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Archives de catégorie Luttes- Changer le système

Appel urgent de VIOME

Nous, les travailleurs de VIO.ME en lutte pour faire fonctionner à nouveau l’usine, avons entendu beaucoup de promesses, beaucoup de bonnes paroles sur la pureté de notre lutte ainsi que de nombreuses dénonciations et menaces.

De temps à autre, on a essayé de nous assimiler à un système qui n’a pas suffisamment de place pour nous, de nous mettre dans les rouages de la bureaucratie à laquelle nous nous opposons quand il s’agit de financements et de subventions.

Puis, nous avons rencontré l’impuissance et le manque de volonté de faire ce qui était évident, c’est-à-dire de légaliser le fonctionnement de l’usine.

On a également essayé de nous présenter comme coupables, car nous revendiquons notre droit au travail et à la vie (en assumant bien sûr tout le fardeau de la gestion de l’usine), par opposition aux entrepreneurs de bonne réputation qui saisissent les profits mais laissent les dettes aux travailleurs.

Bien sûr, le nouvel état de choses nuit à ceux qui perdent le pouvoir, mais il nous nuit encore plus qui sommes exposés, sans beaucoup d’armes, à un pouvoir agressif et résolu.

Nous savons tous parfaitement que le nouveau gouvernement n’est pas simplement défavorable à VIO.ME mais s’y oppose fermement, à nous comme à tous ceux qui peuvent défier le capital. Nous pensons que son premier angle d’attaque sera de nous couper l’électricité. C’est la raison pour laquelle nous demandons de l’aide aux mouvements de solidarité pour acquérir un groupe électrogène qui évitera les ruptures de production et nous aidera à devenir indépendants. La production qui nous maintient en vie ne doit pas s’arrêter pour une seule minute !!!

Nous appelons donc les syndicats, les collectifs, nos compagnons de lutte grecs, européenns et partout dans le monde à participer à l’acquisition d’un générateur de 200 KVA pouvant fonctionner au biodiesel.

Solidairement

Les travailleurs de VIO.ME en lutte

P.S. La meilleure solution serait de trouver une usine de production de groupes électrogènes qui, avec la garantie du mouvement solidaire, nous permettrait de l’obtenir au plus vite!

ANY CONTRIBUTION IS HELPFUL!

on peut trouver le lien paypal à droite en haut sur le site de VIOME http://www.viome.org

Lettre ouverte à Emmanuel Macron , par Geneviève Legay

« Lettre ouverte à Emmanuel Macron », par Geneviève Legay

Au détricoteur des services publics qui lui demandait d’être « sage », Geneviève Legay, talentueuse tricoteuse, lui retourne le compliment par une lettre ouverte accompagnée d’un petit gilet jaune et du drapeau « PAIX ».

La Trinité (06), le 27 juin 2019

Monsieur le Président de la République,

Je souhaite revenir sur vos déclarations du 23 mars 2019, lors de votre passage à Nice, concernant le fait que je serais tombée toute seule ! Vous avez osé affirmer qu’aucun policier ne m’avait touchée ! Espérons que la justice sera plus honnête, au regard de ce qu’ont avoué le procureur de Nice et un policier. Aussi, nous prouverons que ce n’est pas un accident, mais bien des policiers qui m’ont agressée.

De plus, vous avez dit que j’aurais dû rester chez moi. Madame Redouane Zineb était chez elle et, malgré tout, vos policiers l’ont tuée. Qu’avez-vous fait ? Le silence total et plus personne n’en parle. Quel mépris ! Pourtant, cette personne ne manifestait pas.

Nous sommes en France, et, depuis quelque temps, en insécurité permanente. Il ne fait pas bon vivre en macronie parce que, évidemment, vos forces de l’ordre, voire du « désordre » répondent à la politique de Monsieur Castaner et vous-même.

Vos discours sont trop souvent méprisants. Vous n’êtes que mépris. C’est une habitude chez vous de tenir des propos condescendants envers les gens d’en bas, « ceux qui ne sont rien ». Nombre de personnes le constatent depuis plus deux ans.

J’ai 73 ans et suis fière d’être une citoyenne à part entière. Aussi, ne vous en déplaise, je revendique ma liberté de manifester, entre autres, face à vos choix politiques.

Pour vous, qu’est-ce que la sagesse dont je devrais faire preuve ?
C’est accepter la politique que vous imposez comme si aucune alternative n’était possible ?
C’est se laisser dépouiller sans rien dire alors que vous prenez aux pauvres pour donner aux riches ?

Non, je ne vous écouterai pas, bien au contraire, je continuerai à manifester car tout ce que le peuple a obtenu, c’est par de hautes luttes. Le code du travail compilait 150 ans de conquêtes sociales, vous le détricotez ; la sécurité sociale, véritable bijou que le monde entier nous envie, vous l’offrez aux appétits des assurances ; vous organisez la contre-réforme des retraites, vous cassez l’assurance chômage, vous bradez notre patrimoine, vous détruisez les services publics, toujours pour privilégier le privé, notamment en cassant les hôpitaux de l’intérieur…

Votre politique est une véritable honte au regard de celle qui fait cohérence et qui fait peuple.

Vous détricotez, moi je tricote et vous fais parvenir un gilet jaune et un drapeau de la PAIX (faits avec des restes de pelotes).

Voyez-vous, ce sont des symboles face à votre mise en oeuvre de démolition, ainsi que celle de votre entourage, de ce qui faisait société, qui permettait de vivre (certes pas très bien depuis 35 ans) et non de survivre. Avec mes camarades d’Attac, des Gilets jaunes, des syndicats et partis politiques progressistes, nous serons toujours et encore face à vous et vos complices contre cette politique infâme…

Pour tout cela, la citoyenne que je suis ne peut pas vous saluer.

Geneviève Legay

« Si toute vie va inévitablement vers sa fin, nous devons, durant la nôtre, la colorier avec des couleurs d’amour et d’espoir. » – Marc CHAGALL

Entretien Yannis Youlountas

J’ai fait une exception à la règle en parlant pour la première fois à un média mainstream grec (mais pas n’importe lequel), et ce, à la demande de mes compagnons de luttes à Exarcheia. Pourquoi me direz-vous ? L’explication est dans l’article en question : un grand entretien paru hier dans Popaganda. N’hésitez pas à me dire sincèrement votre avis dans les commentaires.

« YANNIS YOULOUNTAS : NOUS N’AVONS PLUS D’AUTRES CHOIX QUE L’UTOPIE OU LA DYSTOPIE

Suite à l’attaque fasciste qu’il a subi il y a un mois au Pirée, l’écrivain, activiste, antifasciste et anarchiste Yannis Youlountas répond à Maria Louka, une invitation à lutter pour un monde meilleur.

Journaliste : Maria Louka / Photographe : Alexandros Katsis / Traduit du grec par Marietta Simegiatou.

[Intro]

Le 13 juin, un groupe de fascistes a attaqué un homme au Pirée. À la nuit tombée, dans un lieu isolé, à quatre contre un. C’est comme ça que les fascistes font leur sale besogne. Dans l’obscurité et en bande, dans le seul but de blesser et de terroriser leurs victimes.

Yannis Youlountas a sans doute eu mal durant l’affrontement, il a aussitôt après été emmené à l’hôpital, mais très rapidement, sans faiblir, il est retourné dans son espace de prédilection : sur la route, parmi ceux qui luttent. Il n’est pas de cette gauche bobo qui circule avec des vestes bien repassées sur les plateaux de télévision, qui mettent en avant leur titres dans la haute société, et qui font des sourires promotionnels. Il n’est pas non plus de ces artistes neutres qui se cachent à l’abri de la forme artistique pour ne pas se mêler de l’incendie qui ravage tout autour d’eux.

Il fait partie de ceux que Kerouac a qualifiés « les fous, les inadaptés, les fauteurs de troubles, les révolutionnaires … qui sont assez fous pour croire qu’ils peuvent changer le monde et qui, à la fin, y parviennent. »

Partageant sa vie entre la France et la Grèce, mais avant tout citoyen d’un monde dont il ne reconnait pas les frontières, réalisateur, écrivain et poète, activiste, antifasciste et anarchiste, Yannis Youlountas a, depuis un très jeune âge, pris position dans les conflits sociaux en faveur des opprimés.

Avec un long parcours dans les mouvements sociaux français et grecs, et toujours en première ligne du front antifasciste, il incarne ces dernières années tout ce que le gouvernement et son discours médiatique diabolise. Il est un fervent participant des collectifs autogérés, telles que les occupations pour les réfugiés que le nouveau ministre de l’intérieur Michalis Chryssochoidis menace de démolir comme il a autrefois démoli la dignité des femmes séropositives. Il est un relais crucial dans la construction d’un mouvement de solidarité international, lié à des personnalités insoumises de notre temps, comme Pia Klemp, la capitaine de navire qui sauve des réfugiés en Méditerranée. Il organise les campagnes internationales de soutien politique et économique à Rouvikonas pour couvrir les frais juridiques supportés par ses membres et croit profondément que la véritable forteresse à anéantir n’est pas Exarcheia mais le capitalisme.

Tout cela et beaucoup d’autres choses encore sont racontées dans son entretien avec Popaganda.

[Entretien]

Maria Louka — Yannis, raconte-nous quelque chose à propos de ton histoire personnelle. Comment la France et la Grèce se croisent dans ta vie ?

Yannis Youlountas — Je suis né en France le 21 septembre 1970, d’une mère française et d’un père grec de Rethymnon en Crète. Ouvrier, issu d’une famille très pauvre de huit enfants, il a quitté l’école dès 11 ans et a reçu sa première paire de chaussures fermées à 13 ans. De l’autre côté, ma mère est issue d’une famille d’enseignants. Elle a étudié la philosophie et a rejoint le mouvement Freinet pour une pédagogie coopérative et libertaire. Ils se sont rencontrés en 1969, pendant la junte des Colonels, et sont ensuite partis pour la France. C’est là que je suis né. Ils se sont ensuite séparés au bout de quelques années. J’ai grandi entre deux logements dont l’un était plein de livres jusque dans les toilettes, et l’autre sans même un dictionnaire. Depuis lors, j’ai compris que les inégalités sont non seulement économiques, mais aussi culturelles. Comme Bourdieu l’a écrit, la lutte n’est pas seulement une affaire de classes sociales, aussi de connaissance.

M.L. — Tu penses donc que les différences dans ta famille ont été le premier stimulant de ta politisation ?

Y.Y. — Oui, les inégalités entre mes parents ont été déterminantes dans ma prise de conscience. Mon père a passé de longues périodes de chômage durant lesquelles j’ai cherché avec lui des champignons, des escargots et des asperges sauvages par nécessité, pour avoir assez à manger. Bien avant de lire des ouvrages analysant les rapports de classes, j’avais déjà développé ma propre représentation.

L’éducation a également joué un rôle important dans ma vie. J’ai étudié de trois façons différentes. Tout d’abord dans une école autoritaire où régnait la violence et compétition. Ensuite, j’ai vécu deux années sans aller du tout à l’école aux côtés de mon grand-père français, durant la séparation entre mes parents. Puis, je me suis familiarisé avec la pédagogie Freinet, coopérative et libertaire, d’abord en tant qu’enfant, puis en tant qu’adulte. Des expériences passionnantes.

La vie est faite de temps et de mouvement. Et c’est précisément ce que confisque le système éducatif aux enfants : la vie elle-même. Alors que les parents ont appris aux enfants à parler et à se tenir debout, le système éducatif leur apprend aussitôt après à se taire et à s’asseoir. C’est pourquoi je participe aux mouvements d’éducation coopérative et libertaire en France et en Grèce, notamment au sein du réseau École Buissonnière-Pédagogie Freinet en Grèce. Je trouve ça très important. Pour changer la société, la lutte contre le gouvernement et l’État ne suffit pas. Les dés idéologiques sont jetés très tôt dans l’existence. La libération des enfants de l’éducation autoritaire est donc une étape indispensable vers un autre futur.

M.L. — Sur cette base, ton identité politique est donc antiautoritaire ?

Y.Y. — Oui. J’aime beaucoup les textes de Marx quant à son analyse du capitalisme, mais je suis convaincu avec Bakounine qu’il faut dissoudre l’État et basculer dans l’autogestion, car le pouvoir finit toujours par corrompre ceux qui le détiennent. Les travaux de Foucault sur la normalité, la surveillance, les prisons et la technologie m’ont également influencé. Tout ce qu’il a écrit se confirme : car chaque jour, nous cédons une partie de notre liberté à la technologie et nous acceptons de mettre notre vie quotidienne sous contrôle. Imaginons un instant si Hitler et sa Gestapo avaient disposé de pouvoirs technologiques de surveillance aussi sophistiqués : un cauchemar !

En France, je suis membre d’un groupe libertaire près de Toulouse, dans le département du Tarn, un groupe composite avec des membres venus de divers horizons, dont la plupart sont fédérés à la fédération anarchiste, Son nom, groupe ELAFF, signifie : écologistes, libertaires, antifascistes et féministes. Je fréquente aussi les mouvements libertaires catalans, en particulier à Barcelone.

M.L. — Tu as réalisé plusieurs films documentaires en Grèce. Cette activité a-t-elle une vocation historique, est-ce une sorte d’enregistrement de choses vues et vécues pour rétablir des faits historiques occultés ou déformés ?

Y.Y. — Depuis sept ans, j’ai réalisé trois documentaires : Ne vivons plus comme des esclaves, Je lutte donc je suis et L’Amour et la Révolution. Et j’ai commencé le tournage d’un quatrième. Je ne fais pas des films pour faire œuvre ou me faire connaître. Ce qui m’intéresse, c’est d’utiliser les outils de l’art pour bâtir de quoi comprendre et, peut-être, changer la société. Je me fiche de l’art pour l’art. Ce qui m’importe, c’est la vie elle-même. Nous pourrions aisément obtenir des subventions de l’État pour produire nos films, les uns après les autres, vu qu’ils ont toujours bien circulé dans les cinémas et qu’ils nous donnent donc le droit de le faire. Mais, avec mes proches, nous avons choisi de refuser toute collaboration avec l’État de même qu’avec les chaînes de télévision auxquelles nous avons systématiquement refusé les rares propositions de passer nos films. En agissant ainsi, nous nous rendons bien sûr la tâche plus difficile, mais nous restons authentiquement indépendants. Nous avons choisi, contre vents et marées, de rester modestes et à bonne distance du pouvoir et de la société spectaculaire. Nos films sont disponibles gratuitement sur Internet et tout le monde peut les voir et, par exemple, organiser des projections dans des lieux de luttes. C’est la même chose pour tous les livres que j’ai publiés. Je n’ai jamais utilisé le copyright, mais le creative commons, donnant la liberté de reproduire à des fins non commerciales. Je ne suis pas non plus rémunéré pour les films, uniquement défrayé. Mon travail professionnel est différent. Je travaille un peu partout pour des structures qui aident des groupes sociaux très vulnérables : sans-abris, prisonniers, élèves renvoyés de leur collège (dans le cadre d’ateliers relais), personnes souffrant de tendances suicidaires ou de dépendance à des drogues, et surtout je travaille dans des médiathèques et des écoles sous forme d’ateliers de philosophie qu’on appelle aussi goûters philo. Voilà pourquoi je ne veux pas gagner d’argent avec ce que je fais pour aider le mouvement. Mais je ne critique pas ceux qui se font payer ou reçoivent des subventions, c’est leur choix et souvent une nécessité. Je suis radical mais je ne veux pas être sectaire.

M.L. — Dans cette vie quotidienne partagée entre la France et la Grèce, tu soutiens beaucoup les squats de réfugiés. Qu’est-ce qu’ils représentent pour toi ?

Y.Y. — Je suis membre de l’assemblée du premier squat ouvert durant la crise des réfugiés, le Notara 26. Je le soutiens politiquement, financièrement et, bien sûr, en matière de communication. En effet, il y a un énorme fossé au niveau de l’information, car les médias du pouvoir déforment la vérité. Ils présentent une image d’Exarcheia qui se concentre uniquement sur la drogue et la mafia. Je ne dis pas qu’il n’y aucun problème à Exarcheia, le jeu obscur de l’État aux côtés de la mafia dans le quartier nous complique souvent la tâche, mais Exarcheia c’est beaucoup plus que tout ça. Les squats de réfugiés, par exemple, sont une grande cause, car ils montrent à la fois notre réponse immédiate à un besoin vital et la société solidaire que nous voulons construire tous ensemble. Lorsque vous ouvrez un squat pour accueillir des réfugiés, vous ne soulagez pas seulement des êtres humains en souffrance, vous apportez aussi un supplément d’égalité et de liberté dans cette société profondément injuste. La société que nous désirons ne peut pas être uniquement décrite dans des textes. Les gens sont fatigués des paroles non suivies d’actes. Nous devons montrer des exemples concrets de la société que nous désirons. Les squats de réfugiés en Grèce en sont un parfait exemple.

M.L. — Dans ce contexte, tu as été la principale personne qui a organisé des convois solidaires internationaux à destinations des structures autogérées en Grèce. Est-ce que ce fut l’une des expériences les plus intenses de ces quatre années ?

Y.Y. — J’ai noté tous les besoins dans les différents squats, dispensaires médicaux, cuisine sociale, etc., autant de lieux que je connais bien, parfois même en tant que membre, puis nous avons apporté, avec mes camarades de l’autre bout de l’Europe, de plus en plus de choses transmises par des personnes solidaires en France et dans d’autres pays alentours. Nous avons toujours pris soin d’amener uniquement des choses correspondant aux besoins précis des lieux, bien rangées dans chaque fourgon, et à ne jamais livrer du débarras. Ce point est très important. Nous agissons comme des égaux, des solidaires, respectueux de nos camarades grecs et réfugiés, et nous n’avons rien à voir avec des initiatives de charité. Je comprends, bien sûr, que chacun participe à sa manière et apprenne progressivement, mais le fond est aussi dans la forme. Nos convois, bâtis en grande partie sur les moyens de communication et financiers de nos films, sont politiques, solidaires, internationalistes.

Parmi ce que nous avons apporté, il y a du matériel médical, des couches pour bébés, ou encore du lait en poudre car les mamans allaitantes étaient épuisées par le long voyage, la peur et la violence, et n’avaient souvent plus de lait pour nourrir leurs enfants. Le premier grand convoi s’est déroulé en mars 2017 avec 26 fourgons en provenance de France, de Belgique, de Suisse et d’Espagne. Dès la première fois, les médias de masse ont beaucoup parlé de nous en diffusant toutes sortes de mensonges, par exemple que nous n’amenions que des choses pour les réfugiés et rien pour les grecs, alors que, outre les squats, nous avons toujours également soutenu les dispensaires médicaux autogérés, la cuisine sociale L’Autre Humain, divers groupes de résistance, des luttes environnementales et une bonne quinzaine de lieux autogérés hautement politiques, comme le K*Vox, Favela, Nosotros, Evangelismo ou Mikropolis. Les chaînes de télé ont également raconté que nous amenions des armes.

Nous avons toujours été au cœur d’une énorme désinformation à cause du danger que nous représentions dans l’imaginaire social. Durant le deuxième grand convoi, en novembre 2017, nous avons été arrêtés par la police au péage de Megara, entre Corinthe et Athènes. Les policiers ont demandé les pièces d’identité à tous les membres du convoi (sauf à moi), mais ils ne sont pas allés jusqu’à ouvrir les cartons. Pourquoi ? Tout simplement parce qu’ils savaient très bien que nous ne transportions pas d’armes. Notre arme, c’est la solidarité. Ils n’ont pas ouvert le moindre carton, car sinon, ils auraient été contraints de cesser de nous calomnier et de nous harceler, notamment en nous suivant un peu partout avec des véhicules banalisés de façon très grossière. Au total, nous avons effectué 12 convois, dont 4 grands convois avec plus de 10 fourgons. À chacune de nos arrivées, une bonne moitié de mes compagnons de voyage ont, tôt ou tard, essuyé quelques larmes d’émotion. Ce sont des moments très intenses et inoubliables, de part et d’autre, qui nous rappellent que les frontières ne sont rien. Le pouvoir les utilise pour nous diviser et nous contrôler.

M.L. — Le nouveau gouvernement du parti Nouvelle Démocratie a annoncé une grande opération d’évacuation et de « nettoyage » à Exarcheia. Cette éventualité t’inquiète ?

Y.Y. — Nous allons être les témoins d’un véritable totalitarisme politique. Mais ce ne sera pas aussi facile que le pouvoir l’imagine. Le nouveau premier ministre grec est un descendant de la dynastie Mitsotakis et plusieurs membres de son gouvernement sont issus de l’extrême-droite. Ils ont promis de détruire tout ce qui faisait la substance et la réputation d’Exarcheia et vont tout faire pour y parvenir. Il y a une trentaine d’années, les flics avaient déjà occupé la place centrale du quartier durant des mois, avant de renoncer.

Depuis, les choses ont changé. Nous avons construit des relations internationales plus fortes que jamais, un puissant réseau de solidarité par-delà les frontières, des échanges d’informations rapides sur un plan horizontal, à l’écart des médias dominants et de leurs mensonges le plus souvent par omission, de fréquents convois et tournées dans un sens et dans l’autre pour mieux nous connaître et présenter ce que nous faisons. Nous sommes avons commencé à construire quelque chose ensemble. Quelque chose d’historique peut-être.

C’est pourquoi, si j’ai accepté pour la première fois de parler à un média de masse qui n’est ni autogéré ni membre de notre réseau, c’est parce que nous avons décidé d’interpeller la société, d’avancer d’un pas vers elle, de faire un effort d’ouverture en direction de gens qui, par exemple, ne nous lisent pas ailleurs. Qu’est-ce que nous voulons dire avec tout ça ? Qu’il y a un monde qui va réagir devant l’attaque et que « nous n’avons pas peur des ruines ». C’est le titre que nous avons choisi à l’unanimité pour le nouveau documentaire que je prépare avec mes compagnons d’Exarcheia et ailleurs en Grèce. Ce titre-slogan est tiré d’une phrase célèbre de Durruti. Pourquoi nous n’avons pas peur des ruines ? Tout simplement parce que c’est nous qui avons tout construit et que, si tout venait à être détruit, nous saurions tout reconstruire en mieux.

M.L. — Tu veux dire que la société capitaliste n’est pas la seule possible ?

Y.Y. — Le capitalisme prétend que l’Histoire est terminée. Autrement dit : chaussez vos pantoufles, asseyez-vous confortablement dans votre canapé, allumez la télévision, gavez vous de chips et soyez heureux que ce que vous voyez aux infos du JT ne vous arrive pas à vous, personnellement. Sauf que ça ne se passera pas comme ça. Rien n’est fini. Il existe des poches et des modèles proposant d’autres façons de vivre dans de multiples régions du monde, du Rojava au Chiapas. Le pouvoir sent de plus en plus qu’il y a quelque chose de puissant et d’insaisissable qui commence à se dessiner en face de lui, c’est pourquoi il se durcit et glisse un peu partout vers le fascisme. Le fascisme est le stade ultime du capitalisme quand il se sent menacé, quant ses illusions perdent en efficacité, quand il éprouve la nécessité de démasquer son vrai visage profondément autoritaire. Partout dans le monde, les pouvoirs se durcissent et le fascisme gagne du terrain. Au Brésil, aux États-Unis, en Hongrie, en Italie, dans trois ans en France…

Pourtant, comble de la réthorique des médias, c’est nous qui sommes traités d’extrémistes. En réalité, en réfléchissant un peu, en ouvrant les yeux sur les actes des uns et des autres, il est clair que ce qui est extrémiste c’est de détruire la Terre, saccager la vie et faire le malheur des gens. La liberté que le pouvoir propose est une liberté de pacotille. Être libre ne signifie pas choisir ce qu’on va acheter dans un rayon de supermarché, mais inventer sa vie, sans opprimer autrui ni détruire la nature, et contribuer réellement à la construction d’un espace commun de réflexion et d’action à commencer par l’entraide. Je ne parle pas seulement d’anarchie, je parle de respect, de dignité, d’humanité, d’amour de la vie et du droit irrépressible de choisir comment nous désirons traverser ce court moment qu’est l’existence.

M.L. — Il y a quelque temps, un groupe de fascistes t’a attaqué au Pirée. Veux-tu nous parler un peu de cette expérience et de l’empreinte qu’elle t’a laissée ?

Y.Y. — C’était il y a un mois. J’étais allé aider le centre social Favela qui avait déjà été la cible d’attaques fascistes par le passé. En sortant du lieu en portant un tee-shirt qu’on venait de m’offrir, j’ai vu quatre fascistes fondre sur moi. Trois ont tenté de me rouer de coups pendant que le quatrième surveillait la seule issue. Heureusement, j’ai tenu bon jusqu’à ce que des témoins arrivent et me viennent en aide. Cela m’est aussi arrivé en France, mais de façon un peu moins violente. Depuis deux ans, je suis également en procès avec les fascistes qui ont organisé l’opération Defend Europe à bord du navire C-Star pour tenter d’empêcher le sauvetage en mer des migrants. Ils n’ont pas supporté notre campagne antifasciste sur toutes les rives de la Méditerranée pour les empêcher d’arriver à leurs fins. D’échec en échec, notamment à Chypre puis en Crète, grâce à la mobilisation de mes camarades de Ierapetra et d’Héraklion, ils ont été forcés de rentrer chez eux en avion. Ensuite, ils m’ont presque aussitôt poursuivi devant les tribunaux parce que j’étais le seul membre visible du collectif Defend Mediterranea qui s’opposait à eux, étant donné que je publiais nos communiqués. L’affaire est en cours. J’attends une éventuelle cassation.

Qu’importe les attaques, les insultes, les menaces, les procès, et peut-être même la mort, s’ils mettent leurs menaces à exécution. Pour chacun d’entre nous, participer au mouvement social est un risque et je l’accepte. Après l’attaque des fascistes, j’ai répondu à mes camarades et amis venus me voir à l’hôpital puis dans mon lieu de convalescence à Exarcheia que j’allais bien et qu’il n’y avait pas lieu de s’inquiéter. Non seulement parce que nous avons librement choisi d’être des cibles potentielles, mais aussi parce qu’en ayant l’habitude d’aider des personnes affamées, malades, sans-papiers ou dormant dans la rue, nos problèmes à nous paraissent vraiment très petits par rapport aux leurs.

M.L. — Tu as des relations étroites avec Rouvikonas pour lequel tu as organisé des actions de soutien. Pourquoi penses-tu que ce groupe est décrit comme le mal absolu dans le discours dominant ?

Y.Y. — Rouvikonas a été diabolisé parce qu’il est la voie à suivre. Si des centaines, des milliers de Rouvikonas agissaient un peu partout, le pouvoir tremblerait sur son piédestal et finirait par tomber. Malgré la propagande immense contre ce groupe, en Grèce comme ailleurs, il y a beaucoup de gens et de collectifs qui aiment Rouvikonas et qui sont diversement inspirés par son action. Ces dernières années, les différentes formes de résistances en Grèce ont joué un rôle très important dans le développement d’un nouveau mouvement international anticapitaliste et, de plus en plus, antiautoritaire. Nous avons créé énormément de liens d’un bout à l’autre de la Grèce et de l’Europe, parfois même au-delà. Rouvikonas en est le parfait exemple. Avec sa façon particulière de remettre au goût du jour l’action directe, le groupe montre tout simplement que le pouvoir n’est pas invincible. En conséquence, il est constamment l’objet de poursuites et de l’ire des médias. D’un bout à l’autre du continent, nous sommes nombreux à le soutenir financièrement pour l’aider à couvrir ses frais de Justice. Nous avons récemment contribué au dépôt de garantie énorme exigé suite à l’attaque du parlement : 60 000 euros réunis en moins d’un mois pour empêcher l’emprisonnement de nos camarades.

Personne parmi nous ne rêve d’être un martyr. Personne ne veut aller en prison. Mais si l’État grec choisit d’envoyer des membres du Rouvikonas en prison, il en assumera les conséquences. Il montrera, une fois de plus, son vrai visage, en privant de liberté des personnes qui luttent contre les inégalités, les accidents du travail, la tyrannie des employeurs, les ventes aux enchères des logements des familles surendettées, les exploitations minières et pétrolières dévastatrices pour l’environnement et tant d’autres causes éminemment justes.

M.L. — Dernière question, quel est selon toi le dilemme de notre temps ?

Y.Y. — Utopie ou dystopie. Nous n’avons plus d’autres choix que l’utopie ou la dystopie dans l’impasse où nous nous trouvons. Et je suis convaincu que nous sommes capables de faire ce grand pas en avant : choisir l’utopie et vivre mieux. »

[Sur le site de Popaganda, l’entretien se termine avec les films Ne vivons plus comme des esclaves, Je lutte donc je suis et L’Amour et la Révolution, en version grecque, intégrés tour à tour dans la page]

Version grecque de l’entretien :
https://popaganda.gr/people/o-giannis-gioulountas-pistevi-oti-to-dilimma-tis-epochis-mas-ine-outopia-i-distopia-ki-epilegi-to-proto

Source http://blogyy.net/2019/07/25/un-entretien-pas-comme-les-autres/

City Plaza c’est terminé

[Migreurop] City Plaza, Athènes : la fin de l’occupation

Après 39 mois de fonctionnement  l’occupation City Plaza, un hôtel athénien transformé en lieu de vie et d’hébergement pour réfugiés a fermé. City Plaza avait accueilli 2.500 réfugiés dans un espace exemplaire, géré collectivement par les solidaires et par les réfugiés eux-mêmes.  L’évacuation a été programmée par le collectif Solidarity 2 refugees qui a été à l’origine de l’occupation. La décision de ne plus continuer l’occupation fut prise en mai 2018 et depuis juin de la même année City Plaza n’acceptait plus de nouveaux arrivants. D’après le communiqué mise en ligne sur FB, la décision fut prise pour trois raisons :

A) le refus de normaliser/légaliser une occupation qui s’est voulue un acte militant tandis que deux ordres successives d’évacuation du procureur restaient en attente.

B) Un manque grandissant des moyens et de forces vives ; il fallait que chaque nuit un service de sécurité de huit personnes soit de garde afin d’assurer la sécurité des réfugiés qui pouvaient à n’importe quel moment devenir la cible d’une attaque de l’Aube Dorée ou d’autres groupuscules d’extrême droite, la possibilité d’une intrusion de la propriétaire accompagnée de ses sbires étant toujours en ligne de mire.

C) Les élections et la formation d’un gouvernent de droite qui a déjà annoncé son intention d’y envoyer les CRS pour évacuer de force l’hôtel et en finir avec la soi-disant « anomie » de l’occupation ; ont  précipité l’évacuation : il fallait protéger les migrants sans-papiers d’une arrestation qui pourrait être suivi d’un internement et d’une expulsion.

Tous les résidents de City Plaza ont été relogés dans des bonnes conditions, soit à d’autres occupations, soit à des appartements.

Le collectif remercie tous ceux et celles ont soutenu d’une façon ou d’une autre et leur donne rendez-vous pour des nouveaux combats en commun

Voir leur communiqué en anglais

https://www.facebook.com/sol2refugeesen/posts/2117692658523066?__tn__=K-R

 

Reportage dans Bastamag sur les VioMe

En Grèce, dans une usine autogérée, le travail devient un « lieu de solidarité et de liberté » par Andrea Fuori, Raphaël Goument

 

Ils ont repris leur usine en faillite suite à la crise financière, réorienté la production, plus « écologique », sauvegardé une vingtaine d’emplois, créé un réseau de distribution pour vendre leurs produits. Et décliné concrètement le credo « Occuper, résister, produire ». Peu soutenus par le gouvernement de gauche, qui vient d’être battu aux élections législatives, les ouvriers grecs de l’usine Vio Me, à Thessalonique, ne sont pas au bout de leur peine. Reportage.

« On n’est pas assez pour défendre notre usine demain matin ! Qui peut venir nous aider ? » Makis lève les bras au ciel. Face au quinquagénaire à la barbe poivre et sel, une assemblée d’une quinzaine de personnes assises à l’ombre des platanes, sur la place de l’Agora à Thessalonique, deuxième ville du pays. Trois d’entre-elles travaillent à Vio Me, l’usine autogérée de savons écolos devenue un symbole du mouvement autogestionnaire grec. Les autres sont des soutiens. « Nous avons besoin de gens qui n’ont pas déjà des soucis judiciaires ! On a lancé des appels depuis des semaines, mais on ne sait toujours pas sur qui on peut compter ! »

Le crépuscule tombe, les rues bruissent de passants et la ville sort lentement des lourdes chaleurs de la mi-juin. La réunion reste étrangement calme. Si Makis est inquiet, il ne le montre pas. Pourtant, les ouvriers jouent gros : le lendemain matin, le 20 juin, leur usine sera mise aux enchères, vendue au plus offrant – une banque ou un investisseur. À force, ils ont fini par s’y habituer : ils occupent illégalement leur site depuis pas moins de huit ans, et bloquent sa revente depuis quatre ans.

« S’ils ne peuvent pas, nous pouvons ! »

Tout commence en 2011. La maison-mère de Vio Me, Philkeram Johnson, une entreprise grecque de fabrication de carrelages fondée en 1961, autrefois florissante, dépose le bilan. Les 70 salariés de Vio Me, qui fabriquent de la colle pour carrelages, sont privés de salaires ou licenciés. L’usine fait faillite dans la foulée. Une histoire banale, dans un pays plombé par les politiques d’austérité. Mais cette fois, les travailleurs refusent le clap de fin et décident d’écrire de nouveaux chapitres.

 À l’assemblée de Thessalonique (© Raphaël Goument)

Organisés depuis 2006 dans un syndicat très déterminé, l’Union des travailleurs de Vio Me, 45 d’entre eux occupent le site à partir l’été 2011. « À cette époque, on exigeait seulement le paiement de nos de salaires ! », se souvient l’un d’eux, Dimitris, un gaillard aux yeux bleus éduqué dans une famille syndiquée. Il a commencé à travailler à 14 ans dans l’industrie textile, avant de rejoindre Vio Me. La première année, les occupants tiennent seulement grâce à leurs maigres indemnités chômage. Bientôt cela ne suffit plus : « On a multiplié les assemblées, les événements de soutien et les actions en justice. Sans résultat. On a décidé d’arrêter de revendiquer pour aller plus loin et agir nous-mêmes », poursuit l’ouvrier avec des gestes énergiques. La suite ? Elle est résumée sur son tee-shirt, aux couleurs de l’usine – rouge, noir, gris. On y lit leur credo, devenu incontournable : « Occuper, Résister, Produire ».

En 2012, les travailleurs rencontrent de lointains collègues des coopératives argentines autogérées depuis le début des années 2000, notamment Zanon, une fabrique de tuile tenue par 400 personnes. C’est le déclic. Fin 2012, une nouvelle assemblée décide de relancer l’activité sans patron, sous contrôle ouvrier. Le mot d’ordre ? « S’ils ne peuvent pas, nous pouvons ! »

Des savons et des lessives « écologiques »

Impossible de redémarrer l’ancienne production. La demande dans le secteur du BTP s’est effondrée avec la crise, et les coûts de production sont trop élevés. Des savons et des lessives « écologiques » remplacent ainsi la colle pour carrelage : la demande est forte, la production plus simple. « Ça nous permettait aussi d’utiliser la matière première la plus proche de nous : l’huile d’olive. On se fournit chez une dizaine de producteurs locaux, justifie Dimitris. On a commencé avec une première recette, puis on a continué à chercher sur Internet, à se former en étant aidé par le mouvement de soutien. » Chez eux, pas de direction « recherche et développement », mais l’expérimentation, au risque des ratés. « Au début, leurs produits étaient vraiment de mauvaise qualité. Impossible de laver les vêtements avec ! », sourit Marcellina, soutien de la première heure.

En six ans de production, les apprentis savonniers ont progressé. Ils commercialisent aujourd’hui une quinzaine de produits ménagers au sein des réseaux militants de centres sociaux, squats et épiceries coopératives : savons à base de lavande, lessive, détartrant, produit lave-vitre, ou encore crème pour le visage.

« Au début, ça a été un choc culturel. On n’avait plus à prendre les ordres de personne ! »

Pour mieux comprendre leur histoire, il faut aller rendre visite aux travailleurs, et s’armer de patience. La zone est éloignée du centre-ville, coincée entre l’aéroport international et les enseignes tapageuses d’une immense zone commerciale. Au bout d’un chemin bordé d’arbres et de buissons, il faut se signaler à l’interphone afin d’espérer voir s’ouvrir le large portail métallique. Menacé d’expulsion à tout moment, le lieu est gardé jour et nuit depuis huit ans. Sur la friche de treize hectares trônent d’immenses hangars en apparence vides et décrépis. Sur l’un d’eux, un graffiti : « Les usines appartiennent à ceux qui y travaillent ». Ce dimanche, Dimitris est là pour nous accueillir, tandis que deux de ses collègues déchargent de l’huile d’olive d’un vieux camion.

L’ouvrier est intarissable sur leur histoire, qu’il est visiblement habitué à partager. « Au début, ça a été un choc culturel. On n’avait plus à prendre les ordres de personne ! », se souvient-il dans le petit bureau étroit, tapissé d’affiches de soutien, où lui et ses collègues se réunissent tous les matins pour se répartir les tâches. « C’était difficile de s’adapter à cette nouvelle organisation collective. Aujourd’hui encore, ça n’est pas toujours évident de se mettre d’accord, mais on y travaille. » Au-delà de la prise de décision en assemblées, les ouvriers mettent un point d’honneur à ce que « tout le monde tourne » aux postes de production. Sauf pour certaines missions plus pointues comme la gestion de l’électricité ou la comptabilité.

« Notre usine, c’est un outil de lutte »

Dimitris nous embarque pour une visite au pas de course. Sur une porte blanche, l’écriteau « No entry » a été remplacé par un « No boss » rageur, doublé d’un doigt d’honneur. Derrière la porte, l’atelier où la plupart des produits ménagers sont préparés. Dans un recoin, une bétonnière un peu rouillée, « pour préparer les lessives ». Plus loin, deux vieilles machines à laver données par des soutiens pour les tester. Les postes de travail sont rangés à la va vite, dans un fouillis de bassines, de cuillères et de lessive, et le sol est collant. Le chaudron et le mélangeur, que les ouvriers ont dû racheter aux enchères, sont eux immaculés.

Ici, aucun standard n’est imposé de l’extérieur. Les ouvriers ont transformé l’outil de production à leur mesure : un mélange d’atelier de bricolage et de petite industrie, où chacun a voix au chapitre et reçoit la même rémunération. « On n’a plus besoin des cadres ni des patrons ! », assène le quadragénaire. Et pour cause : leurs anciens bureaux ont été transformés en séchoirs pour des milliers de savons parfumés – ils en produisent 1600 par semaine et en conservent 3000 en stocks.

  En bas : Dimitris, au sein de l’usine (© Raphaël Goument)

« Pour nous, ici, c’est bien plus qu’une usine : c’est un espace social, un lieu de solidarité et de liberté. » À l’entrée, de grandes tables et d’imposants barbecues accueillent des banquets réguliers. Juste à côté, une « clinique sociale et solidaire » a ouvert en 2015 dans un ancien bureau. Le matériel a été donné par des soutiens en France et en Allemagne, et une dizaine de médecins bénévoles s’y relaient pour des consultations gratuites tous les mercredis à destination des ouvriers et de quelques personnes du mouvement de solidarité. Un peu plus loin, une scène de palette attend son heure. Une compagnie de Thessalonique y jouait sa dernière pièce la semaine précédente. « Des rappeurs ont aussi tourné un clip il y a quelques mois », ajoute fièrement le travailleur. Au fond du hangar, à côté d’immenses sacs de colle et de vieilles machines assoupies, des vêtements et du matériel de soutien pour les réfugiés attendent de partir vers les « points chauds ». « Notre usine, c’est un outil de lutte. »

« Aujourd’hui pour toucher 1000 euros, il faut avoir deux diplômes et parler cinq langues ! »

Avant 2011, l’usine employait soixante-dix personnes. Au début de l’aventure autogestionnaire, en 2013, les ouvriers n’étaient plus que 14. Depuis, cinq personnes ont été embauchées et ils sont maintenant 19 sur le site. Vio Me grandit lentement, avec prudence. Car les travailleurs gèrent leur affaire loin des critères habituels. Les fournisseurs, publics ou privés, sont payés d’avance pour éviter tout endettement. La plus grande partie des bénéfices sert aux éventuelles réparations du matériel, et une petite fraction seulement à l’investissement.

« Quand on a commencé, on dégageait l’équivalent de 5 euros par personne par jour travaillé. Aujourd’hui, on est monté à 20 euros, et ça augmente chaque année », calcule Dimitris. Ils gagnent chacun environ 400 euros par mois – pas plus que la maigre indemnité chômage qu’ils touchaient en 2011. « Ça nous permet de vivre avec dignité. C’est dans la moyenne des salaires depuis la crise. Du temps de l’ancien propriétaire, on touchait autour de 1000 euros. Mais les conditions de travail avec les produits chimiques étaient beaucoup plus dures et tout le monde ne bénéficiait pas de la même paie. Et aujourd’hui, pour toucher 1000 euros il faut avoir deux diplômes et parler cinq langues ! »

Un système de distribution militant, au-delà de la Grèce

Empaquetés en grandes piles sur des dizaines de palettes, des produits attendent d’être expédiés. Mais pas n’importe où. Les supermarchés classiques n’ont jamais été une option. L’illégalité de l’usine ne le permet pas, et de toutes manières les travailleurs le refusent en bloc. Vio Me a dû développer pour survivre un fort réseau de solidarité pour commercialiser ses produits en Grèce et à l’étranger. Une boutique en ligne a été ouverte, renforcée par une forte présence sur le terrain. À Thessalonique et Athènes, deux « assemblées de solidarité » se réunissent toutes les semaines depuis 2013, et se coordonnent une fois par mois avec les travailleurs via Skype. À la demande des travailleurs, elles chapeautent une partie de la diffusion dans le réseau militant. À chaque festival, concert, les mêmes scènes : une petite table installée pour y déposer les produits avec soin, un sac plastique pour faire office de caisse, la compta griffonnée à la va-vite sur un calepin.

« Aujourd’hui, quand on va dans les cuisines ou les toilettes des centres sociaux, on trouve toujours nos produits, fanfaronne Yorgios. Sans ce mouvement de solidarité, nous ne pourrions rien faire. Ce sont comme des minis Vio Me », raconte-t-il. Cinq personnes, parmi les soutiens les plus impliqués sont même employées par la coopérative pour gérer les entrepôts et la logistique commerciale à Athènes et Thessalonique.

Force est de constater que cela fonctionne. Le mouvement de solidarité dépasse aujourd’hui largement la Grèce. Les travailleurs ont organisé en 2017 les « Rencontres euro-méditerranéennes des travailleurs des coopératives », et participé à des rencontres équivalentes en Argentine. Du bout du pied, Dimitris désigne une palette de cartons en partance vers l’Allemagne : « Là, c’est pour une école et là, pour un journal. » Le pays est le plus gros importateur, suivi de près par la France où le supermarché alternatif parisien « La Louve » distribue notamment leurs produits. Vio Me exporte aussi en Italie, en Espagne, en Suisse et jusqu’en Roumanie ou en Bulgarie. « On voudrait exporter vers l’Amérique Latine, mais c’est impossible sans cadre légal. L’absence de statut freine notre développement. »

« Sur le papier, nous sommes toujours considérés comme les employés d’une entreprise en faillite »

Après huit ans de lutte, les ouvriers de Vio Me sont toujours dans l’illégalité. En 2014, ils ont créé une société coopérative qui s’est dotée d’un compte en banque. Mais elle n’est ni propriétaire ni locataire des actifs. « Sur le papier, on est toujours considérés comme les employés d’une entreprise en faillite. Depuis six ans, notre travail n’est pas reconnu », peste Makis. « J’ai 52 ans. Si l’usine fonctionnait normalement, j’aurais pu partir en retraite à 59 ans. Là, c’est l’inconnu. » Depuis 2013, les avocats mènent une bataille juridique avec l’ancienne propriétaire pour obtenir le paiement des salaires. Cette dernière a bien été condamnée, en 2014, à plusieurs années de prison, mais n’a toujours pas vu la couleur des barreaux. Ni les ouvriers celle de leur fiche de paie. La procédure traîne toujours.

 En haut : Makis (© Raphaël Goument)

Ils craignent également les coupures d’électricité par le fournisseur public. « C’est déjà arrivé quatre fois, la dernière en 2016. Depuis, on a réussi à faire pression sur le gouvernement. Pour l’eau on est obligé de pomper sur la citerne d’un voisin. Tous ces obstacles nous freinent pour augmenter la production. »

Les promesses trahies du gouvernement Tsipras

Au mur du petit bureau, Dimitris pointe une photo jaunie d’Alexis Tsipras, premier ministre depuis 2015, et qui vient d’être battu aux élections législatives du 7 juillet. Le patron de Syriza avait visité l’usine lors de sa campagne électorale en 2014. « Il nous a promis de légaliser notre statut. Il nous a assuré qu’on était des travailleurs modèles, sur qui ils s’appuieraient pour leur projet économique. Cinq ans plus tard, rien n’a changé. » Il n’a pas l’air de s’en offusquer. « On n’attendait rien du gouvernement de Syriza, ni du précédent. On sait très bien qu’ils privilégient toujours les propriétaires. » Inutile d’ajouter que les ouvriers n’attendent rien des élections législatives anticipées du 7 juillet, remportées par le parti de droite Nouvelle Démocratie, avec 40% des voix, contre 31 % pour Syriza, le parti de Tsipras.

« Ils n’ont pas la volonté politique de légaliser une exception. Ça aurait pu créer un précédent pour tous les autres travailleurs d’entreprises en faillite dans le pays », analyse-t-il. Semé d’embûches, le chemin choisi par Vio Me n’a d’ailleurs pas ouvert la voie à d’autres coopératives ouvrières. Les milliers de structures autogérées qui ont fleuri en Grèce après le mouvement des places de 2011 se concentraient surtout dans le secteur des services. Selon les ouvriers interrogés elles ont, pour beaucoup d’entre elles, disparu. Les tentatives de réappropriation industrielle se comptent sur les doigts d’une main. Parmi elles, seule Vio Me serait encore debout.

« Même s’ils arrivent à vendre l’usine, ça ne va pas stopper la lutte »

Pour l’heure, la principale menace est judiciaire. En 2014, une vingtaine d’anciens salariés ont réclamé la liquidation rapide des actifs de la maison-mère pour toucher les sommes dues. Depuis 2015, l’État organise chaque année une session de vente aux enchères des terres et bâtiments, pour rembourser les millions de dettes de l’entreprise. Les travailleurs ont essayé d’éviter la vente à un investisseur privé. « On a proposé une autre solution simple aux différents gouvernements : les services publics (sécurité sociale, eau, électricité) envers qui Vio Me était endettée pourraient reprendre une propriété correspondant au montant, et nous louer les locaux. Quant à nos arriérés de salaires de 2,5 millions, on pourrait les échanger contre les machines », explique Makis. Sans succès.

Alors, inlassablement, les ouvriers publient des appels à soutien, bloquent les tribunaux, envahissent les salles d’audience, campent devant le ministère du travail en essuyant les coups de la police. « Mais le prix de rachat est plus bas chaque année : ils ont commencé en 2015 à 32 millions d’euros, puis 25 en 2016, 18 en 2018. Cette fois, ils sont descendu à 12,5 millions », s’alarme Makis. Ce 20 juin, à nouveau, 200 personnes se sont rassemblées devant le tribunal. Sans réussir à bloquer les enchères. Heureusement, aucun acquéreur n’a proposé d’offre. Jusqu’à quand ? La prochaine session aura lieu en septembre.

Les ouvriers se préparent au pire, mais restent déterminés. « Même s’ils arrivent à vendre l’usine, ça ne va pas stopper la lutte. Ce qui est important, c’est de continuer le combat. Seule la lutte nous fera gagner ! », assène Makis. À ses côtés, confiant, Dimitris glisse, poings serrés : « Avec toutes les heures de notre combat depuis des années, c’est comme si on avait déjà racheté l’usine ! »

Andrea Fuori et Raphaël Goument

- Photos : © Raphaël Goument

Source https://www.bastamag.net/Grece-Vio-Me-cooperative-usine-autogeree-savons-ecologiques-legislatives-Tsipras-Syriza

Pour rappel : le collectif de Grenoble soutient les VioMe depuis 3 ans en organisant une commande groupée de leurs produits une fois par an. La prochaine commande se fera à l’automne 2019. Les informations pratiques seront données courant septembre.

Solidarité avec Yannis Youlountas

Le collectif de Grenoble exprime toute sa solidarité à Yannis qui a été agressé mercredi 13 juin au soir alors qu’il sortait de l’espace social autogéré Favela au Pirée. Ils étaient à 3 contre un et c’est l’intervention de voyageurs qui sortaient du tram qui a fait fuir les agresseurs.

Yannis est venu plusieurs fois à l’invitation du collectif de Grenoble pour présenter ses films sur la situation en Grèce et surtout la résistance qui y est toujours présente face à la violence du système qu’elle soit politique, étatique, européenne. Il continuera à être invité sans hésitations.

Bon rétablissement à lui et pour savoir comment réagir dans pareilles situations nous relayons ici son message :

Ne pas céder à la peur par ·

NE PAS CÉDER À LA PEUR

Il n’y a qu’une seule chose que nous ayons à craindre, c’est la peur elle-même. C’est là, le piège éculé de ceux qui se prétendent supérieurs : autoritaires ou fascistes, légaux ou factieux, avec leur meute de flics ou de miliciens. La fabrique du consentement ne passe pas seulement par une construction imaginaire, une représentation symbolique, un rang illusoire auquel se soumettre est présenté comme une évidence, une règle, un devoir. Cette servitude est, plus encore, le produit du sentiment d’impuissance et d’insécurité que suscite la peur. Peu importe que la menace soit directe ou indirecte : baisser les yeux quand elle survient, c’est se résigner ; regarder ailleurs quand d’autres sont opprimés, c’est s’apprêter à subir le même sort.

À l’inverse, ne pas céder à la peur, c’est rester résolument en dehors de ce cercle vicieux, de ce cycle infernal, de cette accumulation de non-dits. C’est crier non, haut et fort, quand le silence équivaut à un consentement. C’est surprendre ceux qui croyaient nous faire obéir, courir ou demander pitié.

Ne pas céder à la peur, c’est refuser de baisser la tête, regarder dans les yeux ceux qui veulent nous dominer, nous exploiter, nous molester, et montrer que nous céderons pas, que nous resterons debout jusqu’au bout. Hier soir, les quatre néo-nazis(2) qui m’ont tendu un piège ont cru m’impressionner. Mais ils ont vite compris que le sang froid et la détermination font plus que le nombre. Certes, je souffre encore à l’heure qu’il est, mais j’ai sans doute échappé à pire. Je dois également leur renoncement à l’arrivée d’un tram à la station voisine, peu après le début de l’attaque. Cette foule imprévue m’a peut-être sauvé la vie. Une vie qui tient parfois à un fil : le fil du lien social, de la présence, de la solidarité.

Ne pas céder à la peur, c’est ne pas reculer face aux tentatives d’intimidations. Les néo-nazis du Pirée fulminent ces jours-ci de voir l’espace social libre Favela fêter son deuxième anniversaire et réussir ce qui paraissait impossible : tenir bon dans un quartier difficile où les fascistes et autres nationalistes ont pignon sur rue. Avec un courage exemplaire et beaucoup d’idées formidables, mes camarades de Favela ont montré, une fois de plus, que les seules luttes perdues d’avance sont celles qu’on n’ose pas mener. C’est pourquoi j’appelle toutes celles et ceux qui sont en Attique ce soir à se rendre à l’anniversaire de Favela et à montrer leur solidarité par leur présence en nombre à ce rendez-vous, au cœur du Pirée(3).

Ne pas céder à la peur, c’est aussi ne pas laisser faire quand d’autres subissent l’injustice et la répression. Cette solidarité nécessite cependant d’être à la hauteur de la force écrasante qui s’abat parfois sur les victimes. Face aux représailles récentes de l’État grec, avec une sévérité sans précédent au moyen d’une faille juridique sournoise, le groupe Rouvikonas semblait depuis un mois condamné à un coup d’arrêt et à l’emprisonnement de deux de ses membres(4). La somme à réunir en dépôt de garantie (futurs frais de réparations et jours-amendes) paraissaient impossible à réunir : 30 000 euros pour Nikos et autant pour Giorgos, le cofondateur du groupe, soit 60 000 euros en tout, c’est-à-dire dix à vingt fois plus que d’habitude. Et bien non ! Nous venons, hier, de réussir à ramener libre Nikos du tribunal ! Alors que les médias du pouvoir annonçaient déjà l’emprisonnement imminent de nos camarades, nous sommes parvenus à réunir et à déposer la première valise énorme de 30 000 euros, grâce à des soutiens du monde entier, petits et grands, jusqu’à des migrants pourtant très pauvres qui ont insisté pour participer modestement : « Vous nous avez défendus tant de fois ! À notre tour de vous défendre ! »

Ce soir, je ne pourrai pas participer à la fête de mes camarades de Favela, non seulement à cause de ma convalescence, mais aussi parce que j’ai prévu d’être, dans la soirée, avec mes camarades de Rouvikonas pour faire le point sur la situation, avant de retourner me reposer. Alors, où en sommes exactement ? C’est bien simple.

A l’heure où j’écris ces lignes, le pot commun affiche 26 700 euros, c’est-à-dire en réalité 22 400 puisque 4 300 avaient déjà été retirés pour deux procès antérieurs. En comptant tout à la fois (pot commun + paypal + virements + versements en liquide sur place ou sur la tournée de Spiros), nous en sommes à plus du double : 47 850 euros en tout ! Autrement dit, nous avons déjà dépassé la moitié de la somme nécessaire pour empêcher l’État grec d’emprisonner Giorgos. Il reste 6 jours pour trouver 12 150 euros. 2000 par jour jusqu’au vendredi 21 juin, date à laquelle la somme devra être déposée pour permettre au co-fondateur de Rouvikonas de repartir libre à son tour(5). 12 150 équivaut au quart de la somme rassemblée en trois semaines. Cela semble presque impossible, vu le délai très court, mais ça reste faisable, à condition de ne pas renoncer si près du but. Avec 47 850 sur 60 000, nous avons fait 80% du chemin. Il serait dommage d’échouer à quelques encablures d’une démonstration formidable à destination du pouvoir ; ce pouvoir qui règne en nous divisant, en nous isolant, en nous rendant indifférents et même jaloux les uns à l’égard des autres.

Ne pas céder à la peur, c’est se rappeler de notre capacité à changer le cours des choses, en mettant bout à bout les actes, les idées, les moyens. Le fait que des soutiens arrivent parfois de l’autre bout du monde symbolise parfaitement l’horizontalité de cette lutte globale face aux géants de papiers qui prétendent encore nous gouverner, nous juger et nous enfermer.

C’est pourquoi les luttes contre le capitalisme et contre le fascisme sont indissociables. Ce sont en réalité les deux versants d’une même lutte : la lutte pour l’émancipation individuelle et sociale, dans la liberté et l’égalité, dans l’amour et la révolution, dans la joie de participer à un élan qui renversera un jour le vieux monde autoritaire.

Les temps sont durs. Oui, certes. Les nazis rôdent, frappent à la nuit tombée et parfois même en plein jour. Mon corps en témoigne. Le capitalisme se durcit, défonçant les conquêtes sociales passées et creusant toujours plus les inégalités. C’est un fait indéniable que seuls les nantis osent contredire. Le pouvoir se raidit, avec de nouvelles armes, de nouveaux outils pour surveiller et de nouvelles lois pour punir. Assurément, vu le nombre de victimes. Le constat est rude, mais il ne doit pas conduire à baisser les bras ou la tête. Car c’est justement parce que les temps sont durs qu’ils sont ouverts, que rien n’est terminé et que nous avons la contrainte vitale, cérébrale, viscérale d’en sortir.

C’est parce que cette société est profondément mortifère que nous n’avons pas d’autre choix que sortir de la préhistoire politique de l’humanité pour sauver la vie et la partager autrement.

C’est parce qu’on me menace, qu’on me frappe et qu’on veut me voler ma vie que je suis d’autant plus déterminé à en finir avec ceux qui m’agressent et avec la société qu’ils veulent m’imposer.

Là où nos ennemis essaient de susciter la peur, ils ne font qu’accroître la révolte : chaque menace m’inonde d’adrénaline, chaque coup me fouette le sang, chaque épreuve nouvelle me fait serrer le poing toujours plus haut.

Ils ne nous auront pas comme ça. Nous sommes encore debout. Et, pour garder le cap et la force de continuer, la seule chose que nous ayons à craindre, c’est la peur elle-même.

Yannis Youlountas

(1) Le communiqué de Maud, suite à mon agression :
http://blogyy.net/2019/06/14/yannis-agresse-par-des-neo-nazis-hier-soir-au-piree/
(2) Trois qui m’ont attaqué et un quatrième qui guettait pendant ce temps côté port, seul issue possible (point de passage plutôt régulier et bien éclairé).
(3) Ce soir au Pirée, rendez-vous, aussi nombreux que possible, pour les deux ans de Favela :
https://www.facebook.com/events/308401606756331/
(4) Comment l’État grec a réussi à piéger Rouvikonas, et pourquoi maintenant en particulier :
http://blogyy.net/2019/05/29/giorgos-kalaitzidis-increvable-anarchiste-bientot-embastille-par-tsipras/
(5) Pour participer à l’appel à soutien financier (avant le 21 juin), le pot commun avec toutes les informations est ici :
https://www.lepotcommun.fr/pot/mjj83sy2
Pour procéder par paypal ou virement (ou chèque, mais c’est un peu long et compliqué par rapport aux autres formes possibles), contacter en français : rouvikonasfrancophone@riseup.net
Si vous passez à Athènes avant le 21 juin :
Rendez-vous au K*Vox tous les jours, de 16:00 à minuit, place Exarcheia.


D’autres réactions

En français :
https://www.monde-libertaire.fr/?article=Les_enfoires_du_Piree
http://www.cadtm.org/Solidarite-a-Yannis-Youlountas-No-pasaran
http://endehors.net/news/yannis-agresse-par-des-neo-nazis-hier-soir-au-piree
https://www.facebook.com/UnionCommunisteLibertaire/posts/2821563887916965

En grec :
http://voidnetwork.gr/2019/06/14/nazis-attack-yannis-youlountas-in-piraeus/
http://net.xekinima.org/fasistes-epitethikan-ston-skinotheti-antifasista/
https://www.kar.org.gr/2019/06/14/fasistes-chtypisan-antifasista-ston-peiraia/
https://www.facebook.com/freesocialcenterfavela/posts/899755467028824
https://www.facebook.com/konpol64/posts/2303617716339907
https://www.facebook.com/permalink.php?story_fbid=1432724003534208&id=645186555621294
https://www.imerodromos.gr/epithesi-fasiston-ston-peiraia/
http://www.antinazizone.gr/2019/06/blog-post_92.html#more

Message de SOS Méditerranée

3 QUESTIONS À Frédéric Penard, directeur des opérations de SOS MEDITERRANEE

Frédéric Penard revient sur la situation plus qu’alarmante en Méditerranée centrale aujourd’hui et sur l’urgence de trouver un navire au plus vite. Pour autant, chercher et trouver un navire adapté aux activités de recherche et de sauvetage de SOS MEDITERRANEE prend du temps. Le cahier des charges est conséquent. Pour y parvenir, il rappelle que le soutien de tous les citoyens mobilisés contre cette tragédie est indispensable.

Soutenir SOS Méditerranée  http://www.sosmediterranee.fr/

Isère : contre la privatisation des barrages

 

Rassemblement samedi 15 juin 2019

Barrage de St Egrève (38) de 12 h à 17 h

 

 

Communiqué de presse

PRIVATISATION DES BARRAGES !
L’intérêt financier ne doit pas primer sur l’intérêt général !
Mobilisons-nous !

Un à un les Services Publics sont démantelés par cette logique libérale dans laquelle l’intérêt général des citoyens n’a que peu de place.

Depuis plus de 5 ans, des syndicats, des collectifs citoyens, des élus politiques font entendre leur voix pour sauvegarder les barrages hydroélectriques dans le giron public. L’exploitation des ouvrages hydrauliques par le secteur public a, depuis des décennies, démontré le sérieux et la cohérence dans la gestion de cet outil industriel majeur.

Les barrages hydroélectriques ont une importance capitale dans l’équilibre du système électrique car c’est une des seules énergies stockables à grande échelle, pouvant démarrer en quelques minutes.

Ces barrages sont également des réservoirs d’eau essentiels à l’agriculture, au tourisme, à la faune et à la flore mais aussi au maintien du niveau des nappes phréatiques, et on le sait moins, au refroidissement de centrales nucléaires…

Comment envisager une seule seconde la possibilité qu’une industrie aussi stratégique pour le pays et  les citoyens soit livrée à des grandes multinationales privées en concurrence ? Cela reviendrait à leur donner un moyen de pression sur n’importe quel gouvernement, collectivité locale ou même sur les citoyens.

Pour preuve l’augmentation incessante des tarifs de l’électricité depuis l’ouverture du marché pour satisfaire la concurrence au détriment des usagers et des citoyens !

Comment la France pourrait-elle suivre cette voie en devenant le seul pays à céder aux injonctions de l’Europe sur ce dossier ? Rappelons que le devoir de l’État et des élus de la Nation est de veiller à l’intérêt général !

À l’heure où il nous faut combattre le réchauffement climatique, la gestion de l’eau sera un réel enjeu de société. Au vu de la diminution des réserves d’eau et de l’augmentation des températures, nous ne pouvons accepter de livrer les barrages à des intérêts privés au détriment de la collectivité dans le seul but de dégager des profits.

C’est pourquoi les organisations signataires appellent
les citoyens, les salariés, les élus politiques de tout bord
à se mobiliser sur le barrage de St Egrève le samedi 15 juin 2019 de 12h à 17h

Ensemble sauvons nos barrages !

———————————————-Organisations signataires——————————————–

Collectif « Ne nous laissons pas tondre » – Collectif « Sauvons nos barrages », les Amis de la Terre – Citoyens pourle Climat Grenoble – Alternatiba – ANV COP21 – Marche pour le Climat- Gilets Jaunes Isère – ATTAC – CADTM
Syndicats : CGT Énergie Isère, Sud Énergie, CFDT Chimie Énergie, CFE GE Alstom, UD CGT Isère,
UD Solidaires Isère, Solidaires Météo-France, CGT GE Alstom

Informations de dernière minute, détails et compléments : www.privatisation-barrages.fr

Le communiqué en pdf 2019-06-15-Communiqué-presse-Non-à-la-privatisation-de-lhydro(1)

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