Au désarroi sans fin notre réponse c’est la Solidarité
Nous revenons sur la question de l’accès au Système National de Santé (ΕΣΥ) des patients non assurés, mais également des patients assurés, suite aux constats répétés que des patients sont exclus des prises en charge.
Examinons de manière exhaustive ce qui finalement s’applique aux personnes non assurés, aussi ce qui a récemment changé pour une partie des assurés sociaux(6), en Grèce.
Depuis 2014 (1) les personnes non assurées ont obtenu le droit d’accès aux soins primaires de santé, à l’exception des examens para cliniques, l’accès aussi aux médicaments, sans que soient pour autant éliminés les graves problèmes que nous avions exposés dans une publication (2) plus ancienne (voir article en grec http://www.mkiellinikou.org/blog/2014/07/31/farmaka-2/). Le nouveau gouvernement a procédé à partir de 2015 à des changements partiels qui dans certains cas ont amélioré la situation, mais dans d’autres l’ont aggravée. Plus concrètement pour les personnes non assurées :
– Le droit d’accès aux examens para cliniques a été accordé, uniquement dans les structures publiques de soins. Mais on observe que les attentes pour avoir des rendez-vous sont longues, notamment dans les hôpitaux publics; alors plusieurs patients reviennent vers nous demander de l’aide. Nous faisons particulièrement référence à des cas urgents, nécessitant dans l’immédiat des examens tels l’IRM, la scintigraphie ou l’écho Doppler numérique, à des situations où l’attente d’un mois mettrait en péril la vie du patient.
– En ce qui concerne l’admission des patients dans les hôpitaux publics, nous constatons une amélioration substantielle ; depuis la nouvelle loi il n’y a que très peu de cas de patients auxquels on réclame – illégalement – de payer. Nous sommes toutefois inquiets que cette amélioration ne soit provisoire puisque les budgets des hôpitaux n’ont pas été augmentés pour faire face à l’afflux accru de patients. Il ne faut pas oublier que le Système National de Santé (ΕΣΥ) sera ainsi appelé à prendre en charge trois millions environ de bénéficiaires potentiels supplémentaires, non assurés. Cela serait-il possible avec des budgets amputés de 50% depuis 2009?
– En ce qui concerne les médicaments nous constatons les faits suivants :
- a) Pour la grande majorité des personnes non assurées il reste valable ce qu’il l’était depuis 2014, c’est-à-dire qu’elles doivent payer le même restant à charge que les assurés. Une nouvelle difficulté réside dans les faits qu’il y a toujours 25% de restant à charge du patient et que le remboursement par les caisses se fait sur la base d’un prix négocié conventionnel et non du prix du marché. Au moment où la société s’appauvrit en rythme accéléré, une encore plus grande partie de la population a du mal à se procurer les médicaments nécessaires.
- b) Au sujet des personnes assurées sous le régime de la « Providence » [NdT: accordé à une partie de personnes matériellement démunies] et d’une partie des personnes non assurées, triées selon des critères bien strictes de revenus et de patrimoine(3), il est aujourd’hui dit [par le gouvernement] qu’il y aurait un accès GRATUIT aux médicaments. Ceci NE CORRESPOND PAS À LA RÉALITÉ du fait que, même si le restant à charge du patient est de 0%, il existe une différence entre le prix conventionnel du médicament négocié par la caisse d’assurance et le prix du marché et que cette différence doit être payée par le patient, qu’il soit assuré ou pas. Nous constatons ici un problème majeur puisque les personnes sous le régime de la « Providence » qui pouvaient jusqu’ici se procurer leurs médicaments GRATUITEMENT des hôpitaux publics doivent aujourd’hui payer comptant la différence ci-dessus mentionnée entre le prix conventionnel et le prix du marché, différence s’élevant parfois à de dizaines d’euros. Mais une personne ne disposant pas de ces sommes est ainsi automatiquement exclue du traitement dont elle a besoin. Ce déni de soins est CRIMINEL ; cela doit IMMÉDIATEMENT changer.
-Un accès aux soins primaires de Santé avait été accordé dès 2014 à travers le Réseau National de Santé Publique (PEDY) (1) comme que nous l’avons plus haut mentionné. Malheureusement il y a un très gros manque de personnel (1) et, compte tenu que les personnes non assurées ont accès aux structures publiques uniquement, pas aux médecins libéraux conventionnés, on observe de longues files d’attentes pour certaines spécialités. Cette situation va s’aggraver à partir de 2017 à cause du départ probable de plusieurs médecins qui, en application d’un référé de justice (1), travaillent actuellement encore au PEDY. Rappelons-nous que plus de 50% des médecins ont quitté ces Centres en février 2014 suite à la « réforme » d’EOPYY et la mise en place du PEDY, que suite au référé judiciaire certains ont pu y retourner, mais pas encore pour longtemps. Par conséquent l’encadrement médical du PEDY va se détériorer.
-Les citoyens sans numéro AMKA(4) sont totalement exclus des soins et seuls les cas graves de patients peuvent être soignés dans les hôpitaux publics, déjà bien surchargés de travail. Sur ce point-là une solution dans l’immédiat doit être trouvée aussi.
-Nous sommes devenus aussi les destinataires du désarroi d’une catégorie particulièrement sensible de patients, les patients souffrant de maladie psychique qui, à cause du nouveau cadre légal pour la délivrance des médicaments, galèrent d’hôpital en hôpital et se retrouvent pendant des jours sans le traitement nécessaire, avec toutes les conséquences que cela entraîne. La situation réelle que nous décrivons dépasse tout entendement humain. Des personnes sans ressources avec des problèmes psychiatriques qui, d’après la nouvelle circulaire du Ministère continueront de se procurer leurs médicaments uniquement dans les hôpitaux publics – la nouvelle loi pérennise une exception pour les traitements neurologiques et psychiatriques qui ne pourront pas pas être obtenus en officine de ville(5) – se font trimbaler d’hôpital en hôpital sous des prétextes tels que « le tampon sur l’ordonnance est celui d’un autre hôpital ». Le résultat est que ces personnes n’ont de choix que de s’adresser aux dispensaires sociaux. Ils arrivent vers nous dans des états d’angoisse et de désarroi.
Nous réclamons donc que les problèmes énumérés ci-dessus soient immédiatement pris en charge. C’est une condition pour que nous puissions accorder au Ministère de la Santé le droit de prétendre qu’il y a accès libre et gratuit pour les personnes non assurées au Système National de Santé (ΕΣΥ).
Les éléments que nous citons indiquent dans tous les cas que la planification politique actuellement à l’œuvre en Grèce a pour objectif le transfert des coûts vers les patients et qu’elle prendrait davantage en compte les injonctions du mémorandum, que le respect des besoins et de la particularité de chaque patient.
Malheureusement les raisons d’existence des dispensaires sociaux n’ont pas encore disparu et nous sommes appelés à revoir notre stratégie pour ne pas se transformer en béquille d’un système qui, en étant en voie d’effondrement est à la recherche d’alibis. Nous continuerons de lutter pour un accès libre, gratuit et sans entraves des personnes non assurées au Système National de Santé, en accompagnant le plus possible de patients vers les structures publiques de Santé, en surveillant les évolutions en matière de politique sanitaire et sociale, en réclamant la mise à niveau des services publics. En parallèle nous réduirons autant que possible l’offre médicale dans notre dispensaire, tout en renforçant en contrepartie l’offre de médicaments à la partie de la population qui ne peut pas en payer les frais. Tout cela sera mis en œuvre en tenant compte des critères de revenu, dans un cadre d’esprit humaniste, et en poursuivant la lutte pour le respect et l’élargissement des droits des patients.
Dans un pays qui traverse la 6e année d’austérité, dans lequel les inégalités sociales se creusent, aucun d’entre nous ne doit faire preuve de complaisance envers la réalité du système. La solidarité est l’arme la plus puissante dont nous disposons. C’est cette solidarité qui apportera le renversement tellement souhaité et nécessaire au pays.
DISPENSAIRE SOCIAL METROPOLITAIN D’ELLINIKO
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Traduction du texte original par Manolis Kosadinos