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Communiqué de SOS MEDITERRANEE

Les personnes rescapées à bord de l’Ocean Viking doivent débarquer de toute urgence dans un lieu sûr

Depuis le lundi 14 février, l’Ocean Viking attend qu’on lui assigne un lieu sûr où débarquer les 247 personnes rescapées à son bord. Alors que leur état de santé se dégrade en raison du mauvais temps, et en dépit des cinq demandes adressées à ce jour aux autorités maritimes compétentes, aucune instruction pour un port de débarquement n’a été envoyée à l’Ocean Viking

Les 247 personnes qui étaient en détresse en mer ont été secourues le week-end dernier et au début de cette semaine lors de cinq opérations distinctes en moins de 36 heures par l’Ocean Viking, le navire humanitaire affrété par l’organisation européenne de recherche et de sauvetage SOS MEDITERRANEE et opéré en partenariat avec la Fédération internationale des Sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge (FICR).

Michele Angioni, coordinateur de la recherche et du sauvetage pour SOS MEDITERRANEE sur l’Ocean Viking, affirme : « Il y a plusieurs jours, nous avons effectué cinq sauvetages en moins de 36 heures en eaux internationales, dans les zones de recherche et de sauvetage maltaise et libyenne, sans aucune coordination des autorités maritimes, malgré de nombreux messages et appels de notre part. Après ce week-end intense, nous avons traversé une tempête avec des vagues allant jusqu’à quatre mètres et des vents atteignant 30 nœuds (plus de 55 km/h) ».

Parmi les 247 personnes secourues, on compte 53 mineur.e.s non accompagné.e.s ainsi qu’un bébé de cinq mois. Certaines des personnes rescapées présentent des marques de torture, comme Amath*, 19 ans, originaire du Sénégal, parti en Libye avec son frère alors qu’il n’avait que neuf ans. Il a expliqué avoir quitté le Sénégal il y a dix ans pour trouver du travail en Libye. Emprisonné à dix reprises dans un centre de détention libyen, il a fréquemment été battu par des gardiens ou des policiers : il en garde de nombreuses cicatrices partout dans le dos. Le jeune homme rapporte aussi avoir été blessé par balle à la jambe alors qu’il tentait de s’échapper.

« Une fois les personnes secourues ramenées en sécurité à bord de l’Ocean Viking, nous avons soigné des cas d’inhalation des vapeurs de carburant, de brûlures dues au mélange, très corrosif, d’eau de mer et de fuel, ainsi que des infections cutanées » expose Johanna Jonsdottir, infirmière de la FICR.

« Depuis, les personnes rescapées souffrent de mal de mer et de la déshydratation qui en résulte, de maux de tête et de nausées. Nous constatons également que l’état psychologique des personnes s’aggrave face à l’impasse dans laquelle nous nous trouvons en pleine mer. Certains ont des blessures anciennes, comme des brûlures, des entorses à la cheville et des blessures par balle, d’autres souffrent de douleurs au dos après avoir été battus », ajoute Eila Rooseli, médecin de la FICR.

De nombreuses personnes secourues par nos équipes leur ont confié que le seul moyen de s’échapper de Libye était de risquer la dangereuse traversée de la Méditerranée centrale dans une embarcation pneumatique en mauvais état. Ceci, alors même qu’elles en connaissaient les dangers.

Selon le droit maritime, un sauvetage n’est formellement achevé que lorsque les personnes secourues sont débarquées dans un endroit où leur vie n’est plus menacée, et que leurs besoins fondamentaux sont satisfaits. Trop souvent, les rescapé.e.s doivent subir de longues attentes sur les navires de sauvetage avant d’être autorisé.e.s à débarquer.

« L’absence de coordination SAR [de recherche et de sauvetage] et d’un mécanisme de débarquement prévisible met en danger la vie et la santé des personnes rescapées depuis plusieurs années maintenant. Cela ne peut plus être la norme. Un navire n’est pas adapté et ne peut en aucun cas être un lieu où retenir des personnes naufragées. Nous avons besoin d’un port sûr pour que ces femmes, ces hommes et ces enfants puissent débarquer sans plus attendre » a conclu Michele Angioni.

  * Les noms ont été modifiés pour protéger l’identité des personnes qui témoignent.

Crédit photo: Claire Juchat / SOS MEDITERRANEE

Source https://www.sosmediterranee.fr/journal-de-bord/CP-18-02-2022-POS-247

La Grèce, laboratoire des solidarités et de la répression

« Un archipel des solidarités » propose une réflexion sur « un autre possible politique », en éclairant la force du « Nous » dans la diversité géographique de la Grèce. Des « luttes communes » qui font face à des mesures globales destructrices. Entretien avec la co-autrice de cet ouvrage, Christiane Vollaire.

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Nicolas Richen – Vous défendez une « philosophie de terrain ». En quoi cela consiste dans la pratique ?

Christiane Vollaire – Une philosophie de terrain, c’est un travail philosophique qui s’appuie sur une expérience de présence dans des espaces et de rencontre avec des personnes. Dans ma démarche, il s’agit de philosophie politique critique. Un travail théorique se fait en amont, pour élaborer le projet et orienter initialement la réflexion. Mais cette orientation elle-même pourra être remise en cause par l’expérience du terrain. Et, ensuite, le décryptage des entretiens constitue lui-même une expérience spécifique de réflexivité qui va nécessairement infléchir ou réorienter le projet initial. Les entretiens constituent ici le matériau central de la réflexion philosophique, et les rencontres avec les acteurs du terrain en sont le moteur. Le travail final tel qu’il se présente est bien un travail philosophique et conceptuel, mais il est entièrement tissé de la parole des sujets rencontrés qui sont explicitement cités, en même temps que des références philosophiques (mais aussi sociologiques, anthropologiques ou historiques) qui permettent de l’étayer. L’idée est que ce travail vise un public le plus large possible : non pas seulement des philosophes ou des chercheurs, mais aussi des militants, des associatifs et un public soucieux d’un éclairage sur les réalités politiques contemporaines, pour lequel le point de vue journalistique peut s’avérer, selon les médias de masse en particulier, insuffisant ou manipulateur. J’ai présenté les éléments de théorisation de cette position dans l’ouvrage Pour une Philosophie de terrain, publié en 2017 aux éditions Créaphis.

NR – Qu’est-ce qui vous a amenée à venir en Grèce avec Philippe Bazin ? D’où vient cette idée de documenter les solidarités ?

CV – Je travaille en collaboration avec le photographe Philippe Bazin, auteur du livre Pour une photographie documentaire critique publié en 2017 chez le même éditeur. Nos positions sont donc équivalentes dans nos deux domaines de création et de recherche. Et nos publications associent le travail philosophique et le travail photographique, combinés sur les mêmes terrains depuis une vingtaine d’années. Essentiellement en Europe (Balkans, Pologne, Turquie, Bulgarie, Grèce, et, plus récemment, en France) ; mais aussi Afrique du Nord (Égypte) et Amérique latine (Chili). L’ensemble du travail se fait autour des processus de globalisation et de leurs effets en termes de revendications, de protestations et d’affrontement aux politiques financières et à leurs effets destructeurs en termes de logement, de droit du travail et de politiques migratoires. La question des solidarités est donc pour nous un point essentiel de cet affrontement : le principe de solidarité n’est pas un principe d’assistanat, mais un motif d’exigence de luttes communes.

Nous avons décidé d’un terrain en Grèce en 2017, parce que la Grèce nous semblait emblématique de cette communauté des luttes, face à la violence économique imposée par la troïka des banques européennes et mondiales depuis les années 2010. Nous avions d’abord ciblé les dispensaires de santé solidaires créés par des acteurs de santé en autogestion, à Thessalonique en particulier. Et c’est pour en rencontrer les intervenants que nous sommes venus en Grèce. Mais entrer sur le terrain grec nous a ouvert l’accès à d’autres formes de solidarité et de luttes communes qui ont considérablement élargi le terrain : lutte pour la pérennisation de l’usine autogérée de Viome à Thessalonique, lutte contre l’ouverture de la mine d’or de Skouries en Chalcidique ; travail associatif dans les quartiers, pour la distribution de nourriture et de produits de première nécessité. Bref, ce premier terrain à l’été 2017 avait déjà pris plus d’ampleur que nous ne l’avions prévu au départ. Il s’est ouvert en même temps sur la question des migrations, nous imposant de revenir en 2018, cette fois sur l’île de Lesbos au cœur de cette problématique puisqu’en vis à vis de la côte turque. D’autres types de solidarité sont mises en œuvre dans ce cadre : une autre disposition de l’affrontement au néolibéralisme, dans les formes policières de la chasse aux migrants.

NR – La Grèce semble à la fois être un laboratoire des solidarités (et de diverses expérimentations socio-politiques) et un laboratoire du capitalisme du désastre, des « politiques globales destructrices » comme vous le dites. Quels exemples illustrent pour vous le mieux ces deux versants ?

CV – Ces exemples sont précisément ceux qui ont justifié le nom de ce livre, dans sa dimension à la fois métaphorique et géographique : Un Archipel des solidarités. Les îles, comme terres émergées d’une série d’archipels, constituent la réalité géopolitique de ce qu’on appelle « la Grèce », qui est loin de se réduire au continent, et encore moins aux métropoles d’Athènes ou de Thessalonique. Un chapitre du livre s’intitule « Politiques solidaires et politiques policières », et il porte précisément sur les îles. Non seulement Lesbos, mais deux îles particulièrement antagonistes dans leur histoire : Icaria et Makronissos. Sur l’île d’Icaria, au moment de la guerre civile (1946-49), les opposants politiques de gauche ont été déportés par le pouvoir fasciste mis en place par les Alliés après la Deuxième Guerre mondiale. Mais la population de l’île (essentiellement des paysans et des pêcheurs) les a majoritairement accueillis non comme des réprouvés, mais comme des hôtes, les a soutenus et protégés de la police, de l’armée et de la gendarmerie. En échange, les déportés ont apporté aux habitants leurs compétences, en matière d’éducation et de santé en particulier. Makronissos, au contraire, île déserte, sans point d’eau et exposée aux vents, a été le lieu emblématique de la répression policière et un laboratoire de la violence politique. C’est là que le pouvoir fasciste, soutenu par les pouvoirs anglais et américain, a édifié un camp de « redressement » politique ; c’est-à-dire, de fait, de terreur, de torture et d’extermination des opposants de gauche. Le terme même de laboratoire a été utilisé en particulier par le général américain Van Fleet qui a, au sens propre du terme, expérimenté sur le territoire grec les premières bombes au napalm pendant la guerre civile. Au contraire, pendant la Deuxième Guerre mondiale, les villages conquis par les andartes (résistants grecs) devenaient des lieux d’expérimentation de politiques sociales dans les formes d’une « laocratie » (laos en grec signifiant le peuple au sens populaire du terme, contrairement à « démos » qui le présente dans une dimension plus élitiste). On retrouve ces deux tendances antagonistes dans le monde grec contemporain, tel qu’il est issu de cette filiation.

NR – Vous parlez de la « puissance du commun ». Vous vous attendiez à une telle force des réseaux de solidarité et à une telle pluralité des formes de lutte en Grèce ?

CV – Nous avons été très impressionnés par cette tradition du commun en Grèce, dont je viens de vous donner quelques exemples historiques. Elle est beaucoup plus étendue, multiforme et profondément enracinée dans la culture grecque, que nous ne pouvions l’imaginer au départ. Il y a comme une sorte d’éducation à la solidarité, qui s’est forgée précisément dans les années les plus noires (celles de la guerre civile en particulier). Et la transmission en est très forte. Il ne s’agit nullement d’une transmission biologique, mais bien plutôt d’une éducation politique, souvent acquise dans la clandestinité. Le quartier d’Exarchia, à Athènes, en témoigne : quartier de tradition anarchiste et internationaliste, qui a abrité nombre d’opposants pendant la guerre civile, et s’est avéré depuis un quartier général des luttes. En 2008 par exemple, quand un adolescent y a été tué par la police, faisant du quartier un véritable ferment de la lutte contre la destruction du commun, et par là même de l’affrontement à la violence policière. Entre 2013 et 2020, des militants du quartier ont créé Omnia TV, une chaîne de télévision qui a rendu compte au jour le jour du procès fleuve contre le parti fasciste Aube dorée, qui a fini par être condamné comme organisation criminelle.

Mais, comme le montre à l’inverse la puissance d’Aube dorée, il y a tout autant une prégnance terrifiante des idéologies fascistes, véhiculées au pouvoir pendant des années (dictature de Metaxas en 1936, dictature des colonels de 1967 à 1974). Et cette tradition-là ne peut pas être ignorée : non seulement elle a été au pouvoir dans ces années-là, mais, même en-dehors de ces années, elle continue d’irriguer les sphères du pouvoir (le parti de droite dure actuellement au pouvoir, Nea Dimokratia, en est largement influencé et infiltré). En dépit d’une telle force, et en dépit des persécutions, on ne cesse de voir à tous les niveaux ce que j’appelle un « retour du refoulé solidaire », dans les luttes pour le commun politique.

NR – Vous dites que cette notion de « commun » permet parfois de dépasser les catégories nationales (Grecs contre réfugiés). Y a-t-il une initiative ou un témoignage qui vous a marqué à cet égard ?

CV – Deux exemples en sont particulièrement significatifs, concernant les réfugiés. À Athènes, le City Plaza, grand hôtel abandonné par ses propriétaires et réapproprié par un collectif militant, a fonctionné de 2016 à 2019 sur un mode autogestionnaire de partenariat entre Grecs et réfugiés, donnant ainsi son plein sens au mot de «solidarité»: la conscience de défendre des intérêts communs à l’encontre des dirigeants politiques. Le lieu a décidé lui-même de sa fermeture au moment du retour au pouvoir d’une droite dure en 2019.

À Lesbos, le dispensaire autogéré de Pikpa a fonctionné sur un mode similaire, jusqu’à ce que le même pouvoir politique décide arbitrairement de sa fermeture. Il constituait une alternative majeure au camp de Moria, qualifié par Jean Ziegler de « honte de l’Europe ». Dans cet espace de vie commune, il n’y avait ni police ni vigiles, et les réfugié s’y sentaient pourtant en pleine sécurité, dans le temps où le camp de Moria, objet d’une gestion policière organisée par l’armée grecque, était le lieu de suicides d’enfants liés au trafic sexuel.

De fait, plus la gestion est horizontale, plus la protection des personnes est assurée, à l’encontre d’une gestion verticale et sécuritaire qui la met en péril. Les politiques d’encampement (pour reprendre le terme employé par l’anthropologue Michel Agier) ne sont rien d’autre que des politiques de domination visant à réduire les réfugiés à la position d’assistés. Dès lors au contraire que l’espace de vie et d’hébergement est autogéré, la rupture avec la verticalité du pouvoir est un facteur de responsabilisation commune. Mais il montre clairement que le clivage n’est nullement entre nationalités différentes, mais bien plutôt entre dirigeants et dirigés ; et que si l’on peut parler, comme le montre le philosophe Grégoire Chamayou, de « société ingouvernable », c’est précisément au sens où les gouvernants sont devenus insociables. La solidarité entre exilés et « sédentaires » (toujours eux-mêmes descendants plus ou moins lointains d’exilés) reconfigure ainsi les véritables clivages politiques.

« L’isolement alimente la mort, la solidarité alimente la vie. » Kypseli (Athènes), juillet 2021. Photo: Nicolas Richen

NR – Votre ouvrage laisse largement la parole aux acteurs de ces solidarités. Quelles sont les rencontres qui vous ont le plus marquée ou bousculée ?

CV – Chaque rencontre est, à vrai dire, une forme de bousculade : la parole des solidaires est puissante. Certains ont un charisme spécifique : Konstantinos Polychronopoulos, qui a créé la cuisine solidaire « O Allos Anthropos », est de ceux-là. Passé d’une carrière réussie dans le marketing, au moment brutal où il s’en est fait jeter comme un kleenex, c’est par cette expérience de la dégradation sociale qu’il a entamé sa réflexion politique. Et c’est par le concret d’une cuisine partagée qu’il y est venu. Un parcours extrêmement pragmatique : je fais un tour sur le marché comme unique sortie, dans la dépression noire où je suis enfermé, j’y propose un sandwich à une vieille dame pauvre qui le refuse. Je me fais une tambouille par terre sur un réchaud de fortune, et là, elle vient la partager avec moi. Je sais que ce geste-là, de cuisiner ensemble, est plus signifiant, et au final plus authentiquement nourrissant, qu’une aumône. Et en pleine dégradation sociale du pays, je vais produire ce geste d’une manière démultipliée. Et proposer au HCR ce mode de partage de la cuisine infiniment moins coûteux et mille fois meilleur que les barquettes plastifiées de nourriture avariée distribuées dans les camps par l’équivalent de la Sodexo. Ce sera un refus. Et là, je comprends la dimension « cannibale » des organismes internationaux et j’étends mon réseau d’intervention avec des équipes motivées. Une autre rencontre, avec une enseignante en biologie, parfaitement pacifique et pondérée, qui se déclare « en guerre » en prenant conscience de la violence économique par sa propre mise en retraite forcée avant l’âge.

Une autre expérience de la dégradation sociale, qui la pousse à venir travailler au dispensaire de santé solidaire d’Elliniko dans un quartier d’Athènes. Elle le transformera en un lieu de référence pour toute la Grèce. À chaque fois, une expérience de la colère politique devient le motif d’une décision sans appel qui ouvre l’individuel sur le collectif et fait entrer délibérément dans un engagement sans faille. Une puissance de radicalisation au sens le plus noble du terme, avec des effets majeurs sur le commun.

NR – Les mouvements de luttes ont eu tendance à s’affaiblir avec l’arrivée au pouvoir de Syriza et la signature du 3e mémorandum. Le retour aux affaires de Nouvelle Démocratie en 2019 a quant à lui accentué le virage ultra-sécuritaire du gouvernement. Entre le début et la fin de votre de votre terrain, quelles différences majeures avez-vous noté dans les dynamiques de lutte ?

CV – Nous avons commencé ce terrain grec en 2017 (sous le gouvernement Syriza) et l’avons terminé en 2020 (sous le gouvernement de la Nea Dimokratia). Dans les dynamiques de lutte, nous n’avons perçu aucune différence. Les différences ont été dans le débridement des violences auxquelles elles s’affrontent. Mais ce qui avait déjà impacté négativement les dynamiques de lutte avant 2017 était bien antérieur à l’arrivée au pouvoir de la droite (qui les a souvent au contraire ravivées). C’était, deux avant notre arrivée sur le terrain, la trahison des dirigeants de Syriza, signant un nouveau memorandum (c’est-à-dire un pacte de soumission à la financiarisation mondiale) dans le temps même où un referendum populaire venait de les soutenir dans leur opposition.

Beaucoup de Grecs, qui n’étaient nullement des militants, s’étaient mobilisés, sur l’injonction de Syriza, pour répondre « non » au referendum, c’est-à-dire non aux injonctions de la troïka des banques, refusant ainsi clairement les politiques dites « d’austérité » (c’est-à-dire de sabordage des acquis sociaux) auxquelles on prétendait les soumettre. Et ce « non » avait obtenu plus de soixante pour cent des voix. La volte-face d’un pouvoir politique réputé de gauche, ne faisant pas suite à ce soutien et ne respectant pas son propre engagement, a totalement désorienté aussi bien les militants que ceux qui ne l’étaient pas, et s’étaient pourtant lancés dans la bataille. Et une telle perversion est beaucoup plus égarante que la violence de la droite. Des militants dans l’âme (les ouvriers de l’usine Viome, par exemple) tentaient de ne pas s’opposer de front à ce pouvoir qui les avait trahis, mais dont ils savaient que ses décisions seraient encore un moindre mal par rapport à celles d’un pouvoir de droite. Et ce chantage-là – celui du « moindre mal » – constitue actuellement la norme des régimes prétendument démocratiques. Une fois de plus, sur ce point, la Grèce est un laboratoire.

NR – Dans l’idéal politique de Castoriadis, une société autonome repose sur la participation de toutes et tous et la fin de la distinction dirigeant-dirigé. Les mouvements de solidarité et d’autogestion en Grèce font face au risque d’hétéronomisation. Je pense à « l’ONGisation » de résistances informelles, de Mitsotakis qui s’affiche dans une cuisine sociale en plein confinement ou encore à la Mairie d’Athènes qui prétend mettre en place des « politiques de solidarité », un terme pourtant utilisé par les mouvements communistes et anarchistes depuis des décennies en Grèce. Qu’est-ce que tout cela vous évoque ?

CV – Il y a deux problématiques différentes dans votre question : celle de l’autonomie politique, telle qu’elle s’exprime dans la pensée de Castoriadis ; et celle de la perversion du langage, telle qu’elle s’exprime dans le néolibéralisme contemporain.
Pour ce qui concerne la pensée de Castoriadis, d’abord, il est important de noter les conditions de sa naissance : sur le territoire turc, de parents grecs qui ont fui la Turquie l’année même de sa naissance qui coïncidait avec ce que les Grecs appellent la « grande catastrophe » de 1922 : la défaite de la Grèce face aux Turcs, qui les ont de ce fait chassés violemment. À l’âge de 23 ans, en décembre 1945, jeune philosophe trotskyste, il quittera en urgence le territoire grec pour fuir les persécutions des fascistes contre les opposants de gauche. Après cette date, où il se réfugie en France, il ne reviendra jamais vivre en Grèce, jusqu’à sa mort en 1997. Ce qui définit la pensée de Castoriadis, c’est la question du possible politique. Et c’est ce qui motive son ouvrage central,
L’institution imaginaire de la société. Ce possible politique est celui d’une autonomisation des sujets par rapport à leurs directions politiques. En fondant, avec Claude Lefort, le groupe « Socialisme ou barbarie », il vise à opposer la profondeur de la pensée communiste à sa trahison par le stalinisme. Car de fait, la Grèce des accords de Yalta est un pays où les militants de gauche ont été littéralement livrés aux fascistes par les cadres du parti communiste, trahis eux-mêmes par la politique stalinienne. Cette complexité sous-tend la revendication d’un imaginaire social visant à s’instituer dans un réel qui lui refuse sa place. Et ce refus est toujours lié à des formes de verticalisation du pouvoir, qu’elles soient fascistes ou staliniennes … ou, actuellement, néolibérales.

Revendiquer la puissance d’un imaginaire social, c’est revendiquer au contraire son horizontalisation dans des formes d’autonomie politique. La puissance du mouvement anarchiste, en Grèce et dans les Balkans, en atteste actuellement. C’est ici que prend place la question de la perversion du langage. Et le terme de solidarité est en butte, lui aussi, à cette perversion. Au début de l’Archipel, je me réfère aux origines du mot, qui sont d’ordre économico-juridique à l’époque romaine ; puis deviennent proprement politiques à sa seconde naissance, contemporaine de la Révolution française et de l’instauration d’une République. Tout système républicain ne peut se légitimer qu’en prétendant à la solidarité : c’est ce que Durkheim appelle, dans De la Division du travail social, la « solidarité organique ». Celle qui fait de chacun l’instrument de la cohérence d’une société dans son ensemble. Mais la pensée de Marx, au contraire, a mis en évidence la dimension conflictuelle de la construction d’un ordre social, dans les dynamiques de la lutte des classes. Tout système de gouvernementalité tendra alors à occulter cette dimension conflictuelle dans une volonté d’hégémonie, mettant en place des rapports de domination qui se réclament pourtant d’une cohésion solidaire. La question humanitaire est au cœur de cette problématique, en faisant de l’assistance un moteur de la vie sociale, et en maintenant par là les rapports de surplomb : une forme de verticalité qui se réclame de la « bienveillance » … ou, tout simplement, ce que Kant nommait le « paternalisme ». Ce que vous nommez «ONGisation des résistances informelles» en est un exemple. C’est ce qu’on peut appeler l’humanitarisation du politique, qui est une des données du néolibéralisme contemporain dans son versant euphémisé. C’est, de fait, l’option antagoniste d’une authentique politique de solidarité, qui suppose d’abord une reconnaissance de l’égalité. Défendre cette solidarité authentique contre ses perversions est précisément l’objet de notre livre, dont une section est consacrée à la question humanitaire.

NR – Dans votre 3e chapitre, vous dressez des parallèles entre les luttes passées (contre la monarchie, le fascisme et l’impérialisme britannique et états-unien) et les luttes du présent. Vous pouvez nous expliquer pourquoi cette articulation entre passé et présent vous est apparue centrale ?

CV – Un des éléments centraux de notre travail, à Philippe et moi, est la contextualisation non seulement des luttes, mais des systèmes de domination. Contextualisation à la fois géographique et historique. Contextualiser, c’est se donner les moyens de saisir les tenants et les aboutissants, c’est-à-dire les moyens de l’analyse. L’image photographique procède de cette contextualisation, au même titre que le discours théorique. Dans le monde médiatique contemporain, c’est précisément cette contextualisation qui manque. Et les politiques éducatives dominantes tendent à l’effacer, comme le montre très clairement, en particulier, la déstructuration de l’enseignement de l’histoire dénoncée par de nombreux enseignants. Chaque événement semble ainsi surgi de nulle part, et l’ « événementiel » est désormais au cœur des politiques culturelles, qu’elles se traduisent dans la transmission enseignante, dans les choix cinématographiques ou dans les représentations de l’actualité. Or, posant la question « Qu’est-ce que notre actualité ? », Foucault montrait au contraire comment elle est profondément ancrée dans ses propres généalogies, et c’est à ce travail généalogique qu’il se livrait.

L’histoire grecque est profondément liée à l’histoire de l’Europe, mais pas dans le sens où on l’entend ordinairement. Le sujet cultivé moyen est supposé s’extasier sur un siècle d’histoire grecque, ou plutôt d’histoire athénienne (le Ve av. JC), comme s’il avait fait matrice de toute l’histoire européenne, et en particulier de cette fameuse « démocratie » dont l’Europe néolibérale se revendique pour se légitimer par le « libéralisme ». Mais dans la Grèce contemporaine, la culture de la Grèce antique est précisément revendiquée par les fascistes : celle de la brutalisation du pouvoir politique à Spartes.

Et, indépendamment de toutes les reconstructions mythiques dont la Grèce fait l’objet, la Grèce contemporaine est bel et bien issue de la modernité, bien plutôt que de l’Antiquité, ayant transité par la période médiévale de la culture byzantine, au fondement de la culture orthodoxe contemporaine, majoritaire et économiquement dominante sur le territoire grec.

La révolution grecque de 1821, contre un empire ottoman défaillant, est soutenue et portée par les puissances européennes, et la Grèce naît dans l’esprit des États-nations émergeant au XIXe siècle. Dans l’esprit, et avec les finances. Et ce sont précisément les premières occurrences d’une rhétorique de la « dette ». Au cœur de ce double langage, qui associe la liberté révolutionnaire à l’assujettissement financier, se trouve la problématique même de la notion de peuple : le peuple, est-ce la dimension populaire du « laos » ou le pouvoir bourgeois tel qu’il s’instaure comme « démos » ? La même problématique se retrouvera dans la période de résistance au nazisme, où les andartes devront combattre sur deux fronts : celui de la résistance au nazisme et celui de la promotion des valeurs sociales. Sur le premier front, les Anglais sont leurs alliés (avec beaucoup d’ambivalence toutefois) ; sur le second, ils deviendront, sans aucune ambiguïté, leurs ennemis. Mais c’est ce second front, on l’a vu, qui va accoucher des solidarités contemporaines.

NR – Alain Damasio appelle à construire « une pluralité d’îlots et d’archipels » pour renverser le capitalisme. L’imaginaire politique que développe cet écrivain vous a-t-il inspiré ?

CV – Je ne connais pas assez le travail de Damasio pour vous répondre. Mais généralement, je suis beaucoup plus inspirée par les essais que par la littérature. À mes yeux, la réalité dépasse toujours la fiction et c’est elle qui suscite le plus la puissance de l’imaginaire. La photographie documentaire, le cinéma documentaire, sont pour moi des sources d’inspiration constantes, comme l’est le terrain dans sa rude réalité, dans les déceptions et les enthousiasmes qu’il suscite. Voir les photographies de Philippe après avoir vécu un terrain commun est une source d’étonnement sans fin. S’il me montre ses photos de notre propre quartier, j’entre dans un monde étrange que je redécouvre. J’ai les mêmes sensations vertigineuses au retour de n’importe quel terrain. Le décryptage lui-même est une source de redécouvertes constantes, dont participe, au retour des entretiens, la découverte des portraits d’entretien. La représentation du réel, la manière dont elle le côtoie et s’en distancie en même temps, crée des espaces féconds pour l’imagination. Et c’est ce qui me fait refuser l’image-choc du reporter-standard, dont l’accroche immédiate est à mille lieux des mondes de réflexivité suscités par le documentaire critique. La philosophie de terrain vise aussi une représentation du réel. Elle a, elle aussi, un authentique rôle esthétique à jouer. Elle est elle aussi, dans sa quête de l’analyse, une forme de création, au même titre que la photographie documentaire est une forme de réflexion.

Pour ce qui est de la notion d’archipel, j’ai davantage puisé dans ce puissant travail documentaire qu’est L’Archipel du goulag de Soljenitsyne. Ou dans la manière dont les fondateurs de la revue de géopolitique Hérodote interrogent Foucault en 1976. Et aussi, depuis, dans les analyses qu’en donne Edouard Glissant. L’idée que ce qui ne se voit pas (le socle sous-marin) constitue la profondeur du lien entre des îles apparemment dissociées est déjà, à elle seule, un puissant ferment d’imagination pour un travail politique. Les images, elles aussi, dans leur dimension sérielle, sont des îlots de cet archipel : celui d’un monde commun.

NR – En quoi vos rencontres durant ces 3 ans en Grèce ont remis en question ou prolongé votre approche philosophique, théorique ?

CV – Les rencontres, sans cesse, renouvellent l’approche théorique. Et c’est précisément l’objet de la philosophie de terrain de se nourrir de la parole des entretiens. En Grèce, c’est des rencontres qu’est partie notre volonté commune, à Philippe et moi, de travailler sur l’histoire, ce qui n’était pas prévu au départ. Sur l’île de Lesbos, en son centre, à Kalloni, un jeune couple qui avait créé une association de solidarité avec les réfugiés nous en a donné l’origine : le simple fait de voir les exilés, dépourvus de tout et pourchassés par la police, sur la route venant de la mer, a suscité en eux les images de leurs propres grands-parents et arrière- grands-parents, eux-mêmes réfugiés, sur cette même île, de la « grande catastrophe » de 1922. Et nous avons commencé à lire cette histoire du début du XXe siècle, et à entrer ainsi dans la complexité d’une histoire des relations internationales, mais aussi d’une histoire balkanique et européenne dont la Grèce est le centre.

Un médecin solidaire de Thessalonique, en nous parlant de sa propre éducation politique par la bonne de sa famille, nous a poussés à aller sur l’île d’Icaria dont elle était originaire, et à y découvrir une histoire des solidarités et de la guerre civile. Mais, par la même occasion, c’est l’inversion du rapport de subalternité qui s’est fait jour ici : une femme de condition domestique éduquant les enfants dont elle a la charge à l’encontre des préceptes de leur propre famille.

C’est aussi la discussion avec de jeunes chercheurs impliqués dans l’humanitarisation des solidarités et montrant l’insupportable qui en découlait, qui m’a permis de réactualiser mon travail de 2007 mené dans le livre Humanitaire, le cœur de la guerre.

C’est la réalité du parcours d’une jeune femme migrante, tel qu’elle me l’a retracé, qui m’a fait saisir les liens d’évidence entre exploitation sexuelle et exploitation du travail, là même où le travail n’est pas un travail sexuel.

C’est aussi le récit d’un homme âgé qui avait vécu les suites de la guerre civile comme enfant éloigné de ses parents militants et envoyé dans un orphelinat en Hongrie, qui nous a fait prendre conscience de l’impact des accords de Yalta sur une vie entière. Tout comme le récit de cette femme de la même génération, née à Tashkent de parents exilés et découvrant à 16 ans sa Grèce d’origine comme un pays étranger.

Ce sont, en général, les analyses des « subalternes » soumis à la violence politique, qui constituent de véritables leçons sur les inaperçus du racisme, sur les redoutables ambivalences du concept de « vulnérabilité », utilisé en droit pour accréditer la demande d’asile sur un motif infériorisant : une rencontre avec des exilés camerounais, aux abords du sinistre camp de Moria, en a pointé pour nous le sens dégradant : qu’est-ce qua ça fait, quand on a eu le courage d’affronter et de surmonter des épreuves aussi violentes que la passage par la Libye ou la traversée de la mer sur l’équivalent d’un radeau, de ne pouvoir être admis qu’au nom de sa faiblesse et en donnant des preuves de sa propre dépendance ?

Enfin de manière plus large, la question du double langage, qui est au cœur de ma critique des politiques publiques, a trouvé ici matière à se renouveler et à s’approfondir à partir de la réflexion de mes interlocuteurs sur les mensonges d’État auxquels ils doivent sans cesse se mesurer.

Source https://blogs.mediapart.fr/nicolas-richen/blog/140222/la-grece-laboratoire-des-solidarites-et-de-la-repression

Procureur grec interrogé au sujet de son enquête sur Novartis

Eleni Touloupaki, le procureur grec qui a enquêté sur les pots-de-vin versés par le producteur pharmaceutique suisse Novartis à des hommes politiques et à des prestataires de soins de santé grecs, a déclaré qu’elle avait été convoquée pour être interrogée vendredi par la Cour suprême grecque dans le cadre d’une enquête pénale distincte ouverte à son encontre après qu’elle a été retirée de l’affaire Novartis.

En plus de soudoyer des politiciens pour augmenter le prix des médicaments en Grèce et donc ailleurs dans l’UE, Novartis a également soudoyé plus de 5 000 médecins grecs pour les inciter à prescrire ses produits à leurs patients.

Touloupaki a été retiré de l’affaire après que les élections de 2019 ont porté le Premier ministre Kyriacos Mitsotakis au pouvoir et que l’affaire s’est refroidie en Grèce.

Mais pas aux États-Unis. Novartis a accepté en 2020 de payer 347 millions de dollars US dans le cadre d’un règlement avec le ministère américain de la Justice et la Securities and Exchange Commision pour des violations de la loi sur les pratiques de corruption à l’étranger, dans lequel elle a reconnu avoir effectué des paiements illégaux à des fournisseurs de soins de santé et des fonctionnaires grecs.

Néanmoins, la Grèce n’a pas fait grand-chose pour demander des comptes à l’entreprise pharmaceutique suisse et aux bénéficiaires des pots-de-vin. Au lieu de cela, Touloupaki a été accusé, avec plusieurs autres personnes, d’abus de pouvoir, de manquement au devoir et de participation à une organisation criminelle qui cherchait à impliquer des hommes politiques dans l’affaire des pots-de-vin de Novartis.

Mme Touloupaki a déclaré à l’époque à l’OCCRP que depuis qu’elle a commencé à enquêter sur l’affaire des pots-de-vin de Novartis, elle a été persécutée politiquement en conséquence. « Ils ont réussi à transformer les auditeurs en accusés afin d’empêcher toute enquête judiciaire », a-t-elle déclaré à l’OCCRP en 2020.

« Maintenant, je suis convoquée par la justice grecque pour répondre en tant qu’accusée », a déclaré Touloupaki dans une déclaration publique mardi.

Elle a qualifié cette convocation de signe d’honneur et de reconnaissance « pour avoir agi guidée par l’intérêt public et ne pas avoir cédé aux pressions, pour avoir mis en lumière le scandale qui a coûté cher à notre pays, à l’Europe et à des milliers de personnes privées du droit aux soins de santé. »

En janvier, les éminents journalistes Ioanna Papadakou et Kostas Vaxevanis, tous deux accusés d’être, avec un ancien vice-ministre de la justice du précédent gouvernement SYRIZA, membres de la même organisation criminelle que Touloupaki, ont dû comparaître devant la Cour suprême pour être interrogés, ce qui a suscité une vive réaction des organisations de défense des journalistes.

Pendant ce temps, une par une, les personnes sur lesquelles Touloupaki a enquêté dans le cadre de la corruption de Novartis ont été libérées. Il y a deux semaines, le ministre de l’économie, Adonis Georgiades, a annoncé que les poursuites contre lui étaient abandonnées.

M. Georgiades a accusé les médias d’avoir fabriqué des articles pour tromper le public et ses collègues sur son rôle dans l’affaire Novartis et a déclaré que ces médias faisaient l’objet d’une enquête par la justice du pays.

« Je tiens à remercier le Premier ministre et président de Nea Demokratia Kyriacos Mitsotakis qui n’a jamais contesté l’intégrité de mon personnage et s’est toujours tenu à mes côtés », a-t-il déclaré.

Quelques jours plus tard, le journal grec Avgi a rapporté que les procureurs avaient jugé le témoignage d’un dénonciateur pas assez crédible pour que M. Georgiades soit poursuivi. Le témoin, dont la véritable identité est protégée et qui n’est connu que sous le pseudonyme « Aikaterine Kelesi », a affirmé qu’à trois reprises, elle avait été témoin de la façon dont Georgiades avait reçu des enveloppes contenant un total de 140 000 euros (160 000 dollars) en espèces.

Pour justifier leur décision d’abandonner les poursuites, les procureurs ont déclaré que diverses sommes d’un montant total de 365 000 euros (419 160 dollars) avaient été déposées sur le compte du ministre par des associés et des proches entre 2013 et 2016.

Mercredi, il est apparu que l’ancien ministre et commissaire européen Dimitris Avramopoulos, qui avait également été mis en examen dans l’affaire des paiements illégaux de Novartis, avait également vu son affaire abandonnée et que, tout comme M. Georgiades, des fonds avaient été déposés sur son compte. Une fois, sa belle-mère a déposé 100 000 euros (114 850 dollars) en espèces en 2007, rapporte Documentonews.gr.

Pour en revenir à Touloupaki et aux accusations portées contre elle, tout le monde n’est pas enthousiaste à l’idée de la cibler.

Le député européen grec Giorgos Kyrtsos, un autre membre du parti Nea Demokratia de Mitsotakis, a averti dans une série de tweets que la décision de traîner Touloupaki devant les tribunaux pourrait se retourner contre lui.

« Le gouvernement s’engage dans une aventure », a déclaré Kyrtsos mercredi. « La combinaison de la poursuite de journalistes (et) d’un huissier de justice au motif qu’ils ont participé à la ‘conspiration Novarrtis’ et de l’immunité (accordée à) la multinationale (entreprise), expose Mitsotakis (et) le gouvernement aux critiques de l’UE ».

Tant que le gouvernement continuera à ignorer l’affaire Novartis, M. Touloupaki trouvera des sympathisants dans l’UE, a-t-il déclaré.

Mardi, le ministre de la santé Thanos Plevris a annoncé l’intention du gouvernement de demander une compensation à Novartis.

La nouvelle a laissé Mme Touloupaki perplexe.

« Comment peuvent-ils soutenir un procès basé sur les conclusions qu’ils m’accusent d’avoir fabriquées ? » a-t-elle déclaré à l’OCCRP. « Quoi qu’il en soit, la poursuite de Novartis pour incitation à la prescription était mon travail ».

Source : www.occrp.org/en/daily/15935-greek-prosecutor-summoned-for-questioning-over-her-novartis-probe

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La Grèce : Le quatrième mémorandum est inévitable à moins que…

Par Maria Negreponti-Delivanis*

L’économie grecque était dans une impasse avant même la pandémie, ce que confirme son tableau statistique. La pandémie, comme elle était inévitable, a aggravé sa situation chronique et désespérée, car elle.. :

* a ajouté plusieurs points négatifs supplémentaires, à l’énorme déclin du PIB causé par les Mémorandums.

* Elle a fait exploser la dette publique et privée.

* renforcé les prévisions pessimistes des entrepreneurs et des consommateurs et

* exacerbé une inégalité de revenus sans précédent.

Dans cette réalité consolidée de l’économie grecque, il n’y a malheureusement pas de place pour la croissance. La conclusion s’impose d’elle-même, si l’on tient compte du fait que le PIB de la Grèce en 2022 est inférieur au PIB correspondant avant les Mémorandums, d’au moins 32%, que la croissance du PIB d’ici 2060 sera d’environ 1%, et que les spécifications des Mémorandums qui nous sont imposés manquent de tout souffle de développement.

Les gouvernants actuels, malgré leurs fréquentes annonces enthousiastes sur l’évolution supposée positive de l’économie, semblent néanmoins conscients du marécage dans lequel nous nous enfonçons. C’est pourquoi, même si l’on exclut les références scandaleuses au Fonds de relance, qui, je le rappelle, ne servent que les intérêts du Nord de l’Europe, et non nos propres besoins urgents, ces dernières années, notre pays a été dépourvu de toute forme de préoccupation sérieuse pour la croissance économique. Au contraire, l’anxiété constante des responsables est monopolisée par la question de savoir comment, d’où et à quel prix l’argent sera obtenu pour faire face à nos charges mémorielles qui montent en flèche.

L’invasion de la pandémie a conduit au renversement complet des règles strictes de la politique monétaire et, en même temps, a encouragé certains espoirs, concernant la possibilité pour la Grèce d’exiger enfin ce qui lui est dû. En particulier, la panique liée à la nécessité immédiate de faire face au coronavirus a justifié l’allocation de milliers de milliards de dollars, par le biais de méthodes connues sous le nom de « helicopter money », a ravivé la prise de conscience des dangers de l’incontrôlable dette publique et privée qui a atteint 425% du PIB en Occident et 356% dans les pays en développement, a encouragé les discussions sur la nécessité d’en supprimer un pourcentage significatif et a ouvert la voie à de nouvelles théories qui minimisent l’importance primordiale de l’équilibre budgétaire.

Cet assouplissement monétaire, qui a prévalu pendant la pandémie, a dû être perçu par la Grèce comme une chance inespérée d’assurer sa survie. Au milieu de cette rupture, dont les conditions favorables ne seront probablement pas maintenues après la fin de la pandémie, la Grèce devrait donc s’empresser de renoncer à son statut d' »élève le plus docile de l’UE », comme le projetait un récent numéro de The Economist, puis rassembler un par un tous ses droits illimités, qui constituent des arguments très forts pour défendre son sauvetage, les poursuivre jusqu’au bout du monde, rechercher des alliances sincères et, surtout, engager le peuple grec autour de la terre dans une lutte pour la survie.

La Grèce est en effet dans une situation misérable, surtout au cours des 11 dernières années. Les menaces et les coups contre sa souveraineté nationale, qu’elle reçoit quotidiennement, sont traités avec indifférence par ses partenaires, à la seule exception de la France. Les mémorandums, avec leurs exigences souvent criminelles, l’ont appauvrie.

Il est certain, cependant, que la Grèce n’aurait jamais atteint cette dernière étape de son existence, si elle n’avait pas accepté avec une incroyable soumission, des péchés d’un autre monde et des humiliations inacceptables, abandonnant ses droits souverains d’une manière mortellement dangereuse, consentant à son asservissement pour des dettes qui étaient parfaitement viables au début de la crise, bradant ses biens publics et inactivant toute sorte d’argument défensif.

L’espoir de la fin de la pandémie coexiste malheureusement avec le risque d’un retour du statut monétaire qui était en vigueur avant le virus, grevé par la résurgence de l’inflation, après 40 ans d’absence. On parle déjà d’une hausse des taux d’intérêt qui, en plus de freiner une reprise très incertaine, alourdira la dette grecque. La prédiction du 4ème Mémorandum est, aujourd’hui, plus valable que jamais, même si elle sera certainement présentée sous un nom convaincant.

Dès le début de la crise, nous disposions de nombreux arguments importants pour éviter la tragédie de ces 11 dernières années, mais nous les avons tous rejetés. Nous sommes peut-être aujourd’hui face à notre dernière chance de salut.

Les arguments

Il n’existe aucun pays européen moderne qui ait été la cible d’autant d’attaques sauvages, de comportements impitoyables, d’accusations injustes, de sentiments punitifs de la part de ses partenaires, de violation de ses droits souverains, d’imposition d’un plan dangereusement erroné, de saisie de sa richesse publique.  Il convient de préciser à ce stade que les constatations ci-dessus n’impliquent nullement qu’il n’y ait pas eu de dette, ni même que cette dette ne doive pas être remboursée. Un Mémorandum était clairement nécessaire ; mais, Mémorandum, au contenu totalement différent de celui qui a été imposé à notre pays. Principalement un Mémorandum avec des spécifications qui assureraient le service de la dette par la croissance et non par la décroissance, comme la France l’avait insisté dès le début, tandis que l’Allemagne faisait la sourde oreille. Alors, avant que le 4ème Mémorandum (ou quel que soit le nom qu’on lui donne) n’envahisse nos vies, revoyons certains de nos arguments de sauvetage, en espérant qu’ils ne continueront pas à hiberner.

Commençons par le chapitre 22 des mémoires de Barack Obama, qui est une preuve indiscutable des positions grecques, car son contenu confirme de la manière la plus officielle ce qui a été largement diffusé depuis le début du drame du mémorandum. C’est-à-dire que l’UE et l’euro n’ont pas été « mis en danger » par la dette grecque, après tout absolument viable (environ 120% du PIB de l’époque), et l’UE et le FMI n’ont pas non plus décidé d’intervenir pour « sauver la Grèce », comme cela a été généralement soutenu au début de la crise. Au contraire, il devient clair que la panique de l’UE à l’époque, qui a conduit à demander l’aide du FMI pour l’atténuer, était liée au risque encouru par les banques franco-allemandes, qui avaient accumulé beaucoup d’obligations grecques. Il a été jugé que le salut des banques ne serait possible qu’en enjambant le cadavre du peuple grec. Donc, maintenant que les banques ont été sauvées, il est impératif d’atténuer, au moins, la condamnation à mort de la Grèce. En même temps, ce serait le bon moment pour clarifier le résultat final de la déclaration souvent répétée de l’UE selon laquelle son désir était de « sauver la Grèce ». Comme les chiffres le montrent strictement, cette intention de l’UE de nous sauver, a abouti après 11 ans, à ce qui suit :

* un quasi-doublement de la dette grecque, en pourcentage du PIB,

* une réduction de notre PIB d’au moins 25 % (afin de ne pas faire peser sur l’UE les effets négatifs supplémentaires de la pandémie),

* une prévision du FMI selon laquelle, d’ici 2060, notre taux de croissance moyen sera d’environ l’unité,

* actuellement, seul le revenu par habitant de la Bulgarie est inférieur au nôtre, alors qu’au début de la crise, nous étions au sommet des Balkans,

* ne nous étendons pas en invoquant un tas de preuves inébranlables, qui témoignent de la destruction à long terme de notre développement potentiel, sur plusieurs générations.

Poursuivons avec le gonflement inexplicable du déficit, au début de la crise, qui ne peut pas entrer dans la catégorie des « théories du complot », car c’est un cas qui préoccupe la justice grecque depuis de nombreuses années. Concernant cette étrange affaire, aucune conclusion arbitraire ne peut évidemment être tirée avant son jugement définitif. Cependant, les responsables devraient accélérer, par tous les moyens légaux, la décision finale du tribunal. Car, s’il est réellement prouvé que le gonflement du déficit a été induit, puisque c’est quelque chose qui s’est apparemment produit « du jour au lendemain », la Grèce sera sauvée, et sera en droit d’exiger une énorme compensation, pour les souffrances qu’elle a endurées jusqu’à présent (une compensation qui ne pourra toutefois pas éliminer les horreurs qui ont eu lieu pendant ces 11 années). Quoi qu’il en soit, on peut espérer qu’une telle décision est susceptible de faire la lumière sur les raisons pour lesquelles les dirigeants actuels de l’UE, à la veille du prononcé de chacune des nombreuses décisions de justice relatives à cette affaire, ont été excessivement sensibles au sort de l’ancien président d’ELSTAT.

La Grèce aurait encore la possibilité de remonter le temps, jusqu’en 2013, afin de corriger ce qui a été passé sous silence à l’époque. Je vous rappelle que l’économiste en chef du FMI de l’époque, Olivier Blanchard, a admis en 2013, que le programme du Mémorandum « était une erreur ». Et cette erreur, comme l’a souligné Olivier Blanchard, a entraîné un degré de contraction de l’économie grecque beaucoup plus important que prévu à l’origine, avec toutes ses conséquences négatives. Étant donné que cette erreur, bien que discutée dans les médias internationaux, a été traitée comme une « discussion interdite » en Grèce, il serait impératif aujourd’hui de la relancer.

Un autre groupe d’arguments en faveur de l’annulation de la dette, bien que perdu dans un passé lointain, concerne le traitement vraiment incroyable, par les gouvernements grecs respectifs, du prêt d’occupation, des atrocités nazies, qui ont rasé l’économie grecque de l’époque, ainsi que de l’enlèvement. valeur des antiquités. Il y a 81 ans de cela, l’Allemagne refuse de payer ses dettes à la Grèce, et notre pays s’en souvient environ une fois tous les 10 ans, mais même alors, il ne « prend pas de gants » pour soulever cette question épineuse. Un autre groupe d’arguments en faveur de l’annulation de la dette, bien que perdu dans un passé lointain, concerne le traitement vraiment incroyable, par les gouvernements grecs respectifs, du prêt d’occupation, des atrocités nazies, qui ont anéanti l’économie grecque, ainsi que de l’enlèvement d’antiquités de grande valeur. Cela fait 81 ans, mais l’Allemagne refuse de payer ses dettes à la Grèce, et notre pays s’en souvient environ une fois tous les 10 ans, mais même alors, il est assez réticent à aborder cette question épineuse. Au cours de ces huit décennies, pendant lesquelles l’Allemagne refuse de payer ses dettes, la Grèce a été confrontée à de grandes difficultés, qui auraient été moins dévastatrices si la dette avait été remboursée. Notre pays aurait eu un taux de croissance plus rapide que celui qu’il a enregistré, et n’aurait probablement pas été conduit à l’emprise des Mémorandums. En calculant le taux d’intérêt sur toutes ces années, la dette allemande est estimée à environ 1 000 milliards. Or, l’Allemagne continue de refuser d’honorer ses obligations. Mais si un pays comme la Grèce, qui est mis à rude épreuve, cherche des solutions, des solutions peuvent être trouvées. Le Comité, qui vient d’être mis en place et qui a succédé à plusieurs autres, avec la participation de l’IHA, de la Fondation Delivanis et du Congrès gréco-canadien, a discuté de la suspension du remboursement des dettes grecques envers l’Allemagne, comme mesure de pression possible, jusqu’à ce qu’elle rembourse ses dettes beaucoup plus importantes. La confiscation éventuelle des biens allemands en Grèce a également été discutée, ainsi qu’un effort coordonné pour faire largement connaître ce problème en Europe et dans le monde. Si, dans le cas d’une économie aussi riche que l’Allemagne, qui est à la tête de l’UE, le refus de rembourser ses dettes, qui trouvent leur origine dans l’occupation nazie, est si simple, il est raisonnable de se demander pourquoi il n’en va pas de même pour sa victime, la Grèce.

Afin d’éviter, si possible, le 4ème Mémorandum.

(*) Docteur d’Etat ès Sciences Economiques (Sorbonne), ancien Doyen de l’Université de Macédoine, Thessalonique

Source  : www.defenddemocracy.press/greece-%cf%84he-fourth-memorandum-is-inevitable-unless/

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Travailleurs de la santé non vaccinés et licenciement

Les travailleurs de la santé seront licenciés s’ils ne sont pas vaccinés, déclare un ministre alors que la Grèce lève certaines restrictions.

Les agents de santé non vaccinés doivent se faire vacciner contre le Covid-19 d’ici le 31 mars, faute de quoi ils seront licenciés du système national de santé grec (ESY), a déclaré lundi le ministre de la Santé Thanos Plevris.Dans une interview accordée à la chaîne de télévision Skai, il a réaffirmé qu’ils resteront suspendus jusqu’à cette date.

Il a ajouté que « d’ici là, il y aura une mesure globale sur la question de savoir s’il faut rendre obligatoire la vaccination du personnel de santé chaque année après la pandémie ».

Le ministre a ajouté que tous les citoyens âgés de plus de 18 ans devront également être vaccinés avec la piqûre de rappel pour être considérés comme pleinement vaccinés. Avec une semaine de retard en raison de la neige de la semaine dernière, la mesure entrera en vigueur le 7 février 2022.

Selon le site d’information médicale healthreport.gr, le ministère de la santé envisage d’autoriser les travailleurs de la santé ayant reçu deux doses de vaccin et n’ayant pas reçu de rappel à continuer à travailler, même s’ils ont subi un test rapide.

Le syndicat des travailleurs hospitaliers POEDIN estime que quelque 10 000 travailleurs de la santé n’ont pas reçu le vaccin de rappel et que leur suspension viderait les hôpitaux.

Selon POEDIN, un total de 4 727 agents de santé ont été suspendus depuis septembre 2021 car ils ont refusé de se faire vacciner contre le COVId-19.

 
Il convient de rappeler que la Grèce a assoupli certaines restrictions dans les restaurants et les lieux de divertissement, notamment en ce qui concerne la musique et les heures d’ouverture à partir du lundi 31 janvier 2022.
En ce qui concerne l’assouplissement des mesures, le ministre Plevris a déclaré que l’opinion générale des ministres de l’UE était qu’il fallait aller dans cette direction, à savoir n’appliquer que les mesures absolument nécessaires.
 
La façon dont les hôpitaux fonctionnent avec quelque 5 000 personnes en moins est un autre chapitre de l’histoire douloureuse du système de santé grec.

Dernier appel prochain convoi solidaire pour la Grèce

Dernières étapes de la collecte avant le départ du convoi solidaire : il y a encore de la place !

POUR FINIR DE REMPLIR LES FOURGONS VERS LA GRÈCE : DEUX SOIRÉES À ARLES ET PARIS ✊❤

Merci à toutes celles et ceux qui ont déjà transmis des montagnes de choses pour les lieux et collectifs solidaires autogérés en Grèce. Nous avons déjà de quoi remplir 7 ou 8 fourgons.

Si vous souhaitez participer, vous aussi, ou si vous souhaitez inviter votre entourage à le faire, voici les deux dernières soirées d’information avec collecte pour le convoi, en présence de plusieurs fourgons à remplir :

JEUDI 3 FÉVRIER À ARLES (18h30 à la Bourse du Travail)
avec ATTAC, RESF et la LDH
https://local.attac.org/13/arles/Rencontre-avec-Yannis-Youlountas.html

VENDREDI 11 FÉVRIER À PARIS (19h30 au 33 rue des Vignoles)
avec le groupe LA RÉVOLTE de la FA et le secrétariat international de la CNT

Rappel de la LISTE DES BESOINS pour la collecte :
http://blogyy.net/2022/01/01/nouveau-convoi-solidaire-vers-la-grece/

Dernier APPEL À RENFORTS pour le convoi : si vous désirez partir avec nous avec votre véhicule, au départ de la France, de la Suisse ou de la Belgique, c’est encore possible, mais ne tardez pas : laissez-nous vos coordonnées (en vous présentant brièvement) à : solidarite@anepos.net
Sur place, après avoir participé à la livraison, vous pourrez soit rester avec nous, agir, aider, discuter, bricoler dans les lieux, faire des tas de choses utiles, soit continuer votre route sans autre engagement, comme vous voulez.

Source http://blogyy.net/2022/02/02/deux-soirees-a-arles-et-paris/

Réfugiés affamés dans les structures d’accueil

Les autorités grecques laissent délibérément  6 446 réfugiés affamés dans les structures d’accueil.

Dimitris Angelides

 Le moyen de pression le plus extrême sur les réfugiés qui ont achevé la procédure d’asile est choisi par le ministère des migrations, en interrompant la distribution de plateaux repas les concernant. ●  Tollé international sur la « crise de la faim » délibérément provoquée par le gouvernement grec, qui  la nie.

Des portions de nourriture beaucoup moins nombreuses que la population vivant dans les structures pour réfugiés commandées par le ministère de l’Immigration et de l’Asile aux sociétés de restauration qui sont en charge du ravitaillement des structures de la Grèce continentale, du début décembre 21  jusqu’à la fin mars 22, selon les données détaillées et chiffrées par structure publiées aujourd’hui par  le Journal des Rédacteurs..

Comme le montre le bilan mensuel de la situation aux structures, publié par l’Organisation internationale pour les migrations, la population totale vivant dans les 26 structures en Grèce continentale était au 21 novembre  16 659 personnes. Cependant, une semaine plus tard, les décisions d’attribuer le contrat aux deux contractants pour la préparation, le transport et la distribution des repas dans les structures du nord et du sud du pays ont fait que le nombre total de personnes ayant droit à la nourriture n’était que de 10 213.

En d’autres termes, le ministère a choisi de laisser 6 446 personnes vivant dans les structures sans nourriture quotidienne pendant l’hiver, soit un pourcentage de 38,69 %. Elle poursuit ainsi la politique qu’elle a mise en œuvre en octobre, lorsqu’elle a décidé de cesser de pourvoir en nourriture des milliers de personnes au motif qu’elles ont achevé la procédure d’asile et n’ont pas le droit de rester dans les structures. Il s’agit d’une politique sans précédent qui ne tient aucunement compte des besoins fondamentaux de survie des personnes et les spécificités de la situation qu’elle tente de réguler, dans le seul but de forcer les gens à quitter les structures, sans leur offrir de solutions de survie pour la suite.

Cette politique n’a fait que rendre la vie plus difficile aux réfugiés qui ont déjà connu tant des souffrances, et rendre encore plus compliquée la gestion des structures, obligeant les travailleurs sur le terrain et les organisations à improviser pour trouver des solutions afin que des milliers de personnes, dont de nombreux enfants, ne soient pas privées de nourriture.

 Dans chaque structure, le ministère indique un nombre de bénéficiaires de nourriture inférieur à celui de la population de celle-ci, à l’exception de la structure de Kleidi à Sidi, où apparaît le paradoxe d’un nombre de bénéficiaires déclarés supérieur à celui de la population. Certaines structures présentent un écart plus important que d’autres, avec plus de la moitié de la population qui se retrouve sans nourriture. Le plus grand écart se présente à la structure de Eleonas, [près d’Athènes] avec 1 529 personnes sur 2 034 qui ne reçoivent pas de nourriture, vient ensuite Ritsona avec 905 personnes sans nourriture sur un total de 2 194, Katsikas avec 590 personnes sans nourriture sur un total de 1 010 et Polykastro avec 544 personnes sans nourriture sur un total de 934.

Le Ministère a choisi de procéder à la signature de ces contrats de provisionnement, malgré les avertissements répétés de la Commissaire européenne Ylva Johansson, les critiques du Médiateur de la République, et les fortes réactions  qu’a suscitées cette politique tant en Grèce qu’au niveau international.

Le 7 décembre, Mme Johansson, répondant à une lettre de protestation de 28 organisations grecques, a souligné qu’elle avait demandé à plusieurs reprises aux autorités grecques « de veiller à ce que toutes les personnes, en particulier les plus vulnérables, reçoivent de la nourriture, des produits d’hygiène et autres produits de première nécessité ». Elle a également noté que « toutes les personnes, quel que soit leur statut juridique, devraient bénéficier des dispositions du droit de l’UE […] ainsi que des dispositions respectives de la Charte des droits fondamentaux de l’UE ».

« Les réfugiés reconnus en Grèce sont contraints de rester dans des structures d’accueil, car l’absence de soutien adéquat à leur intégration fait qu’ils n’ont aucun autre moyen de joindre les deux bouts ou de louer un logement. Ils n’ont nulle part où aller et la fourniture de nourriture par l’État est le seul moyen dont ils disposent pour se nourrir », note Dimitra Kalogeropoulou, directrice de l’IRC, qui a souligné dans un communiqué le décalage entre les bénéficiaires et la population totale de structures.

Un rapport du journal britannique Guardian fait référence à une crise de la faim, le gouvernement niant le terme et le secrétaire général de l’accueil, Manos Logothetis, déclarant qu’il démissionnerait « si l’on trouvait dans le pays dix réfugiés à qui l’on a refusé de la nourriture ».

  • La distribution de cartes bancaires aux réfugiés ayant droit à une aide financière mensuelle a connu un retard de trois mois en janvier. Le programme avait été suspendu en octobre car le ministère, qui a repris la gestion du programme du Haut-Commissariat, n’était pas en mesure de répondre immédiatement. Des sources au ministère de l’immigration et de l’asile notent que dans les prochains mois, l’argent dont ils ont été privés au cours des mois précédents sera déposé sur les comptes des bénéficiaires de manière rétroactive.

Source en grec  source : www.efsyn.gr/ellada/dikaiomata/329760_afisan-epitides-nistikoys-6446-prosfyges-se-domes

Conférence publique sur les refoulements et la violence aux frontières du 3 fev 2022

La conférence se tenait le  jeudi 3 février 2022, à 13h00 à Association des archéologues grecs, Ermou 134, Athènes et diffusée en direct et accessible en visio.

Stop aux refoulements et à la violence frontalière de l’État grec et de l’UE.
La Τurquie n’est pas un pays sûr !
Liberté de mouvement pour tous !

L’Assemblée ouverte contre les refoulements et la violence aux frontières invite les journalistes, les reporters et tous les membres intéressés du public à participer à notre conférence publique avec des intervenants qui partageront leurs expériences et leurs analyses politiques des refoulements et autres formes de violence d’État contre les personnes en mouvement en Grèce dans le contexte du régime frontalier européen, et qui sont impliqués dans la lutte contre la violence aux frontières.

La conférence comprendra des présentations par des orateurs invités (voir ci-dessous), suivies d’une période de questions de la part des membres de la presse, et enfin d’une discussion ouverte modérée.

Programme :
1) Les migrants racontent leurs expériences des pushbakcs et de la violence aux frontières.
2) Parwana Amiri : La situation dans les camps de réfugiés en Grèce
3) Dimitris Choulis : Situation en mer Égée et dans les îles
4) Centre culturel du Kurdistan d’Athènes : Situation à la frontière de l’Evros et conséquences pour les réfugiés politiques kurdes/turcs de Turquie.
5) Solidarité avec les migrants : La Turquie n’est pas un « pays sûr ».

L’Assemblée ouverte contre les refoulements et la violence aux frontières est une assemblée de collectifs et d’individus qui sont solidaires de toutes les personnes qui luttent pour la liberté, les droits et la dignité dans un monde dévasté par la guerre, l’exploitation et l’oppression. Nous organisons une lutte collective à Athènes contre les refoulements violents et systémiques effectués par l’État grec, et contre d’autres formes de violence aux frontières et de violence d’État visant les personnes en mouvement.

Il y aura une manifestation contre les refoulements et la violence aux frontières le 6 février, au départ de la place Omonia à Athènes à 13h00. Nous invitons tout le monde à y participer et à élever la voix contre la violence, les atrocités et les violations des droits qui se produisent aux frontières entre la Grèce et l’Union européenne. Le 6 février est une journée mondiale de lutte contre le régime frontalier meurtrier, exigeant la vérité, la justice et des réparations pour les victimes de la migration et leurs familles. Ce jour-là, des manifestations et des « Actions de commémoration » auront lieu dans toute l’Europe et au-delà.
Événement Facebook pour la manifestation : https://fb.me/e/1tH8zJGFC

Résumés de la conférence :

Expériences des migrants en matière de violence frontalière

Il existe peu d’espaces où les expériences des personnes en mouvement, qui subissent des violences physiques et psychologiques, des humiliations et l’attitude raciste des autorités grecques, peuvent être exprimées et entendues. Ces dernières années, les refoulements, qui incluent la torture et placent les personnes dans des situations dangereuses, voire mortelles, sont devenus une pratique courante aux frontières de la Grèce et de l’UE. En outre, le traitement des migrants en Grèce est devenu de plus en plus violent, les exposant à un harcèlement quotidien et à l’incarcération alors qu’aucun crime n’a été commis, dans des conditions horribles. Malgré la guerre européenne contre les migrants, les personnes qui migrent continuent de lutter pour la sécurité, la liberté et la dignité. Nous ouvrirons cette conférence en donnant l’espace à certaines de ces personnes pour parler de leurs expériences.

Parwana Amiri, réfugiée afghane révolutionnaire, auteur et journaliste.

L’impact des frontières et des politiques migratoires discriminatoires ne se limite pas aux limites physiques d’un État, mais continue d’affecter la vie des personnes en mouvement, des migrants et des réfugiés sur l’ensemble du territoire. Cette intervention se concentrera sur l’impact des frontières sur la vie quotidienne des migrants en Grèce, avec un accent particulier sur la vie dans les camps.

Dimitris Choulis, avocat de Samos

Cette intervention sera un aperçu des refoulements depuis les îles de la mer Égée après l’arrivée d’un navire. L’orateur expliquera comment les autorités agissent et quels sont les risques pour les réfugiés, avec des exemples de cas spécifiques. Dans la pratique, les refoulements sont un usage de la force, non pas pour arrêter les réfugiés mais pour les dissuader à l’avenir. Ceci sera illustré par des exemples de cas qui ont été ou seront rendus publics. En outre, les refoulements entraînent souvent des décès, directement ou indirectement. Des cas spécifiques de décès suite à des pushbacks seront discutés. Enfin, l’orateur parlera de la criminalisation de la solidarité et de l’assistance comme moyen d’intimidation des actions anti-pushbacks, et discutera des moyens d’y faire face.

Centre culturel du Kurdistan d’Athènes

De plus en plus de citoyens kurdes et socialistes de Turquie qui fuient les persécutions politiques et cherchent la sécurité en Grèce sont repoussés vers la Turquie. Nos camarades ont témoigné de l’horreur de la situation dans la région d’Evros : refus du droit de demander l’asile, vol d’argent et d’effets personnels, détention non officielle pendant des jours sans nourriture ni eau, coups et humiliations, implication de bandes armées recrutées par la police grecque, et expulsion de grands groupes de personnes à travers la rivière Evros vers la Turquie dans des canots pneumatiques sous la menace des armes. Persécutés en tant qu’ennemis de l’État turc, nos camarades qui sont repoussés sont exposés au meurtre, à la torture et à l’emprisonnement à long terme ou à vie en Turquie. Des centaines de politiciens, d’activistes et de journalistes kurdes et turcs se sont retrouvés dans des prisons politiques après avoir été repoussés de Grèce.

Solidarité avec les migrants : La Turquie n’est pas un « pays sûr ».

En juin 2021, l’État grec a déclaré la Turquie « pays tiers sûr » pour les demandeurs d’asile originaires de Syrie, d’Afghanistan, du Pakistan, du Bangladesh et de Somalie. La reconnaissance de la Turquie comme « pays sûr » alors qu’elle est au sommet de l’autoritarisme, de la violence politique et de l’effondrement économique est cynique et politiquement motivée. Les personnes originaires des pays susmentionnés n’ont aucune chance d’obtenir un statut légal sûr en Turquie. En outre, elles sont exposées quotidiennement à l’exploitation du travail, au travail des enfants, aux abus sexuels, aux mariages forcés, à la traite des êtres humains, aux attaques racistes et aux meurtres. Alors que le racisme, la misogynie et les attaques organisées contre les minorités ont une longue histoire en Turquie, plusieurs attaques brutales contre des réfugiés ont eu lieu au cours des deux derniers mois seulement, ce qui prouve que la Turquie est de moins en moins sûre pour les réfugiés (tout comme elle l’est pour beaucoup de ses citoyens).

Migrants bloqués sur une île entre la Turquie et la Grèce

Depuis le 19 janvier, 25 Syriens et quatre Turcs sont bloqués sur une petite île au milieu du fleuve Evros, frontière naturelle entre la Turquie et la Grèce. Ils souhaitaient entrer sur le sol hellénique mais ont été refoulés par les autorités. Ankara refuse pour l’heure de les reprendre. Transis de froid, les migrants se retrouvent piégés entre les deux pays.

Cinq jours sur un minuscule bout de terre de moins de 150 m2. Depuis le 19 janvier, 29 personnes, 25 Syriens et quatre Turcs, sont bloqués sur une petite île au milieu du fleuve Evros, frontière naturelle entre la Turquie et la Grèce. Sans eau, ni nourriture, le groupe survit tant bien que mal, sans aide extérieure, alors que les températures sont négatives. Depuis Google map, l’endroit est visible. Il se trouve non loin d’Erdine, côté turc, et tout près de Kastanies, côté grec. « C’est un banc de sable avec quelques arbres. Et cette nuit, il fera -9 degrés », décrit Natalie Gruber, porte-parole de l’association Josoor, basée en Turquie, et qui recense les incidents à la frontière.

Selon la presse grecque, Athènes refuse d’organiser leur sauvetage, leur demandant à la place de retourner par leurs propres moyens en Turquie – en traversant l’Evros. L’association Josoor s’indigne d’une telle réaction et craint pour la vie de ces migrants. « Les courants du fleuve sont forts en hiver. Il est impensable de laisser des personnes entrer dans l’eau », s’offusque la porte-parole de l’association, contactée par InfoMigrants. « En plus, il a neigé ces derniers jours, le niveau de l’eau a peut-être monté ».

Côté turc, les autorités font également la sourde oreille. « Ils n’iront pas les chercher », continue Natalie Gruber. Il n’est pas rare que les forces de l’ordre se placent sur le rivage armes à la main pour intimider les exilés. « Ils sont donc souvent interdits de passage d’un côté et de l’autre », détaille la porte-parole de Josoor qui déplore l’absurdité de la situation. Chaque pays refuse en effet d’assumer la prise en charge de ces exilés en se renvoyant la balle question souveraineté de ces mini-îles.

Une zone militarisée

« Nous n’avons pas de contact direct avec les migrants bloqués », continue Natalie Gruber qui suit néanmoins la situation de près. La zone de l’Evros est militarisée et interdite aux civils (ONG et journalistes compris) côté grec et côté turc. « Les taxis, les seuls autorisés à entrer dans la zone militaire côté turc, nous ont dit que de nombreux soldats s’étaient massés non loin de la zone » où se trouvent les migrants.

Toujours selon la presse grecque, des mineurs se trouveraient parmi les exilés ainsi qu’une personne souffrant d’une maladie des reins.

Ce n’est pas la première fois que des migrants se retrouvent bloqués sur ces petits bouts de terre entre les deux pays. Au mois d’août 2021, une cinquantaine de personnes avaient déjà été piégées sur une île à la frontière terrestre gréco-turque sans abri, nourriture, ni eau potable. Les images envoyées à des associations montraient des membres du groupe sans chaussures, d’autres avec des ecchymoses et des blessures.

En mai 2021, un mineur non accompagné a été porté disparu après avoir contacté une dernière fois sa mère depuis une de ces petites îles, écrit encore Josoor sur son site. Au mois de mars, c’est cette fois-ci un autre groupe de 70 migrants dont une femme enceinte qui a été bloqué sur une île.

Une traversée risquée

Généralement, les autorités grecques repoussent les migrants non désirés directement vers les rives turques. « Mais depuis 2020, craignant des représailles [et suite à une détérioration des relations diplomatiques entre la Grèce et la Turquie, ndlr], les Grecs ne déposent plus toujours les migrants côté turc, ils ne s’approchent plus des rives voisines, ils laissent les exilés sur ces îles entre les deux pays », explique Natalie Gruber. « Ils leur disent ensuite de traverser l’Evros pour rejoindre la Turquie ».

L’été, la traversée peut être envisageable, le niveau de l’eau est plus bas à certains endroits de la rivière. Mais en hiver quand les courants sont forts, les risques de noyades sont élevés.

Cette année, côté grec, une quarantaine de corps ont été retrouvés dans la région de l’Evros, selon l’hôpital d’Alexandropoulis, à la frontière gréco-turque. La majorité des victimes sont des migrants qui se sont noyés dans le fleuve.

« Souvent, les Turcs finissent par céder », continue la porte-parole de l’association Josoor. « Ils autorisent les migrants à revenir en Turquie, mais ils cèdent au bout de plusieurs jours horribles pour les exilés ». 

 

 

Un film sur les Viome

Occupy, Resist, Produce – Vio.Me.

Un film de 30 mn de Dario Azzellini et Oliver Ressler . En grec sous titres en Anglais

youtu.be/JrC2BebBWmQ

Le comité Grenoblois soutien depuis 2016 les VioMe. Nous publierons prochainement les modalités pratiques pour une commande groupée 1e semestre 2022. Les VioMe doivent nous faire parvenir le catalogue avec les tarifs 2022.

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