Les grecs n’oublient pas Pavlos

17/9 Les athéniens ont massivement répondu à l’appel des organisations antifascistes hier pour honorer la mémoire de Pavlos FYSSAS . Le rassemblement et la manifestation qui a suivi ont été très suivis.
Dans la soirée on a noté quelques incidents mineurs ( jets de molotovs, etc..)
« Nous honorons la mémoire de Pavlos Fyssas et invitons tous les citoyens à défendre les valeurs de la démocratie et de la solidarité. À une époque où les néo-nazis tentent, à l’occasion de la situation des milliers de réfugiés, de semer le poison de la haine raciale, la lutte pour ce qu’il a combattu toute sa vie Pavlos Fyssas devient une priorité. » SYRIZA Keratsini
la manif en vidéo:
https://www.youtube.com/watch?v=3l11ifzxc-Y
https://youtu.be/NudG77Kj4TY
dans le reste de la Grèce :
à Kalamata:
https://www.youtube.com/watch?v=QgckSrL6-CA
https://www.youtube.com/watch?v=85shnFKuLdM
https://www.youtube.com/watch?v=O35Au81JUPQ
à Patras:
https://www.youtube.com/watch?v=EluixFdgy00
https://www.youtube.com/watch?v=J6VzcES3yoo
En soirée la famille avait appelé à mettre des bougies devant le monument qui honore Pavlos .
Ici la mère de Pavlos : https://youtu.be/dBwvfi4ud3A
CE soir au Pirée, les antifascistes organisent un grand concert de rap.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

MANIFS ANTIFASCISTES À LA MÉMOIRE DE PAVLOS FYSSAS:

2e Rencontres euro-méditerranéennes de l’économie des travailleurs à Théssalonique

De Palente à Thessalonique
La situation en Grèce est catastrophique. Certes ! L’Union européenne y mène une politique criminelle. Certes ! Le 2e gouvernement Tsipras… Certes ! Les conditions dans lesquelles s’ébrouent les alternatives autogestionnaires concrètes sont extrêmement défavorables. Certes ! … Certes ! … Certes ! Et pourtant elles tournent… L’usine autogérée Vio.Me à Thessalonique, où s’organisent les 2e rencontres euro-méditerranéennes de l’économie des travailleur-euses, sera leur point de ralliement les 28, 29 et 30 octobre prochains.

On occupe des entreprises, on se saisit de l’outil de travail, on remet en marche la production et on rédige des plans alternatifs. On voit ainsi se manifester ce que Marx désignait comme le «triomphe» de l’«économie politique du travail» sur l’«économie politique de la propriété». À la fois projet, programme et pratique sociale, l’autogestion n’est pas seulement la musique d’un avenir incertain, c’est aussi, au coeur même de la société telle qu’elle est, qu’elle joue sa partition quand des groupements et des mouvements sociaux s’emparent des biens communs et du possible.

Alors tous et toutes à Thessalonique ! 

Patrick Silberstein

Honte au penseur qui se mutile, / Et s’en va, chanteur inutile, / Par la porte de la cité ! / Le poète en des jours impies / Vient préparer des jours meilleurs. / Il est l’homme des utopies ; / Les pieds ici, les yeux ailleurs. / C’est lui qui sur toutes les têtes, / En tout temps, pareil aux prophètes, / Dans sa main, où tout peut tenir, / Doit, qu’on l’insulte ou qu’on le loue, / Comme une torche qu’il secoue, / Faire flamboyer l’avenir ! (Victor Hugo, « Les Rayons et les ombres »).

Lire l’appel et les modalités de participation

appel-2e-rencontre-thessalonique-28-29-30-oct-16

OJ réunion du collectif 21 sept 2016

La prochaine réunion du collectif aura lieu mercredi 21 septembre 2016 à 17h salle 123 à la maison des association, 6 rue Berthe de Boissieux à Grenoble.

Ordre du jour :

Préparation de la quinzaine nationale de solidarité avec les dispensaires et le peuple grec prévue du 1 au 14 octobre et sa clôture par un grand meeting à Vénissieux le 15 octobre.

Film  » La tourmente grecque II  » au club à Grenoble

Dans le cadre de la quinzaine nationale de solidarité avec le peuple grec prévue du 1 au 14 octobre le collectif de Grenoble vous invite à assister à la projection du documentaire 

2016-10-10-tourmente-grecque-grenoble-1

La tourmente grecque II 

Chronique d’un coup d’Etat

Le lundi 10 octobre 2016 à 20h15

au cinéma Le club 9 bis rue Phalanstère à Grenoble 

suivie d’un débat avec Philippe Menut, réalisateur 

Deuxième volet de l’enquête sur la situation en Grèce et dans la zone euro

De quoi la « crise » grecque est-elle l’annonciatrice?

Après  six mois de négociations, malgré le « non » massif des Grecs au référendum du 5 juillet 2015, le gouvernement Syriza a cédé aux injonctions des « institutions » de la zone euro, tout en renonçant à toute annulation ou allègement de sa dette. Comment l’expliquer ? En quoi une alternative était-elle possible ?

Par une enquête précise et claire, le documentaire ouvre le débat sur les perspectives politiques et sur les alternatives démocratiques en Grèce et en Europe.

« Je n’ai pas fait un film pour dire ce que je savais ; ce que j’explique, je l’ai compris en tournant le documentaire » (Philippe Menut).

La première version du film, actualisé à deux occasions, avait été projetée et débattue plus de 180 fois en France et à l’étranger.
Les programmations ont été soutenues notamment par Attac, le CADTM, Les Amis du Monde diplomatique, le CAC (collectif pour un audit citoyen de la dette publique), Assemblées citoyennes, Solidarité France Grèce pour la santé, La Ligue des Droits de l’Homme, ACRIMED, Osez Le Féminisme, la CGT, SUD-Solidaires, Parti de Gauche, Ensemble-FdG, PCF,  NPA, EE-les Verts, (liste ouverte).
Le film a également été programmé à Athènes, Madrid, Liège, Namur, Lausanne, Montréal et Berlin.

Pourquoi l’Union européenne ne parvient pas à sortir de sa logique perdante

Article de Romaric Godin  publié le 12/9 sur La tribune

Si la classe ouvrière et ses organisations ne prennent pas la tête de la lutte contre l’UE, en opposant à celle-ci une perspective internationaliste, le champ sera libre pour tous les démagogues droitiers ou fascisants.

Le refus de l’UE de faire face aux insuffisance des politiques économiques menées conduit à une incapacité à construire un projet pour l’avenir. Le sommet de Bratislava qui se tiendra le 16 septembre prochain s’annonce déjà comme un échec.

Souvenez-vous, c’était au lendemain du 23 juin dernier. Les Britanniques venaient de voter en faveur d’une sortie de l’Union européenne (UE). Sous le choc, l’ensemble des dirigeants européens promettait une nouvelle orientation pour l’Europe et une réponse forte pour empêcher l’exemple britannique de se répandre. Pour réaliser cette réforme nécessaire de l’UE, un sommet extraordinaire avait été convoqué. Il se tiendra vendredi 16 septembre à Bratislava. Et d’ores et déjà, il semble évident qu’il n’en débouchera que des bonnes paroles et peu d’actes, du moins en matières économiques.

La situation est pourtant doublement préoccupante. En matière économique, les derniers mois viennent de confirmer l’échec des politiques menées jusqu’ici, notamment dans l’espace le plus intégré de l’UE, la zone euro. La croissance y est faible et devrait le demeurer. L’inflation est sans dynamique et reste trop faiblement modérée pour conduire à des dynamiques d’investissement. La confiance des ménages s’est renforcée dans les enquêtes, mais elle s’est affaissée, car ces ménages continuent d’épargner trop pour les besoins de l’économie. Enfin, les zones de croissance existantes, comme l’Irlande, l’Espagne ou l’Allemagne, sont des zones où les inégalités se creusent, causant les mêmes déstabilisations politiques que la faible croissance ailleurs…

Une situation économique préoccupante
Cette situation est intenable. Sur le plan strictement économique, cette politique est une politique de courte vue qui laisse l’Europe face à un déficit d’investissement préoccupant pour l’avenir, confiant à la seule BCE la gestion de la politique économique de la zone euro. Or, cette dernière ne peut plus rien faire seule, comme l’a confirmé Mario Draghi lors de la réunion du 8 septembre. Sans actions coordonnées des gouvernements, sans vraie relance, la BCE injectera des centaines de milliards d’euros pour empêcher la déflation en créant les conditions d’une future crise financière. Le réflexe consistant à réclamer un respect des règles budgétaires et des « réformes structurelles » conduit à aggraver la menace déflationniste et, partant, joue contre la BCE.

Pire même, ces « réformes » ont partout aggravé les inégalités. Leur échec social alimente la montée des mécontentements et des partis contestataires, y compris à l’extrême-droite. Le FN en France, AfD en Allemagne, le PVV aux Pays-Bas devraient être les grands gagnants des scrutins prévus l’an prochain. Le Brexit n’a, en réalité, été rendu possible que parce que les populations des zones industrielles dévastées du nord de l’Angleterre et du pays de Galles ont voté massivement (par exemple à 65 % à Middlesbrough) en sa faveur. Si l’UE n’est plus capable de montrer son utilité pour ces classes les plus fragiles, elle sera en danger à chaque référendum ou à chaque élection, car si elles ne sont pas majoritaires, ces populations sont souvent décisives. Et, évidemment, en cas de nouvelle crise, la situation deviendra encore plus délicate.

Sur le plan économique, sauver l’Europe consiste donc à trouver un nouveau mode d’action de politique économique et permettre de « protéger » davantage ces populations. Deux éléments qui supposeraient une forte action publique par de vrais plans d’investissement, notamment de réindustrialisation, et une inversion des politiques de « réformes » et de « consolidation budgétaire ». Or, cette double exigence ne semble pas d’actualité.

Division nord-sud
Une des raisons souvent avancée est la traditionnelle division entre « fourmis » du nord et de l’est de l’Europe et « cigales » du sud de l’Europe. Mais la division n’est, en réalité, pas si simple. Certes, la réunion à Athènes, ce vendredi 9 septembre 2016, des sept pays du sud de l’UE s’est terminée sur la demande d’un doublement des moyens attribués au plan Juncker et sur une politique « de promotion de l’emploi et d’amélioration des conditions de vie et des conditions de travail ». Cette demande a immédiatement provoqué une réaction de mépris des ministres des Finances du nord, lors de l’Eurogroupe du samedi soir. Wolfgang Schäuble, le ministre allemand des Finances, a ainsi jugé que « rien d’intelligent ne sort jamais » de ce type de réunion. Ceci prouve assez que les demandes des sept pays ont peu de chance d’être entendues.

Faibles ambitions au sud
Mais, en réalité, ces demandes mêmes semblent trop floues et trop timides pour réellement apporter des réponses à la crise de l’Europe. Il semble désormais établi, comme le soulignait en juin le think tank bruxellois Bruegel, que le plan Juncker est insuffisant et mal construit. Le doubler ne nuirait certes pas, mais il ne saurait apporter le souffle suffisant pour apporter l’air nécessaire à la politique de la BCE. Quant à la « promotion de la croissance », il s’agit du vocabulaire typique de ces sommets européens qui ne décident rien et affichent des objectifs rayonnants sans s’en donner les moyens. Cette réunion d’Athènes n’a pas échoué par le seul mépris de Wolfgang Schäuble, mais aussi parce que les sept pays n’ont pas été capables de fixer un agenda clair et précis de la réforme de l’UE et de la zone euro.

Division au sud
Rien d’étonnant à cela. L’Espagne est sans gouvernement, et son gouvernement en fonction, celui de Mariano Rajoy, ne cesse de prétendre que sa politique d’austérité est à l’origine de la croissance. Comment pourrait-il défendre une position radicalement opposée au niveau européen ? Madrid, qui n’a envoyé à Athènes que son secrétaire d’Etat aux Affaires européennes, est, en réalité, un appui de Berlin en Europe. Ce n’est pas un hasard si, comme l’a révélé El País, c’est Wolfgang Schäuble lui-même qui a refusé toute amende pour déficit budgétaire excessif. Comme la France, l’Espagne soutiendra pour obtenir des sursis de Bruxelles, le maintien du statu quo. Du reste, François Hollande a imposé son agenda sécuritaire à la déclaration commune de la réunion d’Athènes qui réduit l’économie à la portion congrue. Là encore, le président français n’a pas abandonné sa stratégie habituelle, la même que Mariano Rajoy : s’assurer la bienveillance sur ses déficits en laissant à l’Allemagne l’initiative des réformes de la zone euro. Ni Matteo Renzi, qui a parlé vendredi de « l’Europe de la beauté », ni Alexis Tsipras, qui utilise ce sommet pour se refaire une image alors que l’austérité continue de ravager son pays sous sa direction, ne peuvent prendre la tête d’un quelconque « front uni ».

L’alternative est morte en Grèce

En réalité, l’option d’une vraie relance et d’une politique alternative en zone euro n’est simplement plus envisageable parce qu’elle a été refusée avec la plus grande clarté en Grèce voici un an. Les propositions du premier gouvernement Syriza visaient précisément à ouvrir la possibilité d’une politique économique débarrassée des simplismes de l’austérité et du mythe de la « neutralité ricardienne » afin de promouvoir un investissement paneuropéen par le financement de projets de la BEI par la BCE. Ces propositions ont été balayées et la Grèce a ouvertement été punie de son audace. Dès lors, la réflexion économique est forcément bornée en zone euro et dans l’UE, réduisant les outils. Le sommet d’Athènes, comme celui de Bratislava, sont incapables de lever ces tabous imposés en 2015 par les Allemands et leurs alliés avec la complicité des gouvernements français et italiens. L’échec s’annonce d’avance : le 13 juillet 2015, date de l’humiliation d’Alexis Tsipras, ce n’est pas seulement la Grèce, mais aussi l’Europe qui a est sortie perdante.

Rejet de toute « socialisation » des dettes
De fait, toute réforme ambitieuse de l’Europe est exclue. On sait qu’une intégration fédérale est souhaitable en théorie. Mais, en réalité, nul n’en veut. L’Europe de l’est la rejette. La France craint d’y voir un carburant pour le FN. Mais l’Allemagne n’est pas capable de porter ce projet, quoi qu’en dise Angela Merkel. La chancelière a fait du refus de « l’union des transferts » une de ses priorités et la montée de la contestation sur sa droite renforce sa dureté sur ce point : elle ne peut se permettre de prendre le risque de rompre davantage les ponts avec l’électorat conservateur. D’autant que toute avancée vers une Europe fédérale supposera un changement de constitution outre-Rhin. Tout mouvement vers la « socialisation » des dettes est donc exclu, comme le montre le refus du « troisième pilier de l’Union bancaire », la garantie européenne des dépôts bancaires. Mais, plus largement, ce sont tous les efforts pour réduire les excédents allemands qui sont exclus. La proposition Ayrault-Steinmeier du 25 juin, qui prévoyait la fin des « ajustements unilatéraux » des Etats de la zone euro, a ainsi été rapidement mise au placard. Or, sans un tel mouvement vers un effort partagé et une union des transferts, les discours sur davantage d’intégration européenne sont des mots creux. Et les limites de la zone euro ne vont cesser d’apparaître au grand jour, donnant plus de poids aux arguments eurosceptiques.

Crainte des élections
Les gouvernements sont partout paralysés par la crainte des élections. Tout changement de traité – préalable à toute réforme ambitieuse, même si certaines mesures, comme le plan d’investissement européen, peuvent s’en passer – est exclu par cette crainte même d’un référendum perdu. Le Brexit, pour lequel l’argument de la crainte de l’inconnu, jusqu’ici un des piliers les plus solides en faveur de l’UE, n’a pas suffi, a encore renforcé cette peur. De même, les deux plus grands pays de l’UE résiduelle après le Brexit, la France et l’Allemagne votent l’an prochain. L’Italie peut-être aussi après le référendum sur les réformes institutionnelles prévu en octobre où Matteo Renzi a mis son mandat dans la balance. Pourquoi ne pas utiliser ces élections pour porter un projet de renforcement de l’UE et de la zone euro devant les 105 millions d’électeurs français et allemands ? Parce que les dirigeants européens sont persuadés que porter un tel projet devant leurs électeurs conduira à un renforcement des Eurosceptiques aux élections.

Mais ne rien faire conduira évidemment au même renforcement puisque les conditions actuelles jouent dans ce sens. Mais du moins préfère-t-on ne pas tendre le bâton pour se faire battre. La gifle reçue par Angela Merkel aux élections régionales de Mecklembourg-Poméranie Occidentale le 4 septembre dernier a rendu limpide l’issue du sommet de Bratislava : aucune réforme ne sera portée en matière économique et financière. C’est un paradoxe préoccupant, car il traduit en réalité une vision négative de l’Europe de la part des dirigeants actuels qui sont persuadés que placer ce sujet au cœur du débat sera un choix perdant. Aussi préfèrent-ils les incantations de bonne volonté et le maintien d’un statu quo pourtant intenable.

Priorité à la sécurité et au contrôle des frontières
Pour séduire les déçus de l’Europe, les dirigeants européens vont préférer mettre l’accent sur la sécurité et le contrôle des frontières, plaçant ainsi, comme les Eurosceptiques de droite et d’extrême-droite, la question migratoire au centre du problème. C’est ce que laisse entendre l’action de François Hollande au sommet d’Athènes, qui a beaucoup insisté, avec l’Espagne, sur ce sujet, mais aussi le projet de défense commune qui pourrait être engagé. L’espoir est que, en montrant que l’UE agit sur ses domaines, les électeurs déçus de l’Europe et tentés par le vote d’extrême-droite reviendront à l’adhésion à l’Europe. Mais c’est un pari doublement dangereux. D’abord parce que la mauvaise situation économique et le rejet des migrants se nourrissent souvent l’un l’autre et ensuite parce qu’une telle stratégie entre dans la logique des partis d’extrême-droite qui, sur le plan sécuritaire, sont toujours prêts à jouer la surenchère avec succès.

Logique perdante
L’incapacité européenne de dépasser sa logique du rejet de toute action publique pour soutenir directement l’économie réelle, de « politiser l’économie », est donc lourde de conséquence. Elle provoque une incapacité de l’Europe à se donner les moyens de combler le fossé avec une partie de la population qui est cruciale pour sa survie. Cette incapacité entretient la peur de la sanction démocratique, qui paralyse, à son tour, tout projet de réelle réforme et alimente une focalisation sur les questions sécuritaires, là, précisément, où l’extrême-droite veut emmener le débat politique. C’est donc une logique perdante dans laquelle se trouvent l’UE et la zone euro. Et l’origine de cette logique perdante est bien d’origine économique.

 

Europe: Jean-Claude Juncker, toujours aussi crépusculaire

Par Ludovic Lamant publié sur Médiapart le 15/9

Le Luxembourgeois, malmené par le Brexit, a prononcé mercredi à Strasbourg un discours de rentrée en forme de plaidoyer pour une « Europe qui protège ». C’est une première étape pour « réunir l’Europe » menacée d’éclatement après le Brexit, en attendant le sommet de Bratislava vendredi.

Le commissaire européen Pierre Moscovici s’en était pris, la semaine dernière, à « une nouvelle pensée unique, défaitiste et paresseuse [selon laquelle] le projet européen est en train de mourir ». Il s’était vivement opposé, devant des journalistes français réunis à Bruxelles, à ce discours en vogue sur la « sclérose lente » de l’Europe dont se délectent les « populistes » de tout bord, convaincu que l’UE reste « une idée d’avenir ».

À écouter son patron, Jean-Claude Juncker, prononcer mercredi à Strasbourg les premières lignes de son traditionnel discours sur l’état de l’Union, il semble que le « défaitisme » menace de gagner aussi les plus hautes sphères du pouvoir bruxellois. « Je n’ai jamais vu aussi peu de bases communes entre États membres. Et si peu de secteurs dans lesquels ils acceptent de travailler ensemble », a prévenu d’entrée de jeu le président de la Commission, qui navigue pourtant dans les sphères européennes depuis une trentaine d’années.

« Je n’ai jamais vu des gouvernements nationaux à ce point affaiblis par les forces du populisme, et paralysés par le risque d’une défaite lors de prochaines élections », a poursuivi Juncker, alors que la France, les Pays-Bas et l’Allemagne organisent l’an prochain des élections législatives et/ou présidentielle. Le Luxembourgeois a évoqué une « crise existentielle » du projet européen. « Nous respectons et regrettons la décision du Royaume-Uni, mais l’existence de l’UE, en soi, n’est pas menacée », a-t-il toutefois nuancé plus loin, pour couper court aux prophètes de mauvaise augure.

Le patron de la commission, qui a pris la tête en octobre 2014, selon ses propres mots, de la « commission de la dernière chance », est passé maître dans l’art du diagnostic lugubre. Cela n’a pas échappé à Marine Le Pen, qui a raillé cet « éloge funèbre » de l’UE, tandis qu’Harlem Désir, secrétaire d’État aux affaires européennes, a parlé quant à lui d’un « constat lucide de la crise de l’Europe ». En janvier 2016, le Luxembourgeois avait déjà étonné des journalistes en évoquant sans détour les dégâts d’« une Europe en polycrise », en référence tout à la fois au terrorisme, à la crise de l’euro, à la poussée des extrêmes droites ou encore à celle des migrants.

Ces sorties déprimées de Juncker, qui ont le mérite de la franchise, font écho aux propos tenus par Frans Timmermans, numéro deux de la Commission, dans un bref essai publié en septembre en France, Fraternité (éditions Philippe Rey). Le Néerlandais, très proche de Juncker, y va lui aussi de son état des lieux dévastateur : « À cet enchevêtrement de crises, qui touchent spécifiquement, et très durement, la classe moyenne dans le monde occidental, voici que vient s’ajouter maintenant la crise des réfugiés. C’est presque ce qu’on appelle en anglais a perfect storm, une “tempête parfaite”. Toutes les plaies d’Égypte semblent s’être donné rendez-vous. Voilà où nous en sommes. »

Les 45 minutes du discours de rentrée de Juncker étaient très attendues dans la « bulle » bruxelloise. Elles constituent la première étape, dans l’attente du sommet de Bratislava vendredi (où les 27 chefs d’État et de gouvernement se retrouveront, en l’absence de la Britannique Theresa May), pour enclencher une dynamique collective après le séisme du Brexit fin juin. Ce travail de fond – qui reste encore flou – est censé déboucher sur une contribution qui pourrait marquer les esprits, au moment des cérémonies des soixante ans du traité de Rome de mars 1957, ce texte qui avait donné naissance à la Communauté économique européenne (CEE).

Ce discours devait aussi lui permettre de reprendre la main, alors que la commission Juncker a perdu beaucoup de sa splendeur au cours des derniers mois. La crise des réfugiés, et les « quotas » qu’elle a proposés, ont braqué nombre de capitales à l’est. Lors du Brexit, Juncker a été mis directement en cause par certaines capitales, qui ont évoqué sa démission. Quant à ses relations avec la CDU-CSU, le puissant parti conservateur d’Angela Merkel en Allemagne, elles ne sont pas au beau fixe, alors que Juncker plaide pour le maintien de Martin Schulz, un social-démocrate allemand, à la tête du Parlement européen jusqu’à 2019 (Schulz est censé quitter son siège de président à mi-mandat, en janvier 2017, conformément à l’accord de la « grande coalition » entre conservateurs et sociaux-démocrates à Bruxelles).

Sur le fond, Juncker a changé de stratégie, par rapport à son discours bien plus virulent de 2015, devant les mêmes eurodéputés. Il a pris soin, cette fois, de n’évoquer qu’à la marge les sujets qui fâchent, par exemple la relocalisation des migrants (que certains États boudent) ou encore les dossiers très sensibles de libre-échange (préférant, plutôt que de s’appesantir sur les négociations de libre-échange pourtant considérées comme des priorités au sein de la Commission, mais qui cristallisent les oppositions, mettre en avant la lutte contre le dumping dans le secteur de l’acier chinois…). Pas un mot non plus sur le départ de son prédécesseur José Manuel Barroso à Goldman Sachs, Juncker ayant annoncé quelques jours plus tôt qu’il avait enfin demandé l’avis du comité d’éthique interne à la Commission.

Afin de « réunir l’Union », le Luxembourgeois a préféré insister sur les chantiers d’une Europe sociale encore à construire, à même de « protéger » les citoyens : « Il faut nous mettre au travail » pour éviter le délitement de l’Union, a-t-il lancé aux élus, oubliant peut-être qu’il est déjà en poste depuis deux ans. Sur le fond, Juncker, en pro-européen convaincu, continue de miser, sans surprise, sur le renforcement des régulations européennes pour sortir le continent du marasme, quand son partenaire (et concurrent) Donald Tusk, le président du Conseil européen (qui représente la voix des États membres à Bruxelles), n’hésite plus de son côté à parler d’éventuels rapatriements de pouvoir, de Bruxelles vers les capitales, en réponse au Brexit (lire sa lettre d’invitation pour le sommet de Bratislava (pdf, 88.7 kB)). Le débat devrait s’intensifier dans la capitale belge dans les semaines à venir.

« Toute entreprise doit payer ses impôts là où ses bénéfices sont générés »

Voici certaines des priorités pour l’année à venir, plutôt consensuelles, énumérées par Juncker mercredi, censées prémunir l’Europe du risque d’éclatement :

  • Le « plan Juncker » doublé. À l’origine, c’était une enveloppe de 315 milliards d’euros (en fait une vingtaine de milliards d’argent public) qui devait réveiller l’économie européenne et créer des emplois. Mercredi, Juncker a proposé de doubler le fond, pour un total de 630 milliards d’euros d’ici à 2022 (lire notre décryptage de la mécanique du premier « plan Juncker » ici).
  • La lutte contre l’évasion fiscale. « Toute entreprise doit payer ses impôts là où ses bénéfices sont générés », a déclaré Juncker, qui a pourtant dirigé pendant 18 ans un pays très connaisseur des techniques d’« évitement fiscal ». Quoi qu’il en soit, après la spectaculaire décision de la commission sur Apple, qui devra payer 13 milliards d’euros d’impôts à l’Irlande (lire l’article de Dan Israel), il y a de fortes chances pour que l’exécutif européen tente de maintenir cette dynamique constructive. « Nous avons un momentum sur les sujets fiscaux qu’il ne faut pas lâcher », juge de son côté Pierre Moscovici, l’un des commissaires chargés du dossier, qui devrait présenter de nouveaux textes sur le sujet à l’automne.
  • La flexibilité du « pacte de stabilité ». Juncker est revenu entre les lignes sur sa décision, durant l’été, de ne pas sanctionner l’Espagne et le Portugal, qui sont pourtant largement hors des clous des sacro-saints déficits publics. « Nous devrions essayer de soutenir, et non de punir, ceux qui s’efforcent d’accomplir des réformes », a-t-il dit, s’en prenant à certaines capitales (Berlin et ses alliés) qui feraient une lecture « dogmatique » des règles budgétaires. En interne, le sujet continue de diviser les commissaires (ils sont cinq à plaider pour des sanctions, contre une vingtaine sur la ligne Juncker plus souple, dont Moscovici).
  • La révision de la directive sur les travailleurs détachés. Juncker a réaffirmé la nécessité d’avancer, même s’il sait le terrain miné, sur ce dossier très sensible en France comme en Allemagne à l’approche des élections. La commissaire aux affaires sociales, Marianne Thyssen, a décidé cet été d’ignorer une première « alerte » des pays d’Europe centrale et orientale, qui sont eux très opposés au texte. Le dossier va faire son entrée, cet automne, au Parlement européen (lire notre article).
  • Moins de bureaucratie. La politique du « mieux réguler » (better regulation, dans le jargon), martelée par Juncker et son numéro deux Timmermans depuis l’automne 2014, reste une priorité. Mais elle est toujours aussi contestée par ses nombreux adversaires, en particulier chez les eurodéputés, qui y voient surtout une manière de vider l’activité du Parlement européen, voire de renforcer la dérégulation à travers l’Europe… Sur ce point, Juncker semble décidé à ne pas changer de cap (lire notre enquête)
  • Vers une Europe de la défense? Juncker a fait allusion à une disposition du traité de Lisbonne, qui autorise la mise en commun de certaines des capacités de défense des États membres. Le Luxembourgeois n’a fait que reprendre une idée déjà avancée par le couple franco-allemand en septembre, et qui pourrait être débattue lors du sommet de Bratislava.

Il reste, si Juncker veut être crédible, à concrétiser au plus vite certaines de ces annonces. Au-delà des discours, les Européens exigent désormais des « preuves d’amour » concrètes, selon l’expression de l’eurodéputée socialiste Isabelle Thomas. Juncker va devoir en donner, s’il ne veut pas rester associé à ses seules sorties déprimées et lucides sur le marasme européen.

Sur les réfugiés

Sont retracés dans sur cette page quelques articles sur la situation des réfugiés

17/9  Des gilets de sauvetage à New York pour le premier sommet sur les réfugiés

 http://www.lefigaro.fr/international/2016/09/17/01003-20160917ARTFIG00094-des-gilets-de-sauvetage-a-new-york-pour-le-premier-sommet-sur-les-refugies.php

16/9 Migrants. Grèce : polémique autour de l’emprisonnement d’un “passeur” allemand 

http://www.courrierinternational.com/article/migrants-grece-polemique-autour-de-lemprisonnement-dun-passeur-allemand

16/9 Europe: Merkel enterre les «quotas» de réfugiés 

http://www.lefigaro.fr/international/2016/09/16/01003-20160916ARTFIG00394-europe-merkel-enterre-les-quotas-de-refugies.php

15/9 Revue de la presse hellénique

Le Journal des Rédacteurs note un « effet domino » des réactions à Oreokastro contre l’intégration d’enfants réfugiés dans les écoles grecques avec l’apparition de phénomènes de racisme et de xénophobie dans d’autres régions de la Grèce. Sur l’île de Lesbos, le directeur d’une école (et proche collaborateur d’un ancien ministre de la Nouvelle Démocratie) appelle à créer un mouvement de citoyens contre la « musulmanisation » de Lesbos. Par ailleurs des incidents à caractère raciste et xénophobe se sont produits sur l’île de Chios à l’instigation de manifestants d’extrême droite. La presse (Kathimerini, Ta Nea, Avghi, Le Journal des Rédacteurs) relève que la procureur de Thessalonique, Mme Kakali a ordonné une enquête préliminaire sur les incidents à Oreokastro afin d’examiner d’éventuels délits relevant de la loi sur la violence raciste. Par ailleurs, le ministre de l’éducation, M. Filis, a invité la Nouvelle démocratie à prendre position en rappelant l’orientation ND du maire d’Oreokastro. Ta Nea et Avghi reprennent le message publié par le Premier ministre grec sur Twitter : « La Grèce incarne la solidarité de l’Europe envers les réfugiés. La réaction de certaines associations de parents d’élèves et du maire d’Oreokastro n’est pas conforme à la position de la Grèce et ne contribue pas aux efforts déployés pour faire face à la crise des réfugiés ».

15/9 Grèce : manifestation anti-réfugiés sur une île émaillée de violences

http://www.lorientlejour.com/article/1007254/grece-manifestation-anti-refugies-sur-une-ile-emaillee-de-violences.html

6e partie et fin de l’entretien « Généalogie des Politiques de l’anti-dette et du CADTM »

Publié sur le site du CADTM le 13/9  La Commission pour la vérité sur la dette grecque, la capitulation du gouvernement de Tsipras et les perspectives internationales pour la lutte contre les dettes illégitimes

Entretien avec Éric Toussaint, porte-parole et un des fondateurs du réseau international du Comité pour l’Abolition des Dettes illégiTiMes (CADTM). Propos recueillis par Benjamin Lemoine |1|

Cet entretien fait la généalogie de la lutte anti-dette, des plaidoyers pour son annulation, comme de la création empirique, au service des combats politiques, des concepts d’« illégitimité », « d’illégalité », ou du caractère « odieux » des dettes publiques.

6e partie et fin de l’entretien « Généalogie des Politiques de l’anti-dette et du CADTM »

http://www.cadtm.org/Grece-La-Commission-pour-la-verite

Tsipras déplore les divergences entre l’UE et le FMI

par George Georgiopoulos pour Capital

Les divergences entre le Fonds monétaire international (FMI) et l’Union européenne (UE) sur la gestion de la dette sont préjudiciables à la Grèce, a déclaré dimanche le Premier ministre grec Alexis Tsipras.

Estimant que la dette, qui représente plus de 170% du PIB, n’est pas seulement un problème grec mais « européen », Tsipras a dit que les investisseurs éviteront le pays tant que les deux organes ne se mettront pas d’accord sur les moyens de la restructurer.

« Pour moi, ce qui crée les conditions d’un retard pour ce qui est de regagner la confiance des marchés et des investisseurs (…) c’est le désaccord et les accrochages permanents entre le FMI et les institutions européennes », a dit le Premier ministre en conférence de presse.

Le FMI n’a toujours pas décidé s’il participerait à un troisième plan de renflouement de la Grèce, n’étant pas persuadé que la dette du pays soit gérable et que ses objectifs budgétaires soient réalisables.

Le ratio grec de la dette au PIB est le plus élevé de la zone euro.

Les divergences d’opinion des créanciers empêchent l’incorporation de la dette grecque dans le programme d’assouplissement quantitatif (QE) de la Banque centrale européenne (BCE), a poursuivi Tsipras.

La BCE a dit qu’elle ne pouvait déterminer la date à laquelle elle pourrait racheter de la dette grecque et que la Grèce devait subir une analyse relative à la gestion durable de sa dette avant que cela soit envisageable.

Les ministres des Finances de l’Union européenne ont réclamé vendredi une accélération des réformes convenues dans le cadre de l’accord de renflouement conclu en 2015, prévoyant une aide financière de 86 milliards d’euros jusqu’en 2018 en échange desdites réformes.

L’Eurogroupe a déjà accepté en mai le versement d’une tranche de 10,3 milliards d’euros, dont 7,5 milliards ont déjà été transférés, le solde devant l’être d’ici la fin octobre sous certaines conditions.

Tsipras a dit que la Grèce avait déjà accompli 70% des réformes exigées dans le cadre du plan de renflouement.

(Wilfrid Exbrayat pour le service français)

Translate »