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Grève et marche à Athènes contre une réforme du droit de grève

Par Agence Reuters

ATHENES (Reuters) – Plusieurs milliers de Grecs ont manifesté vendredi dans le centre d’Athènes contre des réformes que le Parlement doit adopter la semaine prochaine en échange d’une nouvelle aide internationale.

Une grève, la première de l’année en Grèce, a parallèlement provoqué de nombreuses perturbations dans la capitale.

Le métro d’Athènes, emprunté quotidiennement par 938.000 usagers, est resté portes closes, provoquant d’importants embouteillages dans la ville de 3,8 millions d’habitants.

Les dockers ont paralysé le trafic portuaire et les hôpitaux publics ont dû faire appel à du personnel de remplacement.

D’autres arrêts de travail sont programmés lundi, jour de l’examen par le Parlement d’un projet de loi prévoyant notamment une réorganisation des prestations familiales, la mise en place d’une nouvelle procédure pour les saisies de biens immobiliers et un durcissement des conditions d’appel à la grève.

« Pas touche à la grève ! », « Non à l’esclavage moderne » ou « Soulèvement ! » ont crié des manifestants lors d’une marche qui a rassemblé quelque 20.000 personnes dans le centre d’Athènes.

Des incidents se sont produits devant le Parlement, où les élus débattaient du projet de loi. La police est intervenue brièvement à l’aide de gaz lacrymogène pour disperser quelques individus tentant d’approcher le bâtiment.

Le projet de loi est dénoncé par de nombreux Grecs, qui ont vu leurs revenus chuter et leurs conditions de vie se dégrader fortement depuis le premier plan de sauvetage financier du pays en 2010.

Deux autres plans de renflouement ont été accordés depuis par les Européens et le Fonds monétaire international (FMI).

« Cela revient à abolir le droit de grève. De telles choses ne s’étaient produites que sous la junte », a déclaré un officier de marine à la retraite, George Papaspyropoulos, en référence à la dictature des colonels (1967-74).

« Ce gouvernement n’a de gauche que le nom, mais en réalité, c’est une junte », a-t-il dit.

Le gouvernement est dirigé depuis 2015 par l’alliance de gauche Syriza.

Pour le moment, un syndicat peut lancer un appel à la grève s’il est soutenu par un tiers de ses membres. La nouvelle loi relèverait ce seuil à 50%.

Le gouvernement justifie ces réformes par la nécessité de recevoir de l’argent frais. Le troisième plan de renflouement, toujours en cours, expire en août.

Jusqu’à présent, la Grèce a perçu 40,2 milliards d’euros sur les 86 milliards prévus. Elle espère recevoir prochainement une nouvelle tranche de 4,5 milliards.

Constant Kaimakis vidéos :

les manifestants sont nombreux https://youtu.be/9kyqueOf2YA  https://youtu.be/Nyd41qv-PkE
les manifestants et les lacrymogènes  https://youtu.be/OyP4UG9-qnY
https://youtu.be/j47hGufinTo

A Vaulx en Velin une soirée en soutien au City Plazza

Dans le prolongement de cet article https://www.grece-austerite.ovh/soutenir-le-city-plazza/ le représentant emblématique de City Plazza Giorgos Athanassakis sera présent en France pour alerter sur la situation de cet espace d’accueil pour réfugiés et de la nécessité de les soutenir.

Une soirée est organisée ce mardi 16 janvier 2018 à 19h30 à Vaulx en Velin par : On Vaulx mieux que ça (OVMQC), Éclaireuses Éclaireurs de France, groupe Jean Bart, Comité de solidarité avec le peuple grec (CSPG) Lyonnais.

Projection du film
City Babel. Il faut pas croire
L’histoire d’une famille réfugiée et bloquée en Grèce

Le film la suit dans son quotidien et nous présente sa vie au City Plaza (28 min)
et débat
Avec une présentation par Camille Schnéegans, bénévole au City Plaza,
et Giorgos Athanassakis,
des témoignages d’Éclaireuses et d’Éclaireurs de France
bénévoles en août 201 7,
et des chants improvisés par Émilie Souillot

TRACT SOIREE CITY PLAZA

Écouter son intervention en français lors de la soirée du 26 mai 2016 organisée par Mediapart au Théâtre de la Ville, à Paris https://www.youtube.com/watch?v=Xv03q9Q2NFQ

Grèce : émigration des médecins

« Hémorragie dans la santé : En 10 ans, 12 408 médecins grecs sont partis travailler en Europe

Depuis 10 ans on assiste à une véritable hémorragie dans le secteur de la santé en Grèce avec 12 408 médecins qui ont émigré à l’étranger. Le Président de l’Association des Médecins d’Athènes ( ISA) ne décolère pas : « L’Angleterre, l’Allemagne, Chypre, la Suède, les Emirats Arabes Unis, la France… les accueille, alors que nous les avons formés…nous sommes la « matrice » des ressources médicales pour d’autres pays ! ».

Il dénonce cette fuite dans le domaine vital de la science médicale avec le départ de milliers de médecins, principalement des spécialistes, dans divers pays européens et autres à la recherche d’un emploi qu’ ils ne trouvent pas chez eux.

Si jusqu’en 2009 cet exode concernait principalement de jeunes médecins diplômés, il s’agit depuis 2010 du départ de médecins spécialistes, des médecins qui ont étudié et ont acquis une spécialité grâce à l’investissement du système éducatif et du système de santé en Grèce. Au cours des six dernières années , le nombre de médecins spécialistes fuyant la Grèce a plus que doublé le nombre de médecins non qualifiés.

En 2017, ont demandé et obtenu les certificats nécessaires auprès de l’ISA, 1293 médecins, dont 923 spécialistes et 370 sans spécialité médicale. En 2016 , étaient partis 862 qualifiés et 306 non qualifiés. En 2015 , les départs étaient encore plus importants avec 356 médecins qualifiés et 1165 non qualifiés. En 2014 , on a enregistré une « fuite » au total de 1 380 médecins, dont 1.006 de scientifiques qualifiés. En 2013 , ont quitté 1 488 médecins, avec 1086 d’entre eux qualifiés. 2012 , a été enregistrée comme l’année « noire » de la dernière décennie pour la « fuite » des ressources médicales : ont quitté la Grèce 1 808 médecins avec 1 166 médecins qualifiés.

 » Le chômage, l’ incertitude et le manque de méritocratie poussent le personnel le plus qualifié dans le pays pour chercher sa fortune à l’ étranger. La Grèce s’est maintenant transformée en une matrice d’exportation d’un potentiel médical , mais qui bénéficient à d’ autres pays « , a déclaré le président de l’ ISA, M. George Patoulis.

Selon M.Patoulis la « saignée » des scientifiques n’est pas traitée: « Aucun responsable n’ a traité la fuite des cerveaux. En particulier en ce qui concerne les médecins , la situation est très déprimante. Je crois que si la politique de santé ne change pas, la « saignée » s’intensifiera. On ouvre des postes pour les unités sanitaires locales (Tommy) et on propose des salaires de 1200 euros.

Quelle est l’incitation donnée à un médecin qualifié pour rester en Grèce lorsque vous pouvez demander une position autre rémunération et d’ autres dynamiques en Europe? « Demande M. Patoulis.

De plus ce phénomène de départs des médecins grecs à l’ étranger s’accentue avec le départ à la retraite des médecins du système national de santé (NHS). Selon la Fédération nationale des médecins hospitaliers Association (POEDIN), la nécessité pour les médecins spécialisés dans les hôpitaux du NHS dépasse les 6000 postes. Au ministère de la Santé les données actuelles comptabilisent 7271 médecins du NHS et 2.000 autres médecins auxiliaires .

« Cette inflation de jeunes médecins et la politique de santé inexistante au niveau du gouvernement ont provoqué une situation suffocante pour le monde médical. Dans quel autre pays voit on une situation perverse et paradoxale: un système de santé en effondrement basé sur du personnel âgé , et les jeunes médecins à la recherche d’ un emploi à l’ étranger? Qui, quand et comment transmettre les connaissances dans les hôpitaux grecs aux jeunes médecins ? « note profondément préoccupé M. Patoulis.

CK

Vivre avec la pension des parents

LA MOITÉ DES GRECS VIVENT GRACE AUX PENSIONS DES PARENTS !

Édifiant, le reportage que vient de publier le journal américain Wall Street Journal qui a interviewé de nombreux jeunes forcés de retourner à la maison familiale pour joindre les deux bouts et qui vivent grâce aux pensions des parents retraités.

Ainsi témoigne, Lumbi Nychas, âgé de 33 ans qui il y a 2 ans est revenu dans sa chambre d’enfant, après sa faillite de ses ventes de bijoux. Quelques mois plus tard, il rentra chez lui ainsi que sa sœur, avec son mari et leur fille. Aujourd’hui, tout repose en grande partie sur la pension de leur père âgé de 67 ans.

Comme le décrit le WSJ, le système de retraite en Grèce est devenu un réseau social de facto pour les citoyens les plus vulnérables du pays, avec des millions de personnes âgées qui utilisent leur pension de retraité pour fournir ce qui est nécessaire à leurs familles.

Cette vaste dépendance des pensions explique la douleur ressentie par les Grecs alors que le gouvernement se prépare à présenter une nouvelle série de coupes dans les retraites en 2018 et 2019. Les retraités devraient voir leur pension réduite d’un cinquième, jusqu’à la treizième réduction qui s’applique dès le début du protocole d’accord en 2010.

« Étant donné que la société grecque repose en grande partie sur le paiement des pensions, les dépenses consacrées aux retraites sont plus importantes que les autres formes de dépenses sociales qui pourraient être utilisées pour lutter contre les fléaux de l’Europe, tels que la pauvreté, les taux de natalité, l’inégalité des revenus et l’imprévisibilité de la main-d’œuvre pour l’économie d’aujourd’hui « , a indiqué le journal.

Il poursuit: « Les pensions en Grèce représentent désormais 17,4% du produit intérieur brut, selon les derniers chiffres du ministère grec du Travail, le taux le plus élevé en Europe. En dépit de coupes successives, les dépenses de retraite en pourcentage du PIB ont atteint leur point culminant de la crise, alors que l’économie du pays a diminué de plus d’un quart « .

« Dans les années 1950 et 1960, plus de la moitié des Grecs qui recevaient des pensions n’avaient pas cotisé. Jusqu’en 2011, les coiffeurs, les mannequins et les diffuseurs de recettes de télévision d’Etat occupaient des «emplois lourds et insalubres», pour lesquels une année de cotisation produisait les mêmes avantages que trois années payées par un comptable ou un détaillant » poursuite le Wall Street Journal.

Comme il le souligne, l’abandon de telles exagérations crée le sentiment que les Grecs plus âgés, peut-être sans leur propre responsabilité, ont souffert de l’avenir de leurs enfants et de leurs petits-enfants. Avec le stress d’attirer les électeurs, les gouvernements ont favorisé la retraite anticipée.

« Avec l’effondrement de l’économie grecque et le chômage à 21%, les retraités constituent la principale source de revenus pour la moitié des habitants du pays », note la publication.

Il poursuit: « En 2016, la Grèce a octroyé 30 milliards d’euros en pensions, mais moins de 1 milliard d’euros de prestations de chômage, qui n’indemnise que un grec sur trois au chômage… Le pays dépense moins de 2% du PIB pour soutenir les familles, le logement et la lutte contre la pauvreté ».

Et comme le conclut le Wall Street Journal, tout ceci rend particulièrement douloureux les réductions de pensions exigées par les créanciers internationaux en Grèce, en particulier après de nombreuses coupes précédentes.

CK

De l’interprétation des chiffres de la crise migratoire

La «crise migratoire» n’a pas eu lieu

Par Carine Fouteau Mediapart

Le nombre d’arrivées de migrants ayant traversé la Méditerranée pour rejoindre l’UE a été divisé par deux en 2017 par rapport à 2016 et par cinq par rapport à 2015. La « crise » est terminée. A-t-elle jamais eu lieu ?

La « crise migratoire » est terminée mais les États membres de l’Union européenne n’en finissent pas d’agiter les peurs et de durcir leurs politiques pour empêcher les migrants de débarquer sur leurs côtes. Lors de ses vœux aux Français, le 31 décembre 2017, Emmanuel Macron, après avoir affirmé qu’« accueillir les femmes et les hommes qui fuient leur pays parce qu’ils y sont menacés » était un « devoir moral, politique », s’est empressé d’ajouter que « nous ne pouvons accueillir tout le monde », afin de justifier les mesures de « contrôle d’identité » prévues par une circulaire du 12 décembre dans les foyers d’hébergement d’urgence, mettant en cause l’accueil inconditionnel.

Les statistiques disponibles auprès de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), rattachée à l’ONU, montrent pourtant que les arrivées de migrants par la Méditerranée ont drastiquement chuté en 2017 : leur nombre a été divisé par deux par rapport à 2016 et par cinq par rapport à 2015. En 2017, 170 249 personnes ont traversé la mer au péril de leur vie, contre 363 401 en 2016 et 1 012 169 en 2015 !

Les arrivées de migrants par la mer en Europe, de janvier 2015 à janvier 2018 © UNHCR
Les arrivées de migrants par la mer en Europe, de janvier 2015 à janvier 2018 © UNHCR

Ce que l’ONU a désigné comme étant l’exode le plus important qu’ait connu l’Europe depuis la Seconde Guerre mondiale n’aura duré que quelques mois, du printemps 2015 au printemps 2016, avec un pic à l’automne 2015. Le record a été atteint avec 220 579 arrivées au cours du seul mois d’octobre 2015. À titre de comparaison, elles n’auront pas dépassé 14 000 deux ans plus tard durant la même période.

L’« exode » de 2015-2016 a concerné principalement des Syriens et des Afghans fuyant leur pays et ayant traversé la Méditerranée via la mer Égée, au départ de la Turquie. Les images de cohortes de familles réfugiées remontant la route des Balkans à pieds, bagages et bébés sous le bras, ont marqué les esprits, ainsi que celle du petit Aylan Kurdi, dont le corps a été retrouvé étendu sur une plage turque, après le naufrage de l’embarcation qui devait le conduire en Europe. Associé au blocage successif des frontières en Europe centrale, l’accord politique et financier signé entre l’UE et la Turquie en mars 2016 et autorisant le renvoi massif des demandeurs d’asile débarqués en Grèce a provoqué un ralentissement net des tentatives de passage, au risque de laisser sans protection des personnes menacées dans leur pays d’origine.

Les arrivées en Italie au départ de la Libye ont ensuite pris le relais, mais dans des proportions (en moyenne 20 000 par mois) qui n’ont jamais concurrencé les 200 000 du mois d’octobre 2015 entre la Turquie et la Grèce. Les pays d’origine ont logiquement changé, les Nigérians, en 2017, arrivant en tête, devant les Guinéens, les Gambiens et les Ivoiriens.

Les arrivées de migrants par la mer, mois par mois, au cours des trois dernières années © OIM
Les arrivées de migrants par la mer, mois par mois, au cours des trois dernières années © OIM

 

Lors de la dernière période, les départs depuis la Libye ont à leur tour diminué, à la suite des très contestables alliances plus ou moins secrètes conclues entre Rome et diverses milices de trafiquants libyens. Et c’est l’Espagne, tout en restant en troisième position derrière l’Italie et la Grèce, qui a enregistré la hausse la plus importante des arrivées : leur nombre a plus que doublé en un an, pour atteindre 26 941 en 2017 (contre 118 914 en Italie et 33 986 en Grèce par voie de mer et de terre). Après avoir atteint un niveau record en 2006 (39 180), elles avaient pourtant ensuite nettement diminué, jusqu’à devenir marginales, en raison des patrouilles des bateaux de Frontex, l’agence de surveillance européenne des frontières extérieures, dans le détroit de Gibraltar. Nouveauté, l’Algérie rejoindrait le Maroc comme pays de départ. La diversification des routes est une constante dans l’histoire des mouvements migratoires : qu’une voix d’accès se ferme, son remplacement par une autre est immédiat.

L’examen approfondi de l’« exode » de 2015-2016 permet d’aller encore plus loin. Terminée, la « crise » a-t-elle même eu lieu ? Dans l’ouvrage collectif publié, fin 2017, par le réseau européen et africain de militants et de chercheurs Migreurop, Atlas des migrations en Europe, approches critiques des politiques migratoires (Armand Colin), l’instrumentalisation des chiffres des migrations par les gouvernants et les médias fait l’objet d’une vive critique. Ses auteurs expliquent que les statistiques sont généralement diffusées en valeur absolue, sans comparer les années les unes par rapport aux autres, et de manière décontextualisée et partielle. « Cette utilisation des chiffres est l’un des rouages classiques de la construction de l’idée d’envahissement », soulignent-ils.

L'Union européenne est-elle confrontée à un nombre important de réfugiés ? © «Atlas des migrants en Europe», Migreurop, 2017.
L’Union européenne est-elle confrontée à un nombre important de réfugiés ? © «Atlas des migrants en Europe», Migreurop, 2017.

 

Pour déconstruire leur usage, ils rappellent leur face cachée. Ainsi, les données fournies par Frontex sont peu fiables : certains « franchissements illégaux » de frontières sont comptés plusieurs fois, par exemple lorsque les personnes, entrées une première fois dans l’UE par la frontière turco-grecque, en ressortent ensuite par la Macédoine, avant d’y entrer de nouveau via la Croatie ou la Hongrie. Ces chiffres reflètent en outre l’augmentation du budget de cette agence et donc l’accroissement de l’activité de ses gardes-frontières.

Les auteurs du livre notent par ailleurs que le durcissement des politiques migratoires européennes a pour conséquence de considérer davantage de migrants comme étant en situation irrégulière. Préférant parler de « crise de la politique migratoire » que de « crise des migrants », ils font remarquer que si les arrivées des demandeurs d’asile au sein de l’UE en 2015 (1 257 030) et 2016 (1 204 280) sont effectivement supérieures à celles de l’année 2014 (562 700), elles sont réparties de manière très inégale entre les États membres, 60 % des demandes ayant été déposées en Allemagne en 2016. Le nombre total d’entrées de ces personnes en Europe, ajoutent-ils, ne représente que 0,24 % de ses 508,2 millions d’habitants. « Plus encore : la totalité des demandes d’asile déposées dans l’UE ces dix dernières années représente moins de 1 % de sa population en 2016 », écrivent-ils, observant que des hausses similaires ont existé au début des années 1990 et que l’augmentation de 2015-2016 est également à mettre en relation avec l’élargissement de l’UE de 15 à 28 depuis 2004. « L’usage des chiffres, couplé aux images diffusées par les médias et aux déclarations politiques, participe à faire croire que ce qui se déroule à une échelle locale, par exemple sur l’île grecque de Lesbos, est représentatif de la situation à l’échelle nationale, voire européenne », indiquent-ils.

Au bout du compte, le nombre des arrivées est systématiquement perçu comme trop élevé, par rapport à une situation supposée normale qui serait fixée à zéro. « L’immigration apparaît dès lors non seulement comme surnuméraire, mais aussi comme une anomalie », concluent les auteurs de l’Atlas des migrants en Europe. Et le tour est joué : l’ennemi imaginaire sert à cristalliser les peurs des opinions publiques, qui se développent pour tout un tas d’autres raisons, notamment économiques et sociales, et à justifier la mise en œuvre de politiques toujours plus dures à l’égard des migrants.

La mesure humaine La rubrique de Panagiotis Grigoriou

Panagiotis  Grigoriou est Ethnologue et historien, chroniqueur, analyste, initiateur d’un concept de tourisme alternatif  et solidaire en Grèce. Le regard de l’historien et de l’anthropologue sur l’actualité et le vécu de la crise grecque.

Dans cette rubrique il évoque Lávrion et ses mines qui devinrent aussi un des principaux centres des luttes sociales et politiques en Grèce, dont la révolte du 7 avril 1896 et réagit à l’approbation de l’aménagement de l’ancien aéroport d’Ellinikon.

La mesure humaine

 

À Athènes, l’année 2018 celle de la météo, a bien commencé avec des températures (disons) saisonnières qui ont atteint 15 °C par endroits. Les mieux pourvus, et ceux ayant pu se permettre une si rare exception qui toujours confirme la règle, se sont rués sur les plages comme sur les tavernes de la Riviera d’Attique. Au même moment, le “gouvernement” aura encore “légiféré”, essentiellement par décrets entre le 1er et le 2 janvier, pour… le meilleur des méta-mondes. Ah… la bonne année !

Bords de mer en Attique. 1er janvier 2018

Encore heureux, nous ne connaissons pas pour l’instant cette ère “prometteuse” lorsque les… avatars iront se ruer par milliers sur les exosquelettes ou sur les… bio-conservateurs (encore) réellement existants, rien que parce que ces derniers auront tout simplement voulu faire si possible preuve d’héliotropisme. Ainsi, l’époque qui est la nôtre, elle roule déjà sur l’herbe, celle que nos futures chèvres… numérisées ne mangeront plus. Autrement-dit, de… blabla-car à blabla-corps, ce ne serait finalement qu’une affaire de chemin à parcourir.

Fuyant donc les tavernes des bords de mer (et pour cause), votre humble chroniquer et toute sa crise avec, ont plutôt préféré pour cette première journée de l’année calendaire rendre hommage au… Chaos, comme autant rendre hommage au passé des humains, à leurs lieux d’une certaine mémoire, s’agissant des mines de Lávrion, vestiges allant de l’antiquité au 19e siècle. C’est un beau coin que je fais parfois visiter à mes participants aux programmes Greece Terra Incognita guère loin du Cap Sounion et du célèbre Temple de Poséidon.

Et c’est dans cette partie de l’Attique, qu’on y découvre aussi ce fameux gouffre, un effondrement géologique tel un trou béant que les locaux font semblant d’attribuer parfois à une météorite… que personne n’a certainement jamais vu. Ce… trou, se nomme paraît-il “Chaos” depuis l’Antiquité. Oui, en cette première journée de 2018 nous avons visité… Chaos, pour ensuite rendre aussi hommage à l’Homme !

Lávrion et en face ; les îles de Makrónissos et de Kéa. Janvier 2018
Taverne des bord de mer. En Attique, le 1er janvier 2018
Passé industriel et minier. Lávrion, janvier 2018
Chaos. En Attique, janvier 2018

Et comme le fait remarquer (par mail) à très juste titre mon ami (ami aussi du blog, il tient aussi son propre blog) Jean-François: “C’est bien d’avoir revisité le site du Chaos: en prévision du prochain effondrement qui nous contraindra à remettre en question l’échange marchand, le lieu devrait reprendre une bonne charge symbolique et devrait devenir l’omphalos (nombril) du monde ! Au vu des images, je doute fort que la théorie du météore soit la bonne. Je pense plus à l’effondrement de la voûte au-dessus d’une poche soudain vidée de ce qui la remplissait – eau ou gaz.”

“C’est comme pour le capitalisme qui ne disparaîtra pas à cause d’une météorite de contestations, de grèves ou de partis politiques, mais à cause de sa base théorique, laquelle induit mécaniquement de grosses bulles, ontologiquement ‘éclatantes’ !!!”. Alors… méditons sur Chaos, comme sur tout le reste (ou le restant) !

Les pauvres et les moins… pauvres Grecs, n’aiment décidément pas vraiment marcher. Contrairement aux bords de mer, nos vestiges industriels puis notre… Chaos, n’ont pas été à l’honneur en ce 1er janvier. Nous y avons rencontré seulement quatre heureux Allemands, retraités et (quasi) habitants de la colonie. Le bon sens alors pratique !

Lávrion, alors bourgade connue depuis l’Antiquité classique pour l’exploitation des mines d’argent ayant pu permettre à Athènes de battre monnaie et surtout d’armer sa flotte durant l’époque classique (Guerres médiques et Guerre du Péloponnèse), revient dans l’actualité au XIXe siècle lorsqu’une société franco-italienne décida de relancer l’activité minière.

Depuis l’Antiquité. Lávrion, janvier 2018
Passé et présent. Lávrion, janvier 2018
Musée des mines… comme des luttes. Lávrion, janvier 2018

La localité qui se créa autour de cette activité prit alors le nom “les Usines” en français (en grec “Ergastiria”, de la Compagnie française (plutôt franco-italienne) des mines de Lávrion, “Roux – Serpieri – Fressynet CIE”, omniprésente en son temps. Les mines furent d’ailleurs la cause d’un sérieux différend diplomatique entre les deux pays (France et Grèce) entre 1871-1872, où d’ailleurs Jules Ferry avait été nommé au poste d’Ambassadeur à Athènes pour mieux suivre l’affaire.

Le Parlement hellénique avait voté une loi stipulant expressément que les minerais anciens ne faisaient pas partie de la concession (française). Reprises par une compagnie grecque, les mines firent également l’objet de la première bulle spéculative de la Grèce contemporaine par la (nouvelle) Compagnie Française des Mines du Lávrion.

Cette Compagnie Française des Mines du Lávrion introduisit d’ailleurs en Grèce, la dite “organisation scientifique du travail”, en l’occurrence le système Bedaux système qui pourrait se résumer en… “Travailler mieux ou gagner moins”. Et aussi pour rappel en cette première journée ensoleillée de 2018, Lávrion et ses mines devinrent aussi un des principaux centres des luttes sociales et politiques en Grèce, dont la révolte du 7 avril 1896. C’est le nom de la petite rue… forcement en pente, bien en face du musée des mines… comme des luttes.

Cette grande grève avait duré 18 jours, une première à l’époque. Les principales revendications des travailleurs en ce supposé lointain 1896, (les mines où ils travaillaient était propriété de la deuxième société minière franco/italienne), ont été essentiellement: la suppression des sous-traitants… au versement des salaires alors intermédiaires entre les employés et les patrons, le paiement donc des travailleurs désormais directement par l’entreprise, l’augmentation de leur paye journalière à 3,5 drachmes (au lieu de 2,5), et la mise en place d’un hôpital ou du moins d’une pharmacie près des mines pour enfin cesser le transfert des blessés vers l’hôpital de Thorikon sur la côte (5 à 10 km depuis les mines).

Car bien souvent, ces ouvriers (définitivement) infortunés mouraient lors de ce transfert en charrette. Les grévistes, réclamaient également un moyen de transfert adapté pour les blessés et les malades, et enfin, la possibilité… d’habiter une varie maison, car jusque-là, ils vécurent dans les cavernes des environs ou dans de nombreuses cabanes de fortune.

Passé industriel et manufacturier. Lávrion, janvier 2018
Traces… humaines. Lávrion, janvier 2018

Il y a plusieurs années, ceux ayant directement vécu cette grève ont livré leur témoignage, tel l’ancien ouvrier Vougioukas, et ils ont décrit plus précisément ces événements historiques:

“Il y avait une tension terrible durant cette première grande grève. Il faut noter que Serpieri – alors directeur général de l’entreprise – avait été déguisé et habillé femme ou en prêtre pour quitter les lieux ! Le gouvernement avait aussitôt dépêché sur place les ‘CRS’ de l’époque, puis un navire de guerre dans la baie, pour y enfermer les grévistes arrêtés. La tension était énorme. Une pierre avait été balancée par un gréviste sur un gendarme, et le conflit avait éclaté. Les gendarmes ont ouvert le feu et quatre ouvriers ont été touchés. La bourgade s’est aussitôt transformée en champ de bataille” (enquête du quotidien communiste “Rizospástis” 24/08/2008) .

Notons qu’en décembre 1896, le procès des 15 grévistes a finalement eu lieu, et ils ont été acquittés, ils retrouvèrent ainsi leurs postes sans conditions préalables. Suite à cette grève, un détachement militaire avait été définitivement et durablement installé près des mines, afin… de anticiper les révoltes des travailleurs.

Anciennes maisons ouvrières et bâtiments de la compagnie. Lávrion, janvier 2018
Ruines et symbolismes rajoutés. Lávrion, janvier 2018
Rue du 7 avril 1896. Lávrion, janvier 2018

Longtemps après, les révoltes ont plutôt cessé, tout comme le travail d’ailleurs. Pourtant, les avatars (déjà) politiques, en précurseurs des… futurs robotonymes se ruent sans vergogne aucune, sur les endosquelettes ou sur les… bio-conservateurs et autres travailleurs (encore) réellement existants.

Début 2018, et les mieux pourvus se sont rués sur les plages comme sur les tavernes de la Riviera d’Attique, tandis que l’escroc politique Alexis Tsipras et les siens (sous forme de commissions dites “d’experts”) décideront alors en comité restreint (clos) et sans la presse (la nouvelle vient de tomber), du sort architectural de l’ancien aéroport d’Ellinikón (ou Hellenikó, également sur la Rivier d’Athènes). Il s’agit bien de ce site dont le “gouvernement de la gauche radicale” a ainsi finalisé la vente aux “promoteurs”. Il fut un temps pas si lointain, où Tsipras se faisaient photographier avec ceux qui luttaient contre cette vente (en réalité, il a été bradé). Tsipras, dernier arriviste de l’ultime gauche dans ce pays, ira ainsi jusqu’au bout de l‘hybris.

On sait que la société privée grecque ‘Lamda Development’, soutenue par le groupe multinational ‘Global Investment’, le groupe chinois ‘Fosun’ et une société d’Abou Dhabi, a emporté le… morceau moyennant donc 915 millions d’euros. Elle devient le propriétaire de l’ancien aéroport sur une zone côtière de 3,5 kilomètres de longueur et une marina, pour lancer son… méga-projet immobilier sur le site de l’ancien aéroport, avec la construction de nombreuses résidences de toute taille et des parcs d’activités, voir d’ailleurs à ce propos les articles… dithyrambiques dans la presse plus autorisée que jamais . Pauvres journalistes, incroyables avatars !

Ce qui s’y joue, tient autant de l’autorisation accordée aux “promoteurs” pour y bâtir toute une série d’immeubles très élevés, et même l’autre dictature, celle des Colonels (1967-1974) avait pourtant renoncé à un projet analogue sous la pression collective comme culturelle (colères certes sourdes). En réalité, le POS régissant la construction à Athènes, interdit ce type d’immeubles bien grands, c’est-à-dire plus hauts que l’Acropole, et cette règle est autant et d’abord morale, d’où l’énormité dans la transgression ainsi commise par… la bande à Tsipras.

Mineurs de Lávrion du temps de jadis (presse grecque)
Mineurs de Lávrion du temps de jadis (presse grecque)
Tsipras, magnifique menteur… contre la privatisation d’Ellinikón. Temps… de jadis (Internet grec)
Vision… cauchemardesque d’Ellinikón. “Quotidien des Rédacteurs”, janvier 2018

D’ailleurs à ce sujet, même au “Quotidien des Rédacteurs” (pourtant journal pro-SYRIZA), on ne peut qu’exprimer de l’indignation devant ce nouveau crime d’Alexis Tsipras (et du “gouvernement” SYRIZA/ANEL):

“Ces… esprits ‘instruits’ du gouvernement veulent ainsi autoriser la construction d’une barrière de bâtiments imposants, une miniature (peut-être une copie) de Dubaï, de tout ce toc, alors réalisé aux limites de l’hybris, (autant) au moyen d’arrangements avec et au sein du para-État gouvernemental. Et pourtant en face, elle se trouve la population locale et les citoyens démocrates qui se révoltent, de même que la plupart des scientifiques cohérents d’esprit : archéologues, architectes, voire les artistes.” (“Quotidien des Rédacteurs” du 3 janvier 2018) .

L’Aéroport international d’Ellinikón était comme on se souvient, cet aéroport historique qui desservait la ville d’Athènes, avant d’être remplacé en 2001 par Elefthérios-Venizélos (aéroport actuel) dont ses promoteurs de l’Allemand Hochtief qui détenait encore 40 % des parts en 2013, ont expressément exigé la fermeture. Pourtant, le bon sens exprimé même publiquement à l’époque avait argumenté en faveur du maintient du site comme deuxième aéroport (à l’instar de Roissy après Orly et après Le Bourget en France). Et comme en 2017, le nombre de visiteurs du pays avoisine les 30 millions par an, voilà que le nouvel aéroport de la capitale n’est guère loin d’être saturé.

Dans ce même… (Nouvel) ordre d’idées, la Tsiprostructure actuelle, prépare une autre bien étrange loi, rendant possibles les juridictions de proximité. Le projet de loi avait été lancé pour rester soi-disant consultable, entre… le 28 décembre et le 3 janvier 2018, comme par hasard. Juridictions de proximité, pourquoi pas dans un sens ?

Sauf que contrairement par exemple, au cas analogue français, là où le juge de proximité, sauf exception, n’est pas magistrat de formation mais recruté dans la société civile, cependant parmi des praticiens du droit et selon des critères légaux (entre autres, il faut soit avoir exercé une profession judiciaire pendant au moins 4 ans, soit avoir une expérience d’au moins 25 ans dans un service juridique d’entreprise ou d’administration), en Grèce, pour ce même recrutement un simple diplôme universitaire (de n’importe quelle discipline) satisferait les exigences liées à cette mission.

De nombreux juges ont aussitôt argumenté à travers la presse pour dénoncer cette “privatisation de la justice” , et très officiellement l’Union des Magistrats laisse exprimer toute son inquiétude, à l’instar des avocats du… pauvre pays, s’exprimant également de la même manière .

2018, Quotidien des Rédacteurs, janvier 2018
Le… ‘Diable de Phalère’. Presse grecque, janvier 2018
Musique populaire et extase. Temps de jadis (presse grecque – janvier 2018)

L’année 2018, celle de la météo a certes bien commencé à Athènes. Fuyant donc les tavernes des bords de mer (et pour cause), votre humble chroniquer et toute sa crise avec, ont plutôt préféré pour cette première journée de l’année calendaire rendre hommage au… Chaos. Au même moment, la presse aime parfois publier certaines photos issues des transes comme des extases de la musique populaire et de son temps, forcément de jadis, histoire de rendre hommage à, Dieux sait, quelles originalités, constitutives de ce dont on a le plus besoin, une référence exacte dans le passé, comme à définir en quelque sorte, une unité de mesure humaine, surtout et d’abord face à l’hybris. Et ce n’est pas gagné…

L’année 2018 sera peut-être le moment où il va falloir apprendre ou réapprendre à nager… en toutes circonstances, planétaires ou comme on dit depuis la novlangue des mondialisateurs, circonstances “locales”. Il fut un temps… de mesure humaine, où nos poètes étaient encore parmi nous, ils caressaient même parfois leurs chats, peut-être aussi, pour ne pas vraiment caresser les oreilles du public.

Le poète Odysséas Elytis et son chat. (Internet grec)
Premières fleurs. Lávrion, janvier 2018
Nager… en toutes circonstances. Hermès de ‘Greek Crisis’, janvier 2018

Oui, ce n’est pas gagné… Au moment des premières fleures en ce 2018 et non loin de l’ancien aéroport d’Athènes, la Municipalité de Phalère vient de financer et d’installé peu avant la fin de l’année dernière, cette sculpture disons d’époque, et il faut dire fort controversée, étant donné que de bien nombreux habitants (à l’instar d’une partie de l’Église locale), estiment qu’elle représenterait… en réalité le diable.

Ah… la bonne année diabolique 2018, de… diablabla-car à diablabla-corps, ce ne serait finalement qu’une affaire de chemin à parcourir, et c’est sans doute aussi pour cette raison que nous avons ainsi visité Chaos fuyant les tavernes des bords de mer.

2018 et votre blog ‘Greek Crisis’ poursuit sa route contre vents et marées, il faut alors l’admettre, de plus en plus souvent… surveillé de près. Puis, lorsqu’on aura légiféré sur les… fausses informations en ligne, il finirait comme l’autre poète de la mer l’avait alors prédit, connaissant le même sort que “ces navires rayés du contrôle des flottes”. Ah… la si bonne année !

Votre blog ‘Greek Crisis’… surveillé de près. Athènes, janvier 2018

mais aussi pour un voyage éthique, pour voir la Grèce autrement “De l’image à l’imaginaire: La Grèce, au-delà… des idées reçues !”   http://greece-terra-incognita.com/

Soutien aux Vio.Me pour bloquer la vente aux enchères

La lutte des travailleurs de VIO.ME depuis 6 ans est une lutte emblématique en Grèce. Actionnaires et famille du groupe Philippou avaient abandonné l’usine et ses travailleurs impayés. Les travailleurs de VIO.ME ont pris leur affaires en main, ont reconverti la production de l’usine dans des produits de nettoyage écologiques, et ont organisé sa production de façon autogérée. Malgré une guérilla juridique et une absence de soutien des autorités, ils tiennent bon depuis 6 ans. Avec l’aide de leur Comité de soutien, des avocats et des professeurs de droit, ils ont soumis une proposition complète pour faire fonctionner l’usine de façon légale et efficace, à la fois économique et productive, et pour la distribution des produits.

Contre le gaspillage des deniers publics (cotisations fiscales et d’assurance des employés) et pour protéger l’intérêt public contre les énormes sommes que doivent les entreprises Filkeram SA et BIOME SA, ils exigent de confisquer aux propriétaires les biens immobiliers et mobiliers. Il existe des décisions irrévocables contre les employeurs. Les agences d’État et les organismes publics devraient déjà être intervenus. Ensuite, ils demandent à ce que les propriétés puissent être louées à la coopérative des employés de BIO.ME pour assurer les emplois.
En outre, ils exigent que les biens qui ont déjà été engagés (et exclus de la vente aux enchères) par un gouvernement précédent en 2012 soient confisqués et donnés à la coopérative pour qu’il entre directement en fonctionnement normal avec ce qui est requis pour une légalisation complète.

Les VIO.ME revendiquent un environnement de travail très différent de ceux qui existent en Grèce :
– Faire participer les employés et la société dans le contrôle de la production et de la distribution.
– Avec un contrôle permanent via les assemblées du fonctionnement économique
– Avec l’égalité absolue dans les décisions parce que nous avons tous une voix.
– Avec un salaire égal pour un temps de travail égal.
une production orientée vers les besoins sociaux et environnementaux et non sur l’accumulation de profit.

Les VIO.ME rappellent leur long combat . Les gouvernements qui se sont succédés tout ce temps, n’ont pas fait ce qu’ils ont promis. Ils n’ont déposé aucune proposition légale, indépendamment des allégations faites par les membres des partis politiques qui les soutiennent.

Les VIO.ME demandent le soutien de la société dans cette lutte, car elle influe sur la capacité de tous les employés de stimuler l’économie et la vie dans leurs mains . Avec la solidarité de toute la classe ouvrière et de la société , ils veulent imposer leur propre besoin avec leur propre droit civil!

Ils appellent à se mobiliser le jeudi 11 janvier à 9h devant le Tribunal de Thessalonique contre la Vente aux enchères:

VIO.ME N’EST PAS À VENDRE !

Grèce : encore plus d’agressivité envers les petits créanciers

Les informations que donnent les médias grecs sur la politique à venir de l’État grec envers les citoyens endettés démontrent une agressivité sans précédent vis à vis des petits créanciers, et tout cela pour plaire aux créanciers dans le cadre de l’évaluation du 3 ème mémorandum! Ainsi 1,8 millions d’emprunteurs ayant des difficultés à rembourser leurs dettes de plus de 500 euros sont ciblés par l’administration fiscale. 2,3 millions d’ autres vont vivre chaque mois avec la peur de dépasser cette limite, en fonction des diverses tranches de paiement d’impôt.
Cette situation est unique : jamais auparavant autant ont été confrontés à des ventes aux enchères. Près d’ un contribuable sur trois (soit un ménage sur trois) va connaitre en 2018 des situations sans précédent.

L’accord conclu avec les prêteurs pour fermer la troisième évaluation est à la source de cette situation. En effet, avant le 20 Janvier, le gouvernement aura adopté « dans la douleur »… des centaines de nouvelles dispositions, parmi lesquelles les modifications du code de recouvrement des recettes publiques (KEDE), ouvrant la voie à des ventes aux enchères de masse par l’administration fiscale et les fonds de sécurité sociale.
Le gouvernement a déjà démontré sa détermination à mettre en œuvre le plan avec l’amendement adopté vendredi dernier et mettra immédiatement en application les poursuites d’ office en arrêtant tous ceux qui entravent les ventes aux enchères. De même, il est prévu que les propriétaires soient exclus même par la force de leur maison mise en vente.
Le cocktail des nouvelles mesures est le suivant :
– Les enchères électroniques vont proliférer ( trois fois par semaine au lieu de une actuellement) et vont remplacer le processus traditionnel des tribunaux du comté.
– Bien que souvent reporté par peur des manifestations (après celle du 30 Novembre et les graves incidents au sein du tribunal du comté devant les caméras et pour les beaux yeux de la Troïka afin de finaliser l’évaluation) les ventes aux enchères seront à nouveau organisées, une fois la nouvelle loi adoptée, immédiatement après les vacances.

Les dispositions de la même loi étendent à l’État les dispositions du Code de procédure pénale de sorte que les mêmes règles s’appliquent aux ventes aux enchères qu’aux individus. À partir de seulement 500 euros de dette, le gouvernement exercera nécessairement une action de recouvrement contre les débiteurs.
– Il n’y a pas de protection pour la première résidence prévu par le KEDE, et le gouvernement n’y a pas apporté de modifications au cours des derniers jours pour distribuer un dividende à partir de la surpopulation.
– Dorénavant, la valeur objective ne sera pas entravée afin de vendre aux enchères une propriété pour dettes envers l’État. Basé sur le KEDE, si la propriété n’avait pas obtenu l’objet, il était interdit de vendre, donc toutes les ventes aux enchères étaient pratiquement stériles. Maintenant, l’immobilier ira aux ventes pour les dettes à l’État et la valeur commerciale (c’est-à-dire, sous l’objectif).
– Les temps d’avertissement et de réponse pour le débiteur rétrécissent considérablement. Avec un courrier électronique informatif du Département du Trésor, les délais commenceront à courir sans perdre de temps pour effectuer ou reporter les saisies, étant donné qu’il est automatiquement considéré que le débiteur a pris connaissance du jour de l’envoi (et non reçu) de l’avis.
– À compter du 1er janvier 2018, la mort subite est également prévue pour ceux qui utilisent le régime des  » 100 doses ». Le règlement sera perdu si le débiteur ne paie pas toutes ses nouvelles dettes à temps (en plus des versements qu’il paie). C’est-à-dire, même pour un jour de retard, il va perdre le règlement, sans la moitié ou un mois de marge pour l’empêcher de payer.

Et les personnes qui sont à risque sont nombreuses lorsque l’on sait que sur 4,1 millions de contribuables qui avaient des dettes à l’administration fiscale en Octobre, huit sur 10 (3,5 millions au total) sont aux prises avec de petites dettes d’environ 3 000 euros en moyenne. On sait que près de 2,35 millions d’ emprunteurs doivent , mais ne peuvent pas payer les dettes de seulement 1 à 500 euros. Les 1,75 millions d’ emprunteurs restants doivent plus de 500 euros, mais seulement 400 000 ont des dettes de plus de 10.000 euros.

Source : journal Protothema.

Grèce : Visa et enchères immobilières

Visa d’or et enchères immobilières en ligne attirent l’intérêt russe et chinois

Le malheur de l’un est la fortuité de l’autre. Les investisseurs russes et chinois montrent un grand intérêt pour l’acquisition de propriétés en Grèce, surtout maintenant que les banques grecques se débarrassent de leurs prêts non performants avec des enchères de propriétés en ligne. Il y a une forte demande pour le programme Golden Visa car il ouvre la voie aux citoyens non-européens pour un billet vers l’Europe.

Il existe un intérêt international croissant pour l’acquisition de propriétés en Grèce via des enchères en ligne, en particulier des pays qui pourraient bénéficier du programme Golden Visa , car la Grèce accorde des visas aux non-ressortissants de l’UE s’ils achètent des propriétés d’au moins 250 000 euros.

Les bas prix et la perspective de futures plus-values, ainsi que le calendrier de la sortie prévue du plan de sauvetage de la Grèce, ont accru l’attrait du marché immobilier local, non seulement aux yeux des fonds d’investissement étrangers, mais aussi des investisseurs étrangers. Russie et Chine.

George Kachmazov, directeur général de la plate-forme immobilière russe Tranio , a déclaré à Bloomberg la semaine dernière: «Nous souhaitons participer aux enchères immobilières grecques et acquérir des propriétés directement auprès des banques.

Il a déjà acheté un immeuble à Athènes et prévoit d’en acheter cinq autres dans le but de revendre les appartements à des investisseurs étrangers intéressés par l’obtention d’un permis de séjour grec grâce au programme Golden Visa. Étant donné que les prix du marché se sont stabilisés, les acheteurs peuvent s’attendre à des gains en capital grâce à l’intérêt croissant du tourisme pour la Grèce et à la hausse de la location à court terme via des plateformes de partage de logements.

Les investisseurs chinois regardent également le pays: Carrie Law, PDG du site immobilier chinois Juwai, a déclaré à Bloomberg: «Nous avons des acheteurs qui sont très intéressés par le processus d’enchères électroniques en Grèce. Ils croient qu’il offrira des opportunités d’achat au bas du marché. « 

Selon Kachmazov, le faible seuil d’un Visa d’Or en Grèce est un avantage supplémentaire: en Grèce, les investisseurs doivent dépenser au moins 250 000 euros, alors qu’au Portugal, par exemple, 500 000 euros (soit 350 000 euros pour les 30 ans).

Citant des données d’Enterprise Greece, l’agence d’État chargée de promouvoir les investissements et les exportations, Bloomberg note que la Grèce a attribué 2 053 visas d’or entre 2013 et octobre 2017, les investisseurs chinois représentant 43% d’entre eux. Les Russes arrivent en deuxième position avec 18,6% et les investisseurs de la Turquie voisine arrivent en troisième position avec 8,4%. La Grèce a levé plus de 513 millions d’euros d’investissements étrangers dans le programme de visas.

Les citoyens turcs ont également un grand intérêt à acquérir des biens en Grèce et obtenir un visa d’or néanmoins en raison de l’instabilité politique en Turquie et de la proximité géographique.

Spitogatos: Cette année, les recherches sur les biens grecs ont augmenté de la Chine (203%), de la Turquie (90%), de l’Allemagne (68%) et des États-Unis. Émirats arabes unis (50%).

Portugal, au pays de la gauche qui marche

Par Amélie Poinssot 28 décembre 2017 Médiapart

Depuis octobre 2015, les socialistes tiennent les rênes de l’exécutif portugais. Avec l’appui d’une coalition originale au Parlement : la gauche radicale du Bloco et le parti communiste. Un attelage qui pourrait être riche d’enseignements ailleurs en Europe. Premier volet de notre série de reportages.

Lisbonne (Portugal), envoyée spéciale.-  Ce jour-là, Mario Centeno, fraîchement élu à la présidence de l’Eurogroupe, est auditionné en session parlementaire. Le ministre des finances portugais à la tête de l’institution de la monnaie unique : une bonne nouvelle pour ce petit pays qui se relève doucement d’une longue cure d’austérité ? « Pas vraiment, tranche sèchement Catarina Martins, la « coordinatrice » du Bloco de Esquerda, le parti de gauche radicale portugais, qui soutient pourtant au parlement le gouvernement socialiste dont Mario Centeno est issu. Le changement en Europe ne viendra pas de l’Eurogroupe. Et Centeno est un libéral, il prônait entre autres la facilitation des licenciements. »

Nous sommes début décembre à Lisbonne et la députée Catarina Martins vient d’interpeller le ministre des finances à l’assemblée. « Oublions un instant que le Bloco ne croit pas en l’Eurogroupe. Oublions que l’Eurogroupe est un forum informel qui n’existe dans aucun traité européen et où l’Allemagne a toujours le dernier mot. Oublions que l’Eurogroupe a exclu le ministre grec des finances de ses réunions. Oublions que l’Eurogroupe a insulté le Portugal et imposé l’austérité dans plusieurs pays du Sud. Même si nous oublions tout cela, il y a un problème : vous avez dit en septembre que l’union monétaire était une zone de divergences… Si tout le monde est conscient de cela, au sein du Parti socialiste comme à Bruxelles, quelle est votre stratégie à la tête de l’Eurogroupe ? » lui a-t-elle lancé. Toute l’habileté du Bloco tient dans cette capacité à critiquer le gouvernement socialiste et à assurer le rôle d’un « parti minoritaire »… tout en le poussant, avec l’aide du Parti communiste portugais (PCP), à mettre en œuvre des mesures sociales.

Depuis octobre 2015, c’est cet attelage original qui préside aux destinées du Portugal. Les législatives n’ayant pas débouché sur une majorité claire, le Parti socialiste (PS), arrivé deuxième, a alors pris la main pour former l’exécutif. Il a obtenu le vote du Bloco et du PCP pour l’investiture, en échange de quoi son gouvernement, minoritaire, s’est engagé sur un certain nombre de mesures sociales afin de compenser les effets dévastateurs qu’ont produits la crise économique et la cure d’austérité imposée entre 2011 et 2015 par la droite au pouvoir et la Troïka (Commission européenne, FMI et Banque centrale européenne). « Ce n’est pas que nous soutenons ce gouvernement, nous ne gouvernons pas, corrige Miguel Tiago, élu du Parti communiste. Nous nous contentons de ne pas le faire tomber. »La nuance est de taille pour ces deux partis qui risquent de se brûler les ailes à voter d’une même voix aux côtés des élus socialistes. Comment convaincre ensuite leurs électeurs qu’ils sont toujours opposés à l’Union européenne dans sa forme actuelle, à la monnaie unique, à l’OTAN… et qu’ils sont accessoirement très différents l’un de l’autre, même s’ils se partagent la gauche de la gauche de l’échiquier politique ? Pour l’instant, le résultat des dernières élections municipales, en octobre dernier, n’est guère probant.

Le Bloco, qui n’est pas très bien implanté localement, a certes légèrement progressé dans certaines villes, comme à Lisbonne, où le PS gouverne désormais là aussi suivant un accord avec le Bloco. « Nous sommes aujourd’hui le troisième parti du Portugal », se targue Catarina Martins. Mais le Parti communiste recule ; il a perdu quelques-uns de ses bastions, comme la commune d’Almada qui, de l’autre côté du Tage, fait face à Lisbonne. Et ce malgré un « pacte de non-agression » conclu avec le PS local, qui y avait envoyé comme candidate une actrice sans lien avec le terrain. Elle a réussi à dépasser le PCP de quelque 400 voix…Celui qui semble le mieux profiter de cette alliance, finalement, c’est le Parti socialiste. Le ministre adjoint aux finances, Ricardo Mourinho Félix, s’en réjouit : les positions du Bloco et du Parti communiste « ont de manière évidente influencé notre manière de gouverner ces deux dernières années. Je ne le vois pas comme quelque chose qui s’impose à nous et nous met dans une situation inconfortable », dit-il. (L’intégralité de l’entretien sera à lire dans un prochain article.) En fait, pour une partie du PS, ce soutien est un soulagement…

En témoigne également le député socialiste et vice-président du groupe à l’assemblée Joao Galamba : « La crise a accru nos divergences avec la droite portugaise. La possibilité d’une alliance avec le Bloco et le PC est apparue comme une chance pour la gauche, qu’il ne fallait pas rater. Ne perdons pas de temps et concentrons-nous sur les points où nous pouvions tomber d’accord : telle a été notre philosophie. Nous n’étions pas à la recherche d’idéal, de consensus, de convergence absolue : nous voulions des changements concrets dans la vie quotidienne des gens. »

De fait, la liste de mesures mises en œuvre est impressionnante au regard de ce qu’ont fait – ou plutôt n’ont pas fait – les autres gouvernements sociaux-démocrates en Europe ces dernières années : augmentation du salaire minimum de 5 % par an jusqu’à atteindre 600 euros brut en 2019, allègement de l’impôt sur les plus bas revenus, hausse des petites pensions de retraite, rétablissement de quatre jours fériés qui avaient été supprimés…

Le dernier budget – le 3e voté par cet attelage PS-Bloco-PCP –, adopté fin novembre, s’inscrit lui aussi dans cette lignée : l’impôt sur le revenu est abaissé pour les premières tranches de revenus (1,6 million de foyers touchés au total) ; une nouvelle taxe est introduite pour les grandes entreprises qui dégagent plus de 35 millions d’euros de profits annuels ; les pensions de retraite sont augmentées de manière variable en fonction de leur niveau (de 1 à 10 %), et les livres scolaires deviennent gratuits jusqu’à la sixième année d’éducation.

Le grand écart du PC portugais

Jusqu’à présent, tous les termes du contrat ont été respectés : les mesures sociales sont bien mises en œuvre par l’exécutif, et entre les trois partenaires de circonstance, on ne parle pas des sujets qui fâchent. « Nous nous sommes mis d’accord sur quatre principes, explique Catarina Martins. Le premier, c’est la hausse, chaque année, d’une partie des salaires et des retraites afin de compenser les coupes des années précédentes. Le deuxième, c’est l’impossibilité de nouvelles baisses de revenus, et donc de hausse des prélèvements obligatoires pour les salariés ainsi que des taxes sur les biens essentiels. Le troisième, c’est l’arrêt définitif des privatisations, qui dans le passé avaient été décidées par le Parti socialiste lui-même. Et le quatrième, c’est l’impossibilité de retirer davantage de droits aux travailleurs. » Car le droit du travail, comme en Grèce et comme en France aujourd’hui, a été sérieusement entamé au Portugal pendant les années de Troïka.

« Sur ce plan-là, on ne reviendra pas en arrière avec ce gouvernement, regrette Jorge Costa, autre député du Bloco. C’est la limite de cet accord, et, me semble-t-il, le résultat d’un accord tacite avec le patronat, en contrepartie de la hausse du salaire minimum. » « Les socialistes sont trop compromis avec le système capitaliste pour qu’on puisse évoluer là-dessus », renchérit le communiste Miguel Tiago, qui regrette par ailleurs un blocage tout aussi complet sur le budget alloué à la culture, un budget « misérable, inacceptable », ainsi que l’impossibilité de faire baisser le prix du gaz domestique, « trop élevé pour quantité de foyers au Portugal ».

Autre zone d’ombre de l’accord : le travail précaire, de plus en plus répandu au Portugal. Un décret à venir doit permettre de titulariser 30 000 contractuels de la fonction publique au cours du premier semestre 2018. Une victoire à rajouter au compteur du Bloco. Mais dans le privé, rien ne change. Si l’emploi est reparti à la hausse, ces derniers temps, c’est le plus souvent au détriment des protections sociales élémentaires. Le système d’auto-entreprenariat, où le travailleur doit cotiser lui-même pour ses couvertures santé et retraite, devient en effet de plus en plus la règle… et rien ne permet aujourd’hui d’enrayer cette tendance.« Pour mieux protéger ces travailleurs dits indépendants, nous avons émis des propositions au sein d’un groupe de travail sur la précarité, explique le député du Bloco Jorge Costa. Notamment l’établissement d’un taux très réduit de cotisations sociales pour les bas revenus, le maintien de la protection sociale même si l’activité s’interrompt, et un accès à la caisse d’assurance chômage. » Le texte, présenté mi-décembre au parlement, est en bonne voie d’être adopté.

Restent des désaccords idéologiques de fond et tous les points qui sortent de l’accord avec le PS, sur lesquels les deux partis échouent à faire avancer les choses dans leur sens. Ainsi en est-il par exemple du coût de l’énergie portugaise, l’un des plus élevés du continent. Le Bloco a proposé que le secteur de l’énergie renouvelable – qui fait des profits ahurissants au Portugal – soit taxé au même niveau que le secteur conventionnel et que cette hausse permette au consommateur de payer un prix moins élevé. Échec total.

Face à ces divergences, Bloco comme PCP assurent maintenir une ligne idéologique claire. « Les socialistes et la droite s’entendent parfaitement sur la politique européenne. Ce qui fait que nous avons 80 % des députés engagés dans le statu quo européen, lâche Catarina Martins. Mais nous, notre engagement n’est pas aux côtés du PS. Il est aux côtés de nos électeurs. C’est pourquoi nous n’abandonnerons aucun de nos principes. » Parmi ces principes, il y a une franche hostilité à l’euro, « qui rend chaque jour les pauvres de plus en plus pauvres et l’Allemagne de plus en plus riche – sans que cela ne bénéficie toutefois aux travailleurs allemands », selon les mots de Catarina Martins, pour qui le vrai problème, en réalité, est la renégociation de la dette publique portugaise.

Le professeur d’économie Francisco Louça, membre fondateur du Bloco, ne voit quant à lui aucune contradiction entre cette opposition à l’euro et le fait de voter d’une même voix avec un gouvernement qui envoie son ministre des finances à la tête de l’Eurogroupe : « Ce que change, pour le Bloco, cette attitude de soutien au gouvernement, c’est son agenda. Cela l’inscrit dans la gestion politique d’un travail quotidien. Cela lui donne plus de poids, plus de profondeur. Mais on reste dans le cadre d’un contrat très clair : il s’agissait d’éviter le prolongement de la droite au pouvoir et d’ouvrir la porte aux mesures sociales. »

Le PCP, l’un des derniers partis communistes d’Europe avec le KKE grec à n’avoir pas rompu avec le marxisme-léninisme, fait de son côté le grand écart. Après avoir refusé pendant des années de dialoguer avec les autres partis (posture dans laquelle se trouve encore aujourd’hui le parti frère hellénique, qui agit dans un isolationnisme total, y compris sur le plan syndical), il affiche aujourd’hui un certain pragmatisme, sans rien abandonner de son corpus théorique.

« Le PS ne s’est pas engagé à exaucer tout ce que nous demandons en dehors de l’accord, et de notre côté, nous ne sommes pas obligés de voter ce qui sort de l’accord. Nous avons simplement trouvé un terrain commun sur une liste délimitée de sujets, justifie l’élu communiste Miguel Tiago. C’est pourquoi, par exemple, nous ne pouvons pas faire tomber le gouvernement parce qu’il refuse la nationalisation du système bancaire que nous voulons : cela sort de notre accord. Nous essayons pour le moment de tirer le meilleur de la situation dans laquelle nous nous trouvons, de construire avec les conditions que nous avons. Mais cela ne veut pas dire que nous abandonnons notre lutte. »

« Le PS a retrouvé son électorat traditionnel »

Et le député de rappeler les grèves que le parti a soutenues, les manifestations auxquelles les élus ont participé, la volonté de dissoudre l’euro, l’Union européenne et l’Otan. « Notre objectif n’est pas que le PS tourne le dos à l’Union européenne et se rapproche de nous. Notre objectif, c’est d’élargir notre base. » Le PS n’a d’ailleurs aucunement infléchi sa politique européenne et le gouvernement se targue même de remplir les critères de Bruxelles au-delà des objectifs fixés.

Toutefois, à écouter Miguel Tiago, le principal ennemi du PCP semble être à l’heure actuelle le Bloco… « parti bourgeois, au fonctionnement électoraliste, dont toutes les positions sur le plan international, comme la Corée du Nord, le Venezuela et l’Angola, ne font que suivre la tendance. Certes, nous avons des positions similaires sur le plan social. Mais tout nous sépare en réalité ».

Mais, au-delà de la rhétorique, difficile d’appréhender ces divergences, à l’exclusion de la politique étrangère où le Bloco est en effet beaucoup plus critique envers des régimes corrompus comme l’Angola que le Parti communiste qui, en raison de vieux liens historiques avec le MPLA au pouvoir, ne s’est jamais avancé à critiquer le régime de l’ancienne colonie portugaise. Les deux partis de gauche, d’ailleurs, ne discutent pas entre eux. Les négociations sur les mesures gouvernementales se font de manière parallèle, entre le PS et le PC, d’un côté, et le PS et le Bloco, de l’autre.

« Cette alliance au parlement est un défi, reconnaît de son côté le socialiste Joao Galamba. Il y a des tensions entre nous. Mais cela nous force à être créatifs. Et en général, nous arrivons à un compromis qui est meilleur que notre position de départ. De plus, les citoyens voient que les compromis sont possibles à l’intérieur du parlement : c’est bon pour la santé démocratique du pays… »

utre les bénéfices sociaux indéniables de cette configuration exceptionnelle pour le parlement portugais, cet attelage inédit instille, de fait, une nouvelle manière de faire de la politique à Lisbonne : à la fois un certain pragmatisme chez des partis tenus par un solide socle idéologique, et une recherche du compromis que l’on observe généralement plutôt dans les pays du nord de l’Europe, habitués des coalitions politiques.

« Il n’y avait jamais eu dans le passé de négociation entre les partis de gauche au Portugal, reconnaît Jorge Costa. C’est la première fois de l’histoire du pays qu’un budget est voté par le Parti communiste et la gauche radicale… Cela n’est pas le résultat d’une négociation qui aurait formé un gouvernement rigide. C’est au contraire le résultat de discussions permanentes, graduelles, qui nous permettent de faire la preuve que nous ne sommes pas seulement des partis de confrontation. Les électeurs voient que nous sommes aussi capables de gouverner et de trouver des compromis. »

Une expérience inspirante pour le reste du continent ? Tous nos interlocuteurs le disent : difficile de reproduire ailleurs ce qui a marché dans un contexte exceptionnel, dans un pays particulier. Mais chacun en tire des leçons à sa manière. Pour le député Joao Galamba, il en sort une évidence pour le Parti socialiste : « En se démarquant très clairement de la droite, en s’ouvrant à la gauche radicale, le PS portugais a retrouvé son électorat traditionnel. Il faut montrer à l’électorat qu’il existe une alternative franche aux politiques de droite et que des compromis avec la gauche sont possibles. Si ce choix est proposé aux électeurs, les sociaux-démocrates européens pourront se relever. Mais s’ils restent quelque part dans l’entre-deux, sans valeur claire, ou avec une action sans rapport avec les valeurs affichées, ça ne peut pas marcher. »

Pour le député du Bloco Jorge Costa, il faut rester modeste : « Il ne faut pas surestimer le succès de la gauche au Portugal. Cela ne change rien au rapport de force au niveau européen. Il ne faut pas croire non plus que le Parti socialiste portugais a viré à gauche… Il n’y a pas eu de révolution culturelle au PS. Ce dernier a été obligé, pour des raisons de survie politique, de trouver un accord avec sa gauche. Ce n’était pas un acte volontaire pour ce parti, qui était entré en campagne en 2015 avec le programme le plus à droite de son histoire. Il l’a fait de manière contrainte et forcée. »

Quant à l’éventualité de répéter une telle alliance dans le futur, aucun de nos interlocuteurs ne s’y est engagé. Rien ne dit qu’ils voudront, ni qu’ils pourront, reproduire cet attelage dans la prochaine législature. Se glisser momentanément dans les interstices d’un pouvoir socialiste affaibli : voilà ce qu’auront réussi, pour l’heure, Bloco de Esquerda et Parti communiste portugais

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