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Archives de catégorie Luttes- Changer le système

Pour la défense d’Exarcheia avec Y.Youlountas 1e et 2eme partie

Pour rompre le silence des médias et la désinformation Yannis Youlountas s’exprime depuis Exarcheia à Athènes. Les 5 entretiens seront publiés sur ce site au fur et à mesure de leurs parutions.

Des membres de Radio Libertaire, Le Combat Syndicaliste et Le Monde Libertaire sont venus ensemble voir Yannis Youlountas à Exarcheia, pour regrouper leurs questions dans un seul entretien radio et écrit à paraître bientôt dans leurs médias. Les captations vidéos ci-dessous vous permettent de découvrir quelques extraits de cet entretien.

1 ere partie (sur la situation du quartier)

Source http://blogyy.net/2019/09/08/pour-la-defense-dexarcheia-premiere-partie/

2eme partie (sur Rouvikonas) https://youtu.be/B7mzVthJUug

 

Manifeste – L’Appel du contre-G7

Manifeste rédigé par les organisations des plateformes Alternatives G7 et G7 EZ ! à l’occasion de la clôture du contre-sommet à Hendaye et Irun.

Le contre-G7 d’Hendaye et Irun a rassemblé des milliers de participant.e.s et permis d’organiser des centaines d’activités, de faire vivre un camp alternatif et de multiplier les actions et manifestations de rue.

Nous nous mobilisons face à un G7 divisé et dont il ne sortira rien. Il reste, malgré ses beaux discours sur la réduction des inégalités, le symbole de politiques néolibérales et autoritaires. Il porte des politiques qui ont creusé les inégalités sociales, renforcé les divisions et les dominations dues au racisme et au patriarcat, organisé l’industrialisation de l’agriculture, nourri l’industrie de l’armement, accéléré les crises environnementales, les dérèglements climatiques et la chute de la biodiversité. Il colonise des continents et pille leurs ressources naturelles. Il lève des murailles et empêche la libre circulation des personnes les plus pauvres.

Dans les années 1990, les institutions internationales et le G7 avaient promis que la mondialisation néolibérale allait permettre le triomphe de la “démocratie de marché”, le développement des pays et la réduction des inégalités. Toutes ces promesses se sont fracassées sur les crises majeures du système, la montée de l’autoritarisme sur tous les continents et l’explosion des inégalités et de la précarité, qui touche en priorité les femmes. Et il n’est resté qu’une vérité crue : ce système à la prétention de transformer toutes les réalités du monde, qu’elles soient humaines ou naturelles, en marchandises à la merci de marchés financiers avides de profits ; d’offrir aux multinationales un marché-monde pour leurs produits uniformisés ; et de proposer comme seules aspirations et rêves aux populations du monde entier une consommation sans limite de ces marchandises. Tout cela en multipliant leurs profits au détriment de travailleur.se.s eux-aussi réduit.e.s en marchandise jetable et précarisée.

Avec ce contre-G7 nous voulons démontrer qu’il est possible de résister au système capitaliste qui scie la branche sur laquelle l’Humanité est assise. A l’inverse de la mondialisation néolibérale, il est possible de développer des alternatives en partant des territoires et des collectifs humains qui priorisent la collaboration à la compétition, les biens communs et les droits humains aux profits privés, la garantie d’un logement digne pour toutes et tous à la spéculation, l’égalité et la diversité à la réussite individuelle et à l’uniformisation culturelle. Ici au Pays Basque, comme dans beaucoup d’autres endroits du monde, se construisent des relations différentes, d’autres systèmes fondés sur la coopération, les circuits courts, des relations entre humains et nature respectueuses et une démocratie réelle.

Il ne s’agit pas d’idéaliser des réalités qui sont contradictoires, mais de comprendre que remettre les pieds sur nos territoires et développer des coopérations multiples permettent de mieux répondre aux défis auxquels nous faisons face. Oppression des femmes, drame et chasse des migrant.e.s, dérèglements climatiques, industrialisation de l’agriculture et de l’alimentation, extinction de la biodiversité, détricotage du droit du travail, recul des libertés publiques, démantèlement des États providence… tout ceci nous appelle à renforcer les luttes et les solidarités aux niveaux local, national, étatique, continental et mondial.

Nos alternatives, qui mettent en oeuvre les valeurs de démocratie, de solidarité et d’égalité entre les femmes et les hommes, sont incompatibles avec le développement du capitalisme néolibéral qui s’appuie sur les États dominants et défend les intérêts des marchés financiers et des multinationales par la multiplication d’accords de libre-échange destructeurs, la privatisation des services publics et des biens communs…. Aujourd’hui, toute forme de contestation de ce système se traduit par des répressions policières et des restrictions aux libertés publiques de plus en plus importantes et la banalisation des interventions militaires.

Nos alternatives construisent des territoires plus solidaires, plus résilients face aux crises majeures et à l’effondrement à venir, et mieux armés contre la marchandisation de nos sociétés et de nos vies, la délocalisation et la mise en compétition des peuples et des individus, la destruction de la nature et des cultures populaires. Nos alternatives .

Elles permettent également aux citoyen.ne.s, et en particulier aux plus précaires, de se réapproprier l’exercice de la démocratie, de renouer avec l’engagement politique, de reprendre conscience de leur pouvoir de peser sur le cours des choses, comme nous l’avons vu avec le mouvement des Gilets Jaunes, les mobilisations féministes et les marches pour le climat. Ceci implique de reconnaître le droit à l’expérimentation et à l’autodétermination sur les terrains politiques, économiques, alimentaires, énergétiques et culturels. Nous sommes à ce titre solidaires des mobilisations actuelles des citoyen.ne.s en Algérie, à Hong Kong, en Catalogne, en Palestine, au Soudan et ailleurs.

L’accélération et l’aggravation des dégâts sociaux, écologiques et démocratiques causés à l’échelle planétaire par l’offensive néolibérale, comme nous le voyons aujourd’hui en Amazonie, rend urgente la mise en place d’alliances et de stratégies permettant d’inverser au plus vite le cours des choses. Ce contre-G7 est une étape importante pour la construction de ces alliances nécessaires entre mouvements sociaux, environnementaux, syndicaux, féministes, politiques. Une étape pour les constructions d’alliances sur des terrains spécifiques, mais aussi pour des alliances de plus large portée, d’alliances globales qui pourront être décisives pour les actions à venir.

Les plateformes Alternatives G7 et G7 EZ !

Source https://france.attac.org/se-mobiliser/contre-le-g7-et-son-monde/article/manifeste-l-appel-du-contre-g7

Interview de Pia Klemp

De Grèce une interview de Pia Klemp par la télé alternative OmniaTv traduite par Anastassia Tsoukala

Omniatv   https://omniatv.com/853449937

Maria Louka, 19/08/2019

Pia Klemp : Quoi qu’il arrive, personne ne pourra m’enlever ma foi en la lutte pour la libération sociale et ma joie d’y participer

Au petit matin du 16 août, Athènes était doucement vide, silencieuse et immobile. Pas de voitures en route pour le travail, pas d’odeur de pain frais en dehors des boulangeries. Seuls les bus démarraient nonchalamment leur procession dans la ville déserte. Mais, au numéro 26 de la rue Notara – là où, d’après le reportage du quotidien Kathimerini, le gouvernement a l’intention de planter des arbres, car il faut bien atteindre le comble du ridicule au beau milieu de l’été – la vie s’épanouissait en dépit des menaces et de la chaleur étouffante. Un groupe de réfugiés et de solidaires discutait avec Pia Klemp dans un anglais approximatif mais, surtout, avec de larges sourires et les bras ouverts.

Elle et Carola Rackete incarnent la lutte contre la criminalisation de la solidarité. Pia Klemp a été la capitaine des navires de sauvetage Iuventa et Sea Watch 3, qui ont effectué beaucoup d’opérations de sauvetage de réfugiés en Méditerranée. Selon la législation raciste adoptée par Salvini, elle a été accusée avec neuf autres personnes « d’aide et de complicité à l’immigration illégale » et risque une peine de prison de vingt ans. La gestion du malheur par l’UE consiste en l’application d’une stratégie visant à la fermeture des frontières, à l’aide financière à la mafia libyenne pour qu’elle mette en place un esclavage moderne sur les ruines d’un pays, aux déportations et aux renvois forcés illégaux des réfugiés, à l’attribution à Frontex d’un rôle de surveillance de la maltraitance, et à la criminalisation de la solidarité. Les élites européennes, qui s’expriment à travers Salvini, estiment qu’il est illégal de vouloir échapper à la guerre, à l’autoritarisme et à la pauvreté. Il est illégal d’aider ceux qui se battent pour rester en vie. Peu importe si les crimes commis au quotidien dans le désert, dans le paysage d’horreur qu’est devenue aujourd’hui la Libye, aux frontières d’Evros ou en Méditerranée violent toutes les conventions internationales des droits de l’homme. Nous vivons dans un état d’exception permanent et immuable, où le pouvoir confirme sa puissance en déchirant les lois.

En quoi se différencie la vision de l’actuel gouvernement de droite en Grèce ? Dès sa montée au pouvoir, le nouveau gouvernement s’est fixé comme priorité l’évacuation des seules structures fonctionnant dans un cadre d’autogestion, de liberté et de coexistence, sans recevoir la moindre aide financière par l’Etat grec ou l’UE. Sans doute, c’est ce qui explique le déferlement de la haine raciste qui se sert enveloppée dans du papier journal. Car les squats d’hébergement des réfugiés prouvent de manière tangible qu’il est possible d’offrir des soins et de la dignité aux gens sans barbelés et hiérarchisations, d’établir des relations d’égalité à l’opposé de la charité, de les voir en tant que sujets actifs et créateurs et non pas en tant qu’individus  superflus » et dangereux.

C’est pour cela qu’est venue ici Pia Klemp. Pour qu’elle partage son vécu et qu’elle entende des histoires d’amour. Pour qu’elle donne et qu’elle prenne du courage. Elle s’est promenée dans le quartier d’Exarchia, qui reste toujours animé et éveillé, elle a visité des espaces d’autogestion et de résistance, elle a parlé dans deux salles remplies d’intérêt et d’espoir, dans le squat Notara 26 et K*BOX respectivement. Elle a parlé de la solidarité et de son corollaire, l’utopie, qui ne permettent pas à la réalité de se transformer en une énorme carapace toxique de misanthropie.

Q : Les médias t’ont connue en tant que capitaine de navire de sauvetage de refugiés en Méditerranée. Tu as pourtant passé plusieurs années en bateau en tant qu’activiste luttant pour la libération des animaux. Abordons d’abord ce point.

R : Oui, j’ai passé les sept dernières années de ma vie à bord des navires. Pendant un long moment, nous participions à des opérations contre l’exploitation des animaux en Antarctique, dans l’Océan Pacifique et surtout dans le Golfe du Mexique où il y a un grave problème de pêche illégale, de chasse aux baleines et de capture de dauphins. Derrière ces pratiques, il y a tout un réseau qui fonctionne de manière mafieuse. On nous a attaqués en mer, on nous a menacés qu’on allait brûler notre navire, on nous a mis en danger en général. Nous avons aussi pénétré dans des industries de production de viande, où nous avons tourné des vidéos pour montrer l’extrême violence dont on se sert dans des lieux pareils. Nous souhaitions faire comprendre aux gens le fait que la consommation de viande et de produits animaliers alimente le système de maltraitance des animaux.  

Q : A Athènes, il y a une mobilisation contre le Parc Zoologique d’Attique, au sein duquel se trouve un bassin de dauphins, dont certains proviennent de populations sauvages capturées en Mer noire ou dans le Golfe du Mexique selon les processus que tu as décrits.

R : Je suis au courant. A mes yeux, tous les jardins zoologiques sont ignobles. Ce sont des espaces de maltraitance extrême d’animaux où on inculque aux enfants l’idée fausse que les animaux sont inférieurs aux êtres humains. Je vous souhaite, donc, bonne chance dans votre combat.

Q : Quand as-tu commencé à t’impliquer dans des opérations de sauvetage de réfugiés en mer ?

R : Je suis allée à bord du navire Iuventa en 2016, nous avons réalisé certains sauvetages et, ensuite, notre navire a été confisqué à Lampedusa. Après, je suis allée à bord du navire SeaWatch 3. Nous avons réalisé des sauvetages pendant un an. En juin, nous avons appris que la justice italienne m’accusait avec neuf autres membres de l’équipage de Iuventa « d’aide et de complicité à l’immigration illégale ». Nos avocats nous ont conseillé d’arrêter provisoirement nos opérations de sauvetage en mer, et nous avons suivi leur conseil. Nous essayons maintenant de recueillir des preuves et de collecter l’argent requis pour le procès. Bon, à vrai dire, nous ne sommes qu’une partie infime du problème. En fait, on criminalise les réfugiés. A travers ses pratiques, l’UE fait passer le message qu’il est illégal de revendiquer le droit à une vie meilleure et en sécurité. Beaucoup de réfugiés et de migrants ont été accusés de trafic de migrants, mais cela reste peu médiatisé. Le plus souvent, les embarcations sont conduites par des réfugiés, soit parce qu’ils paient ainsi moins d’argent pour la traversée, soit parce qu’ils sont forcés de le faire par les trafiquants. Une fois l’embarcation arrivée dans un port européen, les autorités s’empressent de découvrir et d’interpeller le réfugié qui conduisait l’embarcation. Quand on est capitaine blanche, on est « héroïne », mais quand on est réfugié persécuté, on est traité comme les criminels.

Q : Pourquoi as-tu décidé de quitter ton domicile afin de participer à des opérations de sauvetage en mer ?

R : De toute manière, je mène une vie de nomade. Cela fait dix ans que je n’ai pas de domicile fixe. Je vis dans des endroits divers à travers le monde. J’ai participé à des opérations de sauvetage en mer parce que j’avais l’expérience et je savais naviguer. Je suis consciente de mes privilèges en tant qu’européenne, détentrice d’un passeport allemand. A mes yeux, l’exploitation des animaux, tout comme l’exploitation des êtres humains résultent d’un système d’oppression et de violence commun, qui décide que les vies des animaux comptent moins que celles des humains, et que certaines vies humaines comptent moins que d’autres. Considérer qu’il y a des formes de vie consommables me paraît impensable et immoral.

Quel est ton souvenir le plus vif des sauvetages en Méditerranée ?

R : J’en ai plusieurs, tantôt bons, tantôt mauvais. Une fois, il y avait quinze embarcations en mer et nous étions le seul navire de sauvetage à proximité. A ce moment, on devait choisir par où on allait commencer l’opération. Nous nous sommes d’abord approchés d’une embarcation prête à couler, remplie de femmes originaires d’Afrique subsaharienne. Nous avons eu le temps de leur lancer des gilets de sauvetage. Pendant ce temps-là, une autre embarcation a coulé et les gens se sont trouvés dans l’eau. Nous avons expliqué aux femmes que nous devions secourir ceux qui étaient déjà dans l’eau sans aucune protection. Elles se sont alors tenu les mains et ont commencé à chanter. C’était extraordinaire de les voir se donner du courage malgré tout ce qu’elles avaient vécu. Elles n’étaient pas seulement victimes, elles devenaient actrices de l’histoire. Elles étaient activistes, elles-mêmes, bien plus que moi. Elles avaient revendiqué leur liberté et elles étaient allées jusqu’au bout de leur revendication. Le système n’a pas pu faire fléchir leur volonté. Mais, j’ai également de mauvais souvenirs. Des cris des naufragés auxquels nous n’avons pas pu porter secours, des images de femmes voyant leurs bébés se noyer sans qu’elles puissent leur venir en aide. Une fois, les gardes-côtes libyens sont arrivés les premiers près d’une embarcation, ils l’ont transpercée, beaucoup de gens se sont trouvés dans l’eau. Les gardes-côtes essayaient de les faire monter à bord de leur navire, mais plusieurs se jetaient à nouveau dans la mer en disant qu’ils préféraient se noyer plutôt que de retourner en Libye. Nous avons pu sauver soixante personnes, quarante autres ont été enlevées par les garde-côtes libyens et les autres, trente ou quarante personnes, ont été noyées. Nous avions à bord un jeune homme qui se balançait sans cesse           en avant et en arrière en disant « ma sœur, ma sœur ». Il l’avait perdue de vue et ne savait pas si elle avait été noyée ou si elle avait été forcée de retourner en Libye. Nous les sauvons, nous savons à quel point ils sont traumatisés et, après, on les remet aux garde-côtes italiens, parmi lesquels certains sont gentils mais il y en a qui sont fascistes et les traitent de manière inhumaine.

Q : Est-ce qu’ils parlent de ce qu’ils ont vécu en Libye ?

R : Il suffit de les regarder, tout est là. Dans la plupart des cas, ils ne portent qu’un short. Ils ne possèdent rien. Ils portent des traces de coups de feu et de coups de fouet. On les torture et on filme les scènes pour les envoyer à leurs familles afin de leur soustraire davantage d’argent. Nous avons rencontré un homme à l’oreille coupée, on la lui avait coupée dans un centre de détention libyen. Nous avons entendu plusieurs histoires sur des femmes violées. Dans les centres de détention, on leur distribue une bouteille d’eau une fois par jour ou tous les deux jours. C’est tout ce qu’ils ont pour boire et verser dans les toilettes. Des conditions indescriptibles que j’ai du mal à imaginer. L’Europe ne se soucie guère des morts dans les pays d’origine, dans le désert, dans les centres de détention, en mer. Elle n’a de soucis que lorsqu’elle voit un sauveteur tenant un enfant dans les bras. Une fois, nous avions à bord un enfant de deux ans et demi, mort suite à un incident impliquant les garde-côtes libyens. La marine italienne et la marine française étaient à proximité, mais n’ont rien fait. Nos médecins à bord ont tenté de le ranimer, en vain. Nous avons dû le placer dans un frigo car nous n’avions pas d’autre espace à notre disposition, alors que sa mère était à bord aussi. Pendant trois jours, l’Europe ne nous autorisait pas à accoster. Nous envoyions sans cesse des appels en précisant que nous avions à bord soixante réfugiés exténués. Quand, enfin, nous avons été autorisés à entrer dans un port italien, nous avons vu qu’on avait préparé une fiesta au port pour le garçonnet décédé. Les gardes-côtes ont transporté pieusement son cadavre et ils ont fait appel à un prêtre pour la messe funéraire. Ils ne se sont pas renseignés sur sa religion. Ils ont appelé un prêtre catholique. C’était très hypocrite, tous ces gens-là n’avaient rien fait pendant que le garçonnet était encore vivant.  

Q : L’UE ne serait-elle pas coresponsable de l’émergence de l’esclavage moderne en Libye et des crimes des garde-côtes libyens ?

R : Tout à fait. Les autorités libyennes gagnent de l’argent grâce au trafic des réfugiés, elles sont subventionnées par l’UE pour maintenir les réfugiés dans des camps exécrables, elles font du chantage aux familles des réfugiés pour qu’elles leur versent encore plus d’argent, elles placent les réfugiés dans des embarcations de fortune que, par la suite, elles détruisent pour renvoyer les réfugiés au pays. Un cercle de destruction qui se perpétue grâce aux subventions communautaires.

Q : Tu as déjà visité l’île de Lesbos. Penses-tu que la dignité humaine est aussi bafouée dans le camp de Moria ?

R : Je suis allée à Lesbos parce que j’ai des amis qui y travaillent. C’est ainsi que j’ai pu visiter le camp de Moria où, en effet, les conditions de vie sont lamentables. C’est désespérant de savoir que les gens, qui ont dû voyager si longtemps, venant de très loin et faisant face à tant de difficultés afin de se trouver en sécurité, aboutissent dans un tel camp. C’est comme si on ne reconnaissait aucun droit aux réfugiés, comme si on les privait de toute possibilité de rêver d’un avenir meilleur.

Q : Je me dis que toi et Carola vous êtes devenues des symboles de la lutte contre la criminalisation de la solidarité. Etre capitaine est rare, l’être lors des missions de solidarité est encore plus rare. D’un autre côté, il y a sans doute une instrumentalisation médiatique. Qu’en penses-tu ?

R : Ceci est aussi important pour notre combat que tout le reste. Il y a des gens superbes à bord d’un navire de sauvetage, lesquels, indépendamment de leurs compétences spécifiques, font des choses incroyables en mer. Je sais qu’il y a du sexisme, même dans les milieux activistes, qu’il y a des rôles liés aux genres et des stéréotypes. On doit mettre tout cela en question et l’écarter de notre vie. Toutefois, je ne peux que répéter ce que j’ai dit auparavant. On assiste à une sensibilisation sélective face à la présence d’une femme aux commandes d’un navire, alors que des milliers de réfugiées se battent pour rester en vie dans l’indifférence absolue des médias.

Q : La législation adoptée par Salvini illustre une facette de la croissante fascisation de l’Italie et, éventuellement, de l’UE. Es-tu optimiste quant à l’émergence des résistances ?

R : Salvini ne représente que l’avant-garde. Tous les chefs de gouvernement européens sont satisfaits de cet état des choses et le déclarent aussi bien par leur silence que par leur refus d’accueillir des populations réfugiées. La montée en puissance de l’extrême droite ne constitue pas un fait qui se produira dans un futur vague. Nous sommes en train de vivre ce fait. L’Europe forteresse, la militarisation de la question des réfugiés et la criminalisation de la solidarité ne sont que des faits révélateurs de cette tendance. J’espère de tout cœur que cela se heurtera à une large résistance et désobéissance.

Q : Ces jours-ci, tu as eu la possibilité de fréquenter certaines structures autogérées dans le quartier d’Exarchia, telles que les squats d’hébergement des réfugiés. Le nouveau gouvernement grec menace d’évacuer ces squats et de renforcer la répression dans ce quartier. Penses-tu qu’il faudrait soutenir un mouvement de défense de ces structures ?

R : C’est pour cela que je suis venue ici, pour exprimer ma solidarité. Je trouve très beau le fait d’avoir des gens vivant et luttant ensemble. Il y a une communauté internationale de solidarité, d’amour et de combat. J’aime faire connaissance avec ses parties et me lier avec elles. On doit défendre les squats en Grèce et notamment les squats d’hébergement des réfugiés car ce sont des espaces de liberté à forte connotation symbolique. Ils montrent clairement qu’on peut prendre vraiment soin des gens loin de la violence et du contrôle de la police. En plus, vivre à côté des réfugiés brise l’ignorance. Les connaître à travers les médias est une chose, vivre à côté d’eux en est une autre.

Q : Es-tu préoccupée par l’évolution de ton affaire devant la justice ?

R : Non, parce que le pire est déjà arrivé. A partir du moment où on a fermé les frontières et signé l’accord entre l’UE et la Turquie, le droit à la vie a été criminalisé impliquant ainsi la mort de nombreuses personnes. Ceci étant, je suis bien évidemment préoccupée par l’évolution de mon affaire. Mais, quoi qu’il arrive, personne ne pourra m’enlever ma foi en la lutte pour la libération sociale et ma joie d’y participer.

Le contre-G7 du 19 au 26 août

Toutes les informations sur le Contre-G7 (Hendaye-Irun 19-26 août)

lundi 24 juin 2019, par Attac France   Campagne > Contre le G7 et son monde

Du 24 au 26 août, Macron accueillera le G7 à Biarritz. Fervents adeptes du système néolibéral, mettant à sac notre planète et faisant souffrir les peuples de leurs politiques austéritaires et pro-business, les sept pays parmi les plus riches du monde et la Commission européenne se réunissent cette année sur le thème des inégalités.

Pour accéder au communiqué initial des organisations membres de la plateforme Alternatives G7, cliquez ici

Contre le G7, pour un autre monde !

Le cynisme de ces pyromanes de la planète n’a donc pas de limite. Dans la lignée des contre-sommets qui ont forgé le mouvement altermondialiste, la réponse citoyenne s’annonce importante encore, cette année au Pays basque, terre de résistances. Pour y défendre sa volonté d’un monde plus juste et désirable, Attac y participe pleinement, aux côtés de nombreuses associations, syndicats et citoyen·ne·s et vous y donne bien sûr rendez-vous. Ensemble, éteignons les sept brasiers du capitalisme !

Voici le programme du contre-sommet qui mêlera actions, réflexions et débats, pour élaborer ensemble la stratégie et les alternatives qui doivent dessiner le monde que nous voulons et pour le crier haut et fort dans les rues du monde entier. Plus de 90 organisations du Pays Basque, de France et d’Europe sont déjà sur le pont !

  • 19-20 Août : Montage du Village d’Accueil des participants-es à Hendaye.
  • 21, 22, 23 Août : Contre-Sommet (Centre-ville de Hendaye et Centre de congrès du FICOBA à Irun).
  • 24 Août : Manifestation !
  • 25 Août : Actions et rassemblements pacifiques sur 7 places autour de la zone d’exclusion du G7.

Nous avons besoin d’une mobilisation forte sur le camp, c’est aussi un objectif de réussite de ce contre-G7 ! Il y aura des repas à prix libre, un bar, des sanitaires, des animations le soir… Venez camper et inscrivez-vous ici, ça nous permettra de gérer au mieux les besoins : https://playout916495.typeform.com/to/w38HFr

Voici les liens permettant d’accéder aux sites et informations logistiques du Contre-G7 :

Programme des 3 Jours du Contre-Sommet

21, 22, 23 Aout 2019

Nous sommes en train d’élaborer le programme des 3 jours de forums/débats/coordinations qui sont déjà prévus, autour de 7 thèmes principaux. Voici en avant-première, ceux qui sont d’ores et déjà programmés. Beaucoup d’autres suivront dans les jours qui viennent ! Et s’y ajoutent de nombreux ateliers organisés par les mouvements basques.

1. Pour un autre monde, sortons du capitalisme et de la dictature des multinationales

  • Stop à l’impunité des multinationales
  • Dette publique
  • Justice fiscale et gilets jaunes
  • Lutte contre la privatisation des Aéroports de Paris, pour les services publics et les biens communs
  • Campagne Stop TAFTA/CETA

2. Contre la destruction de notre planète, protégeons la terre, défendons le vivant :

  • Justice environnementale et marche climat
  • Souveraineté alimentaire
  • Désinvestir des énergies fossiles pour ouvrir l’horizon d’un avenir soutenable

3. Pour un monde radicalement féministe, à bas le patriarcat :

  • Femmes en lutte contre les inégalités sociales et économiques
  • Le féminisme en réponse à la crise écologique et sociale
  • La grève féministe, outil de combat
    (l’essentiel des conférences et ateliers sur ce thème se tiendront le 22 août)

4. Respectons la diversité et la liberté des peuples, pour un monde décolonial et sans discriminations

  • Processus de paix au pays Basque

5. Pour une démocratie sociale et les mêmes droits pour toutes et tous, à bas l’autoritarisme

  • Conférence sur la répression
  • Atelier/débats sur la spéculation foncière
  • Tribunal du Service Public
  • Gratuité des transports publics

6. Pour un monde juste et basé sur la solidarité entre les peuples, à bas les guerres et l’impérialisme

  • Crise dans la mondialisation/Nouvel autoritarisme/Militarisation

7. Personne n’est illégal sur cette planète, abolition des frontières pour les êtres humains

  • Liberté de circulation et d’installation
  • Quelles stratégies face aux politiques migratoires pour les mouvements sociaux au niveau européen ?

Les Informations logistiques

S’y rendre :

Le camp du contre-sommet se situera à côté du centre Pierre et Vacances,
Le Domaine de Bordaberry, Route De La Corniche, Lieu Dit Bordaberry, 64122 Urrugne.

En train
  • Depuis Paris-Montparnasse : 1 train toute les 2 heures env. de 7h47 jusqu’à 17h47 (Trajet : 4h40).
  • Depuis Toulouse : 1 train toute les 2 heures env. de 6h30 jusqu’à 16h45 (Trajet : 5h20).
  • Depuis Bordeaux : 1 train chaque heure env. de 5h20 jusqu’à 20h02 (Trajet : 2h40)
  • Depuis Marseille : 1 train chaque heure env. de 5h14 jusqu’à 14h57 (Trajet : 9h00)
En co-voiturage ou en bus :

Rejoignez l’événement « Contre-G7 » sur le site de covoiturage Mobicoop.

  • Depuis Paris : https://urlz.fr/9YAl
  • Depuis Bordeaux : http://k6.re/yF55L
  • Depuis Marseille : http://k6.re/wi6_i
  • Depuis la Gare de Hendaye : Prendre la navette 20 en direction de Ciboure-Saint-Jean de Luz.
  • Stopper à l’arrêt Abadia, puis prendre la navette 6 jusqu’au terminus Hendaye-Haïçabia. Marcher 100m sur la route de la corniche, avec la mer à votre gauche. Prendre ensuite la première route à droite pour rentrer dans le domaine de la Bordaberry.
Y loger :

Deux possibilités s’offrent à vous pour loger pendant le contre-sommet :
1. En hôtel ou dans la mesure du possible en hébergement militant

  • Hôtel de la Gare-La Palombe Bleue, 1 r Déportes, 64700 HENDAYE
    993 m de Hendaye – Tél : 05 59 20 81 90
  • Le Santiago, 15 r Santiago, 64700 HENDAYE
    885 m de Hendaye – Tél : 05 59 20 00 94
  • Txingudi Hotel, 36 bd Gén Leclerc, 64700 HENDAYE
    925 m de Hendaye – Tél : 05 59 20 00 26
  • Hôtel Valencia, 29 bd Mer, 64700 HENDAYE
    1,8 km de Hendaye – Tél : 05 59 20 01 62
  • Hôtel Lafon, 99 bd Mer, 64700 HENDAYE
    1,5 km de Hendaye – Tél : 05 59 20 04 67
  • Hôtel/Restaurant Ibaïa, 76 av Mimosas, 64700 HENDAYE
    1,4 km de Hendaye – Tél : 05 59 48 88 88
  • Hôtel Restaurant Bergeret-Sport
    4 r Clématites, 64700 HENDAYE – Tél : 05 59 20 00 78
  • Hôtel Villa Goxoa, 32 av Magnolias, 64700 HENDAYE
    Tél : 05 59 20 32 43
  • Résidence Orhoitza, 1 r Oliviers, Vacances Bleues Résidences, 64700 HENDAYE
    1,4 km de Hendaye – Tél : 05 59 48 80 00
  • Hôtel Restaurant Campanile, 102 rte Béhobie, 64700 HENDAYE
    Tél : 05 59 48 06 48
  • Hôtel Restaurant Ibaïa, Pont de Sokoburu 76 av Mimosas, 64700 HENDAYE
    Tél : 05 59 48 88 88
  • Hôtel Uhainak, 3 bd Mer, 64700 HENDAYE
    Tél : 05 59 20 33 63
  • Les Jardins de Bakéa, Quart Bourg, 64700 BIRIATOU
    3,9 km de Hendaye – Tél : 05 59 20 02 01
  • Mer & Golf Résidence Soko, Eder, Route Kattalin Aguirre, 64500 CIBOURE
    7,8 km de Hendaye – Tél : 05 59 51 72 00

Si vous ne trouvez pas de place en hôtel ou hébergement militant, veuillez nous contacter à hebergementg7@attac.org et nous essayerons dans la mesure de nos moyens de vous aider.

2. Dans le « camp »

Nous disposerons de plusieurs grands espaces répartis dans le camp où vous pourrez poser vos tentes et matériels de campings et d’un parking pour vos véhicules (nous sommes en train de déterminer son emplacement). Nous essayerons aussi de fournir, dans la mesure de nos moyens, des espaces de couchages en dur pour ceux ou celles qui en auraient le plus besoin.

Dans la mesure du possible selon les places disponibles sur le campement lors de votre arrivée, un point de ralliement a été déterminé pour regrouper les ami·e·s d’Attac (avec notamment Droit au logement, Solidaires ou encore la Confédération Paysanne, etc…) dans la deuxième partie du campement comme indiqué dans l’image ci-dessous en rouge à droite :
Cliquez sur l’image pour voir l’image en grand.

Des modules de douches et de toilettes sèches seront disposés dans tout le camp. Par ailleurs, nous fournirons des repas (végétariens) à prix libres pour toutes et tous. Des associations et fermiers locaux proposeront aussi des repas variés.

Plusieurs bars seront ouverts en soirée, notamment dans l’espace concert. Durant les trois jours de forums du Contre-Sommet (21, 22, 23 Août) les activités/concerts/débats/ateliers seront répartis entre « le village des alternatives » dans le centre d’Hendaye, le FICOBA à Irun de l’autre côté du fleuve et sur le camp lui-même. Des navettes régulières permettront de rejoindre le village des alternatives, le FICOBA et le camp.

Grèce Résistance à la frénésie pétrolière

En Grèce, face à la frénésie pétrolière, la résistance s’organise

6 juillet 2019 / Andrea Fuori et Raphaël Goument (Reporterre)

Depuis 2014, 72 % des eaux et 13 % des terres de la Grèce sont destinées à la recherche et l’exploitation des hydrocarbures, bien souvent à l’insu des populations locales. Mais, avec l’aide d’associations environnementales, la résistance s’organise, notamment dans l’Épire.

  • Région de Ioannina (Grèce), reportage

« C’est impossible que ça arrive pour de vrai. Non, je ne peux pas imaginer qu’il n’y ait plus d’arbres ici. Si les travaux se font vraiment, s’ils commencent à sortir du pétrole de la terre, nous les bloquerons. Nous n’avons pas le choix. » Costas, prof de maths à la retraite, nous dit ça tout en déchargeant d’énormes sacs d’engrais et de terre de sa voiture. Et, comme chaque jour, pose la même question à sa fille, qui gère le commerce : « Et les ouvriers de la prospection, on a eu des nouvelles aujourd’hui ? » Son visage est doux, son front cuivré luit sous le soleil. « Non rien. Je crois qu’ils ont été aperçus ce matin vers Zagori [un village voisin d’une trentaine de kilomètres], mais le maire est venu protester en personne, les ouvriers ont tout replié et sont partis. »

Costas, prof de maths à la retraite : « Tout le monde a peur de ce changement, pas juste nous, les retraités. »

Difficile d’imaginer que leur village, Zitsa, petit bourg d’environ quatre-cents habitants perdu dans un massif montagneux de l’Épire, soit au cœur des appétits de grands groupes pétroliers. Et pourtant, le sous-sol de cette région du nord-ouest de la Grèce, la plus pauvre du pays, pourrait regorger d’hydrocarbures (pétrole, gaz et gaz de schiste). Tout comme un gros tiers du pays, à la fois dans les terres et en milieu marin. « Le gouvernement a ouvert tout l’ouest du pays aux compagnies pétrolières, il y en a pour des années, nous en sommes encore aux toutes premières phases », se désole Takis Grigoriou, chargé de mission chez Greenpeace Grèce. L’ONG, après un engagement historique contre l’extraction du lignite, a décidé de placer le pétrole au cœur de ses activités fin 2017. « C’est devenu clair qu’il fallait s’en soucier, que ça devenait un enjeu majeur. »

Vingt « blocs » ont été délimités comme on coupe un gâteau, le long de la côte occidentale, des Balkans à la Crète

L’hypothèse de présence d’hydrocarbures dans les sous-sols de l’Épire n’est pas nouvelle. L’armée italienne fut la première à y mener des recherches durant la Seconde Guerre mondiale, avant qu’Athènes ne reprenne le flambeau dans les années 1960, puis 1980. Mais le paysage, difficile et escarpé, avait rendu les prospections infructueuses. Les récentes innovations technologiques, notamment le traitement des données sismiques, ont rebattu les cartes. La seule concession de Ioannina, qui couvre une partie de l’Épire, promet ainsi aujourd’hui de produire entre 3.000 et 10.000 barils par jour.

 

Zitsa, bourg de 400 habitants, en Épire, dans le nord-ouest de la Grèce.

À en croire les déclarations en 2014 d’Antonis Samaras, alors Premier ministre (droite) : en 30 ans, pas moins de 150 milliards d’euros d’entrées fiscales pourraient bénéficier à la Grèce. Une manne pour un État qui peine toujours, neuf ans plus tard, à sortir son économie du marasme dans lequel l’a plongée la crise de la dette publique, qui lui a fait perdre près du tiers de son produit intérieur brut (PIB).La suite est connue : 20 « blocs » ont été délimités comme on coupe un gâteau, le long de la côte occidentale, des Balkans à la Crète. Les sites en mer couvrent au total 58.000 km2, soit 72 % des eaux grecques. À terre, 17.000 km2 sont concernés, soit 13 % du territoire. Tous les blocs ont été attribués ou sont en cours d’attribution sous la forme de concessions de 25 ans. Au rendez-vous, deux compagnies nationales : Hellenic Petroleum et Energean. Mais aussi des grandes compagnies occidentales : Total, ExxonMobil, Repsol ou encore Edison, une filiale d’EDF.

Carte des « blocs » attribués et en voie d’attribution.

Pour l’instant, au cœur des massifs épirotes, ni forage ni puits de pétrole, seulement la chaleur et les nuées de papillons. Pour apercevoir les travaux préparatoires, une seule solution : suivre les pistes. Costas, le vieux prof de maths, ne se fait pas prier. Petrus, son vieux copain, un ancien boulanger à Athènes, insiste pour nous accompagner. Il faut s’éloigner du village, quitter la route et ralentir l’allure sur les chemins rocailleux, s’enfoncer à pied dans le maquis escarpé, traverser les forêts de noyers et de châtaigniers. « Peu de gens viennent jusqu’ici. » La zone est reculée, à peine parcourue par les chasseurs, qui y traquent lièvres et sangliers. Difficile de comprendre comment les ouvriers peuvent l’atteindre.

Petrus, l’ami de Costas. Boulanger à la retraite, il est lui aussi revenu couler ses vieux jours dans les montagnes de l’Épire.

Soudain, le vrombissement d’un hélicoptère se répand dans le ciel. À basse altitude, il hélitreuille des caisses volumineuses. « C’est comme ça qu’ils transportent leur matériel et tous leurs outils, certaines zones ne sont même pas accessibles par la route », précise Costas, visage tourné vers les cimes. Lorsqu’on lui demande comment il peut être sûr qu’il s’agit bien d’ouvriers de la compagnie pétrolière, il rit jaune. « Pourquoi y aurait-il un hélicoptère ici autrement ? » Son copain rigole à son tour.

Un des hélicoptères utilisés pour déplacer outils et matériel dans le maquis de Zitsa, une zone escarpée et difficile d’accès.

Après un bon moment à crapahuter, le vieux professeur s’immobilise. Il pointe du doigt un petit ruban jaune qui flotte au vent, noué à la branche d’un arbuste. « C’est comme ça qu’ils balisent leurs chemins jusqu’aux zones où ils font leurs explosions. » Effectivement, tous les 20 mètres, un ruban conduit à un autre. À la fin du jeu de piste, des trouées artificielles autour desquelles la végétation a été arrachée. Au milieu, des sacs de sable couvrent les orifices qui ont servi à introduire des explosifs dans le sol. Depuis un an, des milliers de ces trouées clairsèment la région.

Des sacs de sables ont été déposés à l’endroit ou les explosifs ont été utilisés.

« D’ici un an, ils auront fini les tests sismiques, ensuite ce sera le moment des premiers forages » 

Les habitants des dizaines de hameaux dispersés dans le massif de l’Épire semblent parfois à peine au courant du destin qui a été négocié pour eux, à des centaines de kilomètres de là, à Athènes. C’est le cas de Stavros, originaire de Kalahori, patelin d’une quarantaine d’âmes. « J’ai découvert ce projet seulement fin 2016, en tombant sur un reportage sur Alpha [une télévision privée] qui vantait les aspects positifs de l’exploitation pétrolière de Prinos [l’ancienne et unique exploitation grecque, dans l’est du pays, exploitée depuis le début des années 1970]. La seconde partie du reportage, c’était mon village ! Tu imagines ? Il montrait les traces de pétrole qui remontent à la surface, près de la rivière. » Personne alors, dans les communautés locales, ne se soucie réellement du problème. C’est seulement l’année suivante, avec l’arrivée des premiers ouvriers et le lancement des recherches à l’automne 2017, que les locaux prennent conscience de la situation, sans n’avoir jamais vu l’esquisse d’une consultation publique.

Les massifs montagneux proches de Zitsa.

La région abrite pourtant un des blocs à l’agenda le plus avancé. Le Parlement grec a ratifié le lancement des opérations dans la zone en octobre 2014. 4.187 km2 sont concernés, faisant craindre un désastre écologique d’ampleur. Pas moins de 20 espaces naturels protégés pourraient être touchés, rien que pour ce bloc. Deux autres sites, cette fois dans le Péloponnèse, inquiètent aussi les ONG : Katocolo (cinq millions de barils espérés) et le golfe de Patras (200 millions de barils espérés). « L’extraction pétrolière est un danger imminent. D’ici un an, ils auront fini les tests sismiques, ensuite ce sera le moment des premiers forages », dit Takis, de Greenpeace.

Vassiliki, 65 ans, née à Zitsa, où elle ouvert une boulangerie en 1992. Avec l’exploitation pétrolière, « il y aura du travail seulement pour quelques-uns et pour quelques temps, ça ne changera rien au problème du chômage dans notre village ».

Aucun des partis politiques représentés à la Vouli (le Parlement grec) ne semble désireux de remettre en question cette frénésie pétrolière. Ni même la formation de gauche radicale Syriza, au pouvoir depuis 2015, qui s’était pourtant fait élire avec un programme ne laissant guère de place à l’extractivisme. « C’est une trahison inacceptable, ils étaient contre. Une trahison qui aura des conséquences désastreuses sur l’économie locale et l’environnement ! » dit Dimitris Ibrahim, engagé avec WWF. Et d’ajouter : « Les seuls qui nous soutiennent, c’est le MeRA25 et Varoufakis [le Front réaliste européen de la désobéissance, formation fondée en 2018 par l’ancien ministre des Finances du premier gouvernement Tsipras]. » Après avoir approché les 3 % aux élections européennes, la jeune formation pourrait espérer faire son entrée à la Vouli lors des élections anticipées le 7 juillet prochain.

« Il y a toujours eu ici un sens très fort de la communauté, de l’attachement à la terre » 

Au cœur des maquis, les communautés épirotes se sont faites à l’idée qu’il fallait s’organiser sans rien attendre de personne. En 2017, Lila, une habitante de la région lance le premier groupe Facebook dédié au sujet. Deux ans plus tard, Save Epirus compte plus de 16.000 membres des quatre coins du pays. « Il n’y avait aucune information pour les habitants. On a créé ce groupe pour informer et aussi pour s’organiser. C’est compliqué de se croiser ici, il n’y a pas forcement beaucoup de contacts entre les communautés », explique Lila. Âgée de 44 ans aujourd’hui, elle a quitté Athènes en 2007 pour se lancer dans les chambres d’hôtes. Comme elle, les jeunes de la capitale ou de Thessalonique, la deuxième ville la plus peuplée du pays, sont nombreux à envisager de s’installer dans le massif de l’Épire, reprenant parfois des terres familiales. Sans compter les retraités, comme Costas ou Petrus, qui reviennent au village pour leurs vieux jours. « Il y a un réseau de la diaspora épirote en Grèce. Il y a toujours eu ici un sens très fort de la communauté, de l’attachement à la terre. Les jeunes reviennent tous passer l’été dans leur village », nous confirme Anastasis, un jeune étudiant investi dans l’opposition au projet à Ioannina, chef-lieu de l’Épire adossée au lac Pamvotis. « Cette région fait office de laboratoire pour les industries pétrolières : si le projet parvient à être accepté ici, alors ils pourront le faire partout », analyse le jeune homme.

Le lac Pamvotis, que borde Ioannina.

Dans les villes d’Athènes, de Thessalonique ou encore de Ioannina, les milieux militants et écologistes grecs se sont rapidement mobilisés. L’Alimura, centre social autogéré au cœur de la petite capitale régionale, accueille chaque semaine depuis février 2018 une assemblée ouverte. Jusqu’à 60 ou 70 personnes font parfois le déplacement, parfois de communes éloignées. Un rôle de relais essentiel, mais que Dimitris Ibrahim, de la WWF, veut nuancer : « Ils [les réseaux anarchistes et antiautoritaires grecs] sont très actifs, ils ont des réseaux très développés, mais ils ne touchent pas tout le monde, les Grecs ne s’y retrouvent pas forcement. »

Vassilis, 85 ans, né à Zitsa : « Je suis tout de même inquiet pour la pollution, est-ce qu’ils maitrisent vraiment ce qu’ils font ? »

Les petits villages semblent en tous cas mobiliser au-delà de leurs maquis. Les premières manifestations organisées à Ioannina ont fait le plein de soutiens. Plus de 2.000 personnes défilaient en mai 2018 dans le chef-lieu de l’Épire, qui ne compte que 65.000 habitants. Puis, à nouveau en juin 2019. Un exploit sans le soutien d’un parti politique. La manifestation organisée à Athènes, en février, n’a en revanche rassemblé que quelques centaines de personnes. « Ils doivent prendre conscience que ce problème nous concerne tous, il faut que tout le monde se rende compte et se mobilise », dit Lila.

« Tout le monde est d’accord pour travailler ensemble. On se structure peu à peu » 

Des réunions publiques et des assemblées se multiplient un peu partout sur les territoires concernés. L’idée émerge d’une grande coordination de toutes les assemblées contre les exploitations pétrolières de Grèce pour le mois de septembre. Un mouvement vu avec enthousiasme par les ONG. « Bien sûr que nous y participerons, si nous avons la chance d’être invités. Mais ce sont des mouvements citoyens, portés par des collectifs très divers, cela n’a rien à voir avec nos structures, notamment en matière d’organisation, il ne faut pas tout mélanger », dit le chargé de mission de la WWF.

L’Alimura, centre social de Ioannina, accueille chaque soir des discussions et des assemblées, notamment celle des opposants à l’extraction pétrolière.

Bien qu’elles tiennent à s’afficher en retrait, les organisations Greenpeace et WWF demeurent très actives et cherchent à faire décoller le mouvement. Samedi 22 juin, 13 délégations de dix différentes zones promises à l’exploitation d’hydrocarbures se sont ainsi rendues à bord du mythique Rainbow Warrior afin de tenter de coordonner les différents collectifs. « Je pense que c’était un succès, tout le monde est d’accord pour travailler ensemble. On se structure peu à peu. Maintenant, comment trouver des idées concrètes rapidement ? » résume Takis, chargé de mission de Greenpeace.Les deux organisations ont aussi essayé d’emmener la bataille sur le terrain juridique, sans guère de garantie de succès. Deux recours déposés par les ONG sont en cours d’examen par les plus hautes institutions du pays. L’un a été lancé en 2018 et concerne le bloc de Ioannina, l’autre, cette année, pour le bloc marin au sud-ouest de la Crète. À chaque fois, les organisations mettent en cause des infractions à la législation existante sur les études des conséquences environnementales. Les décisions sont attendues pour la rentrée. Ni le ministère grec de l’Environnement et de l’Énergie ni l’entreprise Repsol, qui gère les recherches dans le bloc de Ioannina, n’ont pas pour l’instant donné suite à nos sollicitations.

Appel urgent de VIOME

Nous, les travailleurs de VIO.ME en lutte pour faire fonctionner à nouveau l’usine, avons entendu beaucoup de promesses, beaucoup de bonnes paroles sur la pureté de notre lutte ainsi que de nombreuses dénonciations et menaces.

De temps à autre, on a essayé de nous assimiler à un système qui n’a pas suffisamment de place pour nous, de nous mettre dans les rouages de la bureaucratie à laquelle nous nous opposons quand il s’agit de financements et de subventions.

Puis, nous avons rencontré l’impuissance et le manque de volonté de faire ce qui était évident, c’est-à-dire de légaliser le fonctionnement de l’usine.

On a également essayé de nous présenter comme coupables, car nous revendiquons notre droit au travail et à la vie (en assumant bien sûr tout le fardeau de la gestion de l’usine), par opposition aux entrepreneurs de bonne réputation qui saisissent les profits mais laissent les dettes aux travailleurs.

Bien sûr, le nouvel état de choses nuit à ceux qui perdent le pouvoir, mais il nous nuit encore plus qui sommes exposés, sans beaucoup d’armes, à un pouvoir agressif et résolu.

Nous savons tous parfaitement que le nouveau gouvernement n’est pas simplement défavorable à VIO.ME mais s’y oppose fermement, à nous comme à tous ceux qui peuvent défier le capital. Nous pensons que son premier angle d’attaque sera de nous couper l’électricité. C’est la raison pour laquelle nous demandons de l’aide aux mouvements de solidarité pour acquérir un groupe électrogène qui évitera les ruptures de production et nous aidera à devenir indépendants. La production qui nous maintient en vie ne doit pas s’arrêter pour une seule minute !!!

Nous appelons donc les syndicats, les collectifs, nos compagnons de lutte grecs, européenns et partout dans le monde à participer à l’acquisition d’un générateur de 200 KVA pouvant fonctionner au biodiesel.

Solidairement

Les travailleurs de VIO.ME en lutte

P.S. La meilleure solution serait de trouver une usine de production de groupes électrogènes qui, avec la garantie du mouvement solidaire, nous permettrait de l’obtenir au plus vite!

ANY CONTRIBUTION IS HELPFUL!

on peut trouver le lien paypal à droite en haut sur le site de VIOME http://www.viome.org

Lettre ouverte à Emmanuel Macron , par Geneviève Legay

« Lettre ouverte à Emmanuel Macron », par Geneviève Legay

Au détricoteur des services publics qui lui demandait d’être « sage », Geneviève Legay, talentueuse tricoteuse, lui retourne le compliment par une lettre ouverte accompagnée d’un petit gilet jaune et du drapeau « PAIX ».

La Trinité (06), le 27 juin 2019

Monsieur le Président de la République,

Je souhaite revenir sur vos déclarations du 23 mars 2019, lors de votre passage à Nice, concernant le fait que je serais tombée toute seule ! Vous avez osé affirmer qu’aucun policier ne m’avait touchée ! Espérons que la justice sera plus honnête, au regard de ce qu’ont avoué le procureur de Nice et un policier. Aussi, nous prouverons que ce n’est pas un accident, mais bien des policiers qui m’ont agressée.

De plus, vous avez dit que j’aurais dû rester chez moi. Madame Redouane Zineb était chez elle et, malgré tout, vos policiers l’ont tuée. Qu’avez-vous fait ? Le silence total et plus personne n’en parle. Quel mépris ! Pourtant, cette personne ne manifestait pas.

Nous sommes en France, et, depuis quelque temps, en insécurité permanente. Il ne fait pas bon vivre en macronie parce que, évidemment, vos forces de l’ordre, voire du « désordre » répondent à la politique de Monsieur Castaner et vous-même.

Vos discours sont trop souvent méprisants. Vous n’êtes que mépris. C’est une habitude chez vous de tenir des propos condescendants envers les gens d’en bas, « ceux qui ne sont rien ». Nombre de personnes le constatent depuis plus deux ans.

J’ai 73 ans et suis fière d’être une citoyenne à part entière. Aussi, ne vous en déplaise, je revendique ma liberté de manifester, entre autres, face à vos choix politiques.

Pour vous, qu’est-ce que la sagesse dont je devrais faire preuve ?
C’est accepter la politique que vous imposez comme si aucune alternative n’était possible ?
C’est se laisser dépouiller sans rien dire alors que vous prenez aux pauvres pour donner aux riches ?

Non, je ne vous écouterai pas, bien au contraire, je continuerai à manifester car tout ce que le peuple a obtenu, c’est par de hautes luttes. Le code du travail compilait 150 ans de conquêtes sociales, vous le détricotez ; la sécurité sociale, véritable bijou que le monde entier nous envie, vous l’offrez aux appétits des assurances ; vous organisez la contre-réforme des retraites, vous cassez l’assurance chômage, vous bradez notre patrimoine, vous détruisez les services publics, toujours pour privilégier le privé, notamment en cassant les hôpitaux de l’intérieur…

Votre politique est une véritable honte au regard de celle qui fait cohérence et qui fait peuple.

Vous détricotez, moi je tricote et vous fais parvenir un gilet jaune et un drapeau de la PAIX (faits avec des restes de pelotes).

Voyez-vous, ce sont des symboles face à votre mise en oeuvre de démolition, ainsi que celle de votre entourage, de ce qui faisait société, qui permettait de vivre (certes pas très bien depuis 35 ans) et non de survivre. Avec mes camarades d’Attac, des Gilets jaunes, des syndicats et partis politiques progressistes, nous serons toujours et encore face à vous et vos complices contre cette politique infâme…

Pour tout cela, la citoyenne que je suis ne peut pas vous saluer.

Geneviève Legay

« Si toute vie va inévitablement vers sa fin, nous devons, durant la nôtre, la colorier avec des couleurs d’amour et d’espoir. » – Marc CHAGALL

Entretien Yannis Youlountas

J’ai fait une exception à la règle en parlant pour la première fois à un média mainstream grec (mais pas n’importe lequel), et ce, à la demande de mes compagnons de luttes à Exarcheia. Pourquoi me direz-vous ? L’explication est dans l’article en question : un grand entretien paru hier dans Popaganda. N’hésitez pas à me dire sincèrement votre avis dans les commentaires.

« YANNIS YOULOUNTAS : NOUS N’AVONS PLUS D’AUTRES CHOIX QUE L’UTOPIE OU LA DYSTOPIE

Suite à l’attaque fasciste qu’il a subi il y a un mois au Pirée, l’écrivain, activiste, antifasciste et anarchiste Yannis Youlountas répond à Maria Louka, une invitation à lutter pour un monde meilleur.

Journaliste : Maria Louka / Photographe : Alexandros Katsis / Traduit du grec par Marietta Simegiatou.

[Intro]

Le 13 juin, un groupe de fascistes a attaqué un homme au Pirée. À la nuit tombée, dans un lieu isolé, à quatre contre un. C’est comme ça que les fascistes font leur sale besogne. Dans l’obscurité et en bande, dans le seul but de blesser et de terroriser leurs victimes.

Yannis Youlountas a sans doute eu mal durant l’affrontement, il a aussitôt après été emmené à l’hôpital, mais très rapidement, sans faiblir, il est retourné dans son espace de prédilection : sur la route, parmi ceux qui luttent. Il n’est pas de cette gauche bobo qui circule avec des vestes bien repassées sur les plateaux de télévision, qui mettent en avant leur titres dans la haute société, et qui font des sourires promotionnels. Il n’est pas non plus de ces artistes neutres qui se cachent à l’abri de la forme artistique pour ne pas se mêler de l’incendie qui ravage tout autour d’eux.

Il fait partie de ceux que Kerouac a qualifiés « les fous, les inadaptés, les fauteurs de troubles, les révolutionnaires … qui sont assez fous pour croire qu’ils peuvent changer le monde et qui, à la fin, y parviennent. »

Partageant sa vie entre la France et la Grèce, mais avant tout citoyen d’un monde dont il ne reconnait pas les frontières, réalisateur, écrivain et poète, activiste, antifasciste et anarchiste, Yannis Youlountas a, depuis un très jeune âge, pris position dans les conflits sociaux en faveur des opprimés.

Avec un long parcours dans les mouvements sociaux français et grecs, et toujours en première ligne du front antifasciste, il incarne ces dernières années tout ce que le gouvernement et son discours médiatique diabolise. Il est un fervent participant des collectifs autogérés, telles que les occupations pour les réfugiés que le nouveau ministre de l’intérieur Michalis Chryssochoidis menace de démolir comme il a autrefois démoli la dignité des femmes séropositives. Il est un relais crucial dans la construction d’un mouvement de solidarité international, lié à des personnalités insoumises de notre temps, comme Pia Klemp, la capitaine de navire qui sauve des réfugiés en Méditerranée. Il organise les campagnes internationales de soutien politique et économique à Rouvikonas pour couvrir les frais juridiques supportés par ses membres et croit profondément que la véritable forteresse à anéantir n’est pas Exarcheia mais le capitalisme.

Tout cela et beaucoup d’autres choses encore sont racontées dans son entretien avec Popaganda.

[Entretien]

Maria Louka — Yannis, raconte-nous quelque chose à propos de ton histoire personnelle. Comment la France et la Grèce se croisent dans ta vie ?

Yannis Youlountas — Je suis né en France le 21 septembre 1970, d’une mère française et d’un père grec de Rethymnon en Crète. Ouvrier, issu d’une famille très pauvre de huit enfants, il a quitté l’école dès 11 ans et a reçu sa première paire de chaussures fermées à 13 ans. De l’autre côté, ma mère est issue d’une famille d’enseignants. Elle a étudié la philosophie et a rejoint le mouvement Freinet pour une pédagogie coopérative et libertaire. Ils se sont rencontrés en 1969, pendant la junte des Colonels, et sont ensuite partis pour la France. C’est là que je suis né. Ils se sont ensuite séparés au bout de quelques années. J’ai grandi entre deux logements dont l’un était plein de livres jusque dans les toilettes, et l’autre sans même un dictionnaire. Depuis lors, j’ai compris que les inégalités sont non seulement économiques, mais aussi culturelles. Comme Bourdieu l’a écrit, la lutte n’est pas seulement une affaire de classes sociales, aussi de connaissance.

M.L. — Tu penses donc que les différences dans ta famille ont été le premier stimulant de ta politisation ?

Y.Y. — Oui, les inégalités entre mes parents ont été déterminantes dans ma prise de conscience. Mon père a passé de longues périodes de chômage durant lesquelles j’ai cherché avec lui des champignons, des escargots et des asperges sauvages par nécessité, pour avoir assez à manger. Bien avant de lire des ouvrages analysant les rapports de classes, j’avais déjà développé ma propre représentation.

L’éducation a également joué un rôle important dans ma vie. J’ai étudié de trois façons différentes. Tout d’abord dans une école autoritaire où régnait la violence et compétition. Ensuite, j’ai vécu deux années sans aller du tout à l’école aux côtés de mon grand-père français, durant la séparation entre mes parents. Puis, je me suis familiarisé avec la pédagogie Freinet, coopérative et libertaire, d’abord en tant qu’enfant, puis en tant qu’adulte. Des expériences passionnantes.

La vie est faite de temps et de mouvement. Et c’est précisément ce que confisque le système éducatif aux enfants : la vie elle-même. Alors que les parents ont appris aux enfants à parler et à se tenir debout, le système éducatif leur apprend aussitôt après à se taire et à s’asseoir. C’est pourquoi je participe aux mouvements d’éducation coopérative et libertaire en France et en Grèce, notamment au sein du réseau École Buissonnière-Pédagogie Freinet en Grèce. Je trouve ça très important. Pour changer la société, la lutte contre le gouvernement et l’État ne suffit pas. Les dés idéologiques sont jetés très tôt dans l’existence. La libération des enfants de l’éducation autoritaire est donc une étape indispensable vers un autre futur.

M.L. — Sur cette base, ton identité politique est donc antiautoritaire ?

Y.Y. — Oui. J’aime beaucoup les textes de Marx quant à son analyse du capitalisme, mais je suis convaincu avec Bakounine qu’il faut dissoudre l’État et basculer dans l’autogestion, car le pouvoir finit toujours par corrompre ceux qui le détiennent. Les travaux de Foucault sur la normalité, la surveillance, les prisons et la technologie m’ont également influencé. Tout ce qu’il a écrit se confirme : car chaque jour, nous cédons une partie de notre liberté à la technologie et nous acceptons de mettre notre vie quotidienne sous contrôle. Imaginons un instant si Hitler et sa Gestapo avaient disposé de pouvoirs technologiques de surveillance aussi sophistiqués : un cauchemar !

En France, je suis membre d’un groupe libertaire près de Toulouse, dans le département du Tarn, un groupe composite avec des membres venus de divers horizons, dont la plupart sont fédérés à la fédération anarchiste, Son nom, groupe ELAFF, signifie : écologistes, libertaires, antifascistes et féministes. Je fréquente aussi les mouvements libertaires catalans, en particulier à Barcelone.

M.L. — Tu as réalisé plusieurs films documentaires en Grèce. Cette activité a-t-elle une vocation historique, est-ce une sorte d’enregistrement de choses vues et vécues pour rétablir des faits historiques occultés ou déformés ?

Y.Y. — Depuis sept ans, j’ai réalisé trois documentaires : Ne vivons plus comme des esclaves, Je lutte donc je suis et L’Amour et la Révolution. Et j’ai commencé le tournage d’un quatrième. Je ne fais pas des films pour faire œuvre ou me faire connaître. Ce qui m’intéresse, c’est d’utiliser les outils de l’art pour bâtir de quoi comprendre et, peut-être, changer la société. Je me fiche de l’art pour l’art. Ce qui m’importe, c’est la vie elle-même. Nous pourrions aisément obtenir des subventions de l’État pour produire nos films, les uns après les autres, vu qu’ils ont toujours bien circulé dans les cinémas et qu’ils nous donnent donc le droit de le faire. Mais, avec mes proches, nous avons choisi de refuser toute collaboration avec l’État de même qu’avec les chaînes de télévision auxquelles nous avons systématiquement refusé les rares propositions de passer nos films. En agissant ainsi, nous nous rendons bien sûr la tâche plus difficile, mais nous restons authentiquement indépendants. Nous avons choisi, contre vents et marées, de rester modestes et à bonne distance du pouvoir et de la société spectaculaire. Nos films sont disponibles gratuitement sur Internet et tout le monde peut les voir et, par exemple, organiser des projections dans des lieux de luttes. C’est la même chose pour tous les livres que j’ai publiés. Je n’ai jamais utilisé le copyright, mais le creative commons, donnant la liberté de reproduire à des fins non commerciales. Je ne suis pas non plus rémunéré pour les films, uniquement défrayé. Mon travail professionnel est différent. Je travaille un peu partout pour des structures qui aident des groupes sociaux très vulnérables : sans-abris, prisonniers, élèves renvoyés de leur collège (dans le cadre d’ateliers relais), personnes souffrant de tendances suicidaires ou de dépendance à des drogues, et surtout je travaille dans des médiathèques et des écoles sous forme d’ateliers de philosophie qu’on appelle aussi goûters philo. Voilà pourquoi je ne veux pas gagner d’argent avec ce que je fais pour aider le mouvement. Mais je ne critique pas ceux qui se font payer ou reçoivent des subventions, c’est leur choix et souvent une nécessité. Je suis radical mais je ne veux pas être sectaire.

M.L. — Dans cette vie quotidienne partagée entre la France et la Grèce, tu soutiens beaucoup les squats de réfugiés. Qu’est-ce qu’ils représentent pour toi ?

Y.Y. — Je suis membre de l’assemblée du premier squat ouvert durant la crise des réfugiés, le Notara 26. Je le soutiens politiquement, financièrement et, bien sûr, en matière de communication. En effet, il y a un énorme fossé au niveau de l’information, car les médias du pouvoir déforment la vérité. Ils présentent une image d’Exarcheia qui se concentre uniquement sur la drogue et la mafia. Je ne dis pas qu’il n’y aucun problème à Exarcheia, le jeu obscur de l’État aux côtés de la mafia dans le quartier nous complique souvent la tâche, mais Exarcheia c’est beaucoup plus que tout ça. Les squats de réfugiés, par exemple, sont une grande cause, car ils montrent à la fois notre réponse immédiate à un besoin vital et la société solidaire que nous voulons construire tous ensemble. Lorsque vous ouvrez un squat pour accueillir des réfugiés, vous ne soulagez pas seulement des êtres humains en souffrance, vous apportez aussi un supplément d’égalité et de liberté dans cette société profondément injuste. La société que nous désirons ne peut pas être uniquement décrite dans des textes. Les gens sont fatigués des paroles non suivies d’actes. Nous devons montrer des exemples concrets de la société que nous désirons. Les squats de réfugiés en Grèce en sont un parfait exemple.

M.L. — Dans ce contexte, tu as été la principale personne qui a organisé des convois solidaires internationaux à destinations des structures autogérées en Grèce. Est-ce que ce fut l’une des expériences les plus intenses de ces quatre années ?

Y.Y. — J’ai noté tous les besoins dans les différents squats, dispensaires médicaux, cuisine sociale, etc., autant de lieux que je connais bien, parfois même en tant que membre, puis nous avons apporté, avec mes camarades de l’autre bout de l’Europe, de plus en plus de choses transmises par des personnes solidaires en France et dans d’autres pays alentours. Nous avons toujours pris soin d’amener uniquement des choses correspondant aux besoins précis des lieux, bien rangées dans chaque fourgon, et à ne jamais livrer du débarras. Ce point est très important. Nous agissons comme des égaux, des solidaires, respectueux de nos camarades grecs et réfugiés, et nous n’avons rien à voir avec des initiatives de charité. Je comprends, bien sûr, que chacun participe à sa manière et apprenne progressivement, mais le fond est aussi dans la forme. Nos convois, bâtis en grande partie sur les moyens de communication et financiers de nos films, sont politiques, solidaires, internationalistes.

Parmi ce que nous avons apporté, il y a du matériel médical, des couches pour bébés, ou encore du lait en poudre car les mamans allaitantes étaient épuisées par le long voyage, la peur et la violence, et n’avaient souvent plus de lait pour nourrir leurs enfants. Le premier grand convoi s’est déroulé en mars 2017 avec 26 fourgons en provenance de France, de Belgique, de Suisse et d’Espagne. Dès la première fois, les médias de masse ont beaucoup parlé de nous en diffusant toutes sortes de mensonges, par exemple que nous n’amenions que des choses pour les réfugiés et rien pour les grecs, alors que, outre les squats, nous avons toujours également soutenu les dispensaires médicaux autogérés, la cuisine sociale L’Autre Humain, divers groupes de résistance, des luttes environnementales et une bonne quinzaine de lieux autogérés hautement politiques, comme le K*Vox, Favela, Nosotros, Evangelismo ou Mikropolis. Les chaînes de télé ont également raconté que nous amenions des armes.

Nous avons toujours été au cœur d’une énorme désinformation à cause du danger que nous représentions dans l’imaginaire social. Durant le deuxième grand convoi, en novembre 2017, nous avons été arrêtés par la police au péage de Megara, entre Corinthe et Athènes. Les policiers ont demandé les pièces d’identité à tous les membres du convoi (sauf à moi), mais ils ne sont pas allés jusqu’à ouvrir les cartons. Pourquoi ? Tout simplement parce qu’ils savaient très bien que nous ne transportions pas d’armes. Notre arme, c’est la solidarité. Ils n’ont pas ouvert le moindre carton, car sinon, ils auraient été contraints de cesser de nous calomnier et de nous harceler, notamment en nous suivant un peu partout avec des véhicules banalisés de façon très grossière. Au total, nous avons effectué 12 convois, dont 4 grands convois avec plus de 10 fourgons. À chacune de nos arrivées, une bonne moitié de mes compagnons de voyage ont, tôt ou tard, essuyé quelques larmes d’émotion. Ce sont des moments très intenses et inoubliables, de part et d’autre, qui nous rappellent que les frontières ne sont rien. Le pouvoir les utilise pour nous diviser et nous contrôler.

M.L. — Le nouveau gouvernement du parti Nouvelle Démocratie a annoncé une grande opération d’évacuation et de « nettoyage » à Exarcheia. Cette éventualité t’inquiète ?

Y.Y. — Nous allons être les témoins d’un véritable totalitarisme politique. Mais ce ne sera pas aussi facile que le pouvoir l’imagine. Le nouveau premier ministre grec est un descendant de la dynastie Mitsotakis et plusieurs membres de son gouvernement sont issus de l’extrême-droite. Ils ont promis de détruire tout ce qui faisait la substance et la réputation d’Exarcheia et vont tout faire pour y parvenir. Il y a une trentaine d’années, les flics avaient déjà occupé la place centrale du quartier durant des mois, avant de renoncer.

Depuis, les choses ont changé. Nous avons construit des relations internationales plus fortes que jamais, un puissant réseau de solidarité par-delà les frontières, des échanges d’informations rapides sur un plan horizontal, à l’écart des médias dominants et de leurs mensonges le plus souvent par omission, de fréquents convois et tournées dans un sens et dans l’autre pour mieux nous connaître et présenter ce que nous faisons. Nous sommes avons commencé à construire quelque chose ensemble. Quelque chose d’historique peut-être.

C’est pourquoi, si j’ai accepté pour la première fois de parler à un média de masse qui n’est ni autogéré ni membre de notre réseau, c’est parce que nous avons décidé d’interpeller la société, d’avancer d’un pas vers elle, de faire un effort d’ouverture en direction de gens qui, par exemple, ne nous lisent pas ailleurs. Qu’est-ce que nous voulons dire avec tout ça ? Qu’il y a un monde qui va réagir devant l’attaque et que « nous n’avons pas peur des ruines ». C’est le titre que nous avons choisi à l’unanimité pour le nouveau documentaire que je prépare avec mes compagnons d’Exarcheia et ailleurs en Grèce. Ce titre-slogan est tiré d’une phrase célèbre de Durruti. Pourquoi nous n’avons pas peur des ruines ? Tout simplement parce que c’est nous qui avons tout construit et que, si tout venait à être détruit, nous saurions tout reconstruire en mieux.

M.L. — Tu veux dire que la société capitaliste n’est pas la seule possible ?

Y.Y. — Le capitalisme prétend que l’Histoire est terminée. Autrement dit : chaussez vos pantoufles, asseyez-vous confortablement dans votre canapé, allumez la télévision, gavez vous de chips et soyez heureux que ce que vous voyez aux infos du JT ne vous arrive pas à vous, personnellement. Sauf que ça ne se passera pas comme ça. Rien n’est fini. Il existe des poches et des modèles proposant d’autres façons de vivre dans de multiples régions du monde, du Rojava au Chiapas. Le pouvoir sent de plus en plus qu’il y a quelque chose de puissant et d’insaisissable qui commence à se dessiner en face de lui, c’est pourquoi il se durcit et glisse un peu partout vers le fascisme. Le fascisme est le stade ultime du capitalisme quand il se sent menacé, quant ses illusions perdent en efficacité, quand il éprouve la nécessité de démasquer son vrai visage profondément autoritaire. Partout dans le monde, les pouvoirs se durcissent et le fascisme gagne du terrain. Au Brésil, aux États-Unis, en Hongrie, en Italie, dans trois ans en France…

Pourtant, comble de la réthorique des médias, c’est nous qui sommes traités d’extrémistes. En réalité, en réfléchissant un peu, en ouvrant les yeux sur les actes des uns et des autres, il est clair que ce qui est extrémiste c’est de détruire la Terre, saccager la vie et faire le malheur des gens. La liberté que le pouvoir propose est une liberté de pacotille. Être libre ne signifie pas choisir ce qu’on va acheter dans un rayon de supermarché, mais inventer sa vie, sans opprimer autrui ni détruire la nature, et contribuer réellement à la construction d’un espace commun de réflexion et d’action à commencer par l’entraide. Je ne parle pas seulement d’anarchie, je parle de respect, de dignité, d’humanité, d’amour de la vie et du droit irrépressible de choisir comment nous désirons traverser ce court moment qu’est l’existence.

M.L. — Il y a quelque temps, un groupe de fascistes t’a attaqué au Pirée. Veux-tu nous parler un peu de cette expérience et de l’empreinte qu’elle t’a laissée ?

Y.Y. — C’était il y a un mois. J’étais allé aider le centre social Favela qui avait déjà été la cible d’attaques fascistes par le passé. En sortant du lieu en portant un tee-shirt qu’on venait de m’offrir, j’ai vu quatre fascistes fondre sur moi. Trois ont tenté de me rouer de coups pendant que le quatrième surveillait la seule issue. Heureusement, j’ai tenu bon jusqu’à ce que des témoins arrivent et me viennent en aide. Cela m’est aussi arrivé en France, mais de façon un peu moins violente. Depuis deux ans, je suis également en procès avec les fascistes qui ont organisé l’opération Defend Europe à bord du navire C-Star pour tenter d’empêcher le sauvetage en mer des migrants. Ils n’ont pas supporté notre campagne antifasciste sur toutes les rives de la Méditerranée pour les empêcher d’arriver à leurs fins. D’échec en échec, notamment à Chypre puis en Crète, grâce à la mobilisation de mes camarades de Ierapetra et d’Héraklion, ils ont été forcés de rentrer chez eux en avion. Ensuite, ils m’ont presque aussitôt poursuivi devant les tribunaux parce que j’étais le seul membre visible du collectif Defend Mediterranea qui s’opposait à eux, étant donné que je publiais nos communiqués. L’affaire est en cours. J’attends une éventuelle cassation.

Qu’importe les attaques, les insultes, les menaces, les procès, et peut-être même la mort, s’ils mettent leurs menaces à exécution. Pour chacun d’entre nous, participer au mouvement social est un risque et je l’accepte. Après l’attaque des fascistes, j’ai répondu à mes camarades et amis venus me voir à l’hôpital puis dans mon lieu de convalescence à Exarcheia que j’allais bien et qu’il n’y avait pas lieu de s’inquiéter. Non seulement parce que nous avons librement choisi d’être des cibles potentielles, mais aussi parce qu’en ayant l’habitude d’aider des personnes affamées, malades, sans-papiers ou dormant dans la rue, nos problèmes à nous paraissent vraiment très petits par rapport aux leurs.

M.L. — Tu as des relations étroites avec Rouvikonas pour lequel tu as organisé des actions de soutien. Pourquoi penses-tu que ce groupe est décrit comme le mal absolu dans le discours dominant ?

Y.Y. — Rouvikonas a été diabolisé parce qu’il est la voie à suivre. Si des centaines, des milliers de Rouvikonas agissaient un peu partout, le pouvoir tremblerait sur son piédestal et finirait par tomber. Malgré la propagande immense contre ce groupe, en Grèce comme ailleurs, il y a beaucoup de gens et de collectifs qui aiment Rouvikonas et qui sont diversement inspirés par son action. Ces dernières années, les différentes formes de résistances en Grèce ont joué un rôle très important dans le développement d’un nouveau mouvement international anticapitaliste et, de plus en plus, antiautoritaire. Nous avons créé énormément de liens d’un bout à l’autre de la Grèce et de l’Europe, parfois même au-delà. Rouvikonas en est le parfait exemple. Avec sa façon particulière de remettre au goût du jour l’action directe, le groupe montre tout simplement que le pouvoir n’est pas invincible. En conséquence, il est constamment l’objet de poursuites et de l’ire des médias. D’un bout à l’autre du continent, nous sommes nombreux à le soutenir financièrement pour l’aider à couvrir ses frais de Justice. Nous avons récemment contribué au dépôt de garantie énorme exigé suite à l’attaque du parlement : 60 000 euros réunis en moins d’un mois pour empêcher l’emprisonnement de nos camarades.

Personne parmi nous ne rêve d’être un martyr. Personne ne veut aller en prison. Mais si l’État grec choisit d’envoyer des membres du Rouvikonas en prison, il en assumera les conséquences. Il montrera, une fois de plus, son vrai visage, en privant de liberté des personnes qui luttent contre les inégalités, les accidents du travail, la tyrannie des employeurs, les ventes aux enchères des logements des familles surendettées, les exploitations minières et pétrolières dévastatrices pour l’environnement et tant d’autres causes éminemment justes.

M.L. — Dernière question, quel est selon toi le dilemme de notre temps ?

Y.Y. — Utopie ou dystopie. Nous n’avons plus d’autres choix que l’utopie ou la dystopie dans l’impasse où nous nous trouvons. Et je suis convaincu que nous sommes capables de faire ce grand pas en avant : choisir l’utopie et vivre mieux. »

[Sur le site de Popaganda, l’entretien se termine avec les films Ne vivons plus comme des esclaves, Je lutte donc je suis et L’Amour et la Révolution, en version grecque, intégrés tour à tour dans la page]

Version grecque de l’entretien :
https://popaganda.gr/people/o-giannis-gioulountas-pistevi-oti-to-dilimma-tis-epochis-mas-ine-outopia-i-distopia-ki-epilegi-to-proto

Source http://blogyy.net/2019/07/25/un-entretien-pas-comme-les-autres/

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