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La privatisation de l’eau en Grèce

Le point sur l’eau en Grèce par Yiorgos Archontopoulos, Syndicat des travailleurs d’EYATH

Thessalonique, le 24 janvier 2018

Le 15 janvier, le Parlement grec a voté une loi pour adopter la 3ème évaluation de la Troïka. Entre autres, la loi inclut le transfert des sociétés de distribution d’eau (51%) directement au Superfund. Lorsque le Superfund a été créé, l’idée était que toutes les sociétés publiques seraient transférées à une société holding qui serait une filiale du Superfund. En fait, le nouveau scénario est pire que le précédent.

Un jour seulement après le vote au parlement, TAIPED (HRADF) a annoncé l’actualisation de ses projets de privatisation, dont 24% d’EYATH (société des eaux de Thessalonique) et 11% d’EYDAP (société des eaux d’Athènes). Depuis le 3ème mémorandum, il était prévu de vendre 23% d’EYATH; qui est maintenant devenu 24%, laissant le public avec seulement 50% + une action.

En septembre 2016, le Syndicat des travailleurs d’EYATH a poursuivi la Cour Suprême pour la création du Superfund et le transfert d’EYATH à ce dernier. Cette affaire sera jugée à la fin du mois de février. Maintenant, nous cherchons à savoir si le recours 2016 est cohérent avec le transfert qui a eu lieu le 15 janvier ou si nous avons besoin d’un nouveau recours!

Depuis le mois de novembre, avec SOSte to Nero, nous avons organisé des réunions et des négociations avec le syndicat des maires (PED) qui a organisé le référendum sur l’eau à Thessalonique avec nous. Nous prévoyons de faire une campagne à partir de février. De nombreux événements auront lieu dans la ville sur le thème de la privatisation de l’eau. Le point culminant de la campagne sera le 18 mai, jour du 4ème anniversaire du référendum sur l’eau. Nous avons convenu que les maires financeront la projection du film de Yiorgos Avgeropoulos « Jusqu’à la dernière goutte » dans les centres culturels municipaux. Nous organiserons un appel à volontaires début février.

En ce qui concerne l’application de la Directive Cadre sur l’Eau, il n’existe actuellement aucun rapport officiel. Nous savons que les sociétés des eaux municipales doivent les préparer, mais elles ne sont pas encore prêtes.

Il y a deux jours, un article de presse a été publié sur la prochaine évaluation (4ème) du programme grec de sauvetage financier. La 4e évaluation comprend l’eau et l’énergie.

Selon le troisième examen du programme du mécanisme européen de stabilité (voir pages 35, 36, 40 et 41), la Grèce a besoin d’un cadre réglementaire stable qui permette les investissements dans les réseaux d’approvisionnement en eau et protège les consommateurs.

  • La Grèce doit transmettre le changement des conseils d’administration des sociétés des eaux municipales.
  • La Grèce doit clarifier la juridiction géographique de DEYA (sociétés municipales de distribution d’eau), EYDAP et EYATH, afin d’éviter les chevauchements.
  • D’ici février, la loi devrait être amendée pour améliorer l’efficacité et la transparence des institutions en renouvelant la composition et le fonctionnement du Comité national de l’eau. Parmi les membres à ajouter, le Ministre du Travail et deux ONG.
  • D’ici février, le Secrétariat spécial pour l’eau[1] évaluera le fonctionnement du système de collecte des données ainsi que les plans stratégiques d’EYDAP et d’EYATH.
  • D’ici mars, le Secrétariat spécial pour l’eau devrait adopter un plan d’action de six ans pour renforcer sa gouvernance, sa capacité administrative et son autonomie financière.
  • D’ici avril, le nouveau système d’établissement des coûts et de la tarification pour les services d’eau devrait être mis en œuvre conformément à la Directive Cadre sur l’Eau.

En tant que syndicat, nous songeons à organiser une rencontre avec les directions syndicales d’autres sociétés publiques qui ont été transférées au Superfund. Ensemble, toutes ces sociétés comptent plus de 40 000 travailleurs. Le Superfund est le plus gros employeur du pays, donc les travailleurs doivent s’organiser!

Yiorgos Archontopoulos, Syndicat des travailleurs d’EYATH

[1] Le Secrétariat spécial pour l’eau est compétent pour élaborer les programmes de protection et de gestion des ressources en eau du pays et pour coordonner les services et les organes de l’Etat sur toutes les questions relatives à la protection et à la gestion de l’eau. L’une des principales fonctions du Secrétariat est la mise en œuvre de la Directive Cadre sur l’Eau, qui a été incorporée dans la loi nationale 3199 de 2003, dans le but d’atteindre le bon état écologique et chimique des eaux du pays. Le Secrétariat, en coopération avec les Directions régionales des eaux, prépare les programmes nationaux de protection et de gestion des ressources en eau du pays et assure le suivi et la coordination de leur mise en œuvre. Avant leur adoption, les programmes sont présentés pour consultation au Conseil national de l’eau. Le Secrétariat est organisé en Directions et Départements et dirigé par un Secrétaire spécial du Ministère de l’Environnement, de l’Aménagement du Territoire et des Travaux Publics.

Source http://europeanwater.org/fr/actions/focus-par-pays-et-ville/776-le-point-sur-l-eau-en-grece

A qui profite la dette grecque ?

 À qui profite la dette ? Questions pour du pognon

27 mars par CADTM Belgique , ZinTV

Crise grecque. On nous parle d’une dette grecque insoutenable, impayable… mais au fait : à qui cette dette profite ? Qui sont les créanciers de la Grèce ? Pourquoi ont-ils prêté de l’argent à la Grèce et à quelles conditions ? Pourquoi la Grèce n’a pas été « sauvée » ?

Cette courte vidéo animée vous propose quelques éléments de réponses sur la banque centrale européenne (BCE). Élaborée à partir du travail d’audit de la dette grecque, c’est le 3e épisode d’une série de vidéos sur les créanciers de la Grèce : « À qui profite la dette grecque ? »


Revoir :

Le collectif et le convoi solidaire vers la Grèce de mai 2018

Convoi solidaire vers la Grèce de mai 2018

Un convoyeur de Grenoble participera au convoi

Tout comme pour le convoi de mars et novembre 2017 notre collectif organise sur Grenoble une collecte des fournitures qui seront transportées en Grèce par Christophe qui participera à ce convoi organisé par le collectif Anepos.

Rappel des besoins et modalités de récupération des fournitures

Les besoins sont urgents en :

Fournitures bébés : lait infantile en poudre (tous âges) petits pots, mixers de type babycook, soins bébés, sérum, vitamines, couches ( surtout 3, 4 et 5)

Jouets : petites tailles tels que figurines, ballons, cordes à sauter, légos, jeu d’échecs ( ni peluches ni encombrants),

Produits d’hygiène et paramédicaux : gels douches, protections périodiques, dentifrice, brosses à dents, lessives, pansements, désinfectant, chevillères/genouillères, ( ni attelles, ni médicaments) Biafine, Cicatryl,

Base alimentaire : légumes secs, fruits secs, biscuits, céréales, pâtes,riz, lentilles, thé, café, autres. La date de péremption minimale recommandée est juin 2018.

et n’oubliez pas des messages de soutien : avec dessins, photos, affiches,autocollants, infos sur vos luttes….des confiseries fermées et non fragiles peuvent être ajoutées.

Matériel spécifique pour la résistance : photocopieuses( en état de marche) ramettes papiers, ordinateurs, appareils photos/vidéos ( pour les contre- médias), disjoncteurs, dominos, câbles électrique 3G ( 1,5mm et 2,5mm), outils de bricolage.

Important : la place dans les fourgons n’étant pas extensible, merci de vous en tenir à cette liste.

Vous pouvez aussi  envoyer des chèques libellés à l’ordre d’ANEPOS en indiquant au dos « Convoi Isère-Savoie de mai 2018 »

soit directement à l’adresse suivante : ANEPOS « Action Solidarité Grèce » BP10 81540 Sorèze,

soit par l’intermédiaire du collectif de Grenoble lors des rendez-vous  ou dans la boite aux lettres (n° 86) d’Attac 38 à la MDA rue Berthe de Boissieux à Grenoble.

Rendez-vous pour la récupération des fournitures sur Grenoble :

le samedi 21 avril de 15h à 17 h Rue Félix Poulat à Grenoble (barnum rouge à côté de l’église)

le lundi 23 avril à partir de 19h avant la projection du film l’Amour et la Révolution à l’Espace Aragon 19 Boulevard Jules Ferry 38190 Villard-Bonnot

le mercredi 25 avril de 17h à 19h devant le MIN (marché de gros) 117 rue des Alliés à Grenoble

le mercredi 2 mai de 17h à 19h devant le MIN (marché de gros) 117 rue des Alliés à Grenoble.

L’appel de novembre d’Anepos qui reste d’actualité

Pas question de baisser les bras,
pas question de laisser faire…

En soutenant notre convergence de luttes, par-delà les frontières, entre mouvements sociaux, vous épaulez les initiatives solidaires autogérées qui, en Grèce, font face au durcissement des politiques austéritaires (forte hausse de la mortalité infantile, baisse de 50% de la retraite complémentaire pour les plus pauvres, expulsion de milliers de personnes de leur logement, nombreuses familles qui ne survivent que grâce à la solidarité) et au drame de la crise des réfugiés (dont beaucoup d’enfants, parfois orphelins, qui ont traversé la mer Égée et ont échappé aux camps indignes et inhumains).

Notre action n’est pas humanitaire, mais politique et solidaire, sans intermédiaire : nous soutenons directement nos camarades grecs et les encourageons à continuer à résister et à s’entraider. La liste des principaux besoins est à votre disposition, préparée avec eux pour des livraisons à Exarcheia (Athènes), Thessalonique et plusieurs îles. A vous de participer, si vous le désirez et comme vous le désirez.

Pas question de baisser les bras, ni ici, ni là-bas. Pas question de laisser faire. Pas question de rester chacun dans notre coin d’Europe face à la violence du pouvoir qui nous opprime, détruit le bien commun et nous vole nos vies. Pas question de subir sans agir de toutes les façons possibles : insoumission, résistance, création, solidarité…

Cette action n’est peut-être pas grand-chose face à l’ampleur du désastre, mais elle encourage à poursuivre nos luttes qui convergent vers un même but : reprendre nos vies en mains et montrer ce dont nous sommes capables ensemble.

Hauts les cœurs !

Le collectif artistique et solidaire Anepos
Les conducteurs des fourgons des convois
Les organisateurs de la collecte

Compte rendu des convois de mars et novembre 2017 http://lamouretlarevolution.net/spip.php?rubrique15

Le 27 mars à Nice en soutien à Yannis Youlountas et Jean-Jacques Rue

MOBILISATION DE SOUTIEN

aux solidaires par-delà les frontières,

Yannis Youlountas et Jean-Jacques Rue,

poursuivis par les identitaires de Defend Europe

LUNDI 26 ET MARDI 27 MARS 2018

ANTIBES ET NICE

Durant l’été 2017, une expédition raciste a tenté d’entraver le sauvetage en mer des migrants en mer Méditerranée par les ONG. Telle une milice fasciste, les principaux dirigeants identitaires européens ont affrété le « navire C-Star » contre les associations humanitaires et les personnes qui fuient la guerre et la misère, parmi lesquelles des enfants.

Heureusement, sur l’une et l’autre rive, des centaines de militants antiracistes et antifascistes se sont mis en réseau pour les en empêcher. Dès lors, la débâcle de l’expédition Defend Europe a été retentissante : première alerte en Egypte, blocage du bateau à Chypre, abandon du projet d’escale en Crète, manifestations en Sicile, nouvel abandon en Tunisie, panne au large de la Libye et, enfin, capitulation au large de Malte suivie de la fuite des chefs identitaires européens.

Quelques mois après cet échec total, Defend Europe contre-attaque en justice pour se venger.

Les chefs identitaires allemand, français et italien de Defend Europe poursuivent Yannis Youlountas, seul membre visible du réseau antifasciste Defend Mediterranea, opposé à l’action de Defend Europe, pour « diffamation » et « injures publiques », principalement pour l’utilisation du mot « nazi » dans plusieurs communiqués tels que : « Les nazillons toujours coincés sur leur bateau », « La croisière nazie s’amuse », « Un navire d’aide aux migrants envoyé au secours des nazillons en panne » ou encore « Décidément, le bateau nazi au pavillon mongol nous fait beaucoup rire ».

Ils poursuivent également Jean-Jacques Rue, journaliste satirique et ami de Yannis, pour avoir partagé et commenté, avec beaucoup de colère, de verve et non sans humour, l’une des publications de ce dernier.

Ils leur demandent à tous les deux des sommes colossales (plusieurs dizaines de milliers d’euros chacun) non seulement dans le but de gagner beaucoup d’argent, mais aussi de mettre en grandes difficultés ces deux militants aux revenus modestes. Jean-Jacques Rue risque même jusqu’à 3 ans de prison pour un soi-disant appel au meurtre, alors que c’est, au contraire, l’action de vouloir gêner les actions de sauvetage en mer qui est à l’évidence une mise en danger de la vie d’autrui.

Le procès aura lieu
le mardi 27 mars 2018 à 13h30 au Tribunal correctionnel de Nice.

Nous vous invitons à venir soutenir et rencontrer Yannis Youlountas et Jean-Jacques Rue durant trois moments de discussion, de partage, de convergence de luttes et de solidarité par-delà les frontières :

LUNDI 26 MARS À ANTIBES au cinéma Le Casino (avenue du 24 août)

18h30 Projection de Sur la route d’Exarcheia – Récit d’un convoi solidaire en Utopie de Eloïse Lebourg (57 minutes) qui raconte l’aide internationale apportée aux exilé.e.s bloqué.e.s en Grèce et au mouvement social grec à travers le regard de 4 enfants participant à un convoi venu de France, de Suisse et de Belgique.

19h30 Rencontre avec Yannis Youlountas, Jean-Jacques Rue et plusieurs personnages des films

20h30  Projection de L’Amour et la Révolution – Non, rien n’est fini en Grèce de Yannis Youlountas (1h17) qui raconte l’actualité des luttes et des solidarités en Grèce, notamment avec les exilé.e.s

21h50 repas partagé

MARDI 27 MARS À NICE devant le Palais de Justice

13h30 RASSEMBLEMENT DE SOUTIEN FACE A LA XENOPHOBIE

(avant et pendant le procès de Yannis et Jean-Jacques)

MARDI 27 MARS À NICE à la salle de FSGT (27, rue Smollet)

Accueil et rencontre, dès la fin du procès

19h30 Projection de Sur la route d’Exarcheia – Récit d’un convoi solidaire en Utopie de Eloïse Lebourg

20h30 débat  « Construction de la solidarité par-delà les frontières »

puis repas partagé et musique !

Comité de soutien de Yannis et Jean-Jacques

et

SOlidarité MIgrant.e.s COllectif 06 : Artisans du monde 06, ATTAC France, Citoyens solidaires 06, Défends Ta Citoyenneté !, FCPE, FSU 06, LDH section de Nice, Ligue des Droits de l’Homme Paca, Mouvement de la Paix, MRAP 06, Planning familial 06, RESF 06, Roya Citoyenne, Solidaires 06, Solidaires étudiant.e.s Nice, Syndicat des Avocats de France, Vallées solidaires 06

Réseau antifasciste DEFEND MEDITERRANEA

et d’autres collectifs, organisations et associations de France, de Grèce et d’ailleurs.
Liste en cours, nous contacter à l’adresse courriel ci-dessous (collectifs, organisations et associations uniquement).

 Contact comité de soutien de Yannis et Jean-Jacques : yetjj@youlountas.net ou 06 18 26 84 95

Pot commun « Solidarité avec Yannis et Jean-Jacques » : https://www.lepotcommun.fr/pot/hvfshv5n

L’UE et l’aide à la Turquie contre les réfugiés

L’Europe paye des équipements militaires à la Turquie pour refouler les réfugiés

Par John Hansen (Politiken), Emilie Ekeberg (Danwatch) et Sebnem Arsu (The Black Sea)

Mediapart et l’EIC révèlent que l’argent de l’Union européenne a permis à la Turquie de s’équiper en véhicules blindés afin d’empêcher le passage de réfugiés à sa frontière avec la Syrie. Cette opération pourrait avoir causé de nombreuses victimes parmi les Syriens tentant de fuir la guerre, alors que la prise d’Afrin par l’armée turque va pousser encore des milliers de personnes sur la route de l’exil

Enquête menée par Politiken et Danwatch avec Mediapart et ses partenaires du réseau European Investigative Collaborations (EIC).– Quand les soldats turcs ont ouvert le feu, Ibrahim Khaled a pris sa mère par la main et s’est mis à courir. Il a entendu le cliquetis des armes à feu, entendu les cris des réfugiés frappés par les balles, et a été projeté à terre. Khaled ne s’est pas retourné. « J’ai senti que si je m’arrêtais là, je serais tué ou arrêté », dit-il.

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Pendant des heures, Khaled et sa mère ont couru dans la direction que le passeur leur avait indiquée. Ils ont marché à travers des champs d’oliviers, ont rampé sur des pierres jusqu’à atteindre un village turc. De la soixantaine de réfugiés qui avaient quitté le camp près de Darkush, dans la province syrienne d’Idlib, seule une poignée a traversé la frontière. Khaled ne sait pas ce qui est arrivé aux autres. Ils sont probablement morts ou de retour en Syrie, pense-t-il. « Nous avons eu de la chance. »Khaled est assis dans un appartement nouvellement construit en périphérie de Mersin, dans le sud-est de la Turquie, où lui et sa mère ont trouvé refuge après leur fuite à l’automne dernier. Il porte un jean déchiqueté et un pull qu’un voisin lui a donnés. Ses yeux sont fatigués, son front est plissé de rides. Khaled s’est longtemps posé la question de savoir s’il devait parler avec des journalistes des violences à la frontière turco-syrienne. Il a peur que les autorités turques ne se vengent sur lui. Dernièrement, il a accepté de nous accorder une interview à la condition que son nom soit changé. « Je veux que le monde sache ce qui nous arrive à nous, Syriens », dit-il.

Des réfugiés syriens qui attendent de passer en Turquie, près de la frontière, le 7 février 2016. © Reuters Des réfugiés syriens qui attendent de passer en Turquie, près de la frontière, le 7 février 2016. © Reuters

La guerre civile en Syrie entre dans sa huitième année. Plus de 350 000 personnes ont été tuées à ce jour, des millions ont été déplacées. Et bien qu’il n’y ait toujours pas de paix en vue, les pays voisins de la Syrie ont fermé les voies d’échappatoire. Le Liban, la Jordanie et la Turquie, qui accueillent ensemble plus de cinq millions de Syriens, refusent d’accepter davantage de demandeurs d’asile. La Turquie a construit sur sa frontière avec la Syrie un mur de trois mètres de haut et long de plusieurs centaines de kilomètres.

Khaled raconte que des soldats turcs ont ouvert arbitrairement le feu sur des réfugiés. Les détails de son témoignage sont difficiles à vérifier, mais ils sont cohérents et coïncident avec les déclarations de plus d’une douzaine de témoins avec lesquels le Spiegel s’est entretenu. L’ONG Human Rights Watch a révélé des cas similaires début février : des soldats turcs ont forcé des réfugiés à retourner en Syrie et ont tiré de manière indiscriminée, selon l’organisation.

Il y a précisément deux ans, le 18 mars 2016, l’Union européenne et Ankara concluaient un accord selon lequel les Européens allaient verser 3 milliards d’euros à la Turquie en échange du maintien des réfugiés sur son sol (en attendant un deuxième volet de 3 milliards d’euros). Les dirigeants européens ont prétendu que cet accord avait permis de contenir la « crise des réfugiés ». En réalité, la crise s’est simplement déplacée. À présent, les gens meurent moins fréquemment dans la mer Égée, où le nombre d’embarcations traversant vers la Grèce s’est réduit drastiquement une fois l’accord passé. Mais ils meurent sur la frontière turco-syrienne.

Officiellement, les milliards de l’Europe servent exclusivement à aider la Turquie à gérer les réfugiés sur son sol et à les empêcher d’entrer en Europe. C’est faux. Mediapart et ses partenaires du réseau European Investigative Collaborations (EIC) révèlent que l’Union européenne a payé à la Turquie pour 83 millions d’euros de véhicules militaires et d’équipements de surveillance afin de traquer les réfugiés. Y compris à la frontière turco-syrienne, pourtant officiellement ouverte.

Les journalistes de l’EIC se sont plongés dans les centaines de contrats européens. L’un d’entre eux montre que l’Union européenne a financé à 75 % l’achat par la Turquie de 82 véhicules blindés Cobra II, dont le coût total est de 47,5 millions d’euros. Ces engins, équipés de périscopes, peuvent patrouiller le long du mur côté turc tout en localisant les réfugiés approchant de l’autre côté. Produits par Otokar, l’un des plus gros industriels turcs de l’armement, ces véhicules ont été livrés aux forces armées turques au printemps 2017.

Le Cobra II, de l'industriel turc Otokar. 82 de ces véhicules blindés ont été payés par l'UE, qui prétend pourtant ne pas financer d'équipements militaires à la Turquie. © Otokar Le Cobra II, de l’industriel turc Otokar. 82 de ces véhicules blindés ont été payés par l’UE, qui prétend pourtant ne pas financer d’équipements militaires à la Turquie. © Otokar

Ils font aujourd’hui partie de l’infrastructure de surveillance de ce qui va devenir bientôt le troisième mur le plus long du monde : 900 km de béton équipés de drones, de caméras thermiques, et de tours de tir télécommandées et automatisées de manière « intelligente ». Des haut-parleurs diffusent des messages, avertissant les gens, en turc et en arabe, de ne pas s’approcher davantage. De l’artillerie lourde ouvre le feu si ces avertissements sont ignorés. Les caméras thermiques sont capables, par temps clair, de repérer trois personnes debout d’une taille de 1,80 m à une distance de dix kilomètres. En d’autres termes, l’équipement financé par l’Union européenne aide à repérer des réfugiés qui essaient de traverser le mur frontalier et risquent d’être touchés par des tirs… et tués.

Le mur construit par Ankara maintient par ailleurs des centaines de milliers de réfugiés syriens coincés dans une zone de guerre. On estime que plus de 200 000 personnes ont été déplacées dans le nord de la Syrie depuis la mi-décembre, et il faut s’attendre à ce que la prise par l’armée turque, ces derniers jours, de la ville kurde d’Afrin provoque de nouveaux flux de réfugiés.

La Turquie assure que la frontière est toujours ouverte pour les demandeurs d’asile, ce qui est contredit par différentes sources turques et syriennes proches de la frontière. L’Institut international pour les études stratégiques (IISS) notait déjà en juin 2017 que la Turquie avait rendu « pratiquement impossible pour les réfugiés syriens le passage de la frontière légalement ». « La Turquie assure que sa politique de la “porte ouverte” est toujours en vigueur, mais dans la réalité, elle est presque fermée », estimait alors l’institut.

Depuis septembre dernier, 42 civils ont été tués alors qu’ils tentaient de passer de Syrie en Turquie, selon Rami Abdulrahman, directeur de l’Observatoire syrien des droits de l’homme. Le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (UNHCR) confirme qu’il est devenu pratiquement impossible de traverser la frontière (excepté pour les personnes gravement blessées ou malades), alors que le nombre de réfugiés fuyant la Syrie est en hausse.

On assiste à une violation des droits humains, selon Thomas Gammeltoft-Hansen, directeur de recherche à l’Institut danois des droits de l’homme et du droit humanitaire Raoul-Wallenberg. « Si des balles mortelles sont tirées sur des réfugiés essayant de traverser la frontière, c’est une violation pure et simple des droits humains, rappelle-t-il. Si le mur frontalier enlève aux Syriens toute possibilité de demander l’asile, c’est une autre violation du droit international, en particulier du principe de non-refoulement. »

La fourniture de matériel à la Turquie par l’Union européenne pourrait rendre cette dernière complice de violation des droits humains à la frontière turco-syrienne. « S’ils savent que l’équipement est utilisé d’une façon qui viole les droits des réfugiés, les membres de l’UE sont par principe complices », ajoute Thomas Gammeltoft-Hansen.

309 millions d’euros côté français

Interrogée par l’EIC, la Commission européenne nous a répondu que « l’Union européenne ne fournit pas d’équipements militaires ou létaux à la Turquie ». Les Cobra II sont pourtant bien des engins militaires. La Commission ajoute que l’accord avec la Turquie prévoit que les véhicules soient « exclusivement affectés à la surveillance des frontières et que toute modification ou changement d’affectation des équipements requiert l’autorisation écrite de la commission ».

Sauf que Bruxelles n’a pas les moyens de contrôler ce que fait le régime autoritaire d’Erdogan de ses armes. Plusieurs experts des droits de l’homme craignent d’ailleurs que la Turquie n’utilise cet équipement financé par les fonds européens pour les opérations militaires menées actuellement dans les zones kurdes de Syrie, ou pour la répression visant sa propre population. Des photos de l’invasion par l’armée turque de la province kurde d’Afrin depuis fin janvier montrent que des véhicules Cobra II ont été utilisés. Mais au lieu de périscopes avec des caméras thermosensibles, ils ont été équipés d’armes.

Le caractère problématique des financements européens ne se limite pas à la frontière turco-syrienne. Pour aider la Turquie à surveiller sa portion de frontière terrestre avec la Grèce, l’Union européenne a financé des véhicules militaires plus monstrueux encore que les Cobra II, selon l’enquête de l’EIC.

En mai 2017, Aselsan, une société détenue à 84 % par l’armée turque, a remporté un contrat à hauteur de 30 millions d’euros avec l’Union européenne pour fournir à la Turquie 50 véhicules pour patrouiller à la frontière grecque, dont 20 sont dotés d’un blindage extrêmement épais afin de protéger les véhicules des mines et grenades. Selon les documents européens consultés par l’EIC, ces engins sont des contributions de l’Europe à « la prévention de l’immigration illégale, du trafic humain, des crimes de passage des frontières [« cross-border crimes »], et du système des passeurs ».

L’un des industriels qui a étudié l’appel d’offres s’est retrouvé perplexe devant la disproportion apparente entre l’objectif affiché et les spécifications techniques de ces véhicules, « clairement exagérées » pour des engins censés être utilisés à la frontière de la Turquie avec l’Union européenne. Mais l’UE a été ferme : le blindage lourd est absolument requis, dit-elle dans sa réponse, sans en expliquer les raisons.

Le monstrueux véhicule militaire turc Hizir, dont 50 exemplaires ont été commandés par l'UE pour traquer les réfugiés à la frontière gréco-turque. © Katmerciler Le monstrueux véhicule militaire turc Hizir, dont 50 exemplaires ont été commandés par l’UE pour traquer les réfugiés à la frontière gréco-turque. © Katmerciler

On comprend que Bruxelles soit très discret sur la question. Aselsan, qui a remporté l’appel d’offres, ne fournira en réalité que l’équipement électronique. Selon l’enquête de l’EIC, les véhicules sont des Hizir, d’impressionnants engins de guerre (notre photo ci-dessus) fabriqués par Katmerciler, un industriel appartenant à un ancien député de l’AKP, le parti de Recep Tayyip Erdogan. Le président turc est un grand fan de l’Hizir, dont il a dévoilé le prototype en novembre 2016 lors d’un salon militaire, six mois avant que l’UE n’en finance 50 exemplaires.

L’appel d’offres de Bruxelles stipulait pourtant que les véhicules devaient avoir été mis sur le marché depuis un an. Ce n’est pourtant pas le cas des Hizir, dont les premiers exemplaires sont récemment sortis de l’usine, et qui sont toujours en cours de test avant leur livraison prochaine à l’armée turque.

Lorsque, en 2016, l’Union européenne a promis à Erdogan 3 milliards d’euros en échange de son accord pour reprendre tous les réfugiés syriens arrivant sur les îles grecques, il était pourtant statué que cet argent serait uniquement utilisé pour aider à l’accueil des plus de 3,5 millions de réfugiés syriens vivant en Turquie.

Or sur ces 3 milliards d’euros qui ont été collectés auprès des États membres de l’UE (la quote-part de la France dans ce programme s’élève à 309 millions d’euros), une partie a été utilisée pour financer six bateaux de patrouille à destination des gardes-côtes turcs. Lesquels, selon plusieurs ONG opérant dans ces zones maritimes, arrêtent agressivement les réfugiés tentant de quitter la Turquie, mettant parfois les embarcations de réfugiés en danger.

« Juste après que l’accord avec la Turquie a été mis en place, il était évident que les gardes-côtes turcs faisaient tout pour arrêter les gens qui traversaient la mer, explique Ruben Neugebauer, porte-parole de Sea-Watch, l’une de ces organisations. Il y a différentes tactiques. Parfois nous voyons des bateaux turcs naviguer autour des canots pneumatiques, provoquant des vagues, les mettant en danger de telle sorte que parfois les réfugiés décident de rentrer par eux-mêmes. Parfois, ils chassent les bateaux et frappent même les gens à coups de bâton afin de les faire repartir. »

En réponse à cette interpellation, les gardes-côtes turcs ont publié une déclaration disant qu’ils étaient mandatés pour arrêter les bateaux de réfugiés avant qu’ils ne pénètrent dans les eaux européennes. Les bâtons, expliquent-ils, sont utilisés pour tenter d’endommager les moteurs et les hélices de façon à attacher les petites embarcations aux plus gros bateaux des gardes-côtes pour les tirer vers les côtes turques.

Entre la Turquie et la Grèce, mars 2016. © Enough is Enough TV
Entre la Turquie et la Grèce, août 2017. © Epoca Libera

Mais ce n’est pas le seul cas d’abus présumé commis à bord de ces bateaux financés par l’argent européen. L’ONG Lighthouse Relief a publié une déclaration commune avec le UNHCR pour exprimer sa préoccupation au sujet d’un incident survenu en novembre dernier, assurant que les gardes-côtes turcs avaient tiré en l’air et dans la mer, ce qui a provoqué le saut dans l’eau de plusieurs réfugiés.

Ces six bateaux de patrouille ont été commandés à un constructeur naval néerlandais, Damen, pour la somme de 18 millions d’euros – une somme qui vient pour partie du fonds danois d’aide au développement. Ils ont été livrés aux gardes-côtes turcs l’année dernière. Le dernier a été livré juste avant Noël. D’après la société navale, ces bateaux peuvent transporter jusqu’à 120 réfugiés et migrants en mer.

Ces fournitures d’équipement pour le contrôle des frontières à la Turquie font partie d’une tendance croissante au sein de l’Union européenne : « L’UE utilise de plus en plus le principe de la pleine concurrence et externalise le contrôle frontalier à des pays tiers au lieu d’effectuer son propre contrôle, fait valoir le chercheur danois Thomas Gammeltoft-Hansen. Vous financez le contrôle des frontières, mais vous ne voulez pas être là vous-mêmes car vous risquez de mettre en jeu votre responsabilité en termes de droits humains. » Une stratégie qui rappelle étrangement ce qui se passe aujourd’hui entre l’Italie et la Libye.

Un porte-parole de la Commission européenne a répondu par écrit aux questions de l’EIC en affirmant que l’Union européenne suivait « attentivement » la situation à la frontière turco-syrienne et qu’elle était consciente de l’existence de violences à la frontière, « mais n’a pas été capable d’obtenir de confirmation indépendante par ses sources ou par les autorités turques ». Sollicités depuis une semaine, l’ambassade turque à Copenhague et le gouvernement turc à Ankara n’ont pas donné suite aux sollicitations de l’EIC.

Mercredi 14 mars, l’Union européenne a donné son feu vert pour le versement du deuxième volet de l’aide promise à la Turquie. Trois nouveaux milliards d’euros vont être versés à Ankara.

Source Mediapart

CR Réunion du collectif du 22 mars 2018

Réunion du collectif « Citoyens contre l’austérité en Grèce et en Europe » du 22/03/2018

Présents :, Béatrice, Liliane, Georges, Christophe, Bernard, Mattheos, Max

Excusés : Marie-Claude, Christine, Lucienne

– Soirée du lundi 6 mars 2018 à la MDA de Grenoble : Sur la route d’Exarcheia
Une bonne soirée, environ 70 personnes présentes, le film et les interventions d’Éloïse et de Nicolas ont été d’une façon générale appréciés. De petits problèmes techniques ont cependant un peu gêné la projection. La soirée a été aussi l’occasion de faire connaître la lutte des travailleurs de VIOME et de vendre leurs produits. Étaient exposés aussi les panneaux explicatifs du Cadtm sur la situation en Grèce et la vente des confitures d’Isabelle a permis de récolter un peu d’argent pour les dispensaires.

– Convoi solidaire d’Anepos de mai 2018
Christophe a décidé d’y participer avec un fourgon, il prendra en charge les frais occasionnés par ce voyage solidaire.
Des points de collecte seront organisés :
– le lundi 23 avril à partir de 19h avant la projection du film l’Amour et la Révolution à Villard-Bonnot
– le mercredi 25 avril de 17h à 19h devant le MIN (marché de gros) 117 rue des Alliés à Grenoble
– le mercredi 2 mai même heure, même endroit le tri aura lieu après
Les marchandises pourront être stockées dans le garage de Christophe situé pas très loin du MIN.
Béatrice aura des cartons de déménagement, peut-être faudra-t-il aussi des cartons plus petits.
Max apporte du scotch
Information tous azimuts à faire sur ce convoi.

– L’Amour et la Révolution (Non rien n’est fini en Grèce) le dernier film de Yannis Youlountas : projection le 23 avril à l’espace Aragon à Villard-Bonnot, le film sera suivi d’un débat en présence de Yannis. Un tract sera fait avec l’affiche du film au recto et l’appel à apporter des fournitures pour le convoi solidaire ce jour là. Max fera une proposition de tract.
Le samedi 21 avril de 15 à 17h, place Félix Poulat nous informerons (avec barnum) la population grenobloise sur le film et le convoi. Georges fait la demande auprès de la mairie.

VIOME : une nouvelle commande groupée à priori à l’automne, à confirmer lors d’une prochaine réunion.

– Discussion sur l’opportunité de faire un travail sur l’austérité, la dette, en Grèce en Europe, le rôle de l’Union européenne … et le populariser. Pas mal de choses ont déjà été faites sur le sujet, peut-être voir aussi du côté d’Attac et du Cadtm ?

– Prochaine réunion du collectif

Lundi 16 avril 2018 de 17h à 19h salle 112 de la Maison des associations de Grenoble

Communiqué de SOS Méditerranée

COMMUNIQUE « SOS MEDITERRANEE préoccupée face à une nouvelle étape franchie dans la criminalisation de l’aide humanitaire en mer, exprime sa solidarité envers les sauveteurs d’Open Arms. »

Because of the meteo, The aquarius stay in Catane. The crew use this time for training.

Suite à la saisie d’Open Arms, un seul navire d’ONG reste actif en mer

Les ONG de recherche et de sauvetage travaillent dans un environnement dans lequel les ressources sont de plus en plus rares et le contexte sécuritaire complexe, face à l’une des crises humanitaires les plus tragiques aux portes de l’Europe. Pendant des mois, SOS MEDITERRANEE a travaillé aux côtés de ProActiva dans la zone de recherche et de sauvetage dans les eaux internationales au large des côtes libyennes. Tout l’hiver, Open Arms et l’Aquarius ont été les seuls navires d’ONG à mener des opérations de recherche et de sauvetage en mer en continu, combinant leurs ressources à de multiples reprises afin de sauver des vies sous la coordination du Centre de coordination des secours en mer de Rome (IMRCC). A la suite de la saisie du navire Open Arms dimanche 18 mars, SOS MEDITERRANEE affrète désormais le seul navire dédié à la recherche et au sauvetage à patrouiller dans la zone SAR, ce qui n’est clairement pas suffisant par rapport aux besoins.

Augmentation des bateaux en détresse interceptés et ramenés en Libye 

Au cours des derniers mois, l’Aquarius a été de plus en plus souvent témoin d’interceptions de bateaux en détresse par les garde-côtes libyens dans les eaux internationales. Les rescapés sur l’Aquarius ont témoigné à plusieurs reprises du fait que les interceptions par les garde-côtes libyens augmentaient les risques de naufrage et de noyade. De plus, ces interceptions séparent des familles et ramènent les naufragés dans « l’enfer libyen » qu’ils tentaient justement de fuir.

Les garde-côtes libyens n’appartiennent pas à un centre de coordination des opérations de sauvetage maritime et aucune zone libyenne de recherche et de sauvetage n’a jamais été légalement établie par l’Organisation maritime internationale (IMO). De plus, en Libye, aucun port ne peut être considéré comme un port sûr (port of safety) comme l’exige le droit maritime international pour débarquer les personnes secourues.

SOS MEDITERRANEE appelle les Etats européens à garantir des activités de sauvetage en mer transparentes, légales, sûres et renforcées 

Depuis le début de sa mission en mer, SOS MEDITERRANEE n’a cessé de renouveler son appel à l’Union européenne pour fournir des ressources spécifiquement consacrées à la recherche et au sauvetage dans la zone. En attendant, SOS MEDITERRANEE fait face à des opérations de plus en plus complexes dans un contexte où le professionnalisme, la sécurité et la sûreté sont d’une importance majeure. À plusieurs reprises au cours des dernières semaines, la confusion dans la coordination des sauvetages dans la zone SAR a sérieusement mis en péril la sécurité des personnes en détresse et des équipes de recherche et de sauvetage.

« La saisie d’Open Arms et les enquêtes criminelles lancées à l’encontre de ProActiva Open Arms constituent des développements très préoccupants pour les activités de sauvetage en Méditerranée centrale. SOS MEDITERRANEE, préoccupée face à une nouvelle étape franchie dans la criminalisation de l’aide humanitaire en mer, exprime sa solidarité envers les sauveteurs d’Open Arms. Aujourd’hui, l’Aquarius est le seul navire de sauvetage présent en Méditerranée centrale. Jusqu’à quand ? », a déclaré Francis VALLAT, président de SOS MEDITERRANEE France.
Photo : Yann LEVY / SOS MEDITERRANEE

http://www.sosmediterranee.fr/journal-de-bord/CP-Openarms-21-03-2017

Le désastre néolibéral de la protection sociale et sanitaire

Grèce 2018 : Le désastre néolibéral de la protection sociale et sanitaire par Emmanuel (Manolis) Kosadinos, Médecin franco-grec, syndicaliste.

La prétendue amélioration de la situation sociale et sanitaire en Grèce est une fiction du gouvernement grec, des institutions européennes et des médias dominants. La poursuite de l’application des recettes néolibérales mène à la faillite de l’État social et à la pérennisation de la précarité. Emmanuel Kosadinos nous dresse un bilan de la situation dans ce laboratoire européen du néolibéralime et incite, l’ensemble des pays européens, à en tirer les leçons.

Rappel historique des dernières années

Les 23 et 24 octobre 2017 s’est tenu à Paris le Colloque « Une protection sociale pour tous les peuples » organisé par la Fondation Gabriel Péri. Dans le contexte français, marqué par le débat sur le financement de la protection sociale et de la Santé, par l’écho déjà lointain des programmes électoraux, mais surtout par le spectre de contraction de la protection sociale solidaire, la présentation de la situation actuelle en Grèce, qualifiée de laboratoire européen du néolibéralisme, acquiert un intérêt particulier.

La protection sociale a été la cible de la Troïka (UE, FMI, BCE) dès l’imposition des mémorandums à la Grèce (2010), pour y appliquer les recettes néolibérales.

Au principe de solidarité sociale, exprimé par l’adage « de chacun-e selon ses moyens à chacun-e selon ses besoins », les néolibéraux opposent ceux d’un système inégalitaire de prestations, attribuées en fonction des cotisations versées par des assurés individuels, « de chacun-e selon sa capacité à cotiser à chacun-e selon sa contribution financière à la caisse d’assurance », garantissant seulement une protection minimale, permettant l’accès des individus au marché concurrentiel, désamorçant la contestation sociale.

Ainsi, les organismes de protection sociale devront présenter des bilans équilibrés, voire excédentaires. Le niveau des prestations (retraites, allocations, couverture santé) devra s’adapter à une loi comptable implacable et devenir fluctuant, aléatoire, tributaire de la situation du marché. La « redistribution » néolibérale se fait entre les assuré-e-s en exonérant les revenus du capital.

Par l’application de ces principes, les retraité-e-s grec-que-s ont perdu, entre 2010 et 2015, près de 30 % de leurs revenus ; l’âge de départ à la retraite est passé de 60 à 67 ans ; les allocations chômage ont baissé de 25 % (avec 90 % de chômeurs non indemnisés). Le restant à charge pour l’achat de médicaments a nettement augmenté ; de nombreux médicaments ont été déremboursés ; près de 30 % des citoyen-ne-s ont perdu leur couverture sanitaire. Les dépenses allouées aux hôpitaux publics ont baissé de 40 %.

En janvier 2015, le parti SYRIZA a gagné la majorité aux élections législatives sur la base d’un programme qui annonçait le renversement de l’austérité et le rétablissement des droits des salarié-e-s et de la protection sociale. Après 6 mois de négociations avec les créanciers et l’UE, et malgré la condamnation des politiques d’austérité par 61,3 % des élect-eur-rice-s grec-que-s lors du référendum de juillet 2015, les dirigeants du gouvernement grec ont signé un 3e mémorandum d’austérité ratifié en procédure accélérée par le Parlement, en août 2015. Ce virage politique des dirigeants de SYRIZA a produit la scission du parti et la démobilisation de la majorité de ses militants.

D’août 2015 à ce jour, de nouvelles mesures d’austérité sont imposées au peuple grec par le gouvernement de SYRIZA-ANEL.

Les retraites ont été davantage abaissées et l’âge de départ relevé. Les salaires minimaux et les allocations chômage gelés. L’imposition des foyers modestes a été intensifiée et le marché du travail dérégulé. Les saisies des résidences principales des foyers surendettés ont démarré malgré une résistance citoyenne large et déterminée.

La nouvelle réforme de la protection sociale a réitéré la baisse des prestations et la hausse des cotisations, par les « lois-guillotines » 4336/2015 et 4387/2016. Mentionnons aussi la privatisation des infrastructures du pays et la vente scandaleuse des banques grecques à un prix dérisoire.

La faible reprise de la croissance et la baisse du chômage, affichées aujourd’hui par le gouvernement comme des réussites, sont à prendre avec des pincettes, car obtenues par la précarisation de 60 % des salarié-e-s et par des artifices de recensement.

La cagnotte percée des organismes grecs d’assurance sociale

La « solvabilité » du système grec d’assurance sociale a toujours été à l’ordre du jour des gouvernements grecs successifs. Depuis 2010, il fait aussi l’objet d’injonctions de la part des « institutions » (UE, BCE, FMI) de la Troïka. Mais, ce qui menace le système des assurances sociales n’est pas la générosité des politiques sociales en Grèce, une fiction de Droite, mais le néolibéralisme et le pillage des réserves des caisses par les gouvernements. Ce pillage, à l’œuvre depuis les années 1950, c’est amplifié à l’époque de la Troïka et des mémorandums.

En allégeant l’imposition et les cotisations du patronat, en réduisant ainsi les recettes sociales, en prélevant sur les réserves des caisses d’assurances (retraites, santé, chômage) pour les allouer aux besoins du gouvernement, notamment au remboursement de la dette publique, les derniers gouvernements grecs néolibéraux, de Droite ou « de Gauche », poussent inexorablement le système d’assurance sociale vers la faillite. Le point culminant du pillage organisé fut le « PSI » (Private Sector Involvment), manœuvre comptable organisée conjointement par le gouvernement grec et la Troïka, en 2012, dans le but de réduire nominalement la dette de l’État grec. Lors de cette opération, les réserves des caisses d’assurance, converties en titres de dette d’État, ont été dévaluées de 50 %, selon la règle appliquée aux titres détenus par les créanciers privés. Avant cela, sous un gouvernement de Droite, l’implication des caisses dans des activités de spéculation financière avait occasionné d’importantes pertes et le soupçon légitime de corruption du monde politique.

Compte tenu de ces antécédents, les projets gouvernementaux pour la constitution d’un Fonds de sécurité des assurances sociales, d’une « tirelire » censée suppléer aux caisses en déficit, suscitent la méfiance et la crainte d’un renforcement du virage austéritaire du gouvernement SYRIZA, d’autant plus que le financement de cette « tirelire » reste sujet flou. Une proposition pour son financement par des recettes issues des privatisations a été sèchement refusée par les créanciers. Ce Fonds, sous l’acronyme AKAGE, mis en place en 2008 par le gouvernement de Droite de Karamanlis, a déjà subi une ponction par la loi 4335/2015 du gouvernement SYRIZA. Ses seules recettes réelles proviendraient de la TVA et elles ne pourraient être supérieures à 3 milliards sur un horizon de plusieurs années, alors que les pertes des caisses résultant du PSI en 2012 sont de 14 à 20 milliards d’euros.

Le projet du gouvernement SYRIZA, repris à ses prédécesseurs, d’indexer l’augmentation des retraites sur la croissance, ne garantit pas la viabilité du système, mais surtout n’apporte aucun soulagement aux retraité-e-s grec-que-s. Leurs revenus ont subi ces dernières années une diminution moyenne de 30 % et il faudrait des décennies pour que cette perte soit compensée par les revalorisations promises.

Les péripéties du système grec d’assurance sociale démontrent que ni le mode de financement ni le mode de gestion des caisses d’assurance ne sont des conditions suffisantes pour garantir la pérennité et le caractère redistributif d’un système de protection sociale.

Il faut que la part de richesses allouées à la protection sociale, notamment celles créées par la cotisation, bénéficie de protections strictes inscrites dans la Constitution. Cette discussion est de grande actualité, notamment en France, où le débat autour du financement de la Sécurité sociale et du PLFSS est au cœur des luttes sociales et politiques.

Budget social au rabais

Le budget social 2018, déposé le 21 octobre 2017 par la majorité SYRIZA au Parlement grec s’inscrit dans le sillage de toutes les précédentes contre-réformes.

Il diminue davantage les retraites et augmente l’âge de départ, réduit à néant l’Allocation de Solidarité aux Retraités (EKAS), diminue les prestations sociales et augmente les cotisations des salarié-e-s et retraité-e-s.

Le financement public alloué aux caisses d’assurance, à l’Organisme national d’Offre de Services de Santé (EOPYY) et aux hôpitaux est encore diminué de 638 millions pour 2018. Les transferts budgétaires de l’État vers les caisses, EOPYY, les hôpitaux et l’Organisme pour l’Emploi (OAED) passent de 17,911 milliards d’euros à 17,273 milliards d’euros (- 3,56 %).

En même temps, le « budget social » affiche un excédent de 1,929 milliards d’euros, contre 1,560 milliards l’année 2017, c’est-à-dire 369 millions supplémentaires à faire payer aux salarié-e-s et retraité-e-s en cotisations et diminutions du remboursement des soins.

Rappelons que déjà dans le budget 2017, la réduction des retraites et autres prestations sociales avait dépassé de 1,076 milliard celle prévue par le mémorandum.

Selon le budget (anti)social 2018, l’Organisme grec pour l’emploi (OAED) devrait afficher des excédents budgétaires de 586 millions. Ceci est choquant compte tenu du fait que seuls 10 % des chômeurs sont indemnisés et que les allocations chômage stagnent depuis 2012, année où elles avaient été bien diminuées.

En revanche, l’austérité du budget social ne touche pas les entreprises qui verront leurs subventions augmentées, 450 millions d’euros contre 350 en 2017, pour inciter à l’embauche selon la vieille recette néolibérale, prouvée inefficace partout, notamment en France.

La Santé des Grecs en danger…

Malgré les déclarations du gouvernement grec d’une amélioration, depuis trois ans, de la situation sanitaire du pays, et malgré l’autorisation légale d’accès aux soins aux personnes non assurées, de sérieux problèmes persistent et risquent de s’aggraver.

De nouvelles coupes du financement de la Santé publique sont inscrites dans le budget de l’État. Le financement d’EOPYY par l’État, déjà réduit en 2017 de 200 millions (- 38 %) par rapport à 2016, sera encore réduit, en 2018, de 214 millions d’euros.

En raison de l’augmentation des cotisations santé imposée aux retraité-e-s, il est prévu qu’EOPYY présente un excédent de 333 millions en 2018. Le financement de cet Organisme par l’État (100 millions seulement) sera utilisé « pour les soins de santé des citoyens non assurés ». Cette dépense indispensable sera donc financée majoritairement par les cotisations des salarié-e-s et retraité-e-s, la subvention de l’État n’étant que subsidiaire. En 2017, les cotisations représentaient 82,3 % du budget d’EOPYY, contre 79,2 % en 2016, une diminution nette de la part de l’État au financement de la Santé. Cette politique, dans la continuité des gouvernements précédents, vise des excédents pour les caisses d’assurance, que l’opposition populaire qualifie d’ensanglantés.

Le budget des hôpitaux publics et du Réseau de Soins primaires (PEDY) diminue encore de 363 millions en 2018. Cette coupe se rajoute à celle de – 22,8 % en 2015, maintenue en 2016, et de 7 millions en 2017.

L’autorisation d’accès aux soins aux personnes non assurées est une avancée importante dans la direction d’une politique humaniste de Santé. Il faudrait cependant rappeler le retard de neuf mois de sa mise en application, contrairement aux mesures du mémorandum mises en place par procédures express. L’accès ne concerne pas l’achat de médicaments en pharmacie ni les personnes sans documents administratifs. Pour que ce droit soit effectif et pérenne, il faudrait qu’EOPYY dispose de crédits en mesure, ce qui n’est pas le cas. Des pénuries se font sentir même dans les hôpitaux universitaires (Attiko, Laïko) lorsqu’il s’agit de traitements pour les pathologies lourdes.

Autre projet phare du gouvernement SYRIZA, la réforme des Soins primaires de santé a bien mal démarré, à cause du caractère non pérenne de son financement et de la précarité des contrats qui sont proposés aux soignants. C’est une précarité qui s’étend d’ailleurs dans toute la fonction publique : près de 20 % dans le système de santé, et de 50 % dans l’éducation. Avec des conséquences évidentes pour la qualité et la continuité des services…

Nous n’avons pas de données officielles sur la répercussion de cette situation pour les trois dernières années : mortalité et morbidité somatique et psychique, taux de suicide, rapport patients/soignants. Mais, selon le Dispensaire Social d’Elliniko, la mortalité des nourrissons serait passée entre 2015 et 2016 de 4 à 4,2/1000.

La situation sanitaire actuelle en Grèce appelle toujours à la solidarité citoyenne, Grecque et internationale, pour alléger les souffrances des plus démunis. Nous sommes loin d’une normalité. Les décès et infirmités des personnes n’ayant pu accéder aux soins dont ils ont eu besoin sont une accusation adressée à ceux qui imposent les politiques néolibérales (l’Union européenne et les instances créancières) et à ceux qui les exécutent (les gouvernements grecs).

vidéo de l’intervention de Manolis Kosadinos http://silogora.org/wp-content/uploads/2018/03/E.Kosadinos.mp4?_=1

 
 
 

 

Maraude dans le Briançonnais : Résistance

Et pourtant c’est bien en France

Samedi 10/03/18, Montgenèvre (dans le briançonnais) aux alentour 21h.

Une maraude ordinaire comme il s’en passe tous les jours depuis le début de l’hiver.

Au pied de l’obélisque, une famille de réfugiés marche dans le froid. La mère est enceinte. Elle est accompagnée de son mari et de ses deux  enfants (2 et 4 ans). Ils viennent tout juste de traverser la frontière, les valises dans une main, les enfants dans l’autre, à travers la tempête.

Nous sommes 2 maraudeurs à les trouver, à les trouver là, désemparés, frigorifiés. La mère est complètement sous le choc, épuisée, elle ne peut plus mettre un pied devant l’autre. Nos thermos de thé chaud et nos couvertures ne suffisent en rien à faire face à la situation de détresse dans laquelle ils se trouvent. En discutant, on apprend que la maman est enceinte de 8 mois et demi. C’est l’alarme, je décide de prendre notre véhicule pour l’ emmener au plus vite à l’hôpital.

Dans la voiture, tout se déclenche. Arrivés au niveau de la Vachette (à 4 km de Briançon), elle se tord dans tous les sens sur le siège avant. Les contractions sont bien là…c’est l’urgence. J’ accélère à tout berzingue. C’est la panique à bord.
Lancé à 90km/h, j’ arrive à l’entrée de Briançon…et là, barrage de douane. Il est 22h. « Bon sang, c’est pas possible, merde les flics ! ». Herse au milieu de la route, ils sont une dizaine à nous arrêter. Commence alors un long contrôle de police. « Qu’est ce que vous faites là ? Qui sont les gens dans la voiture ? Présentez nous vos papiers ? Ou est ce que vous avez trouvé ces migrants? Vous savez qu’ils sont en situation irrégulière !? Vous êtes en infraction !!! »…

Un truc devenu habituel dans le briançonnais.  Je le presse de me laisser l’emmener à l’hôpital dans l’urgence la plus totale. Refus ! Une douanière me lance tout d’abord « comment vous savez qu’elle est enceinte de 8 mois et demi ?» puis elle me stipule que je n’ai jamais accouché, et que par conséquence je suis incapable de juger l’urgence ou non de la situation. Cela m’exaspère, je lui rétorque que je suis pisteur secouriste et que je suis à même d’évaluer une situation d’urgence. Rien à faire, la voiture ne redécollera pas. Ils finissent par appeler les pompiers. Ces derniers mettent plus d’une heure à arriver. On est à 500 mètres de l’hôpital. La maman continue de se tordre sur le siège passager, les enfants pleurent  sur la banquette arrière. J’en peux plus. Un situation absurde de plus.

Il est 23h passés, les pompiers sont là…ils emmènent après plus d’une heure de supplice la maman à l’hosto. Les enfants, le père et moi-même sommes conduits au poste de police de Briançon à quelques centaines de mètres de là. Fouille du véhicule, de mes affaires personnelles, contrôle de mon identité, questions diverses et variés, on me remet une convocation pour mercredi prochain à la PAF de Montgenèvre.

C’est à ce moment-là qu’on m’explique que les douaniers étaient-là pour arrêter des passeurs.
Le père et les deux petits sont quant à eux expulsés vers l’Italie. Pendant ce temps-là , le premier bébé des maraudes vient de naître à Briançon. C’est un petit garçon, naît par césarienne. Séparé de son père et de ses frères, l’hôpital somme la PAF de les faire revenir pour être au côté de la maman. Les flics finissent par obtempérer. Dans la nuit, la famille est à nouveau réunit. La capacité des douaniers à évaluer une situation de détresse nous laisse perplexe et confirme l’incapacité de l’État à comprendre le drame qui se trame à nos maudites frontières. Quand à nous, cela nous renforce dans la légitimité et la nécessité de continuer à marauder…toutes les nuits.
Signé : Un maraudeur en infraction.

Résister La rubrique de Panagiotis Grigoriou

Panagiotis  Grigoriou est Ethnologue et historien, chroniqueur, analyste, initiateur d’un concept de tourisme alternatif  et solidaire en Grèce. Le regard de l’historien et de l’anthropologue sur l’actualité et le vécu de la crise grecque.

Résister

Au pays grec le soleil revient. Printemps. Fánis, depuis son café dans le Péloponnèse, il commente à sa manière la dernière décision de la Justice, annoncée très tard dans la nuit du 10 au 11 mars… au sujet d’un match de football entre l’Olympique du Pirée et le PAOK de Thessalonique, match qui ne s’était jamais achevé pour cause d’affrontements entre supporteurs. “Ils ont donné raison à PAOK car c’est l’équipe de Savvídis, l’homme fort des Russes. La Grèce est fichue, c’est le foutoir, quel gouvernement ? On en rigole même jusqu’en Afrique…”.

Dimanche de la Croix au Café. Péloponnèse, 11 mars 2018

Fánis s’est également rappelé de la fête du jour, et il a aussitôt allumé le poste de télévision de son bistrot pour le brancher sur la messe diffusée en direct depuis la deuxième chaîne publique de l’ERT. Car cette si belle journée du 11 mars, marque également le troisième dimanche du Carême, consacré comme on sait à la Croix. Et il est de tradition que de vénérer la Croix au milieu du Carême, tandis qu’en Occident chrétien, cette même messe intervient au 4ème dimanche au lieu du 3ème en Orient.

“Nécrosés par nos passions, nous avons besoin de ce soutien essentiel de la Sainte Croix pour aller jusqu’au bout du Carême, et autant parfaire notre purification. Et ce n’est pas dans la douleur mais dans la joie et dans la victoire que nous célébrons alors notre Sainte Croix qui vient ainsi nous soutenir en ce moment précis”, entend-on depuis le poste de la télévision.

Marché aux puces. Athènes, mars 2018

En Orient, cette tradition trouve son origine historique très loin, qui, comme tous les offices particuliers du Carême, n’a pas forcément de rapport avec le Carême: on commémorait, d’après une version des faits, le transfert au 6ème siècle, à Constantinople depuis Apamée en Syrie d’une importante relique issue de la Sainte Croix. Apamée, actuellement Qal`at al-Madhīq, est un site archéologique situé près de l’Oronte, à 55 km au nord-ouest de Hama.

Fánis et ses clients ignorent peut-être l’origine théologique et historique des faits ainsi que le sort d’Apamée l’Antique, sauf que la culture grecque et Orthodoxe y est toujours présente dans les esprits… en plus, diffusée comme elle est en direct sur la deuxième chaîne publique de l’ERT, entre deux coupes de café et un match de foot où il y a forcément à redire. Pays réel !

Printemps grec. Athènes, mars 2018
Printemps grec. Touristes à Athènes, mars 2018
On scrute les nouvelles. Athènes, mars 2018

Fánis enfin, ne doit plus tellement se rappeler du grand Philosophe stoïcien grec, Posidonios d’Apamée au 1er siècle av. J.-C., resté fidèle au principe fondamental du stoïcisme: seule la vertu est un bien. Célèbre philosophe dont la grandeur réside autant dans son savoir encyclopédique et dans les vastes enquêtes ethnologiques, géographiques et historiques qu’il a entreprises: études sur l’océan, sur les météores, sur la grandeur du Soleil ; rédaction de l’Histoire de Pompée, continuation de l’Histoire de Polybe. Vieilles histoires peut-être.

En notre temps, au pays des… Crisanthropes le soleil revient et le Printemps avec. Les touristes visitent l’Agora grecque et romaine, tandis que les Grecs scrutent les journaux. Car les événements comme on sait se succèdent. D’abord, quelques heures seulement après la décision de Justice au sujet de l’équipe de PAOK, la nouvelle est tombée, celle de l’interruption du match du soir lorsque le même Ivan Savvídis, Président de l’équipe de PAOK de Thessalonique a pénétré… très visiblement armée sur la pelouse du stade… pour protester devant une décision de l’arbitre. Le match a été aussitôt suspendu jusqu’à nouvel ordre, et le lendemain, c’est tout le championnat grec qui est interrompu, suite à une décision gouvernementale qui fait ainsi la ‘Une’ de toute la presse.

Ce dernier épisode… athlétique grec est alors déjà commenté jusque dans les colonnes de la presse internationale: “Le choc du championnat grec entre le PAOK Salonique et l’AEK Athènes s’est conclu dans le chaos dimanche 11 mars, les joueurs de l’AEK refusant de terminer la rencontre après l’envahissement du terrain par des dirigeants du PAOK, dont le président qui portait à la ceinture ce qui ressemble à un pistolet, selon des photos de l’Agence France-Presse”, peut-on lire par exemple sur le site du quotidien “Le Monde”.

L’affaire Savvídis. Medias internationaux, le 12 mars 2018
Savvídis et son… pistolet. Quotidien “Le Monde”, le 12 mars 2018

Depuis ces faits avérés, Ivan Savvídis est recherché, et il restera introuvable, le temps que le la procédure de flagrant délit ne s’appliquera plus. Les Grecs scrutent donc leurs les journaux et cette dernière affaire du ballon supposé rond, aura pourtant et très largement effacé de l’actualité cette autre nouvelle du rassemblement de la veille, lequel avait été organisé à Orestiada, ville située près de la frontière avec la Turquie, rassemblement en soutien aux deux militaires grecs incarcérés en Turquie.

Car il serait désormais évident, que les deux militaires grecs incarcérés en Turquie depuis déjà près de deux semaines, ils auraient été en toute évidence capturés par l’armée turque, et plus précisément par la gendarmerie, considérée comme un corps de Prétoriens du régime d’Erdogan, sans peut-être avoir pénétré en territoire turc. Les reportages dans la presse grecque de ce dernier temps deviennent de plus en plus précis, et c’est dans le cadre de l’enquête en cours qu’une équipe de militaires des États-Unis se sont rendus sur place sur la frontière, reportage de la presse grecque à l’instar du journal “Ethnos” du 11 mars. En tout cas, une telle mise en scène relève, comme autant elle révèle de la planification géopolitique côté turc, c’est évident.

Rassemblement à Orestiada le 11 mars, presse grecque

En somme, nous nous trouvons déjà dans une forme et de culture de guerre, et cette dernière affaire rappelle d’ailleurs d’autres précédents historiques, lorsque par exemple l’Allemagne d’Hitler fabriquait des “incidents” sur ses frontières avant de prétexter la “nécessité absolue et justifiée” de son agressivité qui en découlait. On dirait même, que cette capture des militaires grecs participe à la guerre asymétrique et psychologique que la Turquie d’Erdogan mène, il faut dire, de manière bien habile contre la Grèce… “cinquième colonne comprise”, aux dires de Fánis et des clients de son bistrot qui commentent décidément tout !

Cinquième colonne ou pas, ces derniers jours, nous avons vu apparaître dans Athènes certains tracts au message… clair: “Mort à la Grèce, pour que nous, nous puissions vivre, au Diable la famille et au Diable la Patrie”. Et dans un… nouvel ordre d’idées, en somme proches, on y découvre sur ce mêmes murs d’Athènes, cet autre message inévitablement méta-moderne… à propos de l’usage de notre “corps notre choix”.

Il y a même lieu de remarquer que le message en question se combine en six langues, sauf qu’il fait totalement et visiblement volontairement l’impasse sur la… langue du pays. Pourtant à Athènes on parle… encore le grec ! C’est bien connu, la mondialisation c’est l’amour des autres patries, tout comme l’adulation de toute altérité réelle ou supposée telle, et en même temps, la haine, ou sinon le rejet de l’identité.

Dans un tel monde… on disposerait peut-être de notre corps… ainsi notre seul et ultime choix, mais certainement pas de notre pays, ni de notre régime politique, et encore moins des droits et des devoirs. Et tous ces “libres corps” du lendemain des humains, découvriront peut-être un jour, qu’ils ne seront même plus jugés indispensables pour demeurer vivants, ni pour produire et encore moins pour consommer, le tout, et j’espère me tromper, face à un métanthropisme galopant comme autant face à son “humanité” augmentée… réservée aux “élus”.

“Mort à la Grèce…” Athènes, mars 2018
Le choix… du corps. Athènes, mars 2018
Le… choix du corps. Paris, février 2018
Le même choix du corps… déchiré. Paris février 2018

Incidemment, toute cette dichotomie et comme par hasard, elle laisse la porte ouverte aux tenants du discours diamétralement opposé, lequel incite à n’accepter en l’adulant que tout ce qui relève de sa propre identité, haïssant toutes les autres. Le système tient et tiendra ainsi bon lorsqu’il suggère qu’entre le nihilisme apatride et celui des néonazis, aucune autre position n’est alors possible. Pauvres peuples, et ainsi futur unique des… fortunés.

Les frontières ne seraient donc plus, ni pour les marchandises, ni pour les flux financiers, ni entre les êtres, les cultures, les sexes, voire même entre les espèces. Une affiche publicitaire, pédophile et zoophile à la fois, ainsi aperçue car d’abord autorisée à figurer dans les couloirs du métro parisien, a tout de même heurté le bon sens, et autant cette… mesure qui pour certains philosophes, anciens comme contemporains, c’est la meilleure des choses.

L’hybris et la démesure visiblement dominent de Paris à Athènes, sauf que le sentiment identitaire par exemple celui des Grecs est toujours tangible, représentant en réalité plus du 80% de la population à travers les mentalités, en dépit des cercles des marionnettes qui gouvernent comme de leur magma athénocentrique en somme concis. Pauvres philosophes, entre autres d’Apamée. Car aussi par les temps qui courent, et à vol d’oiseau, rappelons qu’entre Apamée et Athènes il y a moins de 1.200 km, tandis qu’entre Athènes et Paris il y a le double de distance.

Héraclite. Athènes, mars 2018
Bientôt nouveau bistrot. Athènes, mars 2018
Immeuble à vendre. Athènes, mars 2018

Sous le soleil alors, c’est à Athènes que l’œuvre d’Héraclite est en ce moment revisitée à travers un spectacle du même nom. Au même moment, la déferlante des plateformes dites communautaires payantes de location et de réservation de logements, conjuguée à huit années de Troïkanisme réellement existant, bouleversent de manière violente la situation de l’immobilier sur place. Car jamais autant de biens immobiliers n’avaient ainsi changé de mains à Athènes… depuis la précédente Occupation allemande, celle des années 1940.

Des… investisseurs petits, moyens et grands, surtout étrangers, achètent dans Athènes parfois par lots de cent appartements, et en même temps, la Troïka élargie a insisté pour que les saisies des biens des Grecs puissent se concrétiser de manière électronique et automatique. Dans le même ordre d’idées, le “gouvernement” des Tsiprosaures annonce ainsi plus d’un million de saisies de biens immobiliers et autres, rien que pour 2018.

Il faut dire qu’a propos des dernières liquidations et ventes aux enchères après saisie de biens immobiliers, encore effectuées de manière “physique”, c’est-à-dire en salle d’audience, le Syndicat des Officiers de la Police vient de lancer une attaque inhabituelle car très violente, vis-à-vis du gouvernement. Son communiqué avait été motivé par le fait que de nombreux policiers avaient été blessés lors des ventes aux enchères de ce type, surtout à Athènes devenant ainsi la cible visible et facile pour les citoyens concernés et paupérisés.

Les policiers y concluent même de la manière suivante: “Puisqu’ils ne nous respectent pas, le temps est arrivé où il va falloir nous craindre. Car au fait, ce sont bien les politiques mémorandaires qui se dissimulent derrière nos propres boucliers, et voilà que nous ne voulons plus défendre de tels procédures, lesquelles conduisent à la spoliation des biens des citoyens (…) Nous avertissons les politiques que ce mouvement au sein de la Police, au demeurant massif, annulera de fait cette attitude qui consiste à faire peser les effets de la responsabilité de telles politiques sur nos seules épaules, et enfin une fois de plus, nous rappelons que nous sommes non seulement considérés tels, mais nous faisons partie intégrante de la société réelle”, le reportage est du quotidien “Kathimeriní” du 12 mars 2018.

Au sujet de la Troïka. Athènes, mars 2018
Défaitisme imposé. Athènes, mars 2018

En attendant les prochaines ventes ou saisies dans l’immobilier athénien, la bistroïsation du centre-ville se poursuit, car comme prévu… il y a à boire et à manger mais certainement pas pour tout le monde.

De la défaite de la société et des droits notamment des travailleurs, à celle du pays il n’y aurait qu’un pas, ainsi, devant un certain défaitisme savamment imposé par les médias, Fánis se dit par exemple prêt à fermer définitivement son établissement, lequel ne se trouve d’ailleurs pas dans le grand Athènes. “Mon bistrot tourne plutôt bien, sauf que plus du 75% de mon chiffre d’affaires part en impôts et en cotisations. Je n’ai plus envie de continuer ainsi, en encore moins d’engraisser la clique des politiciens et de leur clientèle, à qui les miettes sont comme on sait distribuées… Carême ou pas d’ailleurs”.

Fánis retrouve désormais alors souvent son ancien métier, dans la mécanique à bord de navires de la marine marchande. Ses deux fils y travaillent d’ailleurs, ils sont respectivement capitaine et second, et comme les liens professionnels sont évidents, Fánis préfère travailler par intermittence et surtout d’être rémunéré comme il dit bien et “de manière nette”, plutôt que “de servir la caste des profiteurs”. Ceux, habitants du pays réel recherchent et parfois finissent par trouver, ces solutions de survie comme autant de rejet, sauf que ce n’est guère possible pour tout le monde.

Dans les vieux cafés. Athènes, mars 2018
Dans les épiceries. Athènes, mars 2018
Animal adespote mais nourri. Athènes, mars 2018

Dans les authentiques vieux cafés, on scrute ainsi parfois le néant, tout comme on peut refaire ce monde défait, entre patrons et employés aux épiceries athéniennes alors plus fines que jamais. Jamais un effondrement possible, exogène comme endogène n’a été autant évoqué qu’en ce moment, et elle est bien loin cette situation de l’été 2015 où certains mensonges de Tsipras pouvaient encore être prononcés publiquement.

Les clients au bistrot de Fánis, se disent aussi que craignant le pire, ou peut-être parce que déjà bien informé par l’Ambassade des États-Unis, Koulis Mitsotakis, chef à la si vieillarde Nouvelle Démocratie, se tient très visiblement à l’écart de l’actualité, on dirait qu’il ne presse guère trop pour arriver aux “affaires” en ce moment.

De la sardine. Athènes, mars 2018
Boisson chaude à base d’orchidée. Athènes, mars 2018
Animal adespote. Athènes, mars 2018

Entre Orient et Occident, on vend parfois à Athènes de ce breuvage chaud à base d’orchidée, le Salep, comme d’ailleurs on le vend autant en Turquie, et ailleurs en Orient finalement proche. Les Athéniens iront autant acheter leurs sardines abordables, comme ils vont nourrir si possible “leurs” animaux adespotes, sans maître, car peut-être au pays grec, le soleil revient toujours paraît-il.

Dans le même ordre d’idées et de pratiques, résister, c’est autant chanter et danser, et les Grecs, à l’instar de bien d’autres peuples, ils ont de la sorte pratiqué durant ces autres années de guerre entre 1940 et 1949, guerre civile comprise, et ils ne sont pas prêts à y renoncer en ce moment pour cause de Troïka, de mondialisation ou encore parce que la géopolitique environnante redevient-elle alors menaçante.

Pendant qu’à Thessalonique le match s’interrompait, dans une autre taverne que le bistrot de Fánis, ceux du Péloponnèse et d’Athènes réunis faisaient la fête, troisième dimanche du Carême d’ailleurs ou pas.

Il est également à noter que les jeunes par exemple n’ont pas perdu le sens de la tradition musicale du pays. Tout n’est donc pas perdu car les Grecs chantent, dansent et en rient même de la mort comme du destin, si l’on croit par exemple les paroles du chant traditionnel et populaire.

Musique traditionnelle et populaire. Péloponnèse, mars 2018
Mets de Carême. Péloponnèse, mars 2018
Péloponnèse, mars 2018

Le Carême sera certes long, et la Résurrection peut-être éphémère. Fánis, depuis son café du Péloponnèse, ou même depuis les entrailles d’un pétrolier amarré dans un port du Japon, interprètera encore et toujours à sa manière les nouvelles du pays.

Printemps grec dans toute sa plénitude, car Manólis, entrepreneur qui résiste à la fermeture de son entreprise était même monté sur une table de la taverne pour danser. Victime d’un accident vasculaire cérébral durant l’été 2017, il est “revenu du silence et de Charon”, comme il le dit lui-même.

Animal adespote. Athènes, mars 2018
En pilaf et en 2018
Pilaf… social. Athènes, mars 2018

Fánis, Manólis et leurs clients respectifs, ignorent peut-être encore, l’origine théologique et historique des faits liés au transfert à Constantinople au 6ème siècle ainsi que le sort d’Apamée l’Antique, mais ils n’ignorent plus tellement, cette plasticité… holistique de l’Hybris actuelle.

Ainsi en Grèce, la musique traditionnelle et populaire n’est pas morte, la danse non plus. Après tout, seule la vertu est un bien.

Au pays réel grec le soleil revient. Printemps. Chez Greek Crisis, Hermès, dit le Trismégiste, grandit et il danse aussi à sa manière. Continuation peut-être de l’Histoire de Polybe et autres vieilles légendes.

Hermès de Greek Crisis. Athènes, mars 2018

* Photo de couverture: Résister. Péloponnèse, mars 2018

mais aussi pour un voyage éthique, pour voir la Grèce autrement “De l’image à l’imaginaire: La Grèce, au-delà… des idées reçues !”   http://greece-terra-incognita.com/

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