du ministre de la Défense Kamménos (chef du parti allié à SYRIZA des “Grecs Indépendants”), est présenté comme étant le présumé entremetteur dans cette affaire (et toujours bien rémunéré pour ses services). D’après l’affaire telle que les médias ont voulu la présenter, Papadópoulos aurait mal rempli son rôle, et la vente a finalement été gelée, voire annulée, tenant finalement compte (pour les apparences), de la guerre que l’Arabie Saoudite livre en ce moment au Yémen.

Protestation et désarroi devant la saisie de sa maison. Athènes, novembre 2017 (presse grecque)
Une certaine presse du moment. Athènes, décembre 2017
Du côté des vitrines. Athènes, novembre 2017

Aussitôt, “l’opposition” (Nouvelle Démocratie) et essentiellement le clan Mitsotakis, ont présenté au “Parlement” de nombreux documents compromettants, et cependant classés confidentiels, les services secrets grecs (?) et étrangers s’y seraient ainsi mêlés… pour que l’affaire puisse relever ensuite de l’imbroglio total. Sauf qu’il y a sans doute d’autres affaires en cours, beaucoup plus graves et que les Grecs ne devraient point les connaître… avant sans doute un nouvel fait accompli.

Nos eaux sont agitées et elles sont saumâtres. C’est aussi pour cette raison que l’association (Think Tank) “a/simmetrie” (“Asymétries”) m’a fait l’honneur en m’invitant en tant qu’intervenant au colloque qu’elle vient d’organiser sous le patronage de l’Université des Abruzzes à Pescara (Italie du Sud), tenu le 2 et le 3 de ce décembre, sous le thème: “Europe, Globalisation et Austérité – Quel rôle pour l’Italie – Davantage d’Italie ?”. Je tiens à remercier d’ailleurs publiquement “a/simmetrie”, son initiateur, le professeur d’économie à l’Université de Pescara Alberto Bagnai, ainsi que l’Université des Abruzzes pour cette invitation, pour son accueil, et autant, pour la prise en charge de la réalisation matérielle de mon voyage, sans laquelle il ne serait d’ailleurs pas possible.

Et je parle de voyage et non pas de déplacement, car sa particularité fut qu’il a été réalisé par la route (800 km en A/R entre Athènes et Pescara), et par bateau, entre Patras et Ancône, délaissant volontairement le… sacrosaint avion, comme c’est le plus souvent le cas en pareils déplacements. Ce voyage alors ainsi voulu, avait été l’occasion de constater certains faits, de sentir combien depuis la Grèce, le voyage en Italie (et bien au-delà) demeure un voyage autant dans le temps géopolitique et ainsi crisique. L’Italie et la Grèce ne se trouvent pas dans le même cycle à travers leurs situations respectives, c’est évident.

Le professeur Alberto Bagnai. Pescara, le décembre 2017
Débat sur l’austérité. Pescara, le 3 décembre 2017
Copies… du passé comme du présent. Librairie d’Athènes, novembre 2017
Ouzo du mois de novembre. Courtes embellies révolues en Attique

Ces voyages laissent aussi la porte entrouverte pour apercevoir certaines saignées de notre modernité (ce que l’aseptisation de l’avion et des aéroports ne permettent plus), lorsque par exemple, on observe au départ du port de Patras et alors “à chaud”, ces tentatives désespérées des migrants pour se cacher entre les essieux et les marchandises des camions. Les camionneurs inquiets veillent sur leurs engins, les policiers et les vigiles… travaillent, les passeurs devraient aussi s’y trouver quelque part tout de même. Voyager par la route, c’est aussi une manière de constater enfin, combien les autoroutes italiennes sont toujours si bien fréquentées, tandis que celles de Grèce se sont vidées depuis 2010. Puis, il y a en Italie ces préparatifs de Noël, les publicités, et l’ambiance qui font penser à la Grèce des années de l’avant-crise, certaines publicités italiennes sont depuis longtemps devenues… disons intenables chez les Grecs.

Durant le colloque, j’ai été interviewé par le professeur Alberto Bagnai devant le public averti et curieux des affaires grecques, sur la situation du pays, et j’ai insisté sur certains faits alors évidents, s’agissant bien désormais de la phase-I, et de la phase-II dans “l’affaire grecque”.

J’ai insisté notamment sur ce calendrier bien précis de l’austérité, dissimulant hélas fort bien son agenda géopolitique, et sur la neutralisation (et canalisation) des réactions populaires, sur la mise à mort de la démocratie, entre autres et par exemple, en faisant adopter par le “Parlement” le texte du mémorandum Tsipras (août 2015), long de 7.500 pages que la Troïka a imposé. Un texte rédigé il faut préciser, en langue anglaise et seulement partiellement traduit en grec… d’ailleurs de manière automatique, texte pourtant affectant pratiquement tous les secteurs de l’activité, de la démocratie, des droits, comme de la vie des Grecs que les députés n’auront d’ailleurs pas lu. “De toute manière et humainement, nous n’avions guère le temps de le lire”, comme l’avaient déclaré certains ministres Syrizistes à la presse en 2015.

Retour au pays, le Nord de l’île de Corfou. Décembre 2017
Retour au pays. Igoumenítsa, extrémité Nord-Ouest de la Grèce. Décembre 2017

Les asymétries économiques dont, s’avèrent tôt ou tard dissimuler des asymétries géopolitiques, et pour aller jusqu’au fond du raisonnement, j’ai démontré qu’au bout du compte, le peuple grec est en train de subir une forme de guerre et d’agression alors asymétriques. C’est ainsi et pour tout dire toute la crainte des amis Italiens (ceux dont les yeux et les oreilles sont déjà ouverts en tout cas), que leur pays puisse “accepter” finalement sa future vassalisation troïkanne, faisant ainsi suite au dosage d’austérité que le pays de Garibaldi doit déjà supporter. Certes, la géopolitique liée à l’Italie n’est guère comparable à celle de la Grèce ou de Chypre, sauf que le raisonnement (irrationnel) de base (austérité, métadémocratie, vassalisation) semble ainsi immuable, indépendamment des pays concernés.

Au bout du processus dont l’euro constitue d’ailleurs une pièce maitresse, c’est la mort de la démocratie, c’est la mort de l’économie maitrisée sur un territoire donné par les citoyens, et c’est autant la fin de toute maîtrise du temps (du futur) et ainsi la défaite de tout espoir, à moins de briser et alors la totalité de la… coquille (entre autres européiste). C’est pour cette raison que je ne crois guère à “une autre Europe possible”, et encore moins au “Plan-B” à son propos, c’est triste à dire peut-être, ou à faire admettre, mais c’est alors ainsi.

Animaux adespotes d’Italie. Pescara, décembre 2017

Sinon, ce voyage a été l’occasion pour moi que de sortir du cadre psycho-mortel de la Grèce actuelle et ce n’est pas rien, puis, de voir comme on dit un peu de pays… avant peut-être qu’il ne soit plus du tout possible.

Les derniers beaux jours (météorologiques) de novembre et de son ouzo sur les plages d’Athènes sont bien loin, et de retour au pays, j’ai retrouvé nos appartements désespérément froids car sans chauffage central depuis 2012, puis, nos animaux que les voisins ont bien voulu garder durant… l’expédition et… observation participante en Italie.

Pluies et alors vents. Dans l’ancien temps on croyait même préparer Noël, sauf que chaque illusion peut ainsi connaître sa fin. De retour en Grèce, on se sent comme de nouveau englué dans une mélasse qui entrave la réflexion, qui empoisonne le moindre petit bonheur quotidien, et qui rend par la même occasion, toute vision des humains comme des paysages, comme obscurcie par un voile de deuil.

Cependant, j’ai pu raconter à notre grande Mimi et surtout à notre petit Hermès, dit le Trismégiste (et déjà… vieux de ses quatre mois), qu’en Italie aussi, il y a des animaux parfois adespotes (sans maître). Mission donc accomplie… géopolitique ou pas. Retour au pays et aux difficultés encore pour passer l’hiver ! Pauvre blog… dans l’exacte splendeur de sa survie…

Hermès de Greek Crisis retrouvé. Décembre 2017
* Photo de couverture: Alberto Bagnai (à gauche) et Panagiótis Grigoríou au colloque de A-Simmetrie. Italie, Pescara le 3 décembre 2017

mais aussi pour un voyage éthique, pour voir la Grèce autrement “De l’image à l’imaginaire: La Grèce, au-delà… des idées reçues !”   http://greece-terra-incognita.com/

Sur les recommandations de l’ONU au FMI

par Chiara Filoni CADTM Belgique

CC-Wikimedia commons

En juillet 2017, Alfred-Maurice de Zayas, Expert indépendant sur la promotion d’un ordre international démocratique et équitable pour les Nations unies, a publié son sixième rapport qui examine l’incidence des politiques du Fonds monétaire international (FMI) et en particulier de la « conditionnalité » de ses prêts sur l’ordre international et les droits humains. Nous publions ici quelques commentaires sur ses constats et sur les recommandations qu’il adresse au FMI.

Le but de ce rapport, lisons-nous dans l’introduction, n’est pas de produire des analyses ou des prévisions en matière de macroéconomie, mais plutôt d’examiner la situation actuelle en vue de formuler des recommandations au FMI pour que ses politiques soient conformes avec le régime international relatif aux droits humains. Ce régime, qui fait partie de ce que l’on pourrait appeler le droit international coutumier, s’applique tant aux États qu’aux organisations intergouvernementales et aux entreprises multinationales puisque il est au-dessus de toute autre réglementation.

En effet, bien que le FMI soit une organisation internationale indépendante des Nations unies et qu’elle ait signé en 1947 un accord qui stipule que « le Fonds est une organisation internationale indépendante et doit fonctionner comme telle », cela ne veut pas dire qu’elle est dispensée de la responsabilité des conséquences néfastes que peuvent entraîner ses prêts sur les droits humains. De plus, la Banque mondiale et le Fonds monétaire international (FMI), en tant qu’agences spécialisées de l’ONU, sont liées aux objectifs et aux principes généraux de la Charte des Nations unies, parmi lesquels figurent le respect des droits humains et des libertés fondamentales.

Par conséquent, il leur est interdit d’imposer des mesures qui empêchent les États de se conformer à leurs propres obligations nationales et internationales en matière de droits humains. |1|


Conditionnalité fatale

Dans la rédaction de ces recommandations l’expert indépendant se base sur des études empiriques, de rapports d’autres experts et d’ouvrages critiques comme l’excellent livre de Naomi Klein, La stratégie du choc ou celui de Thomas Piketty Le Capital au XXIe siècle ou encore des questionnaires complétés par des organisations de la société civile comme Human Rights Watch ou le CETIM.

L’auteure de la Stratégie du choc démontre par exemple que l’« aide » du FMI à des pays en crise économique et sociale a « transformé la crise en catastrophe ». Naomi Klein décrit dans son livre comment la « thérapie » des privatisations instantanées- qui a été imposée par le FMI et le département du Trésor des États-Unis dans les années 1990 à des pays comme l’Argentine, la Bolivie, la Fédération de Russie et le sud-est asiatique souvent pour des raisons d’opportunisme – a eu des conséquences dévastatrices sur l’exercice des droits de l’homme. |2| De plus, cela a été fait parfois, comme dans le cas de Trinité-et-Tobago, par le biais de fraudes statistiques, comme l’augmentation fictive de la dette gouvernemental afin d’exagérer le niveau de la crise économique et d’appliquer des programmes d’austérité.

Malgré la reconnaissance de problèmes liés à l’approfondissement des inégalités et les efforts pour améliorer son image, notamment par des fiches techniques et des déclarations officielles, selon l’expert, le FMI reste accroché à l’idéologie du Consensus de Washington. Pour le fonds en fait, stabilisation, libéralisation et privatisation stimuleraient automatiquement la croissance économique, dont les « effets de ruissellement » devraient améliorer le niveau de vie de toute la population.

Toutefois, comme l’affirme Alfred-Maurice de Zayas dans ce rapport, lorsqu’un pays s’engage dans un resserrement budgétaire excessif afin d’atteindre les objectifs macroéconomiques fixés par le FMI (croissance économique permettant d’honorer le service de la dette), peu de ressources subsistent pour les dépenses sociales. Il a été démontré par exemple que, outre sa capacité à affaiblir les infrastructures du secteur public, la conditionnalité imposée par le FMI menace le droit à la santé : dans la course à la croissance économique à tout prix, les investissements à long terme, tels que ceux requis pour améliorer les soins de santé, sont relégués au second plan.

En outre, il a été observé qu’il existe un lien entre la conditionnalité du FMI, les dépenses réduites dans le secteur de la santé et la flambée d’Ebola en Afrique de l’ouest. Ainsi, en 2013, juste avant la flambée, trois des pays les plus touchés par l’épidémie avaient si bien suivi les prescriptions du FMI en termes de politique macroéconomique qu’ils n’avaient pas atteint les objectifs de dépenses sociales. |3|

Le refus d’un cadre pour les restructurations de dettes et le cas de la Grèce

En 2001 le FMI a refusé une nouvelle approche de la restructuration de la dette souveraine proposée par Anne Krueger, alors directrice générale adjointe du FMI. Cette proposition prévoyait la « création d’un cadre offrant au pays débiteur une protection légale contre les créditeurs qui s’érigent en obstacle contre une restructuration nécessaire. En contrepartie, le débiteur aura l’obligation de négocier de bonne foi avec ses créditeurs et d’adopter des politiques pour éviter la réapparition de problèmes similaires dans le futur ». |4|

Malgré les limites de cette proposition à nos yeux de militant-e-s engagé-e-s dans la lutte pour l’annulation de la dette illégitime, la seule possibilité d’imaginer un cadre permanent pour la restructuration des dettes fait peur au FMI, qui souvent vit sur le dos des pays en défaut de paiement ou en difficulté économique. |5| est exemplaire à cet égard.

Selon le Bureau indépendant d’évaluation, le FMI a violé sa propre règle fondamentale en autorisant le sauvetage financier de 2010 à partir du moment où il ne pouvait pas garantir que le plan de renflouement permettrait de contrôler la dette du pays. Comme l’explique Michel Husson, après l’expérience désastreuse en Argentine, le FMI s’était fixé comme règle de n’accorder de prêts importants qu’à des pays dont la dette était jugée soutenable avec une forte probabilité. Or, dans le document préparatoire du plan de sauvetage on peut lire : « il est difficile d’affirmer catégoriquement que tel est le cas avec une forte probabilité ». Cette constatation finale aurait donc dû conduire à refuser le programme d’aide à la Grèce. |6| L’exception dans le cas de la Grèce a été décidée en raison du risque de « contagion systémique ». En effet, la préoccupation était de sauver l’union monétaire, non d’aider la Grèce à sortir de la crise.

En décembre 2015, l’Expert indépendant chargé d’examiner les effets de la dette extérieure et des obligations financières internationales connexes des États sur le plein exercice de tous les droits de l’homme, Juan Pablo Bohoslavsky, alarmé par la situation d’une grande partie de la population grecque, appelait à prendre en compte les facteurs sociaux.

Alfred-Maurice de Zayas encourage le FMI à intégrer les Principes fondamentaux des opérations de restructuration de la dette souveraine contenus dans la résolution adoptée le 10 septembre 2015 par l’Assemblée générale de l’ONU, |7| ceci contrairement à ce qui s’est passé lors des différents mémorandums en Grèce, où le FMI a joué le jeu de créanciers et n’a pas du tout cherché à protéger la population, dont les conditions de vie se sont dramatiquement dégradées suite aux conditionnalités appliquées en échange de cette opération. |8|

L’expert va plus loin en affirmant que les politiques de la Troïka face à la crise grecque ne peuvent aboutir qu’à des violations continues des droits de l’homme.

L’expert va plus loin en affirmant que les politiques de la Troïka face à la crise grecque ne peuvent aboutir qu’à des violations continues des droits de l’homme

La mauvaise foi des créanciers est évidente en Grèce – mais aussi dans d’autres pays comme l’Argentine ou la Tunisie : les mesures imposées portent atteinte aux droits fondamentaux des peuples, en violation de la législation nationale et internationale. Il souscrit par conséquent aux conclusions du rapport préliminaire de la Commission pour la vérité sur la dette publique selon lesquelles 85 % la dette grecque est odieuse, illégitime, illégale et insoutenable et doit donc être annulée.


Quelles recommandations ?

Pour toutes ces raisons- et pour d’autres encore- l’Expert indépendant formule les recommandations suivantes au FMI et par ailleurs aussi à la Banque mondiale.

- Modifier leurs Statuts afin de promouvoir le développement et les droits de l’Homme à travers des pratiques de prêt « intelligentes » qui bénéficient non seulement aux banques et spéculateurs, mais à des milliards d’êtres humains. L’expert cite à ce propos l’exemple de la Banque mondiale, qui a récemment soutenu l’objectif de couverture sanitaire universelle.
Malgré l’importance de cette recommandation ayant comme but de limiter les dommages causés par la politique de prêt du FMI, deux aspects posent problème.

1. L’Expert reconnaît que les deux institutions de Bretton Woods ont toujours joué le jeu des banques, voire, dans les termes de Karin Lissakers, représentante des États-Unis au Conseil d’administration du FMI dans les années 1990, sont les « exécuteur[s] des contrats de prêt des banques », pourtant il ne va pas jusqu’à exiger du FMI qu’il soit indépendant des banques et octroie des prêts uniquement au bénéfice des populations des pays destinataires.

2. Il ne met pas en cause les promesses de la Banque mondiale quant à l’objectif de couverture sanitaire universelle. Or il nous semble assez naïf de croire que les déclarations de cette institution se transforment nécessairement en réalité. Comme l’affirme l’ONG Bretton Woods Project, |9| la Banque mondiale elle-même a déjà déclaré que l’objectif de couverture sanitaire universelle est loin d’être atteint, surtout dans les pays les plus pauvres où les ressources économiques sont limitées.

Pour cette raison la BM semble s’orienter plutôt vers un système de protection privée financée par les créanciers dans une approche basée, encore et toujours, sur la performance économique. L’objectif final reste en effet toujours la croissance économique ; par conséquent les investissements dans les secteurs de la santé font partie d’un calcul de coûts-avantages au lieu d’être considérés comme des dépenses fondamentales pour la réalisation du droit humain à la santé. La seule dépense financée par le public sera un package d’interventions sanitaires de base (pas encore bien défini). Pour d’autres interventions (hors package) les patient-e-s devront payer de leur poche ou s’en passer !

On voit mal, dès lors, comment ce programme pourra atteindre les objectifs de fin de la pauvreté et d’une plus grande prospérité pour tou-te-s, comme déclaré par l’institution.

À noter que la BM parle également de « système éducatif universel » à atteindre par le biais d’écoles privées, une méthode qui en réalité sape le droit à l’éducation pour tous et toutes. |10|

- Exiger des avis consultatifs de la Cour internationale de Justice au sujet de toute question juridique soulevée dans les limites du champ de ses activités, comme décrit dans l’article VIII de l’accord du FMI et des Nations Unies précédemment cité. L’expert tient à rappeler également qu’aucune institution financière internationale ni aucun accord commercial n’est au dessus du droit international.

- Assujettir ses prêts à l’adoption d’une législation nationale qui garantit que les entreprises nationales et transnationales s’acquittent de leurs impôts ; interdit le transfert de bénéfices et proscrit les paradis fiscaux ; taxe les transactions financières, prévient la corruption et les pots de vin, inclut des règles générales anti-évitement ; assure l’emprunteur qu’aucune partie d’aucun prêt ne sera utilisée pour satisfaire les réclamations de fonds vautours ou de créanciers récalcitrants.

Toutes ces mesures faciliteraient en effet la lutte contre la fraude fiscale, limiteraient les inégalités, éviteraient le gaspillage et la corruption. Pourtant, même si le FMI reconnaît dans ses publications l’importance de la transparence fiscale et de la lutte contre la corruption, selon Human Rights Watch ces normes ne sont guère appliquées en pratique. Le Manuel du FMI sur la transparence des finances publiques, qui fournit des orientations quant à la mise en œuvre de son Code des bonnes pratiques en matière de transparence des finances publiques, reconnaît que ces normes doivent être appliquées sur les dépenses et revenus militaires mais, en pratique, l’institution n’a pas usé de son pouvoir d’influence pour soutenir le progrès dans ce domaine.

- Assujettir ses prêts à la déclaration d’un moratoire sur les dépenses militaires (excluant les salaires et pensions) pendant la durée du prêt.
En réalité le FMI a jusqu’ici refusé cette proposition ; une fiche technique précise d’ailleurs que « La politique du Fonds prohibe l’établissement de conditions requérant des membres la réduction des niveaux de leurs dépenses militaires. Bien que la somme que les autorités d’un pays membre dépensent sur le secteur militaire puisse être de taille par rapport à la situation macroéconomique du pays, le Fonds adopte la position que les dépenses militaires sont d’une nature intrinsèquement politique et qu’il serait inapproprié qu’elles fassent l’objet d’une conditionnalité ». Voilà qui cadre bien avec la partialité politique des institutions de Bretton Woods, illustrée par leur soutien financier aux dictatures qui ont sévi au Chili, au Brésil, au Nicaragua, au Congo-Kinshasa, en Roumanie à partir des années 1950. |11|

- Plus globalement, redéfinir ses priorités et finalement abandonner les conditions obsolètes de privatisation, de déréglementation des marchés et d’ « austérité » dans les services sociaux qui entraînent nécessairement des violations des droits de l’homme.

Abandonner les conditions obsolètes de privatisation, de déréglementation des marchés et d’« austérité » dans les services sociaux

Selon l’expert, l’amélioration de conditions de vie des personnes requerrait que le FMI adopte une approche fondée sur les droits de l’homme en rupture avec le consensus de Washington et inspirée par une philosophie plus « progressiste » du développement.

Le CADTM nourrit peu d’espoir que ce changement puisse arriver un jour au vu de la politique néolibérale promulguée par les deux institutions, leur fonctionnement anti-démocratique et leurs asservissement aux exigences de certaines États du Nord, à commencer par les États-Unis. |12| Raison pour laquelle le CADTM s’est toujours positionné en faveur du remplacement de la Banque mondiale, du FMI et de l’OMC par des institutions démocratiques qui mettent la priorité sur la satisfaction des droits humains fondamentaux dans les domaines du financement du développement, du crédit et du commerce international (extrait de notre charte politique). Nous constatons d’ailleurs que le FMI utilise l’argument du respect de ses statuts quand cela l’arrange mais que l’interdiction de prendre en compte les considérations « politiques » et « non économiques » est systématiquement contournée. Il est essentiel que l’Assemblée générale de l’ONU et les différent-e-s expert-e-s continuent de tirer la sonnette d’alarme sur la violation de droits humains dont les institutions internationales se rendent complices et de nourrir le débat citoyen sur la nécessité d’inverser radicalement l’ordre économique mondial et les politiques des acteurs institutionnels.


Merci à Christine Pagnoulle pour sa relecture

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Notes

|1| Pour plus d’infos sur le sujet lire Renaud Vivien, Banque mondiale, une zone de non-droit protégée par des juges, disponible sur http://www.cadtm.org/Banque-mondiale-une-zone-de-non

|2| Naomi Klein, La stratégie du choc : la montée d’un capitalisme du désastre, coll. « Babel » (Toronto, Léméac/Actes Sud, 2008).

|3| Pour plus d’informations lire l’article par Émilie Paumard, Le FMI et la Banque mondiale ont-ils appris de leurs erreurs ? publié sur : http://www.cadtm.org/Le-FMI-et-la-Banque-mondiale-ont

|4| Pour plus de détails consulter le rapport de l’expert, p.24

|5| Lire l’article de Jubilee Debt Campaign Le FMI a fait 2,5 milliards € de bénéfice sur ses prêts à la Grèce disponible sur http://www.cadtm.org/Le-FMI-a-fait-2-5-milliards-EUR-de Le cas de la Grèce

|6| Pour plus de détails sur les discussions interne au FMI en 2010 voir l’article par Michel Husson, Grèce : Les “erreurs” du FMI disponible sur http://www.cadtm.org/Grece-les-erre…

|7| Ici le texte complet : http://unctad.org/meetings/fr/Sessi… et les réflexions du CADTM à ce sujet : http://www.cadtm.org/Reflexions-initiales-quant-a-la

|8| Eric Toussaint, L’échec de la restructuration de la dette grecque en 2012 : quelques enseignements à tirer par publié le sur http://www.cadtm.org/L-echec-de-la-… et Xavier Dupret, Restructuration de la dette grecque. Bénéfice sur toute la ligne pour les créanciers… disponible sur http://www.cadtm.org/Restructuration-de-la-dette

|9| A healthy step forward ? World Bank outlines vision for healthcare publié en juin 2013 par Bretton Woods projets et disponible sur http://www.brettonwoodsproject.org/…

|10| Education for all ? World Bank emphasises universal education policies publié en juin 2013 par Bretton Woods Project et disponible sur http://www.brettonwoodsproject.org/…

|11| Pour plus d’information sur le sujet lire Eric Toussaint, Le soutien de la Banque mondiale et du FMI aux dictatures publié sur http://www.cadtm.org/Le-soutien-de-la-Banque-mondiale,734

|12| Eric Toussaint Le FMI : une institution antidémocratique qui impose la régression sociale publié sur : http://www.cadtm.org/Le-FMI-une-ins…

Auteur.e

Chiara Filoni Permanente au CADTM Belgique

Grèce : Stéphan Pélissier condamné

Grèce: Un Albigeois condamné à sept ans de prison pour avoir secouru sa belle-famille syrienne

JUSTICE En Grèce, l’Albigeois est considéré comme un passeur de migrants…

Helene Menal Publié le 29/11/17 à 20h27

Il avait beau s’attendre au pire, le verdict lui a fait l’effet d’un coup de massue. Stéphan Pélissier, un juriste albigeois, vient d’être condamné ce mercredi à sept ans de prison par la justice grecque qui lui reproche d’être un passeur de migrants.

Sa grande faute ? Etre parti en Grèce en août 2015 pour voler au secours de la famille syrienne de sa femme. Ses beaux-parents, un cousin et sa belle-sœur venaient d’effectuer une première traversée en Méditerranée sur un Ziodac surpeuplé, évitant de peu la noyade. Quand Stéphan Pélissier a appris qu’ils s’apprêtaient à embarquer de nouveau pour gagner l’Italie, il a décidé d’aller les chercher en voiture. Et le convoi familial s’est fait pincer.

« Le choc et l’incompréhension »

Théoriquement, en droit européen, le lien familial exonère. Mais la justice grecque ne l’a pas retenu dans son dossier et a condamné lourdement l’Albigeois en tant que vulgaire passeur. Le juriste a appris le verdict à son domicile tarnais. « C’est le choc et l’incompréhension. Je suis scandalisé », réagit-il, « écœuré » par la justice grecque.

Il n’a évidemment pas l’intention de se constituer prisonnier. Il va faire appel, avec au fond de lui « un sentiment d’abandon » face au silence de la diplomatie française sur le cas de son ressortissant. Malgré une pétition en ligne et malgré un courrier adressé à Emmanuel Macron.

http://www.20minutes.fr/monde/2178623-20171129-grece-albigeois-condamne-sept-ans-prison-avoir-secouru-belle-famille-syrienne


Lire notre précédent http://www.infoadrets.info/grece/poursuivi-en-grece-pour-avoir-tente-de-sauver-sa-belle-famille-syrienne/


Dernières nouvelles : La peine peut être « rachetée » via une indemnité équivalente à 5 euros par jour pendant 7 ans, soit environ 12800 euros, ce qui est scandaleux.
La médiatisation repart, d’ores et déjà une cagnotte solidaire et participative a été lancée, en voici le lien
https://www.leetchi.com/c/solidarite-de-stephan-pelissier

Question de prix La rubrique de Panagiotis Grigoriou

Panagiotis  Grigoriou est Ethnologue et historien, chroniqueur, analyste, initiateur d’un concept de tourisme alternatif  et solidaire en Grèce. Le regard de l’historien et de l’anthropologue sur l’actualité et le vécu de la crise grecque.

Question de prix

 

Modernité accrue. Ateliers dits du monde. Les marchands du temple inventent, et ils inventeront jusqu’au clash final. Les enjolivures de Noël sont de retour, tandis que “nous introduisons Black Friday pour la première fois en Grèce”, ce sont les marketistes qui s’expriment de la sorte. Question de prix, comme autant pour Alexis Tsipras… pour son énorme “Prix du courage politique”. Il lui a été discerné cette semaine à Paris, couplé de celui de l’engagement au prétendu “idéal Européen”. Marchands du temple comme du “Template”, outrage politique… vendredi, effectivement noir.

Terracotta tombale. Chypre, époque classique. Musée d’art cycladique. Athènes, novembre 2017

Pour souffler un peu et pour peut-être enfin apercevoir notre monde… de l’endroit, il nous suffirait parfois une visite au Musée de l’Art Cycladique (Athènes), pour par exemple observer pendant quelques minutes cette Terracotta tombale conçue à Chypre de l’époque classique (400-310 av. J.-C.), terre cuite tout simplement à son regard alors ultime.

Les médias insistent et en rajoutent pour ce qui a tenu de la cohue qu’a provoquée dans certaines rues et sur certains trottoirs d’Athènes, cet appel… si global et marchand du vendredi noir. Devant les enseignes de taille, les plus jeunes surtout, ils auront incarné sans nécessairement le réaliser, la preuve tangible par l’aboutissement de l’offensive du (seul) technotropisme… réellement existant, marchandisé à outrance.

Les armes d’autrefois devenant parfois (pas toujours) nos dernières curiosités muséales, tandis que les armes nouveaux, ils incarneront désormais les trouvailles en matière de guerre asymétrique, vitrines comprises. Modernité oblige, on s’entassera comme alors nos ancêtres s’amassaient il y a un siècle tout juste, dans les boyaux et les tranchées de la Grande guerre… ainsi nous, devant les Smartphones, iPhone et autres… métaphones, car crise ou pas, un certain peuple en raffole. Gueules cassées d’antan, gueules cassées finalement de toujours. Fragments d’écrans… comme fragments d’obus. Vendredi, effectivement noir

Métaphones alors, puis, quelques vêtements et chaussures ont été parmi les articles prisés, question disons de prix. Et pendant que cette cohue le plus souvent localisée et médiatisée, les petits commerces des quartiers étaient comme d’habitude, désertés. Modernité ainsi accrue. Les marchands du temple inventent, à l’image de ce mannequin enchaîné derrière une vitrine dans le quartier aisé de Kolonáki, près du centre d’Athènes.

Vendredi…noir. Athènes, novembre 2017
Les armes de jadis. Musée de la guerre. Athènes, novembre 2017
Le… vendredi noir des jeunes. Athènes, le 24 novembre (Presse grecque,)
La dite mode. Athènes… et forcément Mykonos. Novembre 2017

Chez le bouquiniste proche des boutiques de mode et des derniers métaphones, on y découvre alors pêle-mêle, T. S. Eliot et son “Meurtre dans la cathédrale” traduit par le poète Yórgos Seféris, “Les maladies de la personnalité” de Théodule Ribot ouvrage traduit par Galateia Kazantzákis (écrivaine et première épouse de Nikos Kazantzákis), “L’histoire de la Grèce Antique” par l’Académie des Sciences de l’URSS… ainsi que le “Journal de Joseph Goebbels”. Ateliers dits du monde (ancien ?).

C’est également de notre distante et fraîche saison… technologique, la nouvelle est venue de l’île de Crète. C’est à l’intérieur des vestiaires d’un stade en construction, que le corps inanimé d’un homme sans-abri vient d’être retrouvé (encore) cette semaine. Il a été repéré par la sonnerie de son téléphone mobile qui résonnait sans réponse derrière la porte fermée des vestiaires (presse locale de Crète du 21 novembre 2017) . Humanité… déshabillée, plus l’électricité et son “existence” numérique.

Déchets du moment. Athènes, novembre 2017
On décore les vitrines. Athènes, novembre 2017
T.S. Eliot et Th. Ribot. Athènes, novembre 2017
Boutique reprise en travaux. Athènes, novembre 2017

Déchets, affiches et spectacles relevant du prochain “rituel”, celui de Noël, c’est d’ailleurs le moment des décorations et parfois des travaux, lorsque les magasins en faillite retrouvent preneurs, et ce n’est que très partiellement le cas. Ou sinon, (en paraphrasant à peine une réflexion d’André Breton pour ainsi réactualiser, si c’est encore possible, sa portée), comment et combien la précarité artificielle de la condition sociale (et techno-économique) de l’homme ne devrait point lui voiler la précarité réelle de sa condition humaine… et pourtant.

Disons-nous, que les apparences d’une normalité sont sauvées, ceci, car elles restent dans un sens fonctionnelles. De toute manière, les médias rodés au néant, ils ne se focaliseront guère trop longtemps sur la mise aux enchères des biens immobiliers saisis par le fisc comme par les banques. Désormais, leurs ventes aux enchères deviennent électroniques… pour que les mouvements de citoyens qui résistent ne puissent plus s’y opposer en bloquant les procédures de manière physique.

Dans cette catégorie… ainsi catégorique de tant de gens concernés, on y découvrirait d’ailleurs toute une… gamme. Gens aisés ou anciennement aisés ayant exagéré avec le crédit immobilier (avec, il faut bien préciser, la très aimable incitation des banques), puis, ces autres cas de ceux qui ont tout simplement acheté pour se loger… et que leur chômage a définitivement tout bouleversé.

La reprise des ventes aux enchères est même une des exigences coloniales, expressément formulée encore récemment par la Troïka élargie depuis Bruxelles. Après un premier blocage, en somme inefficace des ventes aux enchères… via le numérique à la gloire du numéraire, les procédures reprennent. Il y aurait plus de 1400 saisies et ainsi ventes par jour, rapporte alors la presse du moment (presse grecque) . Modernité toujours accrue.

Histoire de la Grèce ancienne et… Goebbels. Athènes, novembre 2017
Affiches et spectacles du moment. Athènes, novembre 2017
Spectacles du moment et appartement à vendre. Athènes, novembre 2017
Boutique en faillite. Athènes, novembre 2017
Appartement à louer. Athènes, novembre 2017

Les apparences d’une normalité sont donc sauvées car elles restent dans un sens, fonctionnelles. Question… de prix, à l’instar d’Alexis Tsipras… pour son énorme “Prix du courage politique”. Il lui a été discerné cette semaine à Paris, où ce… premier lampiste grec a été ainsi récompensé par la revue française “Politique internationale” et par son directeur Patrick Wajsman, politologue rangé parmi les promoteurs français des thèses néoconservatrices.

Comme on sait et en toute logique, “Politique internationale” est lue dans les cercles très officiels de l’empire financieriste et métadémocratique, et il devient donc important que de récompenser les meilleurs valets de ce système. Question… toujours de prix ! “Dans son allocution lors de la remise de prix Alexis Tsipras s’est félicité d’être parvenu à maintenir son pays à l’intérieur de la zone euro.”

rabâchent-on depuis les médias… “Eurotiques”!

Le Prix d’Aléxis Tsipras. Quotidien “Kathimeriní” du 23 novembre
L’univers de Tsipras à Paris. Presse grecque, novembre 2017

Aléxis Tsipras a par la même occasion également reçu le “Prix de l’engagement européen”, remis à la Maison du barreau de Paris, comme il a été aussi reçu par Emmanuel Macron à l’Élysée après avoir également rencontré François Hollande, toujours d’après la presse. Rencontre officielle aux clichés réalisés, parfois tragicomiques ; les physionomistes et les psychologues analyseront sans doute à souhait les expressions des corps comme celles des visages… les yeux fermés.

Car comme Tsipras lui-même vient de déclarer dans une interview accordée au “Figaro”: “(…) j’ai une communication régulière et continue avec le président Macron même si nos opinions ne sont pas toujours similaires. Nous avons la même vision, les mêmes convictions.”

Tsipras aura répété ces inepties trompeuses, bien propres à la gauche de l’ancien temps (c’est-à-dire d’il y a deux ans), du genre: “L’Europe ne peut plus prendre des décisions derrière des portes closes” ou “une autre Europe est possible”. En attendant, bien de Grecs fermeront leurs portes et leurs fenêtres pour ne pas avoir froid (car souvent nos appartements restent sans chauffage central), pendant que les plus jeunes d’entre eux, se féliciteront de leurs “récompenses” du seul et dernier technotropisme puisque comme on sait, les marchands du temple inventent, et ils inventeront jusqu’au clash final.

Vendredi noir décidément, ainsi, ces deux récompenses, et plutôt… dividendes aux yeux des Grecs, elles ont surtout et d’abord couronné l’outrage fait au peuple et à son ‘NON’ de juillet 2015. Depuis vendredi, la sphère Internet grecque déborde de messages ou commentaires incitant ouvertement à… “trucider le traître Tsipras et les autres avec”, et dans le même ordre d’idées sur un mur d’Athènes, près du (pseudo) Parlement de la colonie européiste et de la dette, on y aperçoit ce slogan, autant fort explicite: “Syrizistes traîtres”.

Emmanuel Macron et Alexis Tsipras… les yeux fermés. Paris, le 24 novembre 2017 (presse grecque)
“Syrizistes traîtres”. Athènes, novembre 2017
Ostraca, portant le nom de Thémistocle, 470-471 av. J.-C. Musée d’art cycladique, Athènes, novembre 2017

Il fut un temps bien lointain, même Thémistocle l’Athénien avait été ostracisé, pourtant vainqueur à Salamine, il joua un rôle déterminant dans la victoire grecque lors de la deuxième guerre médique. L’ostracisme de fait n’est plus, et ce sont toujours les supposés citoyens qui vont payer les pots cassés. Modernité accrue.

Nos statues copiées aux mesures anciennes, parfois installées sur nos balcons donnent l’impression de nous observer, sans plus guère pouvoir intervenir dans nos affaires, si ce n’est que dans nos rêves. Et on résistera comme on peut, ceci, à travers ces belles images reconstituées du quotidien antique au Musée d’art cycladique, au moyen des animaux en terre cuite, et enfin, à la sortie du musée, devant le regard des chat, animaux adespotes de référence bien de chez nous, certains d’entre eux, pouvant être parfois soignés, voire stérilisés, aux frais des associations œuvrant sur le terrain.

Les chats, il y en a d’ailleurs qui nous accompagnent de leur présence jusqu’à nos cimetières, car il faut souffler un peu et enfin apercevoir notre monde… de l’endroit, si possible avant de le quitter dans les dimensions dont nous croyons en tout cas, définitives.

Comme l’écrit l’économiste Kostas Lapavítsas dans sa chronique du jour sous le titre “De profundis”: “Ce qui est très exactement caractéristique de l’état actuel de l’économie grecque, c’est cette stabilité des cimetières. Par exemple, en ce 20 novembre, ELSTAT (Statistique grecque) vient d’annoncer que l’activité l’industrielle a reculé de 0,8% en septembre dernier. Cet indice est alors en baisse continue depuis environ un semestre. La reprise industrielle de grande ampleur dans laquelle tant d’espoirs gouvernementaux ont été préalablement pressentis et annoncés pour la fin 2016 et pour le début 2017, n’existe tout simplement pas.”

Nos statues des balcons. Athènes, novembre 2017
Antiquité revisitée. Musée d’art cycladique, Athènes, novembre 2017
Animal antique représenté. Musée d’art cycladique, Athènes, novembre 2017
Animal adespote récemment stérilisé (opéré). Athènes, novembre 2017

“On pourrait facilement énumérer un certain nombre d’autres indicateurs, tels que les ventes au détail, les exportations et les importations, l’investissement, la consommation, etc., mais cela n’a aucun sens. La réalité est évidente et c’est exactement ce que tout économiste raisonnable aurait prévu depuis 2013-2014. L’économie grecque s’est certes stabilisée par rapport à 2009-2010, mais cela sans la moindre croissance significative.”

“Les larges couches de la société grecque ont été épuisées et elles acceptent la situation on dirait, avec patience. La volte-face d’Alexis Tsipras en 2015 a tué l’espoir des couches populaires, ouvrières, agricoles et ainsi celles de la classe moyenne. Sauf que les gens ne sont en aucun cas d’accord avec ce qui s’y passe, comme en témoigne la récente enquête d’opinion du sondeur Public Issue. Les Grecs accepteraient le mémorandum sans réagir dynamiquement, cependant, ils le désapprouvent par leur profond dégoût mais alors muet. Ce paradoxe est il faut dire autant d’une grande importance, pour les suites politiques au pays.”

“Plus précisément, la mutation SYRIZA a donné une grande confiance à tous ceux qui ont traversé la crise ayant éprouvé les pertes les plus légères qu’elles soient, en particulier au sein des couches très aisées de la population. Et pour ces gens, il n’y a plus la moindre hésitation lorsqu’il s’agit d’exhiber leur fortune. Une simple promenade dans le centre d’Athènes est suffisant pour apercevoir cette couche et classe aisées et sans pitié, insolence d’une classe fabriquée (ou sinon renforcée) par les mémoranda (politiques d’austérité), et qui profite de son confort sans craindre de le montrer aux chômeurs, aux pauvres, à cette grande majorité de la population laquelle passe son temps à calculer mêmes ses pauvres centimes à chaque euro.” (“Quotidien des Rédacteurs” du 25 novembre 2017).

Belle exposition. Musée byzantin. Athènes, novembre 2017
Manière de voir. Athènes, novembre 2017

C’est un constat que je partage et qui trompe d’ailleurs autant et fréquemment nos touristes, quant aux réalités du pays. C’est bien connu, les touristes circulent le plus souvent dans un périmètre bien précis, tandis que les paupérisés du pays comme ceux de la ville d’Athéna devenus (partiellement) invisibles, ils ne sortent pratiquement plus de chez eux.

Et pour ce qui est des couches aisées, je me souviens même que durant ces mois très denses de la première période Troïkanne, aux manifestations populaires très massives, les plus fortunés, souvent ils hésitaient d’exhiber leurs richesses, essentiellement par crainte d’être attaqués, si ce n’est que verbalement. Mais depuis, les temps ont visiblement changé.

Et l’on résistera irrévérencieusement aux ukases des marchands du temple tout comme devant leurs vendredis plus noirs que jamais, autant à travers par exemple nos écrivains ou en soutenant ceux qu’y travaillent pour faire connaître leurs œuvres, en Grèce comme aussi ailleurs. Les amis Odile et Yannis de Lexikopoleío , cette belle librairie francophone du quartier de Pagráti à Athènes, ont organisé cette semaine la rencontre et présentation avec ceux de la librairie parisienne et des éditions Desmós, sous l’impulsion de notre ami également, Yannis Mavroeidakos, ainsi que de ses deux nouvelles collections de poésie et de prose.

Il faut dire que depuis 1983, la librairie hellénique Desmós accueille et conseille les amateurs de littérature grecque à Paris, dans le quartier de Montparnasse. Dernièrement, Desmós a (entre autres) publié “Le Retour en Grèce” du romancier Dimitris Nollas, et “Alba” du jeune poète Thomas Tsalapatis et durant cette émouvante soirée à Lexikopoleío laquelle n’avait absolument rien d’un vendredi noir, nous avons rencontré le romancier Dimitris Nollas, son traducteur Richard Tchélébidès, ainsi que le poète Thomas Tsalapatis et Yannis Mavroeidakos de Desmós.

Lexikopoleío, le 23 novembre. Yannis Mavroeidakos debout sur la photo
Lexikopoleío le 23 novembre. Yannis Mavroeidakos (à gauche) et l’écrivain Dimitris Nollas (à gauche)

Les marchands du temple inventent, et ils inventeront jusqu’au clash final, celui des enjolivures de Noël compris. Question de prix, comme pour Alexis Tsipras… pour son énorme “Prix du courage politique”, et face à l’outrage, question de vivre aussi pour nous, je revois enfin ce week-end mon cousin Kostas après tout un petit moment.

“Nous grignoterons quelque chose chez moi, nous ne pouvons pas sortir, la pizzeria nous coûtera au mieux 20€… et nous ne pouvons plus nous le permettre, car nous passons notre temps à calculer même nos pauvres centimes de chaque euro. Nous en avons assez d’être pauvres, et être riches ne nous dit rien, sauf qu’il n’y a plus de place entre les deux, c’est-à-dire pour nous. C’est bien clair et c’est autant plus clair depuis Tsipras. Entre les vrais riches et les vrais pauvres… il n’y aura plus personne debout”, affirme alors mon cousin Kostas.

Mimi et Hermès de Greek Crisis. Athènes, novembre 2017

Loin de “l’idéal Européen” et oubliant les marchands du temple et les marketistes, je vais lui raconter les rencontres de Lexikopoleío, les nouvelles de la famille, celles également, du petit et imperturbable Hermès de ‘Greek Crisis’ qui grandit de jour en jour.

Question de vie. Ateliers dits du cœur !

Hermès de Greek Crisis. Athènes, novembre 2017
* Photo de couverture: Mannequin enchaîné. Athènes, novembre 2017

mais aussi pour un voyage éthique, pour voir la Grèce autrement “De l’image à l’imaginaire: La Grèce, au-delà… des idées reçues !”   http://greece-terra-incognita.com/

Quand la dette publique « légitime » la casse du droit du travail

Le CADTM publie ce jour un article à l’occasion du vote « solennel » à l’Assemblée nationale de la réforme du droit du travail en France, mise en miroir avec les politiques d’austérité imposées à la Grèce, et passées au crible du rapport de l’expert de l’ONU sur l’impact de la dette sur les droits du travail : des politiques qui violent les obligations nationales et internationales, et qui sont infondées sur les plans de la théorie et de la pratique économique.

Quand la dette publique « légitime » la casse du droit du travail

27 novembre par Anouk Renaud , Simon Perrin

(CC – Flickr – Jeanne Menjoulet)

Alors que les « débats » sont ouverts à l’Assemblée sur la réforme du droit du travail déjà entrée en vigueur depuis deux mois en France et à laquelle le vote « solennel » du 28 novembre 2017 donnera force de loi, examinons au regard du dernier rapport de l’ONU consacré à l’impact de la dette extérieure sur les droits du travail, ces réformes qui, de la Grèce à la France, visent à rebooster la croissance pour « rembourser la dette ».

De l’ajustement macronien en France…

Comme le rappelait fin septembre l’actuel PDG d’Atos et ancien ministre de l’économie, Thierry Breton, sur le plateau de France Télévision, il aura suffi d’une décennie pour que l’Hexagone passe du peloton de tête au peloton de queue en matière de déficits publics, avec un endettement équivalent aujourd’hui à 98 % du PIB contre 62 % il y a 10 ans |1|. En prévision de l’application des mesures néolibérales décidées par le gouvernement En Marche, le ministre de « l’action et des comptes publics » Gérald Darmanin continue de faire porter aux Français-es la responsabilité de rentrer dans les clous des critères de Maastricht et leur demande d’assumer le paiement des quelques 42 milliards d’euros d’intérêts annuels |2| et le renouvellement des 185 milliards d’euros de titres de dette qui arriveront à échéance en 2018 |3| (car la France fait rouler sa dette en réempruntant chaque année sur le marché des capitaux la même somme qu’elle rembourse pour ses emprunts arrivés à échéance), ajoutés aux 60 milliards d’euros qui permettent de combler le déficit primaire : « votre dette, quand un petit français naît c’est 32 000 euros par habitant, quand il travaille c’est 75 000 euros. […] La vérité c’est que nous devons faire tous collectivement des efforts et nous promettons aux Français qu’ils se feront sur des économies et pas en augmentant les impôts » |4|. Plus que de ne pas augmenter les impôts, le gouvernement promet en fait une baisse de 10 milliards d’euros d’impôts |5| sur les sociétés et le capital (allègement des cotisations patronales, suppression de l’ISF, etc). Et avec en première ligne des « efforts collectifs » qui sont présentés dans le « plan d’action pour l’investissement et la croissance » : la réforme du droit du travail |6|.


Les 36 mesures que comptent les 5 ordonnances Macron, attaquent de front les droits des travailleur-euse-s sur au moins trois axes : elles facilitent et réduisent le coût des licenciements, permettent de casser les normes existantes afin de précariser l’emploi et ses conditions d’exercice, et bouleverse la démocratie au sein de l’entreprise, en confisquant leur pouvoir de représentation aux syndicats.

Ainsi, sous la menace d’un licenciement pour « cause réelle et sérieuse » et sans obligation de reclassement, le contrat de travail sera désormais modifiable dans toutes ses dimensions grâce aux accords de maintien de l’emploi, qui pourront être imposés dans n’importe quelle situation du moment qu’ils permettent de « répondre aux nécessités liées au fonctionnement de l’entreprise » |7|.

Prenant exemple sur le Portugal |8|, la réforme prévoit également un plafonnement des indemnités de licenciement, en rupture totale avec le principe de libre appréciation par le juge du préjudice subi par les salarié-e-s au regard de leur situation individuelle : au-delà de 29 ans d’ancienneté, un-e salarié-e recevra au maximum moins de deux ans de salaires |9|.

La création du « CDI de chantier » qui est un CDD déguisé inspiré du Job Act italien, permettra, quant à lui, aux employeur-euse-s d’économiser la prime de précarité en fin de contrat.

Poursuivant la poussée menée avec la loi El Khomri en 2016 visant à briser la « hiérarchie des normes », comme en Espagne, en Irlande ou en Belgique, les ordonnances dites macroniennes élargissent les possibilités de déroger aux accords de branches et conventions collectives, en permettant aux employeur-euse-s de négocier des conditions de travail et de rémunération (en plus du temps de travail depuis 2016) en dessous des standards du secteur professionnel. Affaiblissant considérablement le pouvoir des syndicats dans l’entreprise, l’employeur-euse pourra faire voter l’accord directement par les salarié-e-s dans les entreprises de moins de 20 salarié-e-s, en s’adressant à des représentant-e-s non mandaté-e-s dans les entreprises de moins de 50 salarié-e-s, ou en obtenant seulement 30 % des voix des salarié-e-s avec l’accord de certains syndicats dans les entreprises de plus de 50 salarié-e-s |10|. Dans la même veine, la durée maximale des CDD ne sera désormais plus limitée par la loi, mais négociée au sein des branches : comme en Roumanie |11|, un-e salarié-e pourra voir son CDD renouvelé pendant 5 ans au sein de la même entreprise et sur le même poste.

C’est quoi l’inversion de la hiérarchie des normes ?À l’instar d’autres domaines du droit, le code du travail obéit à une hiérarchie précise qui organise les différentes normes, leur donne plus de valeur que d’autres. La hiérarchie des normes était la suivante : la Constitution est plus forte que la Loi > la Loi est plus forte que les accords de branches et conventions collectives > les accords de branches et conventions collectives sont plus fortes que les accords d’entreprises. Ainsi, les conditions de travail et de rémunération négociées par accord de branche ne pouvaient être moins favorables que la loi et les conditions de travail et de rémunération négociées par accord d’entreprise ne pouvaient être moins favorables que l’accord de branche.

En brisant cette hiérarchie des normes, les dernières réformes du droit du travail mises en place partout en Europe visent à faire disparaître les accords de branches et conventions collectives, et l’ensemble des acquis sociaux qu’ils permettent de défendre au sein de chaque secteur professionnel.

Se faisant, Macron applique à la lettre les recommandations qui ont été faites à la France, en 2016 par la Commission européenne, s’appuyant elle-même sur le programme des Grandes orientations de politiques économiques, élaboré en concertation avec les ministres de l’Économie et les chefs d’État européens |12|, et en 2017 par le Semestre européen, organe de surveillance des politiques économiques et budgétaires créé en 2011 |13|. Pour remplir l’objectif de réduction des déficits publics à 3 % du PIB, la France est ainsi sommée de maintenir la réduction du coût du travail, de faciliter les licenciements et les dérogations aux dispositions juridiques générales, pour flexibiliser les contrats. Fondé sur l’idée que pour rembourser la dette il faut stimuler la croissance, et que pour recouvrer la croissance économique il faut déréglementer le marché du travail, l’ajustement des économies de l’Union européenne s’est accéléré depuis la crise de 2008 |14|, et s’est appliqué avec encore plus de brutalité aux pays du Sud de l’Europe, pour qui les recommandations sont également venues de la Banque centrale européenne.


… À la stratégie du choc en Grèce

En Grèce, comme au Portugal, à Chypre et en Irlande, les réformes du droit du travail de ces dernières années sont intervenues directement suite à la crise de la dette. Le démantèlement du code du travail est devenu ainsi la contrepartie à l’octroi de prêts.

En Grèce, les deux premiers memoranda, conclus respectivement en 2010 et 2012 vont s’atteler notamment à deux chantiers d’importance : la démolition du système de conventions collectives et la baisse du salaire minimum. Pour ce faire, la Troïka (FMI, Banque centrale européenne et Commission européenne) a exigé d’abord la fin du système d’extension des conventions collectives à un secteur tout entier, restreignant ainsi leur périmètre d’application aux seuls employeurs membres d’associations patronales. Tandis que les syndicats se voient supprimer leur capacité à conclure des conventions collectives nationales, une nouvelle instance est créée : les associations de personnes, des groupes ad hoc d’au moins cinq personnes et à qui l’on accorde le droit (traditionnellement réservé aux organisations syndicales) de conclure des accords d’entreprise. Enfin, l’inversion de la hiérarchie des normes, qui fait primer les accords d’entreprises (pouvant donc être conclus par des associations de personnes) sur les accords de secteur et nationaux fera le reste.

Concernant le salaire minimum : pour l’ensemble des travailleur-euse-s grec-que-s, il passera de 751 euros à 586 euros bruts, à l’exception des jeunes de moins de 25 ans pour qui un salaire minimum spécifique de 510 euros est créée. Ce salaire minimum d’exception (et donc illégal) fait partie du « package » du contrat jeune imposé par la Troïka. Il prévoit une période d’essai de deux ans, l’exonération des cotisations patronales et la suppression des allocations chômage pour les travailleur-euse-s de moins de 25 ans.

Parallèlement à cela, d’autres mesures seront imposées comme la mise en place d’une période d’essai pour tous les CDI durant laquelle le licenciement se fait sans préavis, l’extension de la durée maximale des CDD de deux à trois ans, l’abolition des Prud’hommes, ou encore le travail obligatoire dans certains secteur en cas de grève.

Toutes ces réformes ont-elles permis à la Grèce de sortir de la crise ? Non, et le cas de la Grèce a au moins le mérite de fournir un démenti empirique contre le discours macronien.

Si l’on regarde chez nos voisins hellènes, il ne fait aucun doute que les réformes du marché du travail n’améliorent ni l’emploi, ni la compétitivité des entreprises. Entre 2010 et 2016, le PIB grec a chuté de 27 % et le nombre de petites et moyennes entreprises est passé de 900 000 en 2009 à 450 000 aujourd’hui |15|. Les salaires sont aujourd’hui à 75 % de leur niveau de 2010, tandis que le chômage avoisinait les 24% de la population active et les 50 % chez les moins de 25 ans en 2016 |16|.

Quant aux prétendus « gains de compétitivité », on observe que la réduction du « coût » du travail, engendrée par toutes ces réformes, ne s’est pas traduite par une baisse des prix et donc une augmentation des parts de marchés gagnées par les entreprises grecques. En revanche, le taux de marge des entreprises en Grèce a augmenté de 36 % par rapport à la moyenne des autres pays de l’OCDE |17|. Même la Commission européenne le reconnaissait à demi-mot en 2013 : « les taux de marge ont augmenté (…) absorbant ainsi une partie de la réduction des coûts salariaux unitaires » |18|.

En revanche, les conditions de travail et les droits des salarié-e-s se sont vus largement dégradés. L’inspection du travail recensait 6 500 accidents du travail déclarés en 2016 contre 5 721 en 2010 et cela malgré la réduction significative de l’activité des entreprises |19|. Alors qu’en 2009, 83 % des travailleur-euse-s étaient protégé-e-s par une convention collective, ils-elles ne sont plus que 42 % en 2013. Considérant en plus qu’en 2013 et 2014 la majorité des conventions a été conclue par des associations de personnes, parmi ces 42 % beaucoup de travailleur-euse-s sont couvert-e-s par des accords bien moins protecteurs que les conventions de secteur ou nationales |20|. Sur 200 conventions collectives avant l’arrivée de la Troïka, il n’en reste aujourd’hui qu’une petite dizaine… |21|

Un groupe d’experts indépendants invalide les réformes grecques en matière de droit du travailAlors que les mauvais résultats en Grèce mettaient clairement à mal la pertinence des réformes imposées par les Institutions (FMI, BCE, CE et MES), celles-ci ont dû concéder, dans le troisième mémorandum, la mise en place d’un groupe d’experts indépendants pour évaluer le marché du travail grec, composé de quatre experts nommés par le gouvernement grec et de quatre autres (dont le président) désignés par les Institutions. À côté de ce groupe d’experts, le troisième mémorandum demande au gouvernement grec d’aller encore plus loin dans la « flexibilisation » du marché du travail, en libéralisant les procédures de licenciement collectif, en légalisant le lock-out |22| et restreignant le droit de grève. Des exigences dont le FMI se fait le relais le plus zélé.

Pourtant dans son rapport de septembre 2016 |23| ce groupe d’experts fait le constat que le contrat individuel règne dans l’économie grecque au détriment d’une réelle protection des droits des travailleur-euse-s. Parmi ses recommandations |24|, on trouve la nécessité de ne pas toucher au droit de grève, garanti constitutionnellement et déjà bien trop limité ainsi que le maintien de l’interdiction du lock-out, elle aussi garantie constitutionnellement. Ou encore le fait qu’un accord d’entreprise ne peut pas être moins protecteur qu’un accord national ou sectoriel.

Bien évidemment, ce rapport n’a été utilisé ni par les Institutions, ni même d’ailleurs par le gouvernement grec. Des conclusions complètement ignorées, puisque dans le cadre de la troisième revue entamée en juin 2017, le gouvernement Anel-Syriza s’est engagé à mettre en œuvre 95 mesures parmi lesquelles la « simplification » du code du travail, la modification des conditions de vote du droit de grève…


Ou comment revenir sur la distribution de la valeur

Dans un rapport de décembre 2016, l’expert de l’ONU, Juan Pablo Bohoslavsky, traite des effets de la dette extérieure sur les droits du travail |25|. Une large part y est consacrée à la dénonciation des nombreuses violations des droits de l’Homme, à commencer par les droits du travail, commises au nom du remboursement de la dette, avec le soutien sans faille des grandes institutions financières internationales. Pour beaucoup d’entre elles, les réformes du droit du travail de ces dernières années sont frappées d’illégalité, dans la mesure où elles entrent en contradiction avec plusieurs instruments de droit interne et international, voire les nient totalement. Il est évident que les exigences de la Troïka et des États créanciers violent notamment les conventions fondamentales de l’Organisation internationale du travail et la Charte sociale européenne. En septembre 2014, la Confédération générale des travailleurs grecs (GSEE) déposait d’ailleurs une plainte auprès du Conseil de l’Europe contre l’État grec pour non-respect de la charte sociale européenne, garantissant notamment un salaire digne, le droit de négociation, le droit de grève, un délai raisonnable de licenciement |26|. Des obligations internationales également violées par les institutions financières internationales, tenues de les respecter elles aussi lorsqu’elles accordent des prêts et imposent des réformes en contrepartie.

Sur le terrain de la théorie économique, le rapport de Juan Pablo Bohoslavsky s’avère également très utile, dans la mesure où il bat en brèche le fondement de ces réformes du droit du travail, dictées au motif qu’elles « générerai[en]t de la croissance et permettrai[en]t ainsi de prévenir ou de contribuer à enrayer les crises de la dette » (Bohoslavsky, p. 1). En effet, voici des décennies que l’OCDE, le FMI, la BM ou encore la Banque centrale européenne défendent l’idée selon laquelle les droits du travail et les lois de protection de l’emploi sont parmi les principaux obstacles à la croissance économique Or, cette idée, « vigoureusement remise en cause par la recherche théorique », ne passe pas l’épreuve des faits (p.16). Ayant minutieusement épluché une trentaine d’ouvrages et de corpus d’études produits sur le sujet, Bohoslavsky nous rappelle tout bonnement qu’aucun élément concret ne permet d’affirmer que les réformes du marché du travail, menées dans le cadre des politiques d’austérité, contribuent à la reprise économique des pays après une crise de la dette. Tout au mieux, les études menées concluent à une absence de lien « consistant, négatif ou positif, entre les lois générales sur le travail et le chômage » (p.17). Une étude de Dean Baker publiée en 2005 sur les données de 20 pays de l’OCDE indiquait ainsi ne parvenir à démontrer aucune relation entre l’affaiblissement des institutions du marché du travail et la baisse du chômage. Une absence de résultats criante, également observable dans les rares études menées dans les pays en développement. En réalité, les chercheur-euse-s ont bien plus de facilité à prouver exactement le contraire, en identifiant les fonctions du droit du travail qui contribuent à « l’efficacité économique » : un meilleur fonctionnement du marché, la stabilisation de la demande dans les périodes de récession (p.18) ou encore leur effet positif sur la répartition du revenu (p.17). Notons ainsi les résultats d’une étude menée en 2013 par Pasquale Tridico qui conclut que les pays de l’Union européenne ayant eu les meilleurs résultats pendant la crise économique de 2007 à 2011 étaient ceux dont les marchés du travail étaient les moins flexibles (p.18).

Ainsi l’experte conclut qu’en absence d’une quelconque utilité économique, l’application de ces réformes, destinées à miner le droit du travail, semblent être motivées par d’autres facteurs « tels que des préjugés idéologiques et la volonté non déclarée de revenir sur les programmes de distribution [de la richesse produite] » (p.21).


Contre l’agenda néolibéral global : auditons les dettes, renforçons les luttes

Qu’elles soient appliquées sur un court terme à la faveur d’une crise de la dette latente comme en Grèce ou bien distillées sur un plus long terme comme le recommandait l’OCDE il y a déjà 20 ans |27|, à l’instar de la France qui agite le spectre d’une crise de la dette imminente ; ces mesures d’ajustement, parmi lesquelles les réformes du travail occupent une place de choix, reposent donc sur des raisonnements fallacieux. Le rapport de l’expert ONUsien, J. Pablo Bohoslavsky vient corroborer cette analyse en fournissant de précieux arguments théoriques et empiriques à charge contre les fondements et les effets de ces ajustements menés partout dans le monde depuis des années au nom de la dette.

Plus que jamais, il ne peut y avoir de lutte anti-austérité sans s’attaquer à la dette, sans l’auditer, sans remettre en question le pouvoir qu’elle produit. Sinon elle restera l’éternel « prétexte » à la destruction des droits des travailleur-euse-s, c’est-à-dire « la raison invoquée pour cacher le vrai motif d’une action » |28| : à savoir l’application d’un agenda néolibéral global. Une lutte anti-austéritaire qui ne peut se limiter aux arènes feutrées ONUsiennes, tant les institutions semblent sourdes aux constats économiques et aux arguments juridiques. L’expert de la dette précise d’ailleurs dans son rapport que « les institutions financières internationales sont plus sensibles qu’on ne le croit aux pressions politiques exercées par les syndicats nationaux et qu’elles feront sans doute des concessions sur les questions liées au marché du travail si elles sont confrontées à un mouvement de protestation important » (p.24).

Gardons espoir que les journées de grève et de manifestations qui se multiplient en France depuis la rentrée, et ciblent maintenant l’ensemble de la « politique libérale » et « antisociale » de Macron et sa clique (fiscalisation des cotisations chômage et maladie |29|, fusion des régimes de retraite |30|, durcissement des contrôles sur les recherches d’emploi |31|, en prélude à la destruction de la protection sociale) puissent venir à bout des velléités du gouvernement En Marche.


Avec l’aimable contribution du CADTM France. Merci à elles et eux ! Marie-Claude Carrel, Pascal Franchet, Yvette Krolikowski, et Nicolas Sersiron, du CADTM France.

Notes

|1| Thierry Breton était l’invité « inattendu » de l’Émission politique consacrée au Premier ministre du gouvernement En Marche Édouard Philippe, sur France 2, le 28 septembre 2017. La vidéo est accessible sur le lien suivant : https://www.youtube.com/watch?v=_XWyMYm1B70

|2| Les dernières prévisions du montant de la charge de la dette pour 2017 sont disponibles sur le site internet de l’Agence France Trésor, et accessibles sur ce lien : http://www.aft.gouv.fr/rubriques/charge-de-la-dette_93.html

|3| Les prévisions de financement de l’État par émissions de dette à moyen et long terme nettes des rachats sont disponibles sur le site internet de l’Agence France Trésor, et accessibles sur ce lien : http://www.aft.gouv.fr/articles/besoins-et-ressources-de-financement-de-l-etat-en-2018-et-point-sur-l-annee-2017_13044.html

|4| Gérald Darmanin était l’invité de Jean-Jacques Bourdin dans son émission de radio sur RMC le 30 juin 2017. La vidéo est accessible sur le lien suivant : https://www.youtube.com/watch?v=Sri7pmJMKbE

|5| Henri Wilno économiste membre de la Fondation Copernic, « Budget : les inégalités pour programme », Le Chiffon Rouge Morlaix. Article accessible sur ce lien : http://www.le-chiffon-rouge-morlaix.fr/2017/10/fondation-copernic-budget-les-inegalites-pour-programme-henri-wilno-economiste.html

|6| Le plan d’actions pour l’investissement et la croissance, présenté par le premier ministre en déplacement à Niort le 11 septembre 2017 est disponible sur ce lien : http://www.gouvernement.fr/sites/default/files/contenu/piece-jointe/2017/09/dossier_de_presse_-_plan_dactions_pour_linvestissement_et_la_croissance_-_11.09.2017.pdf

|7| Dan Israel, « Ordonnances : le contrat de travail n’est plus une protection », Notre dossier : Loi travail saison 2, Mediapart, 22 septembre 2017. Article accessible sur ce lien : https://www.mediapart.fr/journal/economie/dossier/notre-dossier-loi-travail-saison-2

|8| Rachel Knaebel, « Les réformes du droit du travail généralisent la précarité partout en Europe », Bastamag, 22 mars 2016. Article accessible sur ce lien : https://www.bastamag.net/Partout-en-Europe-les-reformes-du-travail-facilitent-les-licenciements-et

|9| Dan Israel, op. cit.

|10| Dan Israel et Manuel Jardinaud, « Loi travail : ce que le gouvernement fait aux salariés », Notre dossier : Loi travail saison 2, Mediapart, 31 août 2017. Article accessible sur ce lien : https://www.mediapart.fr/journal/france/310817/ce-que-le-gouvernement-fait-aux-salaries?page_article=3

|11| Rachel Knaebel, op. cit.

|12| Coralie Delaume, « Ce que la loi El Khomri doit à l’Union européenne », Figaro Vox, Le Figaro, 17 mai 2016. Article accessible sur ce lien : http://www.lefigaro.fr/vox/politique/2016/05/17/31001-20160517ARTFIG00137-ce-que-la-loi-el-khomri-doit-a-l-union-europeenne.php

|13| Isabelle Schömann de l’Institut syndical européen, citée dans Rachel Knaebel, op. cit.

|14| Emmanuelle Mazuyer, directrice de recherche au CNRS, « Réforme du code du travail : Un mouvement d’ampleur en Europe depuis la crise de 2008 », Le Monde, 22 septembre 2017. Article accessible sur ce lien : http://www.lemonde.fr/politique/article/2017/09/22/reforme-du-code-du-travail-un-mouvement-d-ampleur-en-europe-depuis-la-crise-de-2008_5189903_823448.html

|15| Fabien Perrier, « En Grèce, les lois Macron avant l’heure… », Regards, septembre 2017. Accessible à : http://www.regards.fr/web/article/en-grece-les-lois-macron-avant-l-heure

|16| Wolfgang Däubler, “On the other side, you have only crocodiles : Greece under the Troika”, International Union Rights, Vol. 24, No. 1, World Bank & IMF (2017), pp. 11-13

|17| Michel Husson, « Grèce : une économie dépendante et rentière », ATTAC, avril 2015. Accessible à : https://france.attac.org/nos-publications/les-possibles/numero-6-printemps-2015/dossier-monnaie-et-finance/article/1-michel-husson-grece-pourquoi-une#t3-Les-baisses-de-salaires-n-ont-pas-ete-repercutees-dans-les-prix-a-nbsp

|18| Commission européenne, « Labour Costs Pass-through, Profits and Rebalancing in Vulnerable Member States », Quarterly Report on the Euro Area, vol. 12, n°3, 2013 ; cité par Michel Husson, op.cit.

|19| Fabien Perrier, op. cit.

|20| Wolfgang Däubler, op.cit.

|21| Amélie Poinssot, « Yorgos Katrougalos : ce qu’a produit la réforme du marché du travail en Grèce », Mediapart, septembre 2017. Accessible à : https://www.mediapart.fr/journal/economie/070917/yorgos-katrougalos-ce-qu-produit-la-reforme-du-marche-du-travail-en-grece?onglet=full

|22| Le lock-out est une procédure qui permet de fermer temporairement une entreprise, non pas pour des motifs économiques mais pour appuyer des revendications patronales lors d’un conflit. Le lock-out peut ainsi être utilisé pour « casser » une grève.

|23| Voir le rapport en question : http://www.capital.gr/content/relatedfiles/68/6898c2f55b6f4348828383f331261304.pdf

|24| Sur 12 recommandations, 8 ont été décidées à l’unanimité tandis que 4 à la majorité.

|25| Juan Pablo Bohoslavsky, Rapport de l’expert indépendant chargé d’examiner les effets de la dette extérieure et des obligations financières internationales connexes des États sur le plein exercice de tous les droits de l’homme, en particulier des droits économiques, sociaux et culturels, présenté au cours de la 34e session du Conseil des droits de l’Homme, Haut-commissariat aux droits de l’Homme, 27 décembre 2016. Le rapport en six langues sur ce site : http://ap.ohchr.org/documents/dpage_f.aspx?s=40 ; ainsi qu’en langue française sur ce lien : https://documents-dds-ny.un.org/doc/UNDOC/GEN/G16/441/39/PDF/G1644139.pdf?OpenElement

|26| Greek general Confederation of Labour (GSEE) v. Greece, Case No. 111/2014

|27| Chistian Morisson, « La faisabilité politique de l’ajustement », Cahier de politique économiques, OCDE, 1996, cité dans, Éric Toussaint, La Bourse ou la Vie. La Finance contre les peuples, 1998.

|28| Définition du dictionnaire Larousse.

|29| Ivan Best, « Suppression des cotisations chômage et maladie : ce que veut dire la proposition Macron », La Tribune, 08 décembre 2016. Article accessible sur ce lien : http://www.latribune.fr/economie/france/suppression-des-cotisations-chomage-et-maladie-ce-que-veut-dire-la-proposition-macron-623310.html

|30| Philippe Pihet, « Retraites : chronique d’une réforme annoncée », Miroir Social, 27 septembre 2017. Article accessible sur ce lien : http://www.miroirsocial.com/actualite/15059/retraites-chronique-d-une-reforme-annoncee

|31| Emmanuel Macron était l’invité de l’émission Grand entretien diffusé sur TF1 le 15 octobre 2017. La vidéo est accessible sur ce lien suivant : https://www.youtube.com/watch?v=orKQ_A5MFZQ

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GRECE – 4 enfants sur 10 exposés au risque de pauvreté ( Eurostat)

Paru le 22/11/17 sur Le petit journal Athènes

En Grèce, quatre enfants sur dix âgés de moins de 17 ans risquent la pauvreté ou l’exclusion sociale confirme l’office statistique de l’Union européenne Eurostat, plaçant le pays touché par la crise au sommet de la pauvreté dans la zone euro. Les chiffres ont été publiés à l’occasion de la Journée mondiale de l’enfance, célébrée le 20 novembre.

La plus forte baisse du nombre d’enfants menacés de pauvreté ou d’exclusion sociale a été observée en Lettonie, la plus forte hausse en Grèce.

Pour découvrir le rapport dans sa totalité : http://ec.europa.eu/eurostat/documents/2995521/7738132/3-16112016-AP-FR.pdf/6f54202f-d1f9-47d5-8b6f-7b7963bf2396

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