En Grèce, une Autorité Autonome des Ressources Publiques (Anexartiti Archi Dimosion Esodon, AADE), où siègent deux représentants de la Commission européenne, a remplacé le Trésor Public et récupéré toutes les attributions du Ministère des Finances [1]. Résultat : de plus en plus de contribuables modestes se retrouvent dans l’incapacité de payer leurs impôts. Pour recouvrer les arriérés de paiement et dettes envers l’État, l’Agence Autonome opère des saisies directement sur les comptes bancaires des particuliers, sans crier gare. Pourtant les objectifs fiscaux fixés par l’AADE sont largement atteints pour la troisième année consécutive.
En septembre 2018, date de la deuxième échéance du paiement de l’impôt sur le revenu, ce sont 500 000 contribuables grecs supplémentaires, personnes physiques ou morales, (sur un total de 6 348 353) qui se sont retrouvées à leur tour endettées auprès de l’AADE, portant à 4,2 millions le nombre de contribuables en cessation de paiement de leurs impôts [2].En conséquence, plus de 1,15 million de contribuables, personnes physiques ou morales, se sont vus imposer des mesures de « prélèvements directs » sur le versement de leur salaire, de leur pension de retraite ou sur leur compte bancaire (autrement dit, des saisies sur les revenus des ménages).
L’AADE annonce encore plus de 700 000 mesures de saisie dans les mois à venir.
Plus de 1,15 million de contribuables ont subi des « prélèvements directs » sur leur salaire, leur retraite ou sur leur compte bancaire
En trois ans, le chiffre des dettes des contribuables grecs envers les impôts est passé de 74 milliards d’euros [3] – en février 2015 dus par environ 3,9 millions de contribuables (dont 400 000 entreprises) – à 103,36 milliards d’euros en décembre 2018. (Ce chiffre ne prend pas en compte les majorations qui dépassent les 80 milliards d’€.)« Les institutions créancières considèrent que l’économie grecque doit être saignée à blanc et que les contribuables sont des machines à payer, tels les condamnés d’une colonie de la dette », selon Nadia Valavani, ministre des Finances pendant le premier gouvernement Syriza entre janvier et août 2015. D’après ses archives, une grosse part de la dette fiscale a été créée après 2010, début des mesures d’austérité qui conditionnent les « plans d’aide » – à l’époque, 47 milliards sur les 74 milliards de dette fiscale de l’époque. Les 29,36 milliards de nouvelles dettes ajoutées entre 2015 et 2018 portent donc ce chiffre à 76,36 milliards. Pour résumer, les mesures d’austérité sont la cause de 74% du total de la dette des contribuables grecs.
Les mesures d’austérité sont la cause de 74% du total de la dette des contribuables grecs
Les excédents primaires records sont aussi le résultat de la terreur fiscale qui règne en Grèce
Notes
Auteur.e
Louv Coukoutsi Correspondante du CADTM en Grèce CADTMSource http://www.cadtm.org/Les-Grecs-otages-fiscaux-de-la-Troika-et-des-banquiers