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Entretien avec Makis Anagnostou (Vio.Me)

« Lorsque nous avons décidé de remettre l’usine en marche à notre propre compte, une écrasante majorité des travailleur-Es y a été favorable »

NPA 8 avril 2018

Entretien. Nous avons rencontré Makis Anagnostou (membre du collectif des travailleurs de Vio.Me) et Marco Gastine (producteur du film Prochain Arrêt : Utopia) pour discuter avec eux de l’expérience de Vio.Me, une usine qui était menacée de fermeture par la crise grecque et que les travailleurEs, regroupés en collectif, on reprise en main.

Pouvez-vous brièvement raconter l’histoire de votre entreprise (grève, occupation, réouverture d’usine, etc.) ?

Les problèmes de Vio.Me, la petite entreprise de fabrication de colle pour carrelages située à Thessalonique, dans laquelle nous travaillons, ont commencé avec le début de la crise grecque en 2009 et l’effondrement du secteur du bâtiment. La direction de l’entreprise, volant au secours de la maison-mère, la fabrique multinationale de carreaux de céramique Philkeram-Johnson, en difficulté, a alors transféré une grosse partie de son capital à celle-ci. Elle en a fait payer le contrecoup à nous, ses ouvrierEs : suppression des primes, mise en disponibilité, licenciements et retard dans le paiement des salaires… En même temps, le bruit courait que l’usine allait fermer et que la direction amassait autant d’argent qu’elle le pouvait dans cette perspective. Nous en avons eu la preuve : elle ne payait plus ses fournisseurs de services (électricité, gaz, eau).

Dans l’usine il y avait une organisation syndicale, le syndicat des ouvriers de Vio.Me, qui avait une philosophie différente de celle des syndicats traditionnels : faire participer à l’action et aux prises de décision, non seulement ses membres, mais aussi touTEs les travailleurEs de l’usine. Cette philosophie a été mise en pratique lorsque la direction de l’entreprise a proposé au syndicat de négocier. Les patrons ont alors fait diverses propositions à la délégation du syndicat. Mais, au lieu de répondre immédiatement au nom de leurs adhérentEs comme le font d’habitude les directions syndicales, la délégation est retournée devant les travailleurEs de l’usine et leur a demandé de cesser le travail pour débattre des propositions de la direction. Ainsi tous les travailleurEs ont assumé la décision qui a été prise d’occuper l’usine. Ce mode de fonctionnement a permis à tout le monde de partager la responsabilité des décisions et de s’impliquer dans l’action. Ainsi, lorsque nous avons décidé en 2013, après un an d’occupation, de remettre l’usine en marche à notre propre compte, une écrasante majorité des travailleurEs y a été favorable.

Comment s’est déroulée la remise en marche ?

Auparavant, au vu des énormes retards de paiement des salaires, nous avions fait usage du droit de rétention (suspension du travail, accompagnée d’une indemnité financée par les revenus de l’entreprise), octroyé par la législation grecque aux travailleurEs en cas de non-paiement prolongé des salaires. Ceci nous a permis d’avoir une petite rémunération, de rester dans l’usine et de contrôler les ventes afin que la direction ne puisse profiter de celles-ci à nos dépens. Puis, voyant que la prime de rétention touchait à sa fin et qu’en conséquence nous n’aurions plus aucune source de revenus, nous avons fait appel à la solidarité à Thessalonique et alentour, pour assurer notre subsistance. Cela nous a permis, non seulement de recueillir suffisamment de nourriture pour tenir un bon bout de temps, mais également de rencontrer beaucoup de monde sur lequel nous nous sommes par la suite appuyé pour continuer notre lutte. De concert avec nos nouveaux amis, de membres de collectifs locaux et de militantEs politiques et syndicaux, nous avons créé un large comité de soutien à la lutte Vio.Me. Nous avons par la suite étendu le réseau de solidarité à l’ensemble de la Grèce et aussi en Europe.

Ceci nous a donné le courage de passer à la remise en marche de l’usine. Peu après la remise en état de l’outil de production, nous avons compris que les colles pour carrelages que l’entreprise produisait auparavant ne pourraient plus s’écouler sur le marché, vu l’effondrement du secteur du bâtiment. Nous avons alors décidé, sur les conseils du comité de solidarité, de nous lancer dans la production de nouveaux produits, des savons liquides et autres produits d’entretien naturels, puis des savons de Marseille. Ceux-ci répondaient aux besoins d’une grande partie de la population qui, en raison de la crise, avait beaucoup de difficultés à se les procurer à un prix raisonnable dans les supermarchés.

La production a réellement commencé en février 2013. En 2016, nous nous sommes lancés dans la production d’une version écologique de ces produits, avec l’aide d’un ingénieur chimiste solidaire. C’est ainsi que nous avons réussi à maintenir l’usine en activité. La production nous permet aujourd’hui de toucher un salaire, égal pour tous. Son montant est encore très modeste, mais nous sommes persuadés qu’une fois l’entreprise pleinement légalisée, les entraves à la production seront levées. Nous pourrons alors toucher un salaire plus décent que celui auquel le capital européen et mondial nous condamne actuellement. Dans le même temps, nous essayons de créer (avec d’autres travailleurEs et des étudiantEs) les conditions d’une autre économie, d’une « économie des travailleurEs ». Nous venons par exemple d’ouvrir un « dispensaire ouvrier » autogéré s’adressant à toute la population alentour.

Existe-t-il d’autres exemples d’usines occupées et/ou autogérées en Grèce ?

D’autres usines ont été occupées et les ouvrierEs ont essayé d’entrer dans un processus similaire au nôtre, comme la SEKAP (Coopérative hellénique des tabacs) ou les ciments Halkis. Mais l’État et la bureaucratie syndicale qui contrôlent encore largement la classe ouvrière grecque ont réussi à mettre des embûches et à faire échouer de telles expériences. En revanche, il existe en Grèce de nombreuses expériences de collectifs ou de coopératives autogérées fonctionnant sur les mêmes principes que les nôtres : égalité totale, solidarité et démocratie directe.

Quels sont les exemples de solidarité en Grèce et dans le monde ?

Nous avons des contacts avec divers mouvements en Grèce et à l’étranger. Notre lutte est coordonnée avec celle des habitantEs de Chalcidique qui se sont insurgés contre l’exploitation minière aurifère dans leur région, avec celle de sections syndicales qui croient encore en la classe ouvrière et de militantEs dévoués à la défense d’une société durement touchée par la crise. Nous avons des contacts avec des militantEs en Allemagne, des usines en Italie, des mouvements sociaux en Espagne, et les travailleurEs des usines récupérées d’Argentine, du Chili et d’Uruguay.

Quelles ont été les réactions des partis politiques et du gouvernement en Grèce ?

Nous nous sommes d’abord adressés au Parti communiste grec (KKE) où nous nous sommes vu répondre que le parti était en complet désaccord avec la philosophie de notre lutte, mais qu’il lui apporterait tout de même son soutien en tant que conflit du travail. Mais ils n’ont eu de cesse depuis lors de nous combattre en pratique et en théorie. Syriza a formellement décidé de nous soutenir lors de son congrès, mais en pratique son gouvernement en a fait le moins possible et n’a jamais appliqué ses promesses électorales de légaliser notre entreprise. Nous sommes par contre soutenus par une grande partie de la gauche extraparlementaire et de la mouvance anarchiste. Nous avons discuté avec tous les gouvernements qui se sont succédé ces six dernières années, aucun ne s’est déclaré opposé à nous, mais aucun n’a fait quoi que ce soit pour nous.

Avec qui êtes-vous en contact en France et comment peut-on vous aider ?

Nous sommes en contact étroit, dans votre pays, avec l’usine Fralib, ainsi qu’avec le mouvement contre l’aéroport de Notre-dame-des-Landes. Nous pensons que, dans un premier temps, il faut exiger du gouvernement grec qu’il résolve le problème du terrain sur lequel est implanté l’usine Vio.Me et qui est menacé d’être vendu aux enchères à des investisseurs privés. On peut également faire voter des motions de soutien par les syndicats et, enfin, faire connaître la lutte de Vio.Me dans les diverses organisations de travailleurEs pour réaliser des commandes collectives de nos produits (savons de Marseille ou produits d’entretien écologiques) afin de nous soutenir financièrement. Nous pensons que si vous pouviez faire cela, vous aideriez grandement notre lutte, et que vous contribueriez ainsi à rapprocher toutes celles et tous ceux qui luttent pour leurs droits. Dans le but de construire une nouvelle société, une société dans laquelle les humains compteront plus que les profits.

Propos recueillis par Alain Krivine

Le film vient de sortir en salle en France et est disponible pour des réunions/ventes de solidarité : www.filmsdesdeuxrives.com/

Source https://www.anti-k.org/2018/04/09/lorsque-nous-avons-decide-de-remettre-lusine-en-marche-a-notre-propre-compte-une-ecrasante-majorite-des-travailleures-y-a-ete-favorable/


Le collectif de Grenoble a déjà projeté le film en 2017 mais comme chaque année depuis la venue de Makis à Grenoble, une commande groupée des produits Vio.Me sera organisée à l’automne et une soirée consacrée à l’autogestion .

Grèce 2018 : La bataille de la dette privée et des habitations principales

GRÈCE 2018 : LA BATAILLE DE LA DETTE PRIVÉE ET DES HABITATIONS PRINCIPALES

10 avr. 2018 Par Emmanuel Kosadinos

L’accès au droit de se loger est un axe central de la lutte des mouvements citoyens, surtout en période de crise économique et sociale où ce droit est menacé par l’austérité et la dette. En Grèce, la bataille pour les habitations principales est aujourd’hui au centre de la lutte sociale et politique. Elle pourrait devenir un point de convergence des forces qui combattent l’austérité.

Repères d’histoire économique et sociale  

L’accès au droit au logement est un axe central de lutte des mouvements citoyens, surtout en période de crise économique et sociale où ce droit est menacé. Pour accéder à ce droit, des ménages appartenant aux classes populaires ont fait le choix de l’acquisition d’un bien contre crédit bancaire. Ceci est davantage fréquent dans des pays où les locataires sont moins protégés, où le coût de la construction est relativement faible, où les liens familiaux sont sacralisés, où le taux élevé d’inflation garantissait une part décroissante des remboursements par rapport aux revenus du foyer. La plupart de ces facteurs, voire tous, sont présents, ou le furent, dans les pays de l’Europe du Sud, dont la Grèce, pays où la bataille pour les résidences principales est aujourd’hui au centre de la lutte sociale et politique.

Image d’Épinal des "trente glorieuses" grecques...Image d’Épinal des « trente glorieuses » grecques…

Du côté des banques: l’octroi facile de crédits, prenant souvent l’allure d’un véritable « pousse à l’endettement », fut une opération juteuse ouvrant sur un marché quasi illimité d’investissements et sur l’anticipation de profits conséquents. Pour l’économie ce fut un moteur de croissance rapide, mais au détriment d’un développement harmonieux et durable, accordant au bâtiment une part disproportionnée de l’activité industrielle. Cette distorsion structurelle de l’économie grecque, présente dès le début des années 1970, avant même la chute de la dictature des colonels, a été fustigée par la Gauche, y compris social-démocrate (PASOK), comme la marque même de l’absence de planification d’un capitalisme grec improductif. Chose étrange (ou pas tant que ça) ni l’accès du PASOK au gouvernement, ni l’intégration par la Grèce de l’Union Européenne n’ont inversé cette tendance mais l’ont au contraire amplifiée. D’ailleurs, de telles tendances ont bien marqué le développement économique des autres pays du Sud de l’UE.

Pour les dirigeants grecs, dictateurs ou élus, de Droite ou de Gauche, le surinvestissement dans l’activité du bâtiment a été la voie facile pour le développement du pays et l’augmentation des revenus, sans passer par les difficultés de la planification et de l’intervention active de l’État. Pendant une première période (1970 – 1990) l’activité de construction a pris la forme « artisanale » d’un « capitalisme populaire » d’un genre particulier, favorisant l’épanouissement des classes moyennes et la hausse des revenus de la classe ouvrière du bâtiment, l’instauration d’une relative paix sociale.

Pendant une deuxième période (1990 – 2010) l’activité du bâtiment a davantage profité à des capitaux de plus en plus importants, voire orientés vers l’exportation, en synergie croissante avec le capital international. La classe ouvrière du bâtiment a été recomposée, la main d’œuvre d’origine étrangère constituant une part grandissante, travaillant sans couverture sociale et dans des conditions de sécurité déplorables. Le point d’orgue funeste de cette phase c’est le bilan de 37 morts d’accidents du travail lors de l’achèvement des travaux pour les Jeux Olympiques de 2004.

Dans les années 1990 les entreprises grecques du BTP se placent sur l'internationalDans les années 1990 les entreprises grecques du BTP se placent sur l’international

En parallèle, les bas taux de crédit garantis par l’adhésion de la Grèce à la zone euro ont propulsé l’endettement privé (toutefois inférieur à celui en Espagne ou en Italie) et ont davantage permis à une partie des classes populaires d’accéder à la propriété de leurs logements et accessoirement à d’autres biens de consommation. De nouveaux quartiers habitables ont émergé à la périphérie des villes grecques pour loger les nouvelles classes populaires, essentiellement salariées du secteur tertiaire. Le résultat positif c’est que, vers la fin de cette période, 80% des ménages habitaient dans des logements dont ils étaient propriétaires avec des superficies moyennes supérieures à celles en Europe du Nord. Cependant, même avant le déclenchement de la crise économique, la situation de plusieurs de ces ménages était particulièrement tendue car la part des remboursements exigés par les banques grecques « généreuses » laissait peu de marges pour finir les mois et les travaux de construction. Nombre de ménages ont du se satisfaire d’habitations inachevées pour y loger leur vie de famille. À noter que cette situation correspondait à une période où le chômage était encore autour des 10% et la croissance flirtait avec les 4%.

Or, si le capitalisme grec s’est pendant un temps senti droit dans des bottes en béton armé, il s’est avéré qu’il n’avait que des jambes en argile et une laisse au cou, celle de sa dépendance aux capitaux de l’Union Européenne et à ses banques. Pas la peine ici de refaire l’histoire de la crise grecque et de la mise du pays sous protectorat de la Commission européenne et du FMI. Tout cela a déjà été suffisamment médiatisé. Juste rappeler le taux de chômage autour de 25% de ces dernières années et un taux de décroissance de 10% par an en moyenne. Pendant ce temps les banques grecques ont bénéficié de la part des gouvernements grecs successifs et sous les auspices des « instances européennes », notamment par le biais de recapitalisations, de subventions cumulées d’une hauteur d’environ 240 milliards d’euros, 1,2 fois le PIB annuel, pour être finalement bradées par le gouvernement SYRIZA-ANEL, actuellement au pouvoir, contre une bouchée de pain à des investisseurs étrangers obscurs.

Il est facile d’imaginer dans un tel contexte la détresse et la colère des classes populaires et moyennes grecques, dont les revenus ont baissé les dernières années de 30% , et les menaces qui pèsent sur leur survie, notamment sur leur droit de se loger , car ni les remboursements, ni les taux d’intérêt, ni les prix des biens de consommation, ni l’imposition n’ont baissé de manière significative. Cette situation rend impossible pour une grande partie des ménages le remboursement des crédits empruntés.

Une société surendettée et saisie

Le surendettement des ménages grecs, notamment ceux à revenus modestes, est un fléau social sans précédent. Et la question globale de la dette privée grecque est une bombe économique et sociale dont nous sommes spectateurs de la projection au ralenti du film de son explosion.

Mises aux enchères...Mises aux enchères…

Aujourd’hui il est estimé qu’autour de 1,5 millions de contribuables grecs sont dans l’incapacité de régler leurs dettes, soit plus de 24% de l’ensemble. Il s’agit de dettes envers les banques pour prêts immobiliers et de consommation, mais aussi envers le guichet public, impôts et caisses d’assurances, et de particuliers à particuliers.

L’examen des données officielles sur la dette privée grecque nous révèle qu’environ 4,4 millions de contribuables (près de 70% de l’ensemble) ne sont pas à jour de leurs dettes.

Parmi eux, quasiment tous ont des dettes envers le guichet public (impôts et cotisations) alors que 2,7 millions (35% des contribuables) ne sont pas à jour pour des dettes envers les banques.

  • 420.000 ont des dettes en suspension de paiement pour des prêts immobiliers (7%)
  • 350.000 (6%) ont des dettes pour des prêts professionnels
  • 1,7 millions (27%) pour des prêts à la consommation.

L’ensemble de ces dettes appelées « dettes rouges » contractées par des particuliers, des professionnels et des entreprises (petites, moyennes, grandes) correspond à la somme de 200 milliards d’euros, supérieure au PIB annuel.

Il est important de noter que la grande majorité  (80%)  des prêts immobiliers «rouges » concerne des sommes de 10.000 à 100.000 euros, alors que près de 90% des dettes envers le guichet public concerne des sommes inférieures à 20.000 euros, parfois même des sommes dérisoires.

En termes de répartition du volume de la dette privée l’image s’inverse. En fait, 0,2% des débiteurs du guichet public pas à jour de leurs dettes doivent près de 80% de l’ardoise totale, soit 73 milliards ! En ce qui concerne les dettes envers les banques (environ 110 milliards) l’ascension de la courbe est moins brusque, mais la tendance est la même, les dettes des grandes et moyennes entreprises constituant près de 40% de cette dette !

Logo du plus gros débiteur de l'Etat grec, ancienne société de courtage en failliteLogo du plus gros débiteur de l’Etat grec, ancienne société de courtage en faillite

À l’inspection de ces données on observe que la dette privée grecque, au-delà du fait qu’elle est le résultat de la récession de l’économie, n’est pas une situation homogène, à l’égard de causes plus spécifiques, de ses conséquences sociales et économiques et des actions nécessaires pour la traiter.

On peut séparer deux groupes de débiteurs : des débiteurs trop démunis pour régler leurs dettes et des débiteurs puissants sur les plans social et économique capables de se dégager des conséquences du surendettement par la faillite, les arrangements politiques, la délocalisation et la fuite des capitaux.

Sur la liste des plus gros débiteurs de l’État figure en première place (10% de la dette totale) une société de courtage  débitrice d’une énorme amende (et des intérêts) imposée suite à une condamnation pour escroquerie dans une affaire de spéculation financière avec le patrimoine des caisses d’assurance sociale.

En deuxième place on retrouve « Olympic Air SA  » héritière de la compagnie publique « Olympic Airlines » privatisée en 2009.

La compagnie publique grecque des chemins de fer (OSE) avec ses filiales occupait jadis la première place sur la liste des gros débiteurs de l’État (taxes, cotisations sociales, amendes imposées par la Commission européenne pour non respect de la concurrence) mais sa dette a été effacée par ordonnance du gouvernement SYRIZA en 2018 à la suite de la vente de sa filiale  de transport passagers (TRAINOSE) à «Ferrovie dello Stato Italiane» compagnie italienne publique à statut de SA.

 Il devient évident que le traitement de la dette grecque « privée » est une question politique à l’égard de la répartition de sa charge parmi les classes sociales, parmi l’État, les « particuliers » et les banques, et les actions pour son recouvrement ou son effacement. Ce constat se situe à l’opposé de la vision néolibérale qui traite la question de la dette par des opérations strictement comptables et juridiquement formalistes dont la finalité ultime est la réduction maximale du service public et le transfert des richesses vers la finance et la spéculation au détriment des classes populaires et des travailleur-euse-s.

Le soulagement des foyers populaires et des petites entreprises surendettés était une des mesures phares annoncées dans le programme politique sur lequel SYRIZA a mené et gagné les élections de 2015, programme dit « de Thessalonique ». Parmi les dispositifs annoncés pour réaliser objectif, que SYRIZA à l’époque jugeait pragmatique, il y avait la création d’un réseau de commissions sous contrôle citoyen, censées procéder à l’étalement des dettes, leur effacement ou leur rachat par une agence publique ad hoc. Figurait aussi dans ce programme l’interdiction du rachat des prêts par des tiers spéculateurs, dits « fonds vautours ».

Depuis le début de l’application en Grèce des mémorandums de plus en plus de foyers modestes, de travailleurs indépendants et de très petites entreprises se sont trouvés face au risque de saisie de leurs habitations et de leurs comptes.

Une grande partie des familles saisies pourrait se retrouver dans la rue...Une grande partie des familles saisies pourrait se retrouver dans la rue…

Une grande partie des familles saisies pourrait se retrouver dans la rue. Avec des salaires et retraites réduits parfois jusqu’à 50%, ou parfois sans aucun revenu à cause du chômage, il devient pour elles très compliqué de retrouver un appartement à louer malgré une forte baisse des loyers. Ceci d’autant plus qu’après la vente aux enchères de l’habitation saisie il pourrait rester des sommes importantes à rembourser.

Pour confronter cette situation, le gouvernement du PASOK de Georges Papandréou avait promulgué en août 2010 une loi de dérogation des saisies des habitations principales des débiteurs en difficulté financière, dite « loi Katselis » du nom de la ministre de l’époque. Cette loi accordait le sursis d’un an à ces personnes et autorisait dans certains cas les tribunaux de procéder à des renégociations des dettes envers les banques, voire à leur effacement. La loi Katselis a été prorogée plusieurs fois pendant les premières années de la crise. La Troïka a exigé la modification de la loi dans un sens restrictif, ceci étant resté un point en suspens dans les négociations avec le gouvernement grec. De ce fait, la prorogation de la loi Katselis c’est arrêtée en décembre 2014, un mois et demi avant l’accès de SYRIZA au gouvernement. La loi Katselis avait toutefois été critiquée comme insuffisante par SYRIZA lorsqu’il était dans l’opposition.

L’inversion politique et sociale de SYRIZA

Le 15 janvier 2015, dix jours avant la tenue des élections anticipées, le quotidien de SYRIZA titrait en gros à la Une « Aucune habitation aux mains des banquiers » (!)

15/01/2015: « Aucune habitation aux mains des banquiers » (!)15/01/2015: « Aucune habitation aux mains des banquiers » (!)

Mais comme la plupart des mesures proposées par le programme « de Thessalonique », celles annoncées pour la crise de la dette privée sont passées aux oubliettes, mémorandum et Troïka obligent. Varoufakis avait déjà dit que « le programme de SYRIZA ne valait même pas le prix du papier sur lequel il était écrit ». Sa nomination au poste clé de Ministre des Finances aurait dû rendre plus méfiants les militants. En effet, dès la signature de l’accord du 20 février 2015, le gouvernement grec s’engageait à ne mettre en place « aucune mesure susceptible de menacer la stabilité du système financier et du crédit », selon les critères de la BCE bien entendu. Cette clause faisait directement référence aux mesures annoncées par SYRIZA avant les élections, pour renégociation des dettes privées.

Le 21 mars 2015 alors que la négociation était en cours, le gouvernement grec a promulgué, suite à l’initiative de la ministre Valavanis du courant de Gauche, une loi autorisant l’étalement du remboursement des dettes envers le guichet public, par le dispositif dit « des 100 tranches » qui, bien que relativement timide, a permis de soulager plusieurs débiteurs modestes et à l’État encaisser des recettes dues. La question des dettes envers les banques est cependant restée en souffrance, véritable épée de Damoclès au-dessus des têtes des foyers populaires.

Pire que ça, après la capitulation de juillet 2015, le 3e mémorandum et ses lois d’application ont légiféré, sous les recommandations des créanciers internationaux de la Grèce (BCE, FMI, Commission Européenne), la priorité au remboursement des banques en cas de faillite d’une entreprise. Cette priorité s’exerce au détriment de l’État, des caisses d’assurance et des particuliers, dont les salariés aux salaires dus. Pour valider cette mesure il a fallu réformer en un clin d’œil le Code Civil grec. Quand la Troïka ordonne et que Tsipras s’exécute, la régularité juridique passe au second plan.

En faisant fi de toute évidence, le gouvernement SYRIZA-ANEL n’a cessé de clamer sous tous les tons que, malgré sa capitulation (« compromis honorable » en novlangue syrizéenne) et son ralliement au camp des banquiers, les habitations principales des ménages modestes resteraient protégées des saisies. Cette désinformation a été relayée par ses alliés au sein des directions des partis du Parti de la Gauche Européenne (PGE), acculés par le besoin de sauver les apparences suite à cette terrible défaite.

La supposée protection des habitations principales des foyers modestes est celle de la « loi Katselis » mais bien rabotée suivant les recommandations des créanciers (BCE, FMI, Commission Européenne), par l’ajout de conditions à remplir par les débiteurs pour pouvoir en bénéficier. Il s’agit de  clauses de revenus du foyer et de valeur du bien hypothéqué. Il faut qu’une partie de la dette soit due aux banques et que le débiteur n’ait pas exercé d’activité à caractère commercial pendant l’année qui précède sa demande de bénéficier de la protection de la loi. Il est important de citer que la dérogation à la saisie de l’habitation principale qui pourrait être accordée a seulement un caractère de sursis car les effets de la loi prennent fin le 31 décembre 2018. Le nouveau format de la loi, dont SYRIZA fait mine de s’enorgueillir, promulgué en tant qu’article de la loi d’application du 3e mémorandum en août 2015 et  portant le nom « loi Katselis-Stathakis » (du nom du ministre actuel) est restrictif pour une grande partie des débiteurs modestes qui vivent toujours sous la menace de saisie de leurs logements.

Précisément, la loi protège les habitations principales d’une valeur inférieure à 180.000 euros, bonifiée par le nombre des membres du foyer. À noter que la valeur ainsi déterminée est la «valeur fiscale» fixée par le gouvernement, bien supérieure en temps de crise à la valeur du bien sur le marché.

Les revenus du débiteur susceptible de bénéficier de la protection de la loi ne doivent dépasser de 70% le montant des «frais raisonnables de vie».  Ce montant est aujourd’hui fixé par le gouvernement grec à 680 euros mensuels pour une personne seule, ce qui indique que le niveau des revenus du débiteur ne doit dépasser les 1150 euros mensuels, dont 470 euros obligatoirement alloués au remboursement  de sa dette. Ces sommes sont indexées sur le nombre des membres du foyer. Selon des sources proches du gouvernement la loi actuelle protégerait les habitations principales de 60% des ménages surendettés. En admettant même que cette estimation serait réaliste, la loi laisserait à découvert 168.000 foyers, dont la précarisation est susceptible de déclencher une nouvelle crise sociale majeure.

Grèce 2018: La pauvreté ne recule pas...Grèce 2018: La pauvreté ne recule pas…

Pour dorer la pilule, le gouvernement SYRIZA-ANEL précise que des allègements plus larges pourraient être accordés par négociations directes «de bonne foi», entre les débiteurs et les banques. Voilà encore un gouvernement « de gauche » qui délègue la politique sociale aux banquiers !

Un autre retournement du gouvernement SYRIZA concerne l’interdiction aux banques de revendre des emprunts problématiques aux « sociétés de gestion de dettes» ou fonds-vautours. L’activité de ces sociétés (grecques, européennes ou en provenance de pays tiers) est désormais officialisée par la loi du 16 décembre 2015. Ces sociétés ont le plein droit de racheter aux banques des prêts à prix jusqu’à 3% de leur valeur nominale de les revendre sous forme de paquets de titres ou d’exiger leur remboursement par des moyens d’intimidation et de harcèlement dont elles ont le savoir-faire. Les banques obtiennent aussi le droit de vendre aussi des prêts qui sont à jour dans des paquets mixtes. Les critiques de cette loi réclament la possibilité de rachat des prêts à une valeur raisonnablement inférieure à la nominale (pas moins de 50%) pour débiteurs eux-mêmes, mais le ministre Stathakis de SYRIZA rétorque qu’une telle disposition serait «un encouragement indirect à la fraude et à la mauvaise foi».

Concernant les saisies de logements à venir, le gouvernement SYRIZA soutient que leur mise en œuvre en masse « favorisera la reprise de l’économie grecque et la consommation car, si les banques se débarrassent des prêts problématiques elles pourront recommencer à prêter de l’argent » pour démarrer un nouveau cycle infernal identique au précédent, en ayant entre temps ponctionné des richesses aux classes populaires et moyennes.

Luttes pour la défense du logement des familles modestes

Les saisies et les ventes aux enchères s’intensifient aujourd’hui par le gouvernement Tsipras, coaché par la Troïka, s’efforçant de sauver les banques, une fois de plus en équilibre instable en Grèce. L’implémentation des mesures est « sous haute supervision » par le biais d’évaluations régulières de l’économie et de la politique grecques, dont la passation réussie est la condition pour le déblocage des tranches du financement à l’Etat grec. Pour les néolibéraux, la stabilisation en Grèce du système bancaire passe par l’expropriation et la précarisation des classes populaires et moyennes.

Notons que, même lorsque les débiteurs saisis sont des personnes fortunées, les conséquences se reportent directement sur les classes travailleuses, dans le cas locaux de production, la saisie marquant son arrêt. Ainsi, on ne s’étonne pas de voir le Parti Communiste de Grèce (KKE), qui ne s’est jamais positionné comme représentant des classes moyennes, ni comme partisan des mouvements citoyens horizontaux, rejoindre le mouvement populaire de lutte contre les saisies et les mises aux enchères.

Les militants font irruption dans les tribunauxLes militants font irruption dans les tribunaux

Dans le contexte catastrophique de la Grèce actuelle, la défense du logement des familles modestes passe par des luttes massives et polymorphes d’obstruction au travail de l’administration, des notaires et de la justice lors de procédures de saisie, d’expropriation et de mise aux enchères. Le mouvement populaire grec, dans ses diverses tendances, s’y est déployé depuis le début de la crise, car le fléau des expropriations était déjà à l’œuvre. Le grippage de la mécanique des expropriations est cependant une éventualité réaliste, compte tenu de l’énorme volume d’affaires.

La formation de Gauche Radicale "Unité Populaire" a une place centrale dans le mouvement pour la défense du logement des familles modestesLa formation de Gauche Radicale « Unité Populaire » a une place centrale dans le mouvement pour la défense du logement des familles modestes

Les mobilisations massives devant et dans les tribunaux organisées par des collectifs citoyens ont été soutenues très activement par Unité Populaire, ANTARSYA, KKE et d’autres formations de Gauche Radicale. Je profite pour faire un clin d’œil aux camarades français présents lors de certaines de ces mobilisations. Elles ont réussi d’empêcher les tribunaux de tenir audience et de rendre les décisions des mises aux enchères, faisant trainer les saisies de report en report. La répression policière violente déployée par le gouvernement SYRIZA, a davantage attisé la combativité les militants plutôt que de décourager le mouvement. Des dizaines d’audiences ont été empêchées.

Le gouvernement de SYRIZA, cavalier du jeu d’échecs néolibéral,  avance en biais pour se  préserver de la chute de popularité, mission impossible ! Ainsi, cette mécanique infernale que la Droite avait échoué de mettre en place, est pleinement déployée aujourd’hui, deux ans et demi après la capitulation de juillet 2015. La cerise sur le gâteau sera le démarrage des saisies électroniques par l’administration publique le 1er mai 2018, une manière très ironique de  SYRIZA de célébrer la fête des travailleurs !

Afin de contourner cette résistance populaire le gouvernement SYRIZA implémente la mise aux enchères par voie électronique des biens saisis, notamment des logements des familles modestes. Ce dispositif avait initialement rencontré l’opposition des notaires grecs, surtout des petites villes de province, refusant de se connecter à la plateforme. Par la « loi-valise » d’application du mémorandum de janvier 2018, SYRIZA rend obligatoire et exclusif, à partir du 21/02/18, le recours à la voie électronique avec la possibilité de délocaliser la procédure en cas de situation locale compliquée. L’objectif est d’effectuer des mises aux enchères par centaines, et par milliers si possible. Il n’empêche que l’étude du notaire, certes moins repérable que la salle d’audience du Tribunal d’Instance, est un lieu physique, possible lieu de rendez-vous du mouvement populaire qui s’est déjà manifesté activement depuis l’application du nouveau dispositif.

Usage de gaz asphyxiants dans la salle du tribunalUsage de gaz asphyxiants dans la salle du tribunal

La poursuite et intensification de la répression des militant-e-s reste donc un recours nécessaire au gouvernement SYRIZA qui veut mener le projet néolibéral jusqu’au bout et à tout prix. Un amendement de loi a donc été déposé, arguant dans le rapport préalable que les actions d’obstruction aux mises aux enchères « nuisent à l’intérêt budgétaire suprême de l’État, à la stabilité du système financier et à l’approvisionnement des banques en liquidités » (!) Il devient donc possible de poursuivre d’office ces militant-e-s et de les juger en comparution immédiate. L’entrave donc aux mises aux enchères est considérée comme un délit spécifique, sui generis. Auprès de l’opinion publique grecque, les dispositifs légaux d’exception ont très mauvaise presse, faisant écho au droit de la dictature des colonels et des suites de la guerre civile.

Le tableau se complète par l’usage immodéré de la force brute et vile : faux témoignages, matraquages, gazages, traumatismes infligés aux militant-e-s-qui manifestent.

Avec "Unité Populaire" contre l'austérité et le néolibéralisme, pour les droits du peuple!Avec « Unité Populaire » contre l’austérité et le néolibéralisme, pour les droits du peuple!

Selon les propos des porte-paroles de la formation de Gauche radicale « Unité Populaire » :

« Ni les intimidations, ni la violence, ni la désinformation massive, ni les lois sui generis  n’arriveront à faire fléchir le mouvement de résistance des citoyen-ne-s grec-que-s face aux saisies et mises aux enchères des logements. Le recours du gouvernement SYRIZA aux plateformes électroniques pour désamorcer concrètement la contestation fera émerger de nouvelles formes efficaces de combat, notamment par l’essaimage du mouvement dans les quartiers populaires… »

La bataille pour les habitations principales des classes populaires pourrait devenir aujourd’hui un point de convergence des forces qui combattent l’austérité en Grèce.

Il y a besoin d'un large mouvement unitaire citoyen Il y a besoin d’un large mouvement unitaire citoyen

La Grèce et la libéralisation du transport ferroviaire

Grèce : Conséquences de la politique européenne de libéralisation du transport ferroviaire

Il y a un an le feuilleton de la vente de TRAINOSE, a pris fin.
La société est passée à Ferrovie Dello Stato Italiano pour un prix de 45 millions d’euros. Inutile bien sûr de rappeler les déclarations de messieurs Stathakis et Tsipras quand le gouvernement Samaras-Vénizélos programmait la vente des chemins de fer grecs…
L’accord a été signé après règlement de quelques problèmes particuliers : l’effacement de la dette de TRAINOSE envers OSE (750 millions d’euros) à la suite d’engagements imposés par le mémorandum en échange du patrimoine immobilier de l’OSE. (La dette de l’OSE à laquelle il est fait référence concerne les participations aux travaux d’infrastructure que l’État grec n’a pas payés obligeant ainsi l’établissement à emprunter pour en couvrir les dépenses.)

Quelles ont été les évolutions du réseau ferré en Grèce depuis qu’a été instaurée la politique européenne de libéralisation du transport ferroviaire ?
-démantèlement de l’établissement ferroviaire -fermeture de 40 % du réseau -fermeture de 60 % des gares -réduction des effectifs de 14 500 personnes (1989) à 2900 personnes (2014) -hausse spectaculaire des tarifs -abandon du fret -obsolescence du matériel roulant -dévalorisation de l’infrastructure, vols, abandon du patrimoine -diminution du niveau de sécurité et de qualité des services -diminution du salaire des cheminots de l’ordre de 40 %

Quelles conséquences pour les utilisateurs ?
-Rétrécissement du réseau et des gares, augmentation des tarifs, diminution du niveau de sécurité et de qualité des services

Quelles ont été les actions des luttes sociales et politiques menées ces dernières années ?
Les travailleurs des chemins de fer ces dernières années ont lancé une série de mobilisations et d’actions contre les politiques du mémorandum et les privatisations. Il y a eu plus de 100 jours de grève, avec comme principales revendications l’arrêt des privatisations et le retour à un OSE sous sa forme publique et unique. Ont également eu lieu des dizaines de manifestations, des occupations de bâtiments, des annulations d’itinéraires, etc
À la question « pourquoi un OSE public et unique » la réponse est que l’expérience a prouvé que le morcellement organisationnel n’a, à ce jour, mené nulle part. Ce modèle organisationnel a été testé, a conduit à des gaspillages et des dysfonctionnements et a échoué.
À la question « pourquoi un OSE public » la réponse est que son importance en tant qu’entreprise de transport est stratégique: – pour la sécurité nationale -pour le soutien du développement économique du pays et pour la mise en œuvre d’un plan de développement national et le développement régional
Une structure organisationnelle unique, chapeautée par les Directions Générales des activités et une séparation logistique de ces activités permettant de les suivre avec la plus grande transparence possible, servira les intérêts du peuple grec de la meilleure façon possible.

Dates-clés pour les directives européennes en matière de transport :

***2001 directive européenne 2001/12 – Séparation de la gestion de l’infrastructure. directive européenne 2001/13 – Procédure d’octroi de licences pour les transporteurs ferroviaires. directive européenne 2001/14 – Répartition des compétences en matière d’ infrastructure. directive européenne 2001/16 – Interopérabilité du réseau ferroviaire conventionnel .
***2012 directive européenne 2012/34 – Unification du cadre législatif.
***2004 : directive 2004/49, directive 2004/50, directive 2004/51, règlement 881/2004 – Une plus grande ouverture du marché du fret, adoption de procédures techniques communes en matière de sécurité, institution d’une Agence ferroviaire européenne.
***2007 directive 2007/58, directive 2007/59, règlement 1370/2007, règlement 1371/2007, règlement 3172/200 – Une plus grande ouverture du marché des transports de passagers, création d’un « brevet de conduite » européen pour les transports intra-européens, des droits pour les passagers et des critères de qualité minimum pour le travail de transport.
1991 Publication de la directive européenne 91/440 sur la libéralisation du transport ferroviaire.Évolution des volumes transportés depuis 2000.

Nombre d’organismes ferroviaires intervenant dans le transport de fret et de voyageurs.

OSE(ΟΣΕ) – gestionnaire de l’infrastructure
TREN OSE(ΤΡΑΙΝΟΣΕ)-exploitant du réseau ferré
EESTTY (ΕΕΣΤΤΥ) – société de maintenance du matériel roulant Y sont aussi liées indirectement les entreprises suivantes: GAIA OSE(ΓΑΙΑΟΣΕ) – valorisation du patrimoine immobilier
ERG OSE(ΕΡΓΟΣΕ) – gestion des travaux cofinancés par l’UE

Bref historique sur la dette L’OSE en tant qu’entreprise de transport – contrairement aux autres entreprises de transport privées ou publiques – a la responsabilité de la maintenance et de la surveillance des infrastructures(de ligne). Il a l’obligation de fournir des services à des fins nationales(défense) et bien sûr de faire œuvre sociale à travers sa politique tarifaire. L’état, déjà depuis la création de l’OSE en 1972, a défini ses obligations financières envers l’OSE, en signant une convention de financement correspondante.

a) Depuis 1972 et jusqu’à 1979, la convention de financement a été entièrement respectée. Depuis 1980 et jusqu’à 2002, elle a été respectée seulement pour un tiers avec pour résultat de porter la dette de l’État envers l’OSE à 2,7 milliards €(rapportés au taux actuel).
Depuis 2003 et jusqu’à aujourd’hui, le gouvernement n’a pas versé un seul euro à l’OSE pour couvrir ne serait-ce qu’une partie de ses obligations envers l’OSE.

b ) Le coût de la participation nationale aux travaux de modernisation cofinancés et le coût des travaux financés par des fonds nationaux n’est pas entièrement couvert par le Programme d’investissement public. Ainsi depuis 1993 et jusqu’en 2004 l’OSE a emprunté 1,5 milliards € afin de respecter ses engagements en matière d’investissement. Le programme d‘investissement en 2006 et 2007 a été financé pour 640 millions € par la région de Grèce Occidentale(Π.Δ.Ε) et pour 540 millions par un emprunt de l’OSE. La prise en charge par l’OSE des obligations financières de l’État l’ont conduit à emprunter une somme totale d’environ 7 milliards € et le service de ces prêts a contribué pour 37 % à la création du déficit.
Sources : Syndicats des cheminots grecs

Source article https://unitepopulaire-fr.org/2018/04/08/grece-consequences-de-la-politique-europeenne-de-liberalisation-du-transport-ferroviaire/

Projection débat le 23 avril avec Yannis Youlountas et action de solidarité

Le collectif citoyen de Grenoble contre l’austérité en Grèce et en Europe – soutenu par Attac Isère et le Cadtm Grenoble

vous propose une projection-débat et une action de solidarité

<<<<<<<<<<<<<<<<<<< Projection – débat >>>>>>>>>>>>>>>>>
en présence du réalisateur

Lundi 23 avril 20h
Espace Aragon – 19 bis bd Jules Ferry Villard Bonnot

L’amour et la Révolution
Non, rien n’est fini en Grèce
réalisé par Yannis Youlountas

« Dix ans après les premières émeutes, les médias ne parlent plus de la crise grecque.Tout laisse croire que la cure d’austérité a réussi et que le calme est revenu.  Ce film prouve le contraire.
 A Thessalonique, des jeunes empêchent les ventes aux enchères de maisons saisies. En Crète, des paysans s’opposent à la construction d’un nouvel aéroport.  À Athènes, un groupe mystérieux inquiète le pouvoir en multipliant les sabotages. Dans le quartier d’Exarcheia, menacé d’évacuation, le cœur de la résistance accueille les réfugiés dans l’autogestion.
Un voyage en musique parmi celles et ceux qui rêvent d’amour et de révolution. »

<<<<<<<<<<<<<<<<<<< Action de solidarité >>>>>>>>>>>>>>>>>


Au mois de mai,
un fourgon partira de Grenoble pour la Grèce et se joindra au convoi solidaire, organisé par le collectif artistique et solidaire ANEPOS.

Notre action n’est pas humanitaire, mais politique et solidaire, sans intermédiaire : nous soutenons directement nos camarades grecs et les encourageons à continuer à résister et à s’entraider.

La liste des principaux besoin a été préparée avec eux pour des livraisons à Exarcheia (Athènes), Thessalonique et plusieurs îles.

La liste des besoins et tous les renseignements sur ce convoi : http://lamouretlarevolution.net/spip.php?rubrique15

 

Voici les rendez-vous pour soutenir cette action solidaire et apporter votre contribution

<< Place Félix Poulat – Grenoble (barnum rouge à côté de l’église) >>
samedi 21 avril de 15h à 17h

<< Espace Aragon >>
(avant la projection du film L’Amour et la Révolution)
lundi 23 avril à partir de 19h

<< Devant le MIN (marché de gros) – 117 rue des Alliés – Grenoble >>
mercredi 25 avril de 17h à 19h
et

mercredi 2 mai de 17h à 19h

Les personnes qui ne pourraient vraiment pas se rendre à l’un de ces 4 rendez-vous peuvent adresser un message à greceausterite@hotmail.com, nous chercherons une solution.

Résurrection La rubrique de Panagiotis Grigouriou

Panagiotis  Grigoriou est Ethnologue et historien, chroniqueur, analyste, initiateur d’un concept de tourisme alternatif  et solidaire en Grèce. Le regard de l’historien et de l’anthropologue sur l’actualité et le vécu de la crise grecque.

Dans cette rubrique il évoque la surimposition que subissent les grecs avec 37 nouvelles taxes créées ces dernières années, les velléités avortées du gouvernement d’en créer une nouvelle sur les animaux domestiques, les saisies bancaires…  

Résurrection

Pâques en vue. Le pays s’y prépare, le soleil en plus. La météo annonce un bref passage pluvieux tout juste pour ce Vendredi saint, rien de bien dramatique. Cette année, la plus grande fête chez les Orthodoxes elle est fixée une semaine après Pâques des Catholiques, question de calcul et de nouvelle lune. La tradition veut que l’on consomme les œufs rouges, symbole de Pâques par excellence, on en trouve ainsi en ce moment sur les marchés à Athènes comme partout en Grèce. Donc… résurrection alors prochaine !

Arrivée du ferry. Péloponnèse, avril 2018

Fatigués de l’actualité accablante… et qui perdure déjà depuis huit ans, les Grecs quittent ainsi massivement les grandes villes et essentiellement Athènes, pour fêter Pâques au village, “sto chorio”, comme on dit en grec. Le terme, tout comme sa réalité, renvoient encore suffisamment à ces évidence plus paisibles, familiales, et surtout matrices de souvenirs. Et pour tout dire enfin, Pâques au village et en famille, s’avère parfois plus… économique que dans la capitale.

“Chorio” donc, c’est-à-dire à la fois espace, lieu, et autant “petite patrie d’origine” comme le désignent alors souvent et très volontiers les Grecs entre eux. Dans le Péloponnèse proche, ceux originaire des lieux justement, ils arrivent parfois par les ferrys de la ligne du Golfe Saronique. D’autres préféreront la route, puis, il y a tous ceux qui ne se déplacent plus, immobilisme… crisique y oblige. Pays où l’on rêve parfois… avec la Résurrection et non sans s’en méfier, autant au retour à la monnaie historique et nationale, la drachme.

En attendant, nos touristes sont d’ailleurs déjà aussi bien présents en ce Printemps, observant à l’occasion les usages et parfois mésusages du quotidien grec. Ainsi va la vie athénienne touristique, entre les séances photo devant les gardes Evzones place de la Constitution, les bains de soleil, puis, la découverte du café glacé dont les Grecs raffolent, chaque année entre le printemps et le bien lointain hiver prochain. En somme, tout l’éclat de l’épiphénomène grec, et c’est bientôt Pâques !

Retour à la drachme ? Athènes, avril 2018
Touristes, place de la Constitution. Athènes, avril 2018
Vestiges d’un cinéma en plein air. Péloponnèse, avril 2018

Toutefois, nos visiteurs n’auront certainement pas distingué… tous les vestiges de la civilisation grecque, disons la plus récente, entre les cinémas en plein air, les bâtiments jadis prestigieux de l’Armée grecque et lieux de convalescence pour les officiers, sous-officiers et soldats, construits dans les années 1920, le tout désormais destiné à la vente, comme tant de biens grecs en ce moment. Pays et autant commerce alors si énorme !

Passé, futur et rêve… bradés ; “Mais alors jusqu’où ? Où allons-nous enfin ?”, se demandent ainsi les Grecs entre eux. Ceux par exemple du complexe îlien en mer Égée, amis de longue date et travailleurs supposés indépendants… dépendants du tourisme, lesquels nous confient même parfois leurs rêves, ou plutôt cauchemars:

“Ce matin, j’ai commencé ma journée me rendant au Centre des impôts afin d’inscrire mes chambres que je loue à court terme aux touristes au nouveau registre correspondant, et ainsi être en règle vis-à-vis de la nouvelle réglementation en la matière. Je pouvais à peine marcher, ainsi, j’utilisais le cadre métallique d’une vieille table pliante que j’avais récupéré en lieu et place d’un cadre de marche. Je suis donc arrivé très péniblement au Centre des impôts. J’y ai été accueilli par deux femmes. Je me suis approché à l’une des deux, celle au physique visiblement soigné, elle devait avoir à peu près 45 ans, en lui exposant le motif de ma requête.”

Armée grecque: bâtiment à louer. Péloponnèse, avril 2018
Terrain à vendre. Péloponnèse, avril 2018
Vieilleries mises en vente. Athènes, avril 2018

“Elle s’est penchée vers moi pour m’implorer à voix basse: ‘Désirez-vous vraiment inscrire vos biens à notre nouveau registre?’ Pour aussitôt rajouter sur le même ton: ‘Vous vous demanderez, bien sûr, comment est-il possible qu’un agent des impôts puisse vous poser une telle question’. Et je lui ai répliqué, disons avec un brin d’espoir: ‘Que vous voulez faire, j’y suis obligé, je gagne peu en réalité, et si jamais mon chiffre d’affaires dépasse les 12000€ par an, au lieu de 15% c’est 35% que je dois verser en impôt… plus évidemment, les cotisations correspondantes. Et si je ne déclare pas mes biens, et que je me fais rattraper c’est d’emblée 5000€ d’amende que je devrais vous laisser, rien que pour commencer.”

“Voilà le rêve que j’ai fait l’autre jour à l’aube et me suis réveillé dans une telle ‘joie’. Voilà surtout à quel point nous sommes devenus paranoïaques dans ce pays sous la Troïka, et cela aussi à cause de la surimposition sans oublier les changements incessants des règles en matière fiscale. Un vrai cauchemar”.

Sous l’Acropole le calme apparent règne, autant parfois que la psychose et le désespoir. D’après les dernières statistiques, près du 70% de la population grecque ne survit que grâce à… un cadre de marche économique, et c’est vraiment tout juste que ses besoins primaires soient en somme et à la limite satisfaits.

Sous l’Acropole. Athènes, avril 2018
Temps actuel. Athènes, avril 2018
‘Nous avons faim’. Athènes, avril 2018

Ainsi, même le portail d’information économique et financière (largement) néolibéral, capital.gr, reprenant les éléments issus des données officielles et des autres statistiques du moment, dresse alors un portait fort accablant des réalités grecques actuelles.

“D’après les données officielles, en 2017 les saisies sur comptes bancaires ont dépassé 1,7 million (la Grèce compte dix millions d’habitants). Ces mêmes éléments montrent que de toute évidence l’écrasante majorité des débiteurs doit à l’administration fiscale de sommes ne dépassant guère les 500 €. Et nous pouvons sans risque parler d’une faillite grecque bien en profondeur, puisque 500.000 foyers doivent 10 euros à l’État, et qu’ils ne peuvent pas régler cette dette, ou que leur situation financière ne le permet pas, ou peut-être qu’ils restent indifférents face à cette réalité car ils n’ont plus rien à perdre.”

“Et seulement environ 40.000 débiteurs, soit environ 1% du total, ont des dettes de plus de 100.000€ et dans l’ensemble, ces redevables représentent 89,2% de cette dette globale envers l’État. En face, 87,7% des débiteurs de l’administration fiscale, soit plus de 3,5 millions de débiteurs, ont des dettes en souffrance, inférieures à 5.000 euros. En réalité, la moitié de la population économiquement active… se retrouve en situation de ‘captivité fiscale’, et cela, pour moins de cinq mille euros d’impayés.”

“Quelle conclusion alors faudrait-il tirer de tels chiffres ? Une première conclusion nécessaire, c’est que la moitié des Grecs doivent au plus 5.000 euros au fisc, sauf qu’ils ne s’en inquiètent guère, soit parce que leur compte bancaire est vide, soit parce que leurs revenus ne peuvent plus être repérés des radars des autorités fiscales ni de ceux des banques. Autrement dit, ces ménages ont ainsi basculé dans l’économie informelle, pratiquant entre autres la rétribution ‘au noir’.”

Parking privé en travaux. Athènes, avril 2018
Hors de prix. Athènes, avril 2018
Prix de saison. Athènes, avril 2018

“Pourtant, ces dernières années, environ 37 nouvelles taxes et impôts ont été rajoutés, avec un objectif de 12 milliards d’euros supplémentaires pour l’État. En 2016, l’État a ainsi collecté près de 54,1 milliards d’euros, contre 51,3 milliards en 2014 et pourtant 55,3 milliards en 2009 avant les nouvelles taxes (la Troïka est arrivée en Grèce en 2010). Notons aussi que la TVA impayée s’élève à 21,63 milliards d’euros à la fin de l’année dernière, représentant environ 21,8% de l’impôt global non payé.” (Kostas Stoupas, le 5 avril 2018).

Toujours sur le même portail Internet, un autre article revient sur le fait des 650.000 employés du secteur privé en Grèce, lesquels gagnent… 382€/mois pour un travail à temps partiel. Ceci explique peut-être un peu cela, (Dimitris Katsaganis, le 5 avril 2018).

Ce… néoréalisme grec échappera ainsi quasi-entièrement aux visiteurs du pays, d’ailleurs, ils n’y viennent pas pour… répéter l’audit des statistiques grecques. Car sinon, la vitrine helladique est fort belle, et elle est même parfois authentique, comme par exemple lorsque le pope (prêtre) et les siens, boivent leur café devant l’église aussitôt la messe terminée en cette semaine Sainte Orthodoxe. Au même moment, en attendant Dieu sait quoi, les avenues d’Athènes se vident de leur circulation, puisque les Athéniens retrouvent alors massivement leurs “petites patries d’origine”, si ce n’est que pour quelques jours seulement, laissant les clefs de la ville aux plus paupérisés d’entre eux, aux touristes, aux migrants, et naturellement, à nos animaux adespotes (sans maître).

Avenue d’Athènes. Avril 2018
Touriste. Cap Sounion, avril 2018
Animal adespote. Athènes, avril 2018

Notons enfin que la dernière trouvaille en matière de loi mémorandaire de la part du “gouvernement”, avait été ce projet présenté au “Parlement” en matière d’animaux desposés (ayant un maître) et adespotes (sans maître). Ce projet a été finalement retiré, car il a suscité l’indignation générale, et particulièrement celle des associations lesquelles œuvrent en faveur des animaux adespotes. D’ailleurs et abord cette loi instaurait une taxe liée à la possession d’animaux domestiques, ainsi qu’une forme de… TVA animalière, pour chaque produit acheté au sein d’une boutique commercialisant des articles pour animaux, en plus de la TVA… très humaine à hauteur déjà de 24%.

Ensuite, par cette législation, et par ses dispositions explicites, que toute action l’action en faveur du bien-être animal de la part des citoyens et des associations puisse devenir interdite. En particulier, le sauvetage, le fait de nourrir, la stérilisation des animaux adespotes, ainsi que les efforts de la part des citoyens ou des associations fin de trouver un foyer à ces animaux, seraient dorénavant des actes illégaux.

En réalité, c’est même l’essentiel du travail des associations œuvrant pour la protection des animaux qui deviendrait interdit, en limitant considérablement leur champ d’intervention, quitte à les faire disparaître. Ainsi, tout citoyen ou toute association qui enfreindrait la loi en portant secours, hébergeant ou en sauvant un animal adespote, commettrait ainsi un acte passible d’une amende de 5 à 15 mille euros et d’un an d’emprisonnement, comme l’ont souligné les nombreux reportages de la presse ces deux dernières semaines à l’instar du quotidien “Kathimeriní”.

Animal adespote de la gallérie littéraire. Athènes, avril 2018
Animal adespote de la gallérie littéraire. Athènes, avril 2018
Loi sur les animaux et indignation. Athènes, avril 2018

Ce projet de loi a été certes retiré, mais à l’avis de nombreux observateurs des faits et gestes bien grecs, ce n’est qu’une reculade d’urgence “de la part des salopards et autant marionnettes qui sont au gouvernement”, aux dires même de certains journalistes, à l’instar de ceux de la zone matinale sur la radio 90.1 FM en Attique. La presse aura surtout remarqué le caractère lamentablement aberrent d’une telle législation, ainsi que sa spécificité très comptable, rien que par l’instauration d’une taxe de plus, laquelle se rajouterait aux 37 nouvelles taxes rajoutées depuis 2010.

Il y a pire pourtant. Cette loi, à mon humble avis, elle aurait été très probablement rédigée, d’abord au sein d’un “cabinet d’experts internationaux” à l’instar du 95% de la “législation grecque” depuis 2010, laquelle est comme on sait… importée par mail, pour ensuite être traduite à la hâte pour les besoins de la supposée “procédure parlementaire”.

Ce que la presse n’a pas vu, ou qu’elle n’a pas voulu voir, c’est toute la mutation anthropologique violente que cette même loi avait tenté d’imposer, à savoir, et très exactement, la disparition des animaux adespotes, et par la même occasion, la destruction du lien très puissant qu’alors entretiennent avec eux les Grecs, ce qui n’est d’ailleurs pas qu’une spécificité grecque, il y a qu’à observer par exemple le lien analogue qu’entretiennent nos voisins Turcs avec leurs chats, entre autres à Constantinople, et cela jusqu’à en faire un beau film.

Vision du monde. Athènes, avril 2018
Cuirassier ‘Avéroff’, navire musée. Athènes, avril 2018
Devant la nature. Visiteurs du Cap Sounion, avril 2018

En somme, une telle législation a surtout pour vocation que de briser l’un des derniers ressorts culturels, voire existentiels encore subsistant chez les Grecs. Car au-delà du génocide économique et de la dépossession des biens, des symboles et des affects liés à ce que les Grecs considèrent très exactement comme relevant de leur patrie, “notre” tournure de mondialisation techno-féodale, imposerait pour autant, si elle y arrive, un tel méta-monde, où tout “contact” entre humains et également entre humains et animaux, passerait obligatoirement par la “création” numérique.

Nous en rajoutons déjà… en termes de méthode aux guerres de jadis, comme aux cuirassiers d’il y a un siècle, transformés en musées. Ainsi, le métanthropisme, le transhumanisme, leur supposée réalité augmentée, nous réduiraient et nous conduiraient de toute évidence… à “évoluer” finalement dans un monde azootique, aseptisé, desposé, donc déjà mort. En somme, c’est la “vie” dans un univers concentrationnaire quasi-planétaire, donnant ainsi raison à Günter Anders, lequel avait comme on sait considéré et analysé bien tôt, cette… “Obsolescence de l’Homme”.

Comme il est aussi observé ailleurs au sujet de son œuvre, “le titre de ‘L’Obsolescence de l’homme’ indique déjà qu’il y a quelque chose de périmé en l’homme, quelque chose hors sujet, à savoir son humanité. L’homme perd ses caractéristiques qui constituaient en propre son humanité: la liberté, la responsabilité, la capacité d’agir, la capacité à se faire être. En utilisant ces concepts, nous parlons le langage et la réalité d’un autre temps. Tout se passe comme si l’être de l’homme relevait aujourd’hui d’une nature morte.”

Je rajouterai seulement que cette nature morte, ce serait autant celle des animaux, et qu’en Grèce en ce moment, c’est très précisément un “gouvernement” de… gauche sous l’arriviste Alexis Tsipras qui de fait, il agit en faveur de l’avènement de ce monde alors fondamentalement morbide.

Lara Fabian à Athènes. Affiche, avril 2018
Journaux du moment. Athènes, avril 2018
Biscuits traditionnels de Pâques. Péloponnèse, avril 2018

Pâques donc en vue. Le pays s’y prépare, le soleil en plus. Bref passage pluvieux, tout juste pour ce Vendredi saint, rien de bien dramatique. Lara Fabian à Athènes bientôt, le catastrophisme de la presse, le pays réel et ses cadres de marche, nos biscuits traditionnels de Pâques, les Grecs et leur juste vœu du moment: “Bonne Résurrection”.

Retour si possible à l’essentiel, comme d’ailleurs pour Mimi et Hermès, animaux attitrés de ‘Greek Crisis’. Oui, “Bonne Résurrection” !

Mimi et Hermès de ‘Greek Crisis’. Athènes, avril 2018
* Photo de couverture: Les œufs rouges, symbole de Pâques. Athènes, avril 2018

mais aussi pour un voyage éthique, pour voir la Grèce autrement “De l’image à l’imaginaire: La Grèce, au-delà… des idées reçues !”   http://greece-terra-incognita.com/

SOS Méditerranée : Sauveteurs et témoins en Méditerranée

Chers amis,

Le contexte des opérations en mer est toujours plus complexe avec notamment une confusion grandissante dans la coordination des sauvetages. Comme ce fut le cas pour nos dernières opérations en mer où 292 personnes ont été accueillies à bord de l’Aquarius, les ONG sont désormais contraintes de négocier chaque sauvetage de personnes en détresse, blessées, épuisées, en pleine mer.

Alors que les moyens en mer pour sauver des vies sont insuffisants, cette confusion tend à retarder les opérations, mettant chaque fois en péril la vie de centaines de personnes. A la confusion s’ajoute l’horrible sort réservé aux embarcations interceptées par les garde-côtes libyens qui sont reconduites en Libye et non vers un port « sûr » comme le prévoit la loi.

SOS MEDITERRANEE, association européenne et citoyenne, intervient avec son navire ambulance, l’Aquarius, pour secourir celles et ceux qui sont en danger de mort en Méditerranée dans le respect du droit maritime international et des principes d’humanité et de solidarité, qui ont fondé l’Europe, et sont l’ADN des gens de la mer.

Nous demandons instamment aux plus hautes autorités européennes et internationales de clarifier le cadre d’intervention des différents acteurs dans cette zone maritime. Si ce cadre a changé récemment nous estimons que nous, sauveteurs et citoyens européens, devrions en être les premiers informés.

Sauveteurs et témoins : notre présence est plus que jamais nécessaire en Méditerranée.

Merci d’être à nos côtés.

Francis Vallat
Président de SOS MEDITERRANEE France

Journal de Bord

Interceptions par les garde-côtes libyens : le déni des valeurs d’humanité et de solidarité

Présent sans interruption en Méditerranée pendant tout l’hiver, l’Aquarius a été témoin de la recrudescence des interceptions d’embarcation en détresse dans les eaux internationales par les garde-côtes libyens. Ces interceptions s’accompagnent souvent d’une confusion totale sur les transferts de responsabilités des opérations de sauvetage, augmentant leur dangerosité. Retour sur deux récentes opérations à haut risque, dans les eaux internationales, en pleine mer Méditerranée.

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Et en France qu’en est-il de l’accès aux soins ?

Aux urgences, des milliers de patients passent la nuit sur des brancards

par Nolwenn Weiler

Chaque matin, les médecins du service des urgences de Troyes distribuent une note surréaliste à leurs patients. « Madame, monsieur ; vous venez de passer une nuit sur un brancard au sein du service des urgences. Sachez que nous déplorons cette situation (…). L’hôpital manque de lits. Les médecins étant de moins en moins nombreux, il devient difficile d’assurer l’ensemble des missions [1]. » Il devient courant dans les services d’urgence en France que des dizaines de patients attendent ainsi leur tour sur des brancards pendant toute une nuit. « Dans la nuit du 13 au 14 mars, d’après le décompte quotidien relevé par le Samu des urgences de France, ils étaient plus de 200, relève Jean Vignes, secrétaire fédéral du syndicat Sud Santé. Entre janvier et mars, on arrive à environ 15 000 personnes ! » Ce mois-ci, deux patientes sont décédées d’arrêts cardiaques alors qu’elles attendaient leur tour sur des brancards, dans les couloirs des urgences des hôpitaux de Rennes et Reims.

Grèves dures et droit d’alerte

« Notre système d’accueil n’est pas dimensionné pour faire face, déplore Yves Morice, représentant Sud santé sociaux au CHU de Rennes. Nous avons tellement supprimé de lits que l’on n’a plus de solutions d’accueil pour désengorger les urgences. Résultat ? Les gens restent là, au risque de passer 24 heures ou même 48 heures sur des brancards dans les couloirs. » Dans certains services d’urgences, il n’y a parfois même plus de places dans les couloirs pour poser les brancards… Depuis des années à Rennes, et partout en France, les soignants alertent sur cette situation, avec des grèves parfois très longues ou des droits d’alerte déposés en comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) [2].

Mais les fermetures de lits et les suppressions de postes se multiplient, au fil des sévères coupes budgétaires qui sont imposées à l’hôpital public, alors même que les besoins de la population s’accentuent. La population vieillissante augmente, la précarité également – ce qui conduit de plus en plus de gens vers les urgences puisqu’il ne faut pas y avancer d’argent – et le nombre de médecins « de ville » ne cesse de diminuer. Le plan triennal (2015-2017) de l’ancienne ministre de la Santé Marisol Touraine, a imposé des économies de trois milliards d’euros en trois ans. L’actuel gouvernement Macron persiste : 1, 6 milliards d’euros d’économies ont été réclamées pour 2018.

Vers le surendettement ?

Les conditions d’accueil aux urgences ne risquent pas de s’améliorer, pas plus que les conditions de travail, d’autant que les hôpitaux s’enfoncent dans une situation d’endettement inquiétante. « La situation financière des hôpitaux s’est très fortement dégradée en 2017, comme en témoignent les premières estimations remontées aux Agences régionales de santé (ARS) par les établissements », signale dès le mois de décembre la fédération hospitalière de France. Les hôpitaux devraient connaître un déficit historique de 1,5 milliards d’euros en 2018, soit une multiplication par trois en deux ans. Ce déficit était de 470 millions d’euros en 2016.

« Les établissements de santé vont se trouver pris en otage entre la qualité des soins qu’ils doivent à leurs patients, la préservation des conditions de travail et de l’emploi des équipes hospitalières et l’obligation du retour à l’équilibre des comptes », déplorait Frédéric Valletoux, président de la fédération. Pour faire face, les établissements vont être obligés de recourir aux partenariat public privé et… à l’endettement. Un risque de spirale infernale imposé par une gestion néolibérale des services publics.

Photo : Adrien Maillot

Source https://www.bastamag.net/Aux-urgences-des-milliers-de-patients-passent-la-nuit-sur-des-brancards

Yannis Youlountas à l’Espace Aragon le 23 avril

Le collectif Grèce-austérité de Grenoble soutenu par Attac 38 et CADTM38 

 vous invite à la projection-débat du film

 L’amour et la révolution

Non, rien n’est fini en Grèce

le lundi 23 avril 2018 à 20h

Espace Aragon 19 bis Boulevard Jules Ferry Villard-Bonnot

suivie d’un débat en présence du réalisateur Yannis Youlountas

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Dix ans après les premières émeutes, les médias ne parlent plus de la crise grecque. Tout laisse croire que la cure d’austérité a réussi et que le calme est revenu.

Ce film prouve le contraire.

A Thessalonique, des jeunes empêchent les ventes aux enchères de maisons saisies. En Crète, des paysans s’opposent à la construction d’un nouvel aéroport. À Athènes, un groupe mystérieux inquiète le pouvoir en multipliant les sabotages. Dans le quartier d’Exarcheia, menacé d’évacuation, le cœur de la résistance accueille les réfugiés dans l’autogestion. Un voyage en musique parmi celles et ceux qui rêvent d’amour et de révolution.

A partir de 19h le collectif organise sur place une collecte de fournitures pour le convoi solidaire de mai 2018 pour la Grèce initié par le collectif Anepos voir détails [ICI] )

 

 

 

Merci de diffuser l’information dans vos réseaux avec cette affiche  L’amour et la révolution_affiche_A4

Affronter le néolibéralisme et le nationalisme

Affronter le néolibéralisme et le nationalisme. Entretien entre N. Slavevski et S. Kouvélakis

La tension créée par le différend entre la Grèce et la République de Macédoine et les complexités de la politique intérieure dans les deux pays ont jusqu’à présent entravé le dialogue transfrontalier entre la gauche radicale grecque et macédonienne.

En Macédoine, le parti social-démocrate au pouvoir, successeur du parti unique de l’ère yougoslave, met en œuvre des politiques néolibérales tout en poursuivant une intégration plus profonde dans le bloc occidental. En Grèce, Alexis Tsipras et Syriza ont renié leurs engagements initiaux pour devenir les exécutants les plus fidèles de la thérapie de choc imposée au pays par la coalition d’airain qui lie ses créanciers à sa propre bourgeoisie.

Il existe cependant des forces dans les deux pays qui combattent cette voie désastreuse, en s’opposant à la fois au nationalisme et à la destruction néolibérale de la démocratie et des droits sociaux. Dans cet entretien, Stathis Kouvélakis et Nikola Slavevski discutent de la tension nationaliste croissante et de l’implication croissante des Etats-Unis dans la région ainsi que de la façon dont la gauche radicale devrait y répondre.

Nikola Slavevski, est diplômé de l’école des Beaux-Arts de Skopje et membre du comité central de Levica (La gauche) de la République de Macédoine

Stathis Kouvélakis enseigne la philosophie politique au King’s College de Londres, il est membre d’Unité Populaire en Grèce.

 Commençons par une question sur la perception par l’opinion publique dans votre pays des négociations en cours entre le gouvernement grec et la République de Macédoine sur le « différend sur le nom ». En annonçant le changement du nom de l’aéroport de Skopje (d’« Alexandre le Grand » à « Aéroport international de Skopje »), le premier ministre macédonien Zoran Zaef a également déclaré qu’il acceptait un nom composite, avec une indication géographique à côté de «Macédoine». Un consensus plus large est-il possible autour d’une telle proposition ? Un tel accort pourrait-il obtenir la majorité qualifiée au Parlement nécessaire pour tout changement constitutionnel ?

Le président actuel de l’opposition de droite a récemment visité Washington, où il a rencontré Trump, une confirmation supplémentaire que le VMRO-DPMNE ne s’est jamais opposé à la politique étatsunienne. Les élites politiques de la République de Macédoine sont soumises à l’impérialisme parce qu’elles ont besoin d’un soutien international pour maintenir leur domination. Je pense que si les intérêts étatsuniens dictent un changement constitutionnel, il y aura une majorité qualifiée au parlement. L’impérialisme occidental a besoin que cette question soit résolue pour permettre l’intégration de la République de Macédoine dans l’OTAN, et, de ce fait, elle sera résolue. Quant au changement de nom de l’aéroport de Skopje, je pense que c’était une bonne décision. L’aéroport a été nommé « Alexandre le Grand » en 2006 comme un acte de provocation du gouvernement VMRO dans le contexte de l’escalade de tension du moment.

 Cela nous amène à la question cruciale de l’OTAN. Il est tout à fait clair que la raison pour laquelle les négociations entre la Grèce et la République de Macédoine ont repris à un rythme intensif est de permettre à celle-ci d’adhérer à l’OTAN, et, par la suite, à l’UE. Il y a même des échéances précises pour le bouclage des négociations, à savoir le prochain sommet de l’OTAN les 11 et 12 juillet précédé d’un sommet de l’UE à Sofia le 17 mai consacré à son élargissement dans les Balkans. Comment évaluez-vous l’élargissement de l’OTAN, auquel la gauche radicale grecque s’oppose catégoriquement ?

L’OTAN n’est rien d’autre qu’un outil de répression impérialiste. L’OTAN est un pacte de guerre et d’agression, l’OTAN est une relique du passé. Levica s’oppose à l’intégration de notre pays dans l’OTAN. Nous ne voulons en aucun cas participer à la répression des autres peuples. Rejoindre l’OTAN n’apportera rien de positif à la population, puisque nous devrons consacrer 2% du budget aux dépenses militaires. Cet argent pourrait plutôt être utilisé pour des programmes sociaux, de santé ou d’éducation.

 Pensez-vous que la question de l’adhésion à l’UE devrait être dissociée de l’adhésion à l’OTAN? Quel rôle l’UE a-t-elle joué jusqu’ici dans la politique intérieure de votre pays ?

L’intégration de l’UE est distincte de l’intégration à l’OTAN, il existe des pays de l’UE qui ne sont pas membres de l’OTAN. Le rôle de l’UE dans la région est important mais la diplomatie de l’UE est « soft », l’outil de l’impérialisme occidental ici est la diplomatie étatusienne. Quoi qu’il en soit, nous soutenons l’intégration européenne, mais l’UE doit être restructurée car elle est fondée sur les intérêts capitalistes et impérialistes des pays du centre. L’Union des peuples européens doit être fondée sur l’égalité et le développement équilibré, et non sur les intérêts capitalistes. Pour parvenir à une telle intégration, nous avons avant tout besoin d’une coopération régionale dans la péninsule balkanique.

 Dans les médias grecs, il est constamment question des « vues irrédentistes » de la République de Macédoine attribuées aux passages de la constitution. Cette accusation a-t-elle un fondement ? Le type de nationalisme promu par les gouvernements VMRO-DPMNE et l’utilisation de symboles de l’Antiquité sont-ils l’expression d’un tel irrédentisme ?

Au moment de l’indépendance de la République de Macédoine, on a pu entendre, dans le contexte du nationalisme grandissant de l’époque, certaines déclarations de la part du parti de droite VMRO-DPMNE selon lesquelles ils tiendraient leur prochain congrès à Thessalonique. Les déclarations de ce type sont caractéristiques du nationalisme dans les Balkans, mais elles ne constituent pas une réelle menace pour les frontières existantes dans la région. Depuis cette époque, VMRO-DPMNE a connu de multiples scissions et s’est transformée en un parti populiste. Il a utilisé le nationalisme pour assurer sa domination, mais comme il est apparu dans les transcriptions des conversations qui ont vu le jour lors du scandale des  mises sur écoute, VMRO-DPMNE avait en fait accepté des positions similaires à celles de la SDSM sur la question du nom.

Ce qu’il importe toutefois de comprendre, c’est pourquoi VMRO-DPMNE et la droite ont eu besoin de cette «antiquisation» de l’identité macédonienne. Il est clair que les nations sont un concept moderne, elles apparaissent la formation des Etats-nations. Il est également clair que les forces de droite ont besoin des mythes à la gloire de de l’État national. Mais la construction de l’identité nationale macédonienne est très atypique. Cette identité n’a pas été construite par la droite mais par la gauche parce que la gauche était républicaine et ne voulait pas que le processus de libération de la domination ottomane aboutisse à l’annexion par l’une des monarchies des Balkans. Elle s’est donc engagée sur la voie de la revendication macédonienne d’abord en tant que question de souveraineté, puis en tant que question nationale.

D’un point de vue historique, la nation macédonienne a été créée en 1944 avec la fondation de la République démocratique de Macédoine, rebaptisée plus tard République socialiste de Macédoine, au sein de la fédération yougoslave. Mais cette fédération était un Etat ouvrier socialiste, pas un Etat national. De ce fait, la droite ne pouvait pas créer un mythe national à partir d’un Etat socialiste, et l’Etat existant lui paraissait dépourvu de gloire. Pour créer le mythe nécessaire à leur récit, ils se sont alors tournés vers l’Antiquité.

En ce qui concerne les vues irrédentistes de la République de Macédoine, je pense que c’est une pure exagération qui n’a rien à voir avec la réalité. Si nous regardons la situation économique, notre économie dépend du capital grec. Si cet État veut continuer à exister, il a besoin de capitaux grecs, et le capital grec y trouve son intérêt en raison de la main-d’œuvre bon marché. Quant à l’aspect militaire, la République de Macédoine dispose de très faibles capacités. Son armée ne compte pas plus de 5.000 soldats, et leur équipement militaire est médiocre. Il n’y a pas de bases militaires à proximité des frontières, et c’est d’une façon générale la plus faible puissance militaire des Balkans. La Grèce dispose d’une capacité militaire incomparablement supérieure.

La classe capitaliste macédonienne est incapable de maintenir l’ordre social sans l’aide du capital grec et international. Par conséquent, son intérêt et celui de l’Etat macédonien n’est pas d’affronter l’Etat grec mais de construire une alliance avec lui. Le discours sur les « tendances irrédentistes » n’est donc que propagande visant à maintenir la méfiance nationaliste entre les deux peuples.

Ce qu’il faut souligner c’est que l’intérêt des travailleur.se.s de la République de Macédoine est de rejoindre la classe ouvrière grecque dans une lutte commune pour leurs droits. Les travailleur.se.s dans les deux Etats ne mènent pas une lutte différente, leur combat est commun.

 La situation politique dans votre pays a connu un changement important après l’éclatement du scandale des écoutes illégales, dans lesquel les dirigeants du gouvernement VMRO-DMNE ont été impliqués. Une importante mobilisation populaire a suivi, conduisant aux élections de 2016 et à la défaite du VMRO-DPMNE. Ces scandales ont révélé l’étendue du pillage de l’État par les politiciens au pouvoir et de la corruption qui a accompagné l’imposition de politiques néolibérales particulièrement brutales. Après les élections de 2016, une nouvelle coalition s’est formée autour du parti social-démocrate SDSM et des partis représentant la minorité albanaise. Quelle est votre évaluation de la politique menée par le gouvernement actuel dirigé par Zoran Zaef ?

Après la formation du nouveau gouvernement les gens ont pu respirer, la peur qui existait au temps du gouvernement VMRO-DPMNE a disparu, mais les institutions de l’Etat n’ont pas été réformées. De nouveaux scandales touchent les membres de la Commission électorale nationale et les indemnités qu’ils sont touchés. Un autre scandale est survenu concernant l’indemnisation des frais de voyage des députés, comme à l’époque des gouvernements VMRO-DPMNE.

S’agissant de l’économie, ce sont les mêmes politiques néolibérales qui sont mises en œuvre. Le SDSM tente de se présenter comme un parti de gauche en se livrant à des manipulations avec le salaire minimum, qui est passé de 10800 à 12000 denars (200 €). Mais une faille juridique supplémentaire a également été ouverte, permettant aux patrons d’enfreindre la loi. De cette façon, le SDSM se présente comme un parti qui se soucie des travailleur.se.s sans avoir besoin d’affronter les capitalistes. Le gouvernement a promis une nouvelle politiques fiscale basée sur la taxation progressive mais en réalité rien n’a changé, ils ne veulent pas et ne se confronteront pas au pouvoir du capital.

 Pouvez-vous nous dire comment le parti Levica (La gauche) a été formé et quels sont ses principaux objectifs ?

Après plusieurs années de mobilisations et de luttes sociales, Levica a été formé en 2016 par des membres du Mouvement pour la justice sociale Lenka et le mouvement de gauche Solidarité, deux réseaux militants de base rejoints par des personnes qui n’étaient pas membres de ces organisations. Il a été conçu comme une tentative de combler le vide sur la partie gauche du spectre politique, et de répondre à la nécessité d’un parti ouvrier, puisque les travailleurs n’avaient aucune organisation politique pour représenter leurs intérêts sur la scène politique et dans la société. L’objectif principal de Levica est de représenter l’intérêt des travailleur.se.s et des couches pauvres de la population, d’organiser les travailleur.se.s dans leur lutte et de transformer la société dans un sens socialement plus juste.

 Voyez-vous des possibilités de collaboration entre Levica et les forces de la gauche radicale grecque qui s’opposent à la montée nationaliste actuelle ?

Il ne s’agit pas simplement de possibilités. La coopération entre Levica et les forces de la gauche radicale grecque est une nécessité. La coopération entre les forces de gauche dans les Balkans est nécessaire pour constituer une plateforme balkanique qui unira la gauche dans la région. Les peuples balkaniques se sont trop souvent tournés les uns contre les autres sous l’influence des forces nationalistes et, pendant qu’ils s’adonnent à ces haines ils se font piller par leurs élites.

Seule l’action commune des forces antinationalistes permettra aux peuples de voir que celles et ceux qui se trouvent de l’autre côté de la frontière ne sont pas des ennemis, mais des personnes confrontées à des problèmes similaires, et que ces problèmes nécessitent souvent une action commune pour être résolus. Nous comptons vivement sur la coopération future avec nos camarades grec.que.s pour mener à bien cette tâche.

Source https://www.contretemps.eu/macedoine-grece-neoliberalisme-nationalisme/

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Que fait la gauche européenne devant l’extradition de Puigdemont

Tandis que reviennent en Europe les démons de l’entre-deux-guerres

Empêchons que Puigdemont subisse le sort de Companys !

30 mars par Yorgos Mitralias

Voici donc que l’indomptable Catalogne et son peuple intrépide se trouvent de nouveau, après 80 ans (!), à l’épicentre de cette tragédie européenne toujours recommencée ! Aujourd’hui comme alors les protagonistes du drame, qui menace -une fois de plus- de foutre en l’air notre vieux continent, sont exactement les mêmes : D’un coté, les présidents traqués bien que très démocratiquement élus de la République Catalane en révolte, qui demandent l’asile à nos “démocraties” européennes. Et de l’autre, l’Allemagne qui les emprisonne avant de les livrer à leurs bourreaux de Madrid qui défendent par tous les moyens “l’unité” de l’État des Bourbons et des épigones de Franco !

Aujourd’hui, en l’an 2018 de notre ère, le président destitué et recherché bien que démocratiquement élu, est Carles Puigdemont, détenu actuellement quelque part en Allemagne du nord, en attendant d’être extradé à l’État Espagnol. Hier, c’est a dire en 1940, c’était le président de la jeune République de Catalogne Lluis Companys, bien populaire et démocratiquement élu en 1934, lequel s’exile en France à la fin de la guerre civile. En 1940, il est arrêté par la police secrète de l’Allemagne nazie qui occupe la France. Le président socialiste de la République Catalane est alors livré à la Gestapo laquelle acquiesce à la demande du dictateur Franco et livre Companys à ses bourreaux fascistes Espagnols.

La suite des événements est connue et suffisamment agréable aux épigones actuels de Franco pour qu’ils l’invoquent publiquement afin de terroriser le peuple catalan. C’est ainsi que le 8 octobre 2017, c’est à dire une semaine après le referendum pour l’indépendance catalane et deux jours après le 83e anniversaire de la première déclaration d’indépendance de la Catalogne, Pablo Casado, étoile montante du parti Populaire de Mariano Rajoy, avertissait publiquement Carles Puigdemont … “qu’il pourrait connaître le meme sort que son prédécesseur Lluis Companys” ! Quel a été donc ce “sort” de Companys que Casado et ses amis de Madrid invoquent de façon si ignoble et cynique ?

La réponse est donnée dans l’article biographique de Companys sur Wikipedia : “Mais Companys fut livré à la dictature militaire franquiste par la police secrète de l’Allemagne nazie, le 13 août 1940. Jugé et condamné par un tribunal militaire, il fut, après avoir été torturé, fusillé au château de Montjuic à Barcelone le 15 octobre 19407. Il ne voulut pas qu’on lui bande les yeux et mourut face au peloton d’exécution en criant « pour la Catalogne ! »

Voici donc le “sort” que les épigones de Franco à Madrid promettent publiquement et sans vergogne à M. Puigdemont. Et notre Europe Unie “démocratique” que fait-elle devant cette barbarie ? Comment exprime-t-elle sa révolte et sa désapprobation ? Malheureusement, il n’y a ni révolte ni désapprobation de sa part. Et le pire est que cette Europe-là néolibérale et autoritaire est plutôt complice quand elle soutient activement les épigones de Franco et leurs projets meurtriers. Quand elle regarde sans broncher les procureurs de M. Rajoy en train de fouler aux pieds toute notion de démocratie en remplissant les prisons avec des dizaines d’élus et des centaines de citoyens Catalans parce qu’ils “osent” revendiquer leur liberté. Quand elle feint ne pas voir les policiers de Madrid en train d’envoyer aux hôpitaux des centaines et des milliers de citoyens Catalans qui manifestent pacifiquement et quand elle feint ne pas entendre les ministres de M. Rajoy déclarer que l’armée espagnole est prête à intervenir en Catalogne !

Mais, que dire de ce qui est encore plus décourageant, du comportement inénarrable de la gauche européenne et grecque, de la gauche de -presque- toute sensibilité et couleur. Ce n’est pas seulement qu’elle ne voit pas que les événements tragiques de Catalogne commencent à ressembler comme deux gouttes d’eau à ceux de 1936 et 1937, qui ont conduit finalement à l’énorme bain de sang de la Deuxième Boucherie Mondiale. Ni qu’elle ne comprend pas que de même qu’il y a 80 ans, ce qui se joue aujourd’hui en Catalogne est aussi son propre sort. C’est surtout que notre gauche contemporaine semble avoir perdu toute capacité de s’émouvoir et de se solidariser avec les victimes sans défense de la répression d’État quand elle voit muette et indifférente le sang couler dans les rues de Barcelone et les autocrates de Madrid fouler aux pieds jour après jour les plus élémentaires des droits démocratiques des citoyens Catalans.

Malheureusement, une fois de plus, la conclusion est bien triste : La gauche ne fait pas son travail quand l’ennemi de classe non seulement fait le sien mais il le fait trop bien. Comme par exemple le font l’Allemagne et sa classe dominante qui se prépare à extrader à Madrid le président élu de Catalogne… “dans le cadre de la très bonne collaboration de deux pays”, comme aiment répéter ces derniers jours les proches de Mme Merkel. Et en effet, la collaboration germano-espagnole est vraiment “très bonne” si on pense que les deux États continuent de payer mutuellement les pensions de ceux de leurs citoyens impliqués au début des années ‘40 dans d’horribles crimes de guerre.

Il s’agit du scandale germano-espagnol qu’ensemble avec le député Andrej Hunko du parti allemand Die Linke, nous avons révélé il y a trois ans à l’opinion publique de la Grèce, et même d’autres pays, quand à l’occasion du refus du gouvernement allemand de reconnaître les dettes et autres réparations de guerre de l’Allemagne envers la Grèce, nous révélions et dénoncions les faits… “incroyables mais vrais” suivants : Qu’en vertu de l’ accord germano-espagnol signé en 1963 par le dictateur Franco et le chancelier allemand d’alors K​onrad Adenauer, l’Allemagne se chargeait d’assurer le paiement des pensions des membres de la tristement célèbre “Division Azul” espagnole qui ont combattu aux cotés de la Wermacht au front de l’Est et durant le siège de Stalingrad. De l’autre coté, l’Espagne prenait en charge le paiement des pensions des survivants ou de descendants des membres de l’égaiement tristement célèbre “Légion Condor” nazie, responsable des crimes de guerre durant la guerre civile espagnole, et surtout d’avoir rasé au sol Guernica, le berceau de la nation basque. Nous écrivions même que, répondant à une interpellation de M.Hunko, la chancelière Merkel avait révélé devant le Parlement Allemand la somme exacte de ces pensions que l’État allemand continue de payer jusqu’à aujourd’hui !…

Alors, on ne peut que s’écrier…qu’il est beau notre monde “démocratique” si angéliquement façonné. Et force est de constater qu’une fois de plus, nos tyrans font très bien leur travail immonde car, ayant commencé -de nouveau(!)- par la Catalogne et l’écrasement de son peuple, ils sont maintenant en train de nous préparer des lendemains peut être analogues du passé le plus cauchemardesque. Mais, nous qui sommes la multitude, nous les démocrates et les gens de gauche, que faisons-nous ? Qu’est-ce qu’on attend pour faire un tant soit peu notre travail ? Qu’est-ce qu’on attend pour montrer notre solidarité aux représentants élus du peuple catalan embastillés par les Inquisiteurs de Madrid ? Qu’est-ce qu’on attend pour descendre dans la rue pour manifester notre solidarité à l’héroïque peuple de Catalogne, l’unique oasis de résistance de masse et d’exemplaire auto-organisation populaire dans toute l’Europe ? Qu’est-ce qu’on attend avant qu’il ne soit trop tard ?…

Yorgos Mitralias

Journaliste, Giorgos Mitralias est l’un des fondateurs et animateurs du Comité grec contre la dette, membre du réseau international CADTM et de la Campagne Grecque pour l’Audit de la Dette. Membre de la Commission pour la vérité sur la dette grecque et initiateur de l’appel de soutien à cette Commission.

Source http://www.cadtm.org/Empechons-que-Puigdemont-subisse

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