Plus Jamais ça : 34 mesures pour un plan de sortie de crise

Mardi 26 mai, 20 organisations associatives et syndicales publient un plan de sortie de crise décliné en 4 thèmes, 34 propositions.

La crise qui a éclaté en ce début d’année 2020 montre une fois de plus la nécessité de changer de système. C’est pourquoi nos organisations ont constitué un front élargi et inédit pour initier une tribune, puis une pétition et un appel aux mobilisations du 1er mai. Nous pensons que le moment est venu de préciser les contours du « Plus jamais ça » dans ce Plan de sortie de crise.

Les 4 thèmes :

1. Les conditions pour un déconfinement assurant la sécurité sanitaire, la démocratie et les droits fondamentaux

2. Répondre à la crise sociale, ici et ailleurs

3. L’« Argent magique » existe : il suffit d’aller le chercher au bon endroit

4. Pour une reconversion écologique et sociale des activités

Lire le plan  Plan de sortie de crise

Reportage dans le camp de Moria

« Nous n’avons pas d’électricité et tout le monde est malade » : auprès des femmes réfugiées dans le camp de Moria

par Victorine Alisse

Depuis le début de la crise sanitaire mondiale, les ONG appellent les pouvoirs publics grecs, européens et des autres pays du continent à évacuer les immenses camps de réfugiés des îles grecques de la mer Égée. Dans le camp de Moria, 20 000 personnes vivent dans des conditions sommaires. Parmi elles, de nombreuses femmes. Reportage en images.

L’épidémie les a encore plus invisibilisé.es. En mer Méditerranée et dans les camps de réfugiés de Grèce, des milliers de personnes sont toujours en transit. Quelques 20 000 femmes, enfants, hommes, demeurent coincé.es dans des camps, tel celui de Moria, sur l’île de Lesbos. Les conditions d’existence y sont sommaires, sous des tentes, avec un accès restreint à l’eau, et encore plus difficile aux soins.

Depuis le début de la pandémie en Europe, des ONG appellent, encore et toujours, les autorités européennes et les États à évacuer les camps et ouvrir leurs frontières à ces réfugiés. Presque en vain. Certes, l’Allemagne s’est engagée à en accueillir quelques centaines mais, pour l’instant, seule une cinquantaine d’enfants et adolescents non accompagnés sont arrivés en avril en Allemagne. Le Luxembourg a de son côté accueilli une poignée d’enfants, et la Grèce a évacué début mai plusieurs centaines de personnes de l’île de Lesbos vers le continent [1]. Le 10 mai, des organisations de réfugiés du camp de Moria adressaient une lettre d’appel à l’aide aux autorités européennes, pour une évacuation a minima des personnes les plus vulnérables [2]. « Nous n’avons toujours de l’eau que trois heures par jour », racontent-elles.

En mer, plus aucun navire humanitaire ne navigue au large de la Libye. Les deux derniers qui effectuaient encore des opérations de sauvetage en pleine pandémie ont été saisis début mai par la justice italienne [3]. En avril, les personnes secourues par ces navires avaient déjà peiné à trouver un port pour débarquer.

La photographe Victorine Alisse était au camp de Moria juste avant la pandémie, en février. Voici son reportage.

https://www.bastamag.net/femmes-Moria-Lesbos-Grece-camps-refugies-migrations-reportage

 

Entreprises grecques en difficultés

Six entreprises grecques sur dix en crise de liquidité après le confinement de leurs activités
Par Tasos Kokkinidis –

Six entreprises sur dix sont confrontées à des problèmes de liquidité, avec des réserves de trésorerie suffisantes pour continuer à fonctionner pendant moins de six mois – tandis que trois sur dix n’ont aucune réserve de trésorerie et seulement 15 % de liquidités suffisantes pour durer plus d’un an, selon une nouvelle enquête.

L’enquête, menée par l’organisation Endeavor Greece du 25 au 27 mai, a interrogé 100 entrepreneurs de petites et moyennes entreprises grecques ayant des taux de croissance élevés en 2019, issus de 15 secteurs industriels différents.

Selon les résultats, la moitié des entreprises avaient cessé tout ou partie de leur activité commerciale au cours des deux derniers mois et 57 % des entreprises ont vu leur chiffre d’affaires annuel diminuer, 17 % d’entre elles faisant état d’une baisse de 60 à 100 %. Toutefois, 24 % des participants ont enregistré une croissance au cours de la même période.

Plus de la moitié des entreprises ont mis une partie ou la totalité de leur personnel en congé. Jusqu’à présent, seulement 10 % des entreprises ont licencié des employés, mais ce pourcentage devrait augmenter de manière significative, puisque 30 % des entrepreneurs ont déclaré qu’ils seront obligés de réduire les salaires et de licencier du personnel d’environ 20 % d’ici la fin de l’année.

En ce qui concerne les mesures de soutien que les entreprises grecques ont choisi d’utiliser pour faire face à la crise, 51 % d’entre elles ont déclaré qu’elles ont licencié une partie importante de leur personnel, tandis que 35 % ont profité de la réduction de 40 % sur le loyer de leurs locaux commerciaux.

Par ailleurs, 46 % des entreprises interrogées ont suspendu le paiement de leurs impôts, tandis que 55 % ont pris des mesures pour accroître leur financement. Cependant, vingt pour cent des entreprises n’ont pas eu recours à la moindre mesure de soutien.

La pandémie a également redéfini de manière significative les scénarios utilisés par les entreprises pour déterminer et mettre en œuvre leur planification stratégique. Plus précisément, 53 % des entreprises fonctionnent selon un scénario qui prévoit que la récession se poursuivra jusqu’à la fin de 2020, 10 % jusqu’à la fin de 2021 et 3 % jusqu’à la fin de 2022.

Cependant, 34 % des entreprises fonctionnent selon un scénario qui prévoit que la croissance permettra à l’économie de se redresser dès l’été 2020.

En ce qui concerne le temps qu’il faudra à leur industrie pour regagner ce qu’elle a perdu, 27 % des chefs d’entreprise pensent qu’elle sera au niveau de 2019 d’ici la fin de 2020, 46 % estiment que cela se produira en 2021, tandis que 17 % ne prévoient pas un retour à la normale avant 2022.

Source : AMNA

Grèce : Expulsion de 9000 réfugiés

Le HCR critique la Grèce pour l’expulsion de 9 000 réfugiés reconnus

Ci-dessous la déclaration du porte-parole du HCR Andrej Mahecic lors de la conférence de presse au Palais des Nations à Genève le 2 juin.

Le HCR, l’Agence des Nations Unies pour les réfugiés, est profondément préoccupé par la sortie, organisée par le gouvernement, de quelque 9 000 réfugiés reconnus du système d’accueil de la Grèce, qui a débuté hier (1er juin). Dans les mois à venir, 11 000 autres réfugiés devront passer de l’assistance aux demandeurs d’asile à l’aide sociale générale, une fois qu’ils auront été reconnus comme réfugiés par les autorités grecques en matière d’asile.

Une nouvelle loi adoptée en mars 2020 réduit de six mois à 30 jours le délai de grâce accordé aux réfugiés reconnus pour passer d’un logement organisé et d’un soutien de base à une vie indépendante.

L’objectif de mettre davantage de ressources et d’espace à la disposition des demandeurs d’asile est bien compris, le système d’accueil grec est confronté à une pénurie de places. Les réfugiés reconnus doivent libérer les logements dont les demandeurs d’asile ont grand besoin et qui attendent dans les centres d’accueil surpeuplés des îles grecques de la mer Égée. Plus de 31 000 femmes, hommes et enfants vivent dans cinq centres d’accueil insulaires pouvant accueillir moins de 6 000 personnes.

Cependant, le HCR a continuellement exprimé son inquiétude quant au fait que l’assistance à de nombreux réfugiés reconnus se termine prématurément, avant qu’ils n’aient un accès effectif à l’emploi et aux programmes de protection sociale, prévus par la loi grecque. Le HCR a également exhorté la Grèce à augmenter la capacité d’accueil nationale dans les sites, les appartements, les hôtels et par le versement d’argent pour le logement.

Le fait de forcer les gens à quitter leur logement sans filet de sécurité et sans mesures pour assurer leur autonomie peut pousser beaucoup d’entre eux à la pauvreté et au sans-abrisme. La plupart des réfugiés concernés n’ont pas de revenus réguliers, beaucoup sont des familles avec des enfants d’âge scolaire, des parents célibataires, des survivants de violences et d’autres ayant des besoins spécifiques. La pandémie COVID-19 en cours et les mesures visant à réduire sa propagation créent des défis supplémentaires en limitant la capacité des personnes à se déplacer et à trouver un travail ou un logement.

Déplacer un problème des îles vers le continent n’est pas une solution. Le HCR a exhorté les autorités à appliquer une approche graduelle, un seuil plus élevé pour étendre l’assistance aux personnes vulnérables qui ne peuvent pas partir à ce stade.

L’intégration des réfugiés est un processus qui exige des efforts sincères de la part des réfugiés pour devenir autonomes et rendre à la société qui les accueille. Dans le même temps, l’accès effectif aux programmes nationaux et aux programmes d’intégration qui proposent des cours de langue, une formation professionnelle et l’accès à un emploi rémunéré est essentiel.

Les réfugiés peuvent bénéficier de plusieurs programmes nationaux offrant un revenu minimum garanti, une aide au logement et d’autres prestations aux plus vulnérables. Dans la pratique, cependant, les réfugiés se heurtent à des obstacles dans l’accès à l’aide. Le HCR a proposé des mesures concrètes aux autorités grecques et travaille avec le gouvernement pour promouvoir leur inclusion effective.

Parmi ceux qui doivent quitter leur logement, on compte actuellement 4 000 réfugiés qui séjournent dans le programme d’hébergement ESTIA géré par le HCR et financé par la Commission européenne. Les règles et l’éligibilité du programme sont déterminées par le gouvernement grec. Le HCR gère le programme ESTIA dans toute la Grèce en partenariat avec les municipalités et les ONG, et des efforts conjoints importants ont été déployés pour favoriser l’inclusion et donner aux réfugiés les moyens de participer à la vie sociale de leurs communautés d’accueil. L’ESTIA fournit un logement sûr et digne dans des appartements à 22 700 demandeurs d’asile et réfugiés vulnérables.

Le HCR accueille HELIOS, un programme d’intégration, financé par la Commission européenne et mis en œuvre par l’Organisation internationale pour les migrations, l’OIM, en coordination avec les autorités grecques. HELIOS peut combler des lacunes cruciales, mais une certaine flexibilité est nécessaire pour couvrir un grand nombre de réfugiés qui quittent maintenant leur logement.

Nous sommes prêts à continuer à aider la Grèce à trouver des solutions et à faire face à cette situation complexe et à veiller à ce que les réfugiés reconnus bénéficient d’un soutien adéquat dans leur transition en cours vers l’autonomie, l’ONU

Source https://www.keeptalkinggreece.com/2020/06/02/unhcr-greece-refugees-eviction/

Finance internationale et UE autoritaire

Comment la finance internationale et l’Allemagne ont détruit la Grèce pour créer une UE totalitaire par Dimitris Konstantakopoulos ( Journaliste, expert en géopolitique (Grèce)

Note : les données de l’article suivant prennent en compte l’état de l’économie et de la société grecque avant la récente crise du coronaire. Selon le FMI, la Grèce souffrira d’une plus grande dépression que tous les autres membres de l’UE en raison de la pandémie, mais rien n’est certain pour le moment. En tout cas, les résultats économiques et sociaux de la crise rendront les choses en Grèce bien pires que celles déjà décrites dans notre article.

En mai 2010, l’UE, la BCE, le FMI et le gouvernement grec ont signé un accord de prêt décrivant un « programme de sauvetage » sans précédent pour la Grèce. L’objectif déclaré de ce programme était de « sauver » la Grèce de la faillite et de l' »aider » à redresser son économie et ses finances publiques tout en remboursant ses prêts, principalement auprès des banques européennes.

La « question grecque » est de loin le principal sujet débattu par les dirigeants européens depuis près de dix ans. L' »expérience » grecque était censée non seulement « résoudre » les problèmes grecs, mais aussi créer un nouveau « paradigme » pour l’ensemble de la zone euro. Le 10 mai 2010, jour de la création du programme, Angela Merkel elle-même a expliqué publiquement que d’autres pays européens verront ce qui arrivera aux Grecs et qu’ils seront plus prudents à l’avenir.

L’importance européenne et internationale du programme grec dépasse de loin l’importance de l’économie grecque elle-même. Punir la Grèce et l’obliger à rembourser toute la dette exorbitante qu’elle avait contractée devait être un exemple d’une importance historique pour la solution de la question de la dette en satisfaisant toutes les demandes des banquiers et en sauvegardant le pouvoir de la finance internationale, un pouvoir qui a déjà dépassé celui des États et qui transforme l’UE elle-même.

D’une certaine manière, la guerre économique et politique lancée contre la Grèce (et dans une moindre mesure contre les soi-disant PIIGS) par les élites financières et politiques occidentales a servi d’introduction à l’immense lutte entre les peuples européens et la Finance, qui décidera du sort de notre civilisation, en quelque sorte de la même manière que la guerre civile espagnole (1936-39) a été l’ouverture de la Seconde Guerre mondiale en Europe.

On n’a jamais demandé aux Grecs eux-mêmes s’ils voulaient ce programme. Le gouvernement Papandreou l’a accepté malgré le fait qu’il ait été élu sur un programme complètement différent. Georges Papandréou lui-même s’est donné beaucoup de mal dans une interview préalable à son élection pour exclure toute probabilité d’impliquer le FMI dans les affaires grecques. La seule fois où l’on a demandé aux Grecs s’ils voulaient ce programme, c’était lors du référendum de 2015 et leur réponse a été un non sans équivoque. La plupart des juristes estiment que l’imposition de ce programme à la Grèce est contraire à la constitution et à la législation grecques, aux traités régissant le fonctionnement de l’UE, aux dispositions fondamentales du droit international et aussi aux statuts du FMI lui-même.

En raison du traitement sévère réservé au peuple grec, le prestige et le capital politique de l’UE et de l’Allemagne ont fortement diminué et les tendances centrifuges ont fortement augmenté dans toute l’Union européenne. Le référendum grec et le refus des gouvernements et des autorités européennes de le respecter ont beaucoup contribué au vote de Brexit et à la montée des partis radicaux de gauche et encore plus d’extrême droite dans toute l’Europe.

Au cours de l’été 2018, les autorités européennes et le gouvernement grec ont annoncé que le « programme de sauvetage de la Grèce » avait pris fin. Bien sûr, ce n’était rien d’autre qu’un mensonge de plus dans la lignée des énormes mensonges de l’Allemagne et des autorités européennes tout au long de la décennie de la crise grecque. Ce qui a vraiment pris fin en 2018, c’est l’obligation des « créanciers » de financer le remboursement des emprunts. Les termes clairement néocoloniaux des accords de prêt sont valables et certains resteront même valables pendant 99 ans ( !!!), période pendant laquelle la Grèce ne sera pas un pays souverain, mais plutôt une sorte de colonie de la dette. Ce que nous ne savons pas, c’est s’il y aura des Grecs en Grèce et, s’ils existent, à quel moment dans les 60 ou 100 prochaines années ils partiront.

À l’occasion des dix ans qui se sont écoulés depuis la signature du premier accord de prêt avec la Grèce, nous allons essayer de décrire ici pour nos lecteurs les principaux résultats de ce programme qui a façonné l’orientation de l’UE et qui aura une énorme influence sur la politique européenne pour les années ou décennies à venir.

Le programme grec n’a pas pris fin, pas plus que la crise grecque. Il s’agissait d’une énorme tromperie et d’un autre gros mensonge de la part des dirigeants occidentaux

L’Eurogroupe (les ministres des finances de l’UE) a décidé de ne plus financer le programme de sauvetage de la Grèce. Puis, ils ont commencé à affirmer que le programme et la crise grecque étaient tous deux terminés.

    Rien n’est plus éloigné de la vérité. En fait, les annonces des politiciens européens et grecs concernant la fin du programme de sauvetage ou de la crise grecque ne nous présentent rien de plus qu’un gigantesque village Potemkine, reflétant à la fois l’énorme impasse de l’UE et les fantastiques progrès du totalitarisme du monde occidental. Les hommes politiques sont plus ou moins nommés par des banquiers (par exemple, Emmanuel Macron de Rothschild), ces mêmes banquiers contrôlent la presse et les « intellectuels publics » et, en conséquence de tout cela, les hommes politiques peuvent revendiquer les choses les plus stupides et les faits les plus infondés sans courir le risque de paraître ridicules.

Le programme restera en place et tout le monde se demande si la Grèce sera en mesure de se financer sur les marchés en 2021, comme le suggèrent les prévisions de l’Eurogroupe.

Jusqu’à présent, toutes les prévisions économiques de l’UE concernant la Grèce, sans exception, ont échoué lamentablement. Cela signifie que soit les économistes et les autorités européennes sont totalement incompétents, soit, au contraire, ils connaissent très bien les conséquences destructrices de leur programme pour la Grèce et les cachent derrière des « calculs » et des « prévisions » erronés, qui leur permettent de dire a posteriori qu’ils ont commis des erreurs, et non des crimes.

Les obligations de la Grèce dans le cadre du programme de renflouement resteront valables au moins jusqu’en 2060 ( !!!), malgré la « fin du programme » supposée et rendue publique. La dette souveraine grecque reste « extrêmement non viable » selon le FMI. En réalité, ce que l’Eurogroupe a fait, c’est reporter une fois de plus la décision finale sur la Grèce et l’exécution probable de sa « condamnation à mort », tout en maintenant le pays bien à l’intérieur d’une « spirale de la mort » de la dette, comme l’a dit un jour George Soros.

La Grèce a dû accepter des excédents budgétaires primaires totalement irréalistes, jamais réalisés dans aucun pays, de 3,5 % jusqu’en 2022 et de 2,2 % en moyenne de 2022 à 2060 (ces chiffres sont actuellement révisés en raison du coronavirus, mais ils sont toujours indicatifs de la direction à suivre. D’ailleurs, même si Merkel permettra un certain assouplissement de l’austérité pendant un ou deux ans, le montant même de la dette grecque permettra de revenir très rapidement à la normale).

Outre le fait qu’ils sont totalement irréalistes, ces chiffres signifient une austérité perpétuelle et une quasi-stagnation du pays pendant 40 ans. Leur caractère totalement irréaliste est également apparu à cause du coronavirus. Il devient difficile de faire des prédictions pour six mois, comment peut-on faire des prédictions pour les 40 prochaines années ? C’est une aberration ridicule que d’élaborer un programme basé sur l’hypothèse de décennies de stabilité totale pour la Grèce, l’Europe et l’économie mondiale (ou, encore, c’est une façon de cacher un crime prémédité derrière de prétendues erreurs).

Si la Grèce ne respecte pas les règles, les quelques actifs de l’État qui lui restent, qui ont été transférés à un fonds spécial pendant 99 ans, seront vendus automatiquement et d’autres sanctions seront appliquées.

La Grèce restera sous une surveillance très stricte de l’UE jusqu’en 2060. Le FMI restera dans le programme, mais en tant que « conseiller ». Cela signifie que ses politiques resteront, mais pas son argent. Il continuera à détruire les Grecs et la Grèce, mais il ne sera pas considéré comme responsable de son activité criminelle ! Nous préférerions utiliser des termes purement économiques plutôt que ceux de la criminologie, mais nous pensons qu’il est contraire à la vérité de décrire un crime comme une politique économique simplement mauvaise et erronée.

L’Allemagne et l’UE, agissant au nom des banques européennes et des intérêts généraux de l' »Empire des finances » du capital financier international, ont refusé tout allégement de la dette, ce qui serait la seule solution au problème grec en 2010 et reste la seule solution aujourd’hui. Nous rappelons à nos lecteurs que cette méthode a été appliquée à l’Allemagne elle-même dans le passé (http://www.defenddemocracy.press/why-the-1953-cancellation-of-german-debt-wont-be-reproduced-for-greece-and-developing-countries/), mais aussi à la Pologne, à l’Irak et à d’autres clients occidentaux. Le fait que la Grèce ait été l’un des plus anciens membres de l’UE ou une nation historique, berceau de la notion de démocratie, n’a pas atténué la fureur avec laquelle Berlin et le FMI ont insisté sur un programme de destruction du pays sans résoudre ses problèmes ni rendre la dette grecque viable. L’Allemagne a même refusé une proposition française visant à inclure une clause de report du service de la dette si la Grèce ne produit pas un développement permettant le remboursement de la dette.

Lors de la pandémie de coronavirus, le gouvernement grec a demandé à l’Eurogroupe de permettre à Athènes de reporter de trois mois la confiscation des maisons des personnes qui ne peuvent pas payer leurs prêts aux banques. Les ministres de l’Eurogroupe ont refusé, malgré le danger réel d’expulsion de dizaines de milliers de Grecs de leurs maisons en pleine pandémie et la crise socio-économique.

Source https://uwidata.com/11140-how-international-finance-and-germany-destroyed-greece-to-create-a-totalitarian-eu/

Aides publiques cachées

Crise du Covid-19 : l’aide financière publique cachée à Total, Sanofi et consorts par Olivier Petitjean

Les dirigeants de Total ont justifié le maintien de leur dividende, malgré l’épidémie du Covid-19, en assurant ne bénéficier d’aucune forme de soutien financier de la part des pouvoirs publics. Une posture trompeuse, car le groupe pétrolier bénéficie bien, en toute discrétion, d’aides financières indirectes, notamment via le programme d’achat d’obligations de la Banque centrale européenne.

Renoncer à verser des dividendes ? Hors de question pour Total. Fin mars, le groupe pétrolier annonçait solennellement dans un communiqué de presse qu’il « ne sollicitera[it] pas le soutien de l’État pour faire face aux difficultés économiques créées par le Covid-19 que ce soit sous forme de soutien de trésorerie (prêts bancaires garantis, report de paiement des charges sociales ou fiscales) ou de recours au dispositif exceptionnel de chômage partiel ».

Un décision que l’entreprise n’a pas hésité à présenter comme une « contribution à la solidarité nationale », mais qui permettait surtout de couper court à la controverse. Beaucoup réclamaient en effet une suspension du versement de dividendes pour faire face à la crise, a fortiori pour les entreprises bénéficiant d’aides publiques.

Mais est-il vrai que le groupe pétrolier ne bénéficie d’aucun soutien des pouvoirs publics ? À y regarder de plus près, pas vraiment.

Il existe en effet plusieurs formes de soutien financier public, et celles qui sont en apparence les plus techniques et les plus absconses ne sont pas les moins importantes. L’organisation espagnole Observatori del Deute en la Globalització (ODG), partenaire de l’Observatoire des multinationales au sein du réseau ENCO, s’est penchée sur l’une d’entre elles : les achats d’obligations d’entreprises de la Banque centrale européenne (lire l’analyse complète d’ODG : Au nom du Covid-19, un soutien accru des institutions financières européennes aux grandes entreprises polluantes).

Fin mars, alors que l’épidémie s’étendait en Europe, l’institution financière basée à Francfort et présidée aujourd’hui par Christine Lagarde a annoncé une forte extension de son programme de soutien à la trésorerie des entreprises via l’achat de leur dette sur les marchés. Depuis cette annonce, selon les données rendues publiques, elle a acheté des obligations de plusieurs dizaines de multinationales européennes, dont quatre émises par Total.

D’autres grandes entreprises tricolores qui ont maintenu leurs dividendes malgré la pandémie ont également bénéficié de ce soutien discret des pouvoirs publics, comme Sanofi, Schneider Electric, ou Air Liquide. Les dirigeants de cette dernière entreprise avaient avancé le même argument que Total, se prévalant hypocritement de ne pas avoir « recours au chômage partiel, ni à des aides publiques (délais de paiement…) ». D’autres firmes du CAC40 qui n’ont fait que réduire leur dividende, comme Veolia, Orange, LVMH, Carrefour ou Capgemini, se trouvent aussi sur la liste. La Banque ne divulgue pas les montants investis, mais seulement le nom de l’entreprise et l’échéance de l’obligation.

Un soutien invisible et sans condition

On parle beaucoup du soutien apporté par le gouvernement français à Air France et à Renault. Ce soutien prend la forme de prêts directs de l’État ou de prêts garantis par lui auprès de grandes banques commerciales : 7 milliards d’euros pour Air France, et 5 pour Renault. On a aussi évoqué à cette occasion les contreparties auxquelles ces entreprises devaient être tenues, en termes écologiques et en termes de suspension du versement de dividendes. Finalement, il n’y aura aucune condition véritablement contraignante, le gouvernement se contentant de demander aux firmes concernées des « engagements » environnementaux (par exemple, pour Air France, la fin de certaines lignes intérieures) dont on ne voit pas bien le statut juridique.

L’émission d’obligations est une autre manière pour les multinationales de renforcer leur trésorerie pour faire face à la crise, à travers un emprunt à long terme sur les marchés financiers. Elle permet d’éviter de faire appel ostensiblement au soutien des États, ce que les dirigeants de Total considéreraient probablement comme une tache sur leur honneur. Concrètement, cependant, le résultat est le même : ils sont bel et bien dépendants du soutien financier des pouvoirs publics. Autre avantage : cela permet aussi d’échapper à toute forme de contrepartie en échange de ce soutien, même sous la forme d’un engagement purement volontaire.

Le même tour de passe-passe avait eu lieu lors de la crise financière de 2008. Les grandes banques « trop grosses pour tomber » qui avaient été tenues à bout de bras par les États se sont empressées de rembourser dès que possible prêts et autres aides directes, et de claironner partout qu’elles étaient quittes du soutien des pouvoirs publics. En oubliant commodément toutes les autres manières, indirectes, dont ces derniers les avaient aidées, souvent pour des montants autrement importants.

La BCE a bien demandé aux banques qu’elle supervise de ne pas verser de dividendes cette année, mais elle n’a pas spécifié de règles en ce qui concerne les entreprises soutenues via les achats d’obligations. Tout comme elle n’a posé aucun critère social ou environnemental à ses financements, ce qui l’a amenée à soutenir les plus gros pollueurs du continent comme Shell, Total, Airbus ou BMW. Comme la BCE a désormais tout intérêt à ce que ces firmes continuent à prospérer pendant de longues années pour rentrer dans son argent (au moins jusqu’en 2040 en ce qui concerne les obligations achetées à Total), les institutions européennes seront encore moins incitées à adopter des législations climatiques ambitieuses.

Pour ce qui concerne les multinationales françaises, ces achats d’obligations sont délégués par la BCE à… la Banque de France, dont le gouverneur François Villeroy de Galhau, ancien haut fonctionnaire et dirigeant de BNP Paribas, incarne à lui tout seul la consanguinité entre les élites politiques et économiques françaises. Les achats d’obligations françaises représentent près d’un tiers des sommes consacrées par la Banque européenne à son programme, pour un montant d’environ 65 milliards d’euros. Faute de transparence, on ne sait pas quels montants précis ont été consacrés à chacune des entreprises concernées.

Olivier Petitjean

Source https://multinationales.org/Crise-du-covid-19-l-aide-financiere-publique-cachee-a-Total-Sanofi-et-consorts

L’urgence d’une solidarité internationale avec les réfugiéEs en Grèce

Les fanfaronnades préélectorales de Mitsotakis l’an passé, comme quoi avec lui il n’y aurait plus de « problème immigré », avaient certes pour but de piquer aux nazis leur électorat et reflétaient aussi l’alignement de la droite sur le courant d’extrême droite, très présent désormais au pouvoir. Mais dans la réalité, c’est depuis un an une fuite en avant qui fait du gouvernement grec un émule des Orbán et Salvini, et il est urgent que le sort terrible infligé aux réfugiéEs en Grèce soit l’objet d’une large dénonciation internationale.

La semaine dernière, la police a repris ses intrusions dans des lieux habités par des réfugiéEs : à Exarcheia, une cinquantaine de personnes, dont de nombreux enfants, et presque toutes en règle, se sont retrouvées à dormir dehors, même si la solidarité a essayé de parer au plus pressé. Ceci est vu comme une répétition générale du projet piloté par Mitarakis, ministre « des Migrations et de l’asile » : pressé par la colère des habitantEs des îles proches de la Turquie, le gouvernement veut en partie « vider » les camps d’enregistrement, comme à Mytilène, en logeant les partants dans les « centres d’accueil » (blocs de logements, hôtels…) de la Grèce continentale. D’où le projet d’en chasser 10 000 occupantEs, sous prétexte que comme ils et elles sont en règle, ils et elles peuvent trouver du travail et payer un loyer… Cynisme accentué par la nomination confidentielle de directeurs de ces centres d’accueil, pour bon nombre membres du parti de droite et/ou ex-militaires, avec même à Pyrgos (Péloponnèse) un raciste auteur d’un livre édité par des nazis !

Impasse criminelle de la politique anti-réfugiéEs

Il semble que le seul objectif du pouvoir soit de décourager les réfugiéEs de venir en Grèce. C’est d’ailleurs à peu près ce qu’a benoîtement suggéré Mitarakis devant les instances européennes en parlant, sur fond de « menace asymétrique », d’une « force majeure » qui devait pousser l’Europe à la fermeté, et instrumentalisant le coronavirus1. Résultat : une volée de bois vert de la part d’instances sur les réfugiéEs, sur les libertés et de pas mal d’eurodéputés. Mais comme la réalité de la politique européenne, c’est l’Europe forteresse, le gouvernement grec poursuit sans état d’âme sa politique raciste, comme avec les renvois de réfugiéEs sur la rive turque du fleuve Evros ou sur les côtes orientales de l’Egée : une enquête de la Deutsche Welle établit à plusieurs dizaines ces renvois interdits par le droit international

Et tout aussi grave est le climat raciste entretenu par le pouvoir, avec des ministres parlant d’« invasion » : dans des lieux où devaient être accueillis des réfugiéEs, l’extrême droite se sent alors libre d’appeler à des rassemblements racistes pour « protéger l’intégrité » du lieu, comme on vient de le voir encore à Pella, lieu archéologique connu, où un hôtelier a subi tant de pressions qu’il a renoncé à ouvrir son établissement aux réfugiéEs. Ce racisme quotidien produit aussi ses « bavures » : un Crétois pris pour un Pakistanais vient de se faire tabasser par les policiers locaux…

Pour une riposte antiraciste, en Grèce et en Europe

Face à ce climat nauséabond, des ripostes locales existent heureusement, comme à Pella justement. Mais tout le monde en convient : il est grand temps de passer à la vitesse supérieure, pour un accueil des réfugiéEs dans des lieux sûrs et dignes, pour la fermeture des camps dégradants, sur les îles et sur le continent (Malakassa, Serrès…). Et bien sûr, ouverture des frontières européennes, et pas seulement pour accueillir les mineurEs sans famille. Mais cela suppose une campagne antiraciste menée en commun à l’échelle européenne !
À Athènes

1. Échec des racistes : croyant avoir « enfin» trouvé un foyer d’infection dans un centre de réfugiéEs en Argolide, ils préparaient leur ignoble campagne. Mais le virus semble avoir été « importé » par l’entourage de la famille royale hollandaise, qui a une résidence dans le coin ! Du coup, silence radio…

Source https://npa2009.org/actualite/international/lurgence-dune-solidarite-internationale-avec-les-refugiees-en-grece

Placer les biens et services de santé en dehors des lois du marché

Par Eliane Mandine

Quand sur son ordinateur on tape coronavirus dans PubMed (base de données scientifiques), la réponse se chiffre en milliers d’articles : le sujet est extrêmement actif dans le monde scientifique. Et pour cause, depuis le début du XXIème siècle,  plusieurs épidémies dues à des coronavirus ont sévi dans le monde.

La première en 2002-2003, le SARS-CoV (Severe acute respiratory syndrome-related coronavirus), sévère et moyennement contagieuse, a été jugulée après quelques mois, après avoir  touché 8096 personnes dans 29 pays, provoquant  774 décès (mortalité 9.6 %).

La deuxième en 2012, le MERS-CoV (Middle East Respiratory Syndrome coronavirus), présentant un syndrome clinique similaire au SRAS en plus sévère, mais avec une  transmission interhumaine limitée, est restée localisée au Moyen-Orient, touchant 1413 personnes et provoquant 502 décès (mortalité 35%).

Celle que nous subissons actuellement, le COVID-19, plus  contagieuse, est cause d’une pandémie qui ne se caractérisera pas seulement par une rapide propagation et un certain taux de mortalité dans le monde, mais aussi par les effets collatéraux dévastateurs pour les populations consécutifs à la crise économique et sociale.

Les coronavirus constituent une famille de virus dont certains peuvent infecter les humains, entraînant le plus souvent des symptômes bénins de type rhume.

De nombreuses équipes scientifiques, parmi lesquelles beaucoup de chinoises, ont cherché à caractériser ces virus et tenté de comprendre leur soudaine émergence au sein de la population humaine.

Ces équipes s’accordent à dire que le réservoir de ces virus est la chauve-souris du genre Rhinolophus et qu’ils se transmettent à l’homme via un hôte intermédiaire. Pour le SRAS ce serait un  petit mammifère, la civette palmiste (Paguma larvata), pour le MERS, le dromadaire, et l’hypothèse avancée pour le COVID-19 est le pangolin (mammifère, fourmilier écailleux), dont la chair est très prisée en Asie.

Pourquoi soudainement se propagent-ils chez l’homme ? Notre mode de vie, la modification de l’environnement par l’industrialisation à outrance, les déforestations, ont conduit au réchauffement climatique et à la baisse de la biodiversité. Les écosystèmes sont modifiés,  les  habitats des animaux réduits, situations qui favorisent des contacts entre espèces et exposent  de plus en plus à de nouveaux pathogènes potentiels.

Après les deux premiers épisodes infectieux, de nombreux scientifiques ont alerté sur l’émergence à venir chez l’homme de nouveaux virus pathogènes et potentiellement contagieux. Ils ont proposé la mise en place d’un système international de surveillance pour une détection précoce de la pathologie, et décider des mesures à prendre, à l’instar du GISRS (Global Influenza Surveillance and Response System) pour la grippe, mis en place par l’OMS il y a 65 ans. Sur la base d’un engagement des États membres envers un modèle mondial de santé publique, ce dispositif mondial de surveillance, de préparation et de riposte pour la grippe saisonnière, pandémique et zoonotique, fonctionne au travers de collaborations internationales efficaces, de partage des connaissances et des données sur le virus. Cela ressemble à la construction d’un commun intellectuel justifié par des raisons de santé publique. Ce commun n’est pas totalement préservé des échanges marchands : les données biologiques collectées sont transférées à l’industrie qui développe et commercialise les vaccins et les kits de détection, et qui en contrepartie reverse au GISR une partie des bénéfices afin d’assurer la pérennité du système.

La France, en 2013, s’est dotée d’un système comparable au GISRS avec le consortium appelé REACTing (REsearch and ACTion targeting emerging infectious diseases), sous l’égide de l’Alliance pour les sciences de la vie et de la santé (AVIESAN) rassemblant des équipes et laboratoires d’excellence, afin de préparer et  coordonner la recherche pour faire face aux crises sanitaires liées aux maladies infectieuses émergentes. Son rôle en période de crise épidémique est, outre les aspects de soins, de logistiques, de sécurité et de géopolitiques, de définir les priorités scientifiques, d’assurer l’information des autorités et du grand public.

L’épidémie de SRAS a vite été oubliée. Les épisodes MERS- Zika- Chikungunya et Ebola n’ont pas marqué les esprits, parce qu’ayant été contenus et géographiquement localisés, et surtout sévissant principalement dans des pays à faible revenu (Zika en Amérique centrale et Amérique du Sud,  Ebola en République Démocratique du Congo). Le manque de solvabilité de ces populations est objectivement ce qui a freiné le développement de nouvelles thérapeutiques. La conclusion glaçante est : quand il n’y a pas de marché, il n’y a pas de recherche… Les entreprises préfèrent concentrer leurs investissements sur les produits les plus lucratifs.

L’Europe s’est dégagée de ces grands projets d’anticipation, et  en France les projets de recherches pour mettre au point de nouveaux antiviraux à large spectre n’ont pas été retenus[1]. Quant aux actions conduites par le consortium REACTing depuis sa création, on cherche quelles elles ont pu être. C’est ce que dénoncent  les deux courriers de mise en garde quant aux grandes lacunes dans la constitution d’une indispensable «  première ligne de défense » face aux virus émergents, qui après 2014 ont été envoyés à la commission de l’UE par Bruno Canard (CNRS) et 3 de ses collègues belges et néerlandais, spécialistes de la structure moléculaire du coronavirus[2]

Les risques liés aux épidémies sont connus de longue date, mais quand le sage montre la lune, l’imbécile regarde le doigt. Et jusqu’à présent les épidémies ne sévissaient que dans les pays de Sud.

Stratégie et moyens logistiques

Au lieu de mettre en œuvre les moyens logistiques d’une stratégie, il  a fallu adapter notre stratégie à nos faibles moyens logistiques.

Ainsi, 20 ans après l’épidémie de SRAS, face à l’émergence de cette pandémie due au COVID-19, nous sommes démunis, totalement dépourvus de stratégie pour la combattre,  sans  traitement à proposer aux malades, ni  test de dépistage disponible, qui aurait permis de contrôler la dissémination de la maladie. La seule stratégie possible, pour ralentir le COVID-19, a été de mettre en quarantaine toute la population, avec tous les effets économiques et sociaux désastreux qui s’ensuivent.

La crise économique mondiale que provoque le coronavirus, virus planétaire, est l’aboutissement de nos choix de société. Le tout privé au détriment du public, accompagné d’une stratégie de délocalisation des industries essentielles, ont conduit à une situation catastrophique, dans les hôpitaux débordés par l’afflux des  malades, à la poste, dans l’incapacité d’assurer un service journalier, dans l’enseignement avec l’option du tout numérique sans tenir compte des zones blanches et des familles sans ordinateur.

Les universités et les laboratoires de recherche n’échappent pas à cet effondrement. Bien que moins visibles que les personnels de la santé, les chercheurs dénoncent depuis des décennies le manque de financement, le frein que représente l’Agence Nationale de la Recherche (ANR) qui oblige à consacrer toujours plus de temps à rédiger des propositions de projets qu’à la recherche proprement dite, et à attendre d’une instance dont les membres sont dans le conflit d’intérêt quasi permanent qu’elle donne son feu vert pour pouvoir travailler[3]. La colère des chercheurs s’est amplifiée avec le mouvement  des Facs et Labos en Lutte qui s’élèvent contre la LPPR (loi de programmation pluriannuelle de la recherche), la phase ultime d’une mise à mort de l’indépendance de la recherche fondamentale.

L’orientation de la recherche en fonction du rendement et du meilleur retour sur investissement, a conduit, comme annoncé par les chercheurs, à une perte d’indépendance technologique de la France. Ce qu’illustre parfaitement l’impossibilité de l’Hexagone à procéder à un dépistage massif de la population, les tests de dépistage n’étant pas produits en France. Lorsque BioMérieux relève le défi, c’est pour constater que les réactifs, fabriqués aux Etats-Unis et en Chine, ne sont pas disponibles en quantité suffisante. BioMérieux a par ailleurs développé des tests automatisés, fabriqués aux Etats-Unis et destinés dans un premier temps au seul marché américain. Pour être disponibles à l’international, et donc en France, ils feront l’objet d’une demande d’autorisation d’utilisation en urgence (EUA-Emergency Use Authorization) auprès de la Food and Drug Administration américaine. Les organisations de médecins et de laboratoires d’analyses prennent soudain conscience de ces pénuries[4] et du fait que la France est à la traîne derrière les Etats-Unis. N’est-il pas un peu tard pour s’insurger ?

Une société située en Bretagne, NG Biotech, épargne à la France de se retrouver en queue de peloton du développement technologique, grâce à la commercialisation prochaine d’un kit de détection des anticorps contre le COVID-19, indiquant que l’individu a été en contact avec le virus. Il faudra des tests en masse pour sortir du confinement, d’autant plus que jusqu’alors nous ne disposons ni  de traitement, ni de vaccin. Dans l’immédiat cette biotech, faute d’une capacité suffisante, ne pourra pas fournir un nombre suffisant de kits de détection. La reprise du cours normal de la vie risque d’en être retardée.

La recherche de profits immédiats est également cause de l’impréparation en matière de vaccins. La production d’un vaccin contre les virus de la famille des coronavirus est techniquement difficile, donc demande du temps, ce qui a découragé les investissements et entraîné du retard. Le temps perdu pour la préparation des outils ne se rattrapera pas : le temps nécessaire au développement, à la validation et à la production à grande échelle d’un vaccin n’est pas compressible. L’urgente nécessité d’un traitement prophylactique anti-COVID-19 ne justifie pas de transiger avec la qualité du produit délivré, en s’affranchissant en partie des normes de sécurité pour aller plus vite par exemple. L’efficacité et l’innocuité du vaccin doivent être démontrées avant son administration à l’ensemble de la population.

Quant aux traitements, la communauté médicale ne peut faire mieux que de se mobiliser autour de l’usage de médicaments existants, les antiviraux ciblant d’autres virus (HIV, Ebola), ou des molécules utilisées pour d’autres indications, tels les antipaludéens chloroquine ou hydroxy-chloroquine, sur la base de résultats encourageants in vitro ou dans des études cliniques réalisées en urgence, pour faire face à l’épidémie de SRAS.

Le financement en leur temps des travaux de Bruno Canard, et des autres équipes travaillant sur les coronavirus était un moyen d’être en possession de molécules spécifiques de cette famille de virus, et d’être en mesure de sélectionner rapidement un traitement efficace contre le COVID-19. Au lieu de nous trouver aujourd’hui réduits à solliciter dans l’urgence tous les chercheurs pour lancer de multiples projets. Les résultats de la recherche ne se décrètent pas, aucun appel à projet ne permet de répondre à un état d’urgence sanitaire. C’est pourtant ce que choisit de faire l’Etat qui persiste dans sa logique délétère de mise en concurrence des équipes travaillant sur le  COVID-19 lorsqu’il publie un « appel à projets avec un processus accéléré de sélection et d’évaluation » au lieu de toutes les financer massivement. Le processus d’évaluation et de sélection est certes accéléré, mais seulement quatre projets correspondants aux quatre priorités identifiées par l’OMS seront retenus pour un budget de 3 millions d’euros. Quant à Institut Pasteur, il en est à lancer une collecte auprès du public pour couvrir le financement de ses propres projets.

            Derrière la crise sanitaire, les enjeux financiers

Dans le cas du COVID19, les entreprises qui pourront concevoir les tests de dépistage (viraux ou sérologiques), les traitements et/ou les vaccins, disposeront d’une formidable rente de marché

Allons-nous assister, comme pour l’épidémie de SRAS, à une bataille pour s’assurer des droits de propriété intellectuelle (PI) ?

A l’époque un certain nombre d’organismes avaient  déposé des demandes de  brevet sur la séquence génomique du SRAS. L’université de Hong Kong (HKU), en partenariat avec la société Versitech, le CDC (Center for Disease Control and Prevention) aux Etats-Unis, le BCCA (the British Columbia Cancer Agency) au Canada et CoroNovative, une spin off  du centre médical Érasme aux Pays-Bas, se sont disputés l’exclusivité du génome viral. Ces nombreuses demandes de droit de PI pouvant nuire au développement de produits destinés à combattre le SRAS, tels que des vaccins, la raison a prévalu et il a été proposé de placer ces droits dans une communauté de brevets pour qu’ils soient exploités sur une base non exclusive[5]. C’est une grande première qui mérite d’être soulignée. Il faut préciser que, ce virus ne paraissant plus actif, l’intérêt pour le SRAS était retombé.

De même pour l’épidémie MERS-CoV, l’OMS est intervenue pour que les brevets déposés ne puissent pas ralentir le développement d’un vaccin ou autres produits destinés à vaincre la maladie[6]. Des recherches sont toujours en cours pour développer des traitements contre ce pathogène. Cependant le faible nombre de patients à inclure dans les essais cliniques freine leur validation.

Dans la lutte contre le COVID-19,  il est trop tôt pour connaître les demandes de brevets. Sont en course une soixantaine de candidats vaccins dans le monde, élaborés par des start-up, des groupes pharmaceutiques et des centres de recherche. Un délai de 12 à 18 mois, selon les approches choisies, est estimé pour pouvoir les fournir.

Les Etats-Unis et la Chine rivalisent âprement pour obtenir le marché, une bataille que la Chine estime ne pas pouvoir se permettre de perdre. Dans ces deux pays, des essais cliniques ont déjà débuté. On peut craindre, avec cette précipitation qui ressemble plus à une course au profit qu’à une volonté de servir les intérêts de la santé publique, que des manquements au respect de l’éthique des expérimentations sur les êtres humains, tel que le consentement éclairé, ne soient à déplorer.

D’autre part, de nombreux essais cliniques sont en cours partout dans le monde pour identifier un médicament actif. En Europe, une étude multicentrique,  Discovery, coordonnée par l’INSERM a été lancée pour évaluer 3 molécules (Remdesiv[7], Lopinavir/ritonavir[8] , hydroxychlorine[9]), en association ou non avec Interferon Beta-1A[10].

Ces molécules ne sont pas nouvelles, les droits de PI ne devraient pas se poser. Cependant il n’est pas rare que les entreprises pharmaceutiques demandent des brevets supplémentaires pour un nouvel usage médical (brevets de deuxième application thérapeutique) de composés existants. Ainsi Gilead, qui possède des brevets primaires pour le Remdesivir dans plus de 70 pays, n’a pas hésité à essayer de renforcer ses droits exclusifs, qui courent jusqu’en 2031, en demandant à l’Agence américaine du médicament la classification du Remdesivir comme médicament orphelin. Gilead a dû renoncer sous  la pression des ONG et des critiques publiques. Selon la Bank of America, Gilead pourrait empocher jusqu’à 2,5 milliards de dollars grâce à son antiviral si une activité anti COVI619 était démontrée. L’utilisation de l’hydroxy-chloroquine, initialement un anti paludéen, pour traiter le COVID-19, est hors AMM, on peut se demander, au cas où l’étude clinique confirme l’efficacité de cette molécule, quelle sera la position de Sanofi quant à la demande de brevet supplémentaire. La même interrogation s’applique à Merck pour l’Interferon Beta-1A.

Le laboratoire Abbvie a renoncé à faire valoir ses droits (qui courent encore dans certaines zones géographiques) sur cette combinaison Lopinavir/ritonavir (Kaletra), par ailleurs génériquée par le laboratoire Mylan.

D’autres essais thérapeutiques (Chine, Etats-Unis, France) concernent l’évaluation de traitements modulant l’inflammation tels que les anticorps monoclonaux anti-récepteur de l’interleukine-6 (IL-6), le Tocilizumab de Roche (Actemra©) et le Sarilumab de Sanofi/Regeneron (Kevzara®), administrés en dose unique pour inhiber l’IL-6, médiateur majeur de la réaction hyper inflammatoire liée au COVID-19. Actuellement ces deux  produits,  issus des biotechnologies, sont utilisés dans le traitement de la polyarthrite rhumatoïde. Si leur activité contre le COVID-19 est démontrée, les firmes détentrices des brevets, Roche et Sanofi/Regeneron, oseront-elles augmenter leur prix de vente, comme cela s’est vu avec l’Avastin, passé de 10 à 100 €, soit une hausse de 1000 %, lorsque son usage a été étendu à la dégénérescence maculaire ? Ces traitements seront-ils alors accessibles à tous les patients ?

Le coronavirus tue, mais pour les  grands groupes pharmaceutiques il se présente comme une manne providentielle. Ainsi les actions du laboratoire pharmaceutique Gilead grimpaient de 20 % après l’annonce des essais cliniques du Remdesivir contre le Covid-19, et celles d’Inovio Pharmaceuticals gonflaient de 200 % à la suite de l’annonce d’un vaccin expérimental. Sous les auspices de la gratuité et de dons[11], et de l’urgence sanitaire, des réseaux se tissent à l’échelle internationale, des plateformes de partage de connaissances se créent, les collaborations se multiplient, des alliances stratégiques se développent. Mais en toile de fond c’est la loi du marché qui s’applique. Les enjeux financiers sont trop importants pour ne pas s’assurer de la plus grande efficacité, de la puissance suffisante pour se donner les chances maximales de remporter ce gigantesque marché. Les entreprises cherchent à tirer le meilleur parti de la nouvelle situation.

            Se rassembler pour des jours meilleurs

La dévastation du monde par le coronavirus révèle que les politiques d’austérité de ces dernières décennies ont privé l’Etat de ses ressources essentielles et conduit à l’érosion du secteur public. Celui-ci n’est plus en mesure d’assurer la santé des citoyens lorsqu’il se met au service des financiers, pour lesquels la finalité est d’arriver en tête de la compétition économique mondiale, pour gonfler toujours plus la rémunération des actionnaires et faire monter le cours en bourse. La crise sanitaire actuelle montre cruellement notre vulnérabilité face à des chaînes de production mondialisée et un commerce international en flux tendu, qui empêchent de disposer en cas de choc de biens de première nécessité : masques, kits de diagnostic, médicaments indispensables, etc.

Le coronavirus s’éteindra. Il y aura alors urgence à faire face à la misère engendrée. Il faudra que ce soit avec une pensée radicalement nouvelle, débarrassée de l’idéologie de la valeur et de l’exigence de la valorisation.

Il est temps d’exiger une approche qualitativement différente, fondée sur les communs du savoir et une collaboration non-compétitive. Ce qui nécessite  de (re)construire des services publics forts, santé, climat, économie, éducation, culture doivent être dotés de financements publics pérennes, à la hauteur des grandes missions qu’appelle à satisfaire le bien commun, en France et dans le monde. Il faut des structures collectives puissantes, pour une meilleure appropriation publique et citoyenne des secteurs essentiels à la vie humaine.

Il est temps de placer les biens et service de santé en dehors des lois du marché, de sortir la recherche, la production de médicaments, l’hôpital, la santé, des logiques capitalistes et de lutter contre la dérive néolibérale du capitalisme mondialisé et financiarisé.

Il est temps d’investir massivement dans la recherche, de donner aux chercheurs les moyens d’explorations scientifiques à long terme, d’encourager les collaborations et le partage des connaissances, d’empêcher la prédation des résultats à des fins d’intérêts  privés en refondant les droits de Propriété intellectuelle (PI).

Il est temps de relocaliser les productions de principes actifs, des médicaments, des matériels sanitaires pour être en mesure de répondre aux besoins de santé de la population.

Il est temps de repenser nos modes de vie, de repenser le travail, sa division, sa rémunération, son sens, de repenser notre répartition collective des ressources, de rendre la fiscalité plus juste et redistributive, pour satisfaire les  besoins sociaux, environnementaux et sanitaires du plus grand nombre.

Il est temps de considérer comme des enjeux vitaux pour l’avenir de l’humanité, le maintien de la biodiversité, un modèle de production respectueux de l’environnement, une agriculture relocalisée (circuits courts), la fin de l’élevage intensif, des énergies renouvelables.

Il est temps de se rassembler, dans une entraide et une solidarité mondiale, pour bâtir des jours meilleurs.

14-04-20

[1] « Arrêt des financements des recherches sur les anti-coronavirus large spectre  de l’équipe B. Canard ». Entretien réalisé par Nadège Dubessay, L’Humanité, 19/03/2020.

[2] Témoignage de Bruno Canard, chercheur au CNRS sur des Coronavirus – Facebook.

[3] Voir « Recherche et finance, une dangereuse liaison », E. Mandine et T. Bodin, ContreTemps n°42, juillet 2019.

[4] « Dépistage du coronavirus : biologistes et médecins dénoncent des pénuries de matériel », Le Généraliste, Amandine Le Blanc 25/03/2020.

[5] James H.M. Simon et al. Bulletin of the World Health Organization,  september 2005, 83 (9)

[6] « Coronavirus : un brevet provoque la colère de l’OMS », Les Echos, 23/05/2013.

[7] Remdesiv de Gilead.

[8] Lopinavir/ritonavir : Kaletra de Abbvie.

[9] hydroxychlorine de Sanofi.

[10] Interferon Beta-1A de Merck.

[11] Dons de chloroquine par Sanofi, Bayer, Novartis ; publié le 23/03/2020 N. Viudez-Industrie-Pharma. Merck a récemment fait don de boîtes d’interférons bêta-1a à l’Institut National de la Santé et de la Recherche Médicale (INSERM) en vue de son utilisation dans un essai clinique.

Source http://medicament-bien-commun.org/placer-les-biens-et-services-de-sante-en-dehors-des-lois-du-marche

L’appel : se fédérer

 

L’APPEL

Nous sommes nombreuses, nous sommes nombreux : nous sommes tant et tant à penser et éprouver que ce système a fait son temps. Mais nos voix sont dispersées, nos appels cloisonnés, nos pratiques émiettées. Au point que quelquefois nous doutons de nos forces, nous succombons à la détresse de l’impuissance. Certes, parfois cette diffraction a du bon, loin des centralisations et, évidemment, loin des alignements. Il n’empêche : nous avons besoin de nous fédérer. Sans doute plus que jamais au moment où une crise économique, sociale et politique commence de verser sa violence sans faux-semblant : gigantesque et brutale. Si « nous sommes en guerre », c’est bien en guerre sociale. D’ores et déjà les attaques s’abattent, implacables : le chantage à l’emploi, la mise en cause des libertés et des droits, les mensonges et la violence d’État, les intimidations, la répression policière, en particulier dans les quartiers populaires, la surveillance généralisée, la condescendance de classe, les discriminations racistes, les pires indignités faites aux pauvres, aux plus fragiles, aux exilé-es. Pour une partie croissante de la population, les conditions de logement, de santé, d’alimentation, parfois tout simplement de subsistance, sont catastrophiques. Il est plus que temps de retourner le stigmate contre tous les mauvais classements. Ce qui est « extrême », ce sont bien les inégalités vertigineuses, que la crise creuse encore davantage. Ce qui est « extrême », c’est cette violence. Dans ce système, nos vies vaudront toujours moins que leurs profits.

Nous n’avons plus peur des mots pour désigner la réalité de ce qui opprime nos sociétés. Pendant des décennies, « capitalisme » était devenu un mot tabou, renvoyé à une injonction sans alternative, aussi évident que l’air respiré – un air lui-même de plus en plus infecté. Nous mesurons désormais que le capitalocène est bien une ère, destructrice et mortifère, une ère d’atteintes mortelles faites à la Terre et au vivant. L’enjeu ne se loge pas seulement dans un néolibéralisme qu’il faudrait combattre tout en revenant à un capitalisme plus « acceptable », « vert », « social » ou « réformé ». Féroce, le capitalisme ne peut pas être maîtrisé, amendé ou bonifié. Tel un vampire ou un trou noir, il peut tout aspirer. Il n’a pas de morale ; il ne connaît que l’égoïsme et l’autorité ; il n’a pas d’autre principe que celui du profit. Cette logique dévoratrice est cynique et meurtrière, comme l’est tout productivisme effréné. Se fédérer, c’est répondre à cette logique par le collectif, en faire la démonstration par le nombre et assumer une opposition au capitalisme, sans imaginer un seul instant qu’on pourrait passer avec lui des compromis.

Mais nous ne sommes pas seulement, et pas d’abord, des « anti ». Si nous n’avons pas de projet clé en mains, nous sommes de plus en plus nombreuses et nombreux à théoriser, penser mais aussi pratiquer des alternatives crédibles et tangibles pour des vies humaines. Nous avons besoin de les mettre en commun. C’est là d’ailleurs ce qui unit ces expériences et ces espérances : les biens communs fondés non sur la possession mais sur l’usage, la justice sociale et l’égale dignité. Les communs sont des ressources et des biens, des actions collectives et des formes de vie. Ils permettent d’aspirer à une vie bonne, en changeant les critères de référence : non plus le marché mais le partage, non plus la concurrence mais la solidarité, non plus la compétition mais le commun. Ces propositions sont solides. Elles offrent de concevoir un monde différent, débarrassé de la course au profit, du temps rentable et des rapports marchands. Il est plus que jamais nécessaire et précieux de les partager, les discuter et les diffuser.

Nous savons encore que cela ne suffira pas : nous avons conscience que la puissance du capital ne laissera jamais s’organiser paisiblement une force collective qui lui est contraire. Nous connaissons la nécessité de l’affrontement. Il est d’autant plus impérieux de nous organiser, de tisser des liens et des solidarités tout aussi bien locales qu’internationales, et de faire de l’auto-organisation comme de l’autonomie de nos actions un principe actif, une patiente et tenace collecte de forces. Cela suppose de populariser toutes les formes de démocratie vraie : brigades de solidarité telles qu’elles se sont multipliées dans les quartiers populaires, assemblées, coopératives intégrales, comités d’action et de décision sur nos lieux de travail et de vie, zones à défendre, communes libres et communaux, communautés critiques, socialisation des moyens de production, des services et des biens… Aujourd’hui les personnels soignants appellent à un mouvement populaire. La perspective est aussi puissante qu’élémentaire : celles et ceux qui travaillent quotidiennement à soigner sont les mieux à même d’établir, avec les collectifs d’usagers et les malades, les besoins quant à la santé publique, sans les managers et experts autoproclamés. L’idée est généralisable. Nous avons légitimité et capacité à décider de nos vies – à décider de ce dont nous avons besoin : l’auto-organisation comme manière de prendre nos affaires en mains. Et la fédération comme contre-pouvoir.

Nous n’avons pas le fétichisme du passé. Mais nous nous souvenons de ce qu’étaient les Fédérés, celles et ceux qui ont voulu, vraiment, changer la vie, lui donner sens et force sous la Commune de Paris. Leurs mouvements, leurs cultures, leurs convictions étaient divers, républicains, marxistes, libertaires et parfois tout cela à la fois. Mais leur courage était le même – et leur « salut commun ». Comme elles et comme eux, nous avons des divergences. Mais comme elles et comme eux, face à l’urgence et à sa gravité, nous pouvons les dépasser, ne pas reconduire d’éternels clivages et faire commune. Une coopérative d’élaborations, d’initiatives et d’actions donnerait plus de puissance à nos pratiques mises en partage. Coordination informelle ou force structurée ? Ce sera à nous d’en décider. Face au discours dominant, aussi insidieux que tentaculaire, nous avons besoin de nous allier, sinon pour le faire taire, du moins pour le contrer. Besoin de nous fédérer pour mettre en pratique une alternative concrète et qui donne à espérer.

Dès que nous aurons rassemblé de premières forces, nous organiserons une rencontre dont nous déciderons évidemment ensemble les modalités.

Pour rejoindre cet appel : appelsefederer@riseup.net

Site internet : http://sefederer.mystrikingly.com/

Signatures collectives :

Aggiornamento histoire-géo, ACU (Association des communistes unitaires), Association De(s)générations, CAPJPO-Europalestine, Cerises la coopérative, Changer de Cap, Collectif des révolutionnaires, Collectif Droit à la Belle Ville, Collect’IF paille, EcoRev’, Émancipation collective, Ensemble!-PACG 05, Fédération des syndicats SUD-Rail, Gilets jaunes de Belleville, Gilets jaunes enseignement recherche, Gilets jaunes de Plaine Commune, Jardins Communs, Jarez Solidarités, La Suite du monde, Le Paria, Les infiltrés, On prend les champs, PEPS (Pour une écologie populaire et sociale), Questions de classe(s), Reporters en Colère, Réseau pour l’Autogestion, les Alternatives, l’Altermondialisme, l’Ecologie, le Féminisme, Réseau salariat Essonne, Réseau salariat Pays de Loire, SUD éducation Loiret, SUD éducation Paris, Union prolétarienne ML, Union syndicale Solidaires, Union syndicale SUD Industrie, Unité Communiste de Lyon, Union communiste libertaire

Signatures individuelles ( voir le site)

QUI SOMMES NOUS ?

Nous sommes infirmière, cheminot, charpentier, monteuse, postier, ingénieur, paysan, professeur, ébéniste, travailleur précaire, assistant sociale, animatrice, éducateur, écrivain public, poète, enseignant, universitaire, cinéaste, retraité, interprète, photographe, journaliste, intermittent du spectacle, technicien dans l’aéronautique, astrophysicien, travailleur sous contrat de l’État, directeur de théâtre, metteuse en scène, anthropologue, ouvrier dans la conception mécanique, éditeur, organisateur de communautés, plasticienne, psychiatre, documentaliste, formatrice, conseillère syndicale, comédienne, responsable d’association, psychanalyste, designer, pasteur et théologien, cadre associatif, enseignant-chercheur, environnementaliste, professeure des écoles, statisticien, pilote de ligne, graphiste, informaticienne, médecin, formateur, conseillère syndicale, producteur de films, artiste précaire, linguiste, travailleur social, essayiste, ingénieur de recherche, contractuel, philosophe, téléconseiller, socioéconomiste, architecte, chef de projet multimédias, étudiante, compositeur, psychologue, pédagogue, gestionnaire de contrats, réalisatrice radio, coopérateur, kinésithérapeute…

Nous habitons Aix-en-Provence (13), Albertville (73), Ambert (63), Amiens (80), Angers (49), Apt (84), Argenteuil (95), Arradon (56), Aubervilliers (93), Auterive (31), Auxerre (89), Avignon (84), Bagnères de Bigorre (65), Batukau (Bali), Bègles (33), Berlin (Allemagne), Besançon (25), Blois (41), Bruxelles (Belgique), Calvisson (30), Cayenne (97), Cergy (95), Chambéry (73), Chartres-de-Bretagne (35), Chatres-sur-Cher (41), Clamart (92), Clichy (92), Cossé le Vivien (53), Cotonou (Bénin), Courtry (77), Créteil (94), Diois (26), Dourgne (81), Fontaine (38), Fontenay-aux-Roses (92), Forcé (53), Gaillac-Toulza (31), Gap (05), Garrevaques (81), Genève (Suisse), Gennevilliers (92), Grabels (34), Ivry-sur-Seine (94), La Barque (13), La Bâtie-Neuve (05), L’Aigle (61), La Roche sur Yon (85), Le Havre (76), Le Perreux (94), Le Plessis Robinson (92), Les Lilas (93), Les Matelles (34), Les Ulis (91), L’Île Saint-Denis (93), Liouville (55), Lyon (69), Marseille (13), Martigues (13), Metz (57), Montpellier (34), Montréal (Canada), Montreuil (93), Mordelles (35), Nancy (54), Nantes (44), Orléans (45), Paris (75), Piémont Cévenol (30/34), Poitiers (86), Pontoise (95), Rennes (35), Roanne (42), Rouen (76), Rouillé (86), Saint Affrique (12), St Barthélémy d’Anjou (49), Saint-Cosme-en-Vairais (72), Saint-Denis (93), Saint-Denis-de-la-Réunion (97), Saint-Étienne (42), Saint-Étienne du Rouvray (76), Saint-Pierre-du-Perray (91), Sanary-sur-Mer (83), Senlis (60), Strasbourg (67), Thionville (57), Toulouse (31), Tours (37), Trappes (78), Trets (13), Valence (26), Vanves (92), Veynes (05), Villejuif (94), Villeneuve-Saint-Georges (94), Viry-Chatillon (91), Vitry-sur-Seine (94), Xermaménil (54), Yutz (57)…

Nous nous engageons dans des associations, collectifs, organisations et syndicats divers : parmi bien d’autres, Agir pour l’Environnement, Alternatives et Autogestion, AMAP Court-circuit, Amnesty International, Association des Communistes Unitaires, Atelier Constituant des Bâtisseurs Jaunes, ATTAC, L’aventure citoyenne, Bas les masques, Belleville en Commun, Big Bang, Bloquons Blanquer, Cerises la coopérative, CGT, Collectif contre les Grands Projets Inutiles, Collectif Gilets jaunes enseignement recherche, Collectif d’Échanges Citoyens du Pays d’Aix, Collect’IF Paille, Collectif Lettres Vives, Collectif universitaire contre les violences policières, Collectifs AESH, Commune Thomas Münzer du Mouvement du Christianisme social, Comité National de Résistance et de Reconquête, Comité Place des Fêtes, DécidonsParis, DionyCoop, Ecorev’ – Revue critique d’écologie politique, Éducation populaire & transformation sociale, Ensemble!, Europe solidaire sans frontière, Extinction Rébellion, Faire commune, Fondation Copernic, France Amérique Latine, France Insoumise, ICEM-Pédagogie Freinet, Ifaw, Gilets jaunes enseignement recherche, Groupe de recherche pour une stratégie économique alternative (GRESEA), Le Monde d’Après, mes Mouvement de la Paix MRAP, Nature&Progrès, Ni guerres ni état de guerre, Nouveau Parti Anticapitaliste NPA, PEPS, Pontoise à Gauche Vraiment, Questions de classe(s), REC –Reporters en colère, Réseau féministe RUPTURES, Réseau salariat, SNESUP-FSU, SNJ-CGT, SNUipp-FSU, Solidaires étudiant-e-s, Sous-marins jaunes, SOS Villages d’Enfants, Stop nucléaire, Les stylos rouges, SUD Aérien, SUD Éducation, SUD Industrie, SUD PTT, SUD Rail, S’unir à Saint-Pierre Décidons tous de notre ville, Union communiste libertaire, Union syndicale Solidaires, Unité Communiste Lyon, Union juive française pour la paix, Union pacifiste, Zone de solidarité populaire ZSP 18e… (et tout cela n’est pas exhaustif

ET APRES ?

Nous voulons former un mouvement qui puisse populariser, diffuser, médiatiser les perspectives et les enjeux de notre appel : faire qu’il deviennent l’appel de chacune et chacun. Dès que nous aurons rassemblé de nouvelles forces, nous organiserons une rencontre dont nous déciderons ensemble les modalités.

Il y a parmi nous beaucoup de talents, de savoirs et de savoir-faire : leur partage et leur mise en commun constitueront « une force qui va ». Une priorité sera de créer un « vrai » site internet où nous pourrons mettre, outre l’appel, des premiers textes qui nous seront proposés ou que nous élaborerons collectivement : de tous formats, textes théoriques, récits d’expériences, témoignages, mais aussi des créations artistiques (films, poèmes compositions musicales, créations plastiques…). Nous pourrons aussi y déposer des photos, des vidéos, des porte-folios, des dessins, réaliser des podcasts, des émissions, rassembler des informations pour une newsletter sur des initiatives et des actions.

Les idées ne nous manqueront pas. « Se fédérer » (appellation provisoire puisque nous aurons à imaginer un nom pour cette coopérative/ rassemblement) entend bien en effet n’être ni une tribune, ni un énième appel : mais une force dans laquelle chacune et chacun pourra prendre sa place et participer à sa mesure.

D’ores et déjà, nous vous proposons de commencer à réfléchir aux thématiques qui vous tiennent à cœur (outre bien sûr les enjeux transversaux qui nous préoccupent) pour d’éventuels groupes/ateliers dans lesquels vous souhaiteriez vous engager. Les possibilités sont nombreuses et nous en dresserons toutes et tous ensemble un panorama. Exemple: alimentation, énergie, écologie, art, travail, coopératives, violences policières, féminismes, antiracisme, consommation, logement… (sans aucun ordre hiérarchique évidemment et sans exhaustivité).

N’hésitez pas à nous faire part de vos idées et propositions : appelsefederer@riseup.net. Nous avons constitué une petite équipe technique d’animation évolutive et ouverte à qui le souhaite (là aussi, faites-nous signe si vous souhaitez y prendre part).

Si vous avez des compétences particulières (vidéos, création et animation de site, traduction – d’ores et déjà l’appel a été traduit en anglais et en italien), elles seront les bienvenues !

Source http://sefederer.mystrikingly.com/

 

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