Bonne année La rubrique de Panagiotis Grigoriou

Panagiotis Grigoriou est Ethnologue et historien, chroniqueur, analyste, initiateur d’un concept de tourisme alternatif et solidaire en Grèce. Le regard de l’historien et de l’anthropologue sur l’actualité et le vécu de la crise grecque.
Bonne année !

Nouvelle année. Au soir du 31 décembre et sous une pluie glaciale et battante, les artistes interprétaient comme ils l’ont pu pour les besoins des dites festivités, organisées comme tous les ans par la municipalité d’Athènes. Sous une Acropole alors arrosée, l’image retransmise en simultané par les télévisions grecques convient bien à la situation du pays. Pétards mouillés. Pourtant tout le monde dans la mesure du possible, a pu enfin souffler un peu durant cette coupure calendaire des rythmes et des… arythmies du pays réel. Bonne année 2019 !

Musique et chant pour les enfants. Athènes, décembre 2018

Entre Noël et le Nouvel an, le climat ainsi surfait était un peu partout à la fête, les enfants, les enfants ont particulièrement apprécié. Il faut dire que les enfants en Grèce deviennent de plus en plus rares, d’après les récentes enquêtes démographiques reproduites par la presse du moment en guise de… bonne année, l’indice conjoncturel de fécondité a subi un effondrement sans précédant après 1981, pour se situer en 2016 à environ 1,3 enfant par femme.

Ainsi, les personnes âgées de plus de 65 ans représentent actuellement près du 25% de la population, et le nombre des enfants de moins de 15 ans, s’élèvent seulement à un petit 14%. C’est n’est pas glorieux et surtout, une telle “bombe démographique” signifie d’après les spécialistes que la population du pays (10 millions actuellement) diminuera de presque un million dans près 30 ans, quotidien “Kathimeriní” du 31 décembre 2018.

Alors, ni forces vives et à terme encore moins nation… si rien ne change. Les éditorialistes dignes de ce nom à l’instar de l’universitaire, philosophe et théologien orthodoxe Chrístos Yannarás, tirent donc la sonnette d’alarme. “Les prévisions pour 2019 ne permettent guère l’optimisme. Le seul et alors unique espoir tient alors de la chimère, de la croyance en cette possibilité de ‘surprise’, car chaque société, même plongée dans le déclin le plus profond peut ainsi contre toute espérance, donner naissance à sa propre mutation radicale.” “Il n’est certainement pas prudent que de miser sur le moins probable, sur ce qui est tout simplement souhaitable. Sauf que le désir commun, ou celui partagé par le plus grand nombre, est généralement porteur de cet élan issu de la surprise. Les aspirations inconcevables sont parfois à l’origine des mutations sociales ainsi radicales”, quotidien “Kathimeriní” du 30 décembre 2018. Un mélange de joie et de tristesse (en grec Charmolýpi, terme de la théologie Orthodoxe) règne ainsi pendant ces jours du seul basculement calendaire. Le tout, sous le regard des animaux adespotes devant l’Acropole, ou devant les échoppes, sans oublier cette image des réalités palpables au contact des sans-abris d’Athènes… aux sapins de Noël “qui leur sont suffisamment propres” aux dires des passants. Rythmes comme arythmies du pays réel.

Animal adespote sous l’Acropole. Athènes, décembre 2018
Noël… Sans-abri. Athènes, décembre 2018
Vitrine et échoppe. Athènes, décembre 2018
Animal adespote et terrasse de café. Athènes, décembre 2018

Au centre historique d’Athènes par ce temps dit festif, la municipalité a illuminé cette galerie marchande alors trépassée depuis un moment déjà, rebaptisée pour les besoins d’une muséographie du commerce affichée de la sorte: “Traces du commerce”. Ailleurs pourtant, le commerce reprend timidement, un phénomène en partie lié à la massification des évidences touristiques, tout comme de celles d’Airbnb, la dite plateforme n’est pas sans provoquer les frictions évidentes… entre le monde réel et le monde d’après. Nous y sommes autant à Athènes et en Grèce plus généralement.

Nos touristes d’ailleurs attendent patiemment dans le froid pour visiter l’Acropole, non loin d’une affiche locale, dans l’espoir de retrouver Maria, chatte alors perdue et ainsi désespérément recherchée. En espérant une issue heureuse quant au sort de Maria, d’autres Athéniens nourrissent les autres animaux adespotes du quartier des églises et de l’Archevêché, le tout, sous le regard attiré des visiteurs. Oui, Noël des adespotes c’est presque tous les jours ici !

L’autre quasi-nouveauté du moment tient d’une certaine massification constante de la pratique religieuse, en Grèce, et même à Athènes. Certes, ce phénomène ne peut pas être quantifié de manière exhaustive, sauf qu’il suffit de se rendre à l’église et d’observer. Au moment même où une partie du haut prélat semble accepter la mise en cause de la position de l’Église et plus généralement de l’Orthodoxie, le bas clergé et les laïques des paroisses résistent, persistent, psalmodient et signent. Une mise en cause, signalons-le, en réalité guerre ouverte initiée par les tenants de la mondialisation et leurs serviteurs locaux, à savoir et entre autres, le “gouvernement” Tsípras.

Sauf qu’en ville, comme partout ailleurs, l’Église est de plus en plus présente sur le terrain social, et aussi spirituel à défaut peut-être d’idéologie politique adéquate. Au village thessalien, Maria, l’épouse de mon cousin Vassílis, organise la distribution au sein de la paroisse, ceux du village qui n’ont plus les moyens, les “micro-retraités” comme on les nomme parfois ici, reçoivent une modeste somme, quelques vivres, ainsi que des habits, voilà pour le Noël des Grecs du pays réel et de l’Orthodoxie.

Traces du commerce. Athènes, décembre 2018
Commerces. Athènes, décembre 2018
Maria… perdue. Athènes, décembre 2018
Contre Airbnb. Athènes, décembre 2018

Grèce en hiver. En Thessalie, la ville de Tríkala connaît un afflux de visiteurs, en partie lié au parc thématique local pour enfants organisé durant la période des fêtes. En règle générale, les destinations des montagnes grecques retrouvent une certaine clientèle grecque et aussi non-grecque et c’est nouveau depuis les années de dite crise. Près d’un tiers de la population se débrouille comme on dit, entre les fonctionnaires aux revenus réguliers, puis ceux, acteurs d’une parfois nouvelle économie, partiellement immergée… et quelquefois même criminelle.

Indifférents désormais au sort des autres, car 70% de la population est paupérisée et près de la moitié des Grecs sont alors pauvres, ces rescapés ou “renouvelés” de la crise et par la crise, clientèle des partis comprise, font et feront leur vie, car de toute manière… il n’y aurait plus autre chose à réaliser. Et c’est alors la partie visible de l’ensemble mais qui ne le représente plus depuis la longue agonie de la classe moyenne. Visible même et surtout par ce temps aussi de Noël.

Pour nos animaux adespotes. Athènes, décembre 2018
Église à Athènes à fin de la messe. Décembre 2018

Noël déjà derrière nous, le tout sous une certaine douceur, celle comme on sait de la seule météo. Les plus téméraires qui sont habituellement les meilleurs, ils se sont même baignés en mer, près du port du Pirée, comme mieux encore à Nísyros, belle île du Dodécanèse. Sauf que depuis… 2019, une bonne partie du pays se trouve désormais sous la neige, et que ans les prochaines heures, le manteau neigeux couvrira alors jusqu’à certains quartiers d’Athènes.

Au village thessalien on installe des bâches sur les potagers d’hiver comme on brûle du bois. Telle est la vie locale un peu partout en Grèce. La fanfare municipale a été de sa plus belle musique en ville de Tríkala, bourgade vivante, où aux dires des habitants il fait certainement mieux vivre qu’à Athènes. Au village, le voisin Nikos et aussi cousin un peu lointain, me raconte comment et combien la commune se dépeuple, elle a perdu plus du tiers de sa population depuis les années dites de la crise.

“Les jeunes sont partis en Allemagne et les vieux donc… ils meurent. Ce n’est plus rentable du tout que de travailler la terre, toutes les terres du village finissent par être exploitées par deux ou au mieux, par trois familles, lesquelles ont alors les moyens et pour tout dire, disposent de la mécanisation nécessaire et de pointe pour y parvenir. Nous travaillons déjà et nous travaillerions davantage pour eux ; comme nos ancêtres il y a plus d’un siècle. Nous sommes les abandonnés des politiciens, le Parlement devrait un jour… sauter, sans blague.”

Au Pirée, décembre 2018
Tríkala ville. Thessalie, décembre 2018
En Thessalie, janvier 2019

Dans un sens, Chrístos Yannarás, philosophe et théologien orthodoxe ne dit pas vraiment autre chose. “La solution est simple, nous le savons tous: nous avons besoin d’un gouvernement en dehors de l’ensemble des partis du Parlement actuel et qui exclura institutionnellement la possibilité de faire fonctionner toute sorte d’un état clientéliste. Un gouvernement alors de transition, technique, issu des ‘personnalités’, doté d’un mandat de deux ans, et autant soumis au contrôle du parlement actuel, mais bénéficiant d’un appui de type référendaire pour éliminer l’interminable état clientéliste, et ainsi exclure constitutionnellement sa reconstitution”, quotidien Kathimeriní du 31 décembre 2018.

Entre le clientélisme réellement existant, puis la méta-démocratie Troïkanne et enfin leur dernier ridicule des politiciens grecs, ces mêmes politiciens ont été ainsi “tués”, déjà dans la conscience collective pour un nombre alors important de citoyens. La semaine dernière, Tsípras a inauguré à Thessalonique une station du métro de la ville… lequel fonctionnera concrètement seulement en 2022. Sur les photos publiées par une partie de la presse, on y distingue certaines… machines à ticket factices, puis, une part de la station ainsi “inaugurée” sera démontée pour que les travaux puissent alors se poursuivre. Voilà que le ridicule tue encore dans un sens.

Les élections législatives auront lieu cette année certes, le système politique survivra, et peut-être que lors des élections d’après, d’autres mouvements pourront voir le jour, authentiques, radicaux, émanant du pays réel, pour que l’unique espoir puisse ainsi tenir de la chimère en cette possibilité de surprise. Et à commencer par la dénonciation des accords avec la Troïka et évidemment par la sortie de la Grèce de l’Union européenne, c’est un minimum et ce n’est qu’un début car cette voie est bien longue et difficile.

De la musique. Tríkala en Thessalie, décembre 2018
La station de métro… inaugurée par Tsípras. Thessalonique, décembre 2018 (presse grecque)
Au Mont Athos. Décembre 2018

En attendant le miracle… ou en le préparant peut-être, mes amis m’envoient leurs photos depuis le Mont Athos, cette République monastique en Chalcidique bénéficiant d’un statut d’autonomie comparable aux périphéries et réunissant vingt monastères Orthodoxes, grecs, bulgares, roumains, russes, serbes et autres, qui mènent une vie alors d’anachorètes.

En attendant et en préparant le miracle, nous admirons autant tout l’éclat des animaux adespotes qui sont autant des nôtres. Bonne année, espoir et vérité !

Animal adespote. Athènes, décembre 2018

* Photo de couverture: Vœux du moment. Athènes, décembre 2018

Dette : un outil politique de dépossession

« Avant-propos

Déjà avant le début de ce qui deviendra la « crise grecque » en 2010, le CADTM – Comité pour l’abolition des dettes illégitimes – s’intéressait de près à la dette grecque et aux conséquences de son remboursement sur la population. Depuis plusieurs années, il s’efforce de proposer des analyses émancipatrices et des alternatives en lien avec les mobilisations grecques contre la dette illégitime. En 2015, le travail du CADTM concernant la Grèce s’intensifie, lorsque Syriza, un parti anti-austérité, gagne les élections et que la présidente du parlement grec met en place une commission d’audit, dont le porte-parole de notre réseau assure la coordination scientifique.

Depuis lors, plusieurs vidéos ont été réalisées par le CADTM en collaboration avec ZIN TV, les Productions du Pavé et les Films du Mouvement. Ces outils vidéo ont permis de vulgariser nos analyses, déconstruire des idées reçues et expliquer des mécanismes parfois complexes. Réalisées pendant ou peu de temps après l’expérience « Syriza », certaines de ces vidéos permettent également de documenter et de poser un regard critique sur cette séquence politique en tant que tentative avortée d’un pays de l’Union européenne de rompre avec l’austérité.

Ce livret compile donc ces supports vidéo qui présentent des approches, formats et objectifs différents mais portent tous sur le cas grec. Nous y détaillons leurs contenus et nous apportons des éléments complémentaires qui peuvent être utiles dans la compréhension de la situation grecque, certes, surtout si vous voulez utiliser ces vidéos comme des outils dans vos cours, vos ateliers, vos projections-débats et vos dîners de famille.

À bon entendeur·euse…

NB : les informations contenues dans son livret sont tirées du rapport de la Commission pour la vérité sur la dette grecque : La vérité sur la dette grecque, Les liens qui Libèrent, 2015. Quand ce n’est pas le cas, les sources sont mentionnées. » (Note de lecture : la-dignite-des-populations-grecques-vaut-plus-quune-dette-illegale-illegitime-odieuse-et-insoutenable/)

La dette et le système capitaliste, les transferts de richesses, la dette comme outil de dépossession, les mécanismes d’endettement comme armes de domination, l’imposition de mesures politiques par les grandes puissances au détriment des intérêts et de la souveraineté des populations…

La Grèce et la première troïka au 19e siècle, une tutelle stricte sur le budget, un programme d’austérité sévère, De 1843 à aujourd’hui, la violence et l’injustice du système de la dette, l’imposition aux populations de remboursements d’une dette qui n’est pas la sienne…

Les auteurs et autrices détaillent le travail de la commission pour la vérité sur la dette grecque et ses conclusions, les acteurs clés (FMI, BCE, FESF, MES, Troïka, Commission européenne, Eurogroupe). Je souligne l’« indépendance » de la BCE c’est-à-dire l’indépendance par rapport aux choix démocratiques des populations mais non par rapport aux anciens banquiers qui la dirigent ; la place du droit luxembourgeois et non des droits nationaux des pays concernés ; l’Eurogroupe « organe informel sans statuts ni existence juridique…

Les prêts bilatéraux ont servi « à rembourser la dette grecque aux banques européennes et à recapitaliser les banques grecques », l’argent n’a pas été versé à l’État grec, une socialisation des pertes au seul bénéfice des actionnaires des banques.

La dette ne peut être abordée du point de vue « économique » (par ailleurs, ce point de vue existe-t-il ? Ou hors des rapports sociaux de domination ?). La dette est un « concept politique ». Les auteurs et autrices parlent de dette légale mais pouvant être illégitime, de dette insoutenable, de dette illégitime, de dette odieuse, de dette illégale. Ils en expliquent le sens et fournissent des exemples pour étayer leur argumentation,

Des alternatives étaient et restent possibles, comme l’audit et la suspension unilatérale de paiement, le refus de recapitaliser les banques privées, l’annulation de la dette, la désobéissance aux créanciers, etc… la mobilisation des citoyen·nes en Grèce et en Europe…

CADTM – ZinTV : Comprendre la dette grecque

Outils vidéo & livret pédagogique

http://www.cadtm.org/Comprendre-la-dette-grecque

Bruxelles 2018, 108 pages

Didier Epsztajn

Source https://entreleslignesentrelesmots.blog/2018/12/25/dette-un-outil-politique-de-depossession/

2019 Année critique pour les banques grecques

Selon le journal financier allemand Handelsblatt, les banques grecques seraient dans une crise profonde due aux emprunts toxiques.

Dans un article intitulé « 2019, année critique pour les banques grecques » , le journal allemand note que « les quatre banques systémiques luttent avec une augmentation des dépenses et une réduction des revenus. Le revenu d’intérêts net, qui représente traditionnellement 75% du chiffre d’affaires, a diminué de 14% au cours des neuf premiers mois, tandis que les charges d’exploitation ont augmenté de 3,5%. Les pertes totales des quatre banques après le paiement des impôts ont atteint 151 millions d’euros à la fin du troisième trimestre de 2018, soit près du double par rapport à la même période de l’année dernière » écrit Handelsblatt.
Le journal financier précise encore: « Rien ne permet de penser que la situation va bientôt s’améliorer, car les banques grecques sont confrontées à d’énormes défis. En 2019, elles devraient faire preuve d’une plus grande détermination dans la réduction drastique des «emprunts toxiques », ce qui aura un effet négatif sur les capitaux propres. Jusqu’à présent, cependant, les banques systémiques semblent être suffisamment capitalisées. Mais près de 80% des fonds propres proviennent de remboursements d’impôts dus à des pertes.  »
Dans le pire des cas, la Grèce aura besoin d’une nouvelle assistance financière
Si les banques ne parviennent pas à se stabiliser, le retour de la Grèce sur les marchés est encore plus difficile, poursuit le journal financier allemand. Dans le pire des cas, la Grèce aura besoin d’une nouvelle aide financière de la part des prêteurs.
Cela fait des prêts non performants un risque pour l’ensemble de la zone euro. Selon la Banque de Grèce, la valeur des prêts improductifs a atteint 84,7 milliards de dollars en septembre. En conséquence, les expositions non performantes représentent 46,7% du crédit bancaire.
Pour 2019, les banques prévoient 30 000 ventes aux enchères immobilières. Parallèlement, le gouvernement et TAIPED collaborent avec le support technique de JP Morgan pour créer une « mauvaise banque » dans laquelle des « emprunts rouges » seront transférés à hauteur de 15 milliards d’euros et des titrisations seront réalisées avec la garantie de l’État grec. Il est fort probable que le projet sera conforme à la direction générale de la concurrence de l’UE, car il repose sur un projet similaire impliquant des banques italiennes. Reste à savoir qui investira dans ces titres, compte tenu du mauvais crédit du gouvernement grec.
Tout cela montre à quel point la situation critique de la banque est étroitement liée à la solvabilité de la Grèce. Le pays est encore loin de retourner sur les marchés. Le taux d’intérêt de l’obligation à dix ans est au taux prohibitif de 4,4%. Aucun autre pays participant à un programme n’est contraint de payer des taux d’intérêt aussi élevés aux investisseurs.
En dépit de la réserve de 26 milliards de dollars suffisante pour les deux prochaines années, il est douteux que la Grèce soit en mesure de revenir sur les marchés à des conditions satisfaisantes ou si elle sera obligée de modifier l’aide des prêteurs. La réponse à la question dépend également de l’évolution du secteur bancaire grec. « 

CK

Grèce solidaire des gilets jaunes

Gilets jaunes à Athènes :  » Avec Macron, l’histoire de la France, c’est celle de la Grèce en accéléré » par Fabien Perrier

Des centaines de Grecs ont manifesté ce week-end leur soutien au mouvement des gilets jaunes et comptent poursuivre leurs actions de solidarité. Pour eux, le cœur du problème se trouve dans les politiques européennes.

Soutien aux gilets jaunes en Grèce : acte 3. Samedi 15 décembre, pour la troisième fois à Athènes, des Grecs ont souhaité témoigner de leur solidarité au mouvement né en France. Devant l’ambassade de France, des dizaines de militants de mouvements de gauche (Confrontations – Ligne rouge) ont brandi pancartes et hauts-parleurs. A deux pas de la place de la Constitution, où est situé le Parlement grec, des dizaines d’autres, du parti Unité Populaire, ont revêtu un gilet jaune avant de manifester dans la capitale.
« Les gilets jaunes montrent la voie »

Retraitée, Mania Balsefki est dans les rangs d’Unité Populaire, petit parti d’extrême gauche né d’une scission de Syriza, en août 2015. Pour elle, « les peuples de l’Europe doivent actuellement suivre la voie des gilets jaunes. Nous rencontrons des problèmes communs, l’austérité touche toute l’Europe. » Elle se félicite de l’émergence du mouvement en Belgique, en Italie… et des manifestations sur d’autres thèmes sociaux en Hongrie ou encore en Albanie. « Les gilets jaunes montrent la voie », affirme-t-elle. Economiste et membre, lui aussi, de ce parti, Yannis Tolios ajoute : « Nous manifestons contre la politique de Macron en France. » Selon lui, « les gilets jaunes expriment les intérêts vitaux des travailleurs, en France mais aussi en Grèce. Ils contestent fondamentalement les politiques menées dans l’eurozone, par l’oligarchie, qui sont en réalité des politiques d’austérité », c’est-à-dire des baisses des dépenses publiques, des salaires et des pensions, accompagnées de hausses des taxes.

Ces politiques, la Grèce les a vécues de la façon la plus extrême entre 2010 et 2015. Le salaire minimum, de 751 euros pour tous en 2010, passe à 586 euros brut, et même 510 euros pour les moins de vingt-cinq ans. Les conventions collectives ont été supprimées et la primauté a été donnée aux accords d’entreprise qui peuvent même être conclus avec des « associations de personnes », au détriment de la représentation syndicale. Quant aux prud’hommes, ils ont été abolis… Parallèlement, l’économie a plongé dans une récession incessante – pendant cette période, le produit intérieur brut a chuté de 25%.

« Je n’aurais rien contre un appel européen de solidarité »
« Quand je vivais en France, en 2010, et que j’expliquais à mes amis que les lois passées en Grèce arriveraient en France, que nous n’étions qu’un cobaye, ils ne voulaient pas me croire… », soupire Alkistis Prepi. Cette architecte urbaniste de 33 ans est, elle, devant l’ambassade de France. Autour d’elle, les manifestants brandissent des drapeaux rouges. La jeune femme poursuit : « Partout, les classes populaires subissent actuellement une paupérisation ; elle produit des « oubliés » et ces mouvements, comme les Indignés en Grèce en 2011, leur redonnent la voix. Les lois qui passent en France s’inscrivent clairement dans le contexte de l’austérité que les dirigeants européens veulent appliquer partout en Europe. Avec Macron, c’est l’histoire grecque… mais en accéléré. » En accéléré… jusque dans la répression, affirme-t-elle, rejointe par Kostas Ksotopoulos. Menuisier, il suit de près le mouvement des gilets jaunes. « Nous sommes là en solidarité, car nous comparons leur situation avec la nôtre. En outre, nous voulons dénoncer la façon dont la police a réagi contre les manifestants. Quand nous avons vu les véhicules blindés de l’armée dans Paris, des lycéens agenouillés et les bras sur la tête devant la police, nous ne pouvions pas en croire nos yeux. »

En Grèce, le mouvement trouve un écho. Au sein même de Syriza, le parti au pouvoir, ils sont nombreux à signaler leur sympathie pour les gilets jaunes. Le député Costas Douzinas a même déclaré : « Je n’aurais rien contre un appel européen de solidarité. »

Source https://www.marianne.net/monde/gilets-jaunes-athenes-avec-macron-l-histoire-de-la-france-c-est-celle-de-la-grece-en-accelere

France Budget 2019 : le président des riches maintient le cap !

Votée ce jeudi 20 décembre par l’Assemblée nationale, la loi de finance de 2019 accentue le processus d’injustice fiscale et de régression sociale qui avait caractérisé le premier budget du quinquennat.

Attac dénonce la poursuite de la politique éhontée des cadeaux fiscaux sans contre-parties aux riches et aux entreprises.

Le gouvernement maintient la flat tax et la suppression de l’ISF, alors que la majorité des français y est opposée. L’exit tax contre les expatrié·e·s fiscaux est allégée, ce qui montre que la lutte contre l’évasion fiscale n’est pas une priorité pour ce gouvernement. Simultanément, le budget 2019 prévoit de gros cadeaux fiscaux au patronat à hauteur de 71 milliards d’euros, dont 42 milliards au titre du crédit d’impôt pour la compétitivité, l’investissement et l’emploi (CICE) dont le principal effet est de gonfler les profits des entreprises et les dividendes des actionnaires.

Pour Attac, ce budget porte un nouveau coup dur aux retraité·e·s, aux services publics et à la sécurité sociale. Aurélie Trouvé, porte-parole, s’insurge :

« en ne revalorisant que de 0.3%, les minimas sociaux et les retraites, déjà ponctionnées par la CSG, alors que l’inflation est de 1.3%, ce gouvernement organise une réduction générale du pouvoir d’achat ».

Le gouvernement s’attaque également à la protection sociale, dans le cadre du Projet de loi de la Sécurité sociale (PLFSS). Il impose une baisse de 910 millions du budget des hôpitaux, qui manquent déjà de moyens. Il exige également une réduction des dépenses de 3.8 milliards d’euros pour l’ensemble de l’assurance-maladie.

Pour Raphaël Pradeau, porte-parole d’Attac :

« derrière ces chiffres apparait une nouvelle mise en cause de la sécurité sociale, qui se trouve également profondément fragilisée par les baisses de cotisations sociales qui viennent d’être décidées ».

Les services publics sont également le parent pauvre de ce budget. Le gel du point d’indice des fonctionnaires est maintenu. Les suppressions de postes, estimées à 4170, vont se poursuivre.

Dominique Plihon, porte-parole d’Attac, dénonce :

« Ce budget 2019 montre que le projet de ce gouvernement est de poursuivre la casse des services publics, auxquels nos concitoyens sont très attachés ».

Il est urgent que le gouvernement change de cap afin de satisfaire l’exigence de justice fiscale qui s’est fortement exprimée dans la rue ces dernières semaines.

Source https://france.attac.org/actus-et-medias/salle-de-presse/article/budget-2019-le-president-des-riches-maintient-le-cap

Joyeux Noël La rubrique de Panagiotis Grigoriou

Panagiotis Grigoriou est Ethnologue et historien, chroniqueur, analyste, initiateur d’un concept de tourisme alternatif et solidaire en Grèce. Le regard de l’historien et de l’anthropologue sur l’actualité et le vécu de la crise grecque.

Joyeux Noël

Noël en vue. Au-delà de la nullité brouillonne et légendaire des forces du désordre des gouvernants, le petit peuple au quotidien s’agite comme il peut, histoire de préparer ses moments présumés exceptionnels, même si l’ennui est parfois inséparable des moments festifs, c’est bien connu. Athènes et la Grèce n’échappent guère à la règle, magasins et échoppes, visiteurs et badauds, peuple alors digne mais mutant… quand le grand espoir n’est plus d’ici. Le sourire pourtant y est, c’est l’essentiel. On vient de loin, on y va et on résiste !

Visiteurs Place de la Constitution. Athènes, décembre 2018

Athènes se transforme finalement en une destination également hivernale, au croisement on dirait des mutations et des ronds-points… et autres apories giratoires de notre modernité. Le centre-ville croule sous cette nouvelle affluence, entre le tiers de la population grecque échappant à la paupérisation en tout cas plénière, l’essor des activités dites parallèles sans oublier l’économie liée au crime en plein essor, cela fait du beau monde, puis, il y a comme visiteurs hivernaux les Airbnbistes, puis ceux les hôtels, assez remplis pour un hiver grec.

Non sans rapport, l’immobilier grec passe alors aux mains des dits “investisseurs” venus du plus vaste monde, près des deux tiers des logements Airbnb, et bien entendu presque tous les hôtels nouveaux ou rénovés leur appartiennent, à Athènes, comme d’ailleurs au reste du pays. Dans la capitale, les boutiques et les locataires… trop vieux de 40 ans sont alors expulsés, pour que leurs immeubles puissent se transformer en hôtels et autres auberges avant si possible la saison 2019, et on vient d’apprendre que dix grands ports s’ajoutent à la liste des privatisations… le grand appareillage. Toujours dans Athènes, des publicités foncièrement sauvages et à la gloire des rapaces internationaux, incitent les paupérisés de la classe moyenne à brader leurs derniers biens: “Tony Buys House achète des logements”. On vient de loin, on y va et on dépouille !

Mais c’est bientôt Noël. Les retraités devenus vendeurs de billets de loterie sont partout, s’agissant de la loterie ex-nationale, car la… “Grecque des Jeux” a été bradée aux “investisseurs” étrangers pour moins que l’équivalent d’une année de bénéfices. N’en empêche, le maire Yórgos Kamínis vient d’inaugurer l’arbre des circonstances Place de la Constitution, la fanfare municipale y est souvent, de même que nos musiciens de rue, plus nombreux que jamais, Grecs alors paupérisés au regard accablé, interprétant le bon vieux Rebétiko, cette musique populaire apparue dans les années 1920, à la suite des vagues migratoires des populations, principalement, grecques expulsées d’Asie mineure par la Turquie kémaliste.

Fanfare municipale et arbre de Noel. Athènes, décembre 2018
Quand les retraités deviennent vendeurs de billets de loterie. Athènes, décembre 2018
Tony House… achète des logements. Athènes, décembre 2018

Pays moderne, méconnaissable. Plus d’une saisie par minute et par journée ouvrable est déclenchée par l’administration fiscale appartenant à la Troïka, désormais pour une dette envers l’État de moins de 500 euros, et par ailleurs, quatre millions sur dix millions d’habitants sont redevables envers le fisc, d’après les reportages du jour, informations radiophoniques du 22 décembre, (et presse grecque de la semaine). Comme il est noté ailleurs, notre société “elle est désormais exposée à la rapacité de forces qu’elle ne contrôle pas et qu’elle ne compte ni n’espère reconquérir et dompter”. C’est peut-être pour cette raison, que certains organisent à Athènes des conférences pour ainsi populariser la méthode Gandhi. Pourtant, les Grecs regardent les gilets-jaunes français avec émotion et espoir.

Ainsi à Kos, île du Dodécanèse, et pas qu’à Kos, l’administration fiscale Troïkanne persiste et alors elle encaisse. Témoignage de mon ami Olivier Delorme sur sa page Facebook du 20 décembre: “La Grèce va mieux, comme dit Moscovici: chronique du racket au quotidien. En transit à Kos, ce matin entre deux bateaux, nous nous installons dans un café. On commande deux thés, on les boit, en attendant d’en recommander deux autres. Soudain, deux agents du fisc débarquent, avisant notre table avec consommation mais sans encore de note. Et dresse un PV… Je comprends la situation, que la patronne et la serveuse tentent d’expliquer, je tente d’intervenir pour confirmer. Rien à faire ! Au final, nous recommandons deux thés et lorsque les deux notes arrivent, nous constatons que la première a bien été émise à l’heure même où nous avons été servis. Le cafetier est donc taxé non pour ne pas avoir édité de note, mais pour ne pas l’avoir déposée sur notre table en même temps que les thés.”

“Trois minutes plus tard, F. voit sur un journal grec en ligne que le gouvernement a donné instruction de multiplier les descentes du fisc dans les commerces durant les fêtes de fin d’année. Pendant ce temps-là l’optimisation fiscale des gros au Luxembourg de Juncker est toujours parfaitement légale. Et hier un ami nous disait qu’il attend depuis plus d’un an la restitution d’une saisie sur le compte de sa compagne reconnue comme indue par la justice… Mais qu’il se heurte à un mur. Dans le même moment où le gouvernement Tsípras prétend faire un cadeau de Noël aux gens qu’il a contribué à paupériser, il fait les poches à ceux qui ne le sont pas encore tout à fait. Comme dit Moscovici.”

Touristes chinois. Athènes, décembre 2018
La presse et les élections supposées anticipées. Athènes, décembre 2018

“Chacun doit incarner le changement qu’il souhaite apporter au monde”, d’après Gandhi, pendant la presse prétend que les élections anticipées seraient pour bientôt, sauf qu’il ne s’agit plus de s’en émouvoir du côté du peuple. Chacun doit donc incarner le changement, dont sans doute nos touristes venus de Chine avec leurs guides, pour y découvrir les douceurs réelles ou supposés helléniques sous l’Acropole. On vient de loin, on y va et on prend des selfies !

Pays moderne, certes méconnaissable, le “tiers ainsi payant” de la population persiste et signe, d’après la presse de la semaine, aux destinations hivernales du pays, le taux de remplissage des hôtels avoisine près de 90%, certes, les séjours sont très courts mais c’est alors nouveau depuis les années de l’effondrement. Sauf que ce ne sont pas forcement les mêmes vacanciers qu’avant, auxquels s’ajoutent les nouveaux très riches, issus des autres pays des Balkans, pays pourtant largement paupérisés où la classe moyenne est quasi-inexistante.

Pays moderne et dans Athènes, des humains comme parfois tant leurs animaux entraînés pour la cause, sollicitent les passants pour y laisser une petite pièce, clients ainsi des boutiques, touristes, badauds, voire même les migrants, anciens ou nouveaux… en plein circuit-découverte de leur univers nouveau. Au-delà de la nullité brouillonne et légendaire des forces du désordre des gouvernants, la vie continue ainsi coûte que coûte.

Humains comme parfois leurs animaux. Athènes, décembre 2018
Humains comme parfois leurs animaux. Athènes, décembre 2018
Humains comme parfois leurs animaux. Athènes, décembre 2018

Signe des temps qui sont bien les nôtres, un acteur connu et bien sympathique, Pávlos Kontoyannídis, vient de créer son “Mouvement des pauvres” lequel participera aux prochains scrutins, c’est pour donner comme il déclare, de la voix aux paupérisés, “c’est-à-dire à ce 90% de la population qui n’a plus rien à perdre ou qui ne s’en sortent plus dignement comme avant” presse grecque de la semaine. Sincérité politique ou alors opportunisme ? Difficile à savoir.

La Grèce n’échappe ainsi guère à la règle, magasins et autres échoppes… à bras ouverts, des stéréotypes à peine surannés, mais également, une criminalité qui coure alors les rues, criminalité alors petite moyenne et grande. Dans la même série, notons le cas de certains patrons parmi ceux qui versent encore la maigre prime de Noël obligatoire par la législation à leurs employés, mais qui vont escorter par la suite leurs même employés… jusqu’aux guichets automatiques pour que ces derniers retirent alors cette somme de leurs comptes, et pour ainsi la restituer aux dits patrons. C’est bien connu, l’accablement est parfois inséparable des moments festifs, presse grecque du 22 décembre.

Pendant ce temps, la galerie des affairistes réels de SYRIZA s’amuse comme jamais, promettant en même temps de milliers d’embauches dans la fonction publique par le seul souci du clientélisme et de la survie de… caste, la leur. Et à Athènes, les retraités du secteur des banques réclament… le retour de leurs cotisations ainsi volées. Grande criminalité et surtout hybris.

Retraités des banques devant une agence. Athènes, décembre 2018
Retraités des banques devant une agence. Athènes, décembre 2018
Criminalité dite petite. Athènes de jour, décembre 2018
Hilarité. Tsípras et sa bande. Presse grecque, décembre 2018

Noël en vue. Au-delà de la nullité brouillonne et légendaire des forces du désordre des gouvernants, le petit peuple au quotidien se secoue comme il peut, histoire de préparer ses moments présumés exceptionnels.

Dans les cafés, des retraités exposent leur quotidien à d’autres retraités, aux inactifs comme aux bistrotiers. On évoque volontiers et autant la vie en ville, tout comme les nouvelles du village d’origine, la récolte des olives, les… nouveaux péages, le prix du bois pour se chauffer. La dite grande politique est le plus souvent absente, elle n’est plus de ce monde et c’est définitif aux yeux d’une bonne partie des Grecs en tout cas.

Les mentalités évoluent et les masques tombent. D’après le dernier dit Eurobaromètre, seulement 24% des Grecs font encore confiance à l’Union européenne, et c’est le taux le plus bas enregistré dans la dite Union, presse grecque de la semaine. Donc, c’est bientôt Noël, si l’on veut bien considérer qu’il s’agit plutôt d’une lame de fond un peu partout entre Athènes, Rome, Paris ou Dublin.

Bientôt Noël. Athènes, décembre 2018

Noël et ainsi l’arbre de… Yórgos Kamínis, la fanfare municipale, et surtout nos musiciens de rue comme des tavernes interprétant le bon vieux Rebétiko. “Pour moi, c’est d’abord cela, le rebétiko: une atmosphère autant qu’un chant, des visages silencieux et marqués autant que des danses ou des cris, des odeurs mêlées de vin résiné, d’ouzo, de sciure fraîche sous les tables, de mégots refroidis”, écrivait il y a maintenant plus de quarante ans Jacques Lacarrière dans son récit “L’Été grec”.

Des visages silencieux et marqués autant que des danses ou des cris, des odeurs mêlées de vin, Joyeux Noël !

Animal adespote sous abri. Athènes, décembre 2018
* Photo de couverture: Nos musiciens de rue. Athènes, décembre 2018

La dette grecque : Quelques repères utiles

La dette grecque : Quelques repères utiles par CADTM Belgique

Cet article correspond au Premier Chapitre de la brochure Comprendre la dette grecque, réalisée et éditée par le CADTM et ZinTV.

La dette est un rouage clé du système capitaliste. Elle permet en effet un transfert de richesses de la majorité de la population vers les détenteurs de capitaux. Autrement dit, elle est un outil d’enrichissement, une source de profit pour les plus riches. On parle ainsi de la dette comme levier d’accumulation du capital.

« La dette d’État, c’est-à-dire l’aliénation de l’État – qu’il soit despotique, constitutionnel ou républicain – marque de son empreinte l’ère capitaliste […]. La dette publique opère comme un des agents les plus énergiques de l’accumulation primitive. Par un coup de baguette, elle dote l’argent improductif de la vertu reproductive et le convertit ainsi en capital, sans qu’il ait pour cela à subir les risques, les troubles inséparables de son emploi industriel et même de l’usure privée. »

Karl Marx, Le Capital, Livre 1, 1867,
Édition et traduction sous la responsabilité de Jean-Pierre Lefevre,
Voir https://inventin.lautre.net/livres/MARX-Le-Capital-Livre-1.pdf, p. 897 et p. 847

Si les traces de systèmes de crédit sont très (très) anciennes et précèdent largement l’avènement du système capitaliste, la dette publique apparaît comme un des mécanismes d’accumulation primitive du capital dès les 14e et 15e siècles dans les républiques marchandes de Venise et de Gênes, puis se généralise dans les puissances européennes à l’époque des conquêtes coloniales et de la création de manufactures (du 16e au 18e siècles). Au 19e siècle, l’endettement public accompagne la formation du capitalisme industriel.

Ce transfert de richesses inhérent au mécanisme d’endettement ne procède pas du seul fait du remboursement des intérêts. En effet, la dette s’avère un outil de dépossession. En témoignent les privatisations massives des années 80 et 90 imposées par les institutions financières internationales dans les pays du Sud sous programmes d’ajustement structurel ou bien en Grèce aujourd’hui, où le patrimoine public est bradé. Notons que les dettes privées peuvent aussi être le moyen de déposséder les classes populaires de leurs biens. Ce fut le cas, entre 2400 et 1400 avant JC., en Mésopotamie lorsque l’État prenait les terres des paysan·ne·s pour impayés. Un phénomène similaire a lieu actuellement en Grèce avec la mise aux enchères de maisons suite à des crédits ou factures non payés [1]. Ces dépossessions et ces transferts de propriété se font toujours en faveur des créanciers, c’est-à-dire de ceux qui possèdent de l’argent et en prêtent ; et au détriment des autres qui faute d’avoir des capitaux doivent en emprunter.

Le caractère profondément politique du mécanisme d’endettement doit aussi être pris en compte, dans la mesure où les dettes sont des armes de domination, de contrôle et de coercition puissantes. La dette publique est ainsi utilisée par les puissances économiques pour servir leurs intérêts économiques et les intérêts privés qui y sont liés, que ce soit en termes d’acquisition de marchés ou de ressources, mais aussi en termes de conquête de territoires et d’expansions impérialistes, (étroitement liées aux intérêts économiques). La colonisation de la Tunisie en 1881 et du Maroc en 1912 par l’État français ou encore de l’Égypte à partir de l’invasion franco-britannique de 1882 en sont quelques exemples. Le non remboursement de pays de la périphérie envers les pays du centre ou les banques de ces mêmes pays a servi dans de nombreux cas à asseoir des menaces d’interventions militaires. Dans le cas du Mexique, ces menaces ont été mises à exécution. Après que le président Benito Juárez eut répudié des dettes illégitimes en 1861, les principales puissances créancières s’accordent pour intervenir militairement dans le pays. En janvier 1862, la France envahit le Mexique puis y installe en 1864 un prince autrichien qui prend le titre de Maximilien Ier, empereur du Mexique.

Mais cette domination politique de certains pays rendue possible par la dette publique est plus indirecte qu’une conquête territoriale. C’est le cas de la Grèce ou des pays du Sud, qui sous prétexte de niveaux d’endettement trop élevés se sont vu imposer des mesures politiques dictées par les grandes puissances au détriment de leurs intérêts et leur souveraineté.

Dès 1821, la Grèce contracte des prêts auprès de banques de Londres pour financer la guerre d’indépendance contre l’empire ottoman. Notamment deux emprunts qui équivalent à 120% du PIB du pays à l’époque. Une bonne partie de ces prêts sert à l’achat d’armement et autres équipements produits au Royaume-Uni. Les taux d’intérêt pratiqués sont très élevés (8,33%), tandis que les montants réellement transférés par les banques londoniennes à la Grèce sont largement inférieurs aux montants empruntés (en raison de commissions prélevées par les banquiers) mais doivent être remboursés dans leur intégralité. Le coût de ces emprunts pour la Grèce s’avère donc exorbitant. Si bien qu’en 1826, elle décide de suspendre le paiement de sa dette. En effet, en plus du coût des opérations militaires, en pleine crise, les banques européennes ont fermé le robinet du crédit refusant à la Grèce de contracter des nouveaux emprunts pour rembourser les anciens.

Le Royaume-Uni, la France et la Russie profitent alors de cette situation pour mettre à la tête du pays un prince allemand qui a pour tâche principale de continuer à honorer les dettes du pays.

Il s’agit de la première Troïka européenne de l’histoire grecque. À l’instar de la Troïka actuelle, celle-ci va d’abord soutenir les banquiers britanniques en s’assurant que les remboursements des emprunts seront effectués par la Grèce. Pour cela, elle va demander à une banque française d’émettre un emprunt pour le compte de la Grèce, tout en se portant garante auprès des banques en cas d’un non-paiement grec. Seulement 20 % de la somme empruntée vont être perçus par l’État grec, le reste ira dans une commission perçue par la banque Rothschild, une indemnisation de l’empire Ottoman suite à l’indépendance grecque ; le Royaume-Uni, la France et la Russie vont également en prendre une partie et enfin une somme non négligeable servira à couvrir les frais du prince Othon et à l’achat d’armes. Bien évidemment cette Troïka va exiger de la Grèce qu’elle rembourse l’intégralité de cet emprunt illégitime.

Ces trois puissances vont exercer une tutelle stricte sur le budget grec (et ce en violation de la nouvelle constitution du pays), exigeant une augmentation des taxes et impôts et une réduction des dépenses sociales et des investissements publics.

En 1843, suite à l’impossibilité où se trouvait la Grèce de rembourser ses dettes, les trois puissances européennes lui imposent un programme d’austérité sévère, tel un mémorandum, afin qu’elle poursuivre le remboursement. Parmi les mesures, on trouve le licenciement des fonctionnaires, la suppression des services de santé, la suspension du versement des retraites…

Puis, après une restructuration de la dette publique grecque en 1878 au bénéfice des créanciers, une « Commission financière internationale » est mise en place par les puissances européennes en 1898, qui institutionnalise la tutelle financière de la Grèce afin d’assurer les remboursements et de préserver les intérêts des grandes banques privées de ces pays.

Ça ne vous rappelle rien ?

Pour aller plus loin :
Toussaint Éric, « La Grèce indépendante est née avec une dette odieuse », CADTM, avril 2016.
Toussaint Éric, « Grèce : La poursuite de l’esclavage pour dette de la fin du 19e siècle à la Seconde Guerre mondiale », CADTM, mai 2016.

L’utilisation des dettes (publiques comme privées) comme outils de transfert de richesses et armes politiques est donc loin d’être un phénomène nouveau et spécifique à la Grèce. Toutefois, on ne peut nier qu’aujourd’hui le cas de la Grèce devient emblématique de la violence et l’injustice de ce système dette, que ce soit du point de vue de l’appauvrissement de la majorité de la population engendré par le remboursement d’une dette qui n’est pas la sienne tandis que d’autres s’enrichissent grâce à cette même dette, ou de la mise sous tutelle de la Grèce qui atteint un niveau tel que l’on peut qualifier aisément le pays de « colonie européenne de la dette ».

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LES 3 MEMORANDUMS

Mai 2010
1er mémorandum : 110 mds d’euros

Prêt du FMI (30 mds prévus → 20 mds ont été déboursés ) + prêts bilatéraux des pays européens (80 mds prévus → 52,9 mds ont été déboursés)

Mars 2012
2e mémorandum : 159,8 mds d’euros

Prêt du Fond européen de stabilité financière – FESF (141,8 mds prévus → 130,9 mds ont été déboursés et utilisés) + prêt FMI (18 milliards prévus → 12 mds ont été déboursés)

Juillet 2015
3e mémorandum : 86 mds d’euros

Prêt du Mécanisme européen de stabilité – MES


LA CRÉATION DE LA COMMISSION POUR LA VÉRITÉ SUR LA DETTE GRECQUE

La Commission pour la vérité sur la dette grecque a été créée le 4 avril 2015 via décret par la présidente du parlement hellénique Zoé Konstantopoulou. La coordination scientifique des travaux a été confiée à Éric Toussaint, porte-parole du réseau CADTM. Cette commission se compose d’une trentaine de membres : la moitié de Grecques et Grecs, l’autre d’internationaux (de dix nationalités différentes). Cette commission a eu pour mandat d’analyser la dette publique grecque entre 2010 et 2015 et d’en identifier les parties illégitimes, odieuses, illégales et insoutenables ainsi que de formuler des arguments juridiques, qui pourraient justifier son annulation.



Le FMI c’est quoi ?

Le FMI (Fonds Monétaire international) est une institution financière internationale créée en 1944 à Bretton Woods (en même temps que la Banque mondiale, son institution jumelle). 189 pays en sont membres. Son but officiel est de stabiliser le système financier international en réglementant la circulation des capitaux. Pour se faire le FMI accorde des prêts aux pays en difficultés financières. La contrepartie de ces prêts est la signature d’un accord imposant des mesures d’austérité. Cet argent est mis à disposition par tranches, après vérification de l’application effective des mesures exigées. Certaines tranches pouvant être suspendues si le pays ne satisfait pas aux exigences.
Le FMI est dirigé par une personnalité européenne. Depuis juillet 2011, sa directrice est la Française Christine Lagarde, qui a succédé à Dominique Strauss-Kahn.


La BCE c’est quoi ?
La BCE (Banque centrale européenne) est une institution européenne créée en 1998. Les pays de la zone euro lui ont transféré leurs compétences en matière monétaire. La BCE est donc responsable de la mise en œuvre de la politique monétaire dans ladite zone. Dans cette optique son objectif principal est d’assurer la stabilité des prix en visant une inflation annuelle maximale de 2%. Ses statuts la veulent « indépendante » politiquement mais elle est dirigée par d’anciens banquiers et influencée par les établissements financiers privés. Et bien que ses statuts la limitent à des compétences monétaires, la BCE se prononce régulièrement sur des enjeux liés aux affaires internes de pays, au marché du travail…
Les statuts de la BCE ainsi que le traité de Lisbonne lui interdisent (tout comme aux banques centrales de l’Union européenne) de prêter directement aux États. Elle prête donc aux banques privées qui à leur tour prêtent aux États à un taux plus élevé.


Le FESF, c’est quoi ?
Le FESF (Fonds européen de stabilité financière) est une société anonyme de droit luxembourgeois créée en 2010 dans le contexte de la crise des dettes souveraines en Europe. Son objectif officiel est de garantir la stabilité financière de la zone euro. Pour se faire, elle prête de l’argent aux pays en difficultés financières. Ces prêts sont conditionnés à la mise en œuvre de mesures d’austérité. On dit souvent que le FESF est une sorte de FMI européen. Pour financer ses prêts, le FESF emprunte de l’argent sur les marchés financiers. Des emprunts qui sont garantis par les pays de la zone euro en cas de défaut. Le FESF a été remplacé par le MES en 2012, mais il continue à gérer les remboursements des prêts effectués.


Le MES, c’est quoi ?
Le MES (Mécanisme européen de stabilité) est créé en 2012 pour prendre le relais du FESF, qui était mis en place de manière temporaire. Il poursuit donc les mêmes objectifs et a les mêmes modalités d’action. Toutefois, contrairement à son prédécesseur, le MES est une institution financière internationale vouée à perdurer dans le temps.


La Troïka, c’est quoi ?
La Troïka est un trio d’institutions informel qui n’est prévu dans aucun traité et ne dispose pas de statuts. Elle se compose de la BCE, du FMI et de la Commission européenne. Son rôle est d’assurer le suivi des pays confrontés à d’importantes difficultés financières et bénéficiant de prêts accordés par l’Union européenne et le FMI. Afin de vérifier la mise en œuvre des réformes exigées en contrepartie des prêts, la Troïka organise des visites d’inspection dans les pays signataires : on parle de « revues ». Lors de ces revues, la Troïka n’hésite pas à demander la suppression de certaines mesures prises par les organes démocratiques du pays ou encore de réécrire un projet de loi avant que celui-ci soit examiné par les instances parlementaires. Si la Troïka estime que sa revue n’est pas satisfaisante elle peut retarder le versement des tranches des prêts. La Troïka est intervenue à trois reprises en Grèce (2010, 2012 et 2015), en Irlande en novembre 2010, au Portugal en mai 2011et à Chypre en mars 2013.


La Commission européenne, c’est quoi ?
La Commission européenne est une institution créée en 1958 par le traité de Rome. Elle est l’organe exécutif de l’Union européenne. C’est elle qui en définit l’orientation politique et stratégique. Elle est composée d’un·e commissaire européen·ne par État membre, soit 28 commissaires, et d’un·e président·e. Le président actuel est Jean-Claude Juncker. À l’origine elle a été pensée comme « le moteur de l’intégration » en prétendant être garante de l’intérêt général de l’Union européenne. Le contraire a depuis longtemps été prouvé puisque les décisions et actions de la Commission européenne préservent en réalité les intérêts des grosses entreprises et du capital européen.


C’est quoi l’Eurogroupe ?
L’Eurogroupe c’est la réunion mensuelle au Luxembourg des ministres des Finances des États de la zone euro. Il a été créé en 1997 par le Conseil européen et sa première réunion s’est tenue en juin 1998. L’Eurogroupe est un organe informel, sans statuts ni existence juridique. Pourtant en deux décennies il est devenu l’un des principaux organes décisionnels en matière de politique économique et monétaire de l’Union européenne. Depuis décembre 2017, c’est le ministre portugais Mario Centeno qui est le président de l’Eurogroupe, succédant au Néerlandais Jeroen Dijsselbloem (2013-2018) et au Luxembourgeois Jean-Claude Juncker (2005-2013).


Voir tableau sur l’Évolution du taux d’endettement public de la Grèce et Qui détient la dette publique grecque aujourd’hui ? sur le site du CADTM



Notes

[1] Pour en savoir plus sur les mises aux enchères aujourd’hui en Grèce voir cet entretien : Betavatzi Eva et Filippides Filippos, « Les banques et l’État grecs essaient de prendre nos maisons tous les mercredis au tribunal de paix », CADTM, décembre 2016.

La crise laisse les grecs affamés et les enfants mal nourris

La situation dramatique vécue par les Grecs à cause de la crise qui a frappé le pays est décrite par la radio allemande « Deutsche Welle » sur la base d’une enquête de l’Institut transnational selon laquelle 14% des petits enfants grecs souffrent de malnutrition car ils ne peuvent même pas assurer tous les deux jours un plat de viande. , poulet ou poisson.

Dans le reportage intitulé « La crise de la dette laisse les Grecs affamés et les enfants atteints de malnutrition », il est noté que ce chiffre est le double de celui enregistré en 2008, au début de la crise.
Le reportage commence par une description de la situation chez un poissonnier du centre de Marathon. « Il est midi et la poissonnerie est toujours vide. Personne n’est encore venu… » , déclare la propriétaire Maria Hassotou. « Comme ils ne sont pas encore venus, ils ne viendront probablement jamais… Encore un jour avec des légumineuses et des pâtes. »
Le rapport souligne les données de recherche de l’institut basé à Amsterdam, car les enfants sont les plus touchés par la crise économique qui dure depuis huit ans et qui a laissé 25% de la population active sans travail. Ce chiffre est quatre fois supérieur à ce qu’il était avant le début de la crise en 2009.
En conséquence, environ 14% des enfants souffrent de malnutrition.

Du côté des retraités c’est pas mieux : « Il y a des signes de faim partout. Et si je n’avais pas d’autre moyen de mettre de la nourriture sur la table pour mes enfants, je regarderais dans les poubelles « , a déclaré George Kricky, retraité, à DW, ajoutant qu’il avait vu un ami en train de regarder la poubelle d’un supermarché pour trouver quelque chose pour sa famille.
L’histoire met en lumière la réalité de milliers de ménages basée sur le revenu des grands-parents. « Mais les retraites ont été réduites 13 fois depuis 2009, laissant les familles avec des revenus considérablement moindres, sans même avoir accès au nécessaire », a ajouté le rapport.
Selon l’enquête du Transnational Institute, 9% des enfants grecs ne peuvent pas manger au moins un repas protéiné alors que ce taux était de 4% avant le début de la crise.
Les gens se murent dans le silence : « Inquiets d’admettre cette situation difficile, plusieurs chefs de famille ont choisi de souffrir en silence », écrit DW, ajoutant que pour cette raison, le taux de malnutrition pourrait être encore plus élevé.
Il cite le témoignage d’une femme de Marathon: « Beaucoup de femmes de mon quartier me demandent de leur apporter un peu de nourriture parce qu’elles ont honte d’aller à la soupe populaire. Les Grecs sont dignes et cachent leurs souffrances depuis des années, mais maintenant la faim est omniprésente. Et le pire semble être en expansion. « 

Le journaliste de DW affirme qu’il y a beaucoup d’incidents avec des enfants qui échouent à l’école à cause de la faim. Il cite également les témoignages d’enseignants selon lesquels des élèves vont à l’école pendant des mois en ayant manger que du riz. « Certains enfants ont été identifiés pour fouiller les ordures ».

L’ église orthodoxe grecque du pays fournit une aide importante pour nourrir environ 60 000 personnes par jour. Mais la politique de pauvreté a laissé des débris sur son passage et de nombreuses familles continuent de souffrir.

« Les économies ayant disparu, certains ont même été obligés de laisser leurs enfants dans des institutions qui choisissent de leur rendre visite deux ou trois fois par semaine car ils ne peuvent pas subvenir à leurs besoins essentiels », ajoute le rapport.

L’ancien Rapporteur spécial des Nations Unies sur le droit à l’alimentation et membre de la Commission des droits économiques et sociaux des Nations Unies a suggéré qu’il fallait rechercher la responsabilité de la violation du droit d’accès à l’alimentation.
« Il est peu probable que les responsables à Athènes soutiennent bientôt une telle action. Depuis le début de la crise, les gouvernements grecs ont consenti à des mesures d’austérité strictes et à des mesures fiscales en contrepartie de prêts qui ont préservé le pays « , a rapporté DW.

SOS Méditerranée répond aux questions

Chers amis,

Le vendredi 7 décembre nous vous partagions notre décision de mettre fin à l’affrètement de l’Aquarius et notre volonté de trouver au plus vite un nouveau navire pour repartir sauver des vies en mer. Suite à cette annonce, nous avons reçu de nombreuses questions de votre part comme par exemple :

Est-ce que la fin d’affrètement de l’Aquarius signifie la fin des opérations de sauvetage pour SOS MEDITERRANEE ?
Que vont devenir l’Aquarius et le reste de l’équipage ?
En quoi changer de navire vous permettra de continuer vos opérations de sauvetage ?
À quoi vont servir les dons tant que vous n’avez pas de nouveau navire ?
Quand pensez-vous repartir ?

Toutes ces questions sont importantes et vous en avez certainement d’autres. Nous vous proposons de nous retrouver en direct.

Mercredi 19 décembre à 12h30 sur YouTube

Sophie BEAU, cofondatrice et directrice de l’association SOS MEDITERRANEE France et Frédéric Penard, directeur des opérations de SOS MEDITERRANEE répondront à vos questions. Cette « discussion » durera environ 45 minutes et sera accessible via ce lien privé auquel vous pouvez accéder librement.

Vous pourrez poser vos questions en direct dans les commentaires mais pour cela il faut vous créer ou vous connecter avec un compte YouTube. Si vous préférez nous poser vos questions par écrit, vous pouvez nous envoyer un email jusqu’au 18/12 à question@sosmediterranee.org.

Face à l’inacceptable, restons mobilisés pour repartir sauver des vies en mer.

Merci pour votre engagement,

L’équipe de SOS MEDITERRANEE
#TogetherForRescue

 

 

Annonces de Macron : un enfumage

Annonces de Macron : un enfumage pour préserver l’injustice fiscale et les cadeaux faits aux riches par Attac France

Alors que l’ensemble du pays est parcouru d’une puissante aspiration à plus d’égalité sociale et fiscale, Emmanuel Macron s’est enfin exprimé, après trois semaines de silence, mais refuse de changer de cap.

Derrière quelques mesures « sociales » qui cachent un affaiblissement de la protection sociale et le refus d’une augmentation générale des salaires, Emmanuel Macron a surtout confirmé les très importants cadeaux fiscaux faits aux plus riches (ISF, Flat tax, etc), son agenda néolibéral (réformes des retraites, de la fonction publique et de l’assurance chômage) et la poursuite de la baisse des dépenses publiques au détriment de la présence et de la qualité des services publics.

L’exécutif pense-t-il vraiment pouvoir se sortir d’une crise sociale et politique majeure en accélérant la mise en œuvre d’une politique largement rejetée dans le pays ?

Emmanuel Macron est toujours le Président des ultra-riches : il a fait le choix de préserver les intérêts des 1% les plus riches en ne revenant pas sur la suppression de l’ISF, l’allégement de l’Exit tax ou l’instauration de la Flat tax. Contrairement à ce qu’il prétend, l’exécutif n’a pas écouté les exigences populaires exprimées depuis des semaines en faveur de mesures fiscales plus redistributives : il maintient le cap d’une politique profondément inégalitaire et inefficace qui grève le budget de l’État.

L’annonce d’une hausse du SMIC de 100 euros est une véritable arnaque puisque le SMIC n’est pas revalorisé, pas plus que les salaires juste au-dessus du SMIC. Le salaire perçu va augmenter via la hausse de la prime d’activité, qui était déjà dans les tuyaux. Magnifique tour de passe-passe que tente le Président. Plutôt que de faire financer les hausses de salaires par les entreprises, il fait payer les contribuables. La défiscalisation des heures supplémentaires profitera d’ailleurs aux salarié·e·s les mieux payé·e·s et qui ont la possibilité d’en faire. C’est par ailleurs des ressources en moins pour le budget de l’État. La désocialisation conduira mécaniquement à une fragilisation de notre système de protection sociale »

Les populations les plus en difficulté sont par ailleurs oubliées : aucune augmentation des minimas sociaux n’a été annoncée, tandis que les retraites ne sont toujours pas indexées sur le coût de la vie, une revendication exprimée depuis plusieurs semaines. Étudiant·e·s et lycéen·ne·s, mobilisé·e·s dans la rue et largement réprimé·e·s, sont complètement ignoré·e·s par l’exécutif.

Emmanuel Macron s’entête à poursuivre une politique qui consiste à basculer la fiscalité des entreprises sur les ménages et à préserver les intérêts acquis des multinationales (CICE, CIR, etc) et de leurs actionnaires ; alors que les investissements-climat des entreprises françaises stagnent depuis plusieurs années et pourraient même baisser en 2018, l’exécutif rate l’occasion de réorienter, par voie réglementaire et fiscale, les investissements privés vers la transition écologique et ainsi réduire les émissions de gaz à effet de serre du pays qui sont reparties à la hausse

En refusant de réduire structurellement les inégalités fiscales et sociales dans le pays, Emmanuel Macron confirme avoir endossé son costume de « Président des riches » au détriment des intérêts des plus pauvres et plus précaires, mais également au détriment d’une politique de transition écologique chaque jour plus nécessaire. La baisse confirmée de la dépense publique ne pourra qu’aggraver la situation des services publics et de la protection sociale. La poursuite de son agenda néolibéral (réformes des retraites, de la fonction publique et de l’assurance chômage) illustre le mépris et l’incompréhension du gouvernement envers les mobilisations en cours. De plus, Emmanuel Macron n’hésite pas à faire un appel du pied à l’extrême-droite sur la question de l’immigration pour tenter de détourner la colère sociale actuelle.

Le pouvoir reste sourd aux exigences légitimes exprimées. Attac France appelle ses adhérent·e·s, et ses comités locaux à rester mobilisé·e·s et être présent·e·s dans les mobilisations des jours à venir, notamment le vendredi 14 à l’appel d’organisations syndicales et samedi 15 décembre à l’occasion de l’acte 5 du mouvement des « gilets jaunes », pour exiger plus de justice sociale, fiscale et écologique.

P.-S.

Crédits photo : Brice Le Gall

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