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Rappel Projection-débat avec Yannis Youlountas au club

Le collectif citoyen de Grenoble contre l’austérité en Grèce et en Europe – soutenu par Attac Isère et le Cadtm Grenoble

vous invite à la projection-débat en présence du réalisateur Yannis Youlountas

L’amour et la Révolution
Non, rien n’est fini en Grèce

Lundi 8 octobre 2018 à 20h15 Cinéma le Club Grenoble

« Dix ans après les premières émeutes, les médias ne parlent plus de la crise grecque.Tout laisse croire que la cure d’austérité a réussi et que le calme est revenu.  Ce film prouve le contraire.
 A Thessalonique, des jeunes empêchent les ventes aux enchères de maisons saisies. En Crète, des paysans s’opposent à la construction d’un nouvel aéroport.  À Athènes, un groupe mystérieux inquiète le pouvoir en multipliant les sabotages. Dans le quartier d’Exarcheia, menacé d’évacuation, le cœur de la résistance accueille les réfugiés dans l’autogestion.
Un voyage en musique parmi celles et ceux qui rêvent d’amour et de révolution. »

Depuis la projection le 23 avril à Villard Bonnot le film a été actualisé en juin et juillet en Grèce. Et pour ce qui est du débat les récentes annonces médiatiques de la soi-disant sortie de crise de la Grèce devraient faire l’objet d’un avis différent du réalisateur mais aussi du public.

Le cinéma le Club 9, bis rue du Phalanstère 38000 Grenoble propose sur son site http://www.cinemaleclub.com  la réservation de places. Ce sera le cas pour ce film prochainement.

Grèce : Un chef de parti doit rendre compte de son action politique

La persécution politique à l’encontre de Panayiotis Lafazanis ,une évolution dangereuse qui menace les libertés civiles.

« Ils ont essayé de nous enterrer, ils ne savaient pas que nous étions des graines » Auteur: Thanasis Petrakos

Lorsque, en décembre 2017, le gouvernement a déposé l’amendement sur la possibilité d’ouverture de poursuites à l’initiative du ministère public et l’imposition de sanctions sévères contre tous ceux qui s’opposent aux mises aux enchères des domiciles des foyers populaires, Unité Populaire (LaE) avait déclaré que : « Le gouvernement des Tsipras-Kammenos afin de rendre service aux banquiers fait régresser la Grèce vers des périodes sombres où se pratiquent la persécution politique et l’emprisonnement des opposants ». Malheureusement, quelques mois aprè, nous avons été confirmés.

Il est clair, cependant, que la convocation « pour rendre des explications » devant la Sécurité de l’Etat (!) adressée à Panayiotis Lafazanis, mis en question pour violation de 16 articles du Code pénal grec, ne vise pas à lui faire peur.

Il vise à faire peur à tou-te-s les citoyen-ne-s pour les empêcher de résister aux politiques du mémorandum et notamment aux ventes aux enchères des habitations populaires, aux saisies et au bradage des biens publics. Leur objectif est de terroriser les simples citoyen-ne-s en espérant leur suggérer la réflexion que « si ce gouvernement est capable de poursuivre Lafazanis pour 16 infractions d’articles du Code Pénal, si c’était moi sous leur grappin j’aurais eu à l’ensemble des articles du Code ». Parce que le gouvernement et la Troïka savent bien que, malgré les affabulations sur la prétendue sortie des mémorandums, il y aura un tsunami de mises aux enchères qui s’abattra sur les foyers populaires. Aucune protection de la résidence principale n’est plus en vigueur.

Mais il ne s’agit pas seulement des mises aux enchères et des saisies. Un bradage généralisé des biens publics est sur les rails. C’est pourquoi le « SYRIZA » actuel, ayant subi une totale mutation néolibérale droitière, procède à la persécution politique du secrétaire d’Unité Populaire – LaE. Ils veulent ainsi faire peur aux gens pour qu’ils cessent de résister, mais aussi montrer à leurs patrons qu’ils n’hésitent pas à criminaliser l’action politique de leurs anciens camarades.

Dans tous les cas, la persécution politique à l’encontre de Panayiotis Lafazanis constitue une évolution dangereuse qui menace les libertés civiles. Cela pour les raisons suivantes:

1. Est hautement problématique le fait que, pour la première fois après la dictature des colonels, un chef de parti politique soit appelé à rendre compte devant les services de police de son action politique.

2. Ce ne sont pas les premières poursuites  infligées aux militants qui tentent d’empêcher les mises aux enchères. Les poursuites à l’encontre de trois jeunes activistes et d’autres militants interpellés à Nauplie, Thessalonique et Volos les ont déjà précédées.

3. Il se confirme ainsi qu’en Grèce les mémorandums, ont non seulement installé le plus vaste mécanisme de pillage et d’asservissement d’un peuple, mais ont aussi lancé la mise à l’essai d’un dispositif de terreur et de criminalisation de l’opinion, le plus étendu après celui mis en place par la junte des colonels. Les dirigeants de la Troïka, à travers les gouvernements qui leur sont obéissant, cherchent à faire du protectorat un outil absolu pour la violation des droits et des libertés. Sauf que la criminalisation de la protestation sociale contre les conséquences du mémorandum «éternel» ouvre la voie à un grand déraillement non démocratique des institutions.

C’est pour tout cela que l’intervention du procureur à l’encontre de Panayiotis Lafazanis ne concerne pas principalement sa personne, ni seulement les militants et représentants d’Unité Populaire – LaE. Cette affaire concerne tous les citoyens démocrates. Non seulement ceux qui ont de la sympathie pour LaE, mais encore tou-te-s celles et ceux qui souhaitent se sentir encore des personnes libres.

Cela concerne tous les partis et organisations de Gauche, mais aussi toute force démocratique et progressiste, car les persécutions par le « Département de protection de l’Etat et du régime démocratique », autrement dit par les services de sécurité, rappelle de manière effroyable le passé sombre du pays de Grèce, qui a provoqué l’effusion de beaucoup de sang avant d’être dépassé.

Encore une fois, la défense de la démocratie devient affaire du peuple et de la Gauche! Le peuple doit crier haut et fort: Bas les mains des libertés démocratiques! Indépendance – Liberté – Démocratie! À bas la Troïka et le pouvoir des banques, à bas ceux qui en sont les serviteurs fidèles!

Quant à vous, M. Tsipras, et à votre gouvernement,  j’ai une chose à vous dire: vos banques et vos patrons sont très satisfaits de vous. Mais si vous calculez franchir sans difficultés « l’obstacle » appelé Unité Populaire, vous êtes loin du compte. Je vous dédie, en guise d’épilogue, les paroles du poète Dinos Christianopoulos: « Que n’avez vous fait pour m’enterrer, vous avez pourtant oublié que j’étais une graine »

* Thanasis Petrakos est membre du Secrétariat Politique d’Unité Populaire (LaE) et ancien représentant parlementaire de SYRIZA

Traduction E.Kosadinos

Source https://unitepopulaireparis.wordpress.com/2018/09/28/grece-la-persecution-politique-a-lencontre-de-panayiotis-lafazanis-une-evolution-dangereuse-qui-menace-les-libertes-civiles/

Zorba le Grec La rubrique de Panagiotis Grigoriou

Panagiotis  Grigoriou est Ethnologue et historien, chroniqueur, analyste, initiateur d’un concept de tourisme alternatif  et solidaire en Grèce. Le regard de l’historien et de l’anthropologue sur l’actualité et le vécu de la crise grecque.

Dans cette rubrique il évoque le medicane qui frappe la Grèce mais dont on a peu parlé en France car supplanté par le le tsunami en Indonésie, le durcissement de la politique gouvernementale et le non respect du choix des peuples concernés par le référendum sur l’accord Macédonien de Tsípras et de Zaev.

Zorba le grec

Notre sérénité ultime se cacherait-elle dans les théâtres antiques ? Le pays en a vu certes d’autres tempêtes, mais cette fois c’est décidément une météo inhabituelle. Le Péloponnèse, Athènes et les îles de la mer Égée ont subi ces derniers jours les dégâts du passage de… “Zorbás”, nom donné par euphémisme au medicane qui frappe encore la Grèce. Dépression subtropicale ayant évolué depuis quelques heures en medicane, contraction de “mediterranean” et “hurricane”. La météorologie, le temps seulement de quelques heures, elle a effacé alors tous nos autres… bouleversements “climatiques”, voire, l’amertume contemporaine généralisée. Pluie et vent !

Sous les effets de Zorbás. Péloponnèse, septembre 2018

Temps triste comme on dit, et le peuple se pénètre bien de la misère de notre synchronie interminable entre chômage et naufrage. Déjà tant de talents avariés sont dépréciés au même titre que l’espoir. Le régime de la escroquerie politique nommée SYRIZA se durcit, sans doute pour préparer le terrain aux prochains “bravoures” des présumés futurs “gouvernants” de la Nouvelle Démocratie de Kyriákos Mitsotákis, somme toute variante de la même… tromperie politique. Le système politique grec est mort, plus exactement la politique est morte… et le système, qui se passe désormais ouvertement des ajustements et des recouvres “démocratiques”, se porte il faut dire de mieux en mieux en apparence… sauf qu’il est plus pressé que jamais d’en finir, avec nous tous.

Naomi Klein avait déjà souligné combien le principe systémique fondamental est simple: pour les pays en “crise” ayant désespérément besoin d’une “aide” urgente. Entre les politiques de privatisation et de libre-échange promues en même temps que le dit “sauvetage financier”, tout forme alors un ensemble complet, les pays n’ont d’autre choix que d’accepter le paquet dans la série: “Voulez-vous sauver votre pays? Vendez-le.”

Et le pillage se met en place. Pour le cas grec, la période préliminaire à la liquidation finale, celle de la dite austérité et de la Troïka a d’abord étranglé l’économie et pour tout dire, la nation. Les rapaces installés aux commandes ont écrasé les salaires, les pensions, et ainsi brisé l’entrepreneuriat grec, ainsi le pouvoir d’achat de la population a sombré. Cela se nomme aussi une dévaluation interne “justifiant” au demeurant les emprunts exorbitants à faire payer au peuple grec.

Tempête. Péloponnèse, septembre 2018
Vieux naufrage et cimetière de bateaux. Péloponnèse, septembre 2018
Oiseau marin. Péloponnèse, septembre 2018

Le programme de la Troïka suivi par le mémorandum des gouvernements, dont le plus terrible a été signé par l’escroc politique Aléxis Tsípras, ont abouti à une “société des deux tiers”. Ainsi, la majorité de la population vit en dessous du seuil de pauvreté et la richesse, elle est collectée pour rester entre les mains de seulement quelques-uns. Naufrages, tempêtes et beaux oiseaux marins au pays si visité d’après un imaginaire touristique de plus en plus distant, entre les “réalités” fréquentées et le pays réel.

Ce dernier temps, on observe également un durcissement de la politique gouvernementale, perceptible depuis le remaniement effectué en aout dernier. Une autocratie qui ne se cache plus et une présence plus forte de l’État policier pour ce qui tient du contrôle des opinions et des résistances. Et en même temps, un chaos attisé, sinon provoqué, entre les agissements des néonazis pseudo-patriotes de l’Aube dorée, et de ceux issus de l’éventail anarchisant et de l’extrême supposée gauche largement compatible de la Sorosphère. Et enfin, l’explosion de la criminalité de toute sorte, sans oublier le poids du problème migratoire, tout pèse de son poids insupportable sur les événements et sur les mentalités.

Le corps social grec doit être surtout, démembré, poltron, haineux, désuni, cloisonnée et de surcroît, luttant pour sa survie au jour le jour, histoire de ne plus pouvoir exister politiquement autrement qu’à travers ce simulacre de la représentativité des partis zombis, au demeurant interchangeables si besoin. Le régime tient aussi par le biais d’un “Parlement” politiquement pornographique, et d’une caste politique “se prostituant” volontairement aux mains des “proxénètes” visibles et invisibles des Puissances étrangères.

On dirait que la… météorologie historique se répète depuis l’assassinat du premier Gouverneur des Grecs, Ioánnis Kapodístrias à Nauplie et en 1831. Puis, vint le temps du Roi Othon de Bavière, “Otto von Griechenland”, choisi par les Grandes Puissances. Comme Othon était mineur, le début de son règne avait été marqué par cette période politiquement absolutiste où Joseph Ludwig comte von Armansperg, diplomate et homme d’État bavarois assurait la présidence de la régence du Royaume de Grèce durant la minorité du roi Othon Ier avec deux autres régents: Carl Wilhelm von Heideck et Georg Ludwig von Maurer. C’est-à-dire, une première Troïka. Nauplie… et l’Europe en direct.

Lieu de l’assassinat de Kapodístrias. Nauplie, septembre 2018
Lieu de l’assassinat de Kapodístrias. Nauplie, septembre 2018
Statue du Roi Othon. Nauplie, septembre 2018
Présidence de la régence sous Armansperg. Nauplie, septembre 2018

Notons, que d’après même de récentes études historiques, l’assassinat de Kapodístrias a été fomenté par des agents anglais et français et que les archives britanniques sur cet assassinat restent inaccessibles aux historiens depuis près de 190 ans.

La politique étrangère pour un État Grec si possible indépendant menée par Kapodístrias, Gouverneur grec et ancien ministre des affaires étrangères du tsar Alexandre Ier de Russie et surtout, l’éventualité de voir naître en Méditerranée orientale un nouvel état maritime qui ne serait pas contrôlé par les Grandes Puissances, voilà ce qui dérangeait les deux pays “protecteurs” qui expérimentaient en fait la création d’un petit État grec totalement sous contrôle. En cette année 2018, on revient de la sorte… aux fondamentaux, climat ou pas !

Et pour revenir au climat du moment, celui de la météorologie, Nauplie et l’Argolide, régions de la Vieille Grèce, elles ont été parmi les contrées les plus touchées par cette dépression subtropicale devenue medicane au nom de Zorbás. Samedi, Zorbás abordait le sud de la Grèce, avec des vents d’une intensité correspondant à une tempête tropicale dont le centre du système s’est clairement entouré d’une ceinture convective rendant visible ce qui s’apparente à un œil.

Après avoir touché le Péloponnèse entre vendredi soir et samedi, puis les îles des Sporades et de l’Eubée, les intempéries ont aussi concerné Athènes avec plus de 50 mm en 24h et de violentes rafales de vent dépassant les 100 km/h, occasionnant inondations et coulées de boue. Par ailleurs, des vagues de 5 à 8 mètres sont observées sur le littoral, causant d’importantes submersions marines. Grèce tropicale !

L’Europe en direct. Nauplie, septembre 2018
Péloponnèse tropical. Septembre 2018

Dimanche matin sur le port d’Épidaure et sous ses eaux même on évaluait les dégâts. Quatre voiliers coulés et bien d’autres endommagés lorsque ce terrible vent du samedi et du cyclone venait alors de l’Est. Les experts des assureurs, ceux de la compagnie… anglaise de yachting ayant loué ces voiliers et qui en a perdu quatre, les réparateurs maison, les grues, tout ce petit monde était déjà sur place.

“Heureusement il n’y a pas eu de morts ni de blessés, pour le reste, nous avons perdu quatre voiliers… et c’était notre dernière semaine de la saison. Une fois sortis de l’eau, les bateaux vont être réparés sur place par nos propres équipes, alors…vivement 2019”, nous disent-ils les experts de la compagnie. Touristes comme habitants réalisaient des selfies sous une pluie alors fine, décidément, notre dernière sérénité résiderait-elle plutôt dans les théâtres antiques, surtout à Épidaure. Zorba le Grec.

Au port d’Épidaure. Septembre 2018
Au port d’Épidaure. Septembre 2018
Au port d’Épidaure. Septembre 2018
Les experts sur place. Port d’Épidaure, septembre 2018

Semaine alors fort… cyclonique en Grèce au point de faire oublier le durcissement de la politique gouvernementale, perceptible depuis le remaniement effectué en août dernier. Autocratie et présence plus forte de l’État policier et voilà que le chef du parti de l’Unité Populaire, Panagiótis Lafazánis a été convoqué à la Direction centrale de la Police à Athènes pour s’expliquer sur ses actions sur le terrain des Tribunaux, en opposant à la vente aux enchères forcée de l’habitat populaire. Pourtant homme politique ex-SYRIZA et ex-Ministre ayant quitté ce parti des balivernes historiques en août 2015, son interpellation a provoqué un certain mécontentement exprimé publiquement même chez les députés SYRIZA actuels. C’est le dernier honneur des cyniques arrivistes… joué dans les jeux d’aventure.

Sauf que l’aventure c’est autant celle du pays. Car dans cette affaire, il est fondamental de comprendre que Lafazánis a été interpellé de la sorte pour rendre compte devant un service lequel ne faisait pas vraiment parler de lui jusque là. Il s’agit de la “Direction de la Protection du Régime et de la Démocratie”. Ce n’est ni plus ni moins, une administration sinistre, digne des temps… cycloniques nouveaux, très réactionnaire et profondément anachronique et qui fait référence à d’autres temps bien obscurs. La dystopie techno-féodale se dessine alors déjà dans nos rétroviseurs, il y a urgence.

Cette administration a été mise en place sous le gouvernement du PASOK et du pion de l’Allemagne Simítis en 2000, et dont les prérogatives ont été confirmées et actualisées sous la Troïka et le Mémorandum, sous le gouvernement Papandréou en 2011. Notons-le à l’époque, sous le Ministre de l’Ordre public Chrístos. Papoutsís. Ce dernier, rappelons-le, il est issu de ce personnel politique… alors mûri et macéré dans les fonts baptismaux des intrigues du pouvoir des colonisateurs depuis son poste de Commissaire européen à l’Énergie entre 1995 et 1999.

La dystopie dans le rétroviseur. Athènes, septembre 2018
Siècle cyclonique. Athènes, septembre 2018
Modernité. Athènes, septembre 2018

Enfin, cette “Direction de la Protection du Régime et de la Démocratie” a été confirmée et “modernisée” dans ses fonctions en 2017 par le gouvernement Tsípras, lequel laisse en même temps volontairement, car il s’agirait alors et visiblement d’un plan, la criminalité diverse et variée ronger ce qui reste du pays réel et autant des dernières certitudes. Le pouvoir criminalise ainsi les opinions à la carte mais il favorise le crime si ce n’est que par la négligence.

Et sur Internet grec, on estime même, à l’instar de l’analyse proposée par le site des Ingénieurs Civils (issus des rangs de la gauche), que cette dite “Direction de la Protection du Régime et de la Démocratie”, “serait-elle alors largement contrôlée par le gouvernement et autant liée aux Services secrets étrangers des pays”… faiseurs comme on sait de la dernière pluie cyclonique à la géopolitique actuelle comme passée, site des Ingénieurs Civils, le 26 septembre 2018.

D’après les textes officiels reproduits pour les besoins de l’analyse publiée sur ce site, la mission de ce service au sein de la Division de la sécurité de l’État, “c’est la prévention et la répression des actes de violence ou des menaces graves dirigés contre la sécurité de l’État et contre le système démocratique. Dans ce contexte, elle recherchera, collectera, traitera et exploitera les informations et les renseignements nécessaires recueillis au sujet d’actes individuels ou de groupes organisés qui agissent contre la sécurité de l’État et du gouvernement démocratique ou d’actes de violence à l’égard des personnes ou des biens, tout en surveillant ces activités, œuvrant conjointement avec la Direction de la sécurité de l’État, la Police anti-criminelle, ainsi que la Direction de la gestion et de l’analyse de l’information”.

Commerce… charitable. Athènes, septembre 2018

Au même moment, et c’est du jamais vu en Grèce depuis la chute du régime des Colonels si l’on croit certaines analyses, des compagnies pétrolières s’apprêtant à exploiter le pétrole découvert dans la belle région montagnarde de l’Épire au Nord-Ouest du pays, feraient preuve de comportement et d’agissements inhabituels, pour tout dire criminels, et le “gouvernement” et l’État avec sa “Direction de la Protection du Régime et de la Démocratie” se limitent à un rôle d’observateurs.

“Car les promoteurs des projets pétroliers seraient en train depuis quelques semaines de criminaliser le droit de manifester afin de pouvoir détruire l’environnement assez intact de l’Épire. Ceux donc des compagnies privées de gardiennage, engagés par les pétroliers, sillonnent alors les villages concernés, jetant la lumière de leurs phares depuis leurs véhicules 4X4 au beau milieu de la nuit sur les habitations des citoyens ouvertement opposés à l’exploration et à l’extraction des hydrocarbures en Épire. Une équipe même issue des compagnies privées de gardiennage composée d’une vingtaine de personnes a pénétré dans le domicile des opposants à l’exploitation pétrolière. Jours de terrorisme en Épire”, article de Yánnis Perákis publié sur le site Internet du mouvement du Plan-B daté du 28 septembre 2018. Appel aux journalistes, enquêtez sur cette question !

On s’éloigne alors de cette Grèce photographiée et même caressée dans le sens du poil par les touristes à Épidaure… avant comme après le cyclone au pays où même l’hôtellerie figure parfois parmi les lieux de mémoire, heureusement dans un sens que l’on vend encore du tabac d’Orient et depuis peu, de la marchandise… devenue disons solidaire !

Antiquités. Péloponnèse, septembre 2018
Épidaure. Septembre 2018
Épidaure. Septembre 2018

Sur ces faits la grande presse ne dira pas un seul mot, tandis que toute la presse s’est emballée sur la dramatique affaire d’un toxicomane ayant pénétré la semaine dernière dans une bijouterie d’Athènes, éventuellement pour commettre un vol et ensuite décédé suite à son passage à tabac par le bijoutier et par un passant, sans que les médecins légistes dont celui désigné par les proches de la victime puissent déterminer les causes exactes de sa mort. Il faut préciser que la victime, Zacharías Kostópoulos avait été un militant LGTB+, et drag queen connu(e) sous le nom de Zackie Oh

Depuis cette mort tragique de Kostópoulos âgé de 33 ans, les pseudo-anarchistes et les militants LGBT+, compatibles Sóros ils ont manifesté devant les lieux du drame, tandis qu’une bonne… grappe d’universitaires défenseurs de la mondialisation techno-féodale contre les peuples et les nations, a cru bon signer une pétition. Parmi ces signatures il y a celle d’Antónis Liákos, universitaire, bras droit de Simítis sous le PASOK et de Tsípras actuellement, et accessoirement, compagnon de la nouvelle ministre de la Culture, la très PASÓKienne et SYRIZA Myrsíni Zorbá.

La question ici, ce n’est pas de ne pas juger et surtout de ne pas punir les assassins de Kostópoulos si les faits sont prouvés. La question, ce n’est pas non plus celle des préférences et les autres idiomes sexuels des uns comme des autres historiquement attestés d’ailleurs, mais plutôt cette conversion orchestrée par le système de certaines “luttes et causes”, vers la dissection du corps social et vers la destruction du cadre historique culturel et démocratique, souvent étatique et national des peuples et pour tout dire, de la personne humaine. Car c’est d’abord à partir de la personne humaine et de la société justement, qu’il est encore possible de s’organiser et de résister. Comme le souligne ailleurs Nicolas Bonnal au sujet parallèle de la figure de la Jeune-Fille et de l’idéologie transgenre ; ceci j’ajouterais en préparation du transhumanisme alors totalitaire et intégral, “l’Occident est sous contrôle psychiatrique-pathologique, belliciste-humanitaire, féministe-antiraciste, androphobe-russophobe et sociétal-transgenre” (…)

La violence avec laquelle la féminitude est administrée dans le monde de la marchandise autoritaire rappelle comme la domination se sent libre de malmener ses esclaves, quand bien même elle aurait besoin d’eux pour assurer sa reproduction.” (…) “L’important est la soumission. Contrairement à son ancêtre, la Jeune-Fille bio n’affiche plus l’élan d’une quelconque émancipation, mais l’obsession sécuritaire de la conservation. C’est que l’Empire est miné à ses fondements et doit se défendre de l’entropie. Après on fait du Merkel. On aime les LGTBQ ou les migrants, c’est les hommes et les Allemands qu’on déteste. La Jeune-Fille bio sera donc responsable, ‘solidaire’, écologique, maternelle, raisonnable, ‘naturelle’, respectueuse, plus auto-contrôlée que faussement libérée, bref: bio-politique en diable”, “Le contrôle social par la Jeune-Fille en occident” de Nicolas Bonnal, publié le 14 septembre 2018.

Hôtel, lieu de mémoire. Nauplie, septembre 2018
Hôtel, lieu de mémoire. Péloponnèse, septembre 2018
Hôtel, lieu de mémoire. Péloponnèse, septembre 2018
Tabac d’Orient. Nauplie, septembre 2018

Lundi matin, premier jour d’octobre. Automne grec et balkanique sous un temps cyclonique. Les médias grecs analysent le résultat du referendum de la veille organisé à l’Ex-République Fédérale de Macédoine. Le peuple voisin des Slavomacédoniens a largement rejeté par son abstention, l’accord Macédonien de Tsípras et de Zaev, chefs de gouvernement et marionnettes des Puissances étrangères respectives. Comme durant le référendum grec, les maîtres de la géopolitique forcement interventionniste, ils ont multiplié les déclarations, voire, ils se sont déplacés à Skopje pour dicter aux habitants et citoyens du pays tout le sens de “leur” vote, se prononçant c’est-à-dire en faveur de l’accord préalable.

Dans le désordre, il y a eu l’intervention des dignitaires impériaux de Bruxelles et de Berlin, de Donald Trump, des patrons de l’OTAN, d’Emmanuel Macron, en passant par des acteurs régionaux, à l’instar du Premier ministre de l’Albanie Edi Rama lequel a invité la minorité albanaise (30% de la population) de se rendre aux urnes et de voter en faveur de l’accord, plus exactement, la question posée évoquait également l’approbation ou pas d’une future adhésion de ce pays au sein de l’OTAN et de l’UE

Visiblement, les peuples des Balkans comprennent très bien ce que l’Europe des colonisatrices de Berlin et de l’UE veut dire, l’époque du dépeçage germano européiste de la Yougoslavie et de la haine ainsi attisée entre les peuples n’est guère loin, les peuples donc, seuls grand perdants de l’histoire. Ainsi, avec près de 65% d’abstention, la consultation annule d’après les conditions requises au pays voisin, toute la portée supposée du OUI, donné largement gagnant par les médias habituels.

Temps cyclonique. Péloponnèse, septembre 2018

Et voilà que depuis Bruxelles on annonce maintenant que le referendum n’a qu’une portée consultative et que l’accord doit être ratifié par les deux Parlements, d’ailleurs en Grèce, la marionnette Tsípras s’est obstiné pour ne pas organiser un referendum analogue. L’Occident sous contrôle psychiatrique-pathologique, méta-démocratie comprise. Ainsi à Athènes, certains élus du parti des Grecs Indépendants de Kamménos, Ministre de la Défense et allié de Tsípras, quittent en moment leur parti pour ainsi se prononcer finalement en faveur de l’accord, puisque Kamménos déclare qu’il retirera sa confiance au gouvernement lorsque l’accord va arriver devant la Chambre des députés. De même, les élus du “parti de la Rivière” To Potámi de Stávros Theodorákis, parti engendré entre Berlin et Bruxelles sont pressentis pour servir “comme il faut”, à chaque fois que les grands partis et autant principales marionnettes n’y parviennent pas.

Ainsi le système verrouille et renforce son dernier euphémisme démocratique… avant sans doute le grand formatage ! A moins de pouvoir créer de bien nouvelles conditions de représentativité réellement démocratique et souveraine, les peuples, à commencer par ceux de l’UE, devrait s’abstenir de participer aux élections prépayées et pré-payantes pour seulement certains, et ceci si possible très largement. Déjà, les dites Élections européennes devraient connaître une abstention de plus 95%.

Temps cycloniques… Zorbá le Grec et Macédoine de légumes ! Les décisions sont prises ailleurs, et les peuples sont violés. Si cet accord est finalement ratifié, les relations entre les deux peuples vont être davantage empoisonnées, car il est rejeté par une très large majorité des citoyens des deux côtés de la frontière. C’est bien dommage, d’autant plus que les deux signataires de l’accord préalable, Tsípras et Zaev ne seront plus aux commandes dans quelques mois.

Macédoine, 784 kms. Péloponnèse, septembre 2018
Derrière la vitrine. Athènes, septembre 2018
Institut français d’Athènes. Septembre 2018

Sur un mur de l’Institut français d’Athènes, on y discerne certaines figures de la culture et autant de la gloire de la France et de la République. Pour combien de temps encore ?

Notre dernière sérénité se cacherait-elle dans les théâtres antiques ou même derrière la vitrine politique de fait brisée ? Le pays en a vu certes d’autres tempêtes mais cette fois c’est décidément un mauvais temps bien inhabituel. Quatre personnes sont portées disparues en Eubée et en Thessalie, Zorba… quitte alors la Grèce, tout le symbole y est on dirait.

Sauf que nos matous habituels sont toujours là, scrutant le temps, tout comme les âmes. Athènes en octobre, pluie et vent !

Matou d’Athènes. Septembre 2018
* Photo de couverture: Sérénité à Épidaure, septembre 2018

Aquarius et le refus de la France

Une honte française par Denis Sieffert sur Politis

Le Panama, sous pression de l’Italie, vient de retirer pavillon et immatriculation à l’Aquarius. L’humanitaire devient ainsi illégal. Matteo Salvini fait la loi en Europe, et la France s’y conforme. Triste bilan.

Décidément, le gouvernement français ne se grandit pas dans l’interminable feuilleton de l’Aquarius. Après Matignon, c’est le ministre des Finances, Bruno Le Maire, qui, mardi, a dit « non » au navire humanitaire dont l’équipage demandait le droit d’accoster à Marseille. Nos ministres, en toute mauvaise foi, continuent d’ânonner le même refrain : c’est au pays le plus proche d’accueillir les migrants. En l’occurrence, l’Italie. Point besoin de droit ou de politique européenne, c’est la géographie qui gouverne ! Paris feint d’ignorer qu’une extrême droite xénophobe est au pouvoir à Rome ou, pire encore, lui confère une détestable légitimité en imitant sa politique. Mais la guéguerre avec l’Italie n’est pas la principale motivation du gouvernement français. La volonté de flatter une partie de l’opinion sensible à la propagande de Marine Le Pen et de Laurent Wauquiez pèse davantage dans ce comportement sans principes.

Dans cette situation, il faut saluer une fois de plus le courage des humanitaires qui ne renoncent pas dans l’adversité. Les soutenir est l’objectif de l’appel que nous publions cette semaine. Car ce n’est plus seulement que des ONG doivent se substituer à la défaillance des États, elles doivent aussi résister à leurs attaques. La dernière en date étant la décision de Panama, sous pression de l’Italie, de retirer pavillon et immatriculation à l’Aquarius. L’humanitaire devient ainsi illégal. Matteo Salvini fait la loi en Europe, et la France s’y conforme. Triste bilan.

C’est donc peu dire que l’Europe va mal et qu’elle n’incarne pas les grands principes dont elle se réclame les jours de fête. Mais à New York, c’est un autre épisode de la désagrégation de la communauté internationale qui se joue actuellement. L’Assemblée générale de l’ONU a des allures de fin d’époque. Non seulement il n’y a rien à espérer qui puisse nous rapprocher de la paix en Syrie, au Yémen ou en Libye, mais c’est un discours de guerre, celui de Donald Trump contre l’Iran, qui devait dominer les débats. Comme jadis la Société des Nations, l’ONU est née du beau rêve kantien de « paix perpétuelle ». Mais ce sont toujours les chimères d’après-guerre. Le « plus jamais ça ! » est aussi crédible qu’une promesse d’ivrogne. Comme son ancêtre, l’ONU semble aujourd’hui condamnée. Non par une guerre mondiale, mais par une multiplication de conflits apparemment sans issue. La SDN, qui avait promis le désarmement, a fini dans l’invasion de la Mandchourie par les Japonais, et sous les bombes de la Luftwaffe.

L’ONU agonise au Moyen-Orient. Signe de la maladie qui l’emporte, les chefs d’État des deux pays les plus peuplés du monde, le Chinois et l’Indien, n’ont même pas jugé utile de faire le voyage. Pas plus que le président russe, impliqué dans quelques-uns des conflits les plus sanglants de la planète. Avec son « America first », le président américain – bien présent, lui – est l’inquiétant représentant de ce que Bertrand Badie appelle « l’archéo-souverainisme » (1).

Il forme avec Vladimir Poutine un attelage paradoxal. Le premier est proche des suprémacistes blancs, le second a ressourcé son pouvoir dans l’encens d’une Église orthodoxe moyenâgeuse. Ces deux-là se livrent une guerre commerciale sans merci, tout en partageant fondamentalement la même vision du monde. Si le président américain allonge tous les jours la liste noire des entreprises et des personnalités russes avec lesquelles toute transaction est interdite, c’est beaucoup pour se dédouaner d’une trop grande proximité idéologique avec le maître du Kremlin, auquel il doit sans doute son élection. Il pousse le zèle jusqu’à inscrire sur la liste des bannis l’officine russe Internet Research Agency, accusée d’avoir diffusé de la propagande en sa faveur pendant la campagne électorale de 2016…

Au Moyen-Orient, l’un soutient toujours, en Syrie, la plus sanglante des dictatures ; tandis que l’autre, par Arabie saoudite interposée, provoque au Yémen l’une des plus graves catastrophes humanitaires de notre époque, où la famine s’ajoute aux bombes saoudiennes. Quant au conflit israélo-palestinien, il illustre depuis soixante-dix ans l’impuissance de l’ONU. Plus de deux cents résolutions sont restées lettres mortes ou se sont heurtées au veto américain. Ce conflit est comme une apologie de la force contre le droit. Et il est, quoi qu’on en dise, plus que jamais central. Trump ne militerait pas rageusement pour déstabiliser l’Iran, si ce n’était une « commande » israélienne (2).

Dans ce monde de brutes, le « multilatéralisme » dont Emmanuel Macron se prétend l’apôtre paraît aussi sympathique que dérisoire. Mais ce n’est qu’une posture si l’on n’oppose pas aux « archéo-souverainistes » une autre conception sociale. Toute la politique du président français va en sens inverse. Voilà pourquoi son discours peut toujours provoquer les applaudissements, il sonne creux. On a le sentiment, face à ce sombre tableau, que les sociétés civiles, les ONG, les humanitaires sont amenés à jouer de plus en plus les premiers rôles. Là est l’espoir.

(1) Quand le Sud réinvente le monde, Bertrand Badie, La Découverte, à paraître le 4 octobre.

(2) On ne saurait trop recommander à nos lecteurs le hors-série que nous publions avec nos amis d’Orient XXI : « Israël-Palestine, une si longue histoire ». En vente, ce 27 septembre.

Source https://www.politis.fr/articles/2018/09/une-honte-francaise-39369/

La politique européenne met en péril la vie des migrants

Propos recueillis par Bruno RIPOCHE

L’Union européenne paie la Turquie et des pays africains pour retenir les migrants. Mais quel est l’impact de cette politique sur ces pays ? Un institut de recherche s’est penché sur l’envers du décor.

L’institut néerlandais Clingendael vient de publier un rapport* explosif sur l’impact, en Afrique subsaharienne, de la politique européenne visant à stopper les migrants avant qu’ils n’atteignent nos frontières. Clotilde Warin en est la coauteure. Interview ci-dessous

(*ici le lien vers le rapport – en anglais – : https://www.clingendael.org/sites/default/files/2018-09/multilateral-damage.pdf)

L’Union européenne paie la Turquie et des pays africains pour retenir les migrants avant qu’ils n’arrivent à ses frontières. Cette politique d’« externalisation » fonctionne-t-elle ?

D’un point de vue comptable, cela marche très bien ! Le nombre des arrivées en Italie par la Méditerranée a diminué de 84 % au premier semestre de 2018. Les dirigeants de l’UE affirment : « Les chiffres parlent pour nous, le résultat est là ».

Vous avez regardé l’ envers du décor , sur les routes migratoires au Sahara. Qu’avez-vous vu ?

Des accords ont été signés avec le Soudan dès 2014, avec le Niger en 2016. Contre financement – respectivement 160 et 230 millions d’euros – ces pays mènent une politique de « frein migratoire ». Confier les clés de la fermeture de nos frontières aux pays dont les migrants sont originaires, ou aux pays par lesquels ils transitent, a des conséquences néfastes : cela ne fait que déplacer les flux, mettre les migrants en danger, accroître le pouvoir de milices et créer de l’instabilité régionale.

Vous qualifiez le Niger de « bon élève », dans la mesure où il applique à la lettre les demandes européennes. Les flux sont-ils taris ?

Prenons l’exemple d’Agadez, dans le Nord, aux portes du désert. C’est le principal point de passage vers la Libye. Le gouvernement nigérien entend stopper la mobilité des migrants sur le millier de kilomètres entre cette ville et la frontière libyenne.

Or, d’une part, il s’agissait de mobilité légale, relevant de la libre circulation entre les États de la Cedeao (Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest). Une mobilité comparable à celle existant au sein l’espace de Schengen en Europe.D’autre part, cette mobilité était protégée. Une fois par semaine, un convoi de véhicules escorté par l’armée nigérienne quittait Agadez vers la Libye parce qu’il s’agit de routes dangereuses où l’on peut être attaqué par des bandits.

Que se passe-t-il depuis que le transport des migrants est interdit ? Les migrants continuent évidemment de se déplacer, mais par des routes officieuses, beaucoup plus dangereuses, et se retrouvent entre les mains de trafiquants qui n’hésitent pas à les abandonner en plein désert.

« On oublie les morts dans le Sahara »

Peut-on chiffrer les conséquences ?

Depuis la mise en œuvre de ces politiques, en 2016, le nombre des migrants retrouvés morts dans le désert au nord d’Agadez a explosé : 71 morts en en 2015, 95 en 2016, 427 en 2017, selon les chiffres de l’Organisation internationale pour les migrations. Et les migrants que l’on a interrogés nous disent avoir vu de nombreux cadavres sur le sable… qui ne sont pas tous comptabilisés. On parle des morts en Méditerranée, on oublie souvent ces morts dans le Sahara. La politique européenne met en éril la vie de migrants.

  Image

Les accords entre l’UE, le Soudan et le Niger, ont déplacé les routes migratoires, notamment vers le Tchad. | Service infographie Ouest-France et institut Clingendael.

En quoi cela fragilise-t-il un État comme le Niger ?

Cette politique de « frein migratoire » a conduit Niamey à adopter une loi anti-immigration sans véritable base juridique, et qui met en péril l’unité du pays. Les deux grandes communautés d’Agadez, les Toubous et les Touaregs, vivaient du transport – hier légal — de migrants. Aujourd’hui, on confisque leurs véhicules, on les emprisonne.

La grogne est forte et cela décrédibilise le pouvoir, dans un État qui avait retrouvé son unité et réussi sa transition démocratique avec l’élection en 2011 de Mahamadou Issoufou. Cette politique migratoire rend aussi de plus en plus impopulaires, sur place, des militaires européens déployés dans le cadre de l’opération antiterroriste Barkhane. 

« L’UE contribue indirectement à renforcer le pouvoir des milices »

La coopération avec le Soudan apparaît autrement plus scandaleuse…

Ce pays est dirigé depuis près de 30 ans par Omar el-Béchir, un dirigeant autoritaire inculpé de crimes de guerre, crimes contre l’humanité et génocide au Darfour par la Cour pénale internationale… Et pourtant, il est devenu un partenaire fréquentable pour l’Union européenne.

Pour stopper les migrants, Béchir a dépêché ses Forces de soutien rapide (FSR), des milices gouvernementales qui ne sont autres que les janjaweed, ces milices arabes responsables des exactions contre les populations du Darfour.

Leur commandant, Hemmeti, se targue d’arrêter des milliers de migrants. Nos recherches ont prouvé que les FSR en arrêtent certes quelques centaines, mais qu’elles sont surtout devenues des passeurs, qui rançonnent les migrants et les revendent aux trafiquants libyens.

Cette « milicianisation » est la grande découverte de notre enquête. Elle pose de graves questions sur le choix politique qu’a fait l’Union européenne. L’UE contribue indirectement à renforcer le pouvoir des milices.

Quelles sont les conséquences pour les migrants ?

Que ce soit pour les migrants de la Corne de l’Afrique (Somalie, Erythrée…) ou de l’Afrique de l’Ouest (Cameroun, Guinée, Côte d’Ivoire…), cela rend leur trajet plus long, plus cher, plus dangereux. Lorsque ces migrants prennent la route, ils sont confrontés sur leur chemin à de multiples check points tenus par des armées, des milices ou des bandits. À chaque étape, ils sont rançonnés et doivent trouver de l’argent. Quand ils parviennent en Libye, ils se retrouvent souvent aux mains de trafiquants qui les torturent tout en appelant leur famille au téléphone pour obtenir une rançon.

Je prends l’exemple d’un demandeur d’asile érythréen que j’ai longuement rencontré, sa dette envers sa propre famille était de 13 000 dollars à son arrivée en France. La famille, quand elle entend le migrant hurler sous la torture, envoie de l’argent, quitte à s’endetter. La mère couturière d’un migrant vend sa machine à coudre, puis la vache qu’elle avait… Ce sont des dettes terribles pour les familles en Afrique.

« En contradiction avec les valeurs européennes »

L’Europe s’assoit sur ses principes fondateurs ?

Cela est en contradiction avec les valeurs qui ont été au fondement de la construction européenne. Et, sur le terrain, c’est extrêmement handicapant pour les diplomates européens qui tentent d’œuvrer pour le processus de paix au Darfour ou pour la transition démocratique ailleurs.

L’Union européenne semble se dire qu’elle n’a que cette solution pour contrer la montée de l’extrême droite en Europe. Or, c’est faux. L’Italie, avec l’ancien ministre de l’Intérieur Marco Minniti, a mené une politique très anti-migrants digne de l’extrême-droite… Cela n’a pas empêché l’extrême droite d’accéder au pouvoir aux dernières élections.

L’Institut Clingendael conseille le gouvernement néerlandais en matière de relations internationales. Quelles recommandations faites-vous ?

D’abord, de ne pas adopter des politiques qui vont à l’encontre de l’Etat de droit. Ne pas travailler avec des forces de sécurité qui ont commis des abus contre les droits de l’homme. On souhaite qu’il y ait une responsabilité juridique de l’Union européenne dans ses politiques d’externalisation des frontières, si jamais on se rend compte que leur mise en place porte atteinte aux droits de l’homme.

Source https://www.ouest-france.fr/monde/pour-endiguer-les-migrants-l-europe-les-livre-aux-milices-5984901

le 8 octobre projection-débat L’amour et la révolution en présence de Yannis Youlountas

Le collectif citoyen de Grenoble contre l’austérité en Grèce et en Europe – soutenu par Attac Isère et le Cadtm Grenoble

vous invite à la projection-débat en présence du réalisateur Yannis Youlountas

L’amour et la Révolution
Non, rien n’est fini en Grèce

Lundi 8 octobre 2018 à 20h15 Cinéma le Club Grenoble

« Dix ans après les premières émeutes, les médias ne parlent plus de la crise grecque.Tout laisse croire que la cure d’austérité a réussi et que le calme est revenu.  Ce film prouve le contraire.
 A Thessalonique, des jeunes empêchent les ventes aux enchères de maisons saisies. En Crète, des paysans s’opposent à la construction d’un nouvel aéroport.  À Athènes, un groupe mystérieux inquiète le pouvoir en multipliant les sabotages. Dans le quartier d’Exarcheia, menacé d’évacuation, le cœur de la résistance accueille les réfugiés dans l’autogestion.
Un voyage en musique parmi celles et ceux qui rêvent d’amour et de révolution. »

Depuis la projection le 23 avril à Villard Bonnot le film a été actualisé en juin et juillet en Grèce. Et pour ce qui est du débat les récentes annonces médiatiques de la soi-disant sortie de crise de la Grèce devraient faire l’objet d’un avis différent du réalisateur mais aussi du public. 

Le cinéma le Club 9, bis rue du Phalanstère 38000 Grenoble propose sur son site http://www.cinemaleclub.com  la réservation de places. Ce sera le cas pour ce film prochainement.

Amère Patrie La rubrique de Panagiotis Grigoriou

Panagiotis  Grigoriou est Ethnologue et historien, chroniqueur, analyste, initiateur d’un concept de tourisme alternatif  et solidaire en Grèce. Le regard de l’historien et de l’anthropologue sur l’actualité et le vécu de la crise grecque.

Dans cette rubrique il évoque la destruction des petits bateaux de pêche traditionnels contre subvention de l’Union européenne mais aussi le dernier scandale de transfert de monuments historiques et de sites archéologiques à  l’Agence chargée de la privatisation des biens de la Grèce.

Amère Patrie

Bonne année pour le tourisme d’après les médias, nos plaisanciers restent ainsi longtemps à flotter entre les îles grecques, forcément à la surface de l’eau. Beau pays et cependant coquille de plus en plus vidée. Le gouvernement de l’indescriptible Aléxis Tsípras, fait semblant de découvrir qu’avec le reste des biens publics, il a également transféré la jouissance des sites archéologiques et des musées à la Treuhand à la grecque, c’est-à-dire aux mains des rapaces planétaires de l’Agence chargée de la privatisation des biens de la Grèce. Et pendant ce temps, on détruit à la chaîne les bateaux de pêche, de préférence traditionnels. Culture morte.

Destruction d’un bateau de pêche. Péloponnèse, septembre 2018

La scène se déroule dans le Péloponnèse présumé authentique. La destruction d’un bateau de pêche. Plus authentique que jamais, c’est autant la subvention de l’Union européenne laquelle le plus souvent dépasse largement la valeur marchande du bateau détruit. Le contexte s’y prête d’ailleurs mieux qu’avant, “c’est de l’argent très frais par les temps qui courent”, comme on aime se dire sur place. Donc on accepte, aussi dans la mesure où le métier de pêcheur est de plus en plus malmené et surveillé. D’acculturation en acculturation, sans oublier le départ de la dernière jeunesse grecque à l’étranger, les vocations ne sont plus.

Notons qu’en terre étrangère, les enfants grecs ne connaîtront plus le réseau des écoles que l’État grec avait si naturellement financé durant tant d’années. Comme le rappelle même la presse bien… autorisée, en 2011 une décision ministérielle grecque fait baisser de mille à une centaine seulement, le nombre d’unités pédagogiques officiellement reconnues disposant l’enseignement de la langue grecque à l’étranger, quotidien “Kathimeriní” du 10 septembre 2018. Novembre 2011, c’est également, rappelons-le, le… grand moment du Premier ministre et d’abord banquier, Loukás Papadémos, imposé par les Puissances, suite “logique” au limogeage du déjà funeste Yórgos Papandréou par le tandem Merkel – Sarkozy.

En 2018, les parents expatriés malgré eux, reconnaissent que la bataille avait été perdue, ainsi ils ont été obligés de suivre le chemin de l’exil économique. Seulement, toute la bataille actuelle c’est que leurs enfants ne perdent pas le lien avec la langue grecque et pour tout dire avec le pays. Durant cette même année, et sous la gouvernance des déconstructeurs arrivistes de SYRIZA, comme on sait ouvertement adeptes de l’effacement de notre culture, de notre mémoire, voire de l’effacement du pays tout court, lorsque certains parents installés à Poitiers (France) se sont adressés au Consul grec, exprimant leur désarroi devant la disparition des écoles grecques, le représentant officiel de… l’amère Patrie, leur a tout naturellement suggérer de faire appendre une autre langue à leurs enfants, par exemple la langue italienne, quotidien “Kathimeriní” du 10 septembre 2018.

Bateau en son dernier jour. Péloponnèse, septembre 2018
La destruction… déconstruction commence. Péloponnèse, septembre 2018
Le moteur est enlevé en premier. Péloponnèse, septembre 2018

De retour au pays pour l’été, les enfants de la nouvelle Diaspora ne verront même plus d’ailleurs les beaux bateaux traditionnels, d’après la Confédération de la Protection des bateaux traditionnels en bois, sur 14.500 bateaux de ce type et en 20 ans, près de 12.500 bateaux ont été détruits, “c’est l’apogée de la folie grecque actuelle”, et j’ajouterais que la destruction des bateaux tient autant et savamment de la déconstruction culturelle organisée. Accessoirement, les Grecs ne pourront plus se tourner vers la mer par temps de crise et d’effondrement disons ultimes, et ils demeureront dépendants des chalutiers et des multinationales agroalimentaires qui entre autres mondialisateurs, sont les maîtres de l’Eurocontrol depuis Bruxelles et depuis Berlin.

Ainsi, 12.500 bateaux ont été détruits. “Jeudi après-midi, dans la zone balnéaire de Néos Pýrgos, sur l’île d’Eubée. La scène à laquelle j’ai assisté avait quelque chose d’un cauchemar. Le soleil avait presque atteint le milieu du ciel et il brûlait fort comme pour nous punir. Deux chiens attachés aux bateaux déposés à proximité sur le chantier de réparation aboyaient continuellement. Devant nous, le caïque ‘Pános-Maria’, construit en 1983, longue de huit mètres, reposait à peine sur le sol au moyen de quatre troncs d’arbres tronqués. Le temps était venu, celui de son exécution, de sa mise à mort. Derrière lui, une pelleteuse. Le conducteur tenait une cigarette dans la bouche et les mains sur les leviers. La fumée sortait des vitres étroites de l’engin, on dirait les narines d’une bête immonde. Dès que l’agent de la Garde côtière grecque a donné le signal, le machiniste a aussitôt manié le marteau-piqueur, ce bras en fer vissé au bout du compresseur à la pince si épaisse. Il a attaqué la coque avec rage.”

“Bois brisé comme on brise alors les os d’un animal encore vivant. Comme si le bateau avait du souffle et de la voix. Pendant une demi-heure je voyais le caïque perdre sa belle forme, se perçant et se brisant, se lamentant même. Le marteau-piqueur qui se dressait dans les airs soulevait les morceaux de la coque brisée, et qui retombaient au sol. À côté de moi se trouvait Maria, l’épouse du pêcheur Panagiótis Livanós, le propriétaire du caïque. Ils pêchaient ensemble. Son mari, malade, ne pouvait plus poursuivre dans le travail, ainsi, il a décidé d’abandonner leur bateau à la destruction, et de recevoir en échange, l’indemnité de 83 000 euros que lui a accordée l’Union européenne. Montant excessif Si cette même coque était construite aujourd’hui, cela coûterait au total 40 000 euros”, quotidien “Kathimeriní” du 15 juillet 2018.

Caïques encore vivants. Péloponnèse, septembre 2018
Dystopie imposée et illustrée ! Athènes, septembre 2018
Beauté imposante. Péloponnèse, septembre 2018

J’ai assisté à une scène analogue qui s’est déroulée dans le Péloponnèse, surtout présumé authentique. Le conducteur de l’engin est arrivé le premier sur les lieux, et il a attendu les autres acteurs de la mise à mort durant près d’une heure. Le mécanicien pour bateaux et chalutiers du coin y était également convié, il a ainsi et d’abord œuvré pour la récupération des parties mécaniques avant… l’exécution. Je l’avais rencontré la veille. “C’est ignoble, toute notre tradition se perd, notre capacité de prise sur nos ressources halieutiques en cas de besoin, toute cette culture et en même temps art populaire de la construction navale de proximité. L’Union européenne paye bien pour en finir avec nous, en réalité, elle nous distribue les dernières miettes alors trompeuses”, m’avait-il dit. Péloponnèse authentique.

Ce même jour au café du coin, un jeune homme fustigeait à sa manière note piètre modernité. “Ceux de SYRIZA et de l’UE veulent nous déchristianiser, nous faire enlever la croix de notre sol, puis, faire interdire les cloches des églises, c’est la guerre”. Les autres au café ont fait un signe d’abrogation de la tête. Il n’y a pas vraiment à redire et ce n’est pas du populisme comme le diraient les propagandistes et les politiciens autorisés, les faits sont là et surtout ils sont palpables à travers le pays réel. On sait par exemple que toute une série d’actions très sournoises sont en cours pour faire disparaître à terme la Croix du drapeau hellénique sans oser le dire ouvertement. Cela est visible déjà à travers bon nombre de campagnes publicitaires, tout comme à travers même certaines recompositions disons “esthétiques”, servant de décor aux réceptions officielles en Grèce. Sans oublier cette ONG à Lesbos qui vient d’exiger à que l’on enlève une Croix d’une plage de l’île, “car elle porte atteinte au sentiment religieux des migrants”, presse grecque du 15 septembre 2018.

Au même moment, la presse grecque comme étrangère, elle découvrent seulement à présent combien et comment le quotidien que vivent les migrants dans le Camp de Mória à Lesbos est alors apocalyptique, tandis que près de deux milliards d’euros très européistes, auraient été répartis d’abord pour engraisser le clientélisme des ONG, et ensuite que celui de SYRIZA, plutôt que de faire face aux besoins plus que primaires des migrants, presse grecque et internationale du moment. .

Petite chapelle. Péloponnèse, septembre 2018
Petite chapelle. Péloponnèse, septembre 2018
Sur un mur ‘Bonne chance’. Athènes, septembre 2018

Finalement, les éditorialistes de la presse très autorisée, s’insurgent finalement de l’idéologie des frontières ouvertes, à l’instar de Tákis Theodorópoulos dans Kathimeriní cette semaine:
“La partie difficile c’est d’assumer la responsabilité des frontières ouvertes. Sinon, les ‘frontières ouvertes’ c’est une notion décousue, une idéologie faisant dans l’euphémisme, sans lien pertinent avec la réalité. Car la responsabilité des ‘frontières ouvertes’ signifie assumer d’abord la responsabilité des personnes qui croisent ces frontières pour se réfugier sur notre territoire. Il faut donc s’en occuper, les nourrir, les loger, leur apporter tous les soins médicaux nécessaires, plus la sécurité, et peut-être même les faire travailler. Surtout si en plus notre État veut être désigné comme démocratique, il doit également protéger ses propres citoyens pour que la cohabitation avec les migrants ne devienne pas contrainte, sachant que les migrants sont des gens qui n’ont pas vécu ni la paix dont ils jouissent ici et ils ne connaissent, ni la démocratie, et encore moins son fonctionnement, tandis que leur perception des droits sont plutôt inexistants.”

“Il est évident que l’Union européenne était non seulement mal préparée à assumer les ‘frontières ouvertes’, mais après tant d’années comme d’expériences, elle n’est même pas en mesure de mener l’une des notions centrales de sa constitution. L’UE montre du doigt et elle condamne Orban, sans tenir compte du fait que des sociétés et pays qui ne sont pas sous le gouvernement Orban, réagissent alors de plus en plus par la négative face aux ‘frontières ouvertes’. Le didactisme du politiquement correct est ainsi et de fait annulé par une réalité politique qui lui tourne de plus en plus le dos.”

“Aux antipodes d’Orban de la Hongrie, se situe alors la politique de notre pays en la matière. L’Europe se montre préoccupée par le nationalisme et le populisme de droite, sauf qu’elle n’est pas en mesure de voir le populisme de gauche. Probablement, parce que ce dernier utilise la rhétorique et les impératifs moraux justement issus du politiquement correct. Ainsi, l’Europe découvre soudainement que les migrants à Mória, pour la plupart, ils vivent dans des conditions bien pires que celles laissées dans leur pays natal. Aujourd’hui, nous venons d’apprendre que quatre cents enfants sont littéralement sans-abri. D’autres enfants sont portés disparus. Ce sont les victimes de la politique des ‘frontières ouvertes’. Tous ceux qui sont empilés de la sorte dans les conteneurs et dans les camps, ne peuvent alors que haïr le pays qui leur a promis l’hospitalité et qui les a dupés. Notons que le corps social à Lesbos a également subi un viol et compte parmi les victimes de la politique des frontières ouvertes.”, quotidien “Kathimeriní” du 22 septembre.

L’éditorialiste de “Kathimeriní” ne dit pas pourtant combien, les migrants et les mondialisateurs à la Troïka, partagent au fond le même mépris pour la démocratie et pour les droits des citoyens, et j’ajouterais, la même perception de la terre, du terrain conquis, dont ils ont été d’abord les victimes chez eux, lorsque leurs pays ont été et le sont toujours, piétinés par les intérêts… des “humanistes” affalés des conclaves mondiaux et mondains. La recette n’est pas nouvelle. On utilise alors les victimes d’ailleurs… pour achever ainsi les victimes d’ici. C’est une forme de guerre totale à la manière de notre siècle ultime. Et c’est exactement cette dimension du problème qui est désormais perçue par le mécano du coin ou par le jeune au café du Péloponnèse… authentique, que l’analyste de la grande presse ne veut surtout pas discerner.

Hommes de la Marine nationale russe. Île de Póros, septembre 2018
Hommes de la Marine nationale russe. Île de Póros, septembre 2018
Hommes de la Marine nationale russe. Île de Póros, septembre 2018

Le bateau de pêche a été détruit dans les… règles. Son propriétaire, ses proches, le mécano, ils ont d’abord évoqué des sujets d’actualité comme si de rien n’était et ce bavardage… bien psychanalytique, a duré près d’une heure. Puis soudainement, une voix a pour ainsi dire a déchiré l’atmosphère: “En route, les gars, on y va.” Aussitôt, les visages se sont crispés car on passait à l’acte, comme pour commettre alors un crime.

Et comme pour l’autre bateau, le temps était venu, celui de son exécution, de sa mise à mort. Derrière lui, une pelleteuse. Coque brisée comme on brise alors les os d’un animal encore vivant. Comme si le bateau avait du souffle et de la voix. Pendant une petite heure, je voyais le bateau perdre sa belle forme, se perçant et se brisant, se lamenter même. Ceux du Péloponnèse cette fois authentique, ils ont été visiblement émus. Un vieux pêcheur s’est rapproché à vélo observant déjà la scène de loin: “Salopards, ils l’on eu. Encore un. La Grèce est morte.

Marins russes. Póros, septembre 2018

Beau pays et cependant coquille de plus en plus vidée. L’endroit a été nettoyé et les débris chargés. Au départ du camion, parmi les participants… à la cérémonie, il y en a qui ont donné rendez-vous à Póros, à l’occasion de l’arrivée très officielle et pour tout dire rarissime d’un navire de la Marine nationale russe. Cette visite de la frégate AMIRAL ESSEN de la classe de l’amiral Grigorovitch, s’inscrit dans le cadre de la commémoration du moment inaugural des relations diplomatiques entre la Grèce contemporaine sous le Gouverneur Ioánnis Kapodístrias, et la Russie. Il y a tout juste 190 ans, ces documents historiques avait été signés dans une demeure justement, de l’île de Póros, très exactement à la date du 17 septembre 1828.

Il faut dire qu’aussitôt sur l’île, les marins russes… ont été très positivement remarqués par la population, et autant on dirait par certains touristes. Après la cérémonie en présence des Russes, le navire a levé l’ancre, depuis, l’avion militaire russe a été abattu en Syrie suite à la… gestion des cieux par les F-16 israéliens, et l’histoire très prochaine ne nous est pas encore connue bien entendu.

Le navire AMIRAL ESSEN à Póros. Septembre 2018
Il y a 190 ans à Póros. Septembre 2018
Il y a 190 à Póros. Septembre 2018
Cérémonie grecque et russe. Póros, septembre 2018

C’est donc dans ce contexte géopolitique et interne tendu, que le gouvernement de la marionnette Aléxis Tsípras, fait semblant de découvrir qu’avec le reste des biens publics, il a également transféré la jouissance des sites archéologiques et des musées à la Treuhand à la grecque, c’est-à-dire, aux mains des rapaces planétaires de l’Agence chargée de la privatisation des biens de la Grèce. Et pendant ce temps, on détruit à la chaîne les bateaux de pêche, de préférence traditionnels. Culture morte.

L’affaire avait été fort heureusement récemment dévoilée par un communiqué de l’Association des Archéologues Grecs, daté du 18 septembre, avant que la nouvelle ne soit reprise à travers la presse du pays. D’après le communiqué, “l’Association des Archéologues Grecs souligne une nouvelle fois que les monuments historiques sont protégés par la Constitution et de ce fait, ils sont toujours de propriété publique et ne peuvent faire l’objet d’aucune transaction. Nous dénonçons ainsi, la tentative de transfert de la gestion de tous les monuments anciens comme plus récents, à la Compagnie de Gestion des Biens de l’État, Société Anonyme (ET.A.D. SA), d’après la décision 2018-0004586, en vertu de la loi. 4389 de 2016, et de la décision gouvernementale 86 du 18.06.2018, Journal Officiel 2320 du 19 juin.”

“Cette décision ahurissante a été repérée à l’occasion de la publication d’une liste des monuments ainsi ‘transférés’, relevant du Service archéologique de Région de la Canée en Crète. Sur cette liste y figurent notamment, une grande partie Est des fortifications vénitiennes, le fossé du mur byzantin, le fossé Sud des fortifications vénitiennes, vestiges qui se sont révélés autant importants car on y a découvert des restes de la période minoenne, les traces du chantier naval vénitien, ainsi que les tours vénitiens Monigo, le bastion Lando, la forteresse Firka et le bain turc. Biens et surfaces déjà expropriés à des fins archéologiques par le Ministère de la culture et parfois monument et qui sont également en cours de restauration. Sur cette liste sont encore inclus, les musées archéologiques (!), dont celui établi au sein de l’église de San Francesco, le nouveau Musée archéologique de la ville, le Musée national d’Elefthérios Venizélos, de même que les Archives historiques de la Crète.”

“C’est alors un processus qui ne trouve pas de précédent dans l’acception de ce qui tient habituellement de la bonne gestion en matière de patrimoine culturel. Ainsi, et à juste titre, cette décision gouvernementale ne peut que susciter les plus vives réactions en cascade au niveau national, comme autant international. L’exclusion des monuments et des sites archéologiques, conformément à l’article 196, paragraphe 4 de la loi. 4389 de 2016, n’est que de la poudre aux yeux, dans la mesure où elle est contredite par le paragraphe suivant. Le paragraphe 5 de ce même article stipule que les propriétés exemptées demeurent pourtant inclus dans le portefeuille de la gestion de la Compagnie de Gestion des Biens de l’État. La possession donc, l’utilisation et la gestion des monuments les plus importants de la Canée n’appartiennent plus au ministère de la Culture, ni à ses Services régionaux, en violation de l’esprit de l’article 24 de la Constitution de la Grèce.”

L’Acropole. Athènes, septembre 2018
Travaux. Immeuble classé. Athènes, septembre 2018
Bar datant des années 1930. Athènes, septembre 2018

“Les monuments et les antiquités sont des objets et des réalités qui doivent rester hors toute transaction ou opération de transfert, et ceci de façon comme on dit inaliénable. Toute tentative de transfert à des tiers de leur gestion nous trouve ainsi opposés. Ceci est une position ferme de notre Association, et nous allons nous battre par tous les moyens légaux afin de maintenir le caractère d’antiquités comme étant un bien social public. L’Association des Archéologues Grecs ne permettra pas l’utilisation des sites archéologiques et des monuments comme une sorte de gage, lié à la dette et ceci même pour une durée d’un siècle, au demeurant, aux résultats largement inconnus en fin de compte.”

“Cette action inacceptable, même si elle se produit en temps de paix, elle ne peut être comparée qu’aux vandalismes des monuments et le pillage des antiquités durant les années pétrifiées de l’Occupation allemande, ou au moment où les antiquités était largement pillées au 19ème siècle. Il s’agit enfin de la phase ultime dans l’aberration politique actuelle, étant donné qu’au même temps, nous nous attendions plutôt à une action coordonnée pour le retour des antiquités volées, et pour une compensation légitime liée à leur destruction en temps de guerre. Pour ces raisons importantes, l’Association des Archéologues Grecs, appelle les dirigeants politiques du ministère de la Culture et le gouvernement à annuler immédiatement le transfert de la propriété et la gestion des monuments de La Canée et des autres régions du pays inclus dans cette liste des 10 119 biens à transférer à la Compagnie de Gestion des Biens de l’État (…).”,communiqué de l’Association des Archéologues Grecs sur leur site Internet.

L’entrée du port du Pirée. Septembre 2018
Réception. Péloponnèse, septembre 2018
Roue volée. Póros, septembre 2018

“C’est le site de l’Acropole même qui est menacé par un tel processus”, fustige alors Míkis Theodorákis dans une déclaration communiquée à la presse grecque. Le “gouvernement” dément dans un premier temps, et finalement du bout des lèvres, la nouvelle Ministre de la Culture, la PASÓKienne Myrsíni Zorbá, admet que “c’est dommage que de ne pas délier les monuments de la liste (…) je suppose que Madame Koniórdou qui occupait ce poste il y a peu, avait trouvé une formule adéquate en concertation avec le Ministère des Finances lors de la constitution de cette liste des biens transmis en 2016, cela-dit, je l’ignore”, presse grecque du 21 septembre 2018.

Pendant ce temps, on vole désormais les roues des motos, même sur l’île de Póros, tandis qu’à deux pas des lieux du martyre du caïque brisé, les élus très locaux organisent réception sur réception pour accueillir les potentiels “investisseurs” forcement étrangers qui convoitent hôtels et autres bâtiments désormais relevant ou presque, de la gestion de la fameuse Compagnie de Gestion des Biens de l’État.

D’ailleurs, sur cette fameuse liste longue aux 10.119 biens, figurent d’après les Archéologues, la Tour Blanche de Thessalonique, le monument de la Rotonde, ainsi que l’Église de la Sainte Sophie, presse grecque de la semaine. D’autres sources font état d’une situation dangereuse et analogue pour ce qui est des Îles Ioniennes. Sur l’île de Céphalonie par exemple, ce serait le périmètre du monument dédié à la mémoire des Italiens de la division ACQUI, massacrés comme on sait par les troupes allemandes en septembre 1943, qui passerait sous contrôle… de la Treuhand à la grecque. Retour… de l’histoire ? Je pense alors autant, aux émouvants messages que des Italiens ont laissés sur les murs de l’ancienne prison située au deuxième sous-sol de l’immeuble pour un temps historique que la Gestapo avait transformé en prison entre 1943 et 1944. Serait-il peut-être à vendre ?

Message italien de 1944. Athènes, septembre 2018
Drapeau national. Message de la Résistance grecque de 1944. Athènes, septembre 2018
Navette italienne. Le Pirée, septembre 2018
Baigneurs. Le Pirée, septembre 2018

Bonne année pour le tourisme d’après les médias. Au Pirée, on se baigne entre les fortifications antiques et les évidences du temps présent, signe aussi des temps. Parfois, on y distingue même certaines navettes italiennes qui croisent près des côtes, vraisemblablement en direction du Canal de Corinthe.

La semaine dernière, le journaliste Yórgos Trángas, ami des Ambassades des États-Unis et du Royaume Uni, d’après ses propres affirmations, a-t-il publiquement et fermement souhaité… “l’essor du tourisme en Grèce, c’est-à-dire, d’arriver à plus de 60 millions de visiteurs par an, au lieu de presque 30 millions actuellement”, Radio 90.1 FM, zone matinale. Autrement-dit, le cauchemar, la gestion du patrimoine et les bateaux de pêche en moins si le crime actuel alors se perpétue entre SYRIZA et les marionnettes d’en face, chez les Mitsotákis.

Beau pays marin, derrière sa vitrine.

Beau pays marin, derrière sa vitrine. Athènes, septembre 2018
* Photo de couverture: Nos plaisanciers visiteurs. Île de Póros, septembre 2018

Monuments historiques et musées transférés au Fonds de privatisation de la Grèce

Les archéologues et les gardes des sites sont en colère après que le ministère grec des Finances eut rendu une décision ordonnant  le transfert de plusieurs sites historiques,  musées, monuments et bâtiments historiques au Fonds de super privatisation.

Ils appartiennent de facto à l’Etat et ne peuvent être vendus, a déclaré l’Association des archéologues grecs dans un communiqué intitulé « Non à la vente des monuments du pays » publié mercredi.

Selon les archéologues, 10 119 sites archéologiques, musées et bâtiments historiques ont été transférés au Fonds de privatisation, dont beaucoup proviennent de la région de La Canée et de la Crète.

«Les monuments sont protégés par la Constitution, ils ne peuvent être ni transférés ni vendus», a déclaré l’Association, ajoutant que ce transfert sans précédent connu lorsque le catalogue des monuments de La Canée et des environs est devenu public.

Parmi les monuments et musées de La Canée figurent le nouveau musée archéologique, le musée archéologique situé dans l’église Saint-François, le musée national Eleftherios Venizelos, les archives historiques de Crète, plusieurs douves vénitiennes et byzantines, des fortifications et des bastions ainsi que des propriétés importantes. Des vestiges architecturaux minoen ont été découverts.

«L’Acropole est-elle le prochain?», a déclaré jeudi l’Association des gardes sur les sites archéologiques, également en colère, dans une déclaration  ajoutant que des terrains avaient également été transférés.

La menace de grèves.

«Notre réponse sera très dure. Notre patrimoine culturel appartient à tous les Grecs, aucun gouvernement n’a le droit de négocier à ce sujet ou de transférer la propriété », ont-ils déclaré dans leur déclaration.

Comment cela peut-il arriver?

Le comité chargé de transférer les biens de l’État au Fonds de privatisation est libre d’agir à sa guise.

Apparemment, le ministère des Finances n’a pas pris les mesures nécessaires à temps pour exempter tous ces sites, musées et monuments.

Négligence? Volontairement ? Dans l’espoir que le transfert illégal ne sera pas expulsé?

Le fait est que le transfert a lieu avec la décision ministérielle.

Dans un communiqué publié jeudi, le ministère des Finances a déclaré que «le décret ministériel sur le transfert ne signifie pas que le transfert est automatique car les contrôles doivent être effectués en premier».

Dans le même temps, il est expliqué qu’ont été exemptés du transfert des rivages maritimes, des plages, des zones sous protection naturelle, des sites archéologiques et des zones de forêts pures, des places, des rues, des ports * et une liste d’autres biens de l’État ayant peu à voir avec le problème.

Le ministère des Finances a indiqué entre autres que le transfert de biens publics au Fonds de privatisation était l’une des conditions préalables des créanciers à la conclusion de la 4ème revue du programme grec.

Je me souviens que le ministre des Finances, Euclid Tsakalotos, avait émis un ordre de transfert de biens appartenant à l’Organisation nationale du tourisme. La décision de juin 2016 avait également ordonné le transfert en vue de la privatisation du tombeau de l’éminent politicien Eleftherios Venizelos .

Pendant ce temps, les médias à La Canée exhortent les autorités locales à demander des explications au gouvernement central et à prendre des mesures.

Vendredi matin, le ministre de la Culture, Myrsini Zorba, a admis le trasnfert et a blâmé celle qui l’a précédé, Lydia Koniordou, pour une éventuelle négligence.

« C’était une erreur de ne pas exclure les monuments en 2016, je suppose que Mme Koniordou avait fait des arrangements avec le ministère des Finances, mais je ne sais pas », a déclaré Zorba aux médias.

« C’est la loi de 2016 qui a donné aux fonds de privatisation toutes les propriétés de l’État à l’exception des sites archéologiques déclarés, des régions Ramsar, etc. Je n’ai aucune raison de remettre en cause l’ordre juridique du ministère des Finances », a ajouté Zorba.

La veille, le ministre de la Culture a tenté de réprimander les archéologues, mais il a finalement dû reconnaître l’amère vérité.

sources: plusieurs médias

* La Grèce a été forcée par les prêteurs à privatiser ses plus grands ports du Pirée et de Thessalonique.

Dix ans après la crise, les financiers se portent toujours bien, les autres beaucoup moins

 15 septembre par CADTM Belgique

Action du collectif ByebyeTina du 15 septembre 2018 devant la Bourse de Bruxelles – Photo Collectif Krasnyi

Il y a dix ans, le 15 septembre 2008, Lehman Brothers s’effondrait. Cette faillite retentissante marquait le déclenchement d’une crise financière et économique aux contours encore obscures et dont la sortie semble encore fort éloignée. Par la suite, d’autres faillites se sont succédé, des faillites gérées par la plupart par des États selon le fameux principe de socialisation des pertes, un mantra toujours d’actualité. Sans réelles poursuites des responsables, sans réelles conditions pour la suite. Dix ans après, les dettes globales, privées et publiques, sont plus élevées qu’en 2008 et ne sont pas moins risquées malgré les annonces optimistes des « responsables » politiques. Les populations se saignent aux quatre veines, à coup d’augmentations d’impôts et de coupes budgétaires dans des services publics pourtant essentiels, pour rembourser des dettes responsables de l’austérité qu’on leur impose.

Un monde vulnérable aux secousses financières

Les causes structurelles de la débâcle de 2008 sont toujours présentes. Rien n’a été accompli pour réglementer sérieusement les activités spéculatives, l’utilisation des dérivés ou même pour limiter l’effet de levier pratiqué par les banques (celles-ci ont très peu de fonds propres par rapport à tous les crédits qu’elles octroient). Aucune démarche non plus pour protéger nos dépôts des activités de trading à haute fréquence, pour assainir profondément le bilan des banques ou pour en diminuer radicalement la taille.

Tout le monde ne pâtit pas de la crise de la même façon. En 2015, on découvre ainsi que le FMI fait 2,5 milliards d’euros de profits sur ses prêts à la Grèce depuis 2010 [1]. Plus récemment, on apprend que la BCE, via son programme d’assouplissement quantitatif (en anglais QE – quantitative easing), a réalisé 7,8 milliards d’euros de bénéfices grâce aux titres grecs [2]. Rappelons que cette politique d’assouplissement quantitatif a permis aux grandes banques européennes de se débarrasser des bonds d’États en difficulté sans tenir compte de leurs pratiques spéculatives. Hormis quelques rares banquiers jugés au pénal en Islande, les cadres supérieurs du système financier, celui même qui a engendré cette crise financière transformée en une grave crise sociale dans toute l’Europe, sont restés impunis (les deux tiers des cadres de Lehman se sont d’ailleurs recyclés dans d’autres grandes banques).

Par ailleurs, la diminution des taux d’intérêt dans les économies dites « avancées », provoquée par l’injection massive d’argent de la part des banques centrales des pays riches, a poussé les investisseurs à prêter massivement aux pays du Sud. Environ 12 000 milliards de dollars ont été injectés dans le système financier depuis l’effondrement de Lehman Brothers [3].

Ces flux financiers ont provoqué une augmentation de la dette externe de ces pays libellée en dollars, une dépendance économique accrue vis-à-vis des créanciers occidentaux avec, in fine, le risque d’une nouvelle crise de la dette dans les pays appauvris.

L’augmentation des taux d’intérêt déjà à l’œuvre aux États-Unis détourne aujourd’hui l’attention des investisseurs des économies du Sud à vers les économies du Nord et en particulier vers les États-Unis. Le danger pour les pays du Sud deviendra plus important encore avec l’arrêt du programme du QE de la BCE et de la FED prévu depuis longtemps mais repoussé plusieurs fois vu les risques qu’il fait peser de tous les côtés. Leurs dettes en devises fortes, déjà difficilement soutenables, deviendront insurmontables. Sans doute le FMI, l’éternel pompier pyromane, viendra t-il à la rescousse tel un prêteur en dernier ressort ?

Le recours à l’endettement est devenu la règle plutôt que l’exception

La dette globale sans tenir compte de la dette des entreprises financières (principalement du secteur bancaire) est passé de 97 000 milliards au début de la crise en 2007 à 169 000 milliards de dollars au milieu de l’année 2017, soit une augmentation de 74 % [4]. Les entreprises privées non financières ont poursuivi le recours à l’emprunt de manière intensive et leur dette est passée de 37 000 milliards de dollars à 65 000 milliards de dollars mi 2017. Cette augmentation faramineuse est en grande partie due aux entreprises chinoises, désormais parmi les acteurs les plus importants du panorama global, dont la dette a augmenté de 15 000 milliards de dollars depuis 2007. En pourcentage du PIB, celle-ci est passée de 97 % à 163 % du PIB chinois en 2017, l’un des ratios les plus élevés au monde.

Aux États-Unis, la dette des étudiant-e-s a plus que doublé durant ces dix années de crise : de 600 milliards de dollars il y a dix ans, elle dépasse dorénavant les 1 500 milliards de dollars début 2018. La financiarisation de l’accès aux études représente une bulle spéculative susceptible d’exploser.

Les droits sociaux dépouillés par l’austérité

Alors que les banques et assurances ont été en grande partie recapitalisées par les États, les populations, elles, n’en ont pas fini de payer. Mais pourquoi les peuples devraient se priver de leurs droits fondamentaux pour des faillites privées dont la responsabilité incombe à leurs dirigeants et aux agences en charge de leur contrôle ? Pourquoi les laisserait-on répéter encore les mêmes erreurs ?

Alors que les grandes plus entreprises payent de moins en moins d’impôts, une diminution importante des services publics et une casse de la sécurité sociale ont contribué à l’émergence d’une crise sociale réelle. En Grèce, une récente étude universitaire a démontré les liens évidents entre mesures d’austérité et accroissement spectaculaire du taux de mortalité dans le pays, un taux dont la croissance a dépassé de cinq fois celle de la moyenne européenne durant la même période. [5] De plus, les États européens dans l’application des mesures d’austérité, n’hésitent à diminuer l’accès aux soins, à réduire le plafond du salaire minimum, à démanteler les droits des travailleurs, les allocations sociales, etc. alors que le taux de chômage ne finit pas d’augmenter. De plus, l’âge de la retraite a été retardé et le montant des pensions largement réduit, alors que dans certains pays ces revenus représentent la seule chance de survie de milliers de ménages.

Dettes liées à l’hypothèque

Le droit au logement est plus que jamais menacé par cette crise. L’insolvabilité des ménages (dont les moyens ont été diminués et les frais augmentés) a eu des conséquences sur le droit fondamental que constitue l’accès au logement. Les milliers de ménages qui ne pouvaient pas rembourser leurs prêts, se sont retrouvés attaqués par les banques à coups de ventes aux enchères ou d’expulsions. En Espagne, on estime à 800 000 les familles qui ont perdu leur logement pour cause d’insolvabilité alors qu’au même moment, le gouvernement grec s’est engagé face à ses créanciers à vendre aux enchères 135 000 logements d’ici 2021.

Une décennie d’approfondissement des inégalités
Les entreprises privées contribuent de moins en moins à renflouer l’État via l’impôt sur les sociétés qui leur est attribué. En effet, quand les capitaux ne s’évadent pas dans les paradis fiscaux, ils sont, en toute légalité, de moins en moins taxés. Cette baisse de contribution des entreprises équivaut à un manque à gagner pour l’État qui à son tour est obligé de s’endetter. Un rapport publié mercredi 5 septembre par l’OCDE, nous apprend que « le taux moyen de l’impôt sur les sociétés dans la zone OCDE a reculé de 32,5 % en 2000 à 23,9 % en 2018 ». Parmi les dernières mesures en date, les États-Unis ont approuvé l’année dernière une forte chute du taux d’imposition des entreprises qui est passé de 35 à 21 % et la France prévoit d’abaisser progressivement l’impôt sur les sociétés de 33 à 25 % pendant le quinquennat d’Emmanuel Macron.
Action du collectif ByebyeTina du 15 septembre 2018 devant la Bourse de Bruxelles – Photo Collectif Krasnyi

Moins ponctionnées, ces sociétés engrangent des profits faramineux. Au niveau mondial, les dividendes qu’elles versent à leurs actionnaires ont atteint le niveau record de 244,7 milliards de dollars au premier trimestre 2018. Oxfam nous rappelle que ce vol organisé se déroule dans un monde toujours plus injuste où seules 62 personnes possèdent autant que la moitié de la population mondiale.

Face à ce délabrement persistant de la finance dérégulée, à l’heure où se profile une nouvelle crise financière, nous continuons de nous mobiliser. Nous soutenons le mouvement « Byebyetina » à Bruxelles et à Liège ainsi que la mobilisation européenne pour fêter à sa manière les 10 ans de la crise : actions de rue, manifestations, conférences, débats pour notre avenir à tous et toutes. Seule la conscientisation de la population peut la mobiliser face aux injustices.

Cet article a été publié (dans sa version courte) pour la première fois sur Politis

Notes

[4Données extraites de l’étude Rising Corporate debt, Peril or promise ?, McKinsey Global Institute, juin 2018.

Source http://www.cadtm.org/10-ans-apres-l-eclatement-de-la-crise-les-financiers-se-portent-bien-les

Bien vivre au travail : une utopie

Le collectif Grèce-austérité vous signale cette conférence.

Au fil des années, la souffrance au travail apparaît au grand jour : augmentation des cadences, insatisfaction des travailleurs dans l’application de leurs tâches à cause des conditions de travail, comme c’est le cas des infirmières.
Par ailleurs, le travail est de plus en plus atomisé : il est de plus en plus individualisé, autonomisé. Les entreprises ont de plus en plus recours à la sous-traitance et aux auto-entrepreneurs.

Que faire ? Ne faut-il pas chercher à organiser autrement le travail afin de donner un sens à celui-ci et un rôle à chacun des acteurs ? Ne faut-il pas lutter contre la hiérarchie ? Ne faut-il pas développer d’autres structures de travail que l’entreprise privée, comme les coopératives ?

Pour discuter de ces questions, Ensemble-Isère
vous invite à une conférence-débat
mardi 25 septembre à 19h30
à la Maison des Associations de Grenoble

Suite à des témoignages, Benoît Borrits auteur de « Au-delà de la propriété, Pour une économie des communs » décrira une économie basée sur le principe du Commun pour en déterminer les incidences sur le contenu même du travail

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