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Au côté des réfugiés en Grèce

Après l’incendie du camp de Moria, au côté des réfugiéEs en Grèce par A. Sartzekis

Qui a mis le feu au camp de réfugiéEs de Moria ? Le gouvernement réactionnaire de Mitsotakis répond par un beau mensonge, en faisant croire que ce sont des réfugiés qui refusaient les « contrôles sanitaires ».

En fait, ce que refusaient les personnes détectées comme infectées par le coronavirus et leurs contacts, c’était d’être isolés non pas dans une clinique, comme on l’a lu, mais dans un baraquement encore plus insalubre que le reste du camp, et sans équipement sanitaire. Alors, ensuite, que ce soit peut-être les tirs de la police qui soient à l’origine du feu, comme l’écrit Prin (journal de NAR, principal groupe anticapitaliste) ou que soit clairement une révolte des damnés de la terre, comme l’écrit le militant révolutionnaire Panos Kosmas dans le quotidien Efimerida ton Syntakton, peu importe sur le fond, car toutes les associations humanitaires dénonçaient depuis des années le risque évident de catastrophe : les seuls responsables du drame, ce sont le gouvernement grec et l’Union européenne, qui ont cyniquement surpeuplé un camp prévu pour 3000 personnes et qui en recevait ces derniers temps 12 000. Et c’est toute l’odieuse politique grecque et européenne par rapport aux réfugiéEs qui est plus que jamais en cause !

Fuite en avant raciste

Depuis plus d’un an au pouvoir, la mal nommée Nouvelle Démocratie fait de la répression contre les réfugiéEs un axe majeur de sa politique : évacuation de nombreux squats hébergeant souvent des immigréEs, expulsion de réfugiéEs dotés du droit d’asile de logements provisoires en les jetant à la rue, et les chassant ensuite de places où ils tentent de s’abriter (place Viktoria à Athènes). Et la seule réponse du ministre des politiques migratoires, Mitarakis, reste de construire des camps fermés, refusant le transfert massif des réfugiéEs vers le continent.

Et du côté de l’UE, si on « gronde » Mitarakis qui ose être fier de son sale boulot, le bilan (en 2020 seulement 533 réfugiéEs ont été installés en Europe à partir de la Grèce !) et les propositions sont misérables : financer le transfert de 400 jeunes de Moria vers le continent grec, et accepter un éventuel accueil au compte-gouttes – 100 à 150 réfugiéEs pour la France ! Le dogme de l’Europe forteresse sera-t-il remis en question fin septembre (réunion des instances) ? On ne peut qu’en douter…

Pour une mobilisation anti-raciste puissante et durable !

L’une des raisons de l’urgence, c’est que le drame humain supplémentaire pour les réfugiéEs donne lieu à un nauséabond déferlement de haine et de violences. La première réponse de Mitsotakis à la catastrophe a été l’envoi de renforts policiers et de canons à eau pour empêcher que les réfugiéEs aillent « contaminer » les habitantEs de l’ile de Lesvos (bien plus de cas de virus que chez les réfugiés). Aux réfugiéEs qui revendiquent leur transfert sur le continent, la réponse a été les lacrymos, mais aussi l’apparition de commandos fascistes qui s’en prennent également aux solidaires, en toute impunité… Plus généralement, la presse de droite entretient une campagne de haine complotiste : « L’émeute des islamistes à Moria est une autre tentative du MIT (service secret turc) de déstabiliser la Grèce en créant un front intérieur » (journal Dimokratia), voilà le discours de la presse y compris « classique » de la droite, porté aussi sur place par des représentants de l’État, comme le président de région Moutzouris…

Face à cela la solidarité s’organise, sur place et dans le pays. Vendredi soir, des milliers de personnes ont manifesté à Athènes en exigeant l’ouverture des frontières pour les réfugiéEs, et d’autres initiatives sont en cours. Mais il y a urgence à développer dans toute l’Europe une solidarité antiraciste qui brise la politique des murs : les mobilisations en Allemagne ou l’appel international (http://chng.it/FwXvr7vR) montrent la voie !

D’Athènes

Source https://lanticapitaliste.org/actualite/international/apres-lincendie-du-camp-de-moria-au-cote-des-refugiees-en-grece

Urgent solidarité Grèce

[Urgent] info Grèce : Lesbos, Exarcheia, Crète… par Yannis Youlountas ·

Bonjour à tou-tes !

Nous sommes actuellement de retour en Grèce, avec plusieurs fourgons et un chargement important à destination de plusieurs lieux et actions solidaires autogérées à Athènes et sur plusieurs îles.

À Lesbos, des milliers de réfugiés errent actuellement dans des conditions très difficiles, suite à l’incendie qui a ravagé le sinistre camp de Moria où étaient parqués 15.000 adultes et enfants.

Il ne reste plus rien du sinistre camp de Moria à Lesbos

Nous nous permettons de vous contacter d’urgence parce que nous constatons que la situation est beaucoup plus grave que ce que nous avions prévu et parce que nos moyens ne sont pas suffisants.

Sans faire de bruit, en mars et en juillet, nous avons déjà effectué plusieurs voyages pour soutenir 29 lieux et collectifs en Grèce, et nous avons également participé à la création de nouveaux lieux dont certains nous tiennent particulièrement à cœur.

Parmi les lieux et collectifs que nous avons aidé matériellement et/ou financièrement :

Centre social autogéré Alimoura à Ioannina (nous avons financé la réparation du local qui avait été saccagé par une attaque fasciste) ;

Usine autogérée Bio.Me à Thessalonique (soutien et achat de savons et produits fabriqués par les ouvriers, alors que l’électricité venait de leur être coupée) ;

Mikropolis à Thessalonique (soutien au plus grand espace social libre de Grèce, notamment pour l’aide aux réfugiés et les nombreuses autres activités du lieu) ;

Initiative antifasciste d’aide aux réfugiés près d’Évros (au moment où ces derniers étaient pris au piège entre les deux états grecs et turcs, et où des identitaires européens étaient venus pour tenter de pratiquer la chasse à l’homme, ainsi qu’à Lesbos) ;

Réseau Solidaire de Crète (et soutien à la création de nouveaux lieux dans l’île, dont nous vous reparlerons dans quelques semaines, avec de belles surprises) ;

Initiative de Kastelli en Crète contre le nouvel aéroport (nous avons participé au financement de la procédure de Justice contre l’aéroport qui est en train de basculer à l’échelle européenne, alors que 50.000 des 200.000 oliviers ont déjà été coupés et que l’opinion est de plus en plus opposée au projet, nous avons également participé à plusieurs réunions et actions sur place, et soutenu les paysans en lutte contre ce projet) ;

Centre Social autogéré Favela au Pirée (soutien financier et achat de tee-shirts pour épauler ce lieu situé dans une zone où les fascistes rôdent souvent et où l’un d’entre nous, Yannis en l’occurrence, a été agressé violemment en juin 2019 par un groupe de néo-nazis qui lui avait tendu un guet-apens avant que les passagers d’une rame de tramway ne parviennent à le sauver) ;

K*Vox à Athènes (célèbre base d’un des groupes les plus actifs en Grèce, que nous soutenons depuis sa création) ;

Aide aux frais de Justice de plusieurs compagnons de luttes, notamment pour leur éviter d’aller en prison suite à des actions pourtant exemplaires ;

squat Notara 26 à Athènes (le plus ancien lieu d’accueil des réfugiés dans le quartier d’Exarcheia est aujourd’hui le seul qui ait réussi à résister à la violente vague d’évacuations lancée par le nouveau gouvernement de droite depuis un an) ;

Cuisine Sociale L’Autre Humain (financement permanent de la moitié du loyer du lieu de stockage et livraison de produits alimentaires à chaque convoi) ;

Structure autogérée de santé d’Exarcheia (soutien financier et livraison de matériel médical) ;

Réseau École Buissonnière-Pédagogie Freinet (soutien financier et livraison de fournitures en aide aux enfants précaires) ;

actions solidaires à Lesbos (nombreuses initiatives depuis mars et, surtout, après l’incendie du sinistre camp de Moria il y a quelques jours et l’errance de nombreuses familles en difficultés).

Une fois de plus, c’est le mouvement social qui est en première ligne de la solidarité, dans l’autogestion et l’horizontalité (cuisine sociale L’Autre Humain, septembre 2020, Lesbos)

Parmi nos autres initiatives, nous avons fait livrer à Athènes plusieurs tonnes de fruits et légumes invendus en Crète (conséquence de la forte baisse du tourisme), notamment des centaines de kilos de tomates et d’oranges qui ont été livrées à la cuisine sociale l’Autre Humain, au squat de réfugiés Notara 26 et au K*Vox pour les militants les plus précaires.

Ces derniers jours, nous avons renforcé le financement de la cuisine sociale à Mytilène, en soutien aux nombreuses victimes de Moria, épaulé par le déplacement de l’Autre Humain à Lesbos (plus de 2500 repas servis par jour dans l’autogestion, l’entraide horizontale et le refus de toute convention avec les autorités responsables de ces politiques infâmes). Nos camarades sur place nous signalent que l’aide est encore très insuffisante pour l’instant et que nous devons essayer de l’amplifier au plus vite.

Certains membres du convoi de septembre 2020 ne cachent pas leurs visages… et leur joie de participer à l’entraide directe et sans frontières !

Ce vendredi 25 septembre, nous serons bien évidemment à nouveau à Exarcheia pour le cinquième anniversaire du squat Notara 26, aux côtés des réfugiés et des solidaires (dont plusieurs d’entre nous font partie à longueur d’année). Il faut savoir que depuis le début de l’offensive du gouvernement Mitsotakis contre les squats à Exarcheia, de nombreux membres des convois passés sont revenus à plusieurs reprises pour participer à la protection du lieu et aux tours de garde nuits et jours, sans discontinuer, depuis juillet 2019. Certains sont même restés plusieurs mois d’affilée sur place.

Le Notara 26 reste le premier et le dernier squat de réfugiés qui résiste encore dans le quartier d’Exarcheia, en lien avec beaucoup d’autres luttes et avec les principaux squats politiques du quartier (K*Vox et Lela Karagianni)

Nous sommes également en train de cofonder plusieurs bibliothèques sociales et ressourceries en Crète. Des espaces gratuits et accessibles à tous, dans des villages et des petites villes, pour participer à transformer l’imaginaire social et mieux faire comprendre ce que nous proposons pour sortir de l’impasse du capitalisme et de la société autoritaire.

Voilà pour ce premier bilan de la situation.

Si vous voulez nous aider dans toutes ces initiatives, c’est le moment. Car plusieurs des actions et lieux évoqués ont besoin d’un renfort urgent de l’aide apportée. Surtout :

  • Les actions solidaires à Lesbos
  • La cuisine sociale L’Autre Humain
  • Le squat de réfugiés Notara 26 à Exarcheia
  • Les actions et créations de lieux en Crète
  • Les compagnons de luttes poursuivis (frais de Justice)

Vu le contexte et l’urgence, évitez les chèques : uniquement virement ou paypal.

Pour participer par virement à ANEPOS :

IBAN : FR46 2004 1010 1610 8545 7L03 730 – BIC : PSSTFRPPTOU

objet : « Action Solidarité Grèce »

ou, si vous voulez soutenir plus précisément : « Lesbos » ou « Cuisine » ou « Notara » ou « Crète » ou « Compagnons » (choisissez un mot clé)

Pour participer via PAYPAL, suivre le lien :

https://www.paypal.com/cgi-bin/webscr?cmd=_s-xclick&hosted_button_id=LMQPCV4FHXUGY&source=url

 

Source http://blogyy.net/2020/09/21/urgent-info-grece-lesbos-exarcheia-crete/

Guerre et paix en Méditerranée orientale

Par Dimitris Konstantakopoulos 21 septembre 2020

La décision de la Turquie de retirer ses activités de surveillance des navires en Méditerranée orientale, où les zones maritimes ne sont pas délimitées et sont revendiquées à la fois par la Grèce et la Turquie, a entraîné au moins une récession temporaire dans le dangereux différend en Méditerranée orientale.  entre la Grèce et la Turquie.

Cependant, rien n’a été résolu. Les dangers d’une guerre gréco-turque, avec d’énormes conséquences internationales, ou bien d’une crise longue et dangereuse, sont toujours présents, surtout si l’on considère la « guerre civile » au sein de l’establishment occidental entre les forces plus conservatrices et le parti d’une « guerre des civilisations » permanente. Cette « guerre civile » a déjà trouvé son expression dans les activités de Mme Merkel, qui a négocié un premier moratoire gréco-turc, pour ensuite voir M. Pompeo, une figure de proue du néoconisme, intervenir et le torpiller en 48 heures.

La Grèce surveille la Turquie, la Turquie surveille la Grèce et l’UE surveille les deux. Mais les dirigeants politiques, tant à Athènes qu’à Ankara, ne semblent pas se rendre compte des jeux plus généraux qui déterminent le conflit gréco-turc, comme cela a toujours été le cas dans l’histoire. Un exemple classique est la crise de 1974, lorsque Kissinger a poussé la junte militaire installée à Athènes par les États-Unis à organiser un coup d’État à Chypre, puis la Turquie à envahir l’île
M. Pompeo passe maintenant une grande partie de son précieux temps (car il est occupé par la Chine, l’Iran, le Belarus et l’Amérique latine, entre autres) à voyager à Chypre et en Grèce. Les observateurs ne comprennent pas très bien pourquoi il effectue ces voyages et quel est le véritable message qu’il a transmis à huis clos au président Anastasiades.

M. Pompeo s’efforce de persuader les Allemands qu’il travaille aussi pour la paix et le désengagement, mais nous devrons juger ses véritables intentions par les résultats pratiques de ses voyages, et non par ce qu’il dit.

Nous avons expliqué dans nos précédents articles qu’une guerre entre la Grèce et la Turquie n’aura pas de vainqueurs, elle n’aura que des perdants. Les deux pays disposent d’un grand nombre d’armes de destruction et d’une sorte de « parité stratégique ». Même si l’un parvient à détruire une grande partie des forces armées de l’autre (ce qui est tout à fait improbable), il lui restera la possibilité de porter un coup de riposte dévastateur. Les deux pays (et Chypre) remonteront à deux cents ans en arrière, tandis que les intérêts clés de l’Europe, de la Chine et de la Russie seront affectés. Une forte dose de « chaos » sera ajoutée à une planète qui est déjà dans un état sui generis « d’avant-guerre » (« Extrême-Orient, Moyen-Orient, crise sanitaire et économique profonde, quasi guerre civile américaine »).
L’élément le plus étonnant et le plus tragique de la crise actuelle est qu’en réalité elle a commencé sur des questions inexistantes ou presque. La Turquie veut obtenir le plus possible des hydrocarbures de la Méditerranée orientale, mais il n’est pas certain qu’ils existent et quel est le coût de leur extraction, surtout dans un contexte d’effondrement des économies pétrolières et du recul des combustibles fossiles.
Les gouvernements de la Grèce, de Chypre et de la Turquie semblent nier la réalité d’un déclin systémique de la demande mondiale de pétrole et de gaz, un déclin si grave qu’il menace déjà la viabilité économique de la plupart des États du Moyen-Orient. Quand on lit les divers amiraux turcs qui disent qu’il y a des réserves de gaz pour cinq cents ans en Méditerranée orientale, on comprend facilement que les imbéciles et les provocateurs ne manquent dans aucun des deux pays et que c’est une raison pour laquelle nous pouvons nous retrouver en guerre.

Extrêmement fragilisée, la Turquie pensait aussi que nous sommes en 1920 et non en 2020 et que la Grèce, Chypre et Israël l' »excluraient » de la Méditerranée, en construisant le gazoduc EastMed d’Israël à la Grèce et en s’alliant entre eux. Mais le gazoduc EastMed, fortement soutenu par les États-Unis et Israël, ne sera presque jamais construit, car il est trop cher, aucun gisement n’a été trouvé pour justifier son coût, l’Italie, le destinataire du gaz n’a pas donné son accord et l’Europe s’éloigne des combustibles fossiles et leur prix s’est effondré. Le seul résultat de ce projet de gazoduc a été jusqu’à présent de provoquer une grave crise entre la Grèce et la Turquie et on est en droit de se demander si ce n’était pas le but de l’opération dès le début.

La prétendue alliance entre la Grèce, Chypre et Israël semble dépourvue de tout contenu susceptible de menacer la Turquie. C’est plutôt une façon pour les élites grecques et chypriotes de justifier auprès de leur opinion publique les énormes concessions qu’elles ont faites à Israël, sans rien en retour.

Tayip Erdogan a maintenu une attitude très modérée à l’égard de la Grèce jusqu’à il y a deux ans et surtout un an, lorsqu’il a commencé à intensifier son agression contre Athènes. Aujourd’hui, fidèle à un maximalisme sans limites, qui a souvent par le passé piégé le nationalisme turc lui-même, comme par exemple en Syrie, a sorti du placard une série de revendications scandaleuses contre la Grèce. Seul le Parthénon n’a pas encore été demandé par la Turquie

Les responsables turcs interpellent souvent les Grecs à se souvenir de leur expédition en Asie mineure qui a conduit au désastre. Il semble qu’il ne leur vienne pas à l’esprit que les conclusions sont valables pour quiconque s’étend trop, y compris la Turquie elle-même.

En particulier, la Turquie a soulevé la question de plus de 150 îles dans lesquelles la Grèce a exercé sa souveraineté pendant un siècle, avec l’argument peu sérieux que le traité de Lausanne de 1923 ne les mentionne pas nommément.

En outre, Ankara souhaite la démilitarisation des îles de la mer Égée orientale, comme le prévoit le traité de Lausanne. Ce traité a été signé en 1923, alors que la Turquie voulait bloquer une deuxième campagne d’Asie Mineure contre elle et qu’il y avait encore d’importantes populations grecques en Asie Mineure.

Les îles de la mer Égée orientale n’ont commencé à être militarisées à des fins de défense par la Grèce qu’après 1975. La décision n’a été prise par la Grèce qu’après l’invasion turque de Chypre (où les troupes turques sont toujours présentes) et le nettoyage ethnique de 300 000 Grecs. En outre, la Turquie a construit la plus grande flotte amphibie du monde, qui est basée en face des îles grecques, avec pour seule mission possible de les envahir. Chaque année, elle organise des exercices militaires avec exactement ce scénario.

Selon certaines informations, M. Pompeo et M. Maas s’apprêtent à discuter des demandes de démilitarisation de la Turquie. Ce dernier, que personne n’a jamais confondu avec Bismarck, se distingue par la combinaison d’une grande franchise allemande (et la difficulté conséquente de suspecter même les pièges américains et néoconservateurs), avec le fort pro-américanisme du SPD.
Cependant, aucun gouvernement grec ne peut discuter de la démilitarisation des îles. S’il le fait, il tombera très rapidement et nous aurons très probablement une droite extrémiste pro-américaine et pro-israélienne, ce qui facilitera une guerre.
En d’autres termes, M. Erdogan aura réalisé ce que ses conseillers nous disent depuis des années et dont il a peur : que les États-Unis et Israël utilisent la Grèce et Chypre contre lui ! !!

Après 1955, et plus encore après 1972, à l’instigation des Britanniques et des Américains, la Turquie a fait un grand nombre de réclamations contre la Grèce et Chypre. Se transformant en instrument de l’Occident contre les Grecs, elle n’a pas vraiment gagné grand-chose, sauf pour Chypre, où elle occupe un tiers de l’île, mais cela n’est reconnu par personne, alors qu’elle paie depuis de nombreuses décennies le coût politique, économique et diplomatique considérable de l’occupation.

En réalité, la pression exercée par la Turquie facilite beaucoup plus l’octroi de la souveraineté de la Grèce et de Chypre à l’Occident, à l’OTAN etc. qu’à la Turquie elle-même !

La crise de 1996 n’a pas abouti à la prise d’Imia par la Turquie, mais à sa « neutralisation ». Les Américains veulent contrôler la mer Égée, qui est l’extension du détroit. Ils veulent saper la souveraineté grecque dans la région, ils utilisent la Turquie pour y parvenir, mais la dernière chose qu’ils pensent est de permettre à Ankara de contrôler toute la mer Égée, tant sa côte continentale que ses îles. Pas question de laisser Ankara s’alimenter sur les îles grecques.

La même chose s’est produite avec le plan Annan pour résoudre le conflit chypriote, un plan d’inspiration américaine, britannique et israélienne. Ce plan (rejeté par la population lors d’un référendum) établissait à Chypre un protectorat postmoderne dirigé, indirectement mais clairement par les États-Unis, la Grande-Bretagne et Israël, à travers un labyrinthe de dispositions, le secrétaire général de l’ONU (pas même le Conseil de sécurité) nommant trois juges internationaux qui cumuleraient le pouvoir ultime exécutif, judiciaire et législatif entre leurs mains et nommeraient leurs successeurs !!!

Pour que la paix soit stable, tout accord doit être équilibré. Compte tenu des positions des deux parties, et de leur place dans les idéologies nationales respectives, on peut difficilement imaginer comment ces différends peuvent être réglés facilement.
Le « parti de guerre » international pourrait être utile s’il faisait pression sur l’élite grecque pour qu’elle franchisse ses lignes rouges nationales et fasse de sérieuses concessions de souveraineté, soi-disant à la Turquie, mais en réalité à l’OTAN et aux États-Unis. De telles concessions, par le biais d’accords internationaux, sont généralement irréversibles. Si l’élite grecque les accepte, alors un nationalisme grec d’extrême droite peut gagner du pouvoir à Athènes d’une manière ou d’une autre.

On espère qu’Athènes et Ankara pourront contrôler la dynamique de la confrontation avant qu’elle ne les contrôle, bien que l’examen microscopique des forces souterraines à Athènes et Ankara poussant à une escalade soit convaincant pour la détermination des forces internationales qui veulent mener au conflit, ou au moins à la perpétuation de la crise.
La solution optimale serait de trouver un moyen de diviser le plateau continental entre la Grèce, Chypre et la Turquie et de geler les questions restantes, qui n’ont aucune chance réaliste d’être résolues maintenant.

Si cela n’est pas possible, la deuxième meilleure solution pour la paix en Méditerranée et pour tous les pays concernés, serait de geler tous les conflits et d’attendre des temps meilleurs. C’est ce qui s’est passé il y a de nombreuses années dans la mer Caspienne également, lorsque les divergences entre ses pays ont failli conduire à des conflits militaires.

La Grèce et la Turquie sont toutes deux confrontées à de très graves crises économiques et sanitaires. Elles sont situées à la périphérie d’une région qui risque de devenir inhabitable en raison du changement climatique. Il est ridicule pour eux de penser en termes de l’an 1000 ou 1500, dans une situation mondiale qui est, comme le souligne Noam Chomsky, la plus dangereuse de l’histoire de l’humanité.

Et sans même une épreuve de force, la course aux armements dans laquelle une confrontation prolongée les mènera, suffit à les détruire même sans guerre et à annuler leurs marges de politique étrangère indépendante !

Source http://www.defenddemocracy.press/war-and-peace-in-eastern-mediterranean/


Un commentaire sur l’article de Dimitri Konstantakopoulos sur la « stratégie du chaos ». 24/09/2020 Par Yannis Mavros

La « stratégie du chaos » à laquelle nous assistons à l’échelle mondiale trouve son origine dans la réaction des États-Unis à l’émergence de l’Eurasie comme centre de gravité géoéconomique et géopolitique de la planète, une évolution qui marginalise effectivement l’Amérique et les États-Unis comme « île » à la périphérie (voir « Le Grand Échiquier » de Zbignew Brzezinski).

Si elle est laissée à elle-même, la logique du développement économique conduit inexorablement à l’intégration de l’Eurasie en tant qu’entité géoéconomique (et donc géopolitique) où la Russie jouerait un rôle pivot reliant la Chine et l’Europe, laissant peu de marge de manœuvre à l’Inde et marginalisant le Japon. La « stratégie du chaos » est essentiellement la tentative désespérée des États-Unis d’utiliser leur puissance militaire, ainsi que leur influence politique sur les différentes élites de l’Occident, afin de contenir, voire d’arrêter, cette évolution et de retarder indéfiniment la perte de l’hégémonie mondiale des États-Unis, quoi qu’il arrive. Cela implique de fomenter des tensions et des crises dans le monde entier en appelant à la « médiation » de la gendarmerie mondiale afin de sauvegarder et de promouvoir les intérêts américains et de perpétuer son implication dans tous les coins du monde. Le fait que cette aspiration ne soit plus soutenue par la prédominance incontestable de l’économie et de la culture américaines sur ses adversaires et qu’elle nécessite l’application de la force brute est ce qui rend cette stratégie carrément imprudente et menaçante pour tous.

C’est dans ces conditions et les graves menaces qu’elles font peser tant sur la Grèce que sur Chypre que nous devons traiter avec la Turquie. La « stratégie » nationale de « l’appartenance à l’Occident » de la Grèce*, traditionnellement l’expression idéologique de sa dépendance servile, menace à présent de faire de nous une zone tampon sacrifiable pour l’endiguement de la Turquie (avec ou sans changement de régime) si elle ne nous transforme pas à terme en un appendice de la Turquie (scénario de « finlandization ») dans le cas (et dans la mesure) où cette dernière est reconquise pour l’Occident. Le fait de minimiser l’importance globale de la Grèce pour l’Occident (et l’Orient d’ailleurs !) en la réduisant à la dimension géopolitique et géoéconomique laisse présager un désastre non seulement pour la Grèce et l’Occident. L’importance de la Grèce et sa contribution potentiellement inestimable aux affaires mondiales et à la paix internationale découlent de sa civilisation et plus particulièrement de son héritage de liberté et de démocratie. C’est pourquoi il est impératif de formuler une stratégie nationale alternative globale qui permettra à la Grèce et à Chypre de prendre l’initiative de libérer l’Europe tant de la tutelle américaine, qui la dresse contre la Russie, que de la domination allemande, qui non seulement a coûté et coûte encore si cher à nous, Grecs, mais menace de détruire l’Europe une fois de plus.

*Au cours de la guerre froide, on pouvait incontestablement parler de stratégie mais, compte tenu du changement radical des circonstances, elle est devenue de plus en plus une sorte de relique, une appellation erronée qui a été perpétuée par défaut, à savoir par l’incapacité (et la corruption) de la classe dirigeante et des différentes élites à formuler et à proposer à la nation une stratégie adaptée au présent.

Source http://www.defenddemocracy.press/a-comment-on-dimitri-konstantakopoulos-article-on-chaos-strategy/
Traduit avec www.DeepL.com/Translator (version gratuite)

OJ prochaine réunion collectif

La réunion programmée le 30 septembre 2020 est reportée en octobre ( date en cours) avec le même ordre du jour


Ordre du jour :

  • Réflexions sur le devenir du collectif,
  • Présence au festival des solidarités le 26 novembre 2020 en partenariat avec AEP,
  • Prochaines actions

 

SOS Méditerranée point de situation

[VIDÉO] Point de Sophie Beau sur la situation de l’Ocean Viking

L’Ocean Viking est détenu par les autorités italiennes depuis le 22 juillet dernier dans le port de Porto Empedocle, en Sicile. Sophie Beau, directrice générale et co-fondatrice de SOS MEDITERRANEE fait un point sur la situation dans un message vidéo à découvrir ici.

NB : Au 17/09/2020, le nombre de personnes décédées en Méditerranée centrale depuis le début de l’année s’élève à 400 personnes selon l’OIM. Il s’agit d’estimations qui ne prennent pas en compte les disparus sans témoin.

Captation et Montage : Les Six Patates


 

Pour signer la pétition https://www.change.org/p/lib%C3%A9rez-l-ocean-viking-2

La vente des rafales français à la Grèce

Ventes de Rafale : une triple saloperie

Rédaction l’Anticapitaliste hebdo

Samedi 12 septembre, Kyriakos Mitsotakis, le Premier ministre grec, a annoncé son intention d’acquérir 18 Rafale français pour équiper son armée de l’air. Il a aussi affiché sa volonté de commander quatre frégates : une commande pour laquelle Naval Group (ex-arsenaux de la marine dans lesquels l’État français est toujours majoritaire) est sur les rangs.
Cette vente est une triple saloperie.

Tout d’abord, elle intervient alors que la tension monte en Méditerranée entre la Grèce et la Turquie. Des deux côtés, les nationalismes se déchaînent et sont utilisés par les gouvernements face aux problèmes économiques et sociaux comme le dénoncent les anticapitalistes grecs et turcs, contrairement à la direction de Syriza et au PC. Certes, il n’est pas question de nier la responsabilité immédiate du régime turc mais alors qu’il serait urgent de calmer le jeu, Macron a choisi de s’engager totalement du côté de la Grèce pour vendre des armes et sans doute préserver les intérêts de Total dans la délimitation des eaux territoriales en Méditerranée (sous lesquelles se trouvent des gisements importants d’hydrocarbures). Macron se situe bien dans la continuité de Chirac qui, lors de la guerre Iran-Irak (1980-1988), choisit d’armer le régime irakien agresseur de Saddam Hussein (le bilan fut d’un million de morts).

Cette livraison est une deuxième saloperie. Pendant des années et encore aujourd’hui, les dirigeants de l’Union européenne (UE) avec le soutien de la France ont imposé à la Grèce une politique de baisse des salaires et des retraites, de privatisation et de réduction de toutes les dépenses sociales et de service public. Pendant ce temps, la part des dépenses militaires grecques dans la richesse nationale s’est maintenue à un des niveaux les plus élevés parmi les pays de l’Otan. Et aujourd’hui, Macron pousse les Grecs à la dépense militaire alors que les autres crédits budgétaires demeurent sous la surveillance de l’UE.

Enfin, la troisième saloperie : depuis des années, les grands pays de l’UE laissent la Grèce gérer les migrantsE qui, du fait de sa position géographique, arrivent dans le pays. La situation dans les camps de réfugiéEs est devenue inhumaine. Que les Grecs se débrouillent avec quelques crédits et policiers européens ! Par contre, dans le conflit actuel, Macron envoie des navires militaires français en Méditerranée orientale et se positionne pour des juteuses affaires ! L’achat grec arrive en effet à point nommé pour les profits de Dassault (qui se préparait à faire un chantage à l’emploi pour l’usine de Mérignac et les sous-traitants). Le « monde d’après » demeure celui des marchands de canon et pas la moindre reconversion ne se dessine pour préserver l’emploi et engager les usines vers des productions réellement utiles.

https://npa2009.org/actualite/international/ventes-de-rafale-une-triple-saloperie-0

« France relance » : ceci n’est pas un plan

15 septembre par Michel Husson


Fondé sur une confiance aveugle dans les « lois du marché », le plan de relance présenté jeudi par le gouvernement n’a pas pris la mesure de la crise que traverse le pays.

  Sommaire
  • Une crise particulière
  • Pari sur « l’épargne forcée »…
  • … Sur l’investissement…
  • … Et sur l’Europe
  • L’emploi entre parenthèses
  • Les limites de la « confiance »
  • Les oubliés de la crise
  • Un plan impuissant

Le plan « France relance » semble à première vue équilibré : un tiers pour l’écologie, un tiers pour la compétitivité, un tiers pour la « cohésion » (le social).

Certains critiques disent – en même temps – que le plan est sous-dimensionné et qu’il est mauvais. Cette approche fait penser à la plaisanterie de Woody Allen au début de son film Annie Hall : « La nourriture de ce restaurant est vraiment infâme », s’exclame une dame. Et son amie lui répond : « Oui je sais, et en plus les portions sont si petites ! »

 Une crise particulière

On peut penser effectivement que 100 milliards d’euros sur deux ans, incluant des mesures déjà prises, et dont les effets seront différés, c’est trop peu.

Mais l’essentiel est de discuter l’objectif principal de ce plan, qui est de faire rentrer le fleuve dans son lit, autrement dit de revenir au business as usual. C’est sans doute une tâche impossible, parce que le plan ne prend pas pleinement en compte les spécificités inédites de cette crise.

Car il ne s’agit pas d’une récession, mais d’un « blocage de la production », comme le souligne l’économiste Robert Boyer dans les annexes – déjà disponibles en ligne – de son prochain livre (Les capitalismes à l’épreuve de la pandémie, La Découverte).

C’est aussi un arrêt simultané de l’offre et de la demande. Dès lors, les débats sur la relance par l’offre ou la demande passent à côté du problème, qui est celui de la relance du circuit.

Enfin, la crise a frappé de manière inégale les secteurs, les catégories sociales et les régions de l’économie mondiale, de telle sorte que la reprise ne pourrait être qu’inégale et désynchronisée. Or, le plan de relance n’en tient pas compte et se contente de paris assez aléatoires.

 Pari sur « l’épargne forcée »…

Le plan donne la priorité aux mesures dites d’offre parce qu’il fait l’hypothèse implicite que la consommation va reprendre spontanément. Mais la constitution d’une « épargne forcée », que la Banque de France évalue à 85 milliards d’euros, ne garantit en rien que cette reprise aura bien lieu.

Il faudrait pour cela que disparaissent les incertitudes économiques et sanitaires. Or, c’est loin d’être acquis. Quand on évoque 800 000 emplois détruits, une hausse des faillites, la multiplication des accords de performance collective pouvant amener à des baisses de revenus et ainsi de suite, un tel climat incite à être très prudent. Sans parler d’une seconde vague dont l’éventualité ne peut être écartée…

Mathieu Plane, économiste à l’OFCE, suggère dans les colonnes d’Alternatives Économiques une baisse de TVA en faveur des secteurs les plus touchés (hôtellerie-restauration, spectacles, etc.). Le retour aux conditions d’usage et aux comportements antérieurs à la crise dépend toutefois d’autres facteurs que les prix. En outre, si une bonne partie des ménages a moins consommé, et donc épargné, il en est d’autres que la crise a plongés dans le dénuement.

Une étude assez fascinante menée aux Etats-Unis à partir de micro-données d’entreprises, croisées avec les statistiques locales, fait apparaître d’importants résultats. Le plus significatif est sans doute que les comportements de consommation ne diffèrent pas selon les mesures locales en matière de confinement. Ce résultat confirme ce qu’un article du New York Times avait mis en lumière, à savoir que les comportements de distanciation étaient apparus avant même la mise en place des mesures officielles de confinement.

Cette même étude pointe plusieurs exemples d’impact différencié de la crise, et en particulier que les ménages aux revenus les plus élevés (le premier quartile) ont réduit leurs dépenses de 17 %, contre 4 % pour les ménages à faibles revenus du dernier quartile.

Il est vraisemblable que la ventilation soit la même en France, ce qui veut dire que le plan table sur la reprise de la consommation des riches, ceux qui ont le plus épargné et qui sont aussi ceux que la crise a le plus épargnés. Mais ce pari risque d’être en grande partie perdu, si cette épargne « forcée » reste à l’état d’épargne.

Dans un éditorial, le journal Le Monde se félicite que le plan « évite de se focaliser sur une stimulation de la consommation, qui a surtout abouti dans le passé à favoriser les importations au détriment du made in France ». Si telle est l’intention du plan, elle est contradictoire. De deux choses l’une en effet : ou bien on table sur la consommation de l’épargne Covid, ou bien on veut l’éviter parce qu’elle serait trop coûteuse en importations.

Cette contradiction souligne le déphasage entre la reprise de l’activité à court terme et la reconstitution d’une offre domestique (relocalisations et réindustrialisation) qui ne pourrait, en tout état de cause, être réalisée du jour au lendemain.

 … Sur l’investissement…

Pour les entreprises aussi, le choc a été inégal et on se retrouve dans une situation contradictoire. D’un côté, comme le constate Olivier Passet, directeur de la recherche de Xerfi, « les entreprises ont fait bien mieux que sauvegarder leur liquidité, elles ont engrangé des réserves pour la suite ». D’un autre côté, de nombreuses entreprises de petite taille sont exposées au risque de faillite, et le plan ne prévoit que 3 milliards d’euros pour le renforcement de leurs fonds propres.

Elles ont pu passer le cap, notamment grâce aux PGE (prêts garantis par l’État), pour une somme cumulée de 116,6 milliards fin juillet. La Banque de France précise que « les entreprises ayant accumulé de la trésorerie ne sont pas nécessairement celles qui ont le plus recouru à l’endettement durant cette période ». Les prêts garantis devront être remboursés au printemps prochain et, comme le souligne Mathieu Plane, « la question de leur capacité à affronter le mur de la dette qui arrive se pose ».

S’il suffisait de baisser les cotisations ou les impôts des entreprises, cela se saurait. Rien ne garantit que la baisse des fameux impôts de production suffira à stimuler l’investissement (pas plus que le CICE ou le CIR auparavant). Il faudrait que les perspectives de débouchés soient suffisamment incitatives, que la priorité ne soit pas donnée au désendettement ou… aux actionnaires.

En outre, se pose un double problème de ciblage : sectoriel tout d’abord, car la finance et les industries extractives seront les grandes gagnantes de cette mesure, ce qui est contradictoire avec son orientation écologique, et aberrant quand on sait que la finance se porte bien en ce moment. Problème de ciblage géographique ensuite : ce sont les régions Ile-de-France et Auvergne-Rhône-Alpes, déjà les plus dynamiques économiquement en France, qui vont le plus en bénéficier.

Rien ne nous prémunit donc vraiment contre une « spirale anémique par laquelle le faible investissement réduirait progressivement les capacités de production, ce qui pèserait sur l’emploi et les revenus et donc sur la consommation, laquelle à son tour découragerait l’investissement, etc. ». C’est en tout cas ce scénario qui inquiète Agnès Bénassy-Quéré, chef économiste de la Direction générale du Trésor.

 … Et sur l’Europe

Sur les 100 milliards d’euros du plan, 40 seront pris en charge par l’Europe. Mais pas automatiquement. Deux conditions au moins doivent être réunies. La première (il faut 30 % de « verdissement » de l’économie) ne devrait pas poser problème, la seconde va en revanche soulever quelques difficultés.

Certes, le « semestre européen » a été rangé au magasin des accessoires, mais les plans nationaux devront toujours être assortis des fameuses « réformes structurelles ». Est-ce pour cette raison que le gouvernement s’obstine à remettre au programme une réforme des retraites ? Celle-ci sera-t-elle le prix à payer pour l’octroi des prêts européens ? Plus largement, les « partenaires » européens accepteront-ils facilement de cofinancer les efforts de compétitivité de leur concurrent ? Autant de questions qui restent en suspens.

 L’emploi entre parenthèses

« J’espère que le plan de relance en 2021 créera 160 000 emplois. C’est notre objectif », a déclaré Jean Castex sur RTL, le 3 septembre. Son autre objectif est que la France retrouve dès la fin de 2022 le niveau de richesse atteint avant la pandémie. Bref, croissance nulle entre mars 2020 et décembre 2022. On évalue par ailleurs à 800 000 le nombre de destructions d’emplois d’ici à la fin de 2020. Ces chiffres éparpillés conduisent donc à un pronostic très sombre quant à la situation sur le marché du travail.

Le plan se borne à compter sur la reprise de l’activité et donc de l’emploi, qu’il entend accompagner par des actions de formation et des primes à l’embauche qui représentent la moitié de son volet « cohésion ». Mais ce sont là autant de mesures déjà utilisées (et sans doute déjà budgétées) sans que leur efficacité ait jamais été vérifiée de manière convaincante. Changer l’ordre des individus dans la « file d’attente » ne suffit pas à créer des emplois.

Une information du Canard enchaîné du 26 août donne une idée assez évocatrice de la conception qu’a le gouvernement de ce qu’est un emploi utile. A Jean-Michel Blanquer qui demandait à Bercy l’embauche de 3 000 enseignants supplémentaires, le Président et son Premier ministre auraient répondu que : « C’est le genre de créations d’emplois qui vont aggraver le déficit et qui ne servent pas à redresser le pays. » Que l’anecdote soit avérée ou non, la réticence du gouvernement à relancer l’emploi public est manifeste et, là encore, les leçons de la crise ne sont pas tirées.

 Les limites de la « confiance »

Le plan ne tient pas compte du fait que l’emploi n’a pas été frappé de manière homogène et qu’il a donc subi des distorsions durables. Cela signifie que la question ne sera pas seulement le volume d’emploi total, mais aussi les réallocations sectorielles nécessaires.

Croit-on par exemple que le transport aérien va redémarrer comme avant ? Et, de manière générale, peut-on imaginer qu’une véritable transition énergétique ne nécessite pas une profonde restructuration de l’emploi ? Il faut en tout cas beaucoup de confiance à l’éditorialiste du Monde pour écrire : « Il faudra que la formation professionnelle, réformée au début du quinquennat, montre sa capacité à accompagner les salariés face à la transformation de notre économie. C’est à ce prix que se gagnera la confiance nécessaire pour que les entreprises, les salariés, les collectivités locales et les ménages jouent le jeu d’une relance qui doit profiter à tous ». Comme s’il s’agissait de « confiance » et de « jouer le jeu ».

Dans ces conditions, on pourrait imaginer accompagner cette restructuration par des créations ex nihilo d’emplois publics ou assimilés et une réduction du temps de travail qui permettrait d’éviter les licenciements et créerait un contexte favorable aux réallocations. En Allemagne, le syndicat IG Metall suggère par exemple d’instaurer une semaine de quatre jours. Mais le plan tourne le dos à ces pistes.

 Les oubliés de la crise

Le pari sur la libération de l’épargne « forcée » fait aussi l’impasse sur tous ceux qui sont passés à travers les mailles du filet des mesures déjà prises. Les indépendants, par exemple, ne peuvent plus prétendre aux aides de l’État depuis le mois de juillet, et leur syndicat demande que cette aide soit prolongée jusqu’en décembre 2020.

De manière générale, tout le monde a remarqué que seulement 800 millions d’euros étaient prévus par le plan en faveur des plus démunis. Il aurait été pourtant judicieux de « profiter » de la crise pour augmenter le Smic (en hommage aux travailleurs « essentiels ») ainsi que les minima sociaux (avec évidemment le risque d’une mesure pérenne). Noam Leandri et Louis Maurin de l’Observatoire des inégalités avaient évalué à 7 milliards d’euros ce que coûterait l’éradication de la grande pauvreté. Élargir le RSA aux jeunes de moins de 25 ans, comme le suggère Tom Chevalier, chercheur au CNRS, aurait été opportun pour la période à venir.

Symétriquement, le plan n’envisage pas « de faire contribuer les gagnants de la crise à la relance », constatent l’économiste David Cayla et le politiste Thomas Guénolé. Mais s’agit-il vraiment d’un « écueil grave du plan gouvernemental » ? On pourrait plutôt considérer qu’il s’agit d’un trait caractéristique de ce plan : il ne prévoit à peu près rien pour parer au creusement des inégalités que la crise va engendrer.

 Un plan impuissant

Fondamentalement, le gouvernement n’a pas compris que les objectifs de réorientation de l’économie ne sauraient être atteints par les seuls mécanismes de marché. C’est pourtant Emmanuel Macron qui affirmait en mars dernier : « Ce que révèle cette pandémie, c’est qu’il est des biens et des services qui doivent être placés en dehors des lois du marché. »

Prenons l’exemple de la réindustrialisation et des relocalisations. Selon le ministre de la Relance Bruno Le Maire : « Délocaliser notre industrie a été une faute majeure. » Mais à qui la faute ? Dans une économie mondialisée, les délocalisations vers des zones à bas salaires sont parfaitement rationnelles, et elles ont été en partie un facteur de compétitivité des grands groupes français. Qu’est-ce qui, dans le plan de relance, peut réellement inciter ceux-ci à rapatrier leurs sources d’approvisionnement ? La montagne accouche d’ailleurs d’une souris : en cumulant les lignes relocalisation et décarbonation, on n’arrive qu’à 2,5 milliards d’euros, comme le souligne l’économiste Gabriel Colletis, dans un entretien à Alternatives Économiques.

Qu’est-ce qui garantit que certains de ces grands groupes, par exemple PSA, ne sont pas déjà en train de planifier le redéploiement de leurs sous-traitants vers des pays moins-disants ? L’obstination à faire passer des traités de libre-échange, comme le Ceta, est-elle vraiment en phase avec la volonté affichée de relocaliser les activités ? Là encore, on ne peut que constater l’absence totale de toute conditionnalité, de toute contrepartie aux aides publiques. Les grands groupes planifient, mais l’État ne le fait pas.

Enfin, le plan de relance fait l’impasse sur les disruptions engendrées par la crise. Il est donc incapable d’anticiper sur la trajectoire à suivre. Le minimum aurait été d’instaurer une véritable conditionnalité, voire sous le contrôle (rêvons un peu) des organisations syndicales. La crise du coronavirus a en quelque sorte révélé toutes les limites du modèle économique néolibéral et fait apparaître la nécessité d’une bifurcation. Or, toutes les transformations nécessaires supposent une dose de planification permettant de tordre les fameuses lois du marché pour faire prévaloir les grandes orientations que se donne la société.

Manifestement, ce ne sera pas la feuille de route du nouveau haut-commissaire au Plan François Bayrou.


(Article publié dans Alternatives économiques, le 7 septembre 2020)

Source : A l’encontre

Auteur.e Michel Husson statisticien et économiste français travaillant à l’Institut de recherches économiques et sociales, membre de la Commission d’audit pour la vérité sur la dette grecque depuis 2015. http://hussonet.free.fr/fiscali.htm

Source https://www.cadtm.org/France-relance-ceci-n-est-pas-un-plan

L’incendie de Moria sur l’île de Lesbos

L’incendie de Moria ou la condamnation des politiques gouvernementales face aux migrations et au droit d’asile
Après l’incendie, les réfugiés au bord des routes

Le mercredi 9 septembre au petit matin, le plus grand camp de réfugié·e·s de Grèce, Morio, sur l’île de Lesbos, a été ravagé par un incendie. Ce n’était pas le premier incendie qui s’est déclenché dans ce camp surpeuplé. Deux incendies avaient déjà eu lieu depuis le début de l’année 2020 et aussi bien le délabrement d’un système électrique minimaliste que les conditions de survie en étaient la cause. Le gouvernement grec s’est aventuré à affirmer que l’incendie avait été provoqué par une rébellion de réfugiés qui voulaient échapper à un vaste contrôle sanitaire lié à l’expansion récente de la pandémie du Covid-19. L’hypocrisie de ce discours voisine l’extrême car depuis des années les conditions sanitaires horrifiantes et les maladies diverses ravagent ce camp dans lequel des réfugiés, en grande partie syriens et afghans, avec leurs familles, sont enfermés. En effet, les procédures de reconnaissance du droit d’asile n’aboutissent quasiment jamais. La destruction d’une grande partie des dossiers lors de l’incendie risque d’accentuer encore plus l’arbitraire et le désespoir de milliers de réfugiés qui sont dispersés sur les routes de Lesbos, sans aucune ressource.

Avec la même duplicité, des pays de l’Union européenne se sont mis d’accord pour «accueillir» 400 mineurs non accompagnés: 100 à 150 pour la France et pour l’Allemagne. Et l’Helvétie s’est réveillée et a assuré l’envoi d’une aide humanitaire, au moment où les ONG présentes à Lesbos font face à la plus grande difficulté d’apporter leur aide concrète, suite aux barrages de la police et aux réactions locales de l’extrême droite, dans un contexte marqué par l’exacerbation d’une population qui est à sa façon délaissée depuis des années.

Cet incendie impose encore une fois l’urgence d’un large débat public sur une des dimensions de la crise civilisationnelle qui tend à être refoulée, parfois par dépit. Or, cette dimension est étroitement intriquée à la permanence de guerres, aux diverses facettes de la crise climatique et à la fonction d’une armée de réserve mondialisée de travailleurs et travailleuses.

La rédaction d’Alencontre reproduit ci-dessous les termes de l’intervention de François Gemenne, chercheur à l’Université de Liège, enseignant à Sciences-Po et membre du GIEC, faite ce vendredi 11 septembre sur France Culture. François Gemenne est l’auteur de On a tous un ami noir: Pour en finir avec les polémiques stériles sur les migrations, qui paraîtra aux Ed. Fayard le 30 septembre. Cet ouvrage développe des thèmes exposés dans de nombreux articles antérieurs et esquissés dans cette transcription de son intervention, avec les raccourcis propres à un exercice oral soumis aux contraintes de temps. Prendre connaissance des thèmes développés par François Gemenne devrait encourager nos lectrices et lecteurs à s’approprier le contenu de son ouvrage. (Rédaction A l’Encontre) 

***

«Ce qui s’est passé à Lesbos, dans le camp de Moria, est le résultat inévitable de cinq ans et même davantage d’inaction complète en matière d’asile et d’immigration de la part de l’Union européenne. Un drame devait forcément arriver dans des camps laissés quasiment à l’abandon, surpeuplés, où les gens se trouvent dans des conditions sanitaires indignes. Il faut rappeler qu’il y avait à Moria près de 13’000 personnes, soit quatre fois la capacité «d’accueil» du camp [en mars 2020, quelque 22’000 personnes y étaient concentrées; les personnes pouvaient attendre durant des heures chaque jour pour obtenir une barquette d’alimentation; des dizaines et parfois des centaines se partageaient toilettes et douches]. C’est une situation que les autorités grecques et européennes laissent pourrir depuis des années et des années.

Face à une telle situation, il y a un impératif humanitaire qui consiste à reloger ces personnes potentiellement au sein des pays de l’UE, à commencer par les enfants. Or, il y a toute une série d’initiatives qui sont prises à l’échelle locale ou régionale (par exemple certains Länder en Allemagne) qui affirment qu’elles disposent des moyens pour mettre en place un accueil, dans l’immédiat des enfants. A moyen terme, il faut d’urgence avoir une vraie politique européenne en matière d’immigration et d’asile pour éviter précisément que les gens soient parqués dans des camps aux frontières de l’Europe parce que l’on ne veut ni les voir, ni les accueillir. Cela fait aussi peser un poids déraisonnable sur ces îles, qui sont des portes d’entrée de l’UE, que ce soit le cas de Lesbos, de Lampedusa, de Malte, pour donner quelques exemples. Ce sont des situations qui ne sont pas tenables dans un continent qui veut être à la hauteur de son projet politique proclamé.

Je dirai que c’est une situation relativement similaire, à Lesbos, à celle que l’on a connue en France avec la «jungle» de Calais. On préfère fermer les yeux sur ce qui s’y passe plutôt que de prendre le problème à bras-le-corps. Il y a des gouvernements tétanisés qui craignent aujourd’hui d’offrir un accueil digne à ces gens. Cela paraît surréaliste d’affirmer qu’il y a des gouvernements qui se refusent à offrir un accueil digne car ils sont contaminés par les thèses et le vocabulaire de l’extrême droite notamment autour du prétendu appel d’air. Ils s’imaginent que s’ils fournissent un accueil digne, cela attirerait davantage de migrant·e·s. Mais c’est méconnaître profondément la réalité des migrations que d’imaginer que des gens vont risquer leur vie et «donner» des milliers d’euros à des passeurs, tout cela pour prendre une douche dans de bonnes conditions, pour avoir accès à des toilettes qui ne soient pas surpeuplées, tout cela pour pouvoir vivre décemment.

Existe encore la théorie très prégnante chez les gouvernements et dans l’esprit des gens que les frontières sont la variable d’ajustement des flux migratoires mondiaux. En gros, si vous ouvrez les frontières, tout le monde va venir. A l’inverse, si vous les fermez, vous allez empêcher les migrations. Mais en réalité cela ne marche pas de cette façon. Les gens ne vont pas décider de partir parce qu’au loin une frontière s’est ouverte. Et jamais les gens ne vont rester dans leur pays parce qu’au loin une frontière est fermée. On le voit bien en Europe. Les frontières extérieures sont hermétiquement fermées. C’est le seul point d’accord entre les gouvernements européens et pourtant les gens arrivent quand même. Jamais une frontière fermée ne va empêcher un migrant de passer. Le seul effet des frontières fermées est de rendre les migrations plus dangereuses, plus coûteuses et malheureusement plus meurtrières, avec déjà quelque 600 morts en Méditerranée depuis le début de l’année.

La lutte contre les passeurs semble être la priorité absolue de tous les gouvernements européens. Mais le paradoxe est que lorsque l’on ferme les frontières, on se rend complice des passeurs. Ce qui va faire prospérer le business des passeurs c’est le fait que les frontières sont fermées avec des gens qui ont absolument besoin de les franchir. Ils se trouvent donc à la merci des passeurs, qui peuvent faire monter les prix jusqu’à plusieurs milliers d’euros. Et désormais ce sont, de facto, les passeurs qui décident de la politique migratoire des pays de l’UE. Ce sont eux qui décident qui arrive où et quand, et dans quelles conditions. En quelque sorte, la politique de fermeture des frontières est en réalité la meilleure chose qui puisse arriver au business des passeurs, business qui est devenu aujourd’hui le troisième trafic illégal rentable au monde, après le trafic d’armes et de drogue. Il a cette particularité cynique qui le rend si attirant : quand vous perdez la «marchandise» – contrairement aux armes et à la drogue –, il n’y a personne qui viendra vous la réclamer. Les gouvernements sont dès lors complices de ces passeurs.

Il y a au sein de l’UE, et au sein des gouvernements, un refus absolu de regarder les choses «pragmatiquement» et rationnellement. Ils vont préférer mener des politiques absurdes et meurtrières au nom de considérations idéologiques de peur de faire progresser l’extrême droite, de peur d’attiser certaines tensions politiques, de faire peur à l’électorat, sans que cela freine l’extrême droite, la droite extrême, y compris sous sa forme gouvernementale. Cela les conduit à rester sans cesse dans ce narratif de crise. Toutes les images de l’immigration qui sont renvoyées par les médias sont toujours des images de crises. Or, ces crises ne peuvent profiter qu’aux extrêmes qui vont chercher à imposer ce narratif dans le débat public en espérant en retirer des dividendes électoraux. Dans l’ouvrage qui va être publié, j’essaie de proposer des solutions qui rompent avec ce narratif de crise.

L’Etat français a pris la décision d’interdire la distribution de repas aux migrant·e·s dans la région de Calais. Cela fait des mois, sinon des années que l’Etat essaie de mettre des bâtons dans les roues des associations et des volontaires qui essaient vaille que vaille Calais d’aider les migrants. L’Etat non seulement refuse de fournir à ces migrants des conditions de vie décentes – des sanitaires, des repas – mais en plus il tente d’empêcher ceux qui essaient, malgré tout, de fournir une aide alimentaire à ces migrants de le faire. Calais, comme Moria, renvoie à une situation qu’on laisse pourrir. Et au même titre où Moria existe parce que Lesbos se trouve à quelques kilomètres de la côte turque, Calais existera toujours en tant que point de départ des migrants car se situant à 35 km des côtes anglaises. Emmanuel Macron fait des projets de loi sur le «séparatisme», alors que le véritable séparatisme est dans le fait de refuser que les gens à Calais ou à Moria font aussi partie de notre société.

Dès lors, quand on doit tirer le bilan de la politique européenne, il est nul. Rien n’a bougé, ni les relocalisations de migrants, ni les questions de port de débarquement [comme l’illustrent les tragédies des bateaux de sauvetage de diverses ONG, ce qui revient à nier complètement le droit concernant la sauvegarde la vie humaine en mer], ni la réforme des conventions de Dublin [Dublin III date de 2013, la Suisse y adhère: le règlement délègue la responsabilité de l’examen de la demande d’asile d’un réfugié au premier pays dans lequel il est arrivé, ce qui implique son renvoi dans le pays d’entrée s’il dépose sa demande ailleurs; le réfugié est «dubliné»]. Tout cela est au point mort. La Commission européenne doit présenter à la fin du mois de septembre un nouveau pacte en matière d’asile et d’immigration. Cette proposition risque bien d’être refusée par les gouvernements. Souvent, certains ont tendance à blâmer l’UE pour ce qui arrive, mais il faut rappeler que ce sont les gouvernements qui s’opposent en premier lieu aux propositions assez constructives de l’UE. Pour exemple, on peut prendre le plan de relocalisation qui avait été proposé à la fin de l’année 2015. Il y a un accord sur l’impasse des conventions de Dublin, mais s’affirme le paradoxe suivant: personne n’est d’accord sur la mise en place d’un système alternatif. Car tout le monde tente d’accueillir le moins possible de migrants, de réfugiés, de demandeurs d’asile.

Par ailleurs, les propositions d’externalisation de l’asile sont catastrophiques. L’UE et les gouvernements confient de plus en plus à des pays tiers et à des régimes plus que douteux le soin de mener à leur place les politiques d’asile [et y compris de collaborer à la répression des réfugiés, comme le concrétisent, par exemple, les relations entre le gouvernement italien et le pouvoir en Libye].

La crise humanitaire s’exprime aussi dans la modification des routes de l’émigration. Au fur et à mesure où des frontières se ferment de manière policière et militaire, les routes migratoires se modifient. Les passeurs et les migrants vont en créer de nouvelles, en réactiver d’anciennes. Ces routes sont souvent plus longues et plus dangereuses. Et les flux d’arrivées changent. Ainsi l’Espagne actuellement est la première porte d’entrée en Europe, après la Grèce, après l’Italie. Une constante s’affirme: ce sont toujours les pays du sud de l’Europe qui constituent les principales portes d’entrée et cela renvoie au problème du contenu des conventions de Dublin. Cela nourrit les courants de droite extrême et d’extrême droite dans ces pays.

Le débat sur l’accueil et sur l’intégration est d’ailleurs confisqué – par rapport à des réactions d’accueil de la part de secteurs de la société qui existent effectivement – par les gouvernements où les voix d’autorités locales, de communes, de regroupements de personnes ne sont pas entendues. Mon expérience me montre qu’il existe une disponibilité d’accueil qui est bien plus grande que celle que nous décrivent à longueur de journée les responsables politiques qui défilent au micro des radios et des télévisions.»

Source http://alencontre.org/europe/lincendie-de-moria-ou-la-condamnation-des-politiques-gouvernementales-face-aux-migrations-et-au-droit-dasile.html

VIOME encore devant les tribunaux

BIOME N’EST PAS A VENDRE ! NOUS BLOQUONS LES VENTES AUX ENCHERES !

Ils ne nous ont pas payés. Ils ne nous ont pas respectés et ils ont essayé de nous virer. Fermé l’usine.
Cela fait neuf ans que nous avons répondu. Et nous leur avons répondu pour de bon.
« Si vous ne pouvez pas, nous le pouvons. »
Nous avons pris l’usine et nous y travaillons.
Nous l’avons toujours fait nous-mêmes et ils nous ont commandé. Et ils ont pris l’argent.
Maintenant nous sommes les seuls à travailler, et personne ne nous ordonne.
Nous discutons ensemble, nous opérons en urgence.
Nous décidons dans notre assemblée générale et partageons la richesse que nous générons.
Notre travail nous appartient et non à un gros actionnaire paresseux.
La route n’a pas été facile. Ils ont coupé notre électricité, ils ont essayé de couper notre eau, nous ont frappé pendant les marches, nous vendent aux enchères.
Et pourtant, nous sommes toujours là. Avec le mouvement du travail en difficulté et le mouvement plus large de la concurrence, avec nos collègues/soeurs de Grèce et de l’étranger, nous luttons pour vivre.
Les syndicats de travailleurs du monde entier soutiennent nos produits.
La solidarité et notre travail sont en train de changer de cap.
Et toi aussi. C’est la seule façon qu’ils nous ont amenés ici.
Nous vous invitons à nous soutenir et à prendre votre chance entre vos mains.
Nous serons là avec vous dans ce combat.
Cette usine , ils veulent la fermer, la vendre, la niquer.
Nous ne les laisserons pas faire.
Nous avons réussi à empêcher la vente (et l’expulsion de l’usine) lors de plus de 20 ventes aux enchères précédentes  Nous avons mis – nous et vous – nos corps en avant pour montrer que nous ne tomberons pas.

Nous vous invitons à nous aider à annuler toutes les enchères qu’ils essaient de nous faire. Nous commençons le 17 septembre dans les tribunaux de Thessalonique à 11h00.

Nous vous invitons à participer à l’initiative de solidarité ouverte à BIOME, qui se déroule chaque mercredi

TOUS AUX TRIBUNAUX POUR BLOQUER LES ACTIONS : 9/17, 9/24, 1/10, 8/10, 5/11 !
Syndicat des travailleurs de Biome
Initiative de solidarité ouverte BIOME


Dernière nouvelle : Pas de proposition le 17 ; prochaine vente aux enchères le 24

La relance du monde d’avant

La relance du monde d’avant : inefficace, injuste, antiécologique

Le gouvernement s’apprête à dévoiler un plan de relance de 100 milliards d’euros économiquement inefficace, socialement injuste et antiécologique. Ainsi, il se saisit de la crise pour amplifier sa politique néolibérale et productiviste.

Ce plan est inefficace, puisqu’il s’agit de poursuivre les mêmes recettes qu’avant, appliquées sans succès : une nouvelle baisse des charges des entreprises, soit 20 milliards d’euros d’impôts de production. Bien que présentée sous couvert du plan de relance, cette nouvelle baisse de l’imposition des entreprises, revendication permanente du patronat depuis des décennies, était déjà en gestation avant la crise. Nous expliquons dans la note jointe à quel point les arguments la justifiant ne tiennent pas. Et si le gouvernement s’attaquait sincèrement à des impôts qui touchent la production et non le profit, alors il compenserait cette baisse par une hausse des impôts sur le profit. Ce qu’il ne fait pas. Au contraire, il confirme la baisse du taux nominal de l’impôt sur les sociétés à 25% en 2022.

Ce plan est injuste : en l’état, sans obligation de maintien des salaires et de l’emploi, sans obligation de reconversion écologique des investissements et sans relance d’une certaine demande afin de satisfaire les besoins sociaux, la baisse des prélèvements des entreprises viendra surtout nourrir les profits ; c’est une politique en faveur du capital. Le gouvernement répond ainsi, sous couvert de la crise, aux demandes réitérées du Medef, plutôt que de se préoccuper de la suppression des centaines de milliers d’emplois et de l’urgence écologique et sociale. La même orientation conduit à de nouvelles « simplifications », selon la novlangue néolibérale, ou prolongent celles édictées pendant le confinement, notamment pour autoriser les dérogations aux règles de reconduction des contrats à durée déterminée.

Cette baisse d’impôts privera un peu plus les pouvoirs publics, notamment les collectivités territoriales et/ou la sécurité sociale, de recettes publiques, pourtant essentielles pour développer les services publics, la protection sociale et la bifurcation écologique. On a pu constater ces derniers mois les besoins criants des hôpitaux publics, pour un service public de qualité aux personnes dépendantes et une protection sociale de qualité.

Un minimum de justice sociale et d’efficacité économique aurait voulu que soient rehaussés les minimas sociaux et le salaire minimum des personnes les plus précaires, touchées en premier lieu par la crise. Ou encore que soit baissé l’impôt le plus injuste, la TVA sur les produits de première nécessité, ainsi que l’a réalisé l’Allemagne. Surtout, il aurait fallu annoncer une révolution fiscale, tournée vers la justice sociale, à commencer par une imposition forte sur les revenus et les patrimoines des plus riches. Au contraire, ce sont des miettes qui sont laissées aux plus précaires : 1 milliard d’euros (hausse de l’allocation de rentrée et repas à 1 euro en restaurant universitaire, aide aux associations et à l’hébergement d’urgence)… soit 1% du budget du plan de relance !

Ce plan est antiécologique : il aurait surtout dû répondre aux urgences sociales et écologiques et consacrer les dizaines de milliards d’euros versés aux entreprises à une reconversion profonde de la production. Des désinvestissements massifs des activités les plus polluantes, dès les prochaines années, sont nécessaires pour espérer une planète vivable à la fin du siècle. Or, 400 millions d’euros seraient prévus pour développer le nucléaire, énergie polluante et dangereuse. Des centaines de milliers de nouveaux emplois, non délocalisables, sont pourtant nécessaires dans la transition écologique et les services non marchands. C’est bien dans ces secteurs qu’il faut mettre la priorité, tout en assurant aux salarié·e·s menacé·e·s par la crise actuelle un maintien de leurs revenus et un droit à emploi. Sur 100 milliards d’euros, seuls une dizaine de milliards viseraient directement et potentiellement ces besoins (dans la santé et la rénovation thermique des logements). Et alors que le gouvernement se targue de vouloir soutenir le transport ferroviaire, de nouvelles suppressions d’emplois sont prévues à la SNCF dans le fret ferroviaire. Autre secteur d’importance pour l’avenir de nos écosystèmes, l’agriculture ; en la matière, « la transition agricole » (dont il s’agira de vérifier l’orientation) n’est dotée que de 1,3 milliard d’euros, environ 4 % de l’effort budgétaire, la moitié des sommes consacrées au sauvetage de l’automobile et de l’aéronautique.

Bref, le monde d’après pour Emmanuel Macron et Jean Castex consiste à reproduire les vieilles formules ayant cours depuis 40 ans, en les teintant légèrement de vert, afin de satisfaire aux actionnaires des grandes entreprises et aux dirigeants du MEDEF. D ’autres politiques sont possibles, en commençant par exemple par les mesures d’urgence proposées par le collectif unitaire « Plus Jamais Ça ». C’est également le sens de nos propositions pour une relocalisation écologique et solidaire qui répondent à l’urgence sociale, démocratique et environnementale.

Source https://france.attac.org/actus-et-medias/salle-de-presse/article/la-relance-du-monde-d-avant-inefficace-injuste-antiecologique

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