Selon le FMI, le « risque de pauvreté » augmente en Allemagne ( site Rupture presse)
La publication toute récente des chiffres du chômage outre-Rhin a été saluée par des cris d’admiration des médias français. A y regarder de plus près, la situation est pourtant moins reluisante.
La publication des chiffres officiels du chômage en Allemagne a donné lieu à un nouveau concert de louanges : décidément, nos voisins d’outre-Rhin, après la « purge » des années 2000 administrée par le chancelier social-démocrate Gerhard Schröder, volent de performances économiques en prouesses sociales.
La réalité est pour le moins plus nuancée. Certes, le taux officiel des privés d’emploi vient de s’établir à 5,6% de la population active. Il atteint même 3% en Bavière, alors que les Länder de l’Est restent nettement plus touchés, avec des taux avoisinant les 9%.
Le nombre de chômeurs – qu’on dirait en France de « catégorie A » – s’établit à 2,5 millions. A comparer, nous précise-t-on, aux 5,3 millions dénombrés il y a douze ans.
7,3 millions de travailleurs exercent un « mini-job », non soumis à cotisations sociales patronales, et dont la rémunération est au mieux de… 450 euros par mois
Cependant, l’institut public Destatis signale qu’un million de personnes se trouvent en situation de sous-emploi. Ne sont pas non plus comptabilisés dans les chiffres du chômage « dur » les personnes en activité réduite, de même que ceux qui doivent se contenter d’un « mini-job », non soumis à cotisations sociales patronales, et dont la rémunération est au mieux de… 450 euros par mois.
7,3 millions de travailleurs « bénéficient » (!) d’un tel statut, dont 4,7 millions pour qui c’est la seule activité rémunérée. Et la tendance est à la hausse depuis dix ans.
Rapport du FMI
On imagine sans difficulté ce que peut être la vie dans de telles conditions. Dès lors, ces chiffres sont à rapprocher d’un rapport rendu public le 15 mai… par le Fonds monétaire international (FMI). Ce dernier, pourtant peu connu pour son empathie excessive vis-à-vis des damnés de la terre, pointe cependant la « hausse lente mais générale du risque de pauvreté » en Allemagne.
Pour les experts du Fonds, ce risque de pauvreté est avéré dès lors qu’un au moins des trois critères est rempli : un revenu en-dessous du seuil de pauvreté (60% du revenu médian) ; une privation matérielle récurrente ; ou un très faible taux d’activité des personnes composant le foyer.
En 2015, le risque de pauvreté concernait 20,1% de la population de la République fédérale, soit 16,1 millions de personnes
Sur ce plan, les plus récents chiffres de Destatis portent sur l’année 2015. Le risque de pauvreté concernait alors 20,1% de la population de la République fédérale, soit 16,1 millions de personnes. Les inégalités tendent en outre à augmenter sur longue période. Selon l’institut DIW, entre 1991 et 2014, les 10% des revenus les plus élevés ont cru de 27%, tandis que les 10% des revenus les plus bas perdaient encore du pouvoir d’achat.
Le FMI – dont les experts mesurent aujourd’hui avec inquiétude les dégâts sur la croissance de l’ultra-austérité à laquelle ils ont pourtant longtemps poussé, un peu partout – conseillent donc au gouvernement allemand – qui, rappellent-ils à juste titre, dispose de larges « marges de manœuvre financières » – d’agir notamment dans le sens d’une augmentation des salaires, d’une imposition plus forte des hauts revenus, et d’investissements publics importants.
Si le FMI prodigue de tels conseils, c’est que les perspectives, à moyen terme, ne doivent pas être si rassurantes que cela.