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La Grèce sauvée? …Pas sûr

Par rédaction

La Grèce est sauvée ? … Pas sûr après les privatisations et le recul industriel ! Par Gabriel Colletis

Qu’il s’agisse du gouvernement grec dont le Premier ministre, Alexis Tsipras, a mis récemment pour la première fois une cravate pour signifier qu’il considérait qu’il avait résolu le problème de la dette ou des institutions de la célèbre « Troïka » – le FMI, la BCE et la Commission européenne- tout le monde semble s’accorder pour considérer que la Grèce est sauvée. Par Gabriel Colletis*, Professeur d’Economie à l’Université de Toulouse 1

Après trois mémorandums, des dizaines de réformes ayant exténué le pays, la Grèce, assainie, serait enfin sortie de ses difficultés et pourrait retrouver enfin le chemin de la croissance et même se financer toute seule sur les marchés.

Observée d’un peu près, la réalité apparaît tout autre

En dix ans, le recul des salaires et des pensions de retraite est considérable, supérieur à 30%. La baisse des dépenses publiques de santé et d’éducation dépasse les 40%. La pression fiscale n’a jamais été aussi forte et on ne compte plus les impôts nouveaux. Le PIB s’est effondré (-25%) de même que les investissements (-40%).

Derrière ces chiffres un peu froids, on découvre une vie quotidienne des Grecs qui s’est très gravement détériorée : le chômage touche près du quart de la population active, la pauvreté s’est largement étendue, l’angoisse face à la maladie touche tout le monde, des centaines de milliers de jeunes Grecs (les mieux formés) ont quitté la Grèce à la recherche d’un emploi, hypothéquant ainsi l’avenir du pays. Dans certaines îles, y compris les plus touristiques comme Corfou, les ordures s’accumulent le long des trottoirs sur des dizaines de mètres de long.

Tout cela pourquoi ou avec quelle justification ? Faire tomber le poids de la dette publique afin d’assainir l’économie, a-t-on expliqué aux Grecs comme aux autres peuples des autres pays européens. Eh bien, cette dette n’a nullement reculé et avoisine toujours les 180% du PIB ! La Grèce n’a pas seulement perdu dix ans, elle a, en réalité, perdu son avenir.

Les privatisations opérées privent la Grèce des moyens de son développement. Le port commercial du Pirée a été cédé aux Chinois qui l’utilisent pour déverser leurs marchandises dans l’Europe entière. Les aéroports et nombre d’infrastructures essentielles (chemins de fer, eau, distribution de l’électricité) ont également été vendus à des groupes étrangers (allemands principalement, mais aussi en partie français grâce à l’invitation faite aux firmes françaises par l’ex-Président Hollande d’aller faire de bonnes affaires en Grèce).

Un sauvetage en trompe-l’œil

Contrairement aux illusions entretenues quant à la possibilité d’un redémarrage des exportations industrielles grâce à la baisse des salaires et la fin des conventions collectives, la balance commerciale grecque reste très gravement déficitaire. Les importations de la Grèce (des appareils de communication électroniques aux produits alimentaires en passant par les vêtements, l’équipement de la maison, les automobiles, les machines de toutes sortes qui sont employées dans l’agriculture et ce qui reste de l’industrie) excèdent, en effet, largement ses exportations. Et les recettes du tourisme sont loin d’être suffisantes pour couvrir ce déséquilibre.

Le problème largement ignoré est ainsi moins la faiblesse des exportations que l’extrême dépendance de la Grèce à ses importations. Ici réside le véritable problème de l’économie grecque et non dans la dette de l’État.

Les gouvernements grecs successifs -dont l’actuel- portent, avec la complicité de fait du FMI et des institutions européennes, une responsabilité écrasante dans ce qui est non le sauvetage, mais le naufrage de la Grèce. Ils n’ont pas compris que l’urgence était d’engager un véritable programme de développement du pays centré sur un renouveau des activités productives orientées vers la satisfaction des besoins fondamentaux des Grecs (industrie et agriculture) tout en permettant de réduire les importations.

Ce développement aurait de plus permis à l’État d’élargir la base de ses recettes fiscales, de réduire ainsi son déficit et à terme sa dette.

La politique économique conduite avant comme après 2015 a comme seule cohérence d’obéir à la doxa dominante. Elle aura été néfaste au pays comme à sa population.

* Gabriel Colletis est Professeur d’Économie à l’Université de Toulouse 1-Capitole et Président de l’Association du « Manifeste pour l’industrie » http://manifestepourlindustrie.org/.
Il a publié un ouvrage intitulé « Exo apo tin Krisi », Editions Livanis 2014. Il a conseillé plusieurs membres du gouvernement grec jusqu’en juillet 2015.

Source https://www.latribune.fr/opinions/tribunes/la-grece-est-sauvee-pas-sur-apres-les-privatisations-et-le-recul-industriel-785977.html

Scandale Novartis Grèce

Par rédaction

LA NORMALITÉ SCANDALEUSE DE L’INDUSTRIE PHARMACEUTIQUE par Théodoros Mégaloéconomou, psychiatre, Athènes Traduction Emmanuel Kosadinos 

Ce n’est certainement pas un « cas grec» isolé.

L’implication présumée de longue date de personnalités politiques, d’anciens ministres et premiers ministres, soupçonnés avoir bénéficié de pots de vin d’une hauteur considérable de la part de Novartis, est un scandale aux dimensions énormes et tentaculaires, qui cause de nouveaux tremblements dans un système politique multiplement défaillant, corrompu et en crise constante. Mais la question  ne concerne pas uniquement  les pratiques de Novartis, ni n’est un « cas grec» isolé.

La multinationale NOVARTIS est la troisième compagnie pharmaceutique sur le marché européen La multinationale NOVARTIS est la troisième compagnie pharmaceutique sur le marché européen

Ce n’est que l’expression de la « normalité » scandaleuse du mode de fonctionnement de l’industrie pharmaceutique dans son ensemble (un secteur qui est le deuxième plus rentable dans le monde entier après l’industrie de guerre) dans le cadre d’une « Alliance Sacrée » mutuellement bénéfique avec le système politique et, bien sûr, une grande partie du corps médical, des Universités, mais aussi les médias, etc.

Un exemple à citer est le cas impliquant George Bush Jr., qui en tant que gouverneur du Texas avait soutenu la mise en œuvre d’un projet pilote, avec la participation d’un certain nombre de sociétés pharmaceutiques, visant à l’administration d’antipsychotiques et d’antidépresseurs dans les âges de moins de 18 ans. Ces compagnies pharmaceutiques ont contribué par trois fois plus d’argent à la campagne électorale de Bush aux élections de 2000 qu’à celle de Kerry. Sur les 1,6 milliard de dollars de contributions d’Eli Lilly à la campagne électorale – dont le médicament antipsychotique Zyprexa (très onéreux encore à l’époque) était le premier proposé par le projet, 82% sont allés à Bush. 

Après son élection, Bush a favorisé la mise en œuvre obligatoire du projet au niveau fédéral pour faire le diagnostic des troubles mentaux «pas encore diagnostiqués» (ni même manifestés) dans l’ensemble de la population et même d’enfants d’âge préscolaire – pour aboutir, dans un deuxième temps, à l’administration d’antidépresseurs et d’antipsychotiques, par millions d’ordonnances, même chez des nourrissons de moins de 2 ans. Comme il a été révélé, des hauts fonctionnaires et cadres placés à des postes critiques pour la mise en œuvre du projet d’administration des médicaments, ont reçu de l’argent et des cadeaux des compagnies pharmaceutiques pour certifier la validité d’un projet, qui n’était qu’un effort difficilement masqué des entreprises pharmaceutiques pour accéder à un marché plus large pour des antidépresseurs et des antipsychotiques coûteux, par le biais d’un plan gouvernemental obligatoire, qui leur ouvrait les portes de domaines de la vie des gens qui jusque-là étaient hors de leur compétence.

De toute évidence ce n’est pas un hasard que la tendance internationale à surdiagnostiquer le TDAH (trouble d’hyperactivité avec déficit de l’attention) chez les enfants, et même que tout enfant «vif» (dans un système éducatif en état d’effondrement et / ou une famille crise ) a tendance à être diagnostiqué comme « TDAH » soit en rapport avec la promotion de la prescription (souvent déraisonnée) de la Ritaline (méthamphétamine, un dérivé de l’amphétamine), produite par Novartis (en position dominante sur le plan commercial par rapport aux médicaments similaires, produits par d’autres compagnies ). Il s’agit d’un médicament qui, présenté comme «la pilule de l’obéissance », mais qualifié par des experts internationaux « la cocaïne des bébés», a été également présenté (notamment en Grèce), par les médias, comme «le médicament qui aide l’élève et l’étudiant pour préparer ses examens» peu importe si il peut le rendre par la suite dépendant, car il s’agit d’une substance fortement addictive. 

Le scandale Novartis ne sont pas seulement les pots de vin

La question donc qui a vu le jour à travers le scandale Novartis ne doit pas se limiter aux pots de vin des politiques et des autres (aussi grave que cela soit) ni dégénérer en petite guéguerre tactique dont l’enjeu serait la survie politique des uns et des autres, en en cycle sans fin de discours sur la corruption, dont l’expérience nous enseigne qu’ils s’éteignent par l’oubli, mais elle doit s’approfondir et atteindre les racines du problème, le champ global dans lequel évolue la production et la diffusion sur le marché des médicaments et la relation avec le système de santé. Ainsi, il y a besoin de bien comprendre pourquoi sur un tel terrain, les pots de vin sont la règle, pour que soient apposées les signatures nécessaires à la mise en place d’arrangements favorables aux profits des compagnies. Cela en dépit des intérêts de la Santé à laquelle le médicament est supposé rendre service. 

Ainsi la question, ne concerne pas seulement Novartis, mais toutes les compagnies pharmaceutiques, qui, dans la société capitaliste dans laquelle nous vivons, se sont appropriées la production exclusive d’un « bien social » par excellence tel le médicament, comme s’il s’agissait d’une marchandise, générant des profits et des bénéfices élevés sur les bourses internationales lorsque l’entreprise « va bien » avec des profits en croissance, au présent et en prévisionnel. La production et la diffusion, le marketing du médicament, sont essentiellement en rapport avec cela. Elle est bien là la contradiction qui régit sa production en tant que marchandise. Toutes connaissances scientifiques, tous objectifs thérapeutiques à l’origine de son invention et de sa production doivent être en adéquation avec des besoins de rentabilité. Dans tout autre cas de figure (sauf exception), l’usage thérapeutique doit être modulé et promu de manière qui non seulement ne nuise à la rentabilité mais qui, au contraire, l’augmente. 

Systématiquement donc, les sociétés pharmaceutiques:

  • Occultent les résultats des essais lorsqu’ils sont défavorables à l’utilisation des médicaments qu’elles produisent et font une diffusion démesurée de ceux qui leur sont favorables.
  • Payent des médecins et des universitaires pour qu’ils communiquent dans des congrès et conférences scientifiques au sujet de leurs produits et en fassent la promotion,
  • S’y déploient pour multiplier les indications de leurs médicaments – d’une seule maladie, tout à coup à plusieurs (ceci est la règle, tout en particulier pour les psychotropes, car cette démarche est beaucoup moins coûteuse pour les laboratoires que de fabriquer un nouveau médicament);
  • La plupart des articles publiés au niveau international sur « les grandes qualités » de leurs produits sont concoctés par ces mêmes compagnies pharmaceutiques qui les produisent et signés par des prête-noms, autrement appelés « écrivains fantômes» (« ghost writers ») des personnalités scientifiques connues, payées pour simplement apposer leur signature, comme l’a révélé l’hebdomadaire britannique «The Observer» le 7/12/2003. 

En 2012, une amende de 3 milliards dollars US a été imposée à GlaxoSmithKlein (GSK) suite à une série d’infractions en rapport avec la « promotion illégale de médicaments soumis à ordonnance et omission de données de sécurité. » Une partie de cette amende, la somme de 600 millions, de dollars a été allouée à des « témoins protégés » (tels que les « trois du FBI » qui se sont rendus aux États-Unis pour l’affaire Novartis), dans la mesure où aux États-Unis il existe un système contrasté, avec d’une part une large immunité pour l’industrie pharmaceutique et d’autre part des sanctions sévères pour les infractions, jugées à l’aune des intérêts matériels en jeu. La FDA 1 elle-même, chargée d’autoriser la circulation des médicaments, vacille entre ces deux extrêmes – entre les amendes sévères et la tolérance tacite.  

FDA: Food and Drug Administration (l’Autorité suprême du médicament aux Etats-Unis)FDA: Food and Drug Administration (l’Autorité suprême du médicament aux Etats-Unis)

Une collusion structurelle entre médecins et compagnies pharmaceutiques

Examinons maintenant certains aspects de cette collusion structurelle (qui n’implique certainement pas tous les médecins, mais hélas une majorité), telle que nous l’éprouvons dans notre pays la Grèce, (méritant d’être) connue de tous. 

–  Commençons par le siège quotidien et très envahissant, mais accepté comme la norme, de tous les hôpitaux publics, les cliniques, etc., par les visiteurs médicaux. La fonction de ces visiteurs médicaux n’a rien à voir avec une supposée « information » du médecin sur les médicaments (qui en général ne concerne pas de nouveaux produits, mais surtout et sans cesse des bien vieux et connus), mais l’asservissement du praticien (à travers diverses manipulations) à la routine de prescription du médicament promu. Il s’agit plutôt de transactions « de mise au point », concernant parfois le nombre d’ordonnances du médecin avec l’ d’une « récompense » en proportion, etc. Les infirmier-e-s sont également abordé-e-s (notamment les cadres) et, dans chaque hôpital, toutes les personnes en contact avec la distribution des médicaments. La question est la suivante: quelle est l’utilité de ces visites soi-disant informatives des visiteurs médicaux ? Pourquoi, pour un «problème scientifique», d’autres manières pour accéder aux «connaissances et informations scientifiques» ont-elles été exclues? Mais peut-être, parce qu’il s’agit tout simplement de marketing. 

–  Les Congrès intégralement défrayés pour tous les médecins et les internes (dont la formation et son financement sont désormais de la compétence de l’industrie pharmaceutique) dans des hôtels cinq étoiles, souvent tenus dans des lieux « exotiques », dans lesquels « brille » une « science » bien manipulée par l’industrie pharmaceutique. Des Congrès qu’on peut difficilement distinguer des foires commerciales (médico-pharmaceutiques) où, derrière les stands des exposés, on peut trouver l’espace où a lieu la présentation orale des produits. Et même, lors de ces dernières années, il ne suffit plus de mentionner dans le programme des Congrès, les sociétés pharmaceutiques qui les parrainent (deux, trois, quatre, cinq, etc.), mais sont organisées des « tables rondes » à part, qui ont lieu, comme indiqué, avec « noble parrainage… de Janssen… d’Eli Lilly…, de Ludbeck etc. » On est en droit de se demander, qu’est-ce qui est précisément sponsorisé lors de ces « tables rondes» par les sociétés pharmaceutiques ? Est-ce les bouteilles d’eau, le micro, le pupitre de l’intervenant, quoi donc ? 

En mai dernier (2017) précisément, lors du Congrès annuel de la Société Hellénique de Psychiatrie a été annoncé la création, dans le Service de Psychiatrie d’un Hôpital Général, une «clinique de la clozapine» dédiée, un médicament antipsychotique, qui a des effets secondaires graves, et qui était censé être, jusqu’à présent, un moyen de «dernier recours». On comprend que lorsqu’on crée une clinique dédiée à un seul médicament, cela favorisera son utilisation croissante. Il s’agit, bien sûr, du Leponex, commercialisé par Novartis. Alors que s’il existait un réseau intégré de services communautaires de soins psy, le recours à Leponex pourrait être bien moindre. 

–  Une « clinique spéciale » basée sur le même concept a été également annoncée pour l’administration d’antipsychotiques injectables à effet prolongé (retard), pour y administrer trois médicaments relativement nouveaux et coûteux (mais pas plus efficaces que les anciens) qui se disputent aujourd’hui pour la part du marché. 

– Une « innovation » plus récente, importé celle-là comme d’autres du monde anglo-saxon, sont les accords passés entre les médecins des hôpitaux publics et les labos pharmaceutiques, les gens des labos se déplaçant chez des patients qui sont indiqués par les médecins pour leur administrer des antipsychotiques injectables à effet prolongé afin que les produits des labos pharmaceutiques ne restent pas invendus ni inutilisés. A ce propos, en Angleterre cela a été proposé depuis 2012 comme projet officiel, pour parer soi-disant à l’effondrement du NHS. Ainsi la coopération des médecins généralistes et des labos pharmaceutiques a été officialisée pour traiter des patients (notamment des cas au diagnostic incertain, difficiles à traiter) et notamment, ont-ils dit, pour améliorer la compliance des patients au traitement. Car les visiteurs des labos ont toute latitude pour sélectionner dans la file active des médecins généralistes les patients susceptibles de « bénéficier » du traitement pat les médicaments du labo. Nous ne sommes pas très loin, dans la petite Grèce, de ces « sommets scientifiques » atteints dans le monde anglo-saxon. 

– Que dire encore de la Société Hellénique de Psychiatrie (ΕΨΕ), qui lors de la Journée mondiale de la santé mentale (10/10/17), dédiée au thème « Santé mentale et travail », a invité pour premier orateur, le président de l’Association des entreprises pharmaceutiques de Grèce (ΣΦΕΕ / SFEE) le successeur de l’inqualifiable K. Frouzis2? 

–  Il y a eu enfin des dans des hôpitaux publics des « essais » de médicaments psychotropes déjà en circulation (donc accrédités) sans qu’il ne soit jamais étudié dans quels termes et sous quelles conditions ces « essais » furent menés, car ce fut même parfois au détriment des soins des patients qui n’y participaient pas.  

Le Ministère de la Santé est loin tout ça. Il traite de la gestion des conflits d’intérêts (facturations, etc., en application des clauses des mémorandums), à défaut d’aborder la racine du problème. Une question, en fait, est de savoir si les médecins des différents comités du Ministère entretiennent des relations avec des sociétés pharmaceutiques, s’ils se rendent par exemple à leurs Congrès «intégralement défrayés». Y a-t-il parmi eux des personnes qui effectuent, par exemple, des essais et des études commandées par des laboratoires pharmaceutiques? Font-ils la promotion, par quelque moyen que ce soit, de médicaments d’une compagnie – par exemple, par le biais de conférences supposées scientifiques, etc. (comme pour les antipsychotiques à action prolongée)?

Et que se passe-t-il (encore) à l’Université ? 

L'industrie pharmaceutique (avec celle de l'armement) est la plus lucrative dans le capitalismeL’industrie pharmaceutique (avec celle de l’armement) est la plus lucrative dans le capitalisme

Pas de solution tant que le médicament reste une marchandise

Clairement, il n’y aura pas de solution au problème tant que le médicament restera entre les mains de l’industrie pharmaceutique. Tant que le médecin continue à agir comme «intermédiaire» entre la compagnie et l’usager, à qui il / elle doit administrer le médicament / produit pour son traitement. C’est à travers cette relation que se déploient tous les tentacules de la collusion. 

Parce qu’il n’est pas seulement question de la collusion diffuse et de la corruption du système. C’est la «façon même de penser et de pratiquer» du corps médical qui est façonnée et manipulée par ce qui est contrôlé, constitué et proposé en tant que «connaissance scientifique» (en tant que thérapie, «médicament approprié», etc.) – lorsque la connaissance scientifique est manipulée par la logique et les pratiques de rentabilité des sociétés pharmaceutiques – toujours en ligne avec le biopouvoir  dominant. Ce sont ces choix qui sont proposés même aux médecins qui ont les meilleures intentions, ceux qui se soucient avant tout de leurs patients. 

En Grèce, en France, partout dans le monde il faut lutter pour faire advenir des solutions radicales et humanistes!En Grèce, en France, partout dans le monde il faut lutter pour faire advenir des solutions radicales et humanistes!

Bien que cela apparaisse comme un projet « hors sol », la nationalisation de l’industrie pharmaceutique, sous le contrôle des travailleurs et de la société, est la seule réponse aux scandales en cours et celui-là, perpétuel, qui est devant nous – le scandale de l’existence même de l’industrie pharmaceutique privée et de la production du médicament en tant que marchandise. La solution intermédiaire n’existe pas – et cela, encore une fois, sera éprouvé en cours de route.

1 FDA: Food and Drug Administration

2 K. Frouzis, ancien président de l’Association des entreprises pharmaceutiques de Grèce (ΣΦΕΕ / SFEE), dont la responsabilité lourde dans le scandale Novartis Grèce serait quasiment prouvée

Source: http://www.efsyn.gr/arthro/skandalo-novartis-einai-i-skandalodis-kanonikotita-olis-tis-farmakoviomihanias

 

Université d’été solidaire et rebelle des mouvements sociaux et citoyens à Grenoble

Par rédaction

Le collectif Grèce-austérité vous invite à participer à

L’Université d’été solidaire et rebelle des mouvements sociaux et citoyens

qui se tiendra cette année à Grenoble

du 22 au 26 août 2018

sur le campus universitaire

Dans le prolongement de nombreuses initiatives citoyennes, cette Université d’été sera un moment important de débats et de formation pour la construction d’initiatives communes et d’actions concrètes, ainsi qu’un temps convivial pour toutes celles et ceux qui partagent des valeurs de solidarité face à la casse imposée par le néolibéralisme. Fin août 2018, cette Université d’été sera un temps fort pour toutes celles et ceux qui agissent aujourd’hui et/ou souhaitent rejoindre un espace commun pour contribuer à construire un monde juste, écologique et solidaire.

ATTAC et le CRID sont à l’initiative de cette édition de l’Université d’été, et ont associé de nombreuses organisations et mouvements pour en co-construire le contenu et participer concrètement à son organisation.

Le programme https://ue2018.org/spip.php?page=programme

Les organisateurs https://ue2018.org/Avec-qui

Pourquoi cette université https://ue2018.org/Pourquoi-cette-Universite-d-ete

Comment participer https://ue2018.org/Participez

Les informations pratiques https://ue2018.org/Informations-pratiques

Le site organisateur https://ue2018.org/

On recherche encore des hébergements solidaires : Vous habitez l’aire urbaine grenobloise et pouvez offrir un hébergement lors de l’Université d’été (UE). Merci alors de remplir le formulaire <https://ue2018.org/Offrez-un-hebergement-militant-aux-participant-e-s-a-l-Universite-d-ete> . Ces données permettront de vous mettre en relation avec des participant-e-s susceptibles d’être intéressé-e-s par votre offre (à noter que ces données ne seront pas rendues publiques).

 

Grèce. Le vent mauvais de l’austérité souffle sur les flammes

Par rédaction
par Rosa Moussaoui publié le 26/7/18 l’Humanité

Les politiques de protection de l’environnement et de prévention des incendies ont été, elles aussi, sacrifiées sur injonction de la troïka. Le budget des pompiers a été tailladé. Conséquence : une vulnérabilité grecque accrue face au feu.

«Plus de nourritures ni de vêtements dans la municipalité de Marathon. Ils ont besoin de volontaires. » « Hébergement à Isthmia pour douze personnes dans les zones touchées ». Entre les cruelles photographies d’enfants disparus, des messages de solidarité, comme des lueurs d’espoir dans le paysage de cendres laissé par les incendies en Attique et dans le nord du Péloponnèse. Sur les médias sociaux, les Grecs s’organisent, répercutent localité par localité les besoins des sinistrés, eau, vivres, vêtements, médicaments, relaient les appels au bénévolat, proposent un toit à ceux qui n’en ont plus. Hier, alors que le pays comptait encore ses morts, un extraordinaire élan collectif prenait corps, comme celui qui a permis aux Grecs de rester debout face au sadisme austéritaire de la troïka, comme celui qui a rendu possible l’accueil de centaines de milliers de réfugiés bloqués aux portes de l’Europe forteresse.

Les pompiers manquent cruellement d’équipements

Encore une fois, la société supplée les défaillances d’un État laminé par huit ans d’austérité. Les politiques environnementales, la lutte contre les incendies, la gestion durable des espaces forestiers n’ont pas échappé aux sévères restrictions budgétaires imposées au pays. Dès 2012, le budget alloué à la sécurité civile a été amputé de 25 %. Quant aux pompiers, ils ont vu leurs effectifs tailladés. D’après les statistiques de l’Association internationale des services de secours et d’incendie, leur nombre, en Grèce, est passé de 18 559 en 2008 à 15 660 en 2015. Ils disposaient en 2009 d’un budget de 452 millions d’euros. L’an dernier, celui-ci plafonnait à 354 millions d’euros… Conséquence : les pompiers manquent cruellement d’équipements, de protection individuelle appropriée et ne disposent pas même d’un uniforme de rechange. Dans les zones touchées cette semaine, certaines bornes d’incendie étaient tout simplement hors service, faute d’entretien. Le ministre de l’Intérieur, Panos Skourletis, a explicitement mis en cause l’étranglement austéritaire : « L’achat de nouveaux avions ou hélicoptères est nécessaire, depuis 2000, pas une seule vis n’a été remplacée », a-t-il expliqué à l’agence de presse Ana. Même le « fonds vert » créé en 2010 par voie législative pour financer des programmes de protection de l’environnement, de surveillance des zones protégées, de lutte contre les incendies et de reforestation n’a pas été épargné par la voracité des créanciers. L’essentiel de ses ressources est aujourd’hui affecté… au remboursement de la dette !

Les dangers d’un urbanisme anarchique

Au-delà des moyens consacrés à la lutte contre les incendies, les politiques de prévention, elles aussi, ont été sacrifiées. Les plans locaux et régionaux qui prévoient l’ouverture de voies pour faciliter l’accès aux zones forestières en cas de feu, l’installation de réserves d’eau et le débroussaillage des espaces exposés aux risques d’incendie ne sont pas, ou peu, mis en œuvre. Ces plans, lorsqu’ils sont élaborés, ne revêtent d’ailleurs, du point de vue de la loi, aucun caractère contraignant : ce sont de simples compilations de recommandations.

Ces failles dans les stratégies de prévention se conjuguent pour le pire avec les dangers d’un urbanisme anarchique qui laisse proliférer depuis des décennies, surtout en bord de mer, des constructions souvent illégales, dispersées sur des zones plantées d’essences pyrophiles, comme le pin. C’était le cas à Mati, localité rayée de la carte à une quarantaine de kilomètres au nord-est d’Athènes, où se concentrent l’essentiel des victimes des incendies, cette semaine. « Les pins étaient vieux, très hauts et gros : tout le combustible nécessaire pour que les flammes enflent et courent, dégageant une énorme charge thermique », explique à l’AFP l’ingénieur des eaux et forêts Nikos Bokaris. « Même dans des pays disposant d’énormes moyens de lutte contre le feu, le défi posé par la coexistence entre tissu urbain et milieu forestier est énorme », souligne encore Kostis Kalambokidis, géographe et expert en catastrophes naturelles. Là encore, les injonctions de la troïka ont aggravé la vulnérabilité du pays face aux incendies. Au nom de la promotion des investissements touristiques, les créanciers ont dicté à la Grèce des lois favorisant le bétonnage de zones écologiquement sensibles, légalisant les constructions illicites et encourageant la vente du littoral à la découpe. « Le feu n’a pas attendu la crise pour brûler, mais il est certain que l’assèchement financier des services publics n’arrange rien », résume Nikos Bokaris. Comment, dès lors, ne pas entendre des accents de cynisme dans les déclarations de Jean-Claude Juncker, lorsqu’il promet que la Commission européenne qu’il préside « n’épargnera pas ses efforts pour aider la Grèce » ? Athènes, qui a déclenché le mécanisme européen de protection civile, a reçu les offres d’aide de Chypre, de l’Espagne, de la France, de la Bulgarie, de l’Italie, du Portugal et de la Croatie. Mais, déjà, le bilan de ces feux meurtriers dépasse celui des terribles incendies de 2007. Cette année-là, 77 personnes avaient péri dans le Péloponnèse et en Eubée.
Rosa Moussaoui
Source https://www.humanite.fr/grece-le-vent-mauvais-de-lausterite-souffle-sur-les-flammes-658534

Grèce : incendie, solidarité et colère

Par rédaction

LA GRÈCE BRÛLE… DEUIL, SOLIDARITÉ, COLÈRE ! par Constant Kaimakis

La Grèce brûle…encore une fois. Après les terribles incendies de 2007 du Péloponnèse et d’Eubée, les médias s’accordent à qualifier les incendies de ces derniers jours comme les plus terribles et meurtriers de l’ histoire récente de la Grèce.
Qu’importe les chiffres… Au bout du compte ce seront sûrement encore trop de morts et de blessés, de pauvres grecs traumatisés déjà durement frappés par 10 années de crise.
7… 12… 40… ou plus de départs simultanés de feux dans des zones différentes, réparties sur des fronts géographiques éloignés ( Attique, Crète, Péloponnèse ) des villes durement touchées: KINETA, VOUTZA, MATI, NEA MAKRI, KALAMOS, OROPOS, RAFINA, CORINTHE, environs de CHANIA … et encore et toujours des milliers et des milliers d’hectares partis en fumée, maisons, voitures, hôtels, clubs de vacances… rien n’aura résister cette fois aux vents de feu déchainés…
Après des inondations fin 2017, renouvelées en juin 2018 , ces incendies , eux aussi suivi d’inondations hier après midi à Athènes sont là pour nous rappeler que désormais il faudra compter avec une dialectique Incendie/Inondation: au vu du réchauffement climatique et des dérèglements engendrés, il y aura de plus en plus de cycles alternant pic de chaleur ,et donc incendies, et pic pluviométrique, et donc inondations… Au moment où brûle la Grèce, les forêts Suédoises, le nord de l’Europe mais aussi…le cercle polaire comptent des incendies géants ! 
Si jusqu’ici en Méditerranée, nous savions que nous devions compter avec ces incendies ravageurs et depuis peu avec cette alternance incendies/inondations, parfois, comme en Grèce, cela peut prendre une tournure encore plus dramatique car à la crise environnementale vient se rajouter des crises économico-sociales et politiques.

3 jours de deuil, bien sûr…

Une formidable solidarité … encore et toujours, dans un pays qui connait la résistance , qui sait se relever et rebondir à chaque nouveau drame. Avec des formes inédites … dues à un autre drame, celui des Migrants-Réfugiés, qui sont aujourd’hui une composante démographique de la population vivant en Grèce et qui n’ont pas hésiter à venir apporter leur soutien avec leurs très faibles moyens , et à venir donner leur sang, parfois leur seule et dernière richesse…

Deuil… Solidarité… mais déjà la COLÈRE …

Car bien sûr les grecs sont malheureusement aguerris en matière d’incendie. 
Fin août 2007, 77 personnes avaient péri dans des incendies de forêts sans précédent, qui avaient ravagés 250.000 hectares dans le Péloponnèse-sud et l’île d’Evia (nord-est d’Athènes). En 2012, cinq personnes accusées d’avoir des responsabilités dans ces incendies ont été condamnées à dix ans de prison avec sursis par un tribunal du Péloponnèse: un vice-préfet, un ancien maire, le chef des pompiers locaux, un pompier saisonnier et une femme accusée d’avoir provoqué un incendie alors qu’elle faisait la cuisine. 
Les grecs pensaient que les « autorités » comme ils disent en avaient tirer les leçons…
Cette fois, à MATI, qui semble avoir été l’épicentre de la terreur incendiaire, on parle encore des mêmes causes: une urbanisation dense et anarchique, l’absence de plan d’évacuation… Pire, dans cette cité balnéaire construite dans les 60’ on a pas hésité à sacrifier des forêts entières pour construire au milieu des Pins… Le témoignage de Μαργαρίτα Καραβασίλη , ex-secrétaire du corps des inspecteurs de l’environnement dans une interview à Realfm 97,8 rapportée par le Journal des Rédacteurs, est édifiant . Elle affirme que L’État est corrompu à tous les niveaux : les plans d’urbanisation de cette zone ont subi des pressions des constructeurs, architectes, urbanistes et propriétaires de l’époque quitte à donner quelques bakchichs…Pour elle, « cette zone n’est jamais entrée dans le projet urbain  » de Néa Makri dans le respect de la législation. Le développement urbain des 80′-90′ a généré de grosses contradictions avec notamment toute la difficulté de « normaliser » le territoire au vu des législations actuelles. Dans une zone à 80% forestière… l’ urbanisation galopante s’est faite à l’arrache ! et ce depuis les 60’…sans respect de l’environnement, de la sécurité des biens et des gens… Et elle conclut en disant que dans la dernière phase de développement urbain pour la période 2006-2008, « la pression a été très forte dans une zone qui comportait déjà de nombreuses irrégularités… maisons, hôtels, clubs de vacances sont arrivés jusqu’au littoral, mais avec des clôtures, et l’impossibilité souvent d’accéder à la mer. À Mati où s’est produit la tragédie, il semble qu’il n’y avait plus d’accès à la plage car c’était devenu des  » StockYards » ( parc à bestiaux…) » Tout est dit… Et les photos et vidéos vus ces jours-ci témoignent de ce piège où le vent de 9-12 beaufort a soufflé comme un lance flamme sur les gens piégés dans leur voiture , leur maison, et même sur les plages pour celles et ceux qui ont pu y accéder.
Et puis il y a les 10 années de crise, avec leurs 4 mémorandum et leur arsenal de mesures austéritaires qui ont cassé les Services Publics de la Protection, de l’Environnement, et l’ensemble des autres Services publics.Dans ces cas de crise majeure, on mesure alors l’étendu des dégâts: 
– dégraissage des effectifs POMPIERS et PROTECTION CIVILE ( _ 4000 postes) et pb de leur STATUT NON PERMANENT ( qui a valu de nombreuses grèves, manifestations etc…) , 
– NON RENOUVELLEMENT de matériel, vétuste, mal adapté aux grands feux de forêts ,
– AFFAIBLISSEMENT des administrations concernées ( pb de coordination des autorités, manque d’agents souvent en Burn Out et surchargés, etc…) . 
On peut aussi y rajouter la question de la RÉFORME FORESTIÈRE votée cette année qui a provoqué des grèves d’éleveurs/agriculteurs en janvier dernier. 
Enfin, d’une façon générale l’impact des politiques austéritaires dans la vie quotidienne des grecs: Transports, Santé, Environnement, Écologie etc… Cet ensemble, et sûrement encore d’autres aspects, fait, font que en cas de crise grave liée à un pic climatologique ( Chaleur/Incendies etc…mais il y a qcqs semaines c’était les INONDATIONS…), ces MANQUES, ces DIFFICULTÉS etc… se TRANSFORMENT en VECTEURS DRAMATIQUES, en CAUSES MORTELLES…

C’est pourquoi la colère ne peut qu’éclater chez les pompiers qui avaient averti des risques qu’on prenait et qui expliquaient qu ‘ils ne luttaient pas pour des « privilèges » …mais pour la sécurité des gens…, chez les personnels de santé qui ont déjà bien du mal à gérer le « quotidien normal » des équipements sanitaires et sociaux…imaginez en temps de crise avec des grands brulés, blessés graves etc… jusqu’aux légistes qui ont du mal à identifier les corps par manque de moyens et d’infrastructure.
Et la colère des habitants aussi ,qui en plein deuil national ont envahi le Conseil municipal de Marathon: http://www.iefimerida.gr/…/entasi-sto-dimotiko-symvoylio-ma…
Car par manque de moyens dus à des services publics fracassés, on a du mal à avoir de l’eau, de l’électricité, des médicaments, des soins …

Les enquêtes en cours diront sûrement qui sont les « criminels » …

Mais certains aiment à rappeler que L’État, LES GOUVERNEMENTS passés et actuels ont du mal à faire respecter les articles de la Constitution grecque quand à la protection de l’environnement : Article 24 – Constitution de Grèce – Protection environnement Article 117 – Constitution de Grèce – propriété rurale,forêts,expropriation,zones d’habitation cf http://kinisienergoipolites.blogspot.com/2018/07/24-117.html

PLEURER LES MORTS ET LES BLESSÉS, DÉCRÉTER 3 JOURS DE DEUIL NATIONAL , FAIRE APPEL À L’AIDE INTERNATIONALE…etc C’EST BIEN SÛR LE MINIMUM , mais cela ne gommera pas d’un coup de baguette magique 10 ans de CRISE, 10 ans d’Austérité, 10 ans de CASSE des SERVICES PUBLICS !

 

Migrants: «La collaboration entre Rome et Tripoli passe pour assassine»

Par rédaction

Publié par Alencontre le 19 – juillet – 2018 Par Dominique Dunglas

A peine hissée hors de l’eau par les secouristes de l’ONG Proactiva Open Arms, les yeux hagards, Josepha est en état de choc, incapable de parler, déshydratée et en hypothermie après avoir dérivé pendant 48 heures accrochée à un morceau d’épave. Au second plan, gisent sur une planche de bois flottante le cadavre d’une autre femme et celui d’un enfant de 3 ou 4 ans. La photo de cette Camerounaise de 40 ans est à la une des principaux quotidiens transalpins, le nouveau symbole du drame qui se joue tous les jours entre les côtes de l’Afrique et celles de l’Europe.

Josepha était à bord d’un canot pneumatique se dirigeant vers l’Italie, avec à son bord 165 migrants, dont 39 femmes et 12 enfants, intercepté lundi soir par les gardes-côtes libyens. Conformément aux accords passés avec l’Italie, les soldats ont transféré les migrants sur leur vedette pour les ramener sur les côtes libyennes. Tous? Non.

Selon Oscar Camps, le fondateur de Proactiva Open Arms, deux femmes et un enfant ont refusé de monter à bord du bateau des gardes-côtes par crainte de retourner dans l’enfer des prisons libyennes. Les soldats auraient alors coulé le canot pneumatique et abandonné les trois migrants dans les débris flottants. «Ce sont des assassins qui ont été enrôlés par l’Italie», a déclaré Oscar Camps. Et l’écrivain et journaliste italien Roberto Saviano s’en est pris directement à Matteo Salvini, le ministre de l’Intérieur: «Salvini, quel plaisir prends-tu à voir mourir des enfants?»

Une version des faits toutefois démentie par Rome et Tripoli. Une journaliste allemande qui était à bord de l’unité de la marine libyenne a confirmé que le canot avait bien été coulé mais qu’à sa connaissance, il n’y avait plus personne à bord.

La filière italienne meurtrière

Sans doute ne connaîtrons-nous jamais la vérité. Reste que les tentatives désespérées d’échapper au retour en Libye se succèdent lorsque les migrants comprennent que leur voyage vers l’Europe est un échec. Le 13 juillet, alors que Matteo Salvini avait interdit l’accostage en Sicile d’un vieux chalutier avec 450 migrants à bord, une trentaine d’entre eux s’étaient jetés à l’eau pour essayer de rejoindre à la nage les bateaux italiens. Le bilan officiel, certifié par la marine transalpine, est de quatre morts.

Les statistiques du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés donnent l’ampleur de l’aggravation du drame qui se joue sur la route du canal de Sicile. Depuis le début de l’année, 1143 migrants sont morts en mer, 1100 sur la route vers l’Italie, 300 sur la route vers l’Espagne. Durant les six premiers mois de 2017, un migrant sur 38 perdait la vie durant la traversée. Désormais, c’est un migrant sur sept qui périt entre les côtes africaines et l’Europe. Et avec sensiblement le même nombre de départs, la filière italienne se révèle beaucoup plus meurtrière que celle qui conduit en Espagne. Fermeture des ports italiens, interdiction faite aux ONG de s’approcher des côtes pour permettre aux gardes-côtes libyens de reconduire directement les migrants interceptés dans les geôles d’où ils venaient: la politique mise en œuvre par Matteo Salvini est donc tenue en partie responsable de cette augmentation des morts.

Rien ne semble toutefois freiner la détermination du ministre de l’Intérieur. Au mépris des lois internationales, il veut désormais que les navires militaires italiens rapportent directement les migrants interceptés dans leur port de départ. Selon lui, les conditions de sécurité et de respect des droits de l’homme en Libye le permettent.

Ce n’est pas ce qui se lisait dans les yeux de Joséphine. (Article publié dans le quotidien Le Soir, en date du 19 juillet 2018)

Source http://alencontre.org/europe/migrants-la-collaboration-entre-rome-et-tripoli-passe-pour-assassine.html#more-50596

Grèce : expulsion d’un des 35 accusés de Moria

Par rédaction

I.T., originaire de Guinée vient d’être expulsé vers la Turquie par une procédure qui présente de telles irrégularités qu’elle doit être qualifiée d’illégale. Débouté en première instance de sa demande d’asile, il avait explicitement manifesté son intention de faire appel. I.T. fait partie de 35 de Moria, arrêtés dans le tas après les incidents du 18 juillet 2017 dans le hot-spot de Moria. Le rejet de sa demande d’asile lui a été communiqué pendant sa période de détention préventive et, étant donné l’absence d’avocat et de traducteur qualifié, il n’avait aucun moyen de comprendre le sens du document qui lui a été remis.  La décision de la Commission d’Asile lui fut notifiée en décembre 2017 tandis qu’il était emprisonné à Athènes ; qui plus est ce document porte le code et la signature d’un interprète en français.

Après le procès et la condamnation  de 32 de ses codétenus à 26 mois de prison en sursis de,   I.T. fut remis en liberté et transféré à Lesbos du fait du confinement géographique dans les îles de tous ceux qui sont rentrés après la déclaration commune UE-Turquie. Le 12 juin il fut de nouveau arrêté. Ce n’est qu’à ce moment que le dossier comportant le rejet de sa demande a été communiqué à ses avocats. Ceux-ci ont immédiatement fait savoir à la police leur intention de faire appel  pour que sa demande soit examinée par la Commission de Recours, un droit inaliénable dans un état de droit. Cet appel serait déposé hors délais, étant donné que I.T. n’a pas été en mesure de comprendre le document au moment où celui-ci lui a été notifié. L’introduction d’un recours hors délais est une procédure dérogatoire habituelleμ prévue par la loi, laquelle exige juste que les motifs du retard soient explicités. Le HCR avait également prévenu les autorités de l’intention de  I.T. de faire appel. Le lendemain, lorsque ses avocats se sont présentés pour déposer le recours, ils ont eu la mauvaise surprise d’apprendre que leur client venait d’être expulsé à la Turquie. Cette expulsion illégale constitue une violation flagrante des droits les plus élémentaires garantis, par la légalisation grecque et européenne.  (source Efimeride tôn Syntaktôn)

Voir aussi le communiqué de Legal Centre of Lesbos où d’autres expulsions non conformes à la législation sont dénoncées et de ce cas précis il est dit :  “The second individual was deported on the morning of 13 June 2018. This was despite the fact that for days he had been expressing to the police his desire to appeal the rejection of his asylum claim. Lawyers from HIAS and the Legal Centre also spoke with the Mytilene police department the day before he was deported and informed the police that they would be filing an appeal on his behalf. On the morning of 13 June 2018, he was deported to Turkey. This individual, a Guinean national, claims that he was a victim of torture, and will be subject to persecution if returned to his country. Regardless of whether his claim is credible, he has the right to appeal the rejection of his claim. Even though untimely, it is not the police who have the authority to accept or reject his appeal, but the Asylum Service. His right to appeal was clearly denied, and his deportation was illegal as police were aware that he would be appealing the denial of his claim and they proceeded with the deportation in any case.”

Le communiqué  du Legal Centre Lesbos où plusieurs autres violations de droits sont dénoncées Report on Rights Violations and Resistance in Lesvos

Film La tourmente grecque en accès libre

Par rédaction

Le documentaire de Philippe Menut : « LA TOURMENTE GRECQUE,  un coup d’État financier » (version intégrale en HD) en ligne ci-dessous .

Il avait présenté ce documentaire lors de son passage à Grenoble le 10 octobre 2016. Voici la version actualisée.

Les causes et les conséquences de la crise grecque. Quels enseignements pour la France et l’Europe. Le néolibéralisme est à l’œuvre en Grèce… Privatisation des profits et socialisation des pertes.
La Grèce est un laboratoire  (à la fois pour les politiques libérales imposées à un peuple), mais aussi pour les, forces progressistes d’Europe et du Monde.

La démocratie existe-t-elle en Grèce?

Par rédaction

La démocratie existe-t-elle en Grèce? Revendications historiques d’une assemblée constituante et de l’indépendance nationale  Iskra–24/06/2018

Intervention de Panayotis Lafazanis, secrétaire du Conseil politique d’Unité Populaire, à l’Unity Festival le samedi 23 juin à l’Université d’Agriculture

« La démocratie existe-t-elle en Grèce ou bien notre pays est-il tombé dans quelque chose de pire qu’une république bananière ? »

« La restauration d’une vraie démocratie, de bout en bout, par une assemblée constituante et la réalisation de la souveraineté et de l’indépendance nationales sont les deux grands problèmes actuels de notre pays et les revendications historiques de notre époque ».

Panayotis Lafazanis a poursuivi, en soulignant : « Qui sont donc ceux qui ont autorisé les Tsipras-Kaménos et avec eux un président de la démocratie-fantôme à signer la décision d’une instance informelle de l’UE, l’Eurogroupe, avec laquelle le pays se vend et se compromet depuis des décennies ?

Où et quand y a-t-il eu un débat concernant cette décision et quel corps populaire représentatif l’adoptera ?

De quel droit Tsipras-Kaménos et leurs autres béquilles mémorandaires, dans un Parlement sans opposition, ont-ils accepté comme prétendue réforme de la dette une normalisation qui ne la réduit pas même d’un euro, mais simplement en transfère davantage tout le fardeau à ceux qui ont la malchance d’être affaiblis depuis dix ans ?

Avec quelle autorisation et de quel droit Tsipras-Kaménos et leur gouvernement désintégré ont engagé (ou plutôt, c’est ce que pensent ceux qui les utilisent) le pays, sans que le peuple ni même le Parlement aient leur mot à dire sur une austérité courant environ jusque 2060 ?

Comment, jusqu’à quel point et dans quelle démocratie un gouvernement peut en quelques mois engager un peuple et hypothéquer un pays pour des décennies ?

Comment, jusqu’à quel point et de quel droit Tsipras-Kaménos-Tsakalotos ont signé à l’Eurogroupe pour brader les entreprises publiques stratégiques et rentables comme : DEI (entreprise grecque d’électricité), AIA (Aéroport international d’Athènes), DESFA (compagnie grecque du gaz), ELPE (Compagnie grecque du pétrole), les ports de plaisance de Alimos, Egnatia, DEPA (entreprise publique du gaz), Eydap (Compagnie des eaux d’Athènes), Eyath (Compagnie des eaux de Thessalonique) et les ports périphériques d’Igoumenitsa, Corfou, Alexandroúpolis, Kavala, etc. ?

Comment, sans aucune approbation populaire et sans que le peuple soit consulté, peut-on livrer à des états étrangers et des intérêts multinationaux tout le Bien public, acquis par la sueur et les larmes, comme s’il s’agissait du fief des gouvernants ?

« Il est dramatique », a continué Panayotis Lafazanis, que « Tsipras-Kaménos et à leurs côtés le Président de la République ,Prokopis Pavlopoulos, avec les autres mémorandaires en société au parlement fonctionnent comme des expéditionnaires de la troïka et de la classe financière européenne, comme des fiduciaires d’une oligarchie intérieure asservie à l’étranger et d’un européisme totalitaire, étouffant la terre, l’économie , la société et le futur de la jeunesse grecque ».

« Les deux grandes revendications historiques de notre époque », a constaté Panayotis Lafazanis, « pour lesquelles nous nous battons, afin que notre terre et notre peuple respirent et renaissent, sont d’une part le rétablissement profond et total de la démocratie, à travers une assemblée constituante qui mettra fin au diktat totalitaire et financier de l’euro et d’autre part la souveraineté nationale et l’indépendance par rapport à une Grèce qui s’est transformée en soutien euroatlantique politique et militaire, hypothéquant sa sécurité et plus encore son intégrité.

À présent, un nouveau patriotisme contemporain, au côté de l’internationalisme, devient absolument nécessaire pour une Gauche du XXIe siècle, s’agissant pour cette dernière de s’affirmer à nouveau comme force hégémonique nationale concernant les profondes transformations sociales et l’indispensable sauvegarde et la refondation de notre patrie ».

Traduction : Merci à Vanessa de Pizzol

Source https://unitepopulaire-fr.org/2018/07/10/la-democratie-existe-t-elle-en-grece-de-p-lafazanis-lae/

La Grèce après l’accord du 21 juin

Par rédaction

  À la merci d’un courant violent : la Grèce après l’accord du 21 juin

05/07/2018 ou la vie sauvage par Dimitris Alexakis

Du Parlement allemand à l’Assemblée hellénique, les déclarations faites ces derniers jours par les dirigeants européens permettent de se faire une idée plus précise de la situation qui sera celle de la Grèce à compter du 20 août prochain  et de proposer une lecture de l’accord conclu le 21 juin à rebours des déclarations célébrant «la fin de l’Odyssée» (Moscovici), la «renaissance» grecque («Le Point»), la concorde européenne retrouvée.

L’accord de l’Eurogroupe prévoit un rééchelonnement sur 10 ans d’une part conséquente de la dette grecque [2] (extension de la maturité des titres), un «coussin de sécurité» de 15 milliards d’euros faisant office de réserve de précaution et le reversement au compte-gouttes des bénéfices réalisés par la BCE sur ses titres de dette hellénique ; ces dispositions sont conditionnées par l’obligation faite aux autorités grecques de dégager au cours des années qui viennent un excédent primaire correspondant à 3,5% (puis à 2,2%) du PIB, objectif ne pouvant être poursuivi qu’au prix d’un prolongement à durée indéterminée des politiques d’austérité [3].

Sur les questions cruciales de la dette, du financement, de la politique sociale et du «retour à la croissance» :

▶ Un pays surendetté, contraint de contracter de nouveaux emprunts pour rembourser les emprunts antérieurs, dont la dette s’aggravera mathématiquement à moyen et long terme et dont les excédents resteront dédiés au désendettement. Rien de neuf, donc, sinon le fait que le ratio dette / PIB obtenu après huit années d’austérité sévère [4] signe l’échec des politiques imposées par le FMI et les instances européennes. En Grèce, sous des formes chaque fois différentes, le refrain d’une «sortie des mémorandums» scande l’actualité politique depuis le début de la crise. L’accord de l’Eurogroupe s’inscrit dans cette logique et doit d’abord être lu comme une énième tentative de camoufler l’échec initial. Le déni originel (faire comme si l’État grec n’était pas en faillite mais simplement confronté à un défaut ou une pénurie de liquidités) est reconduit : il s’agit à présent de faire comme si cette dette était soutenable alors que l’imposition d’une politique frappant croissance et productivité à la racine et grevant lourdement le produit intérieur brut ne cesse de l’alourdir. La figure qui s’impose n’est pas celle d’Ulysse revenant au pays natal après dix ans d’errance [5] mais celle de Sisyphe.

▶ Un pays à la merci des marchés et qui devra s’acquitter de taux d’intérêt plus élevés que ceux qui lui étaient demandés dans le cadre du «programme d’assistance» qui s’achève. Comme l’indique Olivier Passet, la question des taux d’intérêt réels et des écarts de crédit est plus que jamais au cœur des divergences et des fractures de la zone euro. Les pays du sud à fort taux de chômage subissent actuellement, selon les termes de cet analyste, une «double peine» : des taux d’intérêt nominaux plus élevés, qui intègrent «une prime de risque sur la dette souveraine», «pénalisent l’investissement» et «freinent la croissance». Dans le cas de la Grèce, deux précédentes ventes d’obligations test ont été réalisées à des taux d’intérêt trois fois supérieurs à ceux assurés dans le cadre des programmes soutenus par la BCE ; ces taux pourraient s’avérer plus importants encore à partir de la fin août.

Les agences de notation, qui ont joué un rôle-clef dans le déclenchement / dévoilement de la crise [6], continuent de situer la Grèce dans la catégorie des États à risques. Certains investisseurs seront dissuadés d’investir dans les obligations grecques ; d’autres exigeront un rendement élevé, variant en fonction de la conjoncture et de la conformité du gouvernement grec aux orientation néo-libérales. Après avoir légèrement rehaussé la note de la Grèce, les analystes de Moody’s et de Standard & Poor’s rappellent que l’accord serait tenu pour caduc si le gouvernement venait à remettre en cause les mesures austéritaires passées et à venir. À compter du 20 août, les diktats de la Troïka seront simplement remplacés par ceux des fonds d’investissement et des agences de notation ; le commandement sera directement exercé par «les marchés», mais son contenu ne changera pas.

▶ Une politique économique «sous étroite surveillance» (à défait d’être «sous tutelle») et sans marge budgétaire réelle. Si les revues régulières opérées par la Troïka ne sont plus à l’ordre du jour, le Premier ministre grec n’a pas obtenu le «Clean Exit» demandé mais une «surveillance renforcée» ; les initiatives du gouvernement grec continueront d’être scrutées à la loupe [7]. Le thème de l’indépendance recouvrée («la Grèce peut désormais se libérer de la tutelle européenne ; les sacrifices consentis par la société grecque, soutenus par la solidarité européenne, ont porté leurs fruits») est d’ailleurs accueilli sur place avec ironie, indifférence ou scepticisme.

▶ La poursuite des politiques d’austérité (coupes sur les retraites, abaissement du seuil d’imposition au détriment de foyers à revenus modestes ou faibles jusqu’alors exemptés) demeure la condition sine qua non des dispositions ouvrant la voie au refinancement de la Grèce sur les marchés. Le pays devra, selon le FMI, poursuivre sur la voie des réformes et ne pas faire machine arrière ; toute «dépense sociale ciblée» devra être approvisionnée par la diminution des pensions et l’abaissement du seuil d’imposition ; l’accent devra être mis sur «l’amélioration de la compétitivité», donc sur «la dérégulation du marché du travail». Aux antipodes des envolées lyriques du commissaire français à l’économie, le ministre des finances allemand précisait ces jours-ci devant le Bundestag [8] que les réformes ne s’arrêteraient pas en Grèce avec l’achèvement du troisième mémorandum. «Nous veillerons à ce que la Grèce poursuive la politique de réformes entreprise ces dernières années.»

▶ Les chiffres attestant d’un «retour de la croissance» doivent être replacés dans le contexte qui est le leur : récession de longue durée, chômage structurel élevé, baisse de près de 30% du PIB en huit ans. Comme le remarque par ailleurs O. Passet, «la reprise conjoncturelle du sud» n’offre que «l’illusion d’une convergence retrouvée en Europe» : «[Les pays périphériques] sont certes repartis d’un point de vue conjoncturel», mais «il s’agit d’un effet de rebond mécanique après une purge sans précédent». Avant d’affirmer que ce mouvement est pérenne, il conviendrait de scruter en profondeur «les moteurs de long terme de la croissance», où «le constat est sans appel» : «toujours pas le moindre souffle de productivité». Rien d’étonnant à cela, puisque ces pays ont vu migrer nombre de leurs jeunes diplômés [9] et ont sacrifié «plusieurs années d’investissement stratégique». Seuls les pays du cœur et du nord de l’Europe disposent en définitive de «la puissance de feu budgétaire» qui leur permettrait de faire face à un choc ou un retournement conjoncturel. Si la Grèce est en fort excédent, cet excédent «restera dédié au désendettement» ; or, «la faiblesse du parachute budgétaire participe dans les récessions à l’érosion du potentiel de croissance.»

L’accord de l’Eurogroupe peut être effectivement interprété comme un «tournant» [10]. Les formules de «sortie de crise» ou de «fin des mémorandums» n’en sont que l’emballage, mais la «sortie sur les marchés», elle, est bien réelle, et rappelle la mise à l’eau d’un navire dont chacun sait qu’il risque d’émettre un signal de détresse dès sa sortie au large. Peut-être les dirigeants européens ont-ils simplement voulu saisir au vol une occasion favorable («l’amélioration conjoncturelle» évoquée plus haut) et «risquer une sortie»? On peut cependant remarquer qu’en cas d’accident, de choc ou de retournement, la Grèce ne pourra désormais plus s’en prendre qu’à elle-même, le débat sur la responsabilité de l’UE dans la fragilisation de l’économie locale et dans l’opération initiale de renflouement de banques privées par de l’argent public étant (une fois de plus) escamoté.

«Stocker les problèmes pour les renvoyer à plus tard» : le diagnostic établi par l’association Finance Watch dans une étude européenne publiée ces jours-ci s’applique de toute évidence à cette fausse sortie de crise. Les dirigeants européens tablent-ils sans le dire sur une restructuration future de la dette grecque, lorsque les circonstances politiques seront réputées plus favorables, que les contribuables allemands, hollandais ou français et leurs parlements respectifs seront mieux disposés à envisager une remise de dette réelle [11]?

Le tableau est pour l’heure celui d’un pays condamné à long terme, au moins jusqu’en 2060, à une forme de stagnation, durablement étranglé par ses obligations de remboursement et qui n’aura d’autre choix, au nom du maintien dans la zone euro et du service de la dette, que de continuer à pressurer la main-d’œuvre locale, à brader ses richesses, ses territoires et son potentiel touristique, dans le sens d’un tourisme de masse aux conséquences environnementales désastreuses [12]. La Grèce des mémorandums fait d’ores et déjà l’objet d’un gigantesque transfert de titres de propriété et cette tendance, plutôt que d’être freinée par l’arrivée au pouvoir d’un gouvernement se réclamant de la «gauche radicale», s’est considérablement accentuée à partir de juillet 2015.

S’il n’est pas certain que la confiance des marchés revienne, la défiance des citoyen.ne.s, elle, ne cesse de monter ; à partir de l’écrasement des négociations de l’été 2015, cette défiance s’exprime en Grèce comme dans le reste de l’Europe à travers toutes les variantes de l’exploitation politique du sentiment national — du souverainisme au néo-fascisme. Confrontée à ce qui lui apparaît comme un courant porteur, une partie de la gauche se laisse entraîner dans le piège par ressentiment, «anti-germanisme» voire refus de la défaite et de la mélancolie [13] ; comme si, à partir de l’écrasement de la gauche grecque, l’initiative et la dynamique politiques avaient basculé de l’autre côté de l’échiquier politique et comme si les signifiants nationaux étaient parvenus à occuper la place, laissée vacante par la défaite de 2015, qui était auparavant celle des revendications de justice, de solidarité et de préservation des ressources naturelles.

Ce délitement impose de procéder à une analyse précise des causes de la défaite grecque. Si le gouvernement grec a effectivement perdu la partie en juillet 2015, c’est d’abord, à mon sens, pour avoir perdu la bataille de l’opinion européenne ; pour n’avoir pas su contrer la propagande massive qui, en Allemagne, en France, aux Pays-Bas ou dans les pays baltes, est parvenue à neutraliser la conscience de classe (intérêts et ennemis communs) de retraité.e.s modestes ou pauvres, de précaires courant de mini-jobs en mini-jobs, d’employé.e.s miné.e.s par la crainte du chômage, pourtant confronté.e.s, quels que soient les pays, aux mêmes maux. La logique néo-libérale l’a d’abord emporté sur ce terrain, rien d’autre que celui des classes sociales, en parvenant à retourner les classes moyennes et populaires des pays créanciers contre les classes moyennes et populaires des pays endettés, en encourageant le ressentiment d’une infirmière allemande à l’égard de sa camarade grecque (ou portugaise, italienne, espagnole…) et en instrumentalisant à cette fin le sentiment national (caricatures racistes de tel quotidien hollandais, couvertures du «Spiegel», sarcasmes de tel éditorialiste du «Monde» imitant l’accent grec sur les ondes de France-Culture, sortie ouvertement raciste du président de l’Eurogroupe, refrain en boucle : travailleurs vertueux du Nord appelés à payer pour le Sud fainéant…). Une offensive idéologique fondée sur l’opposition nord / sud et sur l’application d’une grille de lecture morale aussi simpliste qu’efficace («Il faut toujours payer ses dettes» [14]) à la réalité complexe, opaque au plus grand nombre, des mécanismes contemporains de l’endettement, est ainsi venue se greffer sur les déséquilibres structurels de la zone euro, et les a renforcés.

La manœuvre de longue haleine consistant à instiller des signifiants et des préjugés nationaux afin de diviser celles et ceux qui se trouvent également en butte, à travers tout le continent, au démantèlement de l’État-providence n’est pas que le fait de l’extrême-droite : elle est au cœur de la stratégie de domination néo-libérale et s’est avérée particulièrement payante dans le cas de la Grèce. Ce constat devrait, a contrario de l’illusion nationaliste, nous engager à rechercher les voies d’une alliance de classes porteuse des expériences, revendications et initiatives politiques des victimes de l’austérité.


(Athènes, 5 juillet 2018) {Le titre de cet article est emprunté au très beau roman d’Henry Roth Mercy of a Rude Stream (éd. de l’Olivier, 1994, pour la traduction française). La première partie de cet article a été publiée le 25 juin sous le titre Souveraine dette.}


[1] Arrivée à échéance du troisième Mémorandum, d’un montant de 86 milliards d’euros, signé par le gouvernement grec quelques semaines après le référendum de juillet 2015 par lequel près de 62% des votants avaient rejeté un plan de réformes analogue.

[3] Lire à ce sujet L’Europe propose à la Grèce un plan de sortie irréaliste, Martine Orange, Mediapart.

[4] La dette grecque se monte aujourd’hui à 320 milliards d’euros, soit 179% du PIB.

[5] Lire à ce sujet le texte publié par Pierre Moscovici sur son blog au lendemain de l’Eurogroupe du 21 juin.

[6] Lire ce calendrier des premières années de la crise grecque.

[7] En particulier par le Fonds européen de stabilité.

[8] Le Parlement allemand a validé ce vendredi par un scrutin nominal l’accord de l’Eurogroupe sur la Grèce par 410 votes pour, 226 votes contre, et 7 abstentions.

[9] Comme le rappelle Michel Husson dans un article récent à propos de la Grèce : «Environ un tiers de la population de 15 à 29 ans, pour une bonne partie des personnes qualifiées, a quitté le pays» (Un long calvaire s’annonce pour la Grèce, «Alternatives économiques»).

[10] Selon l’expression de Benoît Cœuré, membre du directoire de la BCE, dans un entretien au «Figaro ».

[11] Lire à ce sujet l’entretien accordé par Klaus Regling, directeur du Mécanisme européen de stabilité, au journal «Ta Nèa» : la surveillance de la Grèce «devra se poursuivre jusqu’à ce que tout l’argent soit remboursé». Jusqu’en 2060 ? «Oui. La Commission arrêtera quand 75 % auront été remboursés, mais pas nous. Nous surveillerons jusqu’à l’échéance finale.»

[12] A propos de l’importance cruciale du secteur touristique, lire Michel Husson, Un long calvaire s’annonce pour la Grèce, «Alternatives économiques».

[13] C’est notamment le cas, en Grèce, de la prise de parole du compositeur Míkis Thèodorákis, figure historique de la gauche grecque, lors d’un rassemblement organisé par la droite, l’ultra-droite et l’Église orthodoxe contre la proposition de résolution du conflit sur le nom de la Macédoine ; cette intervention publique a malheureusement reçu le soutien de l’ancienne présidente du Parlement grec sous le premier gouvernement Tsípras, Zoé Konstantopoúlou, et de certaines figures emblématiques de la contestation des politiques d’austérité, au nom de la défense d’un «grand mouvement populaire».

[14] Lire à ce sujet l’introduction de Dette : 5000 ans d’histoire (David Graeber, éd. Les Liens qui Libèrent, 2013, pour la traduction française).

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