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A la mémoire de Zak Kostopoulos

Comme une prière : à la mémoire de Zak Kostopoulos par

Zac Zackie est mort assassiné le 21 Septembre à Athènes.

Au début, le jeune homme sur les images n’a pas de nom. Nous le regardons mourir avant de savoir qui il est. C’est n’importe qui. Ce n’est personne. La scène a été capturée par une caméra ou un portable en surplomb, à quelques mètres de la scène, et les images sont de mauvaise qualité.

Puis, au bout de quelques heures, la silhouette que deux hommes frappent en plein jour dans le centre d’Athènes acquiert un nom.

Nous recevons la nouvelle en plein cœur : le jeune homme à terre n’est autre que Zak, collègue, ami d’enfance ou simple voisin, amant ou être cher, performer et reine des drag shows athéniens sous le nom de Zackie Oh !, militant des droits de la communauté LGBTQI et séropositif — un des seuls à parler publiquement, en Grèce, de son statut sérologique.

Les images de l’assassinat deviennent rétrospectivement intolérables, comme si on ne réalisait qu’alors que quelqu’un est mort pour de vrai.

Vendredi 21 septembre, je lis en fin d’après-midi sur mon fil d’actualité qu’un braqueur a été passé à tabac dans le quartier d’Omónoia par le propriétaire d’une bijouterie. Je ne me rappelle plus ce que j’ai à faire à ce moment précis mais je rabats l’écran. Je finis par regarder la vidéo dans la nuit — les images sont floues, on ne peut pas reconnaître le visage. Le titre de l’article qui accompagne le film mentionne invariablement, quel que soit le média, la tentative de vol à main armée qui aurait précédé la scène.

Un jeune homme assez grand titube derrière la vitrine d’une joaillerie et peine à soulever l’extincteur avec lequel il a visiblement l’intention de fracasser la porte vitrée pour sortir. Il est bizarrement seul à l’intérieur du magasin. Il tangue comme un ours pris au piège dans une cage de verre. L’extincteur qu’il balance à bout de bras donne l’impression de l’attirer vers le sol. De l’extérieur, deux types déchaînés et visiblement plus âgés, dont l’un en chemise rose, l’apostrophent et balancent dans sa direction des projectiles au travers des vitres. On entend faiblement des cris et les réactions horrifiées d’une femme. On apprendra que les projectiles sont des pierres et un cendrier, que l’homme en rose est le propriétaire du lieu, que le deuxième est un agent immobilier qui fait partie des cadres d’une formation d’extrême-droite, le Front Patriotique.

À l’intérieur du magasin, le jeune homme finit par lâcher l’extincteur après avoir été atteint par un objet ou une pierre, se couche et s’engage en rampant à l’intérieur de la vitrine, sous le présentoir, comme s’il tentait de s’extraire d’un cauchemar ou de se blottir dans un endroit plus sûr. Les deux hommes fracassent la vitrine à coups de pied et l’atteignent à la tête. Le jeune homme se traîne sur les éclats de verre jusqu’au trottoir. On distingue de dos les silhouettes de badauds qui assistent à la scène. Un homme en chemisette jaune, à l’arrière-plan, discute au téléphone. Deux hommes s’interposent après que le bijoutier ait shooté comme dans un ballon dans la tête du jeune homme. La vidéo s’arrête là.

Vers 18 heures, samedi, un ami poste la photo de Zak accompagnée de l’acronyme employé par la plupart des utilisateurs de Facebook pour saluer la mort d’une célébrité, R.I.P. Je ne parviens pas tout de suite à faire le lien, à comprendre que Zak et le jeune homme tué rue Gládstonos sont une seule et même personne.

Sur la deuxième vidéo, prise depuis un balcon ou une fenêtre, Zak se relève quelques minutes après avoir subi l’attaque. Il a le crâne bandé et semble avoir du mal à s’orienter. Il reçoit un coup de pied au bas du dos, s’éloigne en titubant, un morceau de verre à la main, trébuche contre les tables d’un café, s’affale de tout son long avant que les agents se précipitent sur lui. La troisième vidéo, publiée quelques jours plus tard, est plus insupportable encore car elle montre Zak en train de mourir, couché face contre le trottoir, en sang. Son visage est bleu, huit policiers s’acharnent sur son corps inerte, lui passent des menottes dans le dos — il est probable que ce sont les gestes qu’ils font pour lui lier les mains qui provoquent ou précipitent à cet instant sa mort par étouffement.

Les témoignages recueillis rapportent que l’ambulance emporte son corps sans enclencher de sirène, qu’il est donc sans doute déjà mort lorsque le véhicule démarre. Il est mort dans tous les cas à son arrivée à l’hôpital, et toujours menotté. Les infirmiers présents sur place le prennent, diront-ils, « pour un Africain » à cause de la teinte de sa peau. La vidéo est insupportable parce qu’on y reconnaît parfaitement son visage et que ceux qui s’acharnent sur lui sont ceux qui auraient dû lui porter secours.

On ignore encore qu’il est entré dans la bijouterie pour y trouver refuge. On a tendance à croire l’hypothèse du larcin, beaucoup moins celle du braquage, non seulement parce qu’aucune arme n’apparaît dans ses mains — sauf à considérer comme une arme le bout de verre qu’il saisit au tout dernier moment dans une tentative désespérée de fuite —, mais parce qu’il avait toute forme de violence en horreur. Vol ou pas, les images sont celles d’un homme en situation de très grande faiblesse et il n’est pas possible d’attendre qu’il soit lavé de tous soupçons pour dire que sa mort est infâme.

Aucune des vidéos publiées ne permet d’estimer le nombre de badauds qui assistent au lynchage mais les témoignages qui commencent à paraître parlent d’une foule de plus de cinquante personnes, certaines filmant la scène sur leurs portables.

Dans les minutes puis les heures qui suivent, les policiers, au lieu d’isoler les lieux, laissent le propriétaire y faire le ménage. Le bijoutier est photographié face à la vitrine éclairée, balayant les éclats comme un travailleur consciencieux à la fin de sa journée de travail. Il paraît étrangement calme et n’a pas changé de vêtements. Il porte toujours la même chemise rose. Après le départ de l’ambulance, il a donné une interview à une chaîne de télévision privée dans laquelle il explique avoir agi sous le coup de l’exaspération, pour défendre son bien. Sa version est relayée par la quasi-totalité des médias. Une présentatrice en vue invitera bientôt les téléspectateurs à dire s’ils comprennent « la réaction du bijoutier » face à « un homme armé d’un couteau ». Une chaîne liée à une personnalité d’extrême-droite leur soumet la question suivante : « Êtes-vous favorables à ce qu’un braqueur homosexuel et séropositif soit considéré comme un héros ? » Un troisième « sondage » entend établir dans quelle proportion les Grecs considèrent les étrangers et les homosexuels comme des « voisins indésirables ». Selon un mécanisme bien rôdé, la victime se retrouve immédiatement sur le banc des accusés. Un ou deux jours plus tard, l’homme en rose revient sur ses premières déclarations, reconnaît qu’aucune attaque à main armée n’a eu lieu, mais le mensonge initial a produit son effet : plus de dix jours après les faits, beaucoup continuent de croire que le propriétaire a agi en état de légitime défense, s’est fait « justice tout seul » et a voulu « protéger son affaire » — la société grecque est en grande part constituée de petits propriétaires.

La « négligence » policière trouve une explication assez simple : les toxicos ou les immigrés passés à tabac et évacués par les premiers secours à la suite de ce type de violences sont en général des anonymes ; personne ou presque ne s’enquiert d’eux, ne cherche à avoir de leurs nouvelles ou ne vient réclamer leur corps. Le représentant de l’Union des employés de police a raison : les policiers ont agi comme ils le font toujours face aux plus vulnérables — sans se douter que la victime avait cette fois des centaines d’ami.e.s et des milliers de followers.

Le rapport d’autopsie affirme que le corps de Zak ne porte aucune lésion susceptible d’avoir entraîné sa mort, que les causes de son décès sont à première vue « indéfinissables » ou « indiscernables », « αδιευκρίνιστα ». L’adjectif suscite la stupeur. On apprend qu’il faudra attendre les résultats des analyses histologiques et toxicologiques, qui ne seront rendus publics que dans un mois, mais aussi que deux des médecins légistes ont eu dans un passé récent partie liée avec la formation néo-nazie Aube Dorée. Face à l’incrédulité, l’un d’eux s’efforce de minorer les conclusions du rapport.

Plusieurs professionnels de santé dénoncent le silence du Service d’aide médicale d’urgence, remettent en cause le comportement des brancardiers arrivés sur les lieux avant la mort de Zak et qui ont accepté de transporter son corps menotté. Le syndicat des médecins hospitaliers parle d’outrage au mort. L’attitude des huit policiers est en revanche défendue par leur représentant syndical (« telles sont nos pratiques, que ça vous plaise ou non »), qui profite d’une intervention télévisée pour envoyer un message de défi à peine voilé au gouvernement grec. Son attitude et sa rhétorique remettent immanquablement au goût du jour le vieux terme de « παρακράτος » qui désigne les forces d’extrême-droite agissant au cœur de l’État, de la police et de la Justice : « État profond », « État dans l’État », « forces paraétatiques ». Ce responsable instrumentalise de surcroît la « peur du sida » en suggérant que les policiers auraient autant que possible évité de toucher Zak, l’auraient déplacé du pied pour éviter d’être contaminés et de contaminer par la suite « leurs enfants ».

La version initialement défendue par la presse évoque un mur rongé d’humidité, un papier peint qui ne tient pas et dont les bandes se détachent et tombent au sol les unes après les autres.

De plus en plus de témoignages, à rebours de la thèse du hold-up, du larcin, du « coup de folie » ou de l’agressivité dont Zak aurait fait preuve, évoquent une altercation ou une attaque ayant eu lieu avant. Une employée travaillant pour la boulangerie-café située à l’angle de la rue rapporte que Zak était quelques minutes plus tôt en état de panique, qu’il criait, que deux ou trois personnes l’entouraient, s’efforçant peut-être de le rassurer, que l’une d’entre elles serait entrée dans son établissement pour lui rapporter une bouteille d’eau — lorsqu’elle est ressortie, Zak était déjà piégé à l’intérieur de la bijouterie. Avec qui parlait-il ? Pourquoi celui qui s’est proposé de lui porter de l’eau a-t-il disparu ? Les fils de discussion prennent parfois la tournure d’une enquête à plusieurs comme si, face à l’incurie policière, la recherche de la vérité avait été prise en mains par les médias sociaux. C. note qu’une des choses les plus insupportables est de penser qu’on ne saura peut-être jamais.

E., qui défend les droits de personnes incarcérées, repasse les vidéos en boucle et finit par remarquer un détail qu’elle isole sur une capture d’écran : l’intérieur de la porte vitrée comportait déjà des traces de sang avant la ruée du bijoutier et de l’agent immobilier ; Zak saignait peut-être déjà lorsqu’il est entré dans la boutique.

Après l’avoir frappé, l’agent immobilier quitte les lieux et prend le temps d’écrire un tweet dans lequel il affirme que Zak se serait suicidé avec le morceau de verre qu’il tenait à la main.

Une foule de questions nous obsèdent. Pourquoi Zak s’est-il réfugié dans cette bijouterie ? Était-il poursuivi ? Un épisode de bullying a-t-il précédé le passage à tabac ? Pourquoi la vitrine de la bijouterie était-elle faite de vitres normales et pas, comme la plupart des boutiques de ce genre, de doubles vitraux incassables ? Est-il vrai que la boutique ne disposait, comme le prétend son propriétaire, d’aucune caméra de sécurité et que les bijouteries de ce quartier sont des lieux de fourgue où les toxicomanes viennent régulièrement déposer des objets volés contre une somme dérisoire ? Pourquoi les nombreux témoins se taisent-ils ? Pourquoi le gouvernement et l’autorité de tutelle des policiers, le « ministère de la protection du citoyen », demeurent-ils silencieux ?

La deuxième vidéo permet de distinguer le couteau que tient derrière lui, à main nue, un des flics qui entourent son corps comme s’il s’apprêtait à le disposer sur la scène du crime. On sait aujourd’hui que ce couteau ne porte pas les empreintes digitales de Zak. La plupart des pièces qui devraient figurer au dossier sont manquantes, aucune photographie des lieux n’a été prise et aucun prélèvement n’y a été effectué après les faits, les services de police refusent ostensiblement d’exécuter les ordres du juge d’instruction, les vidéos de sécurité des boutiques alentour n’ont pas encore été saisies. On se demande si l’intention du policier n’était pas de déposer le couteau dans la flaque de sang qui couvrait cette partie de l’asphalte de façon que l’arme comporte un échantillon d’ADN facilement identifiable.

Quelques jours après l’enterrement, la famille de Zak, ses parents, son frère, plusieurs de ses ami.e.s lancent dans la presse des appels à témoins.

Au moment où j’écris ces lignes (4 octobre), une nouvelle vidéo prise depuis la boulangerie faisant face à la bijouterie montre Zak, quelques minutes avant sa mort, faisant irruption sur le trottoir de la rue Gládstonos et demandant de l’aide à des passants. Il s’apprête à entrer dans la boulangerie mais un homme en chemisette jaune lui barre le passage ; Zak se détourne et se dirige vers la bijouterie. Depuis la fenêtre d’un bureau, une femme l’a aperçu, quelques secondes plus tôt, criant « à l’aide » à l’angle de la rue Patissíon, s’approcher de deux jeunes femmes pour leur demander secours puis s’engouffrer, après le départ précipité de celles-ci, dans la rue où il sera tué quelques instants plus tard.

Zak est aussi Zackie, ou Zackie Oh !, et a un drag show hebdomadaire dans une petite boîte athénienne.

Zak porte aussi un nom de femme, connaît sa peur et redoute plus que tout ceux qui ne la connaissent pas.

Zak est un activiste qui défend les droits des séropositifs et de la communauté LGBTQI. Sur les médias sociaux ou dans la revue Antivirus, des centaines de jeunes lisent ses textes, toujours drôles, dans lesquels il a l’habitude de se moquer de lui-même.

Zak est un artiste queer qui a joué au KET, notre espace, et que je croise parfois rue Kýprou, car nous habitons le même quartier. Un jeune homme aux yeux lumineux, aux cheveux courts et bouclés et aux longs cils qui promène son chien le jour où je le présente à ma fille de cinq ans — Elèni lève les yeux vers lui puis regarde le chien et sourit. Je l’aperçois, un autre jour, qui descend la rue en dansant, des écouteurs sur les oreilles, lui fais signe ; sans m’entendre, il continue à descendre la rue d’un pas léger, les paupières baissées, en dansant pour lui seul.

Une amie se souvient de la mobilisation qui a permis de retrouver son chien, Snoopys, une boule de poils blancs, il y a quelques mois. Après l’assassinat, Snoopys est confié à son frère, qui possède lui aussi un chien. Snoopys reprend peu à peu du poil de la bête — les premiers jours, écrit M., il ne mangeait pas et paraissait totalement perdu.

Dans un reportage récent, on voit Zak traverser notre quartier, qui compte sans doute le plus grand nombre d’immigrés d’Athènes, et confier qu’il n’a jamais été agressé par des étrangers, « toujours par des Grecs », mais qu’il s’en est heureusement toujours tiré à bon compte — « parce que je cours vite », dit-il en souriant après un silence, « et parce que je peux pousser des cris très stridents quand j’ai peur. »

Il y a de la gourmandise dans son sourire et de la peur dans ses yeux — une trace instinctive de la peur qui lui reste des innombrables fois où il s’est fait moquer, houspiller, menacer, insulter dans la rue — la peur que cela dérape, que les choses aillent brusquement trop loin.

Il sait parfaitement où il est, dans quel monde et quelle société il vit, les réactions que peut entraîner la simple présence d’un garçon manifestement gay et, bien pire, d’un homme perruqué et habillé en femme, même de la part de très jeunes : lors d’une interview qui est réalisée sur la promenade de Phokíonos, il est interrompu par une bande de gamins qui l’apostrophent et finissent par exiger de lui qu’il leur dise s’il est un homme ou une femme. La caméra filme ses yeux. Pendant que les garçons le houspillent, Zak reste silencieux et allume une cigarette. La lassitude et la douleur affleurent, même — surtout — face à des gamins. Une petite fille prend son parti, se détache du groupe de garçons qui s’éloignent et entame la conversation. Zak retrouve peu à peu son calme et recommence à respirer en discutant avec la petite fille.

Dans un autre reportage, on le voit passer progressivement de Zak à Zackie, se maquiller devant la glace, mettre sa perruque — celle qu’il portait lors du show qu’il a donné dans notre espace avec d’autres drag-queens lors du festival « Sound Acts » que nous avons accueilli en 2016.

Pendant la marche de mercredi dernier, D. brandit une de ses chaussures argentées comme un drapeau de ralliement. Nous marchons tou.te.s derrière la chaussure de Zackie Oh !, qui me fait penser au soulier perdu de Cendrillon.

Cendrillon et les vampires.

Sur une photo publiée sur Facebook, les chaussures de Zak (des baskets noires et blanches) et les chaussures de Zackie (des escarpins à talons hauts, argentés) sont délacées et déposées à l’entrée de son appartement de part et d’autre de la même chaise, en vis-à-vis, séparées par un vide, comme si elles discutaient de son absence.

Au moment où les brancardiers ont emporté son corps, une de ces baskets noires est restée au sol à côté de la flaque de sang. Quelques jours plus tard, on ne sait toujours pas pourquoi un des policiers la lui a ôté.

« Pas comme ça, pas maintenant » : les derniers mots de Ce que j’appelle oubli, que nous avions présenté il y a trois ans dans notre espace, en grec, me reviennent en mémoire, ces jours où nous découvrons ce qui s’est passé, strate par strate, une couche d’horreur après l’autre : « όχι έτσι, όχι τώρα ».

A. raconte à F. que lors de l’enterrement, qui a eu lieu à Itèa, les ami.e.s de la victime étaient en drag dans l’église de province où la cérémonie s’est tenue. Il raconte les paillettes dorées projetées dans l’air au-dessus du cercueil, le strass brillant sur les visages des grands-mères, les regards gênés.

C. dit : nous étions nous aussi, autrement, sa famille.

K. s’étonne de la naïveté de ceux et celles qui s’attendaient à ce que la famille respecte son athéisme, son refus des usages orthodoxes — la famille a toujours en Grèce le dernier mot et l’Église parvient presque toujours à récupérer les corps. J. fait ressurgir un texte dans lequel Zak évoque l’enterrement religieux d’un ami, qui aurait voulu être incinéré et n’aurait jamais accepté d’être enterré par les popes. F. est certain que Zak aurait aimé porter pour l’occasion une robe de mariée. L’image des drag-queens entonnant Madonna sous la nef et saupoudrant le cercueil de paillettes nous console. La communauté queer cherche et trouve sa façon à elle de lui faire ses adieux.

Les gens s’enlacent en se retrouvant devant le bâtiment 9 du tribunal d’Athènes ou sur la place Omónoia, avant le départ de la marche. Le long de l’avenue Stadíou, plusieurs avancent en silence, en pleurant ou en se tenant enlacés — un genre de procession funéraire et politique, entre rires et larmes.

Sur le sol de la rue Gládstonos, près d’une bouche à égout, des bougies allumées et des fleurs marquent l’endroit où il s’est effondré après qu’un membre des services d’urgence lui ait bandé la tête, qu’il se soit relevé et ait fait quelques pas en titubant avant de s’étaler
contre les tables. (Hier, lors de la marche du 2 octobre, ces tables de plastique blanc étaient toujours là, les cafés ouverts.)

Sur le rideau de la bijouterie à présent abaissé, T. L. a scotché un texte à sa mémoire : « Ils ont peur de nous et nous tuent / peur du ciel que nous regardons / peur du muret / où nous nous appuyons / peur des paroles que nous prononçons / tous les deux, à voix basse, / peur des paroles que nous prononcerons demain tou.te.s ensemble / peur de nous, Zak, mon amour ; / et s’ils nous tuent / ils nous craignent encore plus / morts. » Odyssèas publie un poème écrit pour lui un an auparavant : « Je suis tout ce que vous redoutez / tout ce que vous combattez / (…) tout ce dont vous avez peur / de tomber amoureux. »

Le sens premier des initiales R.I.P., Rest In Peace, se modifie. Dans son texte sur l’enterrement, F. dit : Rest In Power. L. emploie l’expression Rest In Pride. C’est peut-être l’expression qui lui va le mieux. Le mot power résonne à propos de lui comme dans ce passage d’Une Saison en Enfer  : « Faiblesse ou force : te voilà, c’est la force. » La force de Zak vient de sa fragilité, une fragilité qu’il assume si fort qu’elle est perçue comme une menace par ces « gens normaux » dont la normalité apparaît maintenant sous un jour monstrueux. Il est fort, il est faible, il est lui-même, multiple, il ne fait pas semblant.

Les journalistes l’appellent à présent « la victime ». Dèspina se souvient de lui embrassant un garçon lors d’un happening en faveur de la reconnaissance des couples homosexuels ; sur la photographie, Zak enlace son partenaire d’une main et tient de l’autre l’extrémité d’une pancarte sur laquelle est écrit : « La provocation c’est l’homophobie, pas les baisers. » À la droite de l’image, un couple de jeunes femmes s’embrasse en prenant la même pose, forcément théâtrale, tout en tenant l’autre extrémité du panneau. « Faisons attention les unes aux autres », dit H. À table, ma fille me jette un regard en coin mais semble se retenir de me demander pourquoi j’ai soudain les larmes aux yeux. Je me plonge dans la lecture des posts, sur Twitter ou Facebook. J’ai le sentiment que nous sommes revenus au tout début du cycle, à cette année 2008 marquée par des incendies criminels puis par l’assassinat d’A., jeune anarchiste de 15 ans, que les épisodes de violence nue qui ont marqué le début de la crise recommencent, mais la répétition du même a quelque chose de plus tragique, de plus désespéré qu’à l’époque. L. nous enjoint de parler de Zak : « Parlez de Zak, n’arrêtez pas de parler, parlez de la danse et des larmes que vous avez partagées, parlez de ses beaux cheveux, de sa taille, de son amour pour Madonna, parlez de Zak jusqu’à ce que votre langue se dessèche, parlez sans cesse, avec des murmures ou des cris, parlez du Zak que nous connaissons, parlez de la société grecque qui a assassiné Zak, parlez de ses assassins, parlez. » G. ne parvient pas à parler de lui au passé et écrit en utilisant les deux temps, il est, il était, comme s’il se refusait encore à faire la coupure, comme si la mort était un exil dans le temps. L’exil d’un(e) seul(e). G., encore, écrit qu’il vient de passer deux jours les yeux au plafond, à pleurer. Il est dévasté, comme tou.te.s les ami.e.s de la communauté queer, mais fait pourtant partie de celles et ceux qui organisent la première marche, une manifestation qui se termine à Omónoia sur le Like a prayer de Madonna — je ne me doutais pas qu’on pouvait chanter Madonna en dressant le poing au ciel.

Pour certains anarchistes présents lors de l’AG qui suit cette première marche, les membres de la communauté LGBTQI sont des sujets « apolitiques ». Certains — les plus virils et les plus forts en gueule, les plus cons mais ceux, aussi, qui savent monopoliser la parole et imposer le silence aux autres — se proposent de leur donner des cours de marxisme, de catéchisme révolutionnaire. G. arrache brusquement son bonnet et découvre son crâne avant de déclarer, debout face à l’amphithéâtre, que les travestis, les gays, les lesbiennes, les trans vivent l’anarchie au jour le jour, en Grèce. L’assemblée coule à pic, la rencontre entre les deux mondes se résume presque à une fin de non-recevoir. Le slogan opposé aux gamins qui voulaient défoncer sur le passage du cortège quelques distributeurs automatiques — dehors, les machos — ne passe pas, le fait que certains anarchistes utilisent les termes de « putain », de « pédé » et de « tapioles » comme des insultes non plus. M. se souvient de ce moment où un jeune homme a accusé les trans de « faire du sentiment » — « comme si nous n’étions pas en deuil et comme si les sentiments n’étaient pas politiques ». « On ne change rien sans colère, sans larmes, sans rires, sans joie, sans humour, sans peur, ma chérie », rétorque F., une transsexuelle aux cheveux blonds assise sur l’estrade du bas, qui finit par tout envoyer bouler et crie sans respecter la procédure des tours de parole.

L. se souvient de la fouille au corps à laquelle elle a été soumise après avoir été dévêtue par une employée de police au septième étage de l’immeuble de GADA, le siège de la police d’Athènes, des « flics de bureaux », de la transphobie et du racisme qu’ils exsudaient par toutes leurs pores, du 6 décembre 2008, du 13 septembre 2013, de l’été 2012, « quand ils ont arrêté Tassos ».

K. poste une vidéo prise à Brooklyn montrant un gamin noir qui, après avoir absorbé du cannabis synthétique, cette drogue appelée aussi Spice, ou K2, et qui est réputée provoquer hallucinations, crises d’angoisse, épisodes psychotiques, est pris de spasmes ultra-violents qui le projettent au bas des marches d’un escalier puis le tournent et le retournent comme une crête sur le trottoir. Le gamin hurle, paraît être en train d’étouffer, se lève, ne contrôle plus ses jambes qu’il précipite contre le mur. Une femme ramasse et garde à la main son portefeuille tombé à terre puis s’esquive, trois hommes filment la scène sur leurs portables tout en apostrophant le jeune homme en détresse, un homme en costume l’évite, un autre lui presse la cheville pour l’immobiliser. Le gamin porte dans le dos un cartable d’écolier bleu ciel, son cartable lui aussi semble être pris de spasmes.

On pleure puis on a envie de vomir. La colère a sur les larmes et la nausée l’avantage de nous projeter en avant. La deuxième marche est reportée de samedi à mardi en raison du mauvais temps. Je passe les jours qui suivent dans l’attente du mardi comme si la manifestation était le seul lieu où déposer et partager la peine — les lectures et les débats sur les réseaux sociaux finissent par donner mal au crâne et laissent un goût amer de temps mort, d’heures et de minutes perdues. La mort de Zak a eu lieu il y a six jours, sept jours, huit jours ; nous nous éloignons chaque jour du jour où il est mort, ce jour qui aura été le dernier pour lui, mais pas pour nous, et semble un point qui s’amenuise sur l’océan. Nous l’abandonnons loin derrière comme sur une île déserte, nous continuons à avancer, le temps nous emporte, plus lui.

« Je suis terrifiée par le fascisme qui monte, écrit C., sa vitesse. » « Je suis terrifiée par la pensée que nous ne saurons peut-être jamais ce qui t’est arrivé. » « Je suis terrifiée à la pensée que nous nous étions promis de nous retrouver bientôt pour que tu me maquilles et que nous avons fini par nous retrouver à tes obsèques. » « Je suis terrifiée à l’idée que tu t’es retrouvé seul, entièrement seul face au démon que tu redoutais tant, la haine. » « Je suis terrifiée quand je pense, je n’arrête pas d’y penser, que tu as laissé échapper ton dernier souffle entouré d’assassins qui voyaient en toi quelqu’un de dangereux ; dangereux, toi !? » « Je suis terrifiée par leur haine mais me souviens que tu arrivais à convertir tout ce qui te terrorisait en motif d’action. Et je te promets que tes assassins seront condamnés. Je t’en donne ma parole, notre parole à tou.te.s. La société que tu voulais, c’est nous qui allons la construire, même si c’est la dernière des choses que nous ferons jamais. »

« Le fait que Zak soit probablement entré pour y chercher refuge dans le lieu qui devait le conduire à la mort est à lui seul une raison de pleurer jusqu’à la fin de ses jours », écrit V.

« Votre normalité pue le sang » dit un pochoir qui apparaît sur les murs de la ville au surlendemain de sa mort.

Sur la page d’un groupe d’entraide de la communauté LGBTQI, W. envoie un SOS : il recherche d’urgence un.e colocataire disposant de son propre espace jusqu’en septembre prochain, pas trop loin du métro. Son budget est de 150 euros par mois, tout compris, au moins jusqu’à ce qu’il trouve un second job. Il a fait des études supérieures dans le domaine de la pétrochimie et pense qu’il ne lui sera pas trop difficile de tenir un plateau et de servir des clients « pas forcément aimables ». L., qui se sent terriblement isolé et souffre de crises de panique depuis la mort de Zak, lui répond aussitôt.

La mort de Zak fait remonter à la surface toutes les peurs de la communauté LGBTQI, peurs qui atteignent pour certain.e.s un point de paroxysme insupportable, et toutes les haines de la société grecque. Les commentaires publiés en ligne sous les articles de presse, les posts Facebook ou les tweets sont quelquefois presque aussi violents que les images de l’assassinat. « Il frétille encore », remarque un lecteur en-dessous d’un article décrivant le lynchage. À la veille de la manifestation du 2, le parti Aube Dorée organise une manifestation en motos à travers la ville, une parade. Un homosexuel de 17 ans est pendu en Iran après avoir été accusé d’avoir eu une relation avec un jeune homme de son âge. Tara Fares, ex-Miss Irak et blogueuse influente, est abattue dans une rue de Bagdad.

S. publie une photo de Zak sur laquelle il porte un beau tee-shirt bleu avec les mots : « Protéger et survivre. »

« The Trick Is To Keep Breathing. » C’est un titre de chanson — la dernière chanson qu’il poste sur Twitter à la veille de sa mort. « Le truc, dit la chanson, c’est de continuer à respirer. »

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Dimitris Alexakis

Athènes, jeudi 4 octobre 2018

https://www.facebook.com/justice4ZakZackie/

Soutenons les VioMe : le collectif lance la commande groupée

Solidarité concrète avec les travailleurs
de l’usine VIOME occupée et autogérée
à Thessalonique en Grèce

Après que leur usine ait été mise en faillite et abandonnée par les employeurs, les salariés depuis maintenant 5 ans l’ont reprise en coopérative ouvrière.

Ils fabriquent des produits d’entretien ménager écologiques qu’ils distribuent de manière militante. Ils sont menacés d’expulsion par la justice grecque. Ils en appellent à la solidarité internationale.

Tout comme en 2016 et en 2017, afin de les soutenir, le collectif de Grenoble vous propose de passer une commande groupée de leurs produits.

Vous trouverez :

– le catalogue et les prix (TTC)  :  Catalogue et tarif VIOME 2019

– le bon de commande avec tous les renseignements utiles : Bon-de-commande-Viome-2018

Attention : la date limite de réception des commandes est fixée au vendredi 16 novembre 2018.

Contribuons par nos achats à soutenir cette lutte exemplaire !

A noter la soirée qui sera consacrée au mode de gestion en scop et qui sera l’occasion de faire un point d’actualité sur les VioMe et passer les dernières commandes

La SCOP : de Thessalonique à Grenoble, une autre manière de gérer une entreprise

le 7 novembre 2018 à 20h à la Maison des associations de Grenoble

 

Le virage répressif du gouvernement Syriza

Grèce : le virage répressif du gouvernement Syriza par Stathis Kouvélakis et Costas Lapavitsas

Certain.e.s dans les rangs de la gauche européenne persistent à croire que la situation en Grèce va en s’améliorant, et que le gouvernement Syriza reste une force de gauche qui protège les intérêts des travailleurs et des défavorisés, dans des conditions très difficiles. Parmi eux, Iñigo Errejon, l’un des principaux dirigeants de Podemos, qui a déclaré dans un récent entretien que « compte tenu de ces contraintes, le bilan [de Tsipras] est plutôt satisfaisant »[1]. Pour ceux qui partagent ce point de vue, le tour que prennent les événements apparaîtra comme une mauvaise surprise.

La réalité est que, depuis leur capitulation en juillet 2015 à la Troïka des créanciers de la Grèce (UE, Banque centrale européenne, FMI), Tsipras et son gouvernement ont appliqué de façon inflexible les mêmes politiques néolibérales de choc que tous les gouvernements grecs qui se sont succédé depuis 2010, date du premier Mémorandum signé avec la Troïka. Le gouvernement Syriza a ainsi procédé à une réduction drastique des dépenses publiques, à la poursuite de la déréglementation et à une vague sans précédent de privatisations[2]. Les salaires stagnent au niveau atteint après plusieurs années de chute drastique, les retraites et des aides sociales de nouveau amputées. L’investissement public (et privé) s’est effondré, tandis que les impôts indirects et directs ont atteint des niveaux sans précédent, frappant impitoyablement les ménages à revenus faibles et moyens.

La seule différence avec les prédécesseurs est que Tsipras et son parti ont été élus en janvier 2015 précisément dans le but de renverser ces politiques. Leur revirement de l’été 2015 – survenu quelques jours seulement après un référendum au cours duquel 61% des électeurs ont rejeté l’imposition d’un plan d’austérité – fût un choc traumatique pour la société grecque. Au cours des trois années qui ont suivi, le cynisme de Syriza a entraîné une profonde démoralisation qui imprègne tous les domaines de la vie publique. La passivité et le découragement ont été les principaux facteurs qui ont permis la mise en œuvre de nouvelles mesures d’austérité sans rencontrer d’opposition majeure.

Tsipras a de la sorte rendu d’excellents services à la Troïka, qui lui valent de chaleureux compliments de la part des Moscovici, Juncker et de leurs semblables[3]. Mais la poursuite de telles politiques, qui écrasent la majorité de la population, est impossible sans recourir à la répression et à la mise en place un cadre coercitif. Les coupes dans les services publics, les baisses de pensions et dépenses sociales, les augmentations d’impôts et la surexploitation des salariés ne peuvent s’appliquer sans mettre au pas les oppositions et intimider celles et ceux qui refusent de se soumettre.

L’expérience de l’Europe occidentale, des États-Unis et de plusieurs autres pays au cours des quatre dernières décennies confirme amplement ce constat. De 2010 à 2015, lorsque les gouvernements successifs du PASOK et de la droite mettaient en œuvre les plans d’austérité, la Grèce a connu une avalanche de mesures répressives. Lentement, sûrement – et inexorablement – le gouvernement d’Alexis Tsipras s’est engagé dans la même voie.

Ce qui a accéléré cette évolution au cours des derniers mois renvoie aux difficultés auxquelles sont confrontées les banques grecques. Si le slogan « aucune maison entre les mains des banques » était naguère scandé dans les meetings de Syriza, c’est désormais un gouvernement Syriza qui réprime celles et ceux qui tentent d’empêcher les ventes aux enchères des logements.

Serrer les vis

Pour comprendre l’importance politique croissante de la lutte contre les saisies immobilières, il faut se pencher sur la situation critique des banques et ses répercussions sur le gouvernement et la société grecque. Car c’est justement pour éviter un nouveau cycle de déstabilisation des banques que le gouvernement recourt à des méthodes de plus en plus répressives.

Suite à la crise du début des années 2010, le secteur bancaire grec est passé entre les mains de quatre banques dites « systémiques », qui contrôlent plus de 90% des dépôts et des actifs. Pour éviter leur propre faillite et se prémunir d’une éventuelle nationalisation, ces banques sont devenues les plus fervents défenseurs des plans d’austérité. Elles ont utilisé leur énorme pouvoir économique et social pour contraindre les gouvernements grecs successifs, y compris celui de Syriza, à se conformer aux exigences de la Troïka.

Depuis 2010, deux recapitalisations majeures des banques ont été engagées, la dernière sous un gouvernement Syriza. Le coût total a dépassé les 45 milliards d’euros. Il a été entièrement financé par des emprunts publics, remboursés par les contribuables grecs. Pourtant, en dépit de ce monstrueux fardeau imposé à la population, les banques grecques détiennent actuellement le record européen des « créances douteuses » et ont de fait cessé de soutenir l’activité économique. Les dites créances comprennent des « prêts non performants » (NPL), qui enregistrent un retard de remboursement de plus de 90 jours, mais aussi des « fonds non performants » (NPE), une catégorie plus large qui inclut les prêts dont on pense qu’ils ne seront pas intégralement remboursés, même si aucun retard formel n’a été enregistré[4].

La réduction de l’exposition des banques grecques aux NPE et aux NPL est depuis des années une priorité absolue pour la Banque centrale européenne. Depuis 2016, le gouvernement Tsipras a docilement obéi à ses injonctions en facilitant une vague de saisies de propriétés, y compris de logements principaux, ainsi que la vente à des fonds vautours de « packages » de créances douteuses à des prix bradés. Les ventes aux enchères de logements sont à cet égard à cet égard d’une importance stratégique.

L’incapacité des banques à résoudre ce problème n’a rien de surprenant, elle découle du dispositif mis en place par le gouvernement de Tsipras. En résumé, les banques grecques devaient progressivement assainir leurs bilans du poids des créances douteuses par le biais de ventes aux enchères et de pratiques de recouvrement des prêts plus rigoureuses. Ce processus prendra certainement plusieurs années. Dans le même temps, les banques étaient censées soutenir l’activité économique en fournissant de nouveaux crédits. Toutefois, comme c’était entièrement prévisible, les banques ont eu tendance à réduire l’octroi de nouveaux prêts tout en essayant de nettoyer leur bilan des créances douteuses. Cette limitation drastique du crédit a en fait compromis la reprise, aggravant le problème des créances irrécouvrables pour l’économie. La baisse globale du crédit signifie également que les créances douteuses représentent un ratio plus élevé du total. Il s’agit d’un exemple parfait de l’absurdité des plans de « sauvetage » mis en œuvre par le gouvernement Syriza.

L’échec des banques grecques à réduire le poids des « créances douteuses » a entraîné un effondrement de la valeur de leurs actions à la bourse d’Athènes depuis le début de l’été 2018, effondrement qui s’est accéléré au cours du dernier mois. En réalité, l’ensemble du secteur bancaire grec a été considérablement dévalué depuis la signature du plan de « sauvetage » de Tsipras. Des rumeurs circulent sur la nécessité d’une nouvelle recapitalisation, ou de formes de prise en charge des créances douteuses par l’Etat[5]. Si une telle perspective se concrétisait, ce serait un désastre complet pour le gouvernement, qui doit faire face à de multiples échéances électorales en 2019.

L’accélération du programme de liquidation des créances douteuses est ainsi devenue l’une des priorités de la Troïka et de leurs dociles serviteurs dans l’actuel gouvernement. Comme le problème semble être plus aigu pour les crédits immobiliers et les crédits à la consommation, des objectifs extrêmement ambitieux, et sans doute irréalistes, ont été fixés en matière de saisies et de vente aux enchères : 8 à 10 000 logements pour 2018, chiffre porté à 50 000 pour 2019.

Cibler les actions de protestation

Depuis la capitulation de l’été 2015, la question des saisies et des ventes aux enchères est devenue l’un des problèmes les plus épineux pour Tsipras et son parti. L’accélération du processus sous la pression des banques et de la Troïka a conduit à un affrontement majeur entre le gouvernement et un mouvement dynamique qui s’oppose aux ventes aux saisies et aux ventes enchères de logement. Ce mouvement a pris un nouvel élan après la relance des ventes aux enchères à l’automne 2016. La mobilisation continue de groupes d’activistes déterminés dans les salles d’audience des tribunaux a réussi à annuler des centaines de ventes, ce qui a considérablement ralenti l’ensemble des procédures[6]. C’est sans doute l’une des raisons pour lesquelles les banques n’ont pas réussi à atteindre leurs objectifs.

La réaction du gouvernement, obtempérant aux instructions de la Troïka, a consisté à transférer à partir l’été 2017 la procédure de vente aux enchères vers une plate-forme électronique, activée par des notaires à l’intérieur de leur cabinet, plutôt que d’organiser les ventes dans les tribunaux. Cela a certainement rendu les actions de protestation plus difficiles à organiser. De nouvelles dispositions législatives, votées en décembres 2017, ont créé un délit spécifique qui prévoit des peines d’emprisonnement de trois à six mois pour celles et ceux qui tentent d’entraver le processus de vente aux enchères[7]. Les actions se sont toutefois poursuivies, même si leur ampleur a été affectée, empêchant de nombreuses ventes aux enchères et rendant les notaires moins enclins à prêter leur concours[8].

Au cours de cette période, les affrontements avec la police devant les bureaux des notaires se sont multipliés. Des militants filmés et identifiés pendant les actions ont été systématiquement inculpés. Depuis le début de l’année, des dizaines de militants à travers le pays font face à des poursuites judiciaires. Parmi eux, citons Spiros Milios, conseiller municipal d’Ambelokipi-Menemeni, dans la région de Thessalonique, et militant d’Antarsya, la coalition d’organisation d’extrême-gauche. Dans la petite ville de Volos, pas moins de 20 militants sont le coup de poursuite, de même que 15 autres à Argos et Nauplie[9]. Le procès de trois militants anti-saisies a débuté à Athènes le 21 septembre.

Les poursuites à l’encontre des activistes anti-saisies ne sont que l’exemple le plus patent des pratiques autoritaires dont fait preuve le gouvernement de Tsipras. La répression a également touché les militants mobilisés contre le projet minier d’exploitation à ciel ouvert par le géant canadien Eldorado Gold à Skouries, dans le nord de la Grèce. Plus généralement, le gouvernement a eu recours à la force pour réprimer les manifestations contre sa politique, en particulier lorsqu’elles paraissent susceptibles de s’étendre. L’utilisation de la police anti-émeute contre les retraités n’en est que l’exemple le plus flagrant. Une tendance de fond a commencé ainsi à se dessiner : pour faire face aux réactions que suscite sa politique, le gouvernement s’appuie sur les mécanismes répressifs de « l’État profond ».

Les poursuites à l’encontre de Panagiotis Lafazanis

Un seuil symbolique dans cette escalade répressive a été franchi le 26 septembre, quand Panagiotis Lafazanis, une figure respectée de la gauche radicale, a reçu une convocation pour répondre à des accusations concernant sa participation à des actions de protestation hebdomadaires contre les saisies et les ventes aux enchères[10]. Lafazanis était ministre de l’énergie au sein du premier gouvernement Syriza (janvier à juillet 2015) et la figure de proue de la « Plate-forme de gauche», qui regroupait à l’époque la majeure partie de l’aile gauche de Syriza. Il est maintenant secrétaire national d’Unité Populaire, un front politique créé l’été 2015, principalement par les forces de la Plateforme de gauche, qui ont quitté Syriza et ont été rejointes par d’autres organisations de la gauche radicale.

C’est la première fois depuis la chute de la dictature (1974) – au cours de laquelle Lafazanis a été persécuté pour ses activités clandestines au sein du mouvement étudiant et de l’organisation de jeunesse du parti communiste – qu’un dirigeant d’un parti de gauche fait l’objet de poursuites pour son activité politique. Les chefs d’accusation à son encontre concernent des infractions présumées à pas moins de 15 articles du code pénal, sanctionnées par des peines de prison pouvant aller jusqu’à deux ans. S’il est reconnu coupable de toutes les accusations, la peine pourrait aller jusqu’à neuf ans.

Ce qui est également remarquable, c’est que la procédure émane non du procureur mais du « Département pour la protection de l’État et du régime démocratique », une branche spéciale des services de sécurité censée investiguer les activités liées au terrorisme et qui menacent la démocratie. Ce département a été créé en 2000, par les gouvernements « modernistes » du PASOK, alors que la Grèce s’apprêtait à rejoindre l’Union monétaire. Il a été modernisé en 2011, suite à la mise en place des plans d’austérité, et transformé en service de surveillance des actions de protestation. Des dispositions législatives adoptées en février sous l’impulsion du gouvernement Syriza ont encore élargi son éventail d’activités. Il est à noter que, depuis sa création, le département n’a développé aucune activité à l’encontre des néonazis d’Aube Dorée, ni d’aucune autre organisation d’extrême droite ou terroriste.

Lafazanis n’est pas le seul militant à être ciblé par les services de sécurité. Quatre autres activistes, parmi lesquels un membre d’Unité Populaires et deux personnalités connues du réseau « Je ne paie pas », Leonidas et Elias Papadopoulos, ont également été convoqués pour répondre à une longue liste de chefs d’accusation. La nature des pièces incluses dans son dossier ont permis de mettre en lumière le fait que Lafazanis était sous surveillance depuis des mois par une équipe de policiers déguisés en journalistes filmant des actions devant les bureaux de notaires. Ce matériel a été complété par des photos et des vidéos que les services de sécurité ont demandé aux chaînes de télévision. Des publications Facebook ont également été utilisées pour identifier ces militants lors de diverses actions de protestation.

Quelles suites ?

La vague de poursuites judiciaires, et en particulier celles l’encontre de Lafazanis, a forcé les médias grecs à parler de la répression. Elle a également provoqué certaines réactions dans les milieux politiques, notamment une question au parlement adressée au ministre de la Justice par 43 députés de Syriza. Cependant, la position officielle du gouvernement est que cette question relève entièrement du pouvoir judiciaire et de la police et qu’il n’est en rien concerné.

Il n’en reste pas moins que l’initiative des poursuites n’a pas été prise par la justice mais par un service appartenant à l’« État profond », à savoir le « Département de la protection de l’État et du régime démocratique ». Or ce département est placé sous l’autorité du ministre de l’ordre public. Il existe donc une implication et une complicité de la part du gouvernement, qui renvoie aux mesures prévues par le troisième Mémorandum signé en juillet 2015 et à la crise actuelle des banques grecques.

La mise en œuvre des plans d’austérité et des politiques néolibérales exige la répression et le gouvernement Syriza ne saurait faire exception à cette règle. La démocratie en Grèce est déjà en lambeaux et la situation risque de s’aggraver dans les mois à venir. A l’approche des élections, les problèmes des banques vont sans doute occuper une place centrale. Le désastre économique et social causé par la capitulation de Tsipras est devenu évident pour de larges couches de l’électorat et le dégoût se généralise dans la population. Un gouvernement qui a déjà vendu son âme en se faisant l’exécutant de la Troïka n’hésitera pas à faire monter d’un cran la répression à l’encontre de tou.te.s celles et ceux qui s’opposent à sa politique. La solidarité internationale est indispensable pour mettre fin à cette évolution extrêmement préoccupante de la situation en Grèce. C’est une question de défense de la démocratie.

Cet article a été mis en ligne le 6 octobre 2018 par Jacobin magazine[11]

[1] lemonde.fr/europe/article/2018/03/22/europe-les-courants-populistes-ont-cesse-d-etre-des-exceptions-pour-devenir-la-regle_5274743_3214.html

[2] jacobinmag.com/2018/08/greece–tsipras-memoranda-austerity-odyssey

[3] lemonde.fr/idees/article/2018/06/22/le-courage-des-grecs-et-de-tsipras_5319456_3232.html et euractiv.fr/section/affaires-publiques/news/juncker-praises-tsipras-following-weber-jibe/

[4] bankofgreece.gr/BogEkdoseis/Sept18_Report_Operational_Targets_for_NPEs_EN_Final.pdf

[5] reuters.com/article/us-piraeusbank-capital-ceo-exclusive/piraeus-bank-says-debt-plan-on-track-as-shares-drop-30-percent-idUSKCN1MD0TZ

[6] theguardian.com/world/2017/mar/11/greek-activists-target-sales-of-homes-seized-over-bad-debts

[7] thepressproject.gr/article/121452/Perase-i-tropologia-gia-tous-pleistiriasmous

[8] ft.com/content/e7a5732c-3db0-11e8-b7e0-52972418fec4

[9] epitropi3den.blogspot.com/2018/09/blog-post_24.html

[10] ekathimerini.com/232997/article/ekathimerini/news/ex-minister-panayiotis-lafazanis-denounces-government-persecution

[11] jacobinmag.com/2018/10/syriza-repression-foreclosure-banks-tsipras

A propos de l’auteur

Stathis Kouvelakis enseigne la théorie politique au King’s College de Londres. Il a fait partie du comité central de Syriza.

Costas Lapavitsas est professeur d’économie à SOAS et ancien membre du Parlement grec.

Lafazanis d’ Unité Populaire, « persécuté par la Junte des colonels et maintenant par SYRIZA »

Lafazanis d’ Unité Populaire, « persécuté par la Junte des colonels et maintenant par SYRIZA » 

Lafazanis : « les policiers m’ont suivi, enregistré et filmé ». Une persécution marquant une profonde « une entorse à la démocratie« 

Sous le titre « J’ai été persécuté par la Junte et maintenant par SYRIZA », Yorgos Katsiyannis présente dans « Parapolitika » de samedi 29 septembre 2018 un reportage sur la persécution dont Panayotis Lafazanis fait l’objet et l’entretien qu’il a eu avec lui.

Panayotis Lafazanis a révélé à Yorgos Katsiyannis que les services de sécurité suivaient et enregistraient toutes les manifestations de l’Unité populaire (LaE), particulièrement celles qui s’opposaient aux enchères, et que, d’abord et avant tout, ils suivaient, enregistraient et filmaient systématiquement Panayotis Lafazanis lui-même, non seulement dans le but de connaître ses mouvements, mais aussi de « fonder » des accusations à charge.

Les méthodes de persécution utilisées par les services de sécurité sur mandat du gouvernement reproduisent les pires années de la Grèce anticommuniste d’après la guerre civile si ce n’est sous une forme encore plus dangereuse, dans la mesure où les services de sécurité sont à présent équipés de moyens technologiques plus modernes et bien plus efficaces en matière de contrôle et de surveillance.

Les signalements de Panayotis Lafazanis sont étayés par les dossiers qui ont été constitués contre les militants et contre Panayotis Lafazanis lui-même, des dossiers qui abondent en montages d’enregistrements audio, témoignages d’écoutes et d’enregistrements vidéo, pour lesquels on estime qu’ils ont été réalisés avec l’autorisation du procureur !

La démocratie qui change le « NON » en « OUI », la démocratie des CRS, des matraques, de la guerre chimique, des enregistrements audios et vidéos par les services de renseignement et de la sécurité des partis politiques légitimes et de leurs dirigeants et responsables légitimes est chez nous et donne à la Grèce des apparences de démocratie à la turque.

Une démocratie criblée de trous, que personne ne remet en question du fait du système, parce que tout simplement, loin de gêner la « germano-américanocratie » dans le pays, elle la protège.

Ou plutôt, c’est ce qu’ils croient !

Mikis Theodorakis et le résistant Manolis Glezos , tous les deux poursuivis et emprisonnés par l’ état grec d’ après guerre civile et de la dictature des colonels ont exprimés leur soutien et solidarité envers P. Lafazanis et ont accusé le gouvernement Tsipas de « conduire le pays vers un chemin antidémocratique digne des époques les plus sombres» .

Article signé de Panayotis Lafazanis, Secrétaire du Conseil Politique de l’Unité Populaire (LaE), dans le journal « Ta Nea » de samedi 29 septembre 2018

Le défunt Konstantínos Mitsotákis avait dit que le policier c’est l’État. Il semble que le gouvernement Tsipras-Kamménos a été mis en place pour mettre en pratique ce célèbre adage dans toutes ses déclinaisons. Ce n’est pas seulement le policier qui est l’État, mais l’État lui-même qui devient « policier ». Le gouvernement Tsipras ne peut rien sans ses CRS. Il gouverne au sens littéral du terme avec ses patrouilles bardées de fer, les matraques et la guerre chimique.

La démocratie, particulièrement au cours des années de mémorandums, a cessé de fonctionner dans ce pays. La volonté du peuple et le vote du peuple n’ont quasiment aucune importance. La loi et la politique dans ce protectorat occupé sont les décisions des créanciers. La transformation consensuelle du « NON » au référendum en « OUI » humiliant a porté le coup final au cœur de la démocratie civile.

À présent, avec ces poursuites dont je fais l’objet, sur la base d’un demi-code pénal, voire de lois sur les armes, munitions, artifices, etc., ce n’est pas uniquement ma personne qui est visée. Pour la première fois depuis le retour à la démocratie en 1974 nous avons affaire à des poursuites, pour des raisons évidemment politiques, du fait de ma participation à un mouvement qui lutte contre les enchères des résidences principales et des biens populaires, qui concernent un responsable d’un parti démocratique considéré comme une menace pour le système. Nous sommes face à un virage criant qui marque une étape dans cette déviation profondément antidémocratique. La démocratie à la turque façon Erdogan est chez nous et va continuer si nous ne réagissons pas.

Je souligne que le coupable, de nature intestine, le « Département de protection de l’État et du régime démocratique » de la Sécurité de l’Attique, a échafaudé et envoyé au Parquet le dossier à ma charge, adoptant une politique évidente de couverture et de soutien qui provient des profondeurs du palais Maximou. Je ne m’attendais pas à ce que mes ex-collègues en arrivent là un jour, au point de déclencher une mutation antidémocratique de notre pays avec des poursuites contre moi. Ils ne supportent même pas notre voix. Ils craignent la dynamique ascendante de l’« Unité populaire » (LaE), la seule menace potentielle en des termes actuels qui demeure face aux centres abjects de l’ordre établi.

Naturellement, je ne suis pas venu pour m’excuser en répondant à la convocation du « Département de protection de l’État et du régime démocratique ». De tels départements protègent l’État, celui de la « germanoaméricanocratie », des créanciers et d’une démocratie inexistante qui a changé le NON en OUI.

J’ai déclaré de manière très directe que nous ne nous excusons pas, je ne reconnais pas et je ne légitime pas, par ma présence, les horreurs antidémocratiques et les poursuites politiques. Nous poursuivons, inébranlables et insoumis, ce difficile, mais noble combat.

La Grèce n’a pas besoin d’une nouvelle servilité qui va se consolider et se généraliser comme le cours naturel de son avenir. Car la Grèce ne peut simplement pas exister comme pays colonisé avec des esclaves pour citoyens.

Traduction : Vanessa de Pizzol

Source https://unitepopulaireparis.wordpress.com/2018/10/07/lafazanis-unite-populairepersecute-par-la-junte-des-colonels-et-maintenant-par-syriza/

Pétition pour sauver l’aquarius

Sauvons l’Aquarius et le sauvetage en mer

SOS MEDITERRANEE
LANCE UN APPEL URGENT A MOBILISATION CITOYENNE

Pétition, manifestations, campagne numérique…

Ces derniers mois, l’Aquarius, affrété par SOS MEDITERRANEE et opéré en partenariat avec Médecins sans Frontières (MSF), a été la cible de manœuvres politiques visant à criminaliser ses équipes et à mettre un terme à sa mission vitale de sauvetage. Après la fermeture des ports italiens et les difficultés récurrentes à trouver un lieu sûr pour débarquer les rescapés, l’Aquarius a été attaqué à deux reprises par l’Etat du pavillon – Gibraltar en août puis Panama qui a annoncé son intention de radier le navire de ses registres. Sans pavillon, l’Aquarius serait contraint de rester à quai, alors qu’aux portes de l’Europe, en l’absence de tout navire de sauvetage civil en Méditerranée centrale, les morts se multiplient. Autant de vies qui disparaissent en silence, tandis que les Etats européens ferment les yeux.

Rappeler aux Etats d’Europe leurs responsabilités en Méditerranée centrale

L’Aquarius doit retourner en mer au plus vite pour sauver des vies. SOS MEDITERRANEE et MSF appellent à une mobilisation citoyenne urgente à l’échelle européenne afin de demander à tous les Etats d’Europe :

  • De prendre toutes les mesures pour permettre à l’Aquarius de reprendre sa mission de sauvetage le plus rapidement possible;
  • De faire respecter le devoir d’assistance aux personnes en détresse en mer;
  • D’assumer leurs responsabilités étatiques en établissant un véritable modèle de sauvetage en Méditerranée.

SOS MEDITERRANEE lance une pétition « Sauvons l’Aquarius et le sauvetage en mer » et appelle à des rassemblements citoyens le 6 octobre dans plusieurs villes d’Europe afin de porter ces messages.

Pétition internationale : 1 million de signatures attendues

SOS MEDITERRANEE a choisi la plate-forme WeMove pour porter cette pétition qui peut être signée dès maintenant sur https://you.wemove.eu/campaigns/sauvons-l-aquarius-et-le-sauvetage-en-mer

La pétition sera accompagnée d’une campagne digitale où chaque citoyen sera invité à se filmer ou à se photographier avec les hashtags #SaveAquarius et #SaveRescueAtSea.

Vague orange le 6 octobre dans les rues d’Europe

Le 6 octobre, une vague citoyenne orange, aux couleurs des gilets de sauvetage et de l’Aquarius, est appelée à descendre dans la rue afin de soutenir les valeurs d’humanité portées par SOS MEDITERRANEE et MSF. Les citoyens, marins, humanitaires, secouristes, artistes, intellectuels, associations, entreprises, mouvements religieux, syndicats et collectivités publiques sont invités à rejoindre les rassemblements pacifiques et apolitiques avec comme seul signe distinctif un t-shirt orange. SOS MEDITERRANEE organisera des rassemblements citoyens dans plusieurs villes d’Europe en Allemagne (Berlin), Italie (Palerme) et en France notamment à Paris, Marseille, Lyon, Nantes, Montpellier, Toulouse, Brest, Bordeaux, Grenoble, Saint-Etienne…

Sauvons l’Aquarius et le sauvetage en mer !

crédit photo Laurin Schmid / SOS MEDITERRANEE

Source http://www.sosmediterranee.fr/journal-de-bord/CP-SaveAquarius-28-09-2018

Après Pavlos Fyssas, Zak Kostopoulos,

Encore un victime de la croissance du fascisme dans la société grecque.

Pour comprendre de quoi il s’agit Source   https://renverse.co/Ni-oubli-ni-pardon-pour-Zak-1725

Suivi d’une lettre ouverte de ses amis

Le vendredi 21 septembre 2018, Zak Kostopoulos, activiste LGBTQI+, séropositif et drag queen (Zackie Oh), a été assassiné dans des circonstances atroces et à la vue de tous dans le centre d’Athènes. Ce lynchage est le fait de «bons citoyens» qui ont agi sous la protection et avec le concours de la police grecque. Ces faits ont été suivis d’une entreprise sans précédent de désinformation de l’opinion publique et de culpabilisation de la victime, notamment accusée par les assassins puis une grande partie de la presse d’avoir essayé de commettre un cambriolage, avant que cette version ne s’effondre à l’épreuve des témoignages et des vidéos recueillis depuis lors.

Ce texte, écrit par FITLIG, est une lettre ouverte à Zak et a été publié en ligne le 26.9.2018.

Traduction en français

Cher Zak, Chère Zackie,

Par quels mots commencer à t’écrire une lettre à propos de ta perte? Nous ne parvenons pas à croire que cela a eu lieu. La communauté queer est en deuil, cherche du moins les moyens de te pleurer dans un pays pourri jusqu’à la moelle.

Nous avions l’impression que tu ne mourrais jamais, qu’on continuerait chaque matin, au réveil, à lire les posts pleins d’expressions LGBT dans lesquels tu satirisais l’actualité avec une précision chirurgicale, une sensibilité hors pair, une audace punk et toujours — c’était ta fierté — une flopée de commentaires haineux!

Nous nous étions habitué.e.s à ce que tu nous apprennes des choses, tu étais notre professeur de queer. Tu nous manques déjà terriblement. Seul.e.s, maintenant, nous ne savons pas comment faire.

Les fascistes haineux sont toujours là, eux aussi. Ils hurlent que «les toxicos et les gays sont de trop» et tu n’es plus là pour nous aider à les tourner en dérision comme tu savais si bien le faire.

Tu ne nous as jamais parlé du deuil queer, tu ne nous y avais pas préparé.e.s et nous sommes désemparé.e.s.

Je t’apporte des nouvelles un peu énervantes, accroche-toi. Hier, nous sommes allé.e.s à ton enterrement. Tu as été inhumé à Itèa, dans la société hypocrite où tu as passé ton adolescence, selon des rites chrétiens auxquels tu n’as jamais cru.

Ils t’avaient même paré d’un genre de couronnes de marié — une erreur, si tu veux mon avis, sachant qui tu étais, mais les couronnes en question donnaient l’impression d’avoir été dessinées par une folle ; le résultat avait un côté drag plutôt plaisant. (Ils t’avaient aussi fardé, couvert de cette poudre blanche qui te plaît tant).

Nous étions un bon nombre de queers rassemblé.e.s là, nous t’avons chanté du Madonna puis avons lancé des paillettes un peu partout. Tu aurais adoré. Le vent emportait le strass qui flottait dans les airs et se déposait sur une tante ou un vieux grand-père en les faisant scintiller.

La cérémonie religieuse a pris des allures de Pride. L’Itèa Pride de 2018… Dommage que tu n’aies été nulle part, tu aurais beaucoup ri.

Tu dois bien sûr te demander ce que tu faisais dans ce cimetière, si loin d’Athènes, au milieu de tous ces provinciaux aux regards soupçonneux… Ton assassinat aurait dû être l’occasion d’un pèlerinage populaire mais qu’est-ce que tu veux, ma chérie, tu sais comme sont les affaires de famille en Grèce, nous n’avons pas eu voix au chapitre.

À l’enterrement, des gens très comme il faut n’arrêtaient pas de parler d’un certain Zacharias et nous nous demandions à qui ils faisaient allusion. Nous, nous ne connaissions que Zak et Zackie.

Nous avons l’habitude de la simulation, bien sûr : c’est pour les queers une stratégie de survie élémentaire, la stratégie que nous apprenons dès l’école. C’est de cette façon que nous avons grandi, caché.e.s, blessé.e.s, à l’écart de leur monde dégueulasse et violent, un monde de mecs, de grossièreté et de domination masculines.

La communauté queer porte avec elle une peur sans fond et une blessure souvent impossible à contenir. Nous nous fabriquons des mondes imaginaires et des utopies faites de chansons de Madonna, de paillettes et de Pokémon.

Mais lorsque nous osons revendiquer ne serait-ce que le début d’un droit, un mur d’oppression s’abat systématiquement sur nous. Patrie, Religion, Famille. Merde. Toi, tu ne leur as jamais fait le plaisir de leur cacher quoi que ce soit de ce que tu étais et c’est bien pour ça qu’ils s’en sont si souvent pris à toi. Tu étais bien trop fort pour qu’ils te tolèrent, trop visible pour qu’ils te laissent exister.

Et te tuer une fois ne leur suffit pas. Ils te tuent de nouveau, encore et encore. Les monstres qui écrivent des commentaires fascistes sous ton profil et sous les nôtres, les journalistes assoiffés de sang qui se partagent des morceaux de ton corps pour obtenir un peu d’audience (ta chère Tatiana [1], monstrueuse, au premier rang), les citoyens modérés et irréprochables qui ne savent parler que de « respect des biens des personnes », tous ceux-là te tuent et nous tuent.

Si ça ne dépendait que d’eux, ils nous supprimeraient tou.te.s d’un coup en mettant en application le slogan «MAKE GREECE GREAT AGAIN». Mais vous pouvez vous le garder, votre pays de merde, ordures.

Je viens d’apprendre encore un truc. Hier, ta page, Zackie Oh, a disparu de Facebook. Je ne sais pas ce qui s’est passé — est-ce que la page a reçu une foule de reports, est-ce que quelqu’un a donné l’ordre de la suspendre? — mais on ne va pas laisser passer ça.

Ils te tuent, ils t’effacent de la carte. Les vies queer ne comptent pour rien, nous sommes les erreurs de leur système, des erreurs qu’ils veulent supprimer.

J’aimerais pouvoir te promettre une foule de choses mais je ne sais pas ce qui est en mon pouvoir. Je ne peux pas te promettre que justice te sera rendue, que ces ordures seront punies. Le pessimisme nous gagne déjà ; on voit bien que l’affaire est en train d’être méthodiquement étouffée.

Je ne peux pas te promettre non plus que nous parviendrons, comme tu t’y efforçais si fort, à changer pour le mieux la société grecque. Il est peut-être préférable que tu ne sois pas là pour voir les infamies qui sont commises aujourd’hui sous nos yeux — et pas seulement de la part de membres d’Aube Dorée [2].

L’opinion publique grecque est plus fascisante que jamais, des sondages sont organisés qui invitent les citoyens à décider si tes assassins ont eu ou non raison de te tuer, si les gays et les immigrés sont ou non des « voisins indésirables ». Le pays s’est profondément enfoncé dans la fange.

Il y a quelque chose de terriblement ironique et de terriblement tragique dans l’interview que tu as donnée en tant que Zackie : tu y déclares que tu redoutes par-dessus tout les Grecs « respectables », les bons citoyens, les bons pères de famille. Ce sont eux les véritables assassins, eux qui, avec les journalistes, pavent le chemin du fascisme, tuent encore et encore le jeune Giakoumakis [3], emprisonnent celles qui osent résister à leurs violeurs et qualifient aujourd’hui ton assassinat de simple passage à tabac. Des bêtes sauvages. Une société machiste en état de décomposition avancée.

Mais je ne veux pas finir cette lettre sur cette note pessimiste, je sais bien que tu avais les geignards en horreur. Je peux te promettre — et notre communauté luttera de toutes ses forces dans ce but — que le travail que tu as fait en tant que Zak et que Zackie ne sera pas oublié, ne restera pas dans un tiroir, ne constituera pas une note en bas de page mais s’écrira comme il le mérite en lettres capitales et au néon rose sur les murs de la ville et dans les drag shows, dans nos consciences et dans les consciences des générations queer à venir.

Tu nous manques, et nous te remercions beaucoup, pour tout. REST IN POWER QUEEN ZACKIE OH!


[1] Tatiana Stèfanidou, journaliste emblématique de la chaîne de télévision Skaï à l’origine des sondages évoqués dans le texte.

[2] Parti néo-nazi grec.

[3] Vanguèlis Giakoumakis, étudiant dans la ville de Ioannina, a été retrouvé mort au mois de mars 2015, un moins après sa disparition, victime de bullying, de menaces homophobes suivies par un passage à l’acte : son corps portait des blessures au couteau


Le Tribunal administratif de Grenoble invente le délit de citoyenneté

Emprunt toxique de la Métro : le Tribunal Administratif de Grenoble crée

un délit de citoyenneté !

Le 18 août 2016, le Collectif d’Audit Citoyen 38 a saisi le tribunal administratif de Grenoble pour faire annuler des délibérations de la Métropole de Grenoble du 1er juillet 2016 validant le remboursement des emprunts toxiques à des conditions désastreuses pour la collectivité. La décision des juges a été rendue publique le 29 septembre 2018.

Le Tribunal ne retient aucun des arguments avancés par les 3 requérants agissant au nom du CAC 38. Même « l’absence de connaissance des modalités détaillées du calcul des indemnités de remboursement anticipés » n’est pas jugée susceptible d’influer sur la décision. Il s’agit tout de même de 30 millions d’euros représentant le manque à gagner estimé par la banque prêteuse pour les 7 années d’emprunt toxique de 17 millions d’euros restant à courir. Le tribunal juge qu’il suffit qu’un tiers de confiance (la Banque de France) ait fait la vérification du calcul pour que les élus puissent voter. Étrange conception du rôle d’une assemblée délibérative : les élus sont privés des éléments essentiels pour forger leur décision au profit de spécialistes qui sont les seuls à avoir accès à l’information… Le tribunal statue également qu’il est difficile de considérer les contrats de prêts litigieux comme spéculatifs, alors qu’ils étaient indexés sur les cours des monnaies…

Mais le comble de ce jugement réside dans la condamnation des requérants à verser à la Métropole 1200 € pour les frais de justice. A noter que la Métropole avait demandé 3000 € à des citoyennes et citoyens qui agissaient en lieu et place du Préfet qui, saisi directement par les requérants dès le 8 juillet 2016 n’a pas jugé nécessaire de demander au tribunal administratif de contrôler la légalité des délibérations.

Le tribunal avait pourtant l’opportunité de ne pas accéder à la demande de la Métropole comme le prévoit l’article L 761-1 du code de justice administrative selon lequel : « Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation. »

Après le « délit de solidarité » créé par la justice française, le tribunal administratif de Grenoble vient d’inventer un nouveau délit, le « délit de citoyenneté », en condamnant d’honnêtes citoyennes et citoyens qui défendent les intérêts de leur collectivité. Par cette décision, non seulement les juges administratifs de Grenoble veulent dissuader toute action citoyenne à venir mais ils encouragent également les banques à poursuivre leurs exactions.

Aujourd’hui en France, les juges ne condamnent pas les banques, les riches contribuables et les grosses sociétés impliquées dans la fraude et l’évasion fiscales, ils préfèrent s’attaquer aux citoyennes et aux citoyens qui dénoncent ces malversations. Le CAC 38 va organiser la riposte citoyenne qui s’impose.

CAC38 (Collectif pour un Audit Citoyen de la dette publique) 1er Octobre 2018
audit.citoyen38@gmail.com

Pour diffuser largement communique CAC38 011018

Rappel Projection-débat avec Yannis Youlountas au club

Le collectif citoyen de Grenoble contre l’austérité en Grèce et en Europe – soutenu par Attac Isère et le Cadtm Grenoble

vous invite à la projection-débat en présence du réalisateur Yannis Youlountas

L’amour et la Révolution
Non, rien n’est fini en Grèce

Lundi 8 octobre 2018 à 20h15 Cinéma le Club Grenoble

« Dix ans après les premières émeutes, les médias ne parlent plus de la crise grecque.Tout laisse croire que la cure d’austérité a réussi et que le calme est revenu.  Ce film prouve le contraire.
 A Thessalonique, des jeunes empêchent les ventes aux enchères de maisons saisies. En Crète, des paysans s’opposent à la construction d’un nouvel aéroport.  À Athènes, un groupe mystérieux inquiète le pouvoir en multipliant les sabotages. Dans le quartier d’Exarcheia, menacé d’évacuation, le cœur de la résistance accueille les réfugiés dans l’autogestion.
Un voyage en musique parmi celles et ceux qui rêvent d’amour et de révolution. »

Depuis la projection le 23 avril à Villard Bonnot le film a été actualisé en juin et juillet en Grèce. Et pour ce qui est du débat les récentes annonces médiatiques de la soi-disant sortie de crise de la Grèce devraient faire l’objet d’un avis différent du réalisateur mais aussi du public.

Le cinéma le Club 9, bis rue du Phalanstère 38000 Grenoble propose sur son site http://www.cinemaleclub.com  la réservation de places. Ce sera le cas pour ce film prochainement.

Grèce : Un chef de parti doit rendre compte de son action politique

La persécution politique à l’encontre de Panayiotis Lafazanis ,une évolution dangereuse qui menace les libertés civiles.

« Ils ont essayé de nous enterrer, ils ne savaient pas que nous étions des graines » Auteur: Thanasis Petrakos

Lorsque, en décembre 2017, le gouvernement a déposé l’amendement sur la possibilité d’ouverture de poursuites à l’initiative du ministère public et l’imposition de sanctions sévères contre tous ceux qui s’opposent aux mises aux enchères des domiciles des foyers populaires, Unité Populaire (LaE) avait déclaré que : « Le gouvernement des Tsipras-Kammenos afin de rendre service aux banquiers fait régresser la Grèce vers des périodes sombres où se pratiquent la persécution politique et l’emprisonnement des opposants ». Malheureusement, quelques mois aprè, nous avons été confirmés.

Il est clair, cependant, que la convocation « pour rendre des explications » devant la Sécurité de l’Etat (!) adressée à Panayiotis Lafazanis, mis en question pour violation de 16 articles du Code pénal grec, ne vise pas à lui faire peur.

Il vise à faire peur à tou-te-s les citoyen-ne-s pour les empêcher de résister aux politiques du mémorandum et notamment aux ventes aux enchères des habitations populaires, aux saisies et au bradage des biens publics. Leur objectif est de terroriser les simples citoyen-ne-s en espérant leur suggérer la réflexion que « si ce gouvernement est capable de poursuivre Lafazanis pour 16 infractions d’articles du Code Pénal, si c’était moi sous leur grappin j’aurais eu à l’ensemble des articles du Code ». Parce que le gouvernement et la Troïka savent bien que, malgré les affabulations sur la prétendue sortie des mémorandums, il y aura un tsunami de mises aux enchères qui s’abattra sur les foyers populaires. Aucune protection de la résidence principale n’est plus en vigueur.

Mais il ne s’agit pas seulement des mises aux enchères et des saisies. Un bradage généralisé des biens publics est sur les rails. C’est pourquoi le « SYRIZA » actuel, ayant subi une totale mutation néolibérale droitière, procède à la persécution politique du secrétaire d’Unité Populaire – LaE. Ils veulent ainsi faire peur aux gens pour qu’ils cessent de résister, mais aussi montrer à leurs patrons qu’ils n’hésitent pas à criminaliser l’action politique de leurs anciens camarades.

Dans tous les cas, la persécution politique à l’encontre de Panayiotis Lafazanis constitue une évolution dangereuse qui menace les libertés civiles. Cela pour les raisons suivantes:

1. Est hautement problématique le fait que, pour la première fois après la dictature des colonels, un chef de parti politique soit appelé à rendre compte devant les services de police de son action politique.

2. Ce ne sont pas les premières poursuites  infligées aux militants qui tentent d’empêcher les mises aux enchères. Les poursuites à l’encontre de trois jeunes activistes et d’autres militants interpellés à Nauplie, Thessalonique et Volos les ont déjà précédées.

3. Il se confirme ainsi qu’en Grèce les mémorandums, ont non seulement installé le plus vaste mécanisme de pillage et d’asservissement d’un peuple, mais ont aussi lancé la mise à l’essai d’un dispositif de terreur et de criminalisation de l’opinion, le plus étendu après celui mis en place par la junte des colonels. Les dirigeants de la Troïka, à travers les gouvernements qui leur sont obéissant, cherchent à faire du protectorat un outil absolu pour la violation des droits et des libertés. Sauf que la criminalisation de la protestation sociale contre les conséquences du mémorandum «éternel» ouvre la voie à un grand déraillement non démocratique des institutions.

C’est pour tout cela que l’intervention du procureur à l’encontre de Panayiotis Lafazanis ne concerne pas principalement sa personne, ni seulement les militants et représentants d’Unité Populaire – LaE. Cette affaire concerne tous les citoyens démocrates. Non seulement ceux qui ont de la sympathie pour LaE, mais encore tou-te-s celles et ceux qui souhaitent se sentir encore des personnes libres.

Cela concerne tous les partis et organisations de Gauche, mais aussi toute force démocratique et progressiste, car les persécutions par le « Département de protection de l’Etat et du régime démocratique », autrement dit par les services de sécurité, rappelle de manière effroyable le passé sombre du pays de Grèce, qui a provoqué l’effusion de beaucoup de sang avant d’être dépassé.

Encore une fois, la défense de la démocratie devient affaire du peuple et de la Gauche! Le peuple doit crier haut et fort: Bas les mains des libertés démocratiques! Indépendance – Liberté – Démocratie! À bas la Troïka et le pouvoir des banques, à bas ceux qui en sont les serviteurs fidèles!

Quant à vous, M. Tsipras, et à votre gouvernement,  j’ai une chose à vous dire: vos banques et vos patrons sont très satisfaits de vous. Mais si vous calculez franchir sans difficultés « l’obstacle » appelé Unité Populaire, vous êtes loin du compte. Je vous dédie, en guise d’épilogue, les paroles du poète Dinos Christianopoulos: « Que n’avez vous fait pour m’enterrer, vous avez pourtant oublié que j’étais une graine »

* Thanasis Petrakos est membre du Secrétariat Politique d’Unité Populaire (LaE) et ancien représentant parlementaire de SYRIZA

Traduction E.Kosadinos

Source https://unitepopulaireparis.wordpress.com/2018/09/28/grece-la-persecution-politique-a-lencontre-de-panayiotis-lafazanis-une-evolution-dangereuse-qui-menace-les-libertes-civiles/

Zorba le Grec La rubrique de Panagiotis Grigoriou

Panagiotis  Grigoriou est Ethnologue et historien, chroniqueur, analyste, initiateur d’un concept de tourisme alternatif  et solidaire en Grèce. Le regard de l’historien et de l’anthropologue sur l’actualité et le vécu de la crise grecque.

Dans cette rubrique il évoque le medicane qui frappe la Grèce mais dont on a peu parlé en France car supplanté par le le tsunami en Indonésie, le durcissement de la politique gouvernementale et le non respect du choix des peuples concernés par le référendum sur l’accord Macédonien de Tsípras et de Zaev.

Zorba le grec

Notre sérénité ultime se cacherait-elle dans les théâtres antiques ? Le pays en a vu certes d’autres tempêtes, mais cette fois c’est décidément une météo inhabituelle. Le Péloponnèse, Athènes et les îles de la mer Égée ont subi ces derniers jours les dégâts du passage de… “Zorbás”, nom donné par euphémisme au medicane qui frappe encore la Grèce. Dépression subtropicale ayant évolué depuis quelques heures en medicane, contraction de “mediterranean” et “hurricane”. La météorologie, le temps seulement de quelques heures, elle a effacé alors tous nos autres… bouleversements “climatiques”, voire, l’amertume contemporaine généralisée. Pluie et vent !

Sous les effets de Zorbás. Péloponnèse, septembre 2018

Temps triste comme on dit, et le peuple se pénètre bien de la misère de notre synchronie interminable entre chômage et naufrage. Déjà tant de talents avariés sont dépréciés au même titre que l’espoir. Le régime de la escroquerie politique nommée SYRIZA se durcit, sans doute pour préparer le terrain aux prochains “bravoures” des présumés futurs “gouvernants” de la Nouvelle Démocratie de Kyriákos Mitsotákis, somme toute variante de la même… tromperie politique. Le système politique grec est mort, plus exactement la politique est morte… et le système, qui se passe désormais ouvertement des ajustements et des recouvres “démocratiques”, se porte il faut dire de mieux en mieux en apparence… sauf qu’il est plus pressé que jamais d’en finir, avec nous tous.

Naomi Klein avait déjà souligné combien le principe systémique fondamental est simple: pour les pays en “crise” ayant désespérément besoin d’une “aide” urgente. Entre les politiques de privatisation et de libre-échange promues en même temps que le dit “sauvetage financier”, tout forme alors un ensemble complet, les pays n’ont d’autre choix que d’accepter le paquet dans la série: “Voulez-vous sauver votre pays? Vendez-le.”

Et le pillage se met en place. Pour le cas grec, la période préliminaire à la liquidation finale, celle de la dite austérité et de la Troïka a d’abord étranglé l’économie et pour tout dire, la nation. Les rapaces installés aux commandes ont écrasé les salaires, les pensions, et ainsi brisé l’entrepreneuriat grec, ainsi le pouvoir d’achat de la population a sombré. Cela se nomme aussi une dévaluation interne “justifiant” au demeurant les emprunts exorbitants à faire payer au peuple grec.

Tempête. Péloponnèse, septembre 2018
Vieux naufrage et cimetière de bateaux. Péloponnèse, septembre 2018
Oiseau marin. Péloponnèse, septembre 2018

Le programme de la Troïka suivi par le mémorandum des gouvernements, dont le plus terrible a été signé par l’escroc politique Aléxis Tsípras, ont abouti à une “société des deux tiers”. Ainsi, la majorité de la population vit en dessous du seuil de pauvreté et la richesse, elle est collectée pour rester entre les mains de seulement quelques-uns. Naufrages, tempêtes et beaux oiseaux marins au pays si visité d’après un imaginaire touristique de plus en plus distant, entre les “réalités” fréquentées et le pays réel.

Ce dernier temps, on observe également un durcissement de la politique gouvernementale, perceptible depuis le remaniement effectué en aout dernier. Une autocratie qui ne se cache plus et une présence plus forte de l’État policier pour ce qui tient du contrôle des opinions et des résistances. Et en même temps, un chaos attisé, sinon provoqué, entre les agissements des néonazis pseudo-patriotes de l’Aube dorée, et de ceux issus de l’éventail anarchisant et de l’extrême supposée gauche largement compatible de la Sorosphère. Et enfin, l’explosion de la criminalité de toute sorte, sans oublier le poids du problème migratoire, tout pèse de son poids insupportable sur les événements et sur les mentalités.

Le corps social grec doit être surtout, démembré, poltron, haineux, désuni, cloisonnée et de surcroît, luttant pour sa survie au jour le jour, histoire de ne plus pouvoir exister politiquement autrement qu’à travers ce simulacre de la représentativité des partis zombis, au demeurant interchangeables si besoin. Le régime tient aussi par le biais d’un “Parlement” politiquement pornographique, et d’une caste politique “se prostituant” volontairement aux mains des “proxénètes” visibles et invisibles des Puissances étrangères.

On dirait que la… météorologie historique se répète depuis l’assassinat du premier Gouverneur des Grecs, Ioánnis Kapodístrias à Nauplie et en 1831. Puis, vint le temps du Roi Othon de Bavière, “Otto von Griechenland”, choisi par les Grandes Puissances. Comme Othon était mineur, le début de son règne avait été marqué par cette période politiquement absolutiste où Joseph Ludwig comte von Armansperg, diplomate et homme d’État bavarois assurait la présidence de la régence du Royaume de Grèce durant la minorité du roi Othon Ier avec deux autres régents: Carl Wilhelm von Heideck et Georg Ludwig von Maurer. C’est-à-dire, une première Troïka. Nauplie… et l’Europe en direct.

Lieu de l’assassinat de Kapodístrias. Nauplie, septembre 2018
Lieu de l’assassinat de Kapodístrias. Nauplie, septembre 2018
Statue du Roi Othon. Nauplie, septembre 2018
Présidence de la régence sous Armansperg. Nauplie, septembre 2018

Notons, que d’après même de récentes études historiques, l’assassinat de Kapodístrias a été fomenté par des agents anglais et français et que les archives britanniques sur cet assassinat restent inaccessibles aux historiens depuis près de 190 ans.

La politique étrangère pour un État Grec si possible indépendant menée par Kapodístrias, Gouverneur grec et ancien ministre des affaires étrangères du tsar Alexandre Ier de Russie et surtout, l’éventualité de voir naître en Méditerranée orientale un nouvel état maritime qui ne serait pas contrôlé par les Grandes Puissances, voilà ce qui dérangeait les deux pays “protecteurs” qui expérimentaient en fait la création d’un petit État grec totalement sous contrôle. En cette année 2018, on revient de la sorte… aux fondamentaux, climat ou pas !

Et pour revenir au climat du moment, celui de la météorologie, Nauplie et l’Argolide, régions de la Vieille Grèce, elles ont été parmi les contrées les plus touchées par cette dépression subtropicale devenue medicane au nom de Zorbás. Samedi, Zorbás abordait le sud de la Grèce, avec des vents d’une intensité correspondant à une tempête tropicale dont le centre du système s’est clairement entouré d’une ceinture convective rendant visible ce qui s’apparente à un œil.

Après avoir touché le Péloponnèse entre vendredi soir et samedi, puis les îles des Sporades et de l’Eubée, les intempéries ont aussi concerné Athènes avec plus de 50 mm en 24h et de violentes rafales de vent dépassant les 100 km/h, occasionnant inondations et coulées de boue. Par ailleurs, des vagues de 5 à 8 mètres sont observées sur le littoral, causant d’importantes submersions marines. Grèce tropicale !

L’Europe en direct. Nauplie, septembre 2018
Péloponnèse tropical. Septembre 2018

Dimanche matin sur le port d’Épidaure et sous ses eaux même on évaluait les dégâts. Quatre voiliers coulés et bien d’autres endommagés lorsque ce terrible vent du samedi et du cyclone venait alors de l’Est. Les experts des assureurs, ceux de la compagnie… anglaise de yachting ayant loué ces voiliers et qui en a perdu quatre, les réparateurs maison, les grues, tout ce petit monde était déjà sur place.

“Heureusement il n’y a pas eu de morts ni de blessés, pour le reste, nous avons perdu quatre voiliers… et c’était notre dernière semaine de la saison. Une fois sortis de l’eau, les bateaux vont être réparés sur place par nos propres équipes, alors…vivement 2019”, nous disent-ils les experts de la compagnie. Touristes comme habitants réalisaient des selfies sous une pluie alors fine, décidément, notre dernière sérénité résiderait-elle plutôt dans les théâtres antiques, surtout à Épidaure. Zorba le Grec.

Au port d’Épidaure. Septembre 2018
Au port d’Épidaure. Septembre 2018
Au port d’Épidaure. Septembre 2018
Les experts sur place. Port d’Épidaure, septembre 2018

Semaine alors fort… cyclonique en Grèce au point de faire oublier le durcissement de la politique gouvernementale, perceptible depuis le remaniement effectué en août dernier. Autocratie et présence plus forte de l’État policier et voilà que le chef du parti de l’Unité Populaire, Panagiótis Lafazánis a été convoqué à la Direction centrale de la Police à Athènes pour s’expliquer sur ses actions sur le terrain des Tribunaux, en opposant à la vente aux enchères forcée de l’habitat populaire. Pourtant homme politique ex-SYRIZA et ex-Ministre ayant quitté ce parti des balivernes historiques en août 2015, son interpellation a provoqué un certain mécontentement exprimé publiquement même chez les députés SYRIZA actuels. C’est le dernier honneur des cyniques arrivistes… joué dans les jeux d’aventure.

Sauf que l’aventure c’est autant celle du pays. Car dans cette affaire, il est fondamental de comprendre que Lafazánis a été interpellé de la sorte pour rendre compte devant un service lequel ne faisait pas vraiment parler de lui jusque là. Il s’agit de la “Direction de la Protection du Régime et de la Démocratie”. Ce n’est ni plus ni moins, une administration sinistre, digne des temps… cycloniques nouveaux, très réactionnaire et profondément anachronique et qui fait référence à d’autres temps bien obscurs. La dystopie techno-féodale se dessine alors déjà dans nos rétroviseurs, il y a urgence.

Cette administration a été mise en place sous le gouvernement du PASOK et du pion de l’Allemagne Simítis en 2000, et dont les prérogatives ont été confirmées et actualisées sous la Troïka et le Mémorandum, sous le gouvernement Papandréou en 2011. Notons-le à l’époque, sous le Ministre de l’Ordre public Chrístos. Papoutsís. Ce dernier, rappelons-le, il est issu de ce personnel politique… alors mûri et macéré dans les fonts baptismaux des intrigues du pouvoir des colonisateurs depuis son poste de Commissaire européen à l’Énergie entre 1995 et 1999.

La dystopie dans le rétroviseur. Athènes, septembre 2018
Siècle cyclonique. Athènes, septembre 2018
Modernité. Athènes, septembre 2018

Enfin, cette “Direction de la Protection du Régime et de la Démocratie” a été confirmée et “modernisée” dans ses fonctions en 2017 par le gouvernement Tsípras, lequel laisse en même temps volontairement, car il s’agirait alors et visiblement d’un plan, la criminalité diverse et variée ronger ce qui reste du pays réel et autant des dernières certitudes. Le pouvoir criminalise ainsi les opinions à la carte mais il favorise le crime si ce n’est que par la négligence.

Et sur Internet grec, on estime même, à l’instar de l’analyse proposée par le site des Ingénieurs Civils (issus des rangs de la gauche), que cette dite “Direction de la Protection du Régime et de la Démocratie”, “serait-elle alors largement contrôlée par le gouvernement et autant liée aux Services secrets étrangers des pays”… faiseurs comme on sait de la dernière pluie cyclonique à la géopolitique actuelle comme passée, site des Ingénieurs Civils, le 26 septembre 2018.

D’après les textes officiels reproduits pour les besoins de l’analyse publiée sur ce site, la mission de ce service au sein de la Division de la sécurité de l’État, “c’est la prévention et la répression des actes de violence ou des menaces graves dirigés contre la sécurité de l’État et contre le système démocratique. Dans ce contexte, elle recherchera, collectera, traitera et exploitera les informations et les renseignements nécessaires recueillis au sujet d’actes individuels ou de groupes organisés qui agissent contre la sécurité de l’État et du gouvernement démocratique ou d’actes de violence à l’égard des personnes ou des biens, tout en surveillant ces activités, œuvrant conjointement avec la Direction de la sécurité de l’État, la Police anti-criminelle, ainsi que la Direction de la gestion et de l’analyse de l’information”.

Commerce… charitable. Athènes, septembre 2018

Au même moment, et c’est du jamais vu en Grèce depuis la chute du régime des Colonels si l’on croit certaines analyses, des compagnies pétrolières s’apprêtant à exploiter le pétrole découvert dans la belle région montagnarde de l’Épire au Nord-Ouest du pays, feraient preuve de comportement et d’agissements inhabituels, pour tout dire criminels, et le “gouvernement” et l’État avec sa “Direction de la Protection du Régime et de la Démocratie” se limitent à un rôle d’observateurs.

“Car les promoteurs des projets pétroliers seraient en train depuis quelques semaines de criminaliser le droit de manifester afin de pouvoir détruire l’environnement assez intact de l’Épire. Ceux donc des compagnies privées de gardiennage, engagés par les pétroliers, sillonnent alors les villages concernés, jetant la lumière de leurs phares depuis leurs véhicules 4X4 au beau milieu de la nuit sur les habitations des citoyens ouvertement opposés à l’exploration et à l’extraction des hydrocarbures en Épire. Une équipe même issue des compagnies privées de gardiennage composée d’une vingtaine de personnes a pénétré dans le domicile des opposants à l’exploitation pétrolière. Jours de terrorisme en Épire”, article de Yánnis Perákis publié sur le site Internet du mouvement du Plan-B daté du 28 septembre 2018. Appel aux journalistes, enquêtez sur cette question !

On s’éloigne alors de cette Grèce photographiée et même caressée dans le sens du poil par les touristes à Épidaure… avant comme après le cyclone au pays où même l’hôtellerie figure parfois parmi les lieux de mémoire, heureusement dans un sens que l’on vend encore du tabac d’Orient et depuis peu, de la marchandise… devenue disons solidaire !

Antiquités. Péloponnèse, septembre 2018
Épidaure. Septembre 2018
Épidaure. Septembre 2018

Sur ces faits la grande presse ne dira pas un seul mot, tandis que toute la presse s’est emballée sur la dramatique affaire d’un toxicomane ayant pénétré la semaine dernière dans une bijouterie d’Athènes, éventuellement pour commettre un vol et ensuite décédé suite à son passage à tabac par le bijoutier et par un passant, sans que les médecins légistes dont celui désigné par les proches de la victime puissent déterminer les causes exactes de sa mort. Il faut préciser que la victime, Zacharías Kostópoulos avait été un militant LGTB+, et drag queen connu(e) sous le nom de Zackie Oh

Depuis cette mort tragique de Kostópoulos âgé de 33 ans, les pseudo-anarchistes et les militants LGBT+, compatibles Sóros ils ont manifesté devant les lieux du drame, tandis qu’une bonne… grappe d’universitaires défenseurs de la mondialisation techno-féodale contre les peuples et les nations, a cru bon signer une pétition. Parmi ces signatures il y a celle d’Antónis Liákos, universitaire, bras droit de Simítis sous le PASOK et de Tsípras actuellement, et accessoirement, compagnon de la nouvelle ministre de la Culture, la très PASÓKienne et SYRIZA Myrsíni Zorbá.

La question ici, ce n’est pas de ne pas juger et surtout de ne pas punir les assassins de Kostópoulos si les faits sont prouvés. La question, ce n’est pas non plus celle des préférences et les autres idiomes sexuels des uns comme des autres historiquement attestés d’ailleurs, mais plutôt cette conversion orchestrée par le système de certaines “luttes et causes”, vers la dissection du corps social et vers la destruction du cadre historique culturel et démocratique, souvent étatique et national des peuples et pour tout dire, de la personne humaine. Car c’est d’abord à partir de la personne humaine et de la société justement, qu’il est encore possible de s’organiser et de résister. Comme le souligne ailleurs Nicolas Bonnal au sujet parallèle de la figure de la Jeune-Fille et de l’idéologie transgenre ; ceci j’ajouterais en préparation du transhumanisme alors totalitaire et intégral, “l’Occident est sous contrôle psychiatrique-pathologique, belliciste-humanitaire, féministe-antiraciste, androphobe-russophobe et sociétal-transgenre” (…)

La violence avec laquelle la féminitude est administrée dans le monde de la marchandise autoritaire rappelle comme la domination se sent libre de malmener ses esclaves, quand bien même elle aurait besoin d’eux pour assurer sa reproduction.” (…) “L’important est la soumission. Contrairement à son ancêtre, la Jeune-Fille bio n’affiche plus l’élan d’une quelconque émancipation, mais l’obsession sécuritaire de la conservation. C’est que l’Empire est miné à ses fondements et doit se défendre de l’entropie. Après on fait du Merkel. On aime les LGTBQ ou les migrants, c’est les hommes et les Allemands qu’on déteste. La Jeune-Fille bio sera donc responsable, ‘solidaire’, écologique, maternelle, raisonnable, ‘naturelle’, respectueuse, plus auto-contrôlée que faussement libérée, bref: bio-politique en diable”, “Le contrôle social par la Jeune-Fille en occident” de Nicolas Bonnal, publié le 14 septembre 2018.

Hôtel, lieu de mémoire. Nauplie, septembre 2018
Hôtel, lieu de mémoire. Péloponnèse, septembre 2018
Hôtel, lieu de mémoire. Péloponnèse, septembre 2018
Tabac d’Orient. Nauplie, septembre 2018

Lundi matin, premier jour d’octobre. Automne grec et balkanique sous un temps cyclonique. Les médias grecs analysent le résultat du referendum de la veille organisé à l’Ex-République Fédérale de Macédoine. Le peuple voisin des Slavomacédoniens a largement rejeté par son abstention, l’accord Macédonien de Tsípras et de Zaev, chefs de gouvernement et marionnettes des Puissances étrangères respectives. Comme durant le référendum grec, les maîtres de la géopolitique forcement interventionniste, ils ont multiplié les déclarations, voire, ils se sont déplacés à Skopje pour dicter aux habitants et citoyens du pays tout le sens de “leur” vote, se prononçant c’est-à-dire en faveur de l’accord préalable.

Dans le désordre, il y a eu l’intervention des dignitaires impériaux de Bruxelles et de Berlin, de Donald Trump, des patrons de l’OTAN, d’Emmanuel Macron, en passant par des acteurs régionaux, à l’instar du Premier ministre de l’Albanie Edi Rama lequel a invité la minorité albanaise (30% de la population) de se rendre aux urnes et de voter en faveur de l’accord, plus exactement, la question posée évoquait également l’approbation ou pas d’une future adhésion de ce pays au sein de l’OTAN et de l’UE

Visiblement, les peuples des Balkans comprennent très bien ce que l’Europe des colonisatrices de Berlin et de l’UE veut dire, l’époque du dépeçage germano européiste de la Yougoslavie et de la haine ainsi attisée entre les peuples n’est guère loin, les peuples donc, seuls grand perdants de l’histoire. Ainsi, avec près de 65% d’abstention, la consultation annule d’après les conditions requises au pays voisin, toute la portée supposée du OUI, donné largement gagnant par les médias habituels.

Temps cyclonique. Péloponnèse, septembre 2018

Et voilà que depuis Bruxelles on annonce maintenant que le referendum n’a qu’une portée consultative et que l’accord doit être ratifié par les deux Parlements, d’ailleurs en Grèce, la marionnette Tsípras s’est obstiné pour ne pas organiser un referendum analogue. L’Occident sous contrôle psychiatrique-pathologique, méta-démocratie comprise. Ainsi à Athènes, certains élus du parti des Grecs Indépendants de Kamménos, Ministre de la Défense et allié de Tsípras, quittent en moment leur parti pour ainsi se prononcer finalement en faveur de l’accord, puisque Kamménos déclare qu’il retirera sa confiance au gouvernement lorsque l’accord va arriver devant la Chambre des députés. De même, les élus du “parti de la Rivière” To Potámi de Stávros Theodorákis, parti engendré entre Berlin et Bruxelles sont pressentis pour servir “comme il faut”, à chaque fois que les grands partis et autant principales marionnettes n’y parviennent pas.

Ainsi le système verrouille et renforce son dernier euphémisme démocratique… avant sans doute le grand formatage ! A moins de pouvoir créer de bien nouvelles conditions de représentativité réellement démocratique et souveraine, les peuples, à commencer par ceux de l’UE, devrait s’abstenir de participer aux élections prépayées et pré-payantes pour seulement certains, et ceci si possible très largement. Déjà, les dites Élections européennes devraient connaître une abstention de plus 95%.

Temps cycloniques… Zorbá le Grec et Macédoine de légumes ! Les décisions sont prises ailleurs, et les peuples sont violés. Si cet accord est finalement ratifié, les relations entre les deux peuples vont être davantage empoisonnées, car il est rejeté par une très large majorité des citoyens des deux côtés de la frontière. C’est bien dommage, d’autant plus que les deux signataires de l’accord préalable, Tsípras et Zaev ne seront plus aux commandes dans quelques mois.

Macédoine, 784 kms. Péloponnèse, septembre 2018
Derrière la vitrine. Athènes, septembre 2018
Institut français d’Athènes. Septembre 2018

Sur un mur de l’Institut français d’Athènes, on y discerne certaines figures de la culture et autant de la gloire de la France et de la République. Pour combien de temps encore ?

Notre dernière sérénité se cacherait-elle dans les théâtres antiques ou même derrière la vitrine politique de fait brisée ? Le pays en a vu certes d’autres tempêtes mais cette fois c’est décidément un mauvais temps bien inhabituel. Quatre personnes sont portées disparues en Eubée et en Thessalie, Zorba… quitte alors la Grèce, tout le symbole y est on dirait.

Sauf que nos matous habituels sont toujours là, scrutant le temps, tout comme les âmes. Athènes en octobre, pluie et vent !

Matou d’Athènes. Septembre 2018
* Photo de couverture: Sérénité à Épidaure, septembre 2018
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