L’austérité infligée à la Grèce soulève la question des indemnisations

Les dommages causés par l’austérité en Grèce soulèvent la question de la responsabilité des institutions européennes. Et d’une éventuelle indemnisation. 40 % des populations rurales sont aujourd’hui exposées au risque de pauvreté en Grèce.

« Le niveau des dommages pourrait augmenter la responsabilité de l’UE, mais le problème est d’identifier ceux qui ont été directement touchés par les mesures d’austérité et qui pourraient porter l’affaire devant les tribunaux », a-t-il déclaré.

Selon lui, l’article 340 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne « stipule très clairement que les dommages causés par la faute des institutions européennes devraient être indemnisés ».

Olivier de Schutter, qui a été rapporteur spécial des Nations unies sur le droit à l’alimentation de 2008 à 2014, a commenté un rapport publié le 20 novembre, qui concluait que les mesures d’austérité prises pendant la crise grecque avaient conduit à une violation du droit à l’alimentation.

Il a noté que le droit à l’alimentation avait tout simplement été ignoré lorsque des mesures d’austérité avaient été conçues et appliquées en Grèce.

Violation du droit à l’alimentation

Les auteurs du rapport écrivent que la Grèce s’est retirée du programme de sauvetage de huit ans en août dernier, et qu’il est maintenant temps de discuter de ce que l’austérité a laissé derrière elle, en particulier en ce qui concerne la durabilité des zones rurales et le droit à l’alimentation.

Selon leur rapport « La démocratie n’est pas à vendre : Lutte pour la souveraineté alimentaire durant l’époque de l’austérité en Grèce », réalisé par l’Institut transnational, FIAN International et Agroecopolis, les plans de sauvetage ont porté un coup à l’économie rurale du pays.

Le rapport note que près de 40 % des habitants des zones rurales de Grèce sont exposés au risque de pauvreté, tandis que le chômage dans ces mêmes zones a bondi de 7 % en 2008 à 25 % en 2013.

De même, le revenu rural par habitant a diminué de 23,5 % au cours de la période 2008-2013.

En outre, l’insécurité alimentaire a doublé pendant la crise, passant de 7 % en 2008 à plus de 14 % en 2016, tandis que 40 % des enfants grecs souffrent de privations matérielles et sociales.

La situation s’est particulièrement détériorée entre 2010 et 2013, lorsque le prix des denrées alimentaires a augmenté alors que les revenus chutaient fortement. Les auteurs du rapport ont noté que les petits exploitants, en particulier, ont été énormément touchés par l’augmentation des cotisations sociales, de l’impôt foncier et sur les revenus ainsi que par l’augmentation de la TVA sur les produits agricoles.

Le rapport explique que le secteur agricole grec était déjà vulnérable avant la crise. Lorsque la Grèce a rejoint l’UE en 1981, elle était exportatrice nette de produits agricoles. Mais depuis lors, elle s’est débattue avec le déficit du commerce alimentaire et a commencé à dépendre des importations.

Commentant ces conclusions, Harry Konstantinidis, co-auteur du rapport de l’Université du Massachusetts, explique que le secteur agroalimentaire déjà vulnérable a été encore plus comprimé pendant la mise en œuvre des politiques d’austérité.

« Nous soulignons que le droit à l’alimentation en tant que droit de l’homme a été gravement compromis pendant la crise, le nombre de personnes en Grèce qui connaissent l’insécurité alimentaire étant passée, selon Eurostat, de 7,6 % de la population en 2009 à 13,2 % en 2017 », a-t-il rappelé.

« Nous cherchons à savoir quels acteurs doivent être tenus responsables de cet échec et nous cherchons à contribuer à un débat qui renforcerait la production alimentaire durable et l’accès à l’alimentation tant en Grèce qu’en Europe en général », a ajouté Harry Konstantinidis.

Sylvia Kay, politologue et co-auteure du rapport, a déclaré que plusieurs initiatives citoyennes avaient été prises pendant la crise et a souligné le rôle des différentes entités sociales qui ont fait preuve de solidarité envers les personnes dans le besoin.

Elle a également évoqué l’initiative « du producteur au consommateur », qui visait à raccourcir la chaîne d’approvisionnement alimentaire en supprimant les intermédiaires pour obtenir de meilleurs prix pour les consommateurs.

Selon Sylvia Kay, l’initiative était « une bouée de sauvetage » lancée aux personnes dans le besoin qui ont réussi à acheter de la nourriture 20-50 % moins chère que les prix au supermarché.

Source https://www.euractiv.fr/section/economie/news/eu-institutions-are-liable-for-greek-bailout-damage-former-un-official-says/

Lire aussi notre article résumé du rapport https://www.grece-austerite.ovh/le-rapport-sur-les-effets-de-lausterite-en-grece/

L’aquarius à nouveau attaqué

Chers amis,

A l’heure où l’Aquarius est la cible de nouvelles attaques, il nous semble important de vous donner en direct quelques explications sur la situation.

Ce lundi 19 novembre, les autorités judiciaires italiennes ont demandé la mise sous séquestre de l’Aquarius et ont engagé des poursuites contre notre partenaire médical, Médecins Sans Frontières (MSF). Cette mise en examen fait suite à une enquête ouverte par le Bureau du Procureur général de Catane (Italie) – qui avait déjà lancé par le passé des poursuites contre d’autres navires humanitaires – sur des prétendues anomalies observées dans le traitement des déchets à bord – en particulier les restes alimentaires, les vêtements des personnes secourues et les déchets issus des activités médicales.

MSF va faire appel de la décision auprès des instances de recours italiennes et SOS MEDITERRANEE soutient entièrement cette démarche. En effet, nous réfutons catégoriquement toute accusation de participation à des activités illégales. L’Aquarius a toujours suivi des procédures rigoureuses dans ses activités portuaires, qui n’ont jamais été remises en question en trois ans d’opérations.

Alors que d’autres navires d’ONG ont déjà été saisis, nous dénonçons cette nouvelle offensive dans la série d’attaques qui visent à criminaliser l’aide humanitaire en mer et à bloquer l’Aquarius au port.

Pour l’heure, l’Aquarius n’est pas mis sous séquestre. Étant à quai à Marseille, une telle décision relèverait de la juridiction française. Nous attendons donc des autorités françaises qu’elles fassent preuve de discernement dans la mise en œuvre de cette décision éminemment politique.

Bien que des pressions répétées aient réussi à interrompre temporairement nos opérations en mer, nos équipes travaillent jour après jour à des solutions qui nous permettront de poursuivre notre mission vitale et urgente de sauvetage. Nous demandons aux gouvernements européens de mettre fin à ces attaques et de prendre toutes les mesures nécessaires pour permettre à l’Aquarius de repartir au plus vite en mer. Ne l’oublions pas : au moins 2000 personnes sont mortes noyées cette année en Méditerranée et, en octobre, une personne sur cinq disparaissait ou perdait la vie en tentant la traversée de la Méditerranée centrale, un chiffre jamais atteint selon le HCR.

Portés par votre indéfectible soutien, nous nous engageons à faire tout ce qui est en notre pouvoir pour continuer à porter assistance aux personnes en détresse en mer, un impératif légal et moral qui doit primer sur toute autre considération.

L’Aquarius est un bateau citoyen. Tant que vous serez à nos côtés, renoncer ne sera jamais une option.

Merci pour votre engagement,

L’équipe de SOS MEDITERRANEE
#SaveAquarius
#SaveRescueAtSea

PS : Si vous ne l’avez pas encore fait, nous vous invitons à signer et à partager la pétition disponible en 9 langues que nous avons lancée pour sauver l’Aquarius et le sauvetage en mer. C’est par ici !

Face à l’inacceptable, agissons pour porter secours et sauver des vies http://www.sosmediterranee.fr/

Festival Migrantscene du 17 nov au 7 décembre

Un festival engagé

Un festival dans plus de 100 villes en France métropolitaine et Outre Mer 3 semaines d’événements, d’échanges, de rencontres et de fêtes à partir de la mi-novembre.

AGIR ENSEMBLE…

Né à Toulouse en 2000 et structuré à l’échelle nationale depuis 2006, LE FESTIVAL MIGRANT’SCÈNE DE LA CIMADE réunit et mobilise les milieux de l’éducation populaire, de l’art, de l’éducation, de la culture, de la solidarité ou encore de la recherche, au profit de publics larges et variés.

Plus de 400 partenaires
Des centaines de bénévoles
Avec le soutien de l’Agence française du développement, du ministère de la Culture, des collectivités territoriales…
En lien avec le Festival des Solidarités et bien d’autres festivals et rassemblements locaux…

PENSER ENSEMBLE…

MIGRANT’SCÈNE est un espace où s’ouvrent et se vivent tous les champs des possibles. Le festival s’offre avec simplicité comme un lieu de rencontres et d’échanges. Bienveillance, curiosité, altérité, convivialité, créativité, croisement des regards et des imaginaires… autant d’atouts pour favoriser le dépassement de nos préjugés.

POUR VIVRE ENSEMBLE !

PARCE QUE quitter son pays est un droit inscrit dans la Déclaration Universelle des droits de l’Homme,
PARCE QUE la question des migrations est au cœur de l’histoire et de la structure de nos sociétés,
PARCE QUE nous avons tous des préjugés, issus de toutes nos peurs,
PARCE QU’une représentation politique tenace nous incite à considérer l’étranger comme une menace par nature,
PARCE QU’une politique de repli ne peut être la seule réponse possible aux enjeux actuels et à venir des migrations,

LE FESTIVAL MIGRANT’SCENE choisit de parler des migrations, d’interroger les politiques et mécanismes qui les sous-tendent, et remet à l’honneur l’hospitalité comme fondement de notre société et de notre rapport à l’autre quel qu’il soit !

En 2018, le festival propose de partager inspirations et initiatives autour de la thématique  » D’ici et d’ailleurs : ensemble  » .

Vous trouverez ici https://www.migrantscene.org/un-festival-engage/presentation-du-festival/tout ce qui se passe dans votre région

Le HCR dénonce des conditions abjectes pour les réfugiés en Grèce

Le Haut Commissariat aux Réfugiés de l’ONU (HCR) a dénoncé des conditions abjectes dans les centres de réception et d’identification des deux îles grecques de Samos et Lesbos. Il a également prévenu que le camp de Moria à Lesbos était devenu une poudrière.

Le HCR appelle dans un communiqué le gouvernement grec à prendre des mesures d’urgence pour remédier à la situation de quelque 11’000 réfugiés sur ces deux îles. L’agence de l’ONU demande notamment une accélération du transfert vers le continent de plus de 4000 personnes vulnérables.

Depuis le mois d’août, observe le communiqué, plus de 6500 personnes ont déjà été transférées vers le continent, où le gouvernement a l’intention d’ouvrir 6000 nouvelles places. Mais plus de 11’000 réfugiés sont arrivés durant la même période sur les îles de la mer Egée.

Rats et serpents

A Samos, « la situation empire ». Le camp de Vathi et ses alentours accueillent 4000 personnes, alors que le camp lui-même n’est conçu que pour en recevoir 650. Les nouveaux arrivants doivent acheter leurs propres tentes et les installer sur un terrain pentu hors du camp. Outre l’absence d’électricité et d’eau courante, il y a dans cette zone des serpents et des rats attirés par les ordures non ramassées, poursuit le HCR.

Dans le camp, « de nombreuses toilettes et douches sont cassées et les eaux usées se déversent près des tentes », décrit aussi le HCR. Les réfugiés les plus vulnérables, dont près de 200 mineurs non accompagnés, une soixantaine de femmes enceintes et des personnes handicapées ou victimes de violence sexuelle sont laissés pendant des mois dans ces conditions déplorables, tous les hébergements alternatifs sur l’île étant occupés.

A Lesbos, près de 6500 réfugiés sont accueillis dans le camp de Moria, prévu pour le tiers de ce nombre. Près de 2000 d’entre eux se trouveraient à l’extérieur dans un champ.

« Les tensions et les frustrations s’accentuent alors que les délais administratifs (pour les demandes d’asile) restent importants » explique le HCR, ajoutant que Moria « est devenu une poudrière ». Et de préciser que « ces délais ainsi que la détérioration des conditions menacent sérieusement la sécurité de ceux qui y vivent et y travaillent ».

Meilleure situation à Chios

Le HCR appelle également « la Commission Européenne et les Etats membres à continuer à préparer des mesures de soutien d’urgence et de relocalisations à la demande du gouvernement grec ». D’après les derniers chiffres disponibles, 20’000 réfugiés se trouvent actuellement sur les îles de la mer Egée. La situation est moins dégradée à Chios, Kos et Leros.

Près de 21’737 réfugiés étaient arrivés au total à mi-septembre depuis début janvier, contre 17’563 pour toute l’année 2017, selon le ministère de la Politique migratoire.

Entretien libre Stathis Kouvelakis

La situation se durcit en Grèce, où le pouvoir en vient désormais à une confrontation ouverte avec l’opposition. Lois spéciales, police anti-émeutes contre les militants et même contre les retraités, des dizaines d’opposants sont désormais traînés devant les tribunaux. Les choses ont pris une tournure encore plus grave avec les poursuites engagées depuis un mois contre un ex-ministre du premier gouvernement Syriza, Panagiotis Lafazanis, le secrétaire national d’Unité Populaire, parti de gauche favorable à la sortie de l’euro. C’est la première fois depuis la chute du régime des colonels que le dirigeant d’un parti démocratique se voit ainsi poursuivi pour son activité politique. Pour parler de la situation grecque, Aude Lancelin reçoit aujourd’hui dans l’Entretien Libre Stathis Kouvelakis, professeur de philosophie au King’s College de Londres, et ex-membre du comité central de Syriza.

 

Festival des solidarités en Isère

Le festival commence le 7 novembre avec la soirée organisée par le collectif Grèce-austérité de Grenoble à la MDA à 20h.  » La SCOP : de Thessalonique à Grenoble, une autre manière de gérer une entreprise » ( voir l’annonce  https://www.grece-austerite.ovh/rappel-soiree-scop-et-soutien-aux-viome-de-thessalonique/)

Les associations du Collectif qui organise ce 2e Festival des Solidarités (ex-Semaine de la Solidarité Internationale) vous accueillent à Grenoble et à St Martin d’Hères pour faire connaître des actions de solidarité ici et à l’international. C’est aussi une invitation à partager la réflexion autour de cette solidarité qui vise à construire d’autres modes de développement pour la transformation d’un modèle de société dominant créateur d’inégalités et d’exclusions.

Le programme complet du festival des solidarités festisol2018-depliant_A4 (3)

Pouvoir d’achat : les gagnants et les perdants

En France un article de Laurent Jeanneau sur Alternatives Economiques

A qui profite la politique économique du gouvernement ? Il y a un an, Emmanuel Macron s’était vu accoler l’étiquette de « président des riches », suite notamment à la réforme de la fiscalité du capital. Mais si l’on en croit les résultats d’une récente étude de l’Institut des politiques publiques (IPP), qui évalue l’impact des budgets 2018 et 2019 sur le pouvoir d’achat des ménages, c’est plutôt de « président des très riches » dont il faut désormais parler.

Le 1 % des Français les plus aisés est le grand gagnant de la politique fiscale : en 2019, ses revenus grimperont de 6 %, grâce notamment aux effets cumulés de la réforme de l’impôt sur la fortune et du prélèvement forfaitaire unique sur les revenus du capital. De manière plus précise encore, les gains se concentrent dans le top 0,4 % des niveaux de vie, qui verra son pouvoir d’achat gonflé de plus de 28 300 euros en 2019. Pour le top 0,1 %, le cadeau s’élève même à 86 290 euros !

Des pertes nettes pour les bas revenus

Gains et pertes de revenu disponible liés aux mesures relatives aux prestations sociales dans le budget 2019, en %, par centiles de revenus (voir tableau sur le site de Politis).

A l’autre bout de l’échelle sociale, les bas revenus sont les grands perdants. Les 20 % de Français les moins bien lotis verront leurs ressources s’amoindrir. En cause, la très faible revalorisation des prestations sociales et la réforme des allocations logement, qui amputeront le pouvoir d’achat des Français les plus modestes de 3,5 milliards d’euros, dans un contexte où les prix repartent à la hausse.

Ils seront également pénalisés par la hausse de la fiscalité sur le tabac et sur l’énergie. Sans oublier la baisse programmée des dépenses publiques – dont les effets n’ont pas été modélisés dans cette étude – qui pénalisera indirectement le pouvoir d’achat des plus modestes. Seuls les bénéficiaires de l’allocation aux adultes handicapés et du minimum vieillesse seront épargnés. Certes, la prime d’activité, destinée aux travailleurs à bas revenus, a été revalorisée de 20 euros en 2018. Pas de revalorisation générale en 2019 en revanche, mais une « bonification » ciblée sur le Smic, de façon à en limiter le coût. Couplée à la baisse des cotisations, cette mesure fera gagner 32 euros aux Smicards. « Un effet modeste à l’incitation à l’emploi », juge l’IPP.

Entre les deux bouts de l’échelle sociale, la classe moyenne ne s’en sort pas trop mal. Les Français qui se situent au centre de la distribution des revenus, c’est-à-dire entre le 3e et le 8e déciles, verront leurs revenus légèrement augmenter, grâce à la baisse de la taxe d’habitation. Ceux d’entre eux qui sont actifs profiteront également de la baisse des cotisations salariales.

Les retraités, en revanche, subiront une double peine : la sous-indexation des pensions et la hausse de la CSG. Les pensions de retraite ne seront en effet revalorisées que de 0,3 % en 2019 et 2020, un quasi-gel, alors que l’inflation devrait être de 1,6 %. Et ce tour de vis intervient après une hausse de 1,7 point de la CSG en 2018. Les retraités ont donc du souci à se faire pour leur pouvoir d’achat. Ce que confirme l’évaluation de l’Institut des politiques publiques (IPP).

Les retraités pénalisés

Gains et pertes de revenu disponible suite aux effets des budgets 2018 et 2019 pour les retraités, en %, par centiles de revenus (voir tableau sur le site de Politis).

Mais tous ne sont pas logés à la même enseigne. Les plus modestes d’entre eux bénéficieront de la revalorisation du minimum vieillesse et seront épargnés par la hausse de la CSG. D’autres sortiront en partie gagnants de l’exonération de la taxe d’habitation. Ce sont finalement les retraités les plus aisés qui seront le plus mis à contribution. A l’exception notable des très fortunés…

Source https://www.alternatives-economiques.fr/pouvoir-dachat-gagnants-perdants/00086653

Grèce: Faire front contre l’aventurisme militaire du pétrole

Par Panos Petrou Publié par Alencontre

Le gouvernement grec joue avec le feu dans la Méditerranée orientale inflammable. La tension a de nouveau augmenté dangereusement en Méditerranée orientale, «saturée» encore par des navires de guerre qui évoluent cette fois autour du bateau turc de recherche Barbaros. Celui-ci, escorté par la flotte militaire turque, est étroitement suivi par deux vaisseaux militaires grecs, assistés de quatre destroyers de première ligne des Etats-Unis.

Un incident militaire ­ évité de justesse lorsque la frégate grecque Nikiforos Fokas a tenté d’intercepter la progression du navire de recherche ­ –indique que le gouvernement SYRIZ-ANEL s’est embarqué dans un jeu dangereux, jouant avec le feu… sur la mer.

Nous ne sommes plus impressionnés par la présentation unilatérale – mettant plus d’une fois la réalité cul par-dessus tête – opérée par les médias grecs sur l’évolution de la situation. Ainsi titrent-ils: «De nouvelles provocations turques!» Un problème autrement important émerge lorsque de tels schémas de lecture sont adoptés par la majorité de la Gauche grecque. Comment cependant avons-nous atteint cette nouvelle escalade?

Fin septembre 2018, le climat était différent. En marge de l’Assemblée générale des Nations Unies, eut lieu la rencontre Tsipras-Erdogan, considérée comme un pas vers la normalisation, suite aussi à la libération des deux militaires grecs entrés dans le territoire turc [1]. Il y a eu aussi des rencontres entre le Royaume-Uni, la Grèce, la Turquie et Chypre dans la perspective d’une éventuelle reprise des discussions sur la question de Chypre.

Qui est celui qui provoque?

Alors que l’on était supposé discuter le rétablissement de la confiance, et explorer une réouverture des négociations «depuis le point où elles s’étaient arrêtées à Crans-Montana» [2], il a été annoncé de manière fracassante, à la mi-octobre 2017, qu’une réunion tripartite entre la Grèce, Chypre et l’Égypte avait lieu à Elounda, en Crète. Depuis cette localité, Alexis Tsipras a annoncé qu’il s’était mis d’accord avec le dictateur égyptien Abdel Fattah al-Sissi sur «la grande importance de la délimitation de la zone économique exclusive entre nos pays» et sur la nécessité de «parvenir le plus rapidement possible à un accord sur cette question». Dans le même temps, Tsipras a fermement soutenu l’exploitation de la ZEE de Chypre par le gouvernement Anastasiadis [3], «contre toute menace émanant d’un pays tiers».

Des analystes politiques proches du gouvernement grec se disent optimistes et se félicitent de «l’excellente alliance» qui a été «construite depuis l’arrivée au pouvoir d’Abdel Fattah al-Sissi». C’est vraiment un grand honneur pour le gouvernement grec, que ses relations s’améliorent rapidement avec un pays après qu’il y ait eu là un coup d’État sanglant et que le pouvoir de Sissi se traduise par une répression sans rivages. En effet, Tsipras n’était point avare en compliments, ni en promesses de soutien, évoquant même «la nécessité d’ouvrir la discussion sur une relation stratégique UE-Égypte», envers l’homme surnommé «le Pinochet égyptien».

Le climat de cette rencontre tripartite préfigure la perspective d’un accord entre la Grèce, Chypre et l’Égypte qui prévoirait des dispositions pour les îles grecques de Castellorizo ??et Strongyli [4]. Ce n’est pas sans raison qu’une partie des courants politiques grecs «patriotique» ait parlé de «nouvelle formidable qui a causé un effondrement nerveux à Ankara». Parmi les réactions suscitées en Turquie par la rencontre d’Elounda, le terme «invasion» étant une exagération nationaliste, le terme «étranglement» renvoie à une description plus exacte.

Les préoccupations de la Turquie évoluent dans un contexte plus large. L’escalade des intentions de Tsipras a coïncidé avec le climat de «renforcement de la relation américano-chypriote au niveau de la défense» par des visites bilatérales de ministres, la répétition programmée de l’exercice militaire «Medusa» avec participation de forces navales grecques et égyptiennes dans les prochaines semaines, les contacts denses et fréquents du chef de l’État-Major grec, le général Evangelos Apostolakis, et du général Dunford, chef de l’État-Major des forces armées des États-Unis, à Washington, très peu de temps après leur rencontre en Grèce. Tout cela à l’approche d’un premier tournant décisif: le début des travaux de la compagnie pétrolière Exxon Mobile sur un terrain maritime chypriote d’extraction pétrolière et gazière.

Dans un tel contexte, le navire de recherches Barbaros a été missionné dans une région fortement symbolique, la zone où se touchent les ZEE (zones économiques exclusives) présumées de la Grèce, de Chypre et de l’Égypte. C’est un premier signal d’Ankara manifestant sa volonté de «rester présente» et de ne pas accepter «tranquillement» les faits accomplis en rapport avec une question qu’elle considère comme toujours ouverte.

S’en est suivie l’escalade: le gouvernement grec a envoyé la frégate Nikiforos Fokas pour faire obstacle au navire Barbaros. Le gouvernement turc a envoyé une escorte militaire (trois bateaux supplémentaires et deux sous-marins) et Athènes (avec Washington…) a riposté pour que l’on arrive ainsi au dangereux «surpeuplement» actuel en mer.

Des «droits nationaux justes»?

Ces événements sont présentés comme relatifs à «la défense du plateau continental grec» alors qu’il s’agit bien d’aventurisme politique et militaire. Nous reproduisons ici les mots non d’un quelconque national-nihiliste» mais d’un analyste issu de l’espace politique dit « patriotique » qui toutefois fait preuve d’une élémentaire reconnaissance de la réalité par rapport au sujet que nous traitons.

«Les vaisseaux Nikiforos Fokas et Salamis n’ont pas été envoyés pour protéger les îles de Chios ou de Castellorizo, mais ont été littéralement envoyés au diable Vauvert… Le site à l’origine de la crise actuelle se trouve très loin de la Grèce et il est totalement douteux qu’une quelconque Cour internationale de Justice reconnaisse l’existence d’un plateau continental grec à cet endroit… Dans cette région il n’y a pas de plateau continental grec ou turc. Tout simplement parce que, conformément à la Convention internationale de Montego Bay de 1982 sur le droit de la mer, pour qu’il y ait de plateau continental légalement reconnu il faut que précédemment les Etats limitrophes aient procédé à sa délimitation soit par un accord bilatéral, soit par recours à l’arbitrage international, ou au jugement d’une Cour internationale. La même règle vaut aussi pour la validation légale des Zones économiques exclusives».

Les experts ont averti qu’en cas de recours au tribunal de La Haye rien ne garantirait la confirmation des positions grecques, le droit de la mer énonçant un certain nombre de critères tenant compte de la différence entre une petite île comme Castellorizo ??et un grand pays continental doté d’une grande côte comme la Turquie. La Cour internationale de Justice a également rendu des arrêts qui nient le plein effet pour des îles (par exemple en mer Noire), dans des affaires similaires.

Ce sont bien ces complications qu’Athènes tente de contourner, en créant des états de «faits accomplis», avec le soutien de gouvernements impérialistes et usant de la diplomatie des canonnières, en l’occurrence étrangères. Confrontée à son isolement international, la Turquie répond par la diplomatie de ses propres canonnières, en s’efforçant d’imposer un retour à la négociation dans la perspective d’une co-exploitation des ressources maritimes souhaitée par elle.

Dans cette guerre de nerfs et d’usure, le rôle des États-Unis sera crucial. Ils aimeraient bien inclure la Turquie dans le jeu, mais ils semblent opter pour la méthode du chantage, en soutenant l’axe Grèce-Chypre-Israël-Égypte jusqu’à ce qu’Ankara se conforme pleinement. C’est là-dessus que s’appuie l’arrogance grecque.

En Turquie, l’ambiance (actuelle) est plus «anti-américaine» que «anti-grecque». Le conseiller d’Erdogan, Yigit Bulut, dans un article qui, tout parsemé qu’il soit de pantalonnades sur les moyens d’une victoire turque en cas d’éventuel conflit, indique au fond la voie de la raison en écrivant: «J’espère que la Grèce ne s’embarquera pas dans ce sale jeu, qu’elle ne se laissera pas instrumentaliser… J’espère que la raison et l’amitié vont prévaloir».

La Gauche

Sur quelles voies cette situation conduit la Gauche grecque? Tout point de vue ou analyse qui flirte avec l’idée de «droits nationaux justes» ou de «droits souverains», en lien avec l’exploitation des hydrocarbures en Méditerranée orientale, ne fait que nuire à l’effort commun (de toute la Gauche et de la classe ouvrière) pour construire un mouvement contre les guerres avec des traits forts anti-impérialiste.

Cette contradiction doit être résolue. Pour deux raisons. 1° Dans le capitalisme impérialiste, les « droits souverains » sur les ressources productrices de richesse sont l’affaire des firmes capitalistes et des forces impérialistes. Il ne s’agit pas d’une «dot nationale» d’un futur «pouvoir populaire» dont nous sommes encore très éloignés. Entre-temps il y a tout intérêt à éviter de jouer avec le feu des conflits nationalistes dans une zone inflammable. Car le point de vue opposé est encore plus rétrograde que celui d’un cosmopolitisme bourgeois raisonnable optant pour la co-exploitation des ressources de la mer Egée face au danger d’une guerre. 2° Mais il y a aussi une deuxième raison pour une telle prise de position: face au changement climatique, où l’ONU même est obligée de sonner l’alarme, alors que les militants de Gauche à juste titre nous mettent en garde que «nous devons laisser le pétrole tranquille dans le sous-sol» et saisir d’une chance pour empêcher la catastrophe imminente, la dernière chose que même un futur pouvoir populaire» devrait faire serait de réclamer des parts dans l’extraction des hydrocarbures…

Pour sauvegarder le bien souverain et commun de la paix, pour intensifier la lutte contre l’impérialisme, pour prévenir un désastre écologique, la Gauche doit s’opposer fermement au «grand jeu» autour des hydrocarbures. Nous terminons en revenant vers l’analyste réaliste de l’espace patriotique: «Il n’y aura pas de gagnants ni de perdants… il n’y aura que des perdants… La dernière chose dont nous avons actuellement besoin c’est de nouveaux généraux Ioannidis [4].»(Article paru dans le numéro 419 du bimensuel grec Ergatiki Aristera (Gauche Ouvrière); traduction par Emmanuel Kosadinos pour alencontre.org)

Notes

[1] Les deux soldats grecs libérés d’une prison turque après plus de cinq mois de détention ont atterri dans la nuit du mardi 14 août au mercredi 15 août à l’aéroport de Thessalonique, selon l’AFP. Dans la foulée de l’annonce, mardi après-midi, de la décision de leur libération par un tribunal à Edirne, ville turque où ils étaient détenus depuis mars dernier, le ministre adjoint des Affaires étrangères, Georges Katrougalos, et le chef adjoint de l’état-major Konstantinos Floros s’y sont rendus à bord d’un avion officiel pour les transférer en Grèce. Les deux soldats sont sortis de l’appareil en tenue militaire et ont été accueillis vers 03h30 heure locale (00h30 GMT) à l’aéroport par le ministre grec de la Défense, Panos Kammenos (le patron de l’ANEL, «Grecs indépendants»), et le chef de l’état-major Alkiviadis Stephanis, une garde d’honneur et leurs parents, selon la même source et des images diffusées en direct par la télévision publique grecque ERT. (Réd. A l’Encontre)

[2] Négociations de Crans-Montana: négociations entre les dirigeants chypriotes grecs et turcs et les représentants des puissances garantes (Grèce, Turquie, Royaume-Uni) qui ont eu lieu à partir de fin juin 2017, dans la station de ski de Crans-Montana, en Suisse, dans le but de parvenir à une réunification de l’île, divisée depuis plus de quarante ans. Elles se sont conclues sans accord le 7 juillet 2018 (Note du traducteur).

[3] Nikos Anastasiadis : président de la République chypriote depuis 2013, ancien leader (1997-2013) du parti conservateur «Rassemblement démocrate». (Note du traducteur)

[4] Castellorizo ??et Strongyli sont des îles grecques: la première d’un diamètre maximal de 5,5 kilomètres et la seconde, de diamètre maximal de 1,6 kilomètre. Elles sont situées, la première à 2 kilomètres de la côte sud-ouest de la Turquie et la seconde à 3,2 kilomètres. Elles sont séparées entre elles d’une distance de 9 kilomètres. (Note du traducteur)

[4] Dimítrios Ioannídis: Un parfait exemple d’aventurier irresponsable réactionnaire, le général de brigade Ioannídis, fut le chef de la police militaire pendant la dictature des colonels (1967-1974) dont il a été un des piliers, ayant activement pris part au coup d’Etat militaire qui l’a installée. En novembre 1973, il organisa un «coup d’Etat dans le coup d’Etat» pour diriger pendant quelques mois la Grèce depuis les coulisses. En juillet 1974, Ioannídis, aidé par des éléments extrémistes nationalistes chypriotes grecs, organisa à Chypre un coup d’Etat pour renverser le pouvoir légal de l’archevêque Makarios, président de la République chypriote. Cette intervention brutale du gouvernement grec dans affaires internes de la République chypriote, jadis unifiée, a servi de justification à l’intervention militaire de la Turquie, puissance garante selon les traités, et la partition de facto de l’île. (Note du traducteur)

Source Grèce. «Faire front contre l’aventurisme militaire pour du pétrole»

Comme un air de Grèce qui flotte sur la France

Par Yannis Youlountas

En voyageant quotidiennement dans les coins les plus reculés de l’hexagone, au fil des mois, j’assiste non seulement aux difficultés croissantes des plus précaires, particulièrement touchés, mais j’observe aussi l’appauvrissement brutal d’une classe moyenne qui se croyait à l’abri.

COMME UN AIR DE GRÈCE QUI FLOTTE SUR LA FRANCE

Un ami, pourtant légèrement endetté, vient de perdre brutalement sa maison, un autre dort depuis des semaines dans sa voiture, un troisième s’est construit une petite cabane en palettes au fond du jardin de ses parents âgés et modestes. Une amie quadragénaire m’a raconté ses nouvelles contraintes professionnelles consternantes, une autre a dû arrêter ses études faute de moyens, et une troisième, licenciée six ans avant la retraite, s’est finalement résolue à faire le plus vieux métier du monde pour tenir et rester dans son appart.

Jour après jour, au pays de Fernand Pelloutier et Ambroise Croizat, les conquêtes sociales d’antan fondent comme neige au soleil et les inégalités se creusent comme les tranchées d’une guerre qui ne dit pas son nom. Alors que le pouvoir arrogant promet la lune et le ruissellement de la richesse amassée, les campagnes et les cités se meurent et se murent dans l’angoisse du lendemain.

En France comme en Grèce, le capitalisme se durcit et la pyramide des revenus s’étire et retrécit plus particulièrement en son centre. Après des décennies de collaboration de classe, la petite bourgeoisie française commence à comprendre qu’elle risque à son tour le déclassement, comme son homologue grecque avant elle.

Mauvaise idée que d’avoir avalé la propagande des plus riches, pseudo « forces vives de la nation », en réalité sangsues tyranniques et obscènes. Ces voraces n’en ont jamais assez et vendraient jusqu’à leur mère pour satisfaire leur folie des grandeurs.

Pendant que le pouvoir économique et politique montre son vrai visage de serial killer, une enseignante à la retraite vient d’être expulsée de son logement dans une cité HLM de Vannes par un huissier et des policiers, résultat de la baisse des APL, des nouvelles ponctions sur les retraites et de la hausse d’à peu près tout.

Bienvenue dans le monde d’après. Celui du capitalisme tout puissant qui va ravager l’Europe comme il l’a fait jusqu’ici avec le reste de la planète.

Bienvenue dans le monde que vous annonçait Dora, la pharmacienne grecque d’un dispensaire social autogéré qui vous alertait il y a 5 ans :
« — Si je devais prévenir un ami français, ou d’un autre pays, de cette menace qui le guette aussi, je lui dirais qu’il y a une étape psychologique durant laquelle on a tendance à fermer les yeux, à ne pas vouloir voir ce qui arrive de terrible. C’est ce que nous avons tous fait ici. C’est ce que j’ai fait, de même que ma famille et mes amis avant de perdre leur emploi. En résumé, nous n’arrivions pas à y croire ! Vraiment, nous n’imaginions pas, il y a trois ans, avoir des élèves qui ont faim, des familles qui vivent dans des caves… »

(extrait)

Au prétexte de la dette qui vient d’atteindre 100% du PIB en France, la grande braderie du bien commun va s’amplifier, ce qui reste de droit du travail va finir à la poubelle, les retraites seront sponsorisées par Whiskas et le droit de grève sera interdit.Sauf si…

Yannis Youlountas

source http://blogyy.net/2018/11/02/comme-un-air-de-grece-qui-flotte-sur-la-france/

Délitement La rubrique de Panagiotis Grigoriou

Panagiotis  Grigoriou est Ethnologue et historien, chroniqueur, analyste, initiateur d’un concept de tourisme alternatif  et solidaire en Grèce. Le regard de l’historien et de l’anthropologue sur l’actualité et le vécu de la crise grecque.

Délitement

Vendredi 26 octobre. Dès le matin les cloches des églises ont sonné la Saint Dimitri. C’est vrai que les marionnettes des mondialisateurs à la Tsípras, ne les ont pas encore interdites, comme c’est aussi dans l’air du temps. En attendant, au pays si secoué les séismes ne manquent pas. Une secousse de magnitude 6,4 a été enregistrée ce même vendredi sur l’île de Zákynthos, d’après les médias les dégâts ne sont que matériels. Mer belle aux îles secoués, souvenirs et incarnations, pour à peine paraphraser Claude Debussy. Oui, comme il est bien loin le siècle dernier, et en quelque sorte ultime.
Garde Evzone. Athènes, octobre 2018

Les politiciens du jour, de la semaine comme tu temps acosmique qui est surtout le leur, s’entredéchirent au sujet des déclarations de la semaine dernière sur les magouilles du spéculateur Sóros en Grèce et plus généralement dans les Balkans. Entre Kamménos à la Défense puis Kotziás, le démissionnaire des Affaires Étrangères et pour tout dire, étranges, c’est la guerre des mots, confirmations, démentis, allégations, et apostrophes. Toute la presse évoque Sóros cette semaine, les sujets… grecs tombent, autant que les tabous !

Pays secoué, pays embourbé. Devant cette morgue de la Démocratie dénommée encore “Parlement” pour les besoins théâtraux du totalitarisme techno-féodal en gestation, on discerne parfois et heureusement, un peu de cette autre présence de l’existence et de la vie, digne gardienne du sens des mots comme des choses. Après, il y a notre vieille Garde Evzone, celle que les touristes photographient d’ailleurs depuis même la préhistoire du Tourisme en Grèce. “Ma guarda e passa”, à la manière du célèbre vers de la Divine Comédie de Dante. Au pays secoué, les clichés ne manqueront pas comme devant certaines petites enseignes on peut alors lire ce message “Jamais le dimanche”, en signe de résistance aux dictas amplifiés depuis la Troïka, imposant entre autres mesures d’occupation, l’ouverture des commerces le dimanche. Nos visiteurs ne lisent pas vraiment le grec.

Toujours près du “Parlement”, et bien au-delà de l’existence exoplanétaire des politiciens, les instantanés habituels sont toujours là à l’image des sans-abris nouveaux, c’est-à-dire depuis la dite crise, huit ans déjà et très exactement en cet octobre 2018 sept années de blog Greek Crisis. Une période apocalyptique pour le pays, bientôt plus longue que le temps de la Deuxième Guerre mondiale et la guerre civile alors réunies entre 1940 et 1949. En 1949, la Grèce était en piteux état, elle avait perdu environ 8 % de ses et les destructions furent importantes.

Tombe du Soldat Inconnu devant le ‘Parlement’. Athènes, octobre 2018

On dénombrait alors plus d’un million de sans-abris, la majeure partie de la flotte marchande était détruite, les infrastructures réduites à néant, tout comme les capacités agricoles et industrielles. Pays sans cesse secoué. En dépits des apparences, la situation grecque est bien pire actuellement, car l’implosion en interne, les menaces extérieures, le remplacement partiel de la population, la fuite des dernières forces vives et surtout la politique de destruction du pays et de la culture si cyniquement affichée de la part des politiciens SYRIZA en tête, n’a pas de précédent on dirait.

“Notre pays est un Protectorat, Sóros en toute illégalité, finance et contrôle les cliques des politiciens, des universitaires, des artistes déconstructeurs de notre pays, et autant, les auteurs des nouveaux manuels scolaires d’histoire pour que toute idée de la nation et de la culture grecques soient ainsi gommées, sans parler de la Constitution qui est sans cesse violée, y compris lorsque les nouveaux manuels scolaires s’opposent ouvertement aux buts fixés à l’école grecque par la Constitution. Voilà où nous en sommes,” comme le remarque alors Státhis, journaliste et dessinateur de presse et de la trop vielle gauche cette semaine, dans “To Pontíki”.

Jamais le dimanche. Athènes, octobre 2018
Sans-abri. Athènes, octobre 2018
Kolokotronis, héros national de la Révolution grecque. Athènes, octobre 2018

Siècles d’avant comme surtout siècle d’après, comme devant la statue Theódoros Kolokotrónis (1770-1843), Général et homme d’État, héros de la Guerre d’indépendance grecque (1821), surnommé le “Vieux de Morée”. Notons qu’après l’indépendance, ses choix politiques et notamment son soutien du Gouverneur Kapodístrias puis du parti russe, lui valurent dans un premier temps la rivalité des Bavarois autour du roi Othon. Et qui se souvient même de Lázaros Sóchos, sculpteur de l’œuvre, élève à École des Arts Décoratifs et ensuite à École des Beaux Arts à Paris. D’ailleurs, son Kolokotronis il avait été conçu à Paris, avant d’être installé devant le bâtiment dit aujourd’hui Vieux Parlement.

Et comme à l’époque s’y trouvèrent alors juste en face les écuries du Roi, ce n’est pas sans parfois se tromper que les Athéniens d’il y a un siècle, aimaient se raconter que le Vieux de Morée montrait ainsi la place qui devait être réservée aux politiciens… pays ainsi très historiquement secoué !

Pourtant en 2018, l’oubli n’est pas encore généralisé en dépit des efforts méta modernes des ministres de la dite Éducation, dont bien naturellement ceux de SYRIZA. Cette semaine, nos touristes ont ainsi assisté sans le savoir à une messe en commémoration des combattants grecs morts lors des combats très macédoniens il y a un siècle, d’où aussi cette volonté toujours exprimée massivement pas les Grecs que de ne pas voir les frontières de leur pays se déplacer au moment où certaines Puissances instrumentalisent l’irrédentisme et le nationalisme des voisins Macédoniens Slaves, voilà ce qui n’est pas tout à fait perçu à travers ce que les médias très internationaux et surtout pas balkaniques et qui n’apparait pas au gré des analyses.

Et même bien près des églises, toujours cette allusion renforcée et singulièrement dystopique des graffitis, comme de tant d’autres devises de notre siècle. “Ce n’est plus notre monde, je vais mourir ici, entouré de mon troupeau”, m’avait dit il y a pas si longtemps un berger, dans les campagnes non loin de la ville de Tríkala. Toujours et encore, cette autre présence de la vie, digne gardienne du sens des mots et des choses, Thessalie alors profonde.

Messe à la mémoire des combattants en Macédoine. Athènes, octobre 2018
Dystopie exprimée. Athènes, octobre 2018
Bergerie en Thessalie. Octobre 2018
Tríkala, ville en Thessalie. Octobre 2018

Et au pays encore réel, on arbore alors très volontiers le drapeau national, comme un peu partout entre les balcons et les façades des immeubles, ceci, à l’approche de la fête nationale du 28 octobre. Les Grecs commémorent le NON du Général Metaxás et du peuple grec devant l’ultimatum adressé par le régime et l’armée de Mussolini le 28 octobre 1940, ce n’est pas d’un sentiment anti-italien qu’il s’agit, mais d’un souvenir de volonté de résistance lorsque les circonstances l’imposent.

Un sentiment d’ailleurs que les SYRIZISTES comme autant les tenants de l’européisme germano-compatible veulent ouvertement effacer en supprimant dans le futur cette fête nationale. C’est autant dans l’air du temps, sauf que pour l’instant en tout cas, ces excitations de la part des marionnettes politiques et des historiens compatibles Sóros œuvrant pour l’effacement de la mémoire historique des Grecs, ne peuvent que renfoncer ce sentiment général de dégout et de rejet aux yeux des Grecs. Pays certes secoué, mais qui n’a pas encore perdu toute sa mémoire historique ni son même parfois sens de la musique populaire.

Sauf que les criminels de SYRIZA au gouvernement des marionnettes suivent un agenda géopolitique précis imposé depuis l’étranger, et que le processus alors s’accélère. Fait autant inhabituel, comme le remarque aussi mon ami Olivier Delorme, “en quittant le ministère des Affaires étrangères, Kotziás annonce une décision extrêmement grave: celle d’étendre les eaux territoriales de 6 à 12 milles, en application de la Convention de Montego Bay sur le droit de la mer de 1982, entraînant des droits d’exploitation économique exclusive… sauf dans la moitié orientale de l’Égée. Or, jusqu’ici, les gouvernements grecs n’avaient pas procédé à cette extension dans la mesure où la Grande Assemblée nationale turque a donné, le 9 juin 1995, une autorisation permanente au gouvernement de déclarer la guerre à la Grèce si celle-ci procède à cette extension.”

Vassílis Tsitsánis du chat Rebétiko en soldat. Musée Tsitsánis, Tríkala, octobre 2018
Le sens de la musique. Musée Tsitsánis, Tríkala, octobre 2018
L’autre… sens de la musique. Athènes, octobre 2018

“Cette décision apparaît en réalité, si elle se confirme, absolument catastrophique ! Elle entérine en effet sur deux points essentiels la thèse turque – et ceci sans aucune négociation ni contrepartie. En procédant ainsi, le gouvernement Tsípras reconnaîtrait, de facto, que la Turquie a des droits spéciaux sur toute la moitié orientale de l’Égée, puisqu’elle étendrait ses eaux territoriales en application du droit international, sauf dans cette zone.”

“En outre, si cette politique est mise en œuvre, nul doute que SYRIZA va perdre des voix – et pas qu’un peu – dans les îles orientales qui ne peuvent, aujourd’hui, que se sentir lâchées par ce gouvernement dont on commence à se demander à quelle capitulation il n’a pas déjà souscrit. Je serais à la place des Chypriotes, je commencerais à me faire sérieusement du souci !”, Olivier Delorme sur son blog.

Oui, je le confirme si ce n’est que par intuition et par le déroulement des faits déjà observables, SYRIZA et ANEL (le parti du fanfaron Kamménos) auraient signé un nombre alors inconnu d’accords non dévoilés, ce qui d’ailleurs participe à la reculade grecque qui ne se résume pas qu’à son volet prétendument économique et financier vis-à-vis des dits créancier et de l’UE. Non, non et encore non, c’est un agenda géopolitique visant même à l’effacement, culturel, démographique, voire existentiel de la Grèce contemporaine, les Grecs le savent désormais car c’est alors bien palpable dans l’air du temps, même si sur cette dernière affaire des eaux territoriales passant de 6 à 12 milles, Tsípras a reculé, précisant que ce n’est pas par décret mais une fois n’est pas coutume… au “Parlement” que cette décisions sera discutée, au risque de ne pas être entérinée comme on sait.

On observe tout cela d’en bas et du pays réel sans pouvoir trop réagir… “Que faire sinon, pendre ces politiciens traîtres, mais alors comment ?”, entend-on ici ou là. En attendant, on se baignera une ultime dois dans la saison dans les ports antiques, comme par exemple dans celui des Kehrées près de Corinthe, comme on reviendra de la pêche au large du Péloponnèse, région que nos touristes considèrent toujours comme uniquement mythique. Accessoirement, on est invité à apprendre la langue chinoise… par les temps géopolitiques qui courent, c’est peut-être aussi de cela notre nouveau siècle sera fait.

Baignade à Kehrees. Octobre 2018
Après la pêche. Péloponnèse, octobre 2018
Cours de langue chinoise. Athènes, octobre 2018

Vendredi 26 octobre. Dès le matin les cloches des églises ont sonné la Saint Dimitri, pendant que les marionnettes des mondialisateurs à la Tsípras ne les interdisent pas, comme c’est autant dans l’air du temps. Pays et paysages. Au pays secoué, le soleil se couche toujours derrière Épidaure.

Le soleil se couche derrière Épidaure. Octobre 2018

Saint Dimitri et fête nationale. Pays fragile, mer belle aux îles secoués, souvenirs, et surtout incarnations !

Surtout incarnations. Athènes, octobre 2018
* Photo de couverture: L’autre vie devant le Parlement. Athènes, octobre 2018
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