Publications par auteur⋅ice

Author Archive by rédaction

Grèce : la violence imbécile des créanciers

2 juin 2017 par Michel Husson pour Alencontre

Euclide Tsakalotos et Mario Draghi

Le 18 mai 2017, le Parlement grec a voté à une courte majorité (les députés de Syriza et ANEL : soit 153 députés sur 300) un nouveau train de mesures d’austérité qui couvre la période 2018-2021. En réalité, il s’agit de la transposition d’un volumineux document de 941 pages préparé par les créanciers et de la mise en musique de « l’accord » conclu avec la Commission européenne le 2 mai. Le document préparatoire, le Draft Preliminary Agreement |1| (que le site Keep Talking Greece a fait fuiter) donne un aperçu de l’étendue des champs couverts. La Grèce n’est plus une démocratie : ce sont les créanciers qui rédigent les lois.

L’acharnement

Cela n’a pourtant pas suffi. La réunion du 22 mai de l’Eurogroupe (la réunion des ministres des finances) devait acter la bonne mise en œuvre des réformes en cours. Cela aurait permis de débloquer une nouvelle tranche de prêt de 7,5 milliards d’euros permettant de faire face à une échéance de 7 milliards en juillet et de rendre les titres de la dette grecque éligibles à la BCE (Banque centrale européenne). Mais les ministres européens ont refusé de donner quitus à leur collègue grec, certaines des réformes, notamment des retraites, n’étant pas assez avancées à leurs yeux.

La position des Européens était dictée par Wolfgang Schäuble et le président de l’Eurogroupe, Jeroen Dijsselbloem. Elle consiste à maintenir une pression constante sur les Grecs et à repousser autant que possible toute discussion sur un nouvel allègement de la dette grecque que demande le FMI. Les motivations sont évidemment d’ordre politique (les prochaines élections en Allemagne), doctrinal (le respect des règles) et punitif (tuer toute velléité de politiques alternatives).

Il existe par ailleurs une divergence de vues entre les institutions européennes et le FMI. Ce dernier souffle le chaud et le froid : il déclare que la dette grecque est insoutenable, mais préconise en même temps des mesures supplémentaires encore plus dures que celles des Européens. Cette position difficile à interpréter renvoie à la volonté de ne plus reproduire l’erreur commise en 2010, qui avait consisté à violer ses statuts qui lui interdisent de prêter à un pays dont la dette est insoutenable |2|. A l’appui de cette interprétation, on peut remarquer que le FMI débat actuellement des State-contingent Debt Instruments for Sovereigns. Il s’agit de titres de la dette publique dont les intérêts et le principal sont indexés sur le PIB (GDP-linked bonds) ou à maturité variable (sovereign ‘cocos’ contingent convertibles). Mais les directeurs exécutifs sont partagés comme le montre le compte-rendu de la discussion sur le rapport du staff du FMI |3|, publié par coïncidence le même jour que la réunion de l’Eurogroupe. Le FMI est donc divisé, en butte aux obstructions des représentants européens en son sein.

La feuille de route de Bruno Le Maire

Yanis Varoufakis rappelait récemment |4| les promesses de soutien en faveur d’une « solution durable » que lui avait faites Emmanuel Macron, alors qu’ils étaient tous deux ministres. Mais Hollande et Sapin avaient mis leur veto. Aujourd’hui, rien n’empêche plus Macron de tenir ses promesses. Selon Mediapart |5| son projet est toujours de « trouver un accord prochainement pour alléger dans la durée le poids de la dette grecque. » Telle était donc « la feuille de route » du nouveau ministre de l’économie, Bruno Le Maire. Grâce au site grec Euro2Day qui a fait fuiter les minutes |6| de la réunion de l’Eurogroupe, on peut constater que le nouveau ministre (Lemaire dans le compte-rendu) n’a pas réussi à se faire un nom et que sa prestation a été aussi lamentable que celles de son prédécesseur. Comme Michel Sapin il a, pour reprendre une formule de Varoufakis, émis « quelques bruits discordants mais très subtils (…) pour finalement se plier à la ligne de Doc Schäuble. » |7|

Dans sa première intervention, Le Maire félicite la Grèce pour les mesures adoptées et se plaint du « manque de clarté » qui fait obstacle à un compromis que la France est prête à soutenir. Il a des difficultés avec les hypothèses de croissance du FMI (mais pas avec celles de la Commission européenne), bref c’est le FMI qui bloque.

Vers la fin de la réunion, Le Maire précise qu’il est d’accord (« en même temps ? ») avec ses deux nouveaux copains, Euclide (Tsakalotos) et Wolfgang (Schäuble) et que, décidément, le FMI doit faire un geste. Mais sa vraie préoccupation est ailleurs : il espère que « nous serons capables de communiquer positivement à la réunion de ce soir [la conférence de presse], c’est important pour les marchés. » C’est après tout ce qui compte vraiment, et de manière très cohérente, Le Maire s’est empressé, dès la sortie de la réunion, d’annoncer qu’il fallait reporter toute décision concernant le projet de taxe sur les transactions financières et « attendre de mesurer toutes les conséquences du Brexit. » |8|

Des prévisions de croissance « fake »

Dans ses prévisions de février dernier |9| la Commission européenne faisait preuve d’un optimisme débordant. Elle discernait « des signes de reprise en lien avec la mise en œuvre du programme ». Selon elle, les perspectives s’amélioraient sur tous les fronts : demande intérieure, le marché du travail, finances publiques. Bref, la Commission n’hésitait pas à prévoir une croissance de 2,7 % en 2017, puis de 3,1 % pour 2018.

Patatras, les chiffres de la croissance tombent : le PIB a reculé de 1,2 % au dernier trimestre de 2016, et de 0,1 % au premier trimestre de 2017. La Commission européenne remet alors l’ouvrage sur le métier et, en mai dernier, révise ses prévisions à la baisse : ce sera dorénavant 2,1% en 2017 et 2,5 % en 2018 |10|. Elle est même un peu en dessous des prévisions du FMI d’avril (respectivement 2,2 % et 2,7 %) |11|. Mais elle ne renonce pas à son bel optimisme : « Après un recul au quatrième trimestre de 2016, la reprise devrait redémarrer cette année. » Ce n’était donc qu’un incident de parcours.

Tout cela est affligeant. La réalité est qu’après avoir baissé d’un quart, le PIB de la Grèce est plat depuis le début de 2013, soit quatre années pleines. Comment dans ces conditions oser parler d’amélioration, sans prendre en compte l’émigration, les retraités, la précarisation, la grande braderie des privatisations, la charge des réfugiés ? Comment ignorer les réactions du peuple grec à ce qui n’est rien d’autre qu’un nouveau mémorandum ? |12|.

Même en restant dans le domaine de l’économie « pure », comment postuler que, par miracle, la croissance va faire un bond en avant dans les années à venir ? Le graphique ci-dessous permet de vérifier que le volume trimestriel du PIB oscille autour de 46 milliards d’euros de 2010 depuis 2013. Selon les prévisions de la Commission, il devrait franchir une marche d’escalier dès cette année, suivie d’une autre en 2018. Mais il n’y a aucune raison de penser que l’application d’un programme d’austérité forcené pourrait produire un tel résultat. Il y a au contraire toutes les raisons de penser que ces prévisions sont faites au doigt mouillé par des tricheurs qui n’ont rien à voir, de près ou de loin, avec l’économie.

JPEG - 90.7 ko

Source : Elstat |13|, Commission européenne[9] [10]

Est-ce d’ailleurs une coïncidence si l’OCDE, moins impliquée dans les « négociations » avec la Grèce, est beaucoup plus prudente ? Dans ses dernières Perspectives économiques parues en décembre 2016 |14|, elle table sur une croissance de 1,3 % pour 2017, puis de 1,9 % en 2018. Quant au Parliamentary Budget Office du Parlement grec, son dernier rapport publié en mars 2017 |15| évoquait avec raison la menace de « nouveaux cercles vicieux et de stagnation durable », si les hypothèses de croissance n’étaient pas vérifiées. On ne saurait mieux dire.

En réalité, le programme ne fonctionnera pas si tant est qu’il s’agisse de relancer l’activité économique en Grèce. Il n’est pas conçu pour cela, et c’était déjà le pronostic de la Commission pour la vérité sur la dette grecque dès septembre 2015 : le troisième mémorandum est aussi insoutenable que les deux précédents |16|.

En plus, « ils » le savent depuis le début. On ne peut résister à la tentation de rapporter ici la confidence de Christine Lagarde à Yannis Varoufakis lors de leur première rencontre le 11 février 2015 (un mois après la nomination de ce dernier comme ministre des finances). Dans le passionnant récit qu’il vient de publier |17|, Varoufakis rapporte leurs échanges – privés – après l’entrevue officielle : « Christine a approuvé mon plaidoyer en faveur d’un allègement de la dette comme condition préalable à une reprise de l’économie grecque. Puis elle s’adressa à moi avec calme et franchise : “vous avez bien sûr raison, Yanis. Ces objectifs sur lesquels ils insistent ne peuvent pas fonctionner. Mais vous devez comprendre que nous avons trop investi dans ce programme pour pouvoir faire marche arrière. Pour être crédible, il vous faut accepter de travailler dans le cadre de ce programme”. »

L’acharnement incohérent des créanciers

L’enjeu réel du « programme », c’est la mise en place d’un gigantesque roll over de la dette grecque : tout l’argent qui est prêté à la Grèce est immédiatement affecté aux remboursements. La fonction des « réformes » et de l’austérité est de garantir la capacité de la Grèce à faire face aux échéances à venir. Cela passe par l’obtention d’excédents primaires démentiels : Jeroen Dijsselbloem, le président de l’Eurogroupe n’hésite pas à exiger un excédent primaire d’au moins 3,5 % du PIB pendant cinq ans à partir de 2018. Même un économiste de banque (en l’occurrence Ilias Lekkos, de la Piraeus Bank |18|) peut comprendre cette vérité élémentaire qu’il faut sans cesse rappeler : « On n’a jamais vu un pays non-exportateur de pétrole qui puisse maintenir un excédent primaire de 3,5 % systématiquement pendant plusieurs années (…) Cet objectif ne pourrait être atteint qu’au prix d’une énorme récession. »

JPEG - 156.3 ko
Grève et manifestation, le 25 mai 2017, des motocyclistes livrant de la nourriture

Il faut donc cesser de parler de « négociations » avec la Grèce. Le ministre grec pourrait aussi bien être absent des débats qui opposent deux positions doctrinales : celle du FMI et celle de la Commission européenne. Les voies d’un compromis ne sont pas discutées, alors même que le FMI lui-même les explorait en détail dans son examen de l’économie grecque de février 2017 |19|. Pour rétablir la soutenabilité de la dette grecque, le FMI proposait les mesures suivantes : allongements de maturité allant de 10 à 30 ans ; report des paiements d’intérêt jusqu’en 2040 ; plafonnement des taux d’intérêt à 1,5% pendant 30 ans ; restitution automatique à la Grèce des profits tirés de la détention de titres de la dette grecque par la BCE (programme SMP, Securities Markets Programme ) et par les banques centrales programme ANFA, Agreement on Net Financial Assets).

Ces pistes, et d’autres en discussion aujourd’hui au FMI, rappellent irrésistiblement la logique du plan présenté par Yanis Varoufakis |20| lors de ses premières réunions avec la troïka au printemps 2015. Ce plan était fondé sur l’échange des titres de la dette grecque contre des obligations perpétuelles ou indexées sur la croissance, et il aurait sans doute permis (dans l’abstrait) de trouver un accord raisonnable sans qu’aucune des parties ne perde la face. La distance entre ce possible compromis et l’acharnement désordonné des créanciers permet de mesurer la violence faite au peuple grec.

Source : A l’encontre

Notes

|1| European Commission ; Supplemental Memorandum of Understanding, Draft Preliminary Agreement, 2 mai 2017. Source : « Keep Talking Greece », 9 mai 2017.

|2| Michel Husson, « Grèce : les mea culpa du FMI », A l’encontre, 22 août 2016.

|3| « State-Contingent Debt Instruments for Sovereigns », IMF, mai 2017.

|4| Yanis Varoufakis, « Emmanuel Macron a voulu sauver la Grèce, votez pour lui ! », Le Monde, 2 mai 2017.

|5| Martine Orange, « Les Européens continuent de mettre la Grèce au supplice », Mediapart, 23 mai 2017.

|6| Eurogroup Flash Report, 22 May 2017. Source : « Euro2Day », 25 mai 2017.

|7| Yanis Varoufakis, « Our battle to save Greece », New Statesman, 13 juillet 2015.

|8| Anne-Sophie Jacques, « Taxe sur les transactions financières : la France demande un report. Le Brexit, nouveau prétexte », Arrêt sur images, 26 mai 2017.

|9| European Commission, European Economic Forecast, février 2017.

|10| European Commission, European Economic Forecast, mai 2017.

|11| IMF, World Economic Outlook, avril 2017.

|12| Charles-André Udry, « Grèce. Trois journées de mobilisation face au coup de massue du 4e mémorandum », A l’encontre, 17 mai 2017.

|13| ELSTAT, Hellenic Statistical Authority, Quarterly National Accounts, 15 mai 2017.

|14| OCDE, Perspectives économiques, décembre 2016.

|15| Parliamentary Budget Office, « Quarterly Report October-December 2016 », Parliamentary Budget Office, Hellenic Parliament, mars 2017.

|16| Commission pour la vérité sur la dette grecque, « Le troisième mémorandum est aussi insoutenable que les deux précédents », 1er octobre 2015.

|17| Yanis Varoufakis, Adults in the Room : My Battle With Europe’s Deep Establishment, 2017.

|18| Cité dans Marcus Bensasson et Sotiris Nikas, « Greek Economy Limps Onto Launchpad After Late-Night Vote », Bloomberg, 19 mai 2017.

|19| IMF, Greece : 2017 Article IV Consultation, février 2017.

|20| Tony Barber, « Greece finance minister reveals plan to end debt stand-off », Financial Times, February 2, 2015 ; Thibaut Le Gal, « Grèce : Tout comprendre au plan du gouvernement pour résorber la dette », 20minutes.fr, 4 février 2015.

Grèce. La trajectoire du PIB grec et celle du QI des journalistes économiques

par Romaric Godin Publié par Alencontre le 3 – juin – 2017

Alors que l’économie hellénique continue à s’enfoncer sous le poids des réformes et de l’austérité, les médias français dominants feignent l’incompréhension et les éditorialistes regardent ailleurs. Il est vrai que la Grèce est une épine dans le pied de leurs certitudes…

Il est des silences très parlants. Ainsi celui des éditorialistes et chroniqueurs économiques français sur la situation grecque depuis quelques mois. Regardons le sommaire de la semaine passée: on n’y trouvera que des réflexions assez semblables sur la façon dont Emmanuel Macron a ensorcelé Angela Merkel ou sur les défis des deux nouveaux locataires de Bercy. De Grèce, point. Et, à vrai dire, l’Olympe du journalisme économique ne s’est plus guère penchée sur le sort de ce pays depuis ce 13 juillet 2015 où le Premier ministre grec, a «dû accepter» un troisième programme.

Pourtant, la semaine dernière, l’occasion était bonne d’aider nos concitoyens à «décrypter» cette tragédie économique et sociale en plein cœur d’une zone euro que l’on nous dit en pleine refondation.

Le 17 mai 2017, en effet, le parlement grec a approuvé, sous la pression des créanciers, une nouvelle série de mesures d’austérité, touchant notamment les retraites (pour la treizième fois !) et prévoyant un tour de vis budgétaire jusqu’en 2021. [Voir à ce propos sur notre site l’article de Michel Husson publié en date du 1er juin 2017 : «La violence imbécile des créanciers».]

Cette nouvelle purge est la quatrième pour le seul troisième protocole d’accord signé en août 2015 avec les détenteurs européens de la dette publique européenne. Le vote a donné lieu à des manifestations importantes devant le parlement athénien. Deux jours plus tôt, on avait pris connaissance de la première estimation de la croissance grecque du premier trimestre. Un recul de 0,1 %, le second de suite, ce qui signifie que la Grèce est à nouveau «techniquement» en récession alors même que la croissance du reste de la zone euro s’accélère. Dans la foulée, le 16 mai, la Commission européenne a revu sa prévision de croissance 2017 de 2,7 % à 1,8 %. [Après avoir révisé la croissance à -1,1% au quatrième trimestre 2016, le résultat du premier trimestre 2017 – après ajustement saisonnier – est qualifié, triomphalement, d’une croissance de 0,4% selon Macropolis, 2 juin 2017. Réd. A l’Encontre]

La reprise AFP, cette forme moderne d’indifférence

Or, ce qui est frappant dans le traitement médiatique de ces quelques faits, c’est l’incapacité à les lier entre eux ou l’insistance à les séparer. La croissance ne reprend pas, l’austérité continue. Mais rien ne semble lier les deux. Chaque acte de la crise grecque est traité séparément, avec l’aide de cette forme moderne d’indifférence qu’est la reprise de la dépêche AFP ou Reuters.

Aussi chercherait-on en vain dans ce traitement de l’actualité grecque un lien de cause à effet entre ce chiffre de la croissance et les mesures d’austérité votées sans cesse depuis des mois. Par exemple, Le Figaro publie le 16 mai un papier plus fouillé que ceux des autres médias français, quoiqu’assez court et descriptif. Mais il se contente cependant d’un constat en forme de mystère : «Après sept années de crise, autant de récessions et de multiples cures de rigueur, la Grèce n’arrive toujours pas à sortir du tunnel. Le chômage plafonne à 23%, rares sont les entreprises qui rémunèrent leurs employés dans les temps. Et l’économie tourne au ralenti alors que les réformes structurelles peinent à voir le jour.»

Et il y a là en effet un vrai mystère auprès duquel la trinité est une partie de Cluedo [Il s’agit célèbre un jeu de société dans lequel les joueurs doivent découvrir parmi eux qui est le meurtrier d’un crime commis dans un manoir anglais]. Car les «cures d’austérité» ont bien vocation à «réformer» et chaque loi votée par le parlement grec sous la pression des créanciers comporte des «réformes». Depuis 2014, l’OCDE reconnaît que la Grèce est un des pays à avoir le plus «réformé». Dès lors, comment les «réformes structurelles» peineraient-elles à voir le jour? C’est qu’elles n’ont pas peiné: elles ont été mises en place et elles ont causé la situation actuelle du pays. C’est peut-être que l’on a alors découvert ce fait inouï: les «réformes» pourraient ne pas être bonnes pour la croissance? Le fait étant évidemment inacceptable, il ne sera pas énoncé.

Le cancre grec, encore et toujours

Mieux encore : le même Figaro économie publie le 21 mai sur son site un nouvel article assez long et brillamment infographié pour expliquer que les créanciers européens s’attaquent enfin au problème de la dette dans l’Eurogroupe de ce lundi 22 mai. Et l’article de préciser que «le niveau d’allégement de la dette dépendra des prévisions de croissance de la Grèce et des excédents budgétaires qu’Athènes pourra dégager sur plusieurs années sans pour autant étrangler son économie». Nouveau mystère à vrai dire puisque, précisément, l’économie grecque est étranglée depuis sept ans par les excédents budgétaires (plus précisément, les excédents primaires, qui excluent le service de la dette).

Or, les nouvelles mesures votées le 17 mai ont imposé les mêmes objectifs pour trois ans de plus, justement pour rendre, croit-on, la dette «soutenable». Quel que soit le niveau d’allègement de la dette (qui ne sera en fait qu’une protection contre une future hausse des taux), les créanciers ont déjà décidé d’étrangler l’économie hellénique. Mais il est vrai que la clé de ce mystère repose dans le titre de l’infographie qui résume les niveaux de dette européenne et est titré : «la Grèce, cancre de l’Union européenne». Dès lors, tout devient simple: la Grèce est un pays cancre qui ne sait pas comment faire baisser sa dette et il faut donc encore lui «venir en aide». Une fois de plus, le lien entre la croissance et l’austérité est totalement nié.

Du reste, la très mauvaise croissance grecque du premier trimestre ne sera traitée par les médias français que sous la forme d’une reprise de dépêches. Dans l’ensemble de ces traitements, la raison de cette récession est simple, c’est celle énoncée par la Commission à Bruxelles: le retard dans les discussions entre le gouvernement et les créanciers qui ont «causé de l’incertitude», comme le souligne, par exemple, le site de L’Express qui reprend la dépêche AFP. L’article du Monde, réalisé avec l’AFP et Reuters, se contente de constater que «les trois plans d’aide consécutifs accordés à la Grèce depuis 2010 par l’Union européenne et le Fonds monétaire international, en échange de réformes, n’ont toujours pas remis le pays sur les rails de la croissance.» Mais pourquoi diable? Ces trois plans, ces réformes auraient-elles une part de responsabilité dans cette affaire ? On n’en saura pas davantage.

La Grèce, mauvaise conscience de la magie des réformes

Dans le monde des médias français, la croissance grecque semble vivre dans un monde séparé des plans d’austérité et des excédents budgétaires. C’est d’ailleurs bien ce que sous-entendait cet extraordinaire éditorial du Monde du 22 avril dernier titré majestueusement «la bonne surprise grecque» qui se réjouissait avec emphase de l’excédent budgétaire primaire grec, largement supérieur aux attentes, et y voyait la certitude pour la Grèce d’une restructuration de la dette. La nouvelle récession du pays est pourtant bien le fruit de cet excédent qui n’est rien d’autre qu’une ponction de la richesse nationale pour le seul bénéfice de ses créanciers, alors même que l’outil productif du pays est inexistant. Ce sont les hausses d’impôts, les baisses de retraites, les coupes budgétaires diverses qui ont causé cet excédent dont Le Monde se réjouissait tant et qui, partant, ont détruit l’économie grecque. Mais qu’importe, dans le monde des médias français, l’excédent budgétaire n’a que des vertus.

Ce refus entêté de faire le lien entre réforme, austérité et récession est évidemment symptomatique du biais idéologique du traitement de l’actualité économique. Et, dès lors, le silence de nos chroniqueurs et éditorialistes de tous poils, toujours prompts à nous vendre la lessive austéritaire si bonne pour nous, se comprend. Certes, l’intérêt de la chronique économique devrait être de faire le lien entre des faits liés que l’on voudrait voir séparés. Mais, plus que jamais, la Grèce est la mauvaise conscience de la «magie des réformes», alors même que les ondes et les pages françaises débordent de louanges pour ces mêmes réformes qui régleront tout. Il est donc plus simple d’éviter de parler de cas gênant. Et si l’on y revient dans les jours qui viennent, gageons que ce sera pour insister sur la magnanimité des créanciers qui acceptent de renoncer à des intérêts futurs qu’ils sont certains de ne pas toucher, compte tenu de la politique qu’ils imposent à la Grèce, et non pour dénoncer et démonter cette politique.

Surtout, tous ont défendu avec acharnement la dureté des Européens en 2015 face au «premier» Alexis Tsipras, celui de janvier 2015, qui ne disait pourtant que ce qui est évident désormais: la priorité au remboursement des créanciers, première justification de l’austérité, tue l’économie grecque et donc la capacité de remboursement des Grecs. L’échec du troisième programme, largement prévisible, est aussi l’échec des chroniqueurs économiques et de leurs croyances [1]. La leçon est sans doute encore trop amère pour qu’elle soit acceptée. Les Français attendront donc encore pour comprendre ce qui se passe en Grèce. (Article pour Arrêts sur Images du 22 mai 2017; titre de la rédaction A l’Encontre)

[1] Car, au-delà des croyances, les «réformes» ont abouti à ce que le docteur Babis Zabatis, chef de service oncologie et chimiothérapie d’Ágios Sávvas d’Athènes, grand Hôpital de la Santé Publique, a confié au réalisateur et journaliste Italien Fulvio Grimaldi: «La crise pour nous, c’est surtout le manque cruel de personnel. Plusieurs milliers de médecins ont quitté la Grèce. Au lieu de onze internes dans mon service par exemple, je n’en dispose que de deux actuellement, nous ne pouvons plus faire face aux besoins des patients… alors ils meurent, ou ils meurent plus rapidement car souvent ils restent longtemps sans traitement. Fait alors nouveau… nous avons remarqué une surmortalité, jamais vue jusque-là chez les médecins. Depuis ces trois ou quatre dernières années de la crise, nous ne tenons plus la route de notre mission, nos efforts sont surhumains, j’ai perdu ainsi cinq collègues, d’un cœur qui lâche, d’un AVC… voire, d’un cancer fulgurant. C’est terrible…» (Greek Crisis)

Grèce. La trajectoire du PIB grec et celle du QI des journalistes économiques

 

Regard caméra : la rubrique de Panagiotis Grigoriou

Panagiotis  Grigoriou est Ethnologue et historien, chroniqueur, analyste, initiateur d’un concept de tourisme alternatif  et solidaire en Grèce. Le regard de l’historien et de l’anthropologue sur l’actualité et le vécu de la crise grecque.

Regard caméra ou l’accompagnement du réalisateur Fulvio Grimaldi qui a interviewé trois personnalités politiques toutes issues de la gauche grecque (dans l’ordre, Alékos Alavános, Katerína Thanopoúlou et Panagiótis Lafazánis), et aussi, Babis Zabatis, chef de service chef au pôle oncologie et chimiothérapie à l’hôpital (Santé Publique) Ágios Sávvas d’Athènes, et enfin Polyxeni, pharmacienne et responsable volontaire au Centre Solidaire médical d’Ellinikón (MKIE), au Sud d’Athènes.

Regard caméra

Période quasiment estivale. Aux dires de tout le monde, le gouvernement brasse beaucoup d’air ces derniers jours. La prétendue fameuse “controverse” au sujet de la restructuration la dette grecque, c’est une arlésienne. Alexis Tsipras et les siens prétendront une fois de plus qu’il y aurait blocage dans les “négociations” entre “nous” et la Troïka élargie ; tout cela bien entendu, dans l’indifférence générale. Réalités fallacieuses, futur suspendu.

Temps du… renard. Athènes, mai 2017

Les Grecs aiment se raconter volontiers que l’air du temps actuel, est de ce “temps du renard” forcément, autrement-dit, qu’il faut se méfier de tout et de tous et que la suspicion, elle règne naturellement partout en maître. Et c’est très précisément ce temps du… renard, que le réalisateur et journaliste Italien Fulvio Grimaldi et sa compagne Sandra , ont voulu filmer la semaine dernière à Athènes. Fulvio prépare un documentaire, en partie consacré à la crise grecque, surtout maintenant… que “l’affaire grecque est certainement réglée”, d’après la doxa des médias dominants.

Je l’ai accompagné dans sa démarche athénienne, ainsi nous avons croisé nos regards, comme nos manières d’interpréter les gestes et les paroles des personnes et des situations rencontrées. Pour Fulvio, la crise grecque est déjà moins visible de première vue et certainement plus… sournoise que la crise argentine entre 1998 et 2002. L’effondrement grec n’est pas si soudain, ni autant généralisé d’ailleurs. Pourtant, la situation du pays n’est plus du tout celle de 2010, et cela bien entendu, au-delà des apparences, celles notamment familières au… champ visuel touristique.

Fulvio, pour les besoins de son film a interviewé trois personnalités politiques toutes issues de la gauche grecque (dans l’ordre, Alékos Alavános, Katerína Thanopoúlou et Panagiótis Lafazánis), et aussi, Babis Zabatis, chef de service chef au pôle oncologie et chimiothérapie à l’hôpital (Santé Publique) Ágios Sávvas d’Athènes, et enfin Polyxeni, pharmacienne et responsable volontaire au Centre Solidaire médical d’Ellinikón (MKIE), au Sud d’Athènes.

Fulvio Grimaldi en filmant. Athènes, mai 2017
Alékos Alavános, interviewé par Fulvio Grimaldi. Athènes, le 27 mai 2017
Katerína Thanopoúlou, interviewée par Fulvio Grimaldi. Athènes, le 27 mai 2017

Alékos Alavános, ancien chef de SYRIZA avant Alexis Tsipras, ayant quitté cette formation dite de la “Gauche Radicale”, est depuis 2013 le chef du petit mouvement du ‘Plan-B’ (dont le programme prône le retrait de la Grèce de la zone euro, voire de l’UE).

Nous l’avons rencontré sur la terrasse d’un café athénien. Il venait tout juste de participer au débat organisé autour du livre de Katia Charalambaki, psychiatre et analyste: “Familles grecques aux années difficiles. Notes d’une psychiatre” .

Alékos, nous a d’abord exprimé… combien il s’est senti gêné en participant à un tel débat… sur le livre de son épouse (Katia Charalambaki) ! L’ouvrage, évoque d’abord un certain nombre d’expériences (cas cliniques) et en même temps témoignages, tous issus de ceux qui s’expriment (si possible) devant leur psychothérapeute. L’initiation (au sens je dirais multiple et entier du terme) de la crise grecque (économique et sociale), au même titre que sa pérennisation par la suite, auront profondément bouleversé la vie familiale, du point de vue matériel (survie, ressources) et ainsi psychique. Inévitablement, les relations entre ses membres en sortent bouleversées. En réalité, le lien familial a énormément souffert depuis la crise, et dans de bien nombreux cas, il n’existe plus tout simplement, estime alors Katia Charalambaki.

Alékos Alavános, présentation du livre de Katia Charalambaki. Athènes, mai 2017
Panagiótis Lafazánis, interviewé par Fulvio Grimaldi. Athènes, le 28 mai 2017
La réunion nationale de l’Unité Populaire. Athènes, le 28 mai 2017

Ainsi, pour la thérapeute familiale confrontée à ces expériences si nouvelles, une autre approche devient alors nécessaire. Pour y arriver, Katia Charalambaki a également voulu évoquer l’œuvre de ceux qui par le passé, l’avaient influencé dans sa pratique et dans ses travaux et cela de manière essentielle. Notamment, l’anthropologue Américain Gregory Bateson , le psychiatre Mony Elkaim , et le psychologue Belge Jacques Pluymaekers .

Alékos Alavános, architecte et aussi psychanalyste de formation, se dit autant conscient de cette nécessité… “Il faut aller plus loin, bien au-delà” comme il dit, “en termes de sens”. Ceci, est évidemment valable également en politique, “toute réorientation radicale du pays, surtout pour ce qui est de l’euro et de l’UE, doit être expliquée, portée et profondément soutenue pour ne pas dire initiée, d’en bas. SYRIZA a commis un énorme crime politique… Tout est beaucoup plus dur maintenant” (cité de mémoire).

Katerina Thanopoúlou (elle a quitté le Comité Central SYRIZA pour rejoindre l’Unité Populaire en août 2015), ex-vice-présidente de la Région d’Attique chargé des Affaires Sociales, partage pour ainsi dire ce même avis. “La réaction doit s’organiser d’en bas… sauf qu’elle ne vient pas”. Au même moment, un animal si bienveillant, avait-il… enveloppé de tout son regard la camera de Fulvio Grimaldi durant une bonne partie de l’interview de Katerina. La réaction, elle doit certainement venir de… quelque part, c’est évident.

Monument à la gloire des combattants communistes (KKE). Athènes, mai 2017
Cabane d’un sans-abri. Athènes, mai 2017
Un autre regard… sur la camera de Fulvio Grimaldi. Athènes, mai 2017

Plus… fantaisiste dans ses prévisions je dirais, Panagiótis Lafazánis estime de son côté, “qu’un grand mouvement de révolte est en train de couver et que par exemple, à l’occasion de la date du 5 juillet, c’est-à-dire, deux ans tout juste après le référendum de 2015, ce grand moment du ‘NON’ du peuple grec, ce même peuple se mobilisera”. Le chef de l’Unité Populaire, avait auparavant participé à une réunion du Comité national de son parti. Vers la fin des… travaux, la salle se vidait ainsi peu à peu.

“Camarades, je pense qu’il faut faire venir Mélenchon, dans le cadre des actions de l’Unité Populaire. Bonne idée, non ?” Voilà pour ce qui tient de la dernière idée… comme du dernier orateur. En somme et sans fioritures, après deux ans de “pouvoir” SYRIZA, le pays s’est en réalité… vidé de sa gauche, sa page avait été ainsi tournée, pour ne pas dire déchirée par Alexis Tsipras du paysage politique (et désertique) grec.

Période quasiment estivale, et les Athéniens se rueront sur les plages de l’Attique. Maria la voisine qui s’en sort tout juste, femme aux faibles revenus… faiblement renforcés par ceux de Thanássis, son compagnon, ne s’intéressera plus jamais à la politique (celle des partis) et encore moins aux déclarations d’Alékos, de Katerina ou de Panagiótis, censées ou pas d’ailleurs.

“Il y a un temps pour tout… Thanássis et moi, nous partons enfin durant ce long week-end à Kythnos, notre si belle Cyclade. Nous avons trouvé une chambre pour 40€ par jour, car en plein été c’est impossible. Je ne me plains pas, je travaille… à mon compte et à ma manière. L’État, ainsi que les politiciens sont nos ennemis. Ils veulent nous exterminer. Résister pour survivre, c’est aussi avoir le moins possible de relations avec l’État et avec l’administration. Nous vivons avec peu de moyens et peu de besoins, mais ce peu est bien à nous. En plus, nous n’avons aucune dette, c’est aussi primordial.”

Poésie et peinture: “Temps dur”. Athènes, mai 2017
Au port du Pirée. Mai 2017
Thémistocle… porte d’entrée pour la croisière. Le Pirée, mai 2017
Au port du Pirée, café en faillite. Mai 2017

Au même moment à Athènes, ceux par exemple de la cabane des sans-abri (animaux compris), s’agissant d’un ancien kiosque… reconverti, installé en d’autres temps et circonstances près de l’Hôpital Ágios Sávvas, ceux-là ne partiront pas, sauf qu’ils apprécient comme rien au monde, tout simplement la fin de l’hiver.

Devant leur kiosque, un monument du parti communiste grec (KKE), célèbre… seul la mémoire des combattants qui sont tombés à la bataille d’Athènes (Guerre Civile, décembre 1945), “contre la classe bourgeoise et contre l’impérialisme Anglais”. Fulvio a fait remarquer que ce petit monument est bien invisible, en réalité, il est condamné à l’oubli, signe des temps sans doute.

Et au Pirée, tandis que la croisière peut toujours s’amuser, certains cafés resteront fermés, nous l’avons déjà évoqué, la crise grecque est déjà moins visible de première vue, et certainement plus… sournoise que la crise en Argentine. L’effondrement grec n’est pas soudain, ni général d’ailleurs. Sauf à Ágios Sávvas, grand Hôpital de la Santé Publique, spécialisé en cancérologie. Nous y avons rencontré Babis Zabatis, chef de service oncologie et chimiothérapie.

Polyxeni, au Centre médical solidaire d’Ellinikón. Le 29 mai 2017
Emballage d’un médicament. Prix en drachmes. Ellinikón, mai 2017
“Solution claire ou la crise”. “Quotidien des Rédacteurs”, le 27 mai
“Le pas suivant d’Alexis Tsipras”. “Ta Néa”, 27 mai
Terrasse d’un café à Athènes. Mai 2017
“Schäuble… Con”. Athènes, mai 2017

Souriant devant la camera de Fulvio Grimaldi (29 mai), c’est par toute sa bonté d’abord, que le docteur Babis Zabatis tenta en vain d’éponger cette amertume de l’air du temps actuel, “temps de renard” forcément.

“La crise pour nous, c’est surtout le manque cruel de personnel. Plusieurs milliers de médecins ont quitté la Grèce. Au lieu de onze internes dans mon service par exemple, je n’en dispose que de deux actuellement, nous ne pouvons plus faire face aux besoins des patients… alors ils meurent, ou ils meurent plus rapidement car souvent ils restent longtemps sans traitement. Fait alors nouveau… nous avons remarqué une surmortalité, jamais vue jusque là chez les médecins. Depuis ces trois ou quatre dernières années de la crise, nous ne tenons plus la route de notre mission, nos efforts sont surhumains, j’ai perdu ainsi cinq collègues, d’un cœur qui lâche, d’un AVC… voire, d’un cancer fulgurant. C’est terrible…”

Polyxeni, pharmacienne volontaire au Centre médical Solidaire d’Ellinikón au sud d’Athènes a également répondu aux questions de Fulvio et de Sandra, en plus, dans un italien impeccable (29 mai).

“Le gouvernement Tsipras a enfin ouvert la porte des hôpitaux aux ‘Sans-Sécu’ (près du tiers de la population du pays tout de même). Sauf que le manque de personnel, de matériel, des ambulances… tout cela rend de fait la situation ingérable. La prise en charge est longue, trop longue, six mois d’attente pour un malade souffrant de cancer devient alors synonyme de… condamnation, puis, il y a l’épineux problème des médicaments. Même au cas où il ne reste qu’une participation à régler pour les patients, nombreux sont ceux qui ne le peuvent pas, assurés ou non d’ailleurs. Ils arrivent finalement au Centre médical Solidaire, pour que nous fournissions tous ces médicaments gratuitement, autant que le lait pour bébés ou encore les couches-culottes.”

Toujours à Ellinikón et sur le coin d’une étagère ainsi nommé… “Musée de la drachme”, les pharmaciens du Centre, collent les emballages de certains médicaments remarqués, car datant du temps d’avant, aux prix exprimés en drachmes. Humour ?

“Ne jamais oublier notre poète Elytis”. Archives à Athènes, mai 2017
“Taxi pour animaux”. Athènes, mai 2017
La demeure du Général Ioánnis Metaxás. Kifissiá, mai 2017

Les journaux quant à eux, ils préféreront s’en inquiéter de la dernière (supposée) négociation entre Tsiprosaures et Troïkans ; “Une solution claire ou sinon la crise” (“Quotidien des Rédacteurs”), ou: “Le pas à faire d’Alexis Tsipras” (devant le précipice), (“Ta Néa”). Kóstas Zachariadis, directeur du groupe des parlementaires SYRIZA bien installée dans l’air du temps, vient de déclarer (radio 99,5 FM, 26 mai 2017):

“Nous, nous le confessons. Nous disons que le pays est au garde-à-vous, il est sous tutelle. Essentiellement, pour ce qui tient de la politique économique et fiscale, nous co-gouvernons avec les institutions, avec la Troïka. Et alors à plusieurs reprises, ils s’emparent de notre main et pour tout dire, ils rédigent ainsi directement nos lois.” C’est le stade suivant de la métadémocratie, après avoir évidemment “gouverné” par décrets ou par ordonnances.

J’ai montré à Fulvio la demeure du Général Ioánnis Metaxás à Kifissiá, quartier de la grande bourgeoisie grecque. En dépit de la fascination de son régime dictatorial (1936-1941), Metaxás était d’abord plus proche des démocraties occidentales que de l’Axe sur le plan diplomatique. Mussolini lui envoya le 28 octobre 1940 un ultimatum prévu pour être inacceptable par l’intermédiaire d’Emanuele Grazzi, alors ambassadeur d’Italie en Grèce. Grazzi s’était rendu à Kifissiá à 3h du matin en ce 28 Octobre, exigeant que La Grèce autorise l’occupation par les armées italiennes de tous ses sites stratégiques. Metaxás a eu son célèbre mot qu’il répondit: “NON” dans cette maison.

Camion orné. Le Pirée, mai 2017
Les chattons… nouveaux. Athènes, mai 2017
En Golfe Saronique, années 1960. Souvenirs !

L’Italie envahit le 28 octobre la Grèce depuis son protectorat albanais, déclenchant la guerre entre les deux pays. La défense grecque fut héroïque, repoussant les Italiens en Albanie. Mussolini a perdu sa… guerre, cela jusqu’à l’intervention d’Hitler en avril 1941. “C’est notre histoire commune”, avons-nous dit, Fulvio et moi. C’était le temps du ‘NON’ mais les temps historiques peuvent changer.

Au Pirée, certains camions… passéistes demeureront ornés des symboles du pays, les chattons nouveaux sont déjà nés, puis, dans les quartiers aisés de la Riviera d’Athènes, certains… professionnels proposent leurs services… de taxi pour animaux de compagnie.

Période quasiment estivale. Le gouvernement brasse beaucoup d’air ces derniers jours, peine perdue.

Temps actuel, “temps de renard” forcément, sous le regard alors impénétrable des animaux adespotes (sans maître) face à la mer. Regard camera ?

Animal adespote. Riviera d’Athènes, mai 2017
* Photo de couverture: Babis Zabatis, chef de service oncologie et chimiothérapie, interviewé par Fulvio Grimaldi. Athènes, le 29 mai 2017

mais aussi pour un voyage éthique “De l’image à l’imaginaire: La Grèce, au-delà… des idées reçues !” http://greece-terra-incognita.com/

Les espagnols protestent contre l’austérité

Manifestation massive à Madrid pour « la dignité » de l’emploi Par latribune.fr  28/5/17

Malgré le retour de la croissance depuis 2014, beaucoup d’Espagnols peinent à retrouver des conditions de vie décentes. Ils sont plusieurs dizaines de milliers à être descendus dans la rue pour protester contre l’austérité.

Deux mois après la première marche, des dizaines de milliers d’Espagnols ont participé samedi à une « marche de la dignité » à Madrid pour rejeter la politique du gouvernement conservateur et dénoncer « conditions de travail misérables » et « salaires infimes ». Le nombre de manifestants a été évalué à 6.000 par la préfecture et 200.000 par les organisateurs de la marche. L’une des cibles était la réforme du Code du travail adoptée en 2012 par le gouvernement de Mariano Rajoy, qui a contribué au reflux du chômage au prix d’une grande précarisation.

C’est une manifestation « pour démontrer que l’Espagne idyllique qu’ils nous vendent n’est pas celle que nous connaissons ». « Ce gouvernement nous broie« , avait déclaré un organisateur, Victor Jiménez, dans une vidéo diffusée avant la marche, à laquelle appelaient des dizaines de syndicats et organisations de gauche. Derrière la banderole « pain, travail, toit et égalité », plusieurs colonnes de manifestants – venus de tout le pays – ont convergé pour remonter la principale avenue madrilène, Gran Via.

Après sept années de crise économique, l’Espagne avait retrouvé en 2014 la croissance. Son taux de chômage, qui avait frôlé les 27% début 2013, avait ensuite nettement reflué. Il s’est établi à 18,7% au premier trimestre 2017. Mais « l’emploi actuellement créé, c’est un emploi précaire, avec des conditions de travail misérables et des salaires infimes« , avait dénoncé avant la marche une organisatrice, Silvia Salamanca, ajoutant:

« Le droit du travail, ils nous l’ont réduit au droit à travailler aux conditions que nous impose le patronat ».

La réforme de 2012 a notamment réduit drastiquement les indemnités de licenciement et autorisé les licenciements collectifs sans motif économique.

Le « parti le plus corrompu d’Espagne » appelé à partir par les manifestants

Maria Luisa Rodriguez, aide à domicile de 44 ans, employée par une société privée pour la ville de Léon (nord), se plaignait de gagner moins de 800 euros, à temps partiel subi: « Nous sommes à disposition du matin au soir, mais ils me paient seulement 27,5 heures, car c’est sans compter les temps morts ni les trajets« , a dit à l’AFP cette manifestante. Le salaire minimum – augmenté de 8% en début d’année – est de 825 euros mensuels (sur 12 mois) en Espagne.

De nombreuses pancartes appelaient au départ du Parti populaire (PP) au pouvoir depuis 2011, fustigé comme « le parti le plus corrompu d’Espagne« . Au même moment, M. Rajoy revendiquait, lors d’un meeting du PP sur l’île Majorque, « la création de 1,5 million de postes de travail depuis trois ans« .

« Il faut maintenir les politiques économiques et les réformes menées à bien parce qu’elles ont fonctionné », a dit M. Rajoy, gouvernant actuellement sans majorité parlementaire.

http://www.latribune.fr/economie/international/manifestation-massive-a-madrid-pour-la-dignite-de-l-emploi-725003.html

Les réfugiés semaine 22

03/6/17  Évacuation des migrants et réfugiés du camp Elliniko : A l’aube ce vendredi matin a commencé l’évacuation complète des locaux de l’ancien aéroport en grec, Elliniko, qui était devenu un centre pour les réfugiés et les migrants , et le processus a été achevé en fin d’après – midi. À 07:00 le 1er groupe de migrants et réfugiés sont montés à bord des autobus pour Thèbe. Peu après, vers 11 heures, 210 immigrants qui se trouvaient dans le stade de hockey sont montés à bord des bus. Selon un porte – parole de la police, la mise en œuvre de la planification a commencé depuis dix jours. Les familles, soit environ 500 personnes, seront transférées à la nouvelle structure de Thèbes, alors que les hommes, à peu près 100, partageront des structures à Thèbes, Derveni et Oinofyta. Trois familles seront envoyées à Kavala. Le ministre de la politique de migration, Yiannis Mouzalas , a suivi la procédure et se rendra ensuite à Thèbes.Selon les sources de la police, environ 10% n’ont pas exprimé le désir de partir, et pour ceux là, leur transfert sera négocié avec la participation des négociateurs grecs, des interprètes de la police et des représentants de l’Organisation internationale pour les migrations.

vidéos: https://youtu.be/Bdj9IXPg0i0 https://youtu.be/4d-LX3l5QMc
images prises par les migrants :https://www.facebook.com/100013944220415/videos/265005613974244/

ANA-MPA .Interrogé sur la raison pour laquelle les journalistes n’ont pas eu accès à Elliniko, le secrétaire général du ministère des Migrations, Yiannetos Filippakos a soutenu que dans un «plan opérationnel, certaines règles doivent être tenues pour protéger la phase initiale du plan».

30/5/17 Athènes et Berlin veulent freiner le regroupement familial des réfugiés : Athènes et Berlin se sont mis d’accord pour freiner les transferts de Grèce vers l’Allemagne des réfugiés qui peuvent y prétendre au nom du regroupement familial. Le quotidien grec Journal des rédacteurs a reproduit ce lundi 29 mai, comme preuve, une lettre en ce sens du ministre grec chargé de la Politique migratoire.

« Les transferts de réfugiés vers l’Allemagne, dans le cadre du regroupement familial, seront ralentis comme convenu », écrit Yannis Mouzalas, le ministre grec chargé de la Politique migratoire, dans un courrier adressé au début du mois au ministre allemand de l’Intérieur, Thomas de Maizière.

Pour Yannis Mouzalas, c’est l’Allemagne qui est à l’origine de cet accord qui prévoit une limitation provisoire du nombre des réfugiés transférés chaque mois de la Grèce vers l’Allemagne. Selon le ministre grec, plus de 2 000 personnes seront affectées, et certaines d’entre elles devront attendre des années avant de pouvoir se rendre en Allemagne.

Une députée allemande de la gauche radicale Die Linke, Ulla Jelpke, avait affirmé de son côté dans les médias, que le gouvernement allemand a plafonné en avril à 70 par mois le nombre de « relocalisations » de réfugiés de la Grèce vers l’Allemagne, dans le cadre du regroupement familial.

Les règles européennes en matière d’asile prévoient que les transferts doivent se faire dans un délai de six mois après l’acceptation de la demande de regroupement familial, par le pays d’accueil.

http://www.rfi.fr/europe/20170530-refugies-migrants-athenes-berlin-regroupement-familial-ue

24/5/17 La Suisse ne désespère pas de renvoyer des demandeurs d’asile en Grèce : La Suisse n’exclut pas une réactivation du mécanisme qui consiste à renvoyer les demandeurs d’asile dans le pays par lequel ils sont entrés en Europe, suspendu pour la Grèce depuis 2011. Mais pour Simonetta Sommaruga, en visite à Lesbos et à Athènes, cela prendra du temps.

La Grèce a été exclue du système dit de Dublin après plusieurs condamnations par la Cour européenne des droits de l’homme pour ses mauvaises conditions d’accueil. En visite sur l’île de Lesbos lundi et mardi à Athènes, la conseillère fédérale Simonetta Sommaruga a pu constater que si des progrès ont été fait, la réactivation de Dublin, qui permet de renvoyer les demandeurs d’asile dans le pays par lequel ils sont entrés, ne pourra pas se faire «immédiatement».

Lire aussi: A Lesbos, les ONG seules face au désespoir des migrants

En compagnie du ministre grec de l’immigration, la conseillère fédérale a d’abord visité Moria, le centre de premier accueil pour réfugiés et migrants, une sorte de prison à l’air libre, entourée de haut grillages et de fils barbelés. Dans ce «hotspot» géré par le gouvernement, seule une partie des réfugiés et migrants peuvent se déplacer librement. Ceux qui ont vu leur demande d’asile refusée attendent, enfermés, d’être renvoyés en Turquie comme le prévoit l’accord Union européenne-Turquie. Signé il y a un peu plus d’un an, il a permis de réduire considérablement le nombre d’arrivées de migrants et réfugiés sur les îles grecques.

Conditions de vie très difficiles

Ceux qui vivent à Moria décrivent des conditions de vie très difficile, comme Salif Be Mouamar, un Camerounais de 28 ans, venu discuter, les mains à plat sur le grillage: «La nourriture ne nous suffit pas. Dernièrement, on nous a donné un matelas, mais avant, on dormait sur des couvertures par terre. Et pour avoir de la lumière dans notre chambre, on doit payer un entremetteur pour tirer un câble du générateur, illégalement.»

L’hiver a été la période la plus difficile, alors que cinq personnes sont décédées à cause des mauvaises conditions d’accueil. Alors qu’en septembre dernier, le Haut-commissariat des Nations-unies pour les réfugiés avait proposé un plan pour améliorer les conditions d’accueil avant l’arrivée du froid, les conteneurs n’ont été installés sur le site que récemment. Malgré la neige, le jeune Camerounais a passé plusieurs mois sous la tente et se plaint aujourd’hui de sinusites chroniques. Mais ce qui l’épuise le plus, c’est la lenteur de la procédure d’asile. Il est ici depuis sept mois, il n’a obtenu son premier entretien pour obtenir le statut de réfugié que quatre mois plus tard – et depuis, il attend.

Le gouvernement grec a fait des efforts

Pour Simonetta Sommaruga, le gouvernement grec a fait des efforts pour améliorer le service d’asile, «encore inexistant il y a quatre ans», rappelle-t-elle, mais «les migrants doivent attendre des semaines, parfois des mois pour obtenir une décision sur leur cas». La Suisse a choisi de l’aider à alléger son fardeau en participant volontairement au programme européen des relocalisations de réfugiés. 600 personnes doivent être envoyées en Suisse d’ici la fin de l’année, tandis que 317 sont déjà arrivées. Selon elle, cette solidarité n’est pas gratuite. Au sein du système dit de Dublin,  «tout le monde doit faire son devoir», même si elle se dit consciente au vu de la situation que «cela va prendre du temps».

La Suisse apporte également une aide financière indirecte à la Grèce. Elle a versé en tout 330 000 Francs suisses à l’organisation non gouvernementale Metradrasi pour des postes de traducteurs et d’interprètes. En 2015 et 2016, le HCR a reçu 870 000 Francs suisses pour ses opérations sur les îles. Et la Suisse finance également une unité de soins médicaux de base dans le camp de Kara Tepe à hauteur de 160 000 francs suisses pour encore au moins six mois.

https://www.letemps.ch/suisse/2017/05/24/suisse-ne-desespere-renvoyer-demandeurs-dasile-grece

21/5/17 « Nous sommes cent mille pour les migrants » : Samedi 20 Mai 2017, à Milan, ils étaient dix fois plus nombreux que prévu. Cent mille personnes ont défilé dans les rues en affirmant que « nous ne construirons pas de murs ». Une information que le Corriere della Sera a choisi de mettre en une avec une impressionnante photographie.

Cette marche pour les migrants a été organisée à l’initiative du maire de Milan, Beppe Sala, après la polémique qui a suivi l’agression au couteau de deux policiers par un jeune italo-tunisien radicalisé. Les manifestants réunis dans la capitale de la Lombardie, la région qui accueille le plus de migrants en Italie, réclament une meilleure politique d’accueil.

Ils ont brandi des morceaux de couverture isotherme, « agités comme des drapeaux et pliés pour en faire des chapeaux, des bandanas, des rubans, des foulards, des couronnes ou des bracelets, selon l’imagination des manifestants, comme pour transmettre l’espoir que ces feuilles qui semblent faites d’or et d’argent ne servent plus de linceuls pour les désespérés qui se sont embarqués sur des radeaux de fortune », écrit le quotidien de Milan, qui note aussi quelques tensions en marge du cortège avec des opposants à la politique d’accueil prônée par la manifestation.

Plusieurs personnalités politiques, et notamment des maires de la région, étaient présents dans le défilé, qui « restera comme le plus grand événement en Italie au cours des vingt dernières années sur la question de l’immigration », a commenté le conseiller aux affaires sociales Pierfrancesco Majorino.

À l’issue de la manifestation, le premier ministre Paolo Gentiloni a quant à lui tweeté « merci Milan, sûr et accueillant ».

Depuis le début de l’année, rappelle l’Agence France Presse (AFP), l’Italie a vu arriver plus de quarante six mille migrants sur ses côtes, soit une hausse de plus de trente pour cent par rapport à la même période l’année dernière. Parallèlement, au moins mille deux cent quarante quatre personnes ont trouvé la mort cette année au large de la Libye, selon l’Organisation Internationale pour les Migrations (OIM).

http://www.courrierinternational.com/une/italie-milan-nous-sommes-100-000-pour-les-migrants

Témoignage: vivre à Athènes en 2017

Depuis 2009, la Grèce est au bord de la faillite. Mise sous tutelle par la Troïka, elle voit s’enchaîner les plans d’austérité. Mais à quoi ressemble la vie des Grecs en 2017?

Un constat social alarmant

Nikos Kokkalis a 35 ans et vit à Athènes. Titulaire d’une licence en sciences politiques, il travaille en tant que traducteur dans le secteur juridique. Il nous raconte les changements survenus dans son quotidien depuis le début de la crise.

« Beaucoup de choses ont changé depuis le début de la crise. Lorsque je suis entré sur le marché du travail, je touchais 800 euros par mois, et j’étais considéré comme un travailleur précaire. Aujourd’hui, je n’en touche plus que 600, et je me sens particulièrement privilégié. Se rendre au travail est devenu beaucoup plus difficile, car la fréquence de passage des bus a été réduite d’1/3. Certains quartiers d’Athènes ne sont carrément plus couverts par le réseau de transport. Beaucoup de mes amis ont quitté le pays, et beaucoup continuent à partir chaque année pour trouver du travail et envoyer de l’argent à leur famille restée en Grèce. La plupart de ceux qui sont restés sont au chômage, ou travaillent pour une misère dans des conditions de précarité extrêmes« , explique-t-il.

Outre le chômage et les conditions de travail, les purges imposées par l’Europe et le FMI ont également impacté les services publics et le pouvoir d’achat: « Tous les prix ont augmenté en raison d’une forte hausse de la TVA et des taxes sur les produits alimentaires. En parallèle, on a subit une baisse des salaires, des pensions de retraites, et des coupes dans les minima sociaux. Les budgets gouvernementaux de la culture, de la santé et de l’éducation se sont effondrés. De plus, la privatisation massive des services publics a produit simultanément une hausse des tarifs et une baisse de la qualité des prestations, comme c’est le cas pour les compagnies aériennes et ferroviaires. Mais ce n’est pas fini, aujourd’hui, c’est l’accès à l’eau qu’ils veulent privatiser« .

Grexit et investissement, le duo gagnant de la gauche radicale

Comme beaucoup de Grecs, Nikos a cru que la situation allait s’améliorer après la première victoire de Syriza début 2015. Toutefois, ses espoirs se sont bien vite envolés. « Je savais que Syriza disposerait de marges de manœuvres très faibles, mais j’avais bon espoir que Tsipras et son parti tiennent tête à la Troïka » confie-t-il. « Mais rien de tout cela ne s’est passé, et il a même cédé à chacune de leurs exigences. Si nous continuons dans la voie de l’austérité, l’avenir s’annonce plus que sombre pour le peuple grec« , ajoute-t-il.

Militant pour l’organisation d’extrême-gauche Xekimina, Nikos a des solutions à proposer pour sortir son pays de la crise. « [La bureaucratie européenne ne connaît que l’austérité néo-libérale. Cette politique est en train de la ronger de l’intérieur, en provoquant la montée des nationalismes, la crise économique, et des disparités croissantes entre les États du Nord et du Sud. La seule solution pour la Grèce, c’est de quitter cette Europe qui se meurt. Une fois la sortie de la zone euro, seule une politique d’investissement audacieuse pourra permettre aux grecs de sortir de la crise]i », explique le jeune hellène. « Nationalisation du secteur bancaire, renationalisation des secteurs économiques clés (énergies, santé, transports, télécommunication…), plafonnement des bénéfices pour les compagnies pétrolières et agroalimentaires, augmentation des impôts pour les 1% de la population les plus riches, politique de grands travaux et embauches massives de fonctionnaires » sont autant de solutions qu’il préconise.

En ce mois de mai 2017, Nikos est vent debout contre la nouvelle réforme des retraites annoncée par le gouvernement d’Alexis Tsipras. En l’espace de huit ans, il s’agit du 10e plan d’austérité imposé à la Grèce par la Troïka. Si le jeune militant parle pour l’instant d’une « mobilisation qui n’a pas l’ampleur des grandes grèves de 2011/2012« , il reste confiant et « croise les doigts pour que la rue l’emporte« , malgré l’adoption de la réforme par le parlement grec jeudi 18 mai 2017.

Une nouvelle grève générale contre la réforme des retraites

vidéo https://www.youtube.com/watch?v=1By8U7vsV70

source de l’article http://www.podcastjournal.net/Temoignage-vivre-a-Athenes-en-2017_a24102.html

 

Athènes menacée de trébucher avec le FMI

publié le 30 mai2017  sur la tribune de Genève

Crise de la dette. Le premier ministre grec reste confiant de trouver une solution avec les créanciers d’ici au 15 juin.

Poussée par Berlin au mariage forcé avec le FMI, malgré scènes et amorces de rupture, la Grèce est désormais confrontée au risque d’une union bancale avec ce gendarme financier, ne réglant pas les lourds arriérés de sa dette.

En décembre 2015, après sa réélection pour un deuxième mandat, le premier ministre Alexis Tsipras lançait l’offensive contre l’implication du FMI dans son programme de redressement conclu en juillet avec les Européens, la jugeant «non constructive et non nécessaire».

Un an et demi plus tard, le virage est complet: pour le ministre des Finances, Euclide Tsakalotos, la participation du FMI est «le meilleur choix». Car entretemps, Alexis Tsipras a tablé sur le FMI pour arracher à la zone euro l’engagement d’alléger la dette publique du pays dont il a fait son cheval de bataille.

Il se fondait sur les règles de l’institution, qui ne lui permettent pas en principe de participer au renflouement d’un pays insolvable. Le «pire choix» selon Euclide Tsakalotos, serait du coup une union bancale, soit un ralliement formel du FMI au programme grec mais sans garantie préalable sur la dette, qui caracole à près de 180% du PIB.

Compromis boiteux

C’est un tel compromis qui a été proposé le 22 mai par l’Eurogroupe, contraignant la Grèce à faire de l’obstruction pour le bloquer. Une telle solution ne réglerait rien pour la Grèce, selon Euclide Tsakalotos, n’apportant pas aux marchés la «clarification» nécessaire sur la dette pour qu’ils refinancent le pays comme prévu à partir de l’été 2018.

Vu d’Athènes, le compromis apparaît juste calibré pour permettre au gouvernement allemand de se présenter aux élections de septembre arqué sur son refus de toute concession envers la dispendieuse Grèce. Athènes se prépare du coup à un nouveau rendez-vous difficile avec ses créanciers, lors de la prochaine réunion des ministres des Finances de la zone euro du 15 juin.

Le tout alors que l’échéance de juillet, quand le pays devra s’acquitter de créances de plus de 7 milliards approche, sans qu’il y ait encore de déblocage de nouvelle tranche de prêts à Athènes.

Euclide Tsakalotos s’est affirmé lundi «confiant» qu’un accord sera finalement dégagé le 15 juin «clarifiant comment la dette grecque peut être rendue viable». Mais Athènes ne dispose pas de beaucoup d’atouts.

La Grèce a été entrainée dans cette partie complexe par le choix de Berlin, soutenue par La Haye et Helsinki, d’imposer la participation du FMI comme condition au renflouement du pays, souligne Georges Pagoulatos, professeur d’Études européennes à la faculté économique d’Athènes.

Le FMI bras armé de Berlin

«Le FMI a servi d’acteur utile à l’Allemagne pour imposer à la Grèce un ajustement très dur», faisant peu de cas de l’acquis communautaire et des règles sociales européennes, face à une Commission européenne dont Berlin «se méfie», juge Georges Pagoulatos.

«Demandes aberrantes», «mauvaise foi», experts «plutôt idiots», données «mensongères»: le gouvernement grec de gauche a longtemps regimbé contre ce mariage forcé, imputant au FMI d’être l’empêcheur numéro un de sortie de crise. La rhétorique était «surtout à consommation interne» visant l’électorat de gauche de Alexis Tsipras, juge Kostas Melas, professeur en finance internationale à l’université Panteion d’Athènes.

Mais elle a fait long feu: Alexis Tsipras s’est finalement résigné à proroger l’austérité jusqu’en 2021, comme l’exigeait le Fonds, en faisant voter à la mi-mai de nouvelles mesures d’économies d’un montant de 4,9 milliards.

Défauts d’expertise

Faute d’arracher en échange des engagements sur sa dette, le gouvernement grec, en chute dans les sondages et à la majorité parlementaire étriquée, est confronté au risque de sérieuses turbulences. Le FMI a aussi laissé des plumes dans l’aventure, contraint à plusieurs reprises de confesser des défauts d’expertise sur la Grèce.

Pourtant, le FMI «a non seulement accepté mais exigé plus de rigueur, pour que le pays puisse tenir des objectifs budgétaires qu’il ne considère pourtant comme ni réalistes ni souhaitables», relève M. Pagoulatos.

Pour M. Melas, le ministre allemand des Finances Wolfgang Schäuble pourrait au final réussir à imposer ses vues, en ayant «utilisé à la fois Tsipras et le FMI». (ats/nxp)

http://www.tdg.ch/economie/Athenes-menacee-de-trebucher-avec-le-FMI/story/27502380

Le collectif en visite au dispensaire Ilion

Visite au dispensaire de santé social et solidaire d’Ilion fin avril 2017

Ce dispensaire est situé à Ilion dans la banlieue nord d’Athènes, il est ouvert depuis avril 2015. Il fait partie des dispensaires qui ne veulent plus de rapports avec Syriza et qui sont très critiques vis à vis de la politique de santé menée par le gouvernement. Nous l’avions soutenu financièrement fin 2016 grâce à l’appel aux dons que nous avions diffusé. Ce dispensaire avait organisé un des accueils de la « caravane solidaire avec la Grèce » d’octobre 2016.

Nous avons été reçu par Dimitrios qui est cardiologue et un des créateurs du dispensaire, il assurait ce jour là la permanence médicale, sa fille Matina (qui était venue nous chercher au métro) a assuré la traduction. Nous avions apporté des médicaments, ils ont été aussitôt triés et rangés par Lina l’infirmière.

Le dispensaire est ouvert à tous ceux qui en ont besoin sans distinction, qu’ils soient Grecs ou migrants. Depuis l’ouverture environ 1500 patients ont été accueillis. De quinze à vingt médecins y interviennent ainsi qu’une infirmière, une assistante sociale et une dizaine de bénévoles qui assurent l’accueil, les prises de rendez-vous et le réconfort des personnes qui poussent la porte du dispensaire.

Les spécialités pratiquées sont multiples : médecine générale, cardiologie, pédiatrie, rhumatologie, psychiatrie, pneumologie etc. … Comme il n’y a pas d’équipement pour accueillir les personnes ayant besoin de soins dentaires, certains dentistes ont accepté de les soigner gratuitement dans leur cabinet.

Le dispensaire propose aussi des activités culturelles, des sorties au cinéma, au théâtre, il possède une bibliothèque. Des fêtes sont aussi organisées, le week-end ou pour le nouvel an. Ce n’est pas seulement un lieu où l’on soigne, c’est aussi un lieu où l’on vient rencontrer d’autres gens, discuter, se réconforter. Quand nous y étions, pas mal de gens sont venus pour boire un café, parler et on voyait que Dimitrios et tous les bénévoles étaient très disponibles pour discuter avec eux. Le dispensaire reçoit aussi des vêtements qui sont donnés à ceux qui en ont besoin.

Les dispensaires « affiliés » à Syriza ferment les uns après les autres parce qu’ils considèrent qu’ils n’ont plus d’utilité avec la loi promulguée au mois d’août 2016 qui institue la possibilité pour tous les Grecs de pouvoir se faire soigner gratuitement même s’ils n’ont pas de couverture sociale. Cependant cette disposition est quasiment inapplicable car les hôpitaux sont surchargés, ils manquent de moyens humain et matériel ce qui fait que les malades doivent attendre plusieurs mois un hypothétique rendez-vous. Ce manque de moyens dans les hôpitaux publics a provoqué l’ouverture de cliniques privées, mais elles ne sont bien sûr pas accessibles aux plus démunis.

Le collectif « Citoyens de Grenoble contre l’austérité en Grèce et en Europe » continuera à être solidaire avec ce dispensaire qui fait un travail formidable.

Nous remercions Dimitrios, Lina, Sylvia, Maria, Menelaos … qui nous ont gentiment accueillis et aussi bien sûr un grand merci à Matina qui a fait office de chauffeur et d’interprète.

Maria, Sylvia et Dimitrios

Naufrages : la rubrique de Panagiotis Grigoriou

Panagiotis  Grigoriou est Ethnologue et historien, chroniqueur, analyste, initiateur d’un concept de tourisme alternatif  et solidaire en Grèce. Le regard de l’historien et de l’anthropologue sur l’actualité et le vécu de la crise grecque.

Naufrages

 
Un naufrage sociétal, c’est parfois long à mettre en place. Notre actuel temps, dit de la fin, se prolonge au point de faire oublier que tous les hommes vivant (ou agonisant) dans une même époque et dans un même espace n’ont pas forcément… le même vécu historique. Au soir du jeudi 25 mai, les medias grecs se concentraient déjà sur l’attentat à la lettre piégée qui a blessé l’ex-Premier ministre et banquier Lucas Papadémos. Opéré dans la nuit (du 25 mai), ses jours ne sont pas en danger. Cette même journée du 25 mai, et pour la première fois à Athènes, les livreurs à moto étaient en grève. Dignité, désespoir et journées fort dangereuses.

Lire les titres des journaux. Athènes, mai 2017

Livraison de notre temps, jamais gratuite. On a beau lire les titres de la presse devant les kiosques, en vain ; il ne nous a pas été encore possible d’en trouver la moindre mention. Il faut alors fouiller sur internet, pour découvrir certains chroniqueurs ainsi rendre enfin hommage à nos livreurs à moto.

Maria Louka par exemple, sous le titre “La mort accidentelle d’un livreur à moto” (site “Inside story”, 23/03/2017) : “Il y a quelques jours, il a été tué en pleine rue un livreur à moto durant son temps de travail. Personne n’a été surpris par cet événement tragique. Les accidents de la circulation représentent 53% sur l’ensemble des accidents pour toute la branche restauration. Plus généralement, le… secteur de la livraison incarne à lui seul… ce royaume de l’arbitraire et de l’abolition absolue de ce qui subsiste encore de la protection comme de la législation du travail.”

“En ce 10 mars, l’annonce de la nouvelle de la mort de Mémos a été à peine remarquée par la presse. Ce ne fut pas tout à fait compréhensible sinon, pourquoi un jeune homme de 22 ans, puisse perdre ainsi sa vie, d’ailleurs, la nouvelle n’a pas été jugée bien importante. (…) Pour les vies ‘invisibles’, les morts sont aussi ‘invisibles’. (…) En déjà, leur travail est précaire, ces employés sont des êtres ‘jetables’ et interchangeables.”

La voiture de Loukás Papadémos après l’attentat. Athènes, le 25 mai (presse grecque)
Livreur à moto à Athènes en 2017 (internet grec)
Livreurs à moto, journée d’action, Athènes, le 25 mai (internet grec)
Livreurs à moto, journée d’action du 25 mai (internet grec)

“À l’instar de notre interlocuteur. C’est un jeune homme de moins de 30 ans, qui travaille ces deux dernières années en tant que livreur de produits alimentaires. Il raconte son histoire comme son expérience. Pour le protéger nous maintiendrons l’anonymat. ‘Voyez-vous, dans ce travail nos propres vies sont en suspens. Neuf livreurs sur dix sont payés trois euros de l’heure. Personnellement, j’en reçois quatre, mais cela après accord avec le patron. Pour moi, il n’y aura ni primes, ni congés. Car, comprenez-le bien, c’est un chantage indirect. Cet argent ne me suffit pas pour vivre, c’est évident. J’ai un deuxième emploi pour m’en sortir.”

“Le client veut que sa commande arrive dans moins de quinze minutes et le patron veut être en règle avec le client, mais non pas vis-à-vis de l’employé. Eh bien, le véritable coût de l’opération, il est finalement payé par le livreur. Si vous ne disposez que de 10 minutes pour l’aller et le retour, vous grillerez le feu rouge ou le stop et vous emprunterez le sens unique à l’envers. Je ne dis pas que c’est bien tout cela, mais nous nous mettons nous mêmes de la pression. Quelque chose nous y pousserait. Et notre collègue Mikael qui est mort, il travaillait dans le quartier de l’avenue Kavala sans freins, il a fait un demi-tour, puis, il été… balayé par un camion.”

“Je précise que nos motos exigent de leurs coûts et autres frais d’entretien, qui restent entièrement à notre charge. Sauf que lorsqu’on fait 150 km par jour, la moto doit être révisée tous les mois pour rester en bon état. La mienne, elle exige de nouveau une réparation, ce qui coûtera près de 450 €, que je dois sortir de ma poche. Et entre deux livraisons, on nous demande d’astiquer les toilettes ou de ranger dans les locaux. Nous sommes ces boys à tout faire. Et si quelqu’un d’entre nous alors proteste, les patrons lui disent: ‘Casses-toi si tu n’es pas content, il y a 20 chômeurs dans la file d’attente.’ Pour les patrons, nous sommes absolument jetables. Les clients de leur côté, ils sont indifférents. Ils ne se soucient que d’être livrés immédiatement. Il n’y a aucune solidarité.”

Univers et réalité décomposés. Athènes, 2013
Même lieu. Athènes, mai 2017
Autocollant… décomposé. Athènes, mai 2017

Nous voilà donc en ce début du XXIe siècle, où nous respirerions les décompositions (découpes) du réel. Tout est parfois dans les détails. Livreurs à motos omniprésents, figures principales mais largement ignorées du panorama de la ville.

Habituellement, nous traitons ces livreurs comme des robots, à la manière des rouages des machines, un peu comme déjà dans les Temps Modernes de Chaplin. Livreurs anonymes forcément, que nous ne nommons pas, des extensions en quelque sorte de leurs motos.

En attendant… la généralisation des robots, en ce début du XXIe siècle et en ce mois de mai, nous commémorons (lorsque nous n’avons pas la mémoire courte), le moment précis de la première grande manifestation populaire à Athènes contre le… proto-mémorandum de Georges Papandréou.

C’était le 5 mai 2010. La rue Stadíou était alors remplie de gens qui manifestaient dans l’une des plus importantes manifestations dans la capitale, contre l’adoption imminente du premier protocole signé entre la Troïka et le “gouvernement” Papandréou. Soudain, de cette foule, se détache un groupe de douze personnes cagoulées qui se dirigent vers la librairie “Ianos”, et vers l’agence de la banque “Marfin Bank” au numéro 23 de la rue Stadíou. Ces individus cagoulés brisent alors les fenêtres et lancent à l’intérieur de nombreux cocktails Molotov.

Chez Marfin, huit employés de la banque resteront piégés à l’intérieur qui est ravagé par le feu et où une épaisse fumée rend l’air irrespirable, puisque la seule issue de sortie restera verrouillée. Des employés joignent leurs proches par téléphone… pour leur dire adieu, tandis que d’autres, ils essaient de repérer une fenêtre pour sauter si possible du côté de la rue. Cinq employés ont été sauvés par les pompiers, mais pas tous. Trois jeunes employés et un enfant qui n’était pas encore né ont trouvé la mort: Épaminondas Tsakális (36 ans), Paraskeví Zoúlia (35 ans) et Angelikí Papathanassopoúlou (32 ans), enceinte.

Chez Marfin Bank au 23 de la rue Stadíou, le 5 mai 2010 (presse grecque)
Chez Marfin Bank au 23 de la rue Stadíou, le 5 mai 2010 (presse grecque)
Chez Marfin Bank au 23 de la rue Stadíou, le 5 mai 2010 (presse grecque)
Chez Marfin Bank au 23 de la rue Stadíou, le 5 mai 2010 (presse grecque)

J’y étais presque au moment des faits, je me trouvais de l’autre flanc de la manifestation, à trois cent mètres de la rue Stadíou. La nouvelle a été aussitôt diffusée très rapidement entre nous. Nos cœurs, nos réactions, ont été figés, et ce fut le premier des chocs apportés à la Résistance des Grecs contre le nouveau Régime des mémoranda.

Du 23 de la rue Stadíou, les Athéniens avaient fait depuis, un lieu de mémoire. Ils y déposèrent leurs messages, leurs fleurs, leurs dessins, en somme toute leur douleur et autant indignation. Mais en ce mois de mai 2017, j’ai remarqué que les messages ont été enlevés, et que le bâtiment avait été refait… pour accueillir désormais… la boutique d’une enseigne… mondialisatrice, spécialisée dans la commercialisation des articles de sport. Notre temps actuel de la fin… se prétend en plus sportif. Qui sait ?

Au 23 de la rue Stadíou, lieu de mémoire (2010-2016)
AU 23 de la rue Stadíou… articles de sport. Mai 2017
Alexis Tsipras… qui en rit. Presse grecque, mai 2017

Et en ce temps bien actuel, sportif ou pas, Alexis Tsipras et les siens, apparaissent devant les médias bien décontractés, voire hilares. Un auditeur intervenant en direct par téléphone dans l’émission politique de Lámbros Kalarrytis (radio 90.1 FM du Pirée, semaine du 22 mai), a fait remarquer qu’une telle attitude laisse déjà trahir un cynisme alors certain… et d’ailleurs synonyme d’hybris.

Lámbros Kalarrytis lui répondit que c’est aussi peut-être parce que le pouvoir rend alors absolument fou. Et il y aura toujours ceux qui veulent le conserver à tout prix, le plus longtemps possible. En tout état de cause, Alexis Tsipras se déclare prêt maintenant, à accepter le plan de Wolfgang Schäuble au sujet du prétendu allégement de la dette grecque, ce même plan que le “gouvernement” d’Athènes faisait semblant de rejeter il y a à peine une semaine (médias grecs du 25 mai 2017).

Un naufrage sociétal ou politique, c’est parfois long à mettre en place. Mais pas toujours. D’autres naufrages ou même échouages, nous rappelleront toujours et encore combien cependant notre actuel temps de la fin peut se prolonger.

Avenue d’Athènes, mai 2017
Sans-abri. Athènes, mai 2017

Non loin d’Éleusis près des côtes, le visiteur des lieux désormais sans trop de… Mystères, découvrira ce qui en reste du “Mediterranean Sky”, paquebot construit en 1953 au Royaume-Uni, et qui appartenait à la société “Karageorgis Lines”. Le “Mediterranean Sky” était l’un des deux glorieux navires de ligne de la compagnie et de la ligne entre Patras et Ancône en Italie durant les années 1970 et 1980.

Ces deux navires étaient luxueux et d’abord très en avant sur leur temps. Ils furent équipés entre autres, de cabines de luxe, de deux piscines, d’un bar élégant, ce que la clientèle de l’époque comme de la classe moyenne qui ne voyageait pas encore si fréquemment par avion, appréciait énormément. Le “Mediterranean Sky” a effectué son ultime voyage en Août 1996, entre Brindisi à Patras. En 1999, il fut remorqué à Éleusis où il a chaviré, puis, à jamais abandonné pour des raisons financières.

Le “Mediterranean Sky” au port d’Ancône dans les années 1980. (Internet grec)
Le “Mediterranean Sky”, la Compagnie Karageorgis Lines, document de 1977

En face pratiquement du “Mediterranean Sky”, sur l’île de Salamine, on y distingue la petite et dernière maison où vécut le poète Ángelos Sikelianós (1884 – 1951). Transformée en musée, elle reste cependant le plus souvent fermée, “c’est la crise”, apprend-on alors sur place.

Toujours à Salamine, j’ai rencontré Mihális, retraité et ancien capitaine dans la marine marchande. Il prend toujours la mer à bord de son voilier, acquis au moment où il a quitté comme on dit, la vie active. Le montant de sa retraite… par exacte répartition, a été ramené à 1.100€ mensuels, au lieu de 2.600€ initialement.

“Pourtant, notre Caisse des Marins a toujours été indépendante de toutes les autres structures de ce type. Nous versions nos cotisations bien élevées, de même que nos patrons armateurs, sans la moindre participation ou aide de l’État. Et voilà que notre Caisse a été supprimée, incorporée de force dans le système global, ce dernier se trouve d’ailleurs en pleine décomposition. Nous avons été trompés par ce pays et ses politiciens après tant d’années de service en mer”.

Mihális me raconta par la suite ses histoires du temps des Océans, profondément et peut-être définitivement dégouté de la vie des terriens. Il préfère évoquer son passé en mer, on peut comprendre. Histoires alors comme celle d’un skipper Néerlandais, que Mihális avait croisé au beau milieu de l’Atlantique après une tempête. Il naviguait seul à bord d’un voilier de dix mètres. Des années après, Mihális a pu inviter le skipper Néerlandais à bord de son navire qui se trouvait alors à quai à Rotterdam. Hasard ?

La maison du poète Ángelos Sikelianós. Salamine, mai 2017
Le Post-Future, version d’Athènes, mai 2017
La presse dite people, toujours vaillante. Athènes, mai 2017

Ceux de la terre ainsi ferme, s’occuperont du Post-Future, tandis que leur presse dite People ne connaîtrait pas la crise paraît-il.

La bonne nouvelle de la journée c’est que l’état de santé de Loukás Papadémos se stabilise, le problème c’est que sa… politique est pour autant stabilisée, et cela depuis tant d’années déjà.

Apparition furtive d’une baleine. Presse des Cyclades, 24 mai 2017

L’autre bonne nouvelle nous provient de l’île de Syros, capitale des Cyclades, où une baleine Balaenoptera physalus avait été aperçue près des côtes par les passagers d’un voilier, d’après la presse locale. La Grèce et sa capitale sous les orages du moment, mais passagers, pas d’autre baleine en vue certes, sauf que devant Lexikopoleío, notre librairie francophone (et pas uniquement) d’Athènes, tenue par Odile et Yannis, un majestueux animal adespote (sans maître), n’a décidément que faire du naufrage sociétal, long ou pas à mettre en place.

Animal adespote devant la librairie Lexikopoleío. Athènes, mai 2017
* Photo de couverture: Le “Mediterranean Sky”. Près d’Éleusis, mai 2017

mais aussi pour un voyage éthique “De l’image à l’imaginaire: La Grèce, au-delà… des idées reçues !” http://greece-terra-incognita.com/

Sur les réfugiés semaine 21

25/5/17 Selon le petit journal REFUGIES ET MIGRANTS – continuent d’affluer en Grèce : Les flux de réfugiés vers la Grèce, à bord de bateaux de fortune, se poursuivent à un rythme soutenu alors que la météo devient plus clémente.

164 réfugiés et migrants illégaux sont arrivés sur les îles grecques de Samos, Chios et Kos au cours des dernières 24 heures .

94 sont arrivés à Samos, Chios 58 et Kos 12. Selon les données officielles de la police, il y a 62166 réfugiés et migrants hébergés dans des camps organisés dans tout le pays.

23/5/17 Fermeture de camps de réfugiés en Grèce : l’incertitude

Nul ne va regretter la fermeture de ces camps insalubres et dangereux, mais leurs habitants n’ont toujours pas reçu d’informations sur leur expulsion imminente. Leurs angoisses et leurs peurs ne cessent d’augmenter.

L’évacuation des camps de réfugiés d’Elliniko à Athènes doit débuter le 23 mai dans la matinée. Plus de 800 réfugiés et migrants, pour la plupart originaires d’Afghanistan, vivent actuellement sous des tentes.

Aucune consultation n’a été menée avec les habitants des camps d’Elliniko, tenus dans l’ignorance du moment et du lieu où ils vont être transférés.

Lire aussi : Des réfugiés enfin réunis avec leur famille

Les autorités doivent de toute urgence garantir qu’aucun d’entre eux ne se retrouvera sans abri ni ne sera mis en danger du fait de cette fermeture. Il faut trouver des solutions de relogement sûres et adéquates, qui prennent en compte les besoins particuliers des femmes et des filles.

Des réfugiés dans l’incertitude

Ils ne nous donnent aucune information, ce qui génère beaucoup d’angoisse… Ils veulent nous embrouiller pour que nous ne puissions pas décider et qu’ils décident pour nous. »

Un Afghan sur place

Cet homme avait demandé à se rendre dans les camps entre le 21 et le 23 mai, ce qui lui a été refusé.

Une femme afghane nous a aussi déclaré: « Nous avons demandé à tout le monde, mais personne ne nous dit rien. J’ai vraiment peur de me retrouver à la rue. »

Une autre Afghane a décrit les conditions de vie lamentables à Elliniko, notamment l’état des sanitaires et l’absence d’intimité et de sécurité: « Nous avons connu l’enfer ici. Je n’irai pas dans un autre camp

https://www.amnesty.fr/refugies-et-migrants/actualites/nul-ne-va-regretter-la-fermeture-de-ces-camps-insalubres?utm_medium=email&utm_source=newshebdo

Translate »