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Archives de catégorie Répression-autoritarisme

Déclaration commune des street-médics allemands

Déclaration commune des street-médics allemands adressée aux street-médics français dans le cadre des manifestations des Gilets jaunes
(Crédit image : JohanPX)

Dans notre pays voisin, la France, les protestations très vives des gilets jaunes, des syndicats et de multiples mouvements sociaux se poursuivent. Les unités de police interviennent avec une extrême violence contre les manifestants. L’utilisation disproportionnée des gaz lacrymogènes provoque massivement des séquelles pour la santé des participants ou même pour les spectateurs non impliqués. Le nombre des blessés graves et des mutilés à vie par les tirs de LBD, les grenades de désencerclement et le gaz toxiques se chiffre par centaines. C’est du jamais-vu dans l’Europe de ces dernières décennies. Une dame de plus de 80 ans a été tué par un flashball « perdu », alors qu’elle se trouvait chez elle.

Dans cette situation, les street-médics, bénévoles, interviennent partout en France en urgence et sur place. Depuis six mois, semaine après semaine, ils tentent d’atténuer la souffrance et les séquelles éventuelles, sauvent des vies, sont refuge pour des gens paniqués. Eux-mêmes sont souvent exposés aux risques de mutilations, de menaces et d’attaques violentes.

Depuis le mois de mars, le gouvernement français « chasse » de façon ciblée les soignants, les médecins et d’autres aidants. En tant que « colonne vertébrale importante du mouvement », on cherche à les mettre « hors circuit ». C’est ainsi, que le 7 avril à Bordeaux et dans d’autres villes, la police a tenté d’empêcher au personnel médical d’accéder aux manifestations. Leurs équipements, vêtements de protection inclus, ont été réquisitionnés. Un nombre non négligeable de street-médics a été arrêté. Deux parmi eux ont dû se faire soigner à l’hôpital après une garde grande à vue.

Le fait qu’un état s’en prenne prioritairement à des personnels soignants ne se produit même pas dans la plupart des régions en guerre de cette planète et est en contradiction totale avec toutes les règles, conventions et valeurs d’humanité.

Nous nous joignions au sentiment d’indignation provoqué par l’attitude du gouvernement français et de son appareil d’état. Nous déclarons notre respect et notre reconnaissance particulière pour le travail des street-médics en France. Nous nous joignions à la solidarité avec les street-médics d’une large part de l’opinion publique française. Nous avons une pensée particulière pour tous les employés du système de santé. La violation des droits de l’homme par l’état français a été critiquée et condamné par la « Ligue des droits de l’Homme », par la plupart des organisations se battant pour le respect des droits de l’Homme ainsi que par les commissariats aux droits de l’Homme de l’ONU et de l’EU. Nous soutenons cette critique et cette condamnation !

Lors de la prise de la présidence du conseil de sécurité de l’ONU, le ministre des affaires étrangères allemand, Heiko Maas déclarait : « Les hôpitaux, les médecins, les soignants deviennent de plus en plus souvent une cible. […] Cette tendance au décloisonnement total des conflits militaires doit être stoppée. Autrement nous glissons vers une nouvelle forme de barbarie. » (Zeit.de 01.04.2019)

Si un tel « glissement vers une nouvelle barbarie » de déroule ou se profile à horizon en plein milieu de l’Europe, dans notre pays voisin, la France, nous attendons que les politiques et la presse en Allemagne ne ferment pas totalement les yeux devant une « telle tendance au décloisonnement des conflits ».

MISE EN GARDE face à des street-médics d’extrême-droite venant d’Allemagne !

Nous avons remarqué, que certains médics de la mouvance populiste de l’AFD et du mouvement identitaire allemand proposent dans le cadre du mouvement des « gilets jaunes » leur aide de façon couverte ou ciblée.

Nous ne pouvons que formellement déconseiller de coopérer et vous mettre en garde contre ces personnes. Ils ne partagent pas les règles et valeurs de notre travail, comme le secret médical vis-à-vis de l’administration. Ils abusent de la bonne réputation des street-médics pour influencer le mouvement de solidarité et de protestation en Allemagne. Ils utilisent leur engagement pour se mettre en scène et pour favoriser leur propagande et les organisations d’extrême-droite qui se tiennent derrière eux.

Nous conseillons fortement aux éventuels donateurs de s’informer précisément en amont à qui ils confient leur argent.

Premiers signataires :
– Autonome Sanitätsinitiative Dresden (Dresde)
– Demonstrations Sanitäter/innen – Sanitätsgruppe Oberpfalz (Ratisbonne)
– Demosanitäter – Sanitätsgruppe Süd-West e.V. (Stuttgart)
– Demosanitäter Westfalen (Ahlen)
– K. Freisen – secouriste de Bonn (Bonn)
– Left-Wing Demonstration Medics (Berlin)
– Medizinischer Einsatztrupp – Demosanitäter (Düsseldorf)
– Riot Medics Berlin (Berlin)
– Vienna Street Medics (Vienne)

D’autres groupes en Allemagne et au-delà sont invités à rejoindre notre déclaration et à la publier également !

Ils seront ensuite répertoriés en tant que supporters supplémentaires entre autre sur https://demosanitaeter.com/declaration-fr/

Répression en Grèce

Chèr e s ami e s, Chèr e s Camarade s,

Quoiqu’on pense de la mouvance anarchiste, libertaire , anti-autoritaire grecque , la répression féroce s’abat sur elle parce qu’elle mène un combat quotidien contre le capitalisme et le pouvoir grec.

Pas un mot ou presque dans les médias internationaux francophones ou anglophones, d’où ce relais de la communication de mon ami et camarade Yannis YOULOUNTAS , philosophe, cinéaste et militant acharné franco-grec.Vous avez entendu parlé:

–   de la situation inique de ce prisonnier Dimitri KOUFONTINOS considéré comme terroriste et emprisonné à vie mais qui a droit comme n’importe quel prisonnier à ses droits et sa dignité et donc à sa 7 ème demande de « permission » qui est légitime, au point qu’ il vient de gagner en justice cette demande et a arrêté une grève de la faim bien éprouvante !

– du  groupe anarchiste ROUVIKONAS et de ses actions toujours minutieusement ciblées ( ambassades, institutions étatiques, capitalistes…) , emblématiques de la lutte anticapitaliste ( médecins et notaires véreux, entreprises et patrons voyous etc…) , actions très populaires en Grèce, mais qui agacent les institutions policières et judiciaires ( très peu d’arrestations et de procès) , l’État grec, le gouvernement et sa majorité,  et l’opposition de droite grecque ( et malheureusement aussi quelques partis de gauche…).

Comme le dit Yannis :  » Ce qui vient de se passer durant 21 jours en Grèce est impressionnant. Le mouvement social a fait preuve d’une immense solidarité avec le prisonnier, épaulant sa grève de la faim de toutes les façons possibles, certaines très modérées, d’autres particulièrement radicales, jusqu’à faire céder le pouvoir.

Une fois de plus, rangeant au placard leurs désaccords théoriques et vieilles querelles, les anarchistes et autres révolutionnaires ont fait la preuve de leur puissance de frappe un peu partout en Grèce (plus d’une centaines d’actions relevées par les médias de masse grecs, au moins le triple selon mes camarades).

N’hésitez pas à faire tourner ses infos, l’information et la solidarité sont nos premières armes ! 

Et n’oubliez pas … tout cela n’arrive pas, jamais… qu’aux autres!
CK

suivre les infos sur Facebookhttps://www.facebook.com/constant.kaimakis et https://www.facebook.com/yyoulountas) ou sur le webhttp://blogyy.net/?fbclid=IwAR15bkSaqWOBA5wQqAgOK4exsq-FnMNT4Sb3ZhjGczOXC3WJ3SxHHysdNJo ,

 

Pour rencontrer des membres de Rouvikonas voir la tournée en France  http://blogyy.net/2019/05/25/nouvelle-tournee-de-rouvikonas-en-italie-suisse-france-et-belgique/ et notamment à Grenoble le 2 juin 2019

Liberté et l’indépendance de la presse

Une vingtaine de sociétés de rédacteurs et journalistes apportent leur soutien à Gaspard Glanz

Les sociétés des rédacteurs et des journalistes d’une vingtaine de médias, dont Reporterre, apportent leur soutien à Gaspard Glanz, journaliste indépendant gardé à vue pendant 48 heures avant de se voir notifier une interdiction de paraître à Paris les samedis et le 1er mai, l’empêchant d’accomplir son travail. Voici leur texte commun :

Samedi dernier, alors qu’il couvrait la manifestation des Gilets jaunes, notre confrère Gaspard Glanz a été interpellé sans ménagement et placé en garde à vue pendant quarante-huit heures. D’après les témoignages recueillis et publiés depuis, il a eu un mouvement d’humeur à destination de policiers, ces derniers refusant de l’entendre alors qu’il voulait se plaindre d’avoir été visé par un tir de grenade. Il lui est désormais interdit de paraître à Paris les samedis et le 1er-Mai, donc d’y couvrir les manifestations, jusqu’à sa comparution pour « outrage sur personne dépositaire de l’autorité publique » le 18 octobre, ce qui revient à lui interdire de faire son travail de journaliste.

Les sociétés de journalistes et de rédacteurs signataires, qui apportent leur plein soutien à Gaspard Glanz, empêché de couvrir les prochaines manifestations parisiennes, c’est-à-dire de travailler et d’informer, dénoncent une fois encore les conditions de travail extrêmement difficiles qui sont les leurs dans le cadre des manifestations de Gilets jaunes. Une situation particulièrement difficile pour les journalistes indépendants et les photographes, souvent en première ligne. Les journalistes, qui ne font que leur métier, ne peuvent pas tolérer de se voir régulièrement pris pour cible par les forces de l’ordre : depuis le début du mouvement, 79 journalistes ont été victimes de violences policières, selon le décompte du journaliste David Dufresne, et la nouvelle loi « anticasseurs » renforce encore l’arbitraire et met un peu plus en danger la liberté de la presse.

Les SDJ et SDR déplorent également le silence assourdissant du ministre de la Culture et de la Communication, pourtant censé soutenir la liberté et l’indépendance de la presse.

Signataires : les sociétés des journalistes, sociétés des rédacteurs et sociétés des personnels de BFMTV, Les Échos, L’Express, Le Figaro, France 2, France 24, France 3 National, Franceinfo.fr, France Inter, L’Humanité, Le JDD, Libération, Le Média, Mediapart, Le Monde, L’Obs, Télérama, Paris Match, Le Parisien-Aujourd’hui en France, Sud-Ouest, Premières Lignes, RFI, RMC, TV5 Monde, 20 Minutes ainsi que les rédactions d’Alternatives économiques, du Bondy Blog, des Jours et de Reporterre.

Source https://reporterre.net/Une-vingtaine-de-societes-de-redacteurs-et-journalistes-apportent-leur-soutien

Liberté de manifester

Liberté de manifester : abrogation de la loi

Communiqué commun signé par plus de 40 organisations nationales

Si la loi est votée par le Parlement au nom du peuple français, elle ne peut et elle ne doit pas porter atteinte à la libre expression du peuple. La loi adoptée par l’Assemblée nationale qui prétend encadrer le droit de manifester reste, malgré la censure partielle du Conseil constitutionnel, une atteinte grave aux libertés publiques et à l’équilibre des pouvoirs.

Les violences contre les personnes, les biens, les institutions qui ont eu lieu ne peuvent justifier qu’un exécutif s’arroge des pouvoirs exorbitants. Participer à une manifestation ne saurait signifier le risque pour chacun et chacune d’entre nous d’être poursuivi, fiché et condamné pénalement comme financièrement.

Soumettre les participants et les participantes à une manifestation à une fouille systématique, faire d’un visage en partie couvert un délit, persister dans l’usage d’armes qui mutilent, voici l’esprit et la lettre de mesures qui sont autant d’empêchements à l’exercice d’un droit essentiel en démocratie : celui de manifester publiquement, collectivement et pacifiquement son opinion.

Cette loi de circonstance porte un lourd risque d’arbitraire des gouvernements d’aujourd’hui comme de demain, nous en demandons l’abrogation. C’est pourquoi nous appelons à manifester partout en France le samedi 13 avril 2019.

Paris, le 8 avril 2019

Signataires : Action des chrétiens pour l’abolition de la torture (Acat) ; Amnesty international France ; Association des Tunisiens en France (ATF) ; Association européenne pour la défense des droits de l’Homme (AEDH) ; Agir ensemble pour les droits de l’Homme ; Association France Palestine solidarité (AFPS) ; Attac ; Comité pour le respect des libertés et des droits de l’Homme en Tunisie (CRLDHT) ; Confédération générale du travail (CGT) ; Confédération nationale du logement (CNL) ; Droit solidarité ; Emmaüs France ; EuroMed Droits ; Fédération des conseils de parents d’élèves (FCPE) ; Fédération des Tunisiens pour une citoyenneté des deux rives (FTCR) ; Fédération française des motards en colère (FFMC) ; Fédération indépendante et démocratique lycéenne (FIDL) ; Fédération internationale des ligues des droits de l’Homme (FIDH) ; Fédération nationale de la Libre pensée ; Fédération nationale des Francas ; Fédération syndicale unitaire (FSU) ; Femmes Egalité ; France Nature Environnement (FNE) ; Gilets jaunes de Commercy ; Greenpeace ; La Cimade ; La Quadrature du Net (LQDN) ; Le Planning familial ; Les Amis de la Terre France ; Les Effronté-e-s ; Ligue de l’enseignement ; Ligue des droits de l’Homme (LDH) ; Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples (Mrap) ; Mouvement national lycéen (MNL) ; Mouvement pour une alternative non-violente Ile-de-France (MAN) ; Oxfam France ; Pas sans nous ! ; Réseau Euro-Maghrébin citoyenneté et culture (REMCC) ; SOS Racisme ; Syndicat de la magistrature (SM) ; Syndicat des avocats de France (SAF) ; Syndicat national des journalistes (SNJ) ; Syndicat national des personnels de l’éducation et du social (SNPES PJJ/FSU) ; Union juive française pour la paix (UJFP) ; Union nationale lycéenne (UNL) ;  Union des Tunisiens pour l’action citoyenne (UTAC).

Au plan local sont (déjà) signataires :

ACAT ; AFPS 38 ; Alternatiba Grenoble ; ATTAC 38 ; CIIP ; CISEM ; CSRA ; Ligue des droits de l’Homme ; Ligue Internationale des Femmes pour la Paix ; Libre pensée ; Mouvement de la Paix-Isère ; RESF ; Réseau de lutte contre le fascisme 38 ; Sortir du nucléaire 38 ; Union juive française pour la paix ; CGT UD38 ; CNT CCS 38 ; FSU ; SAF ; Solidaires Isère ; SUD PTT 38 ; UNL 38 ; Ensemble 38 ; France Insoumise ; Génération.s ; Mouvement des jeunesses communistes ; Parti communiste français ; Parti de Gauche 38 ; Pole de renaissance communiste en France ; Union des étudiants communistes..

Rassemblement samedi 13 avril 2019 à 10h30 rue Félix Poulat à Grenoble

L’enjeu : le droit de manifester

Beaucoup d’articles sur le sujet : ici celui de Bastamag

Une militante septuagénaire blessée à Nice : « L’enjeu est celui du droit de manifester »

par Sophie Chapelle

 

Son nom est devenu le symbole du droit de manifester en France. Geneviève Legay, 73 ans, porte parole d’Attac dans les Alpes-Maritimes et figure militante locale, a été gravement blessée le 23 mars alors qu’un cordon de police chargeait une manifestation des gilets jaunes à Nice. De multiples images montrent cette militante, gilet jaune sur le dos et drapeau arc-en-ciel « Pace » dans les mains, scander « liberté de manifester » peu avant une charge policière au cours de laquelle sa tête a heurté un poteau métallique. Si Geneviève Legay a subi plusieurs fractures du crâne, souffre d’hématomes sous-duraux, et de quatre fractures des côtes, « les nouvelles sur son état de santé vont dans le bon sens », selon son entourage.

Une plainte contre X pour « violences volontaires en réunion avec arme par personne dépositaire de l’autorité publique sur personne vulnérable » et « subornation de témoin » a été déposée le 25 mars par les enfants de Geneviève Legay. L’avocat de la famille, Arié Alimi, indique que des policiers seraient venus dans la chambre d’hôpital de la victime. « Selon Geneviève, une policière lui a demandé à plusieurs reprises de préciser qu’il s’agissait d’un cameraman qui l’avait poussée ou qui était à l’origine de sa chute. Elle s’en est émue auprès de ses filles : le simple fait d’avoir essayé d’orienter son témoignage consiste en une subornation de témoin », souligne Arié Alimi. La plainte déposée par la famille Legay vise également le préfet des Alpes-Maritimes, qui fixe la stratégie du maintien de l’ordre, pour « complicité de violences volontaires aggravées ». Une deuxième plainte visant les « violences volontaires » à l’encontre d’un de ses membres a été déposée le 26 mars par l’association Attac France.

Les versions s’opposent

Jean-Michel Prêtre, le procureur de la République de Nice, a ouvert dès samedi après-midi « une enquête classique en recherche des causes des blessures ». Le 25 mars, il a affirmé que Geneviève Legay n’avait « pas été touchée intentionnellement », et n’a eu « aucun contact avec un agent de sécurité ». « Elle a été poussée, la chute est intervenue alors que les forces de l’ordre intervenaient pour une action de dispersion », a t-il précisé, mais « il est difficile de savoir qui exactement était derrière elle ».

C’est une toute autre version que livre Arié Alimi. « Le procureur considère que les vidéos dont il dispose ne permettent pas de matérialiser un contact direct avec les autres forces de l’ordre. Il se trouve qu’il y a d’autres vidéos permettant de matérialiser un contact direct. » « C’est bien un membre des forces de l’ordre qui a poussé Geneviève » assure-t-il. Plusieurs vidéos, filmées par les journalistes de France 3 ou de CNews, ainsi que des photos et des témoignages étayent la version d’un contact direct entre un policier et la manifestante, contrairement à ce qu’avance le procureur. L’avocat réclame sa démission « immédiate ».

Bataille pour le droit de manifester

Emmanuel Macron a suscité l’indignation en souhaitant à Geneviève Legay « un prompt rétablissement, et peut-être une forme de sagesse ». « Pour avoir la quiétude, il faut avoir un comportement responsable », a t-il déclaré, rappelant qu’une interdiction administrative de manifester dans une grande partie de Nice avait été prise. « Geneviève était dans la rue pour le droit de manifester, dans un contexte de mobilisations sociales important », rappelle Annick Coupé, porte-parole d’Attac France. « Il y a une exigence de justice sociale sur laquelle le gouvernement refuse de répondre depuis des mois. L’interdiction administrative de manifester est une fuite en avant dans la répression, et jamais la répression n’a réglé les questions sociales de fond. Nous sommes fiers d’avoir des militants comme Geneviève qui descendent dans la rue pour défendre des droits fondamentaux. »

« Dans trois mois j’aurai 85 ans et ce n’est pas à Emmanuel Macron ou à un préfet de dire si je peux sortir un samedi », lance Susan George, présidente d’honneur de l’association Attac. « Nous avons tous le droit de manifester et nous allons continuer de le faire. » Alors que des rassemblements de solidarité se multiplient partout en France à l’initiative de citoyens, syndicats, associations et organisations politiques, l’association Attac a lancé un appel à dons pour prendre en charge les frais de justice.

A l’occasion de la 19e journée de manifestation des gilets jaunes le 23 mars, le journaliste David Dufresne a recensé 24 signalements de violences policières. Depuis le début du mouvement en novembre 2018, le journaliste fait état de 232 blessures à la tête, 22 éborgnés et 5 mains arrachées. Le 1er décembre dernier, lors de l’Acte II des gilets jaunes, une octogénaire, Zineb Redouane est décédée à l’hôpital après avoir été touchée au visage par un éclat de grenade lacrymogène lancée par des CRS, alors qu’elle se tenait à la fenêtre de son appartement. Un comportement sans doute irresponsable, puisqu’aucune excuse officielle n’a été, depuis, exprimée.

Sophie Chapelle

Photo : © CGT Campus 06 / rassemblement de soutien à Geneviève Legay, Nice, le 25 mars 2019

Accueil des exilés…ça se passe en France

L’Appel d’air Dimanche 31 mars, Place d’Armes à Calais.

Le collectif Appel d’air est un mouvement spontané des personnes exilées de Calais, habitant de plusieurs campements, et de leurs soutiens, qui veulent se réapproprier le droit à la parole.

Cette mobilisation a émergé suite à l’expulsion définitive de la zone industrielle des Dunes, c’est pourquoi le collectif lance aujourd’hui cet appel à soutien :

Citoyen.ne.s calaisien.ne.s, bénévoles associatifs, militant.e.s, Depuis un mois maintenant, la politique envers les personnes exilées s’est durcie : cela se traduit par un harcèlement soutenu et des violences policières accrues, ainsi que des expulsions quotidiennes des campements de toute la ville de Calais. Une expulsion définitive du terrain occupé jusque là a eu le lieu le 12 mars, d’autres expulsions sont planifiées prochainement pour empêcher définitivement l’occupation de la zone industrielle des Dunes et de tout autre lieu de vie proche de Calais. Les communautés en sont désormais chassées, victimes jour et nuit du harcèlement des policier.e.s. Les tentes sont jetées à l’eau, saisies, détruites et les associations déplorent plusieurs blessé.e.s graves suite à ces opérations policières.

Déjà très isolées, la situation aujourd’hui place les personnes dans une plus grande précarité encore.

Face à la maltraitance institutionnelle et étatique les personnes exilées sont obligées de se mettre toujours plus en danger pour passer la frontière.

Ainsi, le 2 mars au soir, une centaine de personnes se sont organisées pour tenter le passage en Angleterre de façon collective à bord d’un ferry.

Le 9 mars, une personne âgée de 20 ans est décédée dans un camion de marchandise.

Le 20 mars, une personne d’origine soudanaise a été déportée malgré le danger de mort auquel elle fera face dans son pays ; d’autres encourent le même sort au Centre de Rétention Administrative de Coquelles.

Face cette politique répressive, les personnes exilées de Calais se mobilisent :

Elles dénoncent le règlement Dublin III et son absurdité administrative devenue épidémique, condamnant les personnes à l’errance. Les personnes exilées souhaitent ouvrir un dialogue avec les gouvernements français et anglais afin de réclamer leur droit à la mobilité et à l’installation en Europe.

Elles veulent que des solutions réelles et adaptées leur soient proposées.

Elles dénoncent les aménagements urbains « antimigrants » de la ville de Calais. L’abondance de clôtures, de pierres, de barbelés et de murs, pensée pour empêcher les personnes de s’installer, les contraignants à survivre dans un environnement hostile, indigne et dangereux.

Elles dénoncent la discrimination, la stigmatisation et la criminalisation dont elles font l’objet. Le harcèlement et l’enfermement à répétitions fragilisent psychologiquement les personnes jusqu’à les faire sombrer dans la dépression.

Elles dénoncent les violences policières, verbales et physiques, ainsi que les humiliations incessantes qu’elles subissent.

Elles dénoncent la responsabilité de l’État face aux décès qui adviennent à la frontière. L’état français doit arrêter de nier l’existence des personnes en portant assistance aux vivants et en rendant hommage aux morts.

C’est au vu de toutes ces revendications que nous vous proposons de vous joindre à nous, le dimanche 31 mars à 14h, sur la place d’armes de Calais.

Liberté de manifester : Communiqué d’Attac France

Geneviève Legay, porte-parole d’Attac 06, grièvement blessée par une charge policière

[Actualisation] En plus de la plainte déposée par la famille de Geneviève Legay, Attac déposera plainte également ce lundi 25 mars à 14h pour « violence volontaire en réunion par personne dépositaire de l’autorité publique sur personne vulnérable ».

Geneviève Legay, 74 ans, porte-parole d’Attac 06 et militante infatigable pour la paix, a été grièvement blessée par une charge policière, lors de l’acte 19 des Gilets Jaunes ce samedi 23 mars à Nice. Selon son avocat, elle était dimanche matin dans un état stable.

Samedi vers 11h, les CRS ont procédé à une violente charge au cours de laquelle Geneviève est tombée au sol, sa tête heurtant un poteau métallique. De multiples images montrent Geneviève, gilet jaune sur le dos et drapeau arc-en-ciel « Pace » dans les mains, avec une attitude totalement non violente, scander « Liberté de manifester » peu avant la charge policière.

Alors que les précédentes mobilisations des Gilets Jaunes à Nice n’avaient pas entraîné de dégradations, Christian Estrosi, maire de la ville, avait demandé et obtenu une interdiction de manifester dans une grande partie de la ville.
L’interdiction par le préfet des manifestations et rassemblements dans une grande partie de Nice est illégitime et ne peut justifier d’utiliser la force contre des citoyenˑneˑs qui se rassemblent pacifiquement pour exprimer leurs opinions.

Attac France condamne la répression des rassemblements pacifiques qui ont eu lieu ce samedi et s’indigne de la grave restriction des libertés publiques actuellement en cours en France. Ce n’est pas par la répression et les violences policières qu’Emmanuel Macron répondra à la légitime demande de justice sociale qui s’exprime partout dans le pays.

Attac France exige que toute la lumière soit faite et que les responsabilités de ces actes de violence à l’encontre de Geneviève Legay soient clairement établies.

Attac France apporte tout son soutien à Geneviève et à ses proches.

Source https://france.attac.org/actus-et-medias/salle-de-presse/article/genevieve-legay-porte-parole-d-attac-06-grievement-blessee-par-une-charge

 

Conseil de l’Europe et usage du LBD

Répression des gilets jaunes: l’avertissement du Conseil de l’Europe Par Karl Laske

Au terme d’une mission conduite en France, la commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe a recommandé la « suspension » de l’usage du lanceur de balles de défense (LBD) lors des manifestations. Cette décision ouvre la voie à une nouvelle saisine de la Cour européenne des droits de l’homme.

 

Le ministre de l’intérieur Christophe Castaner et son secrétaire d’État Laurent Nuñez entendront-ils l’avertissement ? Pas sûr. La commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe, Dunja Mijatović, a rendu public, mardi, un mémorandum accusateur consacré au maintien de l’ordre dans le contexte du mouvement des gilets jaunes. Elle recommande la « suspension » de l’usage du lanceur de balles de défense (LBD) durant les manifestations, compte tenu du nombre élevé de tirs et de blessés recensés.

« Cette recommandation ouvre la voie à une nouvelle saisine de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) », s’est félicité Me Arié Alimi, l’avocat de Jérôme Rodrigues, le gilet jaune grièvement blessé à l’œil, le 26 janvier, qui a salué un texte « très fort » dans ses préconisations. L’avocat annonce qu’il se prépare à transmettre à la CEDH une « requête en mesure provisoire » visant à suspendre l’usage des LBD dès la prochaine manifestation de samedi, et les suivantes.

En termes diplomatiques, la commissaire aux droits de l’homme appelle la France à « mieux respecter les droits de l’homme lors des opérations de maintien de l’ordre » et, en outre, « à ne pas apporter de restrictions excessives à la liberté de réunion pacifique à travers la proposition de loi visant à renforcer et garantir le maintien de l’ordre public lors des manifestations ». Elle met en garde la France contre l’adoption de la loi anticasseurs.

Cet avertissement intervient après l’adoption au Parlement européen d’une résolution « sur le droit à manifester pacifiquement et l’usage proportionné de la force » approuvée par 438 députés européens – 78 votes contre et 87 absentions. Le 14 février, trois rapporteurs des Nations unies ont par ailleurs jugé que « le droit de manifester en France a été restreint de manière disproportionnée lors des manifestations récentes des gilets jaunes ».

Venue à Paris fin janvier pour y procéder à de nombreuses auditions, Dunja Mijatović « s’inquiète » en particulier « du nombre élevé » de tirs subis par les manifestants au moyen d’armes dites de force intermédiaire – les lanceurs de balles de défense et les grenades à main – « alors même que leur cadre d’emploi est restrictif et qu’ils peuvent provoquer de graves blessures ».

La commissaire aux droits de l’homme a obtenu des autorités françaises des données chiffrées sur les tirs, une information que le ministère de l’intérieur ne divulguait plus depuis le mois de décembre. Entre le début du mouvement des gilets jaunes et le 4 février, les forces de l’ordre françaises ont procédé à 12 122 tirs de lanceur de balle de défense, 1 428 tirs de grenade lacrymogène instantanée (GLI F4) et 4 942 tirs de grenade à main de désencerclement, révèle le rapport de Dunja Mijatović.

La commissaire déplore « un manque de clarté quant aux données relatives aux personnes blessées ». Elle a pris en compte le recensement réalisé par le journaliste David Dufresne – et publié par Mediapart – faisant état de 253 blessés par des « armes de force intermédiaire », dont 193 par des tirs de LBD, sur les 428 signalements collectés, et 189 blessures à la tête, dont 20 éborgnements. Le mémorandum « observe que des armes de défense intermédiaire, en particulier le LBD, sont mises en cause par de nombreuses victimes de ces blessures à la tête alors même que les tirs de LBD doivent, selon les instructions rappelées par le directeur général de la police nationale le 16 janvier 2019, être “ciblées”, le tireur ne devant “viser exclusivement que le torse et les membres supérieurs ou inférieurs” ».

Invité, jeudi, dans l’émission Au tableau ! sur C8, le ministre de l’intérieur Christophe Castaner s’est justement livré à une explication, non parodique, des parties du corps pouvant être visées par les fonctionnaires équipés d’un LBD devant des élèves d’une classe de primaire. « On a eu une dizaine de tirs, où par accident, il y a eu des tirs sur le visage », a-t-il déclaré aux enfants. Dans une réponse à la commissaire aux droits de l’homme, les autorités françaises ont par ailleurs rejeté les décomptes non officiels, contestant les « chiffres avancés » sans toutefois en présenter d’autres.

« Au cours de sa mission, la Commissaire a pu constater, en particulier, que l’usage du lanceur de balles de défense dans le contexte des manifestations était contesté par la plupart de ses interlocuteurs mettant en avant son inadaptation aux opérations de maintien de l’ordre et sa dangerosité dans un tel contexte », signale le mémorandum, mentionnant l’avis du Défenseur des droits, en décembre 2017, réitéré en janvier dernier. Un avis partagé par « de nombreux professionnels de santé » en raison des dommages parfois irréversibles provoqués par des tirs de LBD.

Tout « en condamnant fermement la violence »« les propos et les agressions racistes, antisémites ou homophobes » de « certains manifestants », Dunja Mijatović rappelle que la tâche première des forces de l’ordre « consiste à protéger les citoyens et leurs droits de l’homme ». Or, souligne-t-elle, le nombre et la gravité des blessures infligées aux manifestants montrent que les méthodes employées lors des opérations de maintien de l’ordre sont incompatibles avec le respect de ces droits.

Dans ses conclusions, la commissaire « encourage les autorités à publier des données chiffrées précisant la qualité des personnes blessées (manifestant, passant, membre des forces de l’ordre, etc.), ainsi que la gravité, la localisation des blessures et leur cause lorsque celle-ci est connue ». « Extrêmement préoccupée par le nombre d’allégations sérieuses, concordantes et crédibles de violences policières ayant entraîné des mutilations et de graves blessures, notamment à la tête », Dunja Mijatović considère que « les blessures à la tête occasionnées par des tirs de LBD révèlent un usage disproportionné de la force », « ainsi que l’inadaptation de ce type d’arme au contexte d’opérations de maintien de l’ordre ».

Le Conseil de l’Europe recommande donc à la France de suspendre l’usage du LBD, mais aussi d’engager « au plus vite » la révision de la doctrine d’emploi des armes de force intermédiaire, en se fondant sur « une évaluation approfondie de la dangerosité de ces armes ». « La commissaire signale l’incompatibilité de la stratégie actuelle du maintien de l’ordre avec le respect du droit de manifester, commente Me Arié Alimi. Elle souligne en outre que les interpellations ne peuvent être un outil préventif de maintien de l’ordre. »Au chapitre de ces manœuvres, le syndicat de la magistrature a révélé, lundi, une directive du procureur de la République aux magistrats du parquet de Paris visant à ne lever les gardes à vue que le samedi soir ou le dimanche matin « afin d’éviter que les intéressés ne grossissent à nouveau les rangs des fauteurs de trouble », en faisant fi des décisions de classement sans suite ou des simples rappels à la loi.

Dans son mémorandum, la commissaire Dunja Mijatović s’inquiète précisément « des interpellations et placements en garde à vue de personnes souhaitant se rendre à une manifestation sans qu’aucune infraction ne soit finalement caractérisée ni aucune poursuite engagée à l’issue de ces gardes à vue » ; elle précise que « de telles pratiques constituent de graves ingérences dans l’exercice des libertés d’aller et venir, de réunion et d’expression et invite les autorités à respecter scrupuleusement l’obligation de s’assurer que toute restriction soit strictement nécessaire et à ne pas utiliser ces procédures comme des outils préventifs de maintien de l’ordre ».

Dernier sujet d’inquiétude de la commissaire aux droits de l’homme : le projet de loi anticasseurs, qui pourrait porter atteinte au droit à la liberté de réunion. Elle recommande notamment à la France « de ne pas introduire une interdiction administrative de manifester » qui « constituerait une grave ingérence dans l’exercice de ce droit, alors même que le code de la sécurité intérieure prévoit déjà que l’autorité judiciaire puisse imposer une interdiction de manifester »

Source https://www.mediapart.fr/journal/international/260219/repression-des-gilets-jaunes-l-avertissement-du-conseil-de-l-europe

Les forcenés par Frédéric Lordon

Article de Frédéric Lordon paru dans le monde diplomatique du 9 janvier 2019« Le roi fou ou la folie de Charles VI » (détail), François-Auguste Biard, 1838.

Méthodologiquement, et déontologiquement, il faut maintenir les hypothèses psychiatriques dans un statut d’ultime recours quand il est question de politique, et ne se tourner vers elles qu’après avoir tout essayé. Au point où nous en sommes cependant, observant Macron, Griveaux, écoutant le défilé ininterrompu des députés LREM sur les chaînes d’information continue et les chiens de plage arrière qui font « oui oui » en leur passant les plats, on cherche en tous sens, et surtout en vain, ce qui pourrait nous sauver de ce dernier recours. Après avoir épuisé toutes les explications alternatives, il va falloir s’y résoudre : ces gens sont complètement fous.

On savait depuis longtemps que chaque fois que l’un d’eux dit « j’ai bien entendu » ou « nous sommes à l’écoute », il utilise juste d’autres mots pour dire « nous n’en ferons qu’à notre tête et vous n’existez pas ». Cependant, il y a un point où le cynisme bonnasse de type chiraquien ou hollandiste ne fait plus une hypothèse suffisante. Quand un mouvement quasi-insurrectionnel hurle au gouvernement qu’il mettra le feu plutôt que de continuer dans cette direction, et que le gouvernement lui répond qu’il a « bien entendu » « l’impatience », qu’il a bien compris la demande, l’envie même, d’aller encore « plus loin dans le changement », de se montrer « encore plus radical dans les méthodes et les manières de faire », comment écarter l’hypothèse psychiatrique ? Quel type de rapport Benjamin Griveaux entretient-il avec la réalité quand il se prévaut d’une « envie de changement des Français », en tout cas d’une envie du type de celle qui appellerait sa réponse à lui ? Et, accessoirement, pourquoi ne se trouve-t-il pas un média pour le lui faire remarquer clairement ? En commençant d’ailleurs par lui faire observer que « ses » Français, mesurés au score réel de la présidentielle, font à peine plus de 10 % du corps électoral (1), et qu’ils n’ont porté Macron au pouvoir qu’au terme d’une gigantesque prise d’otages de deuxième tour, méthodiquement agencée de longue date avant le premier — autrement dit sans aucune des « envies » que leur délire Griveaux.

On savait depuis longtemps que chaque fois que l’un d’eux dit « nous sommes à l’écoute », il utilise juste d’autres mots pour dire « nous n’en ferons qu’à notre tête et vous n’existez pas »

Orwell, qui n’est pas redevenu par hasard une référence contemporaine, a dit comme personne le tour de langage propre au pouvoir dictatorial : l’inversion, en fait la négation, systématique des choses par les mots — la guerre qui est la paix, l’esclavage la liberté et l’ignorance la force. Mais c’est autre chose encore, d’une autre nature, qui émane par exemple du discours de « vœux » de Macron. C’est qu’il faut un twist déjà très prononcé pour revendiquer « avoir posé les bases d’une stratégie ambitieuse pour améliorer l’organisation de nos hôpitaux » (2) quand le système de soin est au bord de l’effondrement et que médecins et infirmières en sont à se suicider ; de même pour prétendre « lutter contre le réchauffement climatique » quand les mesures prises finissent par écoeurer un personnage a priori aussi disposé à tous les simulacres que Nicolas Hulot. Ou pour se targuer « d’éradiquer la grande pauvreté » quand, du fait de politiques de guerre sociale à outrance, elle explose dans les statistiques et sous nos yeux mêmes. Il faut avoir passé des caps pour expliquer sans ciller que la transformation « en profondeur des règles de l’indemnisation du chômage », de « l’organisation du secteur public » et de « notre système de retraite », transformations qui promettent les demandeurs d’emploi à une précarité sous surveillance sans précédent, le secteur public au saccage néomanagérial, et les retraités à la misère, pour expliquer, donc, que tous ces bons soins sont faits « au fond pour bâtir les nouvelles sécurités du XXIe siècle ».

À ce stade, l’examen clinique est déjà très lourd, mais il ne prend sa véritable consistance qu’au moment, proprement glaçant, où le sujet déclare placer toutes ses intentions sous le signe de la vérité et de la réalité, et jusqu’à en faire un vœu, « un vœu de vérité » — consciencieusement mâchonné par le commentariat médiatique. C’est alors qu’on le voit passer le 38e parallèle quand, bien en face, il nous souhaite pour 2019 « de ne pas oublier qu’on ne bâtit rien sur des mensonges ». Et c’est à l’instant où il nous sermonne que « nous nous sommes installés dans un déni parfois flagrant de réalité » que toutes les alarmes se mettent à sonner.

C’est donc avec des profils de ce genre qu’il faudrait aller jouer au « grand débat », et avec lesquels la « presse démocratique » appelle elle aussi à aller « parler », puisque « parler », c’est la « démocratie ». Des profils qui ont pourtant annoncé la couleur, qui invitent à discuter de tout mais sous l’évidence préalable qu’« on ne détricotera pas ce qui a été réalisé en dix-huit mois », c’est-à-dire qu’on ne changera rien — sinon à donner du même en pire. On réalise ici que c’est de nouveau à Benjamin Griveaux qu’on doit cet encouragement à débattre, décidément un personnage remarquable, fin connaisseur du pays profond depuis « la clope et le diesel (3) », et l’on se dit qu’on pourra raconter ce qu’on veut à propos des animateurs de l’après-midi « Portes ouvertes » au ministère, sauf qu’ils ont manqué de sens politique.

C’est donc avec des profils de ce genre qu’il faudrait aller jouer au « grand débat »

Comme un événement se reconnaît à sa puissance de classement, à son pouvoir de montrer qui est où, et qui pense quoi — après le TCE de 2005, Trump ou le Brexit, celui des « gilets jaunes » en est un au plus haut point —, l’événement dans l’événement, dont les portes défoncées du ministère fait certainement partie, l’est au carré : il fait tout sortir. À commencer de l’intéressé lui-même qui, pour se refaire une dignité express après avoir changé de linge, va puiser dans les dernières ressources de son lyrisme Sciences-Po pour expliquer que ce qui a été attaqué, « c’est la maison France ». Si l’on prend le parti charitable de considérer que « la maison France » (assez judicieusement rebaptisée par un internaute « la maison Business France ») n’est pas une entité imaginaire pour enfants en bas âge, ou bien pour délirant échappé du CMP, il faut expliquer à Griveaux que, non, c’est bien lui qui a été visé, qu’il n’était d’ailleurs pas illogique qu’il en fût ainsi car, est-il dit quelque part, le malheur va à celui par qui le scandale arrive et que, porte-parole d’une clique qui scandalise le pays, il a lui-même, à force de provocations et de mépris, porté l’outrage général à des sommets qu’on ne peut décemment pas imaginer franchir en toute impunité. Appelons donc Benjamin Griveaux à refaire des distinctions élémentaires, dont la perte est une indication préoccupante de plus : il n’est pas « la maison France » en personne, ni même « les institutions ».

Cette confusion n’existe cependant pas qu’à l’état isolé dans les têtes les plus dérangées de ce gouvernement. Un reportage court mais frappant de l’AFP auprès des forces de l’ordre révélait avec quelle sorte de conditionnement les chefs bourrent les têtes de la troupe avant de l’envoyer matraquer : « ils nous disent que si on perd cette bataille-là tout peut s’effondrer. Ils nous rappellent l’importance de notre métier pour la démocratie et la république (…) Notre vocation, c’est de défendre les institutions (4) », témoigne ainsi l’un d’eux. Brutes fascisées mises à part, qui n’ont besoin d’aucun motif pour cogner, que resterait-il de l’ardeur des policiers si on leur expliquait posément que, Griveaux et Macron dégagés, les « institutions », qui ne se confondent pas avec leurs occupants transitoires, seraient toujours là… accessoirement débarrassées des personnages qui leur bricolent la même vie pourrie que ceux sur qui ils ont ordre d’aller taper ? Défendre Macron n’est pas défendre « les institutions » : c’est défendre Macron — barricadé dans les institutions.

Mais l’on pourrait aussi, à l’exact inverse, répondre tout autre chose au spasme indigné de ce que, sinon « la maison France » du type en rupture de cachets, ce sont « les institutions de la République qu’on attaque », autre chose qui ferait le choix de prendre cette phrase de carton-pâte au sérieux malgré tout, et qui lui dirait que, tout bien réfléchi, en définitive, oui, c’est vrai, il y a de ça. On ne sait jamais trop où se situer entre le trop et le trop peu d’importance accordée aux questions institutionnelles, mais si vraiment les renversés du Fenwick tiennent à en parler, alors oui : se débarrasser des institutions de la Ve République, ça peut en effet faire partie de l’idée générale (5).

Défendre Macron n’est pas défendre « les institutions » : c’est défendre Macron — barricadé dans les institutions

Il faut que les « défenseurs de la démocratie », forcenés médiatiques hurlant à la « sédition » et aux « factieux » avec les forcenés politiques, aient perdu de longue date l’idée de la démocratie qui, il faut visiblement le leur rappeler, consiste en l’activité autonome par lesquelles les peuples créent non seulement leurs lois mais leurs institutions — créent, c’est-à-dire s’autorisent à recréer chaque fois qu’ils le jugent opportun. On aura donc du mal à tenir le renversement des institutions en vue de refaire de nouvelles institutions pour une activité opposée à la démocratie quand elle en est l’expression même.

Pour parler aux forcenés avec des références simples qu’ils peuvent peut-être comprendre, de Gaulle en 1958, par exemple, se propose de « renverser les institutions de la république » — la IVe. Comme on sait, il s’est alors agi, dans la manière, davantage d’un coup d’État que d’une refondation démocratique, mais comme de Gaulle est leur doudou à tous, et qu’ils tiennent tous ce cas de « renversement des institutions de la république » pour une chose très admirable, un argument a fortiori devrait les convaincre sans peine que la même chose appliquée à la Ve, mais avec beaucoup de monde au lieu d’une sorte de junte, est encore plus exemplairement démocratique.

Pour tout dire, on sait bien qu’aucun argument ni aucune logique n’auront plus la moindre prise sur ces esprits. Tout autant que ce gouvernement, la presse mainstream qui fait bloc avec lui a quitté le réel. Départ qui hésite entre les formes du grotesque et celles du refuge dans les principes supérieurs, crécelles à tourner quand, le dos au mur, on n’a plus rien à dire. Le grotesque par exemple quand France Inter convie une « spécialiste des discours politiques » à commenter les vœux de Macron et, joignant le pire radiophonique au pire universitaire, obtient sans peine de l’invitée choisie à cette fin que prononcer les vœux debout, c’est « donner une image de dynamisme et de jeunesse », mais aussi « casser l’image très éloignée des Français (6) » — avouons qu’ici le « service public » ne pouvait guère cerner de plus près le sentiment du public, à qui l’écoute de l’allocution présidentielle a certainement fait cet effet-là exactement, et inspiré des pensées toutes pareilles. « Donc un président qui a entendu, et qui se remet en marche » résume Alexandra Bensaïd, avec une parfaite objectivité, elle aussi vouée à tomber des nues le jour où les portes de la Maison de la Radio seront à leur tour enfoncées à l’engin de chantier.

Comme par une sorte de prescience du Fenwick qui vient, le monde des médias prend les devants et n’en finit plus de s’envelopper préventivement dans la « démocratie », de crier que si on lui touche un cheveu à lui, c’est elle qu’on assassine, et qu’il n’y a pas de plus grand crime. Alors dans une crise d’écholalie qui sent les paniques terminales, il ne dit plus, en boucle et en désordre, que « république », « les institutions », « démocratie » et « liberté de la presse ». Mais il y a belle lurette que « la démocratie », dans ces bouches, n’est qu’un mot ectoplasme, comme « presse libre », et ça n’est certainement pas un hasard que les deux se serrent l’un contre l’autre pour tenter de se sauver solidairement — la « démocratie » du capital accrochée à la « presse libre » du capital (ou à celle de l’État du capital).

Déjà au naturel apparentées à ces concepts dont Deleuze disait qu’ils sont « gros comme des dents creuses », la « presse libre » et la « démocratie » sont des abstractions vides de sens, dont les tenants voudraient qu’on les révère en principe, alors qu’on n’en juge qu’en situation. Montrez-nous telle presse, et tel système de gouvernement, nous vous dirons s’ils sont libres et démocratiques, indépendamment des étiquettes avantageuses qu’ils se donnent, et pour le reste, inutile de s’agiter avec des généralités à faire du vent. Quel effet pourrait bien nous faire par exemple l’étiquette de « presse libre, pilier de la démocratie » quand on écoute BFM, France Info (qui est pire que BFM), ou qu’on lit le JDD en ce moment ?

On comprend en tout cas que, dans toute cette affaire, la question de la violence soit le point de cristallisation absolue

On comprend en tout cas que, dans toute cette affaire, la question de la violence soit le point de cristallisation absolue. D’abord parce qu’elle répond à une série d’égalités ou d’oppositions entre « dents creuses » suffisamment rudimentaires pour entrer dans des têtes de journaliste : violence = contraire de démocratie ; or démocratie = bien suprême, et incidemment démocratie = presse (libre) ; donc presse libre = bien suprême, et violence = ennemi de presse libre (spécialement quand ça commence à chauffer à proximité des sièges de médias). Mais aussi, bien plus encore, parce que la violence n’est pas que le point d’outrage, ou de terreur, de la « presse libre » : elle est son point de mauvaise conscience.

Depuis trente ans en effet, la structure institutionnelle d’ensemble, dont les médias sont un élément décisif, n’a pas cessé d’organiser la cécité, la surdité et la tranquillité des puissants — dont Griveaux est le produit achevé, la forme pure : « à l’écoute », il « entend » qu’il faut accélérer, et puis s’étonne de se retrouver avec une porte cochère sur les bras. Or depuis 1995 jusqu’à aujourd’hui, en passant par Le Pen en 2002, le TCE de 2005, le Brexit, Trump, etc., les médias dominants se sont scrupuleusement tenus à leur tâche de gardiennage qui consistait à renvoyer toute manifestation de mécontentement à l’irrationalité et toute demande d’alternative à l’irresponsabilité, pour placer la continuité gouvernementale néolibérale hors d’atteinte. Quand tous les médiateurs, médiatiques et syndicaux, ont cessé depuis trois décennies de médiatiser quoi que ce soit, quand le jeu ordinaire des institutions ne produit plus que du Griveaux, et que sa manière très spéciale « d’écouter » est bénie, au moins par omission, par la corporation éditorialiste, il ne faut pas s’étonner qu’ayant parlé si longtemps dans le vide et à bout de souffrances, le peuple n’ait plus d’autre solution sous la main que de prendre la rue et d’enfoncer les portes pour se faire entendre une bonne fois.

Depuis trente ans en effet, la structure institutionnelle d’ensemble, dont les médias sont un élément décisif, n’a pas cessé d’organiser la cécité, la surdité et la tranquillité des puissants

On comprend mieux que les médias soient accrochés à leur cher tamis, celui qui doit faire le tri des « agitateurs factieux » et des « gilets jaunes pacifiques ». Il leur sera difficile d’admettre, comme en témoignent pourtant les sondages aussi bien que la « cagnotte du boxeur », que les seconds soutiennent tacitement, voire explicitement, les premiers. Et que ces seconds voient très bien que, sans ces premiers, ils n’auraient même pas obtenu les miettes qui leur ont été octroyées avec condescendance, car toute manifestation « citoyenne » et « pacifique » est vouée à la nullité dans le système de la surdité institutionnelle organisée — un mois de quasi-insurrection pour un moratoire sur l’essence et quelques clopinettes autour du SMIC : nous connaissons maintenant les tarifs de la « démocratie à l’écoute ».

La « violence » dont s’épouvante la corporation, et dont elle voudrait épouvanter avec elle le reste de la population, offre donc en creux l’exacte mesure de sa carence. Et comme il est trop tard, comme par ailleurs, à l’image de tous les pouvoirs, le pouvoir médiatique est incapable du moindre apprentissage — les médias ne font-ils pas partie depuis des décennies des institutions les plus détestées, et qu’ont-ils fait, année après année, sinon enregistrer stupidement leur discrédit sans rien changer ? —, alors la corporation campera sur ses équations pour débiles légers : violence = mal incompréhensible, en fait même inconcevable.

Feignant de ne rien comprendre, ou ne comprenant rien vraiment, les médias croient qu’on les chicane injustement sur des questions de comptage, ou bien pour avoir montré quelques fascistes au milieu des « gilets jaunes » — avec l’appui de sociologues à la pointe de la connaissance scientifique, comme Michel Wieviorka, qui a « vu dans Paris des tags avec un « A » entouré, qui est un signe d’extrême-droite (7) ». Aussi bien éclairés, on comprend qu’ils ne puissent pas voir qu’à part leur racisme social foncier, c’est par leur fusion manifeste avec toutes les vues des dominants, et plus encore sur la question de la violence que se joue actuellement leur infamie. Répéter jusqu’à la nausée « casseurs », ne montrer que la violence des manifestants, occulter systématiquement celles de la police, c’est infâme.

Aussi bien l’expérience concrète que l’enquête tant soit peu soigneuse confirment que la police porte la responsabilité pratique du niveau des violences. L’expérience concrète car, depuis 2016 déjà, on ne compte plus les témoignages de manifestants parfaitement pacifiques que le matraquage sans motif, sans préavis, et sans justification, a rendus enragés, et déterminés à ne plus se laisser faire « la fois d’après ». Quant à l’enquête, celle de Laurent Bonelli rapporte ce propos recueilli d’un « haut responsable des forces de maintien de l’ordre » : « c’est nous, l’institution, qui fixons le niveau de violence de départ. Plus la nôtre est haute, plus celle des manifestants l’est aussi ». Voilà ce qu’on ne lira jamais dans la presse mainstream.

Qui n’en cultive pas moins l’hypocrisie minimale lui permettant de se croire quitte de ses devoirs « d’informer ». Car, se récriera-t-elle, elle « en parle » ! Si en effet, passé samedi soir, où l’un des journalistes de France Info, un certain Pierre Neveux, encore plus en roue libre que ses collègues, suggère au sous-ministre de l’intérieur d’interdire purement et simplement les manifestations, un flash de dimanche après-midi mentionne bel et bien la scène du flic tabasseur de Toulon. Mais pour l’accompagner d’une interview d’un syndicaliste… de la police, et sans omettre la plus petite des circonstances justificatrices, quitte à relayer toutes les fabrications policières s’il le faut. Pendant ce temps, le boxeur de CRS, lui, est omniprésent. Car voilà toute l’affaire : l’omniprésence, ça s’organise. Et, forcément, ça s’organise sélectivement.

Un journaliste cependant sauve l’honneur de la profession (heureusement, il n’y en a pas qu’un) : David Dufresne a tenu un compte scrupuleux des violences policières, sauvages, gratuites, illégales. 230 signalements depuis un mois, une encyclopédie de la honte « démocratique », dont la moindre image soulève le cœur et l’indignation. Et surtout — c’est bien ça le problème — suffirait à retourner l’opinion comme une crêpe. Mais qui lui donne la parole ? Envoyé spécial, brièvement et dans un exercice d’équilibrisme visiblement sous haute surveillance. Et Le Média, seul de son genre, dans une émission comme on est bien certain qu’on n’en verra nulle part ailleurs de pareille. Car dans le cercle des médias installés, pas un n’a encore trouvé la force d’articuler explicitement cette vérité de l’époque Macron qu’aller manifester emporte le risque d’une blessure de guerre, ou de sanctions judiciaires ahurissantes. Ni plus ni moins. On attend toujours de voir la « presse démocratique » éditorialiser ou, comme il lui reviendrait en réalité, faire campagne sur ce thème, à l’appel par exemple des avertissements répétés des institutions internationales, ONU, CEDH, Amnesty International. Car, là encore, il y a une différence entre se dédouaner à peu de frais de la restitution des « faits » et en faire quelque chose. Comme les médias croient se dédouaner, à l’image du Monde, en couvrant le mouvement, pour finir par éditorialiser que l’ordre macronien est le bon et que ceux qui persistent à le contester ne sont plus que des « irréductibles violents (8) », ils rapportent a minima quelques cas de violences policières, et puis éditorialisent… ailleurs, c’est-à-dire rien. Manifester, blessure de guerre — mais rien.

Il apparaît donc que la « presse démocratique » se moque absolument des atteintes réelles à la démocratie. Traquant la fake news jusqu’à l’écœurement, sans d’ailleurs jamais qualifier comme telles toutes celles qui viennent de l’intérieur de son propre système, elle est devenue l’institution centrale de la fake democracy. Et elle s’étonne que les mots-amulettes aient perdu toute efficacité, que les gueux ne mettent plus genou à terre devant le crucifix de la « presse libre », elle se consterne que, ne trouvant rien d’autre pour sa défense que de se réfugier dans « la dent creuse » des principes supérieurs, elle ne recueille plus que les lazzis dans le meilleur des cas, et la rage, à son tour maintenant — implacable mécanique de la solidarité des pouvoirs forcenés : comme ils ont régné ensemble, ils tombent ensemble.

En tout cas on l’a compris, ce pouvoir médiatique n’est pas moins forcené que ce pouvoir politique

En l’occurrence ce sont les troupiers médiatiques qui tombent les premiers — comme dans toutes les guerres, les bidasses ramassent pour les généraux. Au reste, on n’est pas tout à fait certain de la mesure dans laquelle, à BFM, les options idéologiques de la base diffèrent de celles du sommet. À tout le moins, il semble que le compte n’y soit plus suffisamment pour continuer de se faire traiter « d’enculé » et sortir méchamment des cortèges en conséquence des agissements de la chefferie. Si cependant les reporters de BFM avaient deux sous d’analyse, ils donneraient à leur débrayage un tout autre sens que celui d’un « boycott de la couverture des “gilets jaunes” » : le sens d’une grève, c’est-à-dire d’un avertissement à leur direction, responsable réelle de la situation impossible où ils se trouvent. Du reste, exactement de la même manière que les CRS devraient poser le casque en un geste de défiance enfin bien adressé : à l’endroit du gouvernement, qui répand une colère écumante et laisse ses prolos du maintien de l’ordre aller en accuser réception à sa place.

En tout cas on l’a compris, ce pouvoir médiatique n’est pas moins forcené que ce pouvoir politique. Tous ses choix, et plus encore ses non-choix, le confirment. De quoi parle-t-il, et de quoi ne parle-t-il pas ? Et comment parle-t-il de ce dont il parle, croyant être à jour de ses obligations du seul fait « d’en avoir parlé » ? Pourquoi, par exemple, les médias mainstream qui n’aiment rien tant que se voir partir en croisade et se faire un blason d’investigateurs avec les Leaks et les Papers (qu’on leur envoie) ont-ils fait si peu de choses de ce mail des Macronleaks expliquant benoîtement que les taxes essence étaient écologiques comme Bernard Arnault un militant de la cause du peuple : elles n’étaient faites que pour financer les baisses de cotisations du CICE ? Pourquoi n’en ont-ils pas fait une campagne, comme ils l’ont fait avec entrain au début pour expliquer que les « gilets jaunes » et leurs carrioles puantes étaient les ennemis de la planète ? Pourquoi cet élément accablant n’a-t-il pas fait toutes les une écrites et audiovisuelles pendant plusieurs jours d’affilée, puisque c’est le genre d’opération pour lesquelles les chefferies ont une passion ?

Pourquoi, également, ne se sont-ils pas saisis de cet accident d’un ouvrier de 68 ans, auto-entrepreneur, mort d’être tombé d’un toit, fait qui n’a rien de « divers » puisque, non seulement il dit tout de l’époque, mais qu’il épouse parfaitement le moment ? 68 ans, ouvrier, auto-entrepreneur, mort au travail : n’y avait-il pas de quoi faire quelque chose de cette sorte de synthèse parfaite ?

Du code du travail à la gueule des manifestants, ce sont eux qui cassent tout — c’est bien ça le problème avec les forcenés : ils cassent tout

Pourquoi, encore, se sont-ils joints au ministère de l’intérieur pour crier au scandale à propos de la guillotine en carton, au mépris de toute l’histoire populaire des effigies ? Au mépris surtout de ce qu’à fermer jusqu’aux formes symboliques de l’expression de la colère, après en avoir fermé toutes les formes politiques, ils devraient se demander quelles solutions d’expression ils lui laissent.

Les vrais forcenés sont ceux dont le pouvoir, joint à l’acharnement, produisent ce genre de situation. Du code du travail à la gueule des manifestants, ce sont eux qui cassent tout — c’est bien ça le problème avec les forcenés : ils cassent tout. Cependant, il y a un moyen très simple de les en empêcher : on leur envoie les infirmiers. Les « gilets jaunes » le pressentent-ils : il y a quelque chose en eux de la blouse blanche.

Frédéric Lordon

(1) À 79 % de taux de participation et 45 % de vote utile (mesurés par un sondage Opinionway), les 24,1 % de Macron au premier tour donnent un soutien réel de 10,47 % des inscrits.

(2) Emmanuel Macron, « Vœux 2019 aux Français », 31 décembre 2018.

(3) « Pour Griveaux, Wauquiez est « le candidat des gars qui fument des clopes et roulent au diesel » », JDD, 2 décembre 2018.

(4) « Si on perd cette bataille-là, tout peut s’effondrer », AFP, 9 décembre 2018.

(5) Fenwick est une marque bien connue de chariot élévateur.

(6) Cécile Alduy, Le 7/9, France Inter, 1er janvier 2019.

(7) « L’Info du vrai », CNews, 7 janvier 2019.

(8) Éditorial, « Gilets jaunes : sortir de l’impasse », Le Monde, 24 décembre 2018.

Source https://blog.mondediplo.net/les-forcenes

Festival de soutien aux 4 de Valence

Soutien à Tom, Stéphane, Maria et Dylan,

les 4 inculpé.es de Valence

Rendez-vous à la salle des fêtes et à la salle paroissiale de Saillans les 11, 12 et 13 janvier

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Une manifestation, 4 arrestations, 9 points de suture, 1 tir de flashball, 1 tir de taser, 48 jours de prison préventive, des dizaines de vies tourmentées, 4 mises en liberté, des joies inquantifiables, des soulagements, 2380 photocopies, 4 heures d’audience, des larmes innombrables, 3 avocat·e·s, 6000 € de frais, 3 juges, … 1 délibéré : 4 ans et 3 mois de prison, 4000€ de dommages et intérêts, 12 ans d’interdiction de manifester …  des centaines de vies chamboulées, et mobilisées !

À part ça, tout va bien !

Nous, ami·e·s, familles, proches et moins proches, acteurs·trices de la vie locale, compagnons·es de route, voisin·e·s solidaires, désirons apporter notre soutien à Dylan, Maria, Stéphane et Tom, lourdement condamné·e·s le 26 décembre 2018 à Valence.

Face à la violence policière, judiciaire, institutionnelle, face à de telles condamnations, nous avons imaginé, rapidement, dans l’urgence de ce qui se vit ici, un festival pour échanger autour des questions que soulève ce qu’ont vécu Dylan, Maria, Stéphane et Tom, mais aussi un festival pour fêter la solidarité qui, de toute part, arrive et devient concrète.

Pour la liberté d’expression, pour la liberté de manifester, pour se rencontrer, pour s’informer et pour se former.

Venez nombreux·euses les 11, 12 et 13 janvier 2019 à Saillans.

Pour la liberté d’expression et de manifester, au delà de toute appartenance à un mouvement ou parti politique.

* PROGRAMMATION * (en cours, à retrouver sur  http://www.apartcatoutvabien.org/ )
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REMUE-MÉNINGES : ateliers, projections, débats, informations

Samedi 12 janvier et dimanche 13 janvier de 10H À 18H30, salle St Géraud

– Les violences policières

– Que faire face à la police et à la justice (les droits à connaître et les réflexes à avoir)

– La stratégie judiciaire pour affaiblir les mouvements sociaux

– Médias de proximité et indépendants, manières de communiquer localement

– Formes de pensée divergentes

– Le traitement médiatique des luttes et des mouvements sociaux

EFFERVESCENCE : concerts, spectacles, ateliers pour adultes et enfants

Vendredi 11 et samedi 12 janvier, de 19H À 1H, salle des fêtes

Dimanche 13 janvier, de 11H à 20H, salle des fêtes

Week-end festif avec une quinzaine de formations musicales, théâtrales, artistiques et engagées.

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* INFORMATIONS PRATIQUES *
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Entrée prix libre, reversée aux caisses de soutien des inculpé·e·s
Cantine et lutto-thèque sur place
Organisation et concerts 100 % bénévole – vous pouvez nous aider !
Adresses :
    • Salle St Géraud, boulevard de l’Écho, 26340 Saillans
    • Salle des Fêtes, rue de la République, 26340 Saillans
Retrouvez toutes les informations surhttp://www.apartcatoutvabien.org/

ESPACE D’EXPRESSION LIBRE ET CRÉATIVE SUR SURFACES PLANES [exposition participative]

À l’occasion de ces trois jours de festival, petits et grands seront conviés à afficher leurs œuvres sur papier* à la salle des fêtes pour une exposition évolutive au pied levé. Poèmes, gribouillis, témoignages, collages, fresques (de format modeste), cadavres exquis, mots doux ou rageurs, … Tout ce que vous inspire ce festival et les évènements qui y sont liés sera bienvenu pour un grand déballage collectif. Un espace de création (avec papier, crayons et autres ustensiles basiques) sera mis en place pendant les horaires d’ouverture de la salle des fêtes pour ceux qui n’auront pas couché leurs idées au préalable.

Pour déposer vos œuvres (à Saillans ou via courrier électronique) avant le festival, merci de vous mettre en relation avec Yannis (yannisfrier@gmail.com).

* carton, tissus et autres surfaces peu épaisses et très légères ne seront pas exclues !

https://www.facebook.com/events/618586185246297/

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