La politique européenne met en péril la vie des migrants

Propos recueillis par Bruno RIPOCHE

L’Union européenne paie la Turquie et des pays africains pour retenir les migrants. Mais quel est l’impact de cette politique sur ces pays ? Un institut de recherche s’est penché sur l’envers du décor.

L’institut néerlandais Clingendael vient de publier un rapport* explosif sur l’impact, en Afrique subsaharienne, de la politique européenne visant à stopper les migrants avant qu’ils n’atteignent nos frontières. Clotilde Warin en est la coauteure. Interview ci-dessous

(*ici le lien vers le rapport – en anglais – : https://www.clingendael.org/sites/default/files/2018-09/multilateral-damage.pdf)

L’Union européenne paie la Turquie et des pays africains pour retenir les migrants avant qu’ils n’arrivent à ses frontières. Cette politique d’« externalisation » fonctionne-t-elle ?

D’un point de vue comptable, cela marche très bien ! Le nombre des arrivées en Italie par la Méditerranée a diminué de 84 % au premier semestre de 2018. Les dirigeants de l’UE affirment : « Les chiffres parlent pour nous, le résultat est là ».

Vous avez regardé l’ envers du décor , sur les routes migratoires au Sahara. Qu’avez-vous vu ?

Des accords ont été signés avec le Soudan dès 2014, avec le Niger en 2016. Contre financement – respectivement 160 et 230 millions d’euros – ces pays mènent une politique de « frein migratoire ». Confier les clés de la fermeture de nos frontières aux pays dont les migrants sont originaires, ou aux pays par lesquels ils transitent, a des conséquences néfastes : cela ne fait que déplacer les flux, mettre les migrants en danger, accroître le pouvoir de milices et créer de l’instabilité régionale.

Vous qualifiez le Niger de « bon élève », dans la mesure où il applique à la lettre les demandes européennes. Les flux sont-ils taris ?

Prenons l’exemple d’Agadez, dans le Nord, aux portes du désert. C’est le principal point de passage vers la Libye. Le gouvernement nigérien entend stopper la mobilité des migrants sur le millier de kilomètres entre cette ville et la frontière libyenne.

Or, d’une part, il s’agissait de mobilité légale, relevant de la libre circulation entre les États de la Cedeao (Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest). Une mobilité comparable à celle existant au sein l’espace de Schengen en Europe.D’autre part, cette mobilité était protégée. Une fois par semaine, un convoi de véhicules escorté par l’armée nigérienne quittait Agadez vers la Libye parce qu’il s’agit de routes dangereuses où l’on peut être attaqué par des bandits.

Que se passe-t-il depuis que le transport des migrants est interdit ? Les migrants continuent évidemment de se déplacer, mais par des routes officieuses, beaucoup plus dangereuses, et se retrouvent entre les mains de trafiquants qui n’hésitent pas à les abandonner en plein désert.

« On oublie les morts dans le Sahara »

Peut-on chiffrer les conséquences ?

Depuis la mise en œuvre de ces politiques, en 2016, le nombre des migrants retrouvés morts dans le désert au nord d’Agadez a explosé : 71 morts en en 2015, 95 en 2016, 427 en 2017, selon les chiffres de l’Organisation internationale pour les migrations. Et les migrants que l’on a interrogés nous disent avoir vu de nombreux cadavres sur le sable… qui ne sont pas tous comptabilisés. On parle des morts en Méditerranée, on oublie souvent ces morts dans le Sahara. La politique européenne met en éril la vie de migrants.

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Les accords entre l’UE, le Soudan et le Niger, ont déplacé les routes migratoires, notamment vers le Tchad. | Service infographie Ouest-France et institut Clingendael.

En quoi cela fragilise-t-il un État comme le Niger ?

Cette politique de « frein migratoire » a conduit Niamey à adopter une loi anti-immigration sans véritable base juridique, et qui met en péril l’unité du pays. Les deux grandes communautés d’Agadez, les Toubous et les Touaregs, vivaient du transport – hier légal — de migrants. Aujourd’hui, on confisque leurs véhicules, on les emprisonne.

La grogne est forte et cela décrédibilise le pouvoir, dans un État qui avait retrouvé son unité et réussi sa transition démocratique avec l’élection en 2011 de Mahamadou Issoufou. Cette politique migratoire rend aussi de plus en plus impopulaires, sur place, des militaires européens déployés dans le cadre de l’opération antiterroriste Barkhane. 

« L’UE contribue indirectement à renforcer le pouvoir des milices »

La coopération avec le Soudan apparaît autrement plus scandaleuse…

Ce pays est dirigé depuis près de 30 ans par Omar el-Béchir, un dirigeant autoritaire inculpé de crimes de guerre, crimes contre l’humanité et génocide au Darfour par la Cour pénale internationale… Et pourtant, il est devenu un partenaire fréquentable pour l’Union européenne.

Pour stopper les migrants, Béchir a dépêché ses Forces de soutien rapide (FSR), des milices gouvernementales qui ne sont autres que les janjaweed, ces milices arabes responsables des exactions contre les populations du Darfour.

Leur commandant, Hemmeti, se targue d’arrêter des milliers de migrants. Nos recherches ont prouvé que les FSR en arrêtent certes quelques centaines, mais qu’elles sont surtout devenues des passeurs, qui rançonnent les migrants et les revendent aux trafiquants libyens.

Cette « milicianisation » est la grande découverte de notre enquête. Elle pose de graves questions sur le choix politique qu’a fait l’Union européenne. L’UE contribue indirectement à renforcer le pouvoir des milices.

Quelles sont les conséquences pour les migrants ?

Que ce soit pour les migrants de la Corne de l’Afrique (Somalie, Erythrée…) ou de l’Afrique de l’Ouest (Cameroun, Guinée, Côte d’Ivoire…), cela rend leur trajet plus long, plus cher, plus dangereux. Lorsque ces migrants prennent la route, ils sont confrontés sur leur chemin à de multiples check points tenus par des armées, des milices ou des bandits. À chaque étape, ils sont rançonnés et doivent trouver de l’argent. Quand ils parviennent en Libye, ils se retrouvent souvent aux mains de trafiquants qui les torturent tout en appelant leur famille au téléphone pour obtenir une rançon.

Je prends l’exemple d’un demandeur d’asile érythréen que j’ai longuement rencontré, sa dette envers sa propre famille était de 13 000 dollars à son arrivée en France. La famille, quand elle entend le migrant hurler sous la torture, envoie de l’argent, quitte à s’endetter. La mère couturière d’un migrant vend sa machine à coudre, puis la vache qu’elle avait… Ce sont des dettes terribles pour les familles en Afrique.

« En contradiction avec les valeurs européennes »

L’Europe s’assoit sur ses principes fondateurs ?

Cela est en contradiction avec les valeurs qui ont été au fondement de la construction européenne. Et, sur le terrain, c’est extrêmement handicapant pour les diplomates européens qui tentent d’œuvrer pour le processus de paix au Darfour ou pour la transition démocratique ailleurs.

L’Union européenne semble se dire qu’elle n’a que cette solution pour contrer la montée de l’extrême droite en Europe. Or, c’est faux. L’Italie, avec l’ancien ministre de l’Intérieur Marco Minniti, a mené une politique très anti-migrants digne de l’extrême-droite… Cela n’a pas empêché l’extrême droite d’accéder au pouvoir aux dernières élections.

L’Institut Clingendael conseille le gouvernement néerlandais en matière de relations internationales. Quelles recommandations faites-vous ?

D’abord, de ne pas adopter des politiques qui vont à l’encontre de l’Etat de droit. Ne pas travailler avec des forces de sécurité qui ont commis des abus contre les droits de l’homme. On souhaite qu’il y ait une responsabilité juridique de l’Union européenne dans ses politiques d’externalisation des frontières, si jamais on se rend compte que leur mise en place porte atteinte aux droits de l’homme.

Source https://www.ouest-france.fr/monde/pour-endiguer-les-migrants-l-europe-les-livre-aux-milices-5984901

le 8 octobre projection-débat L’amour et la révolution en présence de Yannis Youlountas

Le collectif citoyen de Grenoble contre l’austérité en Grèce et en Europe – soutenu par Attac Isère et le Cadtm Grenoble

vous invite à la projection-débat en présence du réalisateur Yannis Youlountas

L’amour et la Révolution
Non, rien n’est fini en Grèce

Lundi 8 octobre 2018 à 20h15 Cinéma le Club Grenoble

« Dix ans après les premières émeutes, les médias ne parlent plus de la crise grecque.Tout laisse croire que la cure d’austérité a réussi et que le calme est revenu.  Ce film prouve le contraire.
 A Thessalonique, des jeunes empêchent les ventes aux enchères de maisons saisies. En Crète, des paysans s’opposent à la construction d’un nouvel aéroport.  À Athènes, un groupe mystérieux inquiète le pouvoir en multipliant les sabotages. Dans le quartier d’Exarcheia, menacé d’évacuation, le cœur de la résistance accueille les réfugiés dans l’autogestion.
Un voyage en musique parmi celles et ceux qui rêvent d’amour et de révolution. »

Depuis la projection le 23 avril à Villard Bonnot le film a été actualisé en juin et juillet en Grèce. Et pour ce qui est du débat les récentes annonces médiatiques de la soi-disant sortie de crise de la Grèce devraient faire l’objet d’un avis différent du réalisateur mais aussi du public. 

Le cinéma le Club 9, bis rue du Phalanstère 38000 Grenoble propose sur son site http://www.cinemaleclub.com  la réservation de places. Ce sera le cas pour ce film prochainement.

Amère Patrie La rubrique de Panagiotis Grigoriou

Panagiotis  Grigoriou est Ethnologue et historien, chroniqueur, analyste, initiateur d’un concept de tourisme alternatif  et solidaire en Grèce. Le regard de l’historien et de l’anthropologue sur l’actualité et le vécu de la crise grecque.

Dans cette rubrique il évoque la destruction des petits bateaux de pêche traditionnels contre subvention de l’Union européenne mais aussi le dernier scandale de transfert de monuments historiques et de sites archéologiques à  l’Agence chargée de la privatisation des biens de la Grèce.

Amère Patrie

Bonne année pour le tourisme d’après les médias, nos plaisanciers restent ainsi longtemps à flotter entre les îles grecques, forcément à la surface de l’eau. Beau pays et cependant coquille de plus en plus vidée. Le gouvernement de l’indescriptible Aléxis Tsípras, fait semblant de découvrir qu’avec le reste des biens publics, il a également transféré la jouissance des sites archéologiques et des musées à la Treuhand à la grecque, c’est-à-dire aux mains des rapaces planétaires de l’Agence chargée de la privatisation des biens de la Grèce. Et pendant ce temps, on détruit à la chaîne les bateaux de pêche, de préférence traditionnels. Culture morte.

Destruction d’un bateau de pêche. Péloponnèse, septembre 2018

La scène se déroule dans le Péloponnèse présumé authentique. La destruction d’un bateau de pêche. Plus authentique que jamais, c’est autant la subvention de l’Union européenne laquelle le plus souvent dépasse largement la valeur marchande du bateau détruit. Le contexte s’y prête d’ailleurs mieux qu’avant, “c’est de l’argent très frais par les temps qui courent”, comme on aime se dire sur place. Donc on accepte, aussi dans la mesure où le métier de pêcheur est de plus en plus malmené et surveillé. D’acculturation en acculturation, sans oublier le départ de la dernière jeunesse grecque à l’étranger, les vocations ne sont plus.

Notons qu’en terre étrangère, les enfants grecs ne connaîtront plus le réseau des écoles que l’État grec avait si naturellement financé durant tant d’années. Comme le rappelle même la presse bien… autorisée, en 2011 une décision ministérielle grecque fait baisser de mille à une centaine seulement, le nombre d’unités pédagogiques officiellement reconnues disposant l’enseignement de la langue grecque à l’étranger, quotidien “Kathimeriní” du 10 septembre 2018. Novembre 2011, c’est également, rappelons-le, le… grand moment du Premier ministre et d’abord banquier, Loukás Papadémos, imposé par les Puissances, suite “logique” au limogeage du déjà funeste Yórgos Papandréou par le tandem Merkel – Sarkozy.

En 2018, les parents expatriés malgré eux, reconnaissent que la bataille avait été perdue, ainsi ils ont été obligés de suivre le chemin de l’exil économique. Seulement, toute la bataille actuelle c’est que leurs enfants ne perdent pas le lien avec la langue grecque et pour tout dire avec le pays. Durant cette même année, et sous la gouvernance des déconstructeurs arrivistes de SYRIZA, comme on sait ouvertement adeptes de l’effacement de notre culture, de notre mémoire, voire de l’effacement du pays tout court, lorsque certains parents installés à Poitiers (France) se sont adressés au Consul grec, exprimant leur désarroi devant la disparition des écoles grecques, le représentant officiel de… l’amère Patrie, leur a tout naturellement suggérer de faire appendre une autre langue à leurs enfants, par exemple la langue italienne, quotidien “Kathimeriní” du 10 septembre 2018.

Bateau en son dernier jour. Péloponnèse, septembre 2018
La destruction… déconstruction commence. Péloponnèse, septembre 2018
Le moteur est enlevé en premier. Péloponnèse, septembre 2018

De retour au pays pour l’été, les enfants de la nouvelle Diaspora ne verront même plus d’ailleurs les beaux bateaux traditionnels, d’après la Confédération de la Protection des bateaux traditionnels en bois, sur 14.500 bateaux de ce type et en 20 ans, près de 12.500 bateaux ont été détruits, “c’est l’apogée de la folie grecque actuelle”, et j’ajouterais que la destruction des bateaux tient autant et savamment de la déconstruction culturelle organisée. Accessoirement, les Grecs ne pourront plus se tourner vers la mer par temps de crise et d’effondrement disons ultimes, et ils demeureront dépendants des chalutiers et des multinationales agroalimentaires qui entre autres mondialisateurs, sont les maîtres de l’Eurocontrol depuis Bruxelles et depuis Berlin.

Ainsi, 12.500 bateaux ont été détruits. “Jeudi après-midi, dans la zone balnéaire de Néos Pýrgos, sur l’île d’Eubée. La scène à laquelle j’ai assisté avait quelque chose d’un cauchemar. Le soleil avait presque atteint le milieu du ciel et il brûlait fort comme pour nous punir. Deux chiens attachés aux bateaux déposés à proximité sur le chantier de réparation aboyaient continuellement. Devant nous, le caïque ‘Pános-Maria’, construit en 1983, longue de huit mètres, reposait à peine sur le sol au moyen de quatre troncs d’arbres tronqués. Le temps était venu, celui de son exécution, de sa mise à mort. Derrière lui, une pelleteuse. Le conducteur tenait une cigarette dans la bouche et les mains sur les leviers. La fumée sortait des vitres étroites de l’engin, on dirait les narines d’une bête immonde. Dès que l’agent de la Garde côtière grecque a donné le signal, le machiniste a aussitôt manié le marteau-piqueur, ce bras en fer vissé au bout du compresseur à la pince si épaisse. Il a attaqué la coque avec rage.”

“Bois brisé comme on brise alors les os d’un animal encore vivant. Comme si le bateau avait du souffle et de la voix. Pendant une demi-heure je voyais le caïque perdre sa belle forme, se perçant et se brisant, se lamentant même. Le marteau-piqueur qui se dressait dans les airs soulevait les morceaux de la coque brisée, et qui retombaient au sol. À côté de moi se trouvait Maria, l’épouse du pêcheur Panagiótis Livanós, le propriétaire du caïque. Ils pêchaient ensemble. Son mari, malade, ne pouvait plus poursuivre dans le travail, ainsi, il a décidé d’abandonner leur bateau à la destruction, et de recevoir en échange, l’indemnité de 83 000 euros que lui a accordée l’Union européenne. Montant excessif Si cette même coque était construite aujourd’hui, cela coûterait au total 40 000 euros”, quotidien “Kathimeriní” du 15 juillet 2018.

Caïques encore vivants. Péloponnèse, septembre 2018
Dystopie imposée et illustrée ! Athènes, septembre 2018
Beauté imposante. Péloponnèse, septembre 2018

J’ai assisté à une scène analogue qui s’est déroulée dans le Péloponnèse, surtout présumé authentique. Le conducteur de l’engin est arrivé le premier sur les lieux, et il a attendu les autres acteurs de la mise à mort durant près d’une heure. Le mécanicien pour bateaux et chalutiers du coin y était également convié, il a ainsi et d’abord œuvré pour la récupération des parties mécaniques avant… l’exécution. Je l’avais rencontré la veille. “C’est ignoble, toute notre tradition se perd, notre capacité de prise sur nos ressources halieutiques en cas de besoin, toute cette culture et en même temps art populaire de la construction navale de proximité. L’Union européenne paye bien pour en finir avec nous, en réalité, elle nous distribue les dernières miettes alors trompeuses”, m’avait-il dit. Péloponnèse authentique.

Ce même jour au café du coin, un jeune homme fustigeait à sa manière note piètre modernité. “Ceux de SYRIZA et de l’UE veulent nous déchristianiser, nous faire enlever la croix de notre sol, puis, faire interdire les cloches des églises, c’est la guerre”. Les autres au café ont fait un signe d’abrogation de la tête. Il n’y a pas vraiment à redire et ce n’est pas du populisme comme le diraient les propagandistes et les politiciens autorisés, les faits sont là et surtout ils sont palpables à travers le pays réel. On sait par exemple que toute une série d’actions très sournoises sont en cours pour faire disparaître à terme la Croix du drapeau hellénique sans oser le dire ouvertement. Cela est visible déjà à travers bon nombre de campagnes publicitaires, tout comme à travers même certaines recompositions disons “esthétiques”, servant de décor aux réceptions officielles en Grèce. Sans oublier cette ONG à Lesbos qui vient d’exiger à que l’on enlève une Croix d’une plage de l’île, “car elle porte atteinte au sentiment religieux des migrants”, presse grecque du 15 septembre 2018.

Au même moment, la presse grecque comme étrangère, elle découvrent seulement à présent combien et comment le quotidien que vivent les migrants dans le Camp de Mória à Lesbos est alors apocalyptique, tandis que près de deux milliards d’euros très européistes, auraient été répartis d’abord pour engraisser le clientélisme des ONG, et ensuite que celui de SYRIZA, plutôt que de faire face aux besoins plus que primaires des migrants, presse grecque et internationale du moment. .

Petite chapelle. Péloponnèse, septembre 2018
Petite chapelle. Péloponnèse, septembre 2018
Sur un mur ‘Bonne chance’. Athènes, septembre 2018

Finalement, les éditorialistes de la presse très autorisée, s’insurgent finalement de l’idéologie des frontières ouvertes, à l’instar de Tákis Theodorópoulos dans Kathimeriní cette semaine:
“La partie difficile c’est d’assumer la responsabilité des frontières ouvertes. Sinon, les ‘frontières ouvertes’ c’est une notion décousue, une idéologie faisant dans l’euphémisme, sans lien pertinent avec la réalité. Car la responsabilité des ‘frontières ouvertes’ signifie assumer d’abord la responsabilité des personnes qui croisent ces frontières pour se réfugier sur notre territoire. Il faut donc s’en occuper, les nourrir, les loger, leur apporter tous les soins médicaux nécessaires, plus la sécurité, et peut-être même les faire travailler. Surtout si en plus notre État veut être désigné comme démocratique, il doit également protéger ses propres citoyens pour que la cohabitation avec les migrants ne devienne pas contrainte, sachant que les migrants sont des gens qui n’ont pas vécu ni la paix dont ils jouissent ici et ils ne connaissent, ni la démocratie, et encore moins son fonctionnement, tandis que leur perception des droits sont plutôt inexistants.”

“Il est évident que l’Union européenne était non seulement mal préparée à assumer les ‘frontières ouvertes’, mais après tant d’années comme d’expériences, elle n’est même pas en mesure de mener l’une des notions centrales de sa constitution. L’UE montre du doigt et elle condamne Orban, sans tenir compte du fait que des sociétés et pays qui ne sont pas sous le gouvernement Orban, réagissent alors de plus en plus par la négative face aux ‘frontières ouvertes’. Le didactisme du politiquement correct est ainsi et de fait annulé par une réalité politique qui lui tourne de plus en plus le dos.”

“Aux antipodes d’Orban de la Hongrie, se situe alors la politique de notre pays en la matière. L’Europe se montre préoccupée par le nationalisme et le populisme de droite, sauf qu’elle n’est pas en mesure de voir le populisme de gauche. Probablement, parce que ce dernier utilise la rhétorique et les impératifs moraux justement issus du politiquement correct. Ainsi, l’Europe découvre soudainement que les migrants à Mória, pour la plupart, ils vivent dans des conditions bien pires que celles laissées dans leur pays natal. Aujourd’hui, nous venons d’apprendre que quatre cents enfants sont littéralement sans-abri. D’autres enfants sont portés disparus. Ce sont les victimes de la politique des ‘frontières ouvertes’. Tous ceux qui sont empilés de la sorte dans les conteneurs et dans les camps, ne peuvent alors que haïr le pays qui leur a promis l’hospitalité et qui les a dupés. Notons que le corps social à Lesbos a également subi un viol et compte parmi les victimes de la politique des frontières ouvertes.”, quotidien “Kathimeriní” du 22 septembre.

L’éditorialiste de “Kathimeriní” ne dit pas pourtant combien, les migrants et les mondialisateurs à la Troïka, partagent au fond le même mépris pour la démocratie et pour les droits des citoyens, et j’ajouterais, la même perception de la terre, du terrain conquis, dont ils ont été d’abord les victimes chez eux, lorsque leurs pays ont été et le sont toujours, piétinés par les intérêts… des “humanistes” affalés des conclaves mondiaux et mondains. La recette n’est pas nouvelle. On utilise alors les victimes d’ailleurs… pour achever ainsi les victimes d’ici. C’est une forme de guerre totale à la manière de notre siècle ultime. Et c’est exactement cette dimension du problème qui est désormais perçue par le mécano du coin ou par le jeune au café du Péloponnèse… authentique, que l’analyste de la grande presse ne veut surtout pas discerner.

Hommes de la Marine nationale russe. Île de Póros, septembre 2018
Hommes de la Marine nationale russe. Île de Póros, septembre 2018
Hommes de la Marine nationale russe. Île de Póros, septembre 2018

Le bateau de pêche a été détruit dans les… règles. Son propriétaire, ses proches, le mécano, ils ont d’abord évoqué des sujets d’actualité comme si de rien n’était et ce bavardage… bien psychanalytique, a duré près d’une heure. Puis soudainement, une voix a pour ainsi dire a déchiré l’atmosphère: “En route, les gars, on y va.” Aussitôt, les visages se sont crispés car on passait à l’acte, comme pour commettre alors un crime.

Et comme pour l’autre bateau, le temps était venu, celui de son exécution, de sa mise à mort. Derrière lui, une pelleteuse. Coque brisée comme on brise alors les os d’un animal encore vivant. Comme si le bateau avait du souffle et de la voix. Pendant une petite heure, je voyais le bateau perdre sa belle forme, se perçant et se brisant, se lamenter même. Ceux du Péloponnèse cette fois authentique, ils ont été visiblement émus. Un vieux pêcheur s’est rapproché à vélo observant déjà la scène de loin: “Salopards, ils l’on eu. Encore un. La Grèce est morte.

Marins russes. Póros, septembre 2018

Beau pays et cependant coquille de plus en plus vidée. L’endroit a été nettoyé et les débris chargés. Au départ du camion, parmi les participants… à la cérémonie, il y en a qui ont donné rendez-vous à Póros, à l’occasion de l’arrivée très officielle et pour tout dire rarissime d’un navire de la Marine nationale russe. Cette visite de la frégate AMIRAL ESSEN de la classe de l’amiral Grigorovitch, s’inscrit dans le cadre de la commémoration du moment inaugural des relations diplomatiques entre la Grèce contemporaine sous le Gouverneur Ioánnis Kapodístrias, et la Russie. Il y a tout juste 190 ans, ces documents historiques avait été signés dans une demeure justement, de l’île de Póros, très exactement à la date du 17 septembre 1828.

Il faut dire qu’aussitôt sur l’île, les marins russes… ont été très positivement remarqués par la population, et autant on dirait par certains touristes. Après la cérémonie en présence des Russes, le navire a levé l’ancre, depuis, l’avion militaire russe a été abattu en Syrie suite à la… gestion des cieux par les F-16 israéliens, et l’histoire très prochaine ne nous est pas encore connue bien entendu.

Le navire AMIRAL ESSEN à Póros. Septembre 2018
Il y a 190 ans à Póros. Septembre 2018
Il y a 190 à Póros. Septembre 2018
Cérémonie grecque et russe. Póros, septembre 2018

C’est donc dans ce contexte géopolitique et interne tendu, que le gouvernement de la marionnette Aléxis Tsípras, fait semblant de découvrir qu’avec le reste des biens publics, il a également transféré la jouissance des sites archéologiques et des musées à la Treuhand à la grecque, c’est-à-dire, aux mains des rapaces planétaires de l’Agence chargée de la privatisation des biens de la Grèce. Et pendant ce temps, on détruit à la chaîne les bateaux de pêche, de préférence traditionnels. Culture morte.

L’affaire avait été fort heureusement récemment dévoilée par un communiqué de l’Association des Archéologues Grecs, daté du 18 septembre, avant que la nouvelle ne soit reprise à travers la presse du pays. D’après le communiqué, “l’Association des Archéologues Grecs souligne une nouvelle fois que les monuments historiques sont protégés par la Constitution et de ce fait, ils sont toujours de propriété publique et ne peuvent faire l’objet d’aucune transaction. Nous dénonçons ainsi, la tentative de transfert de la gestion de tous les monuments anciens comme plus récents, à la Compagnie de Gestion des Biens de l’État, Société Anonyme (ET.A.D. SA), d’après la décision 2018-0004586, en vertu de la loi. 4389 de 2016, et de la décision gouvernementale 86 du 18.06.2018, Journal Officiel 2320 du 19 juin.”

“Cette décision ahurissante a été repérée à l’occasion de la publication d’une liste des monuments ainsi ‘transférés’, relevant du Service archéologique de Région de la Canée en Crète. Sur cette liste y figurent notamment, une grande partie Est des fortifications vénitiennes, le fossé du mur byzantin, le fossé Sud des fortifications vénitiennes, vestiges qui se sont révélés autant importants car on y a découvert des restes de la période minoenne, les traces du chantier naval vénitien, ainsi que les tours vénitiens Monigo, le bastion Lando, la forteresse Firka et le bain turc. Biens et surfaces déjà expropriés à des fins archéologiques par le Ministère de la culture et parfois monument et qui sont également en cours de restauration. Sur cette liste sont encore inclus, les musées archéologiques (!), dont celui établi au sein de l’église de San Francesco, le nouveau Musée archéologique de la ville, le Musée national d’Elefthérios Venizélos, de même que les Archives historiques de la Crète.”

“C’est alors un processus qui ne trouve pas de précédent dans l’acception de ce qui tient habituellement de la bonne gestion en matière de patrimoine culturel. Ainsi, et à juste titre, cette décision gouvernementale ne peut que susciter les plus vives réactions en cascade au niveau national, comme autant international. L’exclusion des monuments et des sites archéologiques, conformément à l’article 196, paragraphe 4 de la loi. 4389 de 2016, n’est que de la poudre aux yeux, dans la mesure où elle est contredite par le paragraphe suivant. Le paragraphe 5 de ce même article stipule que les propriétés exemptées demeurent pourtant inclus dans le portefeuille de la gestion de la Compagnie de Gestion des Biens de l’État. La possession donc, l’utilisation et la gestion des monuments les plus importants de la Canée n’appartiennent plus au ministère de la Culture, ni à ses Services régionaux, en violation de l’esprit de l’article 24 de la Constitution de la Grèce.”

L’Acropole. Athènes, septembre 2018
Travaux. Immeuble classé. Athènes, septembre 2018
Bar datant des années 1930. Athènes, septembre 2018

“Les monuments et les antiquités sont des objets et des réalités qui doivent rester hors toute transaction ou opération de transfert, et ceci de façon comme on dit inaliénable. Toute tentative de transfert à des tiers de leur gestion nous trouve ainsi opposés. Ceci est une position ferme de notre Association, et nous allons nous battre par tous les moyens légaux afin de maintenir le caractère d’antiquités comme étant un bien social public. L’Association des Archéologues Grecs ne permettra pas l’utilisation des sites archéologiques et des monuments comme une sorte de gage, lié à la dette et ceci même pour une durée d’un siècle, au demeurant, aux résultats largement inconnus en fin de compte.”

“Cette action inacceptable, même si elle se produit en temps de paix, elle ne peut être comparée qu’aux vandalismes des monuments et le pillage des antiquités durant les années pétrifiées de l’Occupation allemande, ou au moment où les antiquités était largement pillées au 19ème siècle. Il s’agit enfin de la phase ultime dans l’aberration politique actuelle, étant donné qu’au même temps, nous nous attendions plutôt à une action coordonnée pour le retour des antiquités volées, et pour une compensation légitime liée à leur destruction en temps de guerre. Pour ces raisons importantes, l’Association des Archéologues Grecs, appelle les dirigeants politiques du ministère de la Culture et le gouvernement à annuler immédiatement le transfert de la propriété et la gestion des monuments de La Canée et des autres régions du pays inclus dans cette liste des 10 119 biens à transférer à la Compagnie de Gestion des Biens de l’État (…).”,communiqué de l’Association des Archéologues Grecs sur leur site Internet.

L’entrée du port du Pirée. Septembre 2018
Réception. Péloponnèse, septembre 2018
Roue volée. Póros, septembre 2018

“C’est le site de l’Acropole même qui est menacé par un tel processus”, fustige alors Míkis Theodorákis dans une déclaration communiquée à la presse grecque. Le “gouvernement” dément dans un premier temps, et finalement du bout des lèvres, la nouvelle Ministre de la Culture, la PASÓKienne Myrsíni Zorbá, admet que “c’est dommage que de ne pas délier les monuments de la liste (…) je suppose que Madame Koniórdou qui occupait ce poste il y a peu, avait trouvé une formule adéquate en concertation avec le Ministère des Finances lors de la constitution de cette liste des biens transmis en 2016, cela-dit, je l’ignore”, presse grecque du 21 septembre 2018.

Pendant ce temps, on vole désormais les roues des motos, même sur l’île de Póros, tandis qu’à deux pas des lieux du martyre du caïque brisé, les élus très locaux organisent réception sur réception pour accueillir les potentiels “investisseurs” forcement étrangers qui convoitent hôtels et autres bâtiments désormais relevant ou presque, de la gestion de la fameuse Compagnie de Gestion des Biens de l’État.

D’ailleurs, sur cette fameuse liste longue aux 10.119 biens, figurent d’après les Archéologues, la Tour Blanche de Thessalonique, le monument de la Rotonde, ainsi que l’Église de la Sainte Sophie, presse grecque de la semaine. D’autres sources font état d’une situation dangereuse et analogue pour ce qui est des Îles Ioniennes. Sur l’île de Céphalonie par exemple, ce serait le périmètre du monument dédié à la mémoire des Italiens de la division ACQUI, massacrés comme on sait par les troupes allemandes en septembre 1943, qui passerait sous contrôle… de la Treuhand à la grecque. Retour… de l’histoire ? Je pense alors autant, aux émouvants messages que des Italiens ont laissés sur les murs de l’ancienne prison située au deuxième sous-sol de l’immeuble pour un temps historique que la Gestapo avait transformé en prison entre 1943 et 1944. Serait-il peut-être à vendre ?

Message italien de 1944. Athènes, septembre 2018
Drapeau national. Message de la Résistance grecque de 1944. Athènes, septembre 2018
Navette italienne. Le Pirée, septembre 2018
Baigneurs. Le Pirée, septembre 2018

Bonne année pour le tourisme d’après les médias. Au Pirée, on se baigne entre les fortifications antiques et les évidences du temps présent, signe aussi des temps. Parfois, on y distingue même certaines navettes italiennes qui croisent près des côtes, vraisemblablement en direction du Canal de Corinthe.

La semaine dernière, le journaliste Yórgos Trángas, ami des Ambassades des États-Unis et du Royaume Uni, d’après ses propres affirmations, a-t-il publiquement et fermement souhaité… “l’essor du tourisme en Grèce, c’est-à-dire, d’arriver à plus de 60 millions de visiteurs par an, au lieu de presque 30 millions actuellement”, Radio 90.1 FM, zone matinale. Autrement-dit, le cauchemar, la gestion du patrimoine et les bateaux de pêche en moins si le crime actuel alors se perpétue entre SYRIZA et les marionnettes d’en face, chez les Mitsotákis.

Beau pays marin, derrière sa vitrine.

Beau pays marin, derrière sa vitrine. Athènes, septembre 2018
* Photo de couverture: Nos plaisanciers visiteurs. Île de Póros, septembre 2018

Monuments historiques et musées transférés au Fonds de privatisation de la Grèce

Les archéologues et les gardes des sites sont en colère après que le ministère grec des Finances eut rendu une décision ordonnant  le transfert de plusieurs sites historiques,  musées, monuments et bâtiments historiques au Fonds de super privatisation.

Ils appartiennent de facto à l’Etat et ne peuvent être vendus, a déclaré l’Association des archéologues grecs dans un communiqué intitulé « Non à la vente des monuments du pays » publié mercredi.

Selon les archéologues, 10 119 sites archéologiques, musées et bâtiments historiques ont été transférés au Fonds de privatisation, dont beaucoup proviennent de la région de La Canée et de la Crète.

«Les monuments sont protégés par la Constitution, ils ne peuvent être ni transférés ni vendus», a déclaré l’Association, ajoutant que ce transfert sans précédent connu lorsque le catalogue des monuments de La Canée et des environs est devenu public.

Parmi les monuments et musées de La Canée figurent le nouveau musée archéologique, le musée archéologique situé dans l’église Saint-François, le musée national Eleftherios Venizelos, les archives historiques de Crète, plusieurs douves vénitiennes et byzantines, des fortifications et des bastions ainsi que des propriétés importantes. Des vestiges architecturaux minoen ont été découverts.

«L’Acropole est-elle le prochain?», a déclaré jeudi l’Association des gardes sur les sites archéologiques, également en colère, dans une déclaration  ajoutant que des terrains avaient également été transférés.

La menace de grèves.

«Notre réponse sera très dure. Notre patrimoine culturel appartient à tous les Grecs, aucun gouvernement n’a le droit de négocier à ce sujet ou de transférer la propriété », ont-ils déclaré dans leur déclaration.

Comment cela peut-il arriver?

Le comité chargé de transférer les biens de l’État au Fonds de privatisation est libre d’agir à sa guise.

Apparemment, le ministère des Finances n’a pas pris les mesures nécessaires à temps pour exempter tous ces sites, musées et monuments.

Négligence? Volontairement ? Dans l’espoir que le transfert illégal ne sera pas expulsé?

Le fait est que le transfert a lieu avec la décision ministérielle.

Dans un communiqué publié jeudi, le ministère des Finances a déclaré que «le décret ministériel sur le transfert ne signifie pas que le transfert est automatique car les contrôles doivent être effectués en premier».

Dans le même temps, il est expliqué qu’ont été exemptés du transfert des rivages maritimes, des plages, des zones sous protection naturelle, des sites archéologiques et des zones de forêts pures, des places, des rues, des ports * et une liste d’autres biens de l’État ayant peu à voir avec le problème.

Le ministère des Finances a indiqué entre autres que le transfert de biens publics au Fonds de privatisation était l’une des conditions préalables des créanciers à la conclusion de la 4ème revue du programme grec.

Je me souviens que le ministre des Finances, Euclid Tsakalotos, avait émis un ordre de transfert de biens appartenant à l’Organisation nationale du tourisme. La décision de juin 2016 avait également ordonné le transfert en vue de la privatisation du tombeau de l’éminent politicien Eleftherios Venizelos .

Pendant ce temps, les médias à La Canée exhortent les autorités locales à demander des explications au gouvernement central et à prendre des mesures.

Vendredi matin, le ministre de la Culture, Myrsini Zorba, a admis le trasnfert et a blâmé celle qui l’a précédé, Lydia Koniordou, pour une éventuelle négligence.

« C’était une erreur de ne pas exclure les monuments en 2016, je suppose que Mme Koniordou avait fait des arrangements avec le ministère des Finances, mais je ne sais pas », a déclaré Zorba aux médias.

« C’est la loi de 2016 qui a donné aux fonds de privatisation toutes les propriétés de l’État à l’exception des sites archéologiques déclarés, des régions Ramsar, etc. Je n’ai aucune raison de remettre en cause l’ordre juridique du ministère des Finances », a ajouté Zorba.

La veille, le ministre de la Culture a tenté de réprimander les archéologues, mais il a finalement dû reconnaître l’amère vérité.

sources: plusieurs médias

* La Grèce a été forcée par les prêteurs à privatiser ses plus grands ports du Pirée et de Thessalonique.

Dix ans après la crise, les financiers se portent toujours bien, les autres beaucoup moins

 15 septembre par CADTM Belgique

Action du collectif ByebyeTina du 15 septembre 2018 devant la Bourse de Bruxelles – Photo Collectif Krasnyi

Il y a dix ans, le 15 septembre 2008, Lehman Brothers s’effondrait. Cette faillite retentissante marquait le déclenchement d’une crise financière et économique aux contours encore obscures et dont la sortie semble encore fort éloignée. Par la suite, d’autres faillites se sont succédé, des faillites gérées par la plupart par des États selon le fameux principe de socialisation des pertes, un mantra toujours d’actualité. Sans réelles poursuites des responsables, sans réelles conditions pour la suite. Dix ans après, les dettes globales, privées et publiques, sont plus élevées qu’en 2008 et ne sont pas moins risquées malgré les annonces optimistes des « responsables » politiques. Les populations se saignent aux quatre veines, à coup d’augmentations d’impôts et de coupes budgétaires dans des services publics pourtant essentiels, pour rembourser des dettes responsables de l’austérité qu’on leur impose.

Un monde vulnérable aux secousses financières

Les causes structurelles de la débâcle de 2008 sont toujours présentes. Rien n’a été accompli pour réglementer sérieusement les activités spéculatives, l’utilisation des dérivés ou même pour limiter l’effet de levier pratiqué par les banques (celles-ci ont très peu de fonds propres par rapport à tous les crédits qu’elles octroient). Aucune démarche non plus pour protéger nos dépôts des activités de trading à haute fréquence, pour assainir profondément le bilan des banques ou pour en diminuer radicalement la taille.

Tout le monde ne pâtit pas de la crise de la même façon. En 2015, on découvre ainsi que le FMI fait 2,5 milliards d’euros de profits sur ses prêts à la Grèce depuis 2010 [1]. Plus récemment, on apprend que la BCE, via son programme d’assouplissement quantitatif (en anglais QE – quantitative easing), a réalisé 7,8 milliards d’euros de bénéfices grâce aux titres grecs [2]. Rappelons que cette politique d’assouplissement quantitatif a permis aux grandes banques européennes de se débarrasser des bonds d’États en difficulté sans tenir compte de leurs pratiques spéculatives. Hormis quelques rares banquiers jugés au pénal en Islande, les cadres supérieurs du système financier, celui même qui a engendré cette crise financière transformée en une grave crise sociale dans toute l’Europe, sont restés impunis (les deux tiers des cadres de Lehman se sont d’ailleurs recyclés dans d’autres grandes banques).

Par ailleurs, la diminution des taux d’intérêt dans les économies dites « avancées », provoquée par l’injection massive d’argent de la part des banques centrales des pays riches, a poussé les investisseurs à prêter massivement aux pays du Sud. Environ 12 000 milliards de dollars ont été injectés dans le système financier depuis l’effondrement de Lehman Brothers [3].

Ces flux financiers ont provoqué une augmentation de la dette externe de ces pays libellée en dollars, une dépendance économique accrue vis-à-vis des créanciers occidentaux avec, in fine, le risque d’une nouvelle crise de la dette dans les pays appauvris.

L’augmentation des taux d’intérêt déjà à l’œuvre aux États-Unis détourne aujourd’hui l’attention des investisseurs des économies du Sud à vers les économies du Nord et en particulier vers les États-Unis. Le danger pour les pays du Sud deviendra plus important encore avec l’arrêt du programme du QE de la BCE et de la FED prévu depuis longtemps mais repoussé plusieurs fois vu les risques qu’il fait peser de tous les côtés. Leurs dettes en devises fortes, déjà difficilement soutenables, deviendront insurmontables. Sans doute le FMI, l’éternel pompier pyromane, viendra t-il à la rescousse tel un prêteur en dernier ressort ?

Le recours à l’endettement est devenu la règle plutôt que l’exception

La dette globale sans tenir compte de la dette des entreprises financières (principalement du secteur bancaire) est passé de 97 000 milliards au début de la crise en 2007 à 169 000 milliards de dollars au milieu de l’année 2017, soit une augmentation de 74 % [4]. Les entreprises privées non financières ont poursuivi le recours à l’emprunt de manière intensive et leur dette est passée de 37 000 milliards de dollars à 65 000 milliards de dollars mi 2017. Cette augmentation faramineuse est en grande partie due aux entreprises chinoises, désormais parmi les acteurs les plus importants du panorama global, dont la dette a augmenté de 15 000 milliards de dollars depuis 2007. En pourcentage du PIB, celle-ci est passée de 97 % à 163 % du PIB chinois en 2017, l’un des ratios les plus élevés au monde.

Aux États-Unis, la dette des étudiant-e-s a plus que doublé durant ces dix années de crise : de 600 milliards de dollars il y a dix ans, elle dépasse dorénavant les 1 500 milliards de dollars début 2018. La financiarisation de l’accès aux études représente une bulle spéculative susceptible d’exploser.

Les droits sociaux dépouillés par l’austérité

Alors que les banques et assurances ont été en grande partie recapitalisées par les États, les populations, elles, n’en ont pas fini de payer. Mais pourquoi les peuples devraient se priver de leurs droits fondamentaux pour des faillites privées dont la responsabilité incombe à leurs dirigeants et aux agences en charge de leur contrôle ? Pourquoi les laisserait-on répéter encore les mêmes erreurs ?

Alors que les grandes plus entreprises payent de moins en moins d’impôts, une diminution importante des services publics et une casse de la sécurité sociale ont contribué à l’émergence d’une crise sociale réelle. En Grèce, une récente étude universitaire a démontré les liens évidents entre mesures d’austérité et accroissement spectaculaire du taux de mortalité dans le pays, un taux dont la croissance a dépassé de cinq fois celle de la moyenne européenne durant la même période. [5] De plus, les États européens dans l’application des mesures d’austérité, n’hésitent à diminuer l’accès aux soins, à réduire le plafond du salaire minimum, à démanteler les droits des travailleurs, les allocations sociales, etc. alors que le taux de chômage ne finit pas d’augmenter. De plus, l’âge de la retraite a été retardé et le montant des pensions largement réduit, alors que dans certains pays ces revenus représentent la seule chance de survie de milliers de ménages.

Dettes liées à l’hypothèque

Le droit au logement est plus que jamais menacé par cette crise. L’insolvabilité des ménages (dont les moyens ont été diminués et les frais augmentés) a eu des conséquences sur le droit fondamental que constitue l’accès au logement. Les milliers de ménages qui ne pouvaient pas rembourser leurs prêts, se sont retrouvés attaqués par les banques à coups de ventes aux enchères ou d’expulsions. En Espagne, on estime à 800 000 les familles qui ont perdu leur logement pour cause d’insolvabilité alors qu’au même moment, le gouvernement grec s’est engagé face à ses créanciers à vendre aux enchères 135 000 logements d’ici 2021.

Une décennie d’approfondissement des inégalités
Les entreprises privées contribuent de moins en moins à renflouer l’État via l’impôt sur les sociétés qui leur est attribué. En effet, quand les capitaux ne s’évadent pas dans les paradis fiscaux, ils sont, en toute légalité, de moins en moins taxés. Cette baisse de contribution des entreprises équivaut à un manque à gagner pour l’État qui à son tour est obligé de s’endetter. Un rapport publié mercredi 5 septembre par l’OCDE, nous apprend que « le taux moyen de l’impôt sur les sociétés dans la zone OCDE a reculé de 32,5 % en 2000 à 23,9 % en 2018 ». Parmi les dernières mesures en date, les États-Unis ont approuvé l’année dernière une forte chute du taux d’imposition des entreprises qui est passé de 35 à 21 % et la France prévoit d’abaisser progressivement l’impôt sur les sociétés de 33 à 25 % pendant le quinquennat d’Emmanuel Macron.
Action du collectif ByebyeTina du 15 septembre 2018 devant la Bourse de Bruxelles – Photo Collectif Krasnyi

Moins ponctionnées, ces sociétés engrangent des profits faramineux. Au niveau mondial, les dividendes qu’elles versent à leurs actionnaires ont atteint le niveau record de 244,7 milliards de dollars au premier trimestre 2018. Oxfam nous rappelle que ce vol organisé se déroule dans un monde toujours plus injuste où seules 62 personnes possèdent autant que la moitié de la population mondiale.

Face à ce délabrement persistant de la finance dérégulée, à l’heure où se profile une nouvelle crise financière, nous continuons de nous mobiliser. Nous soutenons le mouvement « Byebyetina » à Bruxelles et à Liège ainsi que la mobilisation européenne pour fêter à sa manière les 10 ans de la crise : actions de rue, manifestations, conférences, débats pour notre avenir à tous et toutes. Seule la conscientisation de la population peut la mobiliser face aux injustices.

Cet article a été publié (dans sa version courte) pour la première fois sur Politis

Notes

[4Données extraites de l’étude Rising Corporate debt, Peril or promise ?, McKinsey Global Institute, juin 2018.

Source http://www.cadtm.org/10-ans-apres-l-eclatement-de-la-crise-les-financiers-se-portent-bien-les

Bien vivre au travail : une utopie

Le collectif Grèce-austérité vous signale cette conférence.

Au fil des années, la souffrance au travail apparaît au grand jour : augmentation des cadences, insatisfaction des travailleurs dans l’application de leurs tâches à cause des conditions de travail, comme c’est le cas des infirmières.
Par ailleurs, le travail est de plus en plus atomisé : il est de plus en plus individualisé, autonomisé. Les entreprises ont de plus en plus recours à la sous-traitance et aux auto-entrepreneurs.

Que faire ? Ne faut-il pas chercher à organiser autrement le travail afin de donner un sens à celui-ci et un rôle à chacun des acteurs ? Ne faut-il pas lutter contre la hiérarchie ? Ne faut-il pas développer d’autres structures de travail que l’entreprise privée, comme les coopératives ?

Pour discuter de ces questions, Ensemble-Isère
vous invite à une conférence-débat
mardi 25 septembre à 19h30
à la Maison des Associations de Grenoble

Suite à des témoignages, Benoît Borrits auteur de « Au-delà de la propriété, Pour une économie des communs » décrira une économie basée sur le principe du Commun pour en déterminer les incidences sur le contenu même du travail

Situation dramatique sur l’ile de Lesbos

2 articles : (1) Des enfants tentent de se suicider dans le camp de Moria en Grèce  et Migrants (2) Les journalistes en grève à Lesbos

MSF : des enfants tentent de se suicider dans le camp de Moria en Grèce : Par  Wesley Dockery Naser Ahmadi

Le camp de réfugiés de Moria sur l’île grecque de Lesbos a été à plusieurs reprises au centre de la crise migratoire européenne, mais les conditions de vie désastreuses semblent s’être encore détériorées. Luca Fontana, co-coordinateur des opérations de Médecins sans frontières (MSF) sur l’île, raconte notamment à InfoMigrants le désespoir des jeunes demandeurs d’asile.

Surpeuplement. Violence. Saleté. Ce ne sont là que quelques-uns des mots utilisés pour décrire le camp de migrants de Moria, en Grèce, à Lesbos. Dans une interview accordée à InfoMigrants, Luca Fontana, le co-coordinateur des opérations sur l’île pour MSF, a déclaré que des enfants y tentent même de mettre fin à leurs jours. « Il y a des enfants qui essaient de se faire du mal ainsi que des enfants qui ne peuvent pas dormir à cause d’idées suicidaires », explique-t-il. Ces enfants sont souvent traumatisés par les conflits qu’ils ont connus dans leur pays d’origine. Et les mauvaises conditions de vie dans le camp de Moria, qu’il décrit comme une  » jungle « , ne font qu’aggraver leur situation.

Manque d’accès aux soins de santé mentale

« Nous dirigeons un programme de santé mentale pour les enfants, avec des groupes de thérapie et des consultations pour les cas les plus graves », raconte-t-il. « Mais le problème est qu’il n’y a pas de psychologue ou de psychiatre pour enfants sur l’île : ils n’ont donc pas accès aux soins médicaux parce qu’ils ne sont pas transférés à Athènes pour y recevoir des soins spécialisés. »

La clinique de santé mentale de MSF est située à Mytilene, la capitale de Lesbos, et l’organisation est la seule ONG qui fournit des soins psychologiques à la population migrante de l’île. A la clinique, les enfants dessinent pour exorciser les traumatismes qu’ils ont subis dans leur pays, pendant l’exil ou en Europe.

Les demandeurs d’asile sur l’île ont fui la Syrie, l’Afghanistan, l’Irak, le Soudan et le Congo, des pays où la guerre est souvent une réalité quotidienne.

Bien qu’il y ait eu des tentatives de suicide, aucune n’a abouti, précise Luca Fontana.

Les temps d’attente pour les services de base sont longs, les conditions de vie « horribles » 

Les migrants doivent attendre longtemps avant d’obtenir des soins médicaux, car le camp est surpeuplé. La capacité d’accueil est de 3 000 personnes, mais ils sont plus du triple, dont beaucoup vivent dans des tentes. Surtout, près de 3 000 occupants sont des enfants.

A Moria, il y a très peu de toilettes – environ 1 toilette pour 50 à 60 personnes. Les migrants reçoivent trois repas par jour, mais l’attente est longue. « Ils faut parfois attendre trois heures par repas. Les gens doivent se battre pour la nourriture et les services médicaux. »

En juillet, MSF a lancé sur son site web plusieurs demandes d’aide urgentes. L’ONG souhaite que les personnes vulnérables soient déplacées vers des logements plus sûrs, pour « décongestionner le camp ».

Source http://www.infomigrants.net/fr/post/11769/msf-des-enfants-tentent-de-se-suicider-dans-le-camp-de-moria-en-grece

et le commentaire de Vicky Skoumbi : …En effet le camp de Moria est plus que surpeuplé,  avec 8.750 résidents actuellement pour à peine 3.000 places, chiffre assez large car selon d’autres estimations la capacité d’accueil du camp ne dépasse pas les 2.100 places. Selon le Journal de Rédacteurs,(Efimerida ton Syntakton) 

http://www.efsyn.gr/arthro/30-meres-prothesmia

Il y a déjà une liste de 1.500 personnes qui auraient dû être transférés au continent, à titre de vulnérabilité ou comme ayant droit à l’asile,mais ils restent coincés là faute de place aux structures d’accueil sur  la Grèce continentale. Les trois derniers jours 500 nouveaux arrivants se sont ajoutés à la population du camp. La plan de décongestion du camp du Ministère de l’immigration est rendu caduc par les arrivées massives pendant l’été. 

La situation sanitaire y est effrayante avec des eaux usées qui coulent à ciel ouvert au milieu du camp,  avant de rejoindre un torrent qui débouche à  la mer. Le dernier rapport du service sanitaire,  qui juge le  lieu impropre et constituant un danger pour la santé publique et l ‘ environnement,  constate non seulement le surpeuplement,  mais aussi la présence des eaux stagnantes, des véritables viviers pour toute sorte d’insectes et de rongeurs et bien sûr l’absence d’un nombre proportionnel à la population de structures sanitaires. En s’appuyant sur ce rapport,  la présidente de la région menace de fermer le camp si des mesures  nécessaires pour la reconstruction du réseau d’eaux usées ne sont pas prises d’ici 30 jours.  Le geste de la  présidente de la Région est tout sauf humanitaire,  et il s’inscrit très probablement dans une agenda xénophobe, d’autant plus qu’elle ne  propose aucune solution alternative pour l’hébergement de 9,000 personnes actuellement à Moria. N’empêche les problèmes sanitaires sont énormes et bien réels,  le surpeuplement aussi,  et les conditions de vie si effrayantes qu’on dirait qu’elles ont une fonction punitive. Rendons- leur la vie impossible pour qu’ils ne pensent plus venir en Europe…

Ouvrez les îles maintenant ! Et je dirais même,  ouvrez -les hier, avant qu’il ne soit trop tard

Malheureusement la campagne lancée il y a un an reste plus que jamais actuelle

https://opentheislands.wordpress.com/2017/10/11/open-the-islands-no-more-dead-from-cold/


Migrants : les journalistes en grève à Lesbos

Grèce. Suite à des violences d’extrême-droite, les journalistes ont décidé de faire grève et de ne plus couvrir l’île de Lesbos, porte d’entrée migratoire en Grèce.

13.09.2018

L’île grecque de Lesbos était privée jeudi de médias locaux du fait d’une grève des journalistes contre des violences d’extrême droite les visant, sur fond de tensions alimentées par le confinement sur l’île de plus de 10’000 exilés.

L’appel au débrayage de 24 heures intervient alors qu’un homme devait être jugé dans la journée pour «diffamation» et «injures» après une plainte d’une journaliste à laquelle il s’en était pris sur les réseaux sociaux.

Devant le tribunal

Le tribunal de Mytilène, chef-lieu de Lesbos, a finalement décidé de suspendre l’audience jusqu’au 22 janvier, après un recours de l’accusé qui a invoqué des raisons de santé.

La plaignante, Anthi Pazianou, du cas de laquelle s’est saisie le Conseil de l’Europe, avait dénoncé une attaque contre une fillette de neuf ans, prise à tort par ses agresseurs pour une réfugiée.

Harcelement

Mais le cas de Mme Pazianou, qui travaille pour plusieurs organes de presse dont l’AFP, n’est le seul sur l’île, où d’autres collègues ont eu maille à partir avec des militants d’extrême droite, et de tels cas de harcèlements et violences sont déjà rapportés depuis plus d’un an, selon le syndicat local des journalistes.

Dans son appel à la grève, celui-ci met en avant «les conditions dangereuses dans lesquelles s’exerce le travail journalistique à Lesbos et les menaces émanant d’éléments extrémistes pour imposer une censure».

Xénophobie

Si elles restent minoritaires sur cette île qui compte près de 90’000 habitants, les mobilisations xénophobes s’y sont multipliées face au confinement sur place de plus de 10’000 réfugiés et migrants qui continuent d’affluer depuis les côtes turques proches. En principe voués au renvoi en Turquie, mais en pratique éligibles pour beaucoup d’entre eux à l’asile en Grèce, ces exilés attendent des mois sur place une décision sur leur sort.

Dans le principal camp migratoire de l’île, à Moria, d’une capacité de 3100 places, plus de 8000 d’entre eux s’entassent dans des conditions dénoncées par toutes les parties prenantes, du personnel au Haut-Commissariat de l’ONU pour les Réfugiés (UNHCR).

Dernier cri d’alarme en date, 19 ONG, dont Oxfam, Caritas et Terre des Hommes, ont réclamé jeudi une «action immédiate» d’Athènes pour mettre fin à une situation «honteuse» et «pire que jamais». (afp/nxp)

Athènes, le 13 septembre 2018 – Plus de 17 000 personnes restent entassées dans des centres d’accueil des îles grecques d’une capacité totale de 6 000 personnes, vivant dans des conditions désespérées qui ne respectent pas les normes humanitaires. Ceci, malgré les assurances publiques du ministre grec de la politique migratoire, Dimitris Vitsas, selon lesquelles les îles seraient désengagées d’ici à septembre et que des milliers de nouveaux lieux seraient créés sur le continent grec. Alors que les conditions continuent de se détériorer, 19 organisations de la société civile demandent une fois encore aux autorités de s’engager dans la création de solutions durables pour la décongestion des îles et d’améliorer immédiatement les conditions d’accueil des réfugiés. Il est tout à fait honteux que l’on attend des gens qu’ils endurent des conditions aussi horribles sur le sol européen.

Moria, le premier centre d’accueil de l’île grecque de Lesbos, récemment décrit dans un rapport de la BBC comme «le pire camp de réfugiés au monde», héberge actuellement près de trois fois sa capacité. Le système d’égout ne fonctionne pas et l’eau de toilette sale atteint les tentes et les matelas où les enfants dorment. Ceci, malgré que des fonds pour l’amélioration du système d’assainissement aient été approuvés depuis un certain temps. Les cas de violence et d’abus sexuels sont en augmentation. Le premier centre d’accueil à Samos est six fois supérieur à sa capacité d’accueil.

En outre, les pénuries chroniques de personnel essentiel sont encore aggravées par les démissions constantes des professionnels de la santé travaillant sur les sites insulaires, qui démissionnent en raison de conditions de travail intenables. Selon la presse grecque, le coordinateur de Keelpno à Samos a déclaré que, malgré les difficultés financières actuelles en Grèce, «le personnel médical préfère prendre la route du chômage plutôt que de devoir travailler dans de telles conditions». Plus tôt cette semaine, le personnel de Moria a organisé une grève pour protester contre les conditions sur le site.

Cette semaine également, la préfecture de l’Égée-Septentrionale a qualifié la Moria de «inadaptée et dangereuse pour la santé publique et l’environnement» et a averti que le site serait fermé dans 30 jours si les conditions sanitaires ne s’amélioraient pas de manière spectaculaire. Dans ce contexte, les organisations de la société civile travaillant sur les îles ont également de plus en plus de mal à faire leur travail.

Il n’y a aucune excuse pour les conditions honteuses dans lesquelles des milliers de personnes restent bloquées dans l’attente de leurs demandes d’asile. Les autorités grecques doivent prendre des mesures immédiates et urgentes pour veiller à ce que les réfugiés bénéficient de l’accès à leurs droits fondamentaux et soient logés dans des conditions dignes, conformément au droit national et international. Les mesures de secours promises par les autorités grecques pour créer des milliers d’hébergements supplémentaires sûrs et dignes sur le continent et transférer des personnes hors des îles sur le continent doivent être mises en œuvre de toute urgence. Dans le même temps, les dirigeants de l’UE devraient de toute urgence redoubler d’efforts pour débloquer les discussions sur la mise en œuvre d’un mécanisme équitable et permanent d’attribution des responsabilités au sein de l’Union européenne.

Les signataires

  1. ActionAid Hellas
  2. Arbeiter-Samariter-Bund
  3. Caritas Hellas
  4. Commission Espagnole d’Ayuda al Refugiado
  5. Conseil danois des réfugiés
  6. DIOTIMA
  7. Conseil grec pour les réfugiés
  8. Forum grec des réfugiés
  9. Greek Helsinki Monitor
  10. Ligue hellénique des droits de l’homme
  11. HIAS Grèce
  12. Comité international de secours
  13. Service Jésuite des Réfugiés
  14. Centre juridique Lesbos
  15. Médecins du Monde
  16. Oxfam
  17. Praksis
  18. SolidarityNow
  19. Terre des hommes

source : Keep Talking Greece

Source https://www.tdg.ch/monde/Migrants–les-journalistes-en-greve-a-Lesbos/story/14509503

Le 8 octobre projection débat au club en présence de Yannis Youlountas

Le collectif citoyen de Grenoble contre l’austérité en Grèce et en Europe – soutenu par Attac Isère et le Cadtm Grenoble

vous invite à la projection-débat en présence du réalisateur Yannis Youlountas

L’amour et la Révolution
Non, rien n’est fini en Grèce

Lundi 8 octobre 2018 à 20h15 Cinéma le Club Grenoble

« Dix ans après les premières émeutes, les médias ne parlent plus de la crise grecque.Tout laisse croire que la cure d’austérité a réussi et que le calme est revenu.  Ce film prouve le contraire.
 A Thessalonique, des jeunes empêchent les ventes aux enchères de maisons saisies. En Crète, des paysans s’opposent à la construction d’un nouvel aéroport.  À Athènes, un groupe mystérieux inquiète le pouvoir en multipliant les sabotages. Dans le quartier d’Exarcheia, menacé d’évacuation, le cœur de la résistance accueille les réfugiés dans l’autogestion.
Un voyage en musique parmi celles et ceux qui rêvent d’amour et de révolution. »

Depuis la projection le 23 avril à Villard Bonnot le film a été actualisé en juin et juillet en Grèce. Et pour ce qui est du débat les récentes annonces médiatiques de la soi-disant sortie de crise de la Grèce devraient faire l’objet d’un avis différent du réalisateur mais aussi du public. 

Le cinéma le Club 9, bis rue du Phalanstère 38000 Grenoble propose sur son site http://www.cinemaleclub.com  la réservation de places. Ce sera le cas pour ce film prochainement.

L’Europe est au bord de l’abîme Entretien avec J Stiglitz

Par Mathieu Magnaudeix

Dans un entretien à Mediapart, le célèbre prix Nobel d’économie Joseph Stiglitz s’inquiète de la poursuite de l’austérité dans la zone euro. Il s’alarme aussi des politiques de Donald Trump et de l’explosion des inégalités, dix ans après la crise financière de 2008. Plus que jamais, il plaide pour « augmenter les salaires », réguler la finance et lutter contre les « monopoles ».

Lui aussi membre de l’ICRICT, le célèbre prix Nobel d’économie Joseph Stiglitz, professeur à l’université Columbia et ancien chef économiste de la Banque mondiale, a répondu aux questions de Mediapart.

 Panama Papers, Paradise Papers, Swiss Leaks, LuxLeaks, Malta Files, etc. Depuis la crise de 2008, de grandes enquêtes internationales ont prouvé l’ampleur de l’évasion fiscale dans le monde. Mais la situation a-t-elle vraiment changé ?

Joseph Stiglitz. La crise financière de 2008 n’a pas été provoquée par les paradis fiscaux, mais il est assez remarquable de constater la lumière crue qu’elle a projetée sur eux. Et c’est une bonne chose ! Grâce au travail d’investigation de journalistes du monde entier, on s’est rendu compte de la magnitude de l’évasion fiscale, mais aussi de l’évitement fiscal, qui privent les États de ressources cruciales. Les restrictions budgétaires qui ont suivi la crise ont d’ailleurs accru cette prise de conscience et rendu l’opinion très sensible à ces questions.

Plus récemment, je pense que l’élection de Donald Trump a aussi aidé à cette prise de conscience. Le président américain est un expert incontesté du blanchiment d’argent. Avec lui, l’opinion a découvert ce marché obscur où toutes sortes de gens miteux blanchissent de l’argent sale en achetant et revendant des appartements de luxe. C’est exactement le modèle de Trump ! (Il regarde par la fenêtre, au 34e étage d’une tour de Manhattan, qui donne sur des gratte-ciel sur la 3e Avenue).

Tout cela a fini par renforcer le sentiment que dans une ville comme celle-ci, il y a quelque chose qui ne tourne pas rond. Les gens ordinaires ne peuvent plus acheter de biens immobiliers. Les plus pauvres habitent à l’extérieur et doivent chaque jour faire de longs trajets. Mais au cœur de la ville, il y a des milliers et des milliers de mètres carrés vides, propriété de riches spéculateurs, qui s’en servent souvent à des fins de blanchiment. Ce genre de choses renforce la colère des citoyens.

Y a-t-il eu des progrès depuis dix ans pour réduire les paradis fiscaux et réguler les marchés financiers ?

Sur la transparence du système financier international et l’évasion fiscale, il y a eu certains progrès. Mais c’est loin d’être suffisant. Le verre reste aux trois quarts vide. Quant au système financier, est-il plus stable qu’il y a dix ans ? Je dirais probablement. Les seuils de capitaux minimums exigés [des banques – ndlr] ont été augmentés, il y a davantage de supervision. Mais ce n’est clairement pas suffisant. Au cours des trois ou quatre dernières années, il y a même eu d’importantes rechutes, avec la remise en cause de régulations financières adoptées après la crise. La pression des grandes banques américaines a été couronnée de succès. À l’instar de Citigroup, elles ne se cachent pas de faire pression au travers d’amendements législatifs écrits par leurs lobbyistes.

La différence avec le monde de 2008, n’est-ce pas que l’urgence est encore plus grande ? Il y a le défi climatique, l’émergence d’énormes entités monopolistiques comme Apple et Amazon (dont les capitalisations boursières dépassent désormais les 1 000 milliards de dollars), l’explosion des inégalités. Le sénateur socialiste américain Bernie Sanders cite souvent ce fait frappant : aux États-Unis, la fortune cumulée de trois milliardaires, Warren Buffett, Bill Gates et Jeff Bezos, est supérieure au bas de laine de la moitié des Américains les plus modestes…

L’urgence de la question des inégalités est en effet la grande différence. En mars 2011, lorsque j’ai fait paraître un article sur la captation par 1 % des Américains du quart des revenus, il n’y avait pas encore de prise de conscience globale. Désormais, on sait qu’au cours des trois ou quatre dernières décennies, presque tous les bénéfices de la croissance sont allés aux plus aisés. Le capitalisme est en échec. Malgré les progrès fantastiques de la recherche médicale, l’espérance de vie aux États-Unis est en train de décliner, c’est inouï. De plus en plus de gens se disent que le rêve américain est un mythe. L’élection de 2016 est la preuve que l’explosion des inégalités a désormais des conséquences politiques et sociales majeures.

Garantir l’emploi

Justement, Donald Trump, le héraut du « Make America great again », a été élu il y a deux ans. Il se vante souvent d’un taux de chômage au plus bas depuis dix-huit ans et des records de la bourse, autant de preuves, dit-il, de son succès. Que penser de ses politiques économiques ?

D’abord, elles ne marchent pas pour la plupart des Américains. Le marché des actions monte parce que les salaires sont faibles et les taux d’intérêt sont bas. En baissant les salaires et en transférant l’argent vers les profits, il n’est pas difficile de faire monter les marchés d’action, a fortiori si vous baissez les impôts des entreprises !

La réforme fiscale de Trump, une baisse d’impôt massive pour les milliardaires et les grandes entreprises, a substantiellement creusé le déficit budgétaire américain [il pourrait atteindre mille milliards de dollars en 2020 selon le Congrès américain – ndlr] mais la croissance supplémentaire créée par ce cadeau fiscal massif est en réalité très faible. C’était une très mauvaise réforme fiscale, dont l’impact ne sera que de très court terme et minime. Rajoutons à ça le protectionnisme de Trump, qui plonge le monde dans l’incertitude…

Que pensez-vous des « guerres commerciales » lancées par Trump avec la Chine, l’Europe, etc. ?

Dans les guerres commerciales, tout le monde perd. Donald Trump s’est donné comme objectif de réécrire les règles du commerce international pour donner un avantage significatif aux États-Unis et réduire le déficit commercial américain. Mais ce sont des fadaises. Ce qui détermine les déficits commerciaux, c’est la macroéconomie, et quoi qu’il fasse, le déficit commercial américain va s’aggraver. Derrière la rhétorique et ses rugissements, il récolte des cacahuètes.

Regardez l’accord avec le Mexique, récemment annoncé en fanfare. Les États-Unis ont en réalité obtenu une concession mineure sur la part de voitures construites en Amérique du Nord : c’est peu et cela risque in fine d’augmenter les coûts de production et donc de détruire des emplois. L’accord avec la Corée du Sud n’aura pas non plus beaucoup d’effet : la Corée a accepté de faire entrer davantage de voitures américaines qui ne respectent pas forcément leurs critères de sécurité. Mais les Coréens ne les achètent pas ! Qu’il y en ait davantage sur le marché ne changera pas la donne.

Dans la presse américaine, on lit fréquemment des analyses qui annoncent une nouvelle crise financière. Certains pointent les excès de la finance, d’autres la bulle énergétique aux États-Unis, d’autres encore le caractère insoutenable de l’endettement des ménages américains. Doit-on craindre une nouvelle crise ?

Pour la Turquie et l’Argentine, on y est déjà. On se doutait que les politiques d’« assouplissement quantitatif » mises en place par les banques centrales après la crise allaient poser un problème pour les économies émergentes lorsque les taux d’intérêt allaient remonter, à cause de leurs déficits et de leurs dettes. C’est ce qui est en train de se passer et on ne connaît pas le degré de contagion. D’un point de vue global, c’est le risque le plus imminent.

Après, il y a ce que vous mentionnez, notamment la dette étudiante des Américains qui atteint 1 500 milliards de dollars. L’effet négatif sur notre économie est déjà là. De très nombreux Américains ne peuvent plus acheter de bien immobiliers, ils retardent leurs projets familiaux, cela affaiblit l’économie. Le problème, c’est que passé son effet cosmétique, la réforme fiscale de Trump va commencer à avoir un impact négatif sur l’économie. On peut donc s’attendre à un ralentissement économique significatif en 2019 ou en 2020. À ce moment-là, les dettes pourraient accélérer les problèmes.

Vous avez depuis longtemps mis en garde contre l’absence de réforme de l’euro et les politiques d’austérité. L’Europe est-elle en train de sombrer ?

Il est décevant de constater qu’alors que le risque grec a diminué, les efforts pour réformer l’euro et la zone euro ont aussi diminué, tandis que les politiques d’austérité ont continué. La Grèce est toujours en dépression avec des objectifs de surplus budgétaires qui risquent de l’étouffer, les jeunes Grecs continuent de fuir leur pays, et l’Europe semble fermer les yeux. Avec son nouveau gouvernement qui envisage une sortie de l’euro, l’Italie est un risque de crise potentielle. Si l’Europe ne réforme pas l’euro, je pense qu’il faut anticiper une crise. Des pays quitteront l’euro, réellement ou de facto en créant des monnaies parallèles.

L’Europe est au bord de l’abîme. Et quand vous restez au bord de l’abîme, il y a une bonne chance que vous tombiez.

Le président français Emmanuel Macron affiche son intention de réformer l’Europe. À domicile, il mène des politiques orthodoxes.

Il a une vision de l’Europe mais elle ne semble pas convaincre l’Allemagne et d’autres pays. Encore une fois, à part une réforme de l’eurozone et de l’euro, la possibilité de politiques expansionnistes est très limitée. En attendant, l’Europe pratique la dévaluation interne, ce qui cause la récession, affaiblit l’économie, compresse les salaires. L’autre piste, c’est une taxe carbone qui stimulerait l’économie.

En France, en Europe, aux États-Unis, les progressistes recherchent des politiques pour résoudre la question des inégalités, répondre aux défis du changement climatique, lutter contre l’autoritarisme et l’extrême droite. Que leur suggérez-vous ?

Une des sources des inégalités, c’est le déséquilibre croissant entre d’un côté le pouvoir toujours plus grand des monopoles, et de l’autre l’affaiblissement du pouvoir de négociation des salariés. Il faut donc renforcer les syndicats et attaquer les monopoles, à la fois en les régulant et en renforçant la concurrence. Par ailleurs, il faut davantage de redistribution – songez qu’aux États-Unis nous avons un système fiscal non pas progressif, mais régressif ! –, augmenter les salaires des travailleurs, renforcer l’éducation publique, réduire le poids des transferts intergénérationnels avec une taxe sur l’héritage, améliorer la santé, le logement, avoir l’objectif d’un emploi pour tous.

Aux États-Unis, plusieurs figures émergentes du Parti démocrate proposent une « garantie d’emploi » pour les salariés. Ce pourrait même être une des idées phares du candidat opposé à Trump à la présidentielle de 2020. Qu’en pensez-vous ?

C’est une des idées que je soutiens. Pour les classes les plus populaires, et les minorités, le marché ne fonctionne pas comme il devrait. D’un côté, il y a d’énormes besoins, par exemple pour entretenir les villes et apporter des soins aux personnes âgées. De l’autre, plein de gens n’ont pas de travail. Faire se rencontrer les deux réduirait les inégalités, stimulerait l’économie et bénéficierait à toute la société.

Trump est au pouvoir, l’Europe est rongée par l’extrême droite et pourtant vous restez optimiste…

Je n’ai jamais vu les jeunes Américains aussi motivés. Ils réalisent que leur futur est en jeu. Notre démocratie prend l’eau, l’économie est défaillante, mais ils ont encore confiance dans nos processus démocratiques. Ils ont compris que la direction dans laquelle nous entraîne le Parti républicain est un trou noir. Quand je voyage, je sens cela aussi en Europe et dans d’autres parties du monde. Voilà mon espoir.

Exposition colonisée La rubrique de Panagiotis Grigoriou

Panagiotis  Grigoriou est Ethnologue et historien, chroniqueur, analyste, initiateur d’un concept de tourisme alternatif  et solidaire en Grèce. Le regard de l’historien et de l’anthropologue sur l’actualité et le vécu de la crise grecque.

Exposition colonisée

Les apparences dominent pendant que l’été grec se termine. Tout y est, touristes, travailleurs paupérisés, et alors bandits… aux règlements de compte mortels en pleine rue à l’heure du deuxième café. Athènes, ville… vivante au quotidien. Les politiques, Tsípras et Mitsotákis en tête quant à eux depuis Thessalonique à l’occasion de sa foire commerciale, auront comme d’habitude promis.la lune, jamais pleine. Le mensonge gouverne, automne des feuilles mortes.

Retour des îles. Le Pirée, septembre 2018

Les vacanciers athéniens sont de retour, la grogne aussi. Le pays s’apprête à affronter l’automne… en réalité celui de sa destinée, et Tsípras se rend à Thessalonique pour le grand discours politicien annuel d’une portée supposée économique, “le premier discours du genre depuis huit ans, où c’est le gouvernement grec qui fixe les règles en matière d’économie et non pas la Troïka”. Foutaises et canulars.

La ruine des retraités. Presse grecque, septembre 2018

Tsípras a annoncé des allégements supposés de l’imposition et autres mesures similaires et d’ailleurs applicables… dans la durée, c’est-à-dire sur une période de quatre à cinq ans. Ensuite, et pour faire passer la pilule de l’énième baisse du montant des retraites tout en prétendant le contraire, le… dernier Premier ministre de la… “Gauche radicale” a aussitôt voulu rajouter “que comme cette baisse concerne essentiellement les retraités âgés de 70 ans et plus, le problème n’est que temporaire car naturellement, ces pensions versées cesseront d’être au fil du temps”, (radio 90,1 FM, zone matinale du 11/09). Autrement-dit, nos vieux disparaîtront… si possible rapidement d’après le vœu implicite de la marionnette Tsípras. Inutile de dire combien cette déclaration a été aussitôt remarquée à travers le beau pays vieillissant.

Ce prétendu report de la baisse programmée du montant des retraites intervenant dès janvier 2019, pour tout dire opposé aux engagements de Tsípras vis-à-vis du carcan européiste, est déjà mis en cause. Aussitôt, d’entrée de jeu, il a été fortement critiqué, rien que par cette mise à garde de Jean-Claude Juncker en personne: “Les mesures votées doivent être appliquées à la lettre”, quotidien Kathimeriní du 13 septembre .

Je suis torturée. Sur une surface à Athènes, septembre 2018

En attendant, et sur le terrain…grec des expérimentations métahistoriques de notre bien piètre nouveau siècle, Aléxis Tsípras, dans une posture visiblement satisfaite a fait si bonne figure aux côtés de l’Ambassadeur des États-Unis Geoffrey Pyatt , signe aussi des temps géopolitiques qui sont… disons les nôtres. Il faut préciser que le grand pays est l’invité d’honneur à Thessalonique cette année… plus affinités géopolitiques… si “gentiment” imposées. Rappelons aussi que rarement auparavant la Grèce n’avait affirmé une telle aspiration envers l’OTAN, sauf durant la funeste Junte des Colonels, signe aussi des temps on va dire.

On comprendra certes… que Les États-Unis envisagent une nouvelle expansion militaire en Grèce alors sans précédant, au beau milieu des tensions avec la Turquie, ce que la presse américaine évoque autant en ce moment à l’instar de Wall Street Journal cette semaine . La géopolitique, encore la géopolitique.

Le pays grouille alors d’espions et d’agents étrangers ou… compatriotes de toute sorte comme de toute obédience. Déjà les médias publics, voire les médias tout court propagent des “fake news” à répétition, des analystes se présentant sous le masque du patriote ou de l’internationaliste sclérosé travaillent en réalité pour le compte des services des puissances étrangères, comme d’ailleurs et d’abord le gouvernent Tsípras, l’opposition de Mitsotákis, voire, l’essentiel névralgique me semble-t-il de l’État grec profond, sans oublier le système de la partitocratie pseudo parlementaire actuelle.

C’est alors un jeu de rôle dans l’ultime tragédie grecque ou sinon, divine comédie au pays… de l‘exposition colonisée. Le tout, sous une mer Égée fort agitée.et au beau milieu, votre blog Greek Crisis qui lutte pour sa survie, et autant pour en extraire à partir de tout ce magma le sens encore possible de l’histoire comme celui de la vérité à travers les vagues. La maritimité… comme stade final de la politique !

Aléxis Tsípras et Geoffry Pyatt à Thessalonique. Presse grecque, septembre 2018
Aléxis Tsípras à Thessalonique. Presse grecque, septembre 2018
Drapeau et quotidien. Grec. Athènes, septembre 2018

En dehors des pupitres officiels, les Grecs, de droite comme de gauche étaient nombreux à manifester contre la présence de Tsípras à Thessalonique, d’abord les organisations culturelles de la région grecque de Macédoine ont fait savoir combien l’accord signé entre Tsípras et les voisins Slavomacédoniens est inacceptable pour une large majorité en Grèce, et ensuite il y a eu ceux des gauches grecques aux manifestants, toujours dispersés défilant contre l’austérité, et donnant l’illusion de résister sans plus convaincre personne il faut dire. Leur temps historique en Grèce n’est plus et accessoirement… SYRIZA est passé par là.

Et pour ce qui est de l’accord macédonien de Tsípras, tout le monde sait qu’il a été précipité, non pas pour arriver à une solution durable et réellement souhaitable par les deux peuples, mais pour que l’OTAN puisse s’étendre à la Macédoine slave le plus rapidement possible, histoire de contrer l’influence de la Russie dans les Balkans, aux suites géopolitiques relevant de l’habituelle chirurgie plastique des grandes puissances sur les frontières et surtout sur les peuples, car c’est de nouveau dans l’air du temps dans tous les Balkans il faut dire.

Pendant ce temps, et en préparant le référendum du 30 septembre chez nos voisins Slaves, sauf que les Grecs ne seront pas consultés sur ce même accord, les officiels de l’OTAN, ceux de la Présidence autrichienne de l’UE, ainsi qu’Angela Merkel visitent Skopje et interviennent ouvertement en faveur du OUI auprès des Slavomacédoniens lesquels sont d’ailleurs menacés de ne plus espérer intégrer un jour l’OTAN et l’UE en cas de victoire du NON, ceci explique subséquemment cela.

Et comme attendu en Macédoine grecque, les manifestants de Thessalonique ont été très violemment accueillis par les forces de l’ordre, épaulées il faut dire par le FBI et la CIA quant à la surveillance des lieux. Les dits “débordements” des CRS grecs, ont même obligé le gouvernement à ordonner une enquête sur le comportement de certains policiers, presse grecque de la semaine .

Manifestants et CSR. Thessalonique, septembre 2018
Moine et CSR. Thessalonique, septembre 2018. Presse grecque
Futur supposé. Athènes, septembre 2018

Plus au sud, la capitale du pays devenu territoire fait davantage dans les apparences que Thessalonique pendant que l’été bien grec alors se termine. Tout y est, la Garde républicaine Evzone devant le “Parlement” et le Monument du… pauvre Soldat inconnu forcement de jadis. En Attique, les chômeurs pêchent à la ligne près du Temple de Poséidon au Cap Sounion, et au centre d’Athènes on y découvre toute la nouveauté du “Mur de la bonté”. Histoire d’y accrocher de l’aide pour nos semblables, voilà, pour les instantanés de ce beau septembre grec.

Sous les apparences de cette normalité, au pays réel métamorphosé à jamais, les représentants de la Troïka, rendront alors visite aux valais locaux quatre fois par an au lieu de trois sous la Troïka officielle, et les dits marchés, décideront du financement de la colonie de la dette, en lieu et place des structures du dit mécanisme européen.

Car en dépit des mensonges de Tsípras, comme d’ailleurs du germanochrome Mitsotákis à la tête du parti de la Nouvelle Démocratie, la période supposée révolue de la Troïka laisse derrière elle, plus de 700 lois mémorandaires, près de 60 000 décisions gouvernementales allant dans le même sens unique et inique, plus de 300.000 décrets-lois et autres décisions ministérielles toujours en vigueur. Le tout, sous les signatures des gouvernements du mémorandum depuis 2010, SYRIZA compris.

La Grèce subira comme prévu l’entier suivi du programme amélioré de surveillance accrue… post-mémorandum, et cette réalité va durer durant de nombreuses décennies, sous les… auspices des visiteurs réguliers depuis les conclaves des Institutions. Sous le mémorandum… éternel, la surveillance durera ainsi au moins jusqu’au remboursement des 153 milliards.sur les 203 milliards d’euros que le pays de Zeus a comme on dit empruntés auprès du supposé mécanisme de sauvetage européen. D’après les calculs les plus optimistes, ce nouvel exploit hellénique arrivera à son terme seulement vers 2060. Retour vers le futur !

Garde Evzone. Athènes, septembre 2018
Garde Evzone. Athènes, septembre 2018
Pêche à la ligne. Cap Sounion, septembre 2018
Cap Sounion, septembre 2018

Après huit ans de lois austéritaires, et d’une fiscalité multipliée, après tant de dispositions antisyndicales sans oublier le coup de grâce porté sur le régime de la Sécurité Sociale, le bilan grec est… fort prometteur. Le pays a perdu près du 25% de son PIB, la population de la Grèce a diminué de plus de 700 000 personnes entre 2011 et 2017. Pour 48% de la population, soit 5,1 millions de personnes, c’est subsister dans la survie sous le seuil de pauvreté, et il y a 1,5 million de personnes vivant dans la pauvreté alors extrême, c’est-à-dire au-dessous des 182 euros par mois.

Ainsi, trois Grecs sur dix vivent dans une pauvreté extrême, et ils sont incapables de subvenir à leurs besoins de base tels que la nourriture ou le chauffage. Selon ELSTAT, l’Office des Statistiques du pays, 26,7% des enfants de moins de dix-sept ans sont même privés de biens matériels de base. Pour 40,5% des pensionnaires et après dix diminutions successives des montants des retraites, leur pension, n’excède pas les 500 euros en brut par mois. Pour 30,15% des travailleurs du pays, ou alors 613 119 personnes qui travaillent encore, leur “salaire” se situe entre 328€ en net par mois et 580€, le capitalisme réel… plus les Smartphones.

Devant le “Parlement”, les animaux adespotes des lieux sont les seuls à être toujours admirés par les passants et toujours citoyens supposés du pays, hors évidemment les nombreuses tribus de la clientèle des partis, plus clientélistes que jamais. La nouvelle Ministre de Grèce du Nord (régions de Macédoine et de Thrace), la très bimboïde Katerina Notopoúlou, a finalement admis lors d’un entretien qu’elle avait été embauchée comme… nettoyeuse de surface pour le compte de la Municipalité de Thessalonique et qu’elle a été aussitôt propulsée au service Tourisme de la mairie, “car telles sont les usages grecs en la matière”, entretien accordé à la télévision ERT. Voilà qu’une ministre admet l’illégalité de fait pour ce qui tient des débuts de sa si courte vie pseudo-professionnelle, en réalité de façade, avant d’être propulsée dans la gestion des affaires publiques par la clique à Tsípras, quotidien “Kathimeriní” du 13 septembre .

Et toute la Grèce en rigole à défaut de réagir de manière efficace, novatrice et radicale face à la pègre qui nous gouverne . Rapidement, la jeune femme qui ne serait pas inconnue de la famille Pappás, famille comme on sait compère des Tsípras, elle a été nommée collaboratrice spéciale de Tsípras pour son bureau de Thessalonique et depuis peu… là voilà Ministre… Pauvre fille parvenue de la sorte. Admirable parcours, aux compétences avérées du clientélisme et du népotisme réellement existants. Mafia, et alors “garda e passa”

Devant le dit Parlement. Athènes, septembre 2018
Au Cap Sounion, septembre 2018
Sans-abri. Place de la Constitution. Athènes, septembre 2018
Le Mur de la bonté. Athènes, septembre 2018

En dehors du… Mur de la bonté, on peut encore se rabattre sur les sardines plutôt abordables, ou même pénétrer à la limite les mystères de certains restaurants très populaires, c’est-à-dire pas chers d’après l’acception du terme en grec moderne. Sans oublier bien entendu la posture toujours majestueuse des animaux adespotes d’Athènes et du pays réel.

Pendant ce temps, les acquéreurs des plages et des presqu’îles bradées par la Treuhand à la grecque, instituée pour sa version finale il faut dire sous Tsípras et qui contrôle et brade désormais l’ensemble des biens publics du pays pour une durée de 99 ans, financent des fouilles d’urgence pendant leurs travaux en cours. Maigre consolation il faut dire.

On vient même d’apprendre qu’outre les ports, les aéroports et les autres infrastructures, 10.119 parcs et autres biens immobiliers du domaine ex-public viennent d’être attribués à cette agence fiduciaire, pilotée comme on sait par les créanciers et autres rapaces internationaux, sous l’aimable patronage de la gestion métropolitaine du totalitarisme de l’UE, presse grecque de la semaine .

Animal adespote. Athènes, septembre 2018
Taverne populaire. Athènes, septembre 2018
Sardines… populaires. Athènes, septembre 2018
Fouilles d’urgence. Attique, septembre 2018

Les ferrys sont déjà revenus des îles bondés. Il pleut déjà un peu sur le Péloponnèse comme sur Athènes, l’automne est tout de même d’une beauté autre que l’été grec, admettons-le. Par ces temps qui changent… sans changer, les régions comme les municipalités du pays entreprennent de leurs travaux habituels avant les élections locales et régionales du mois de mai, programmées au même moment que les pseudo élections dites européennes qui n’ont jamais pu servir à autre chose qu’à légitimer le pouvoir impérial de Bruxelles.

Retour au Pirée. Septembre 2018
Travaux. Athènes, septembre 2018
Gastronomie simple. Athènes, septembre 2018

Certaines rumeurs et autant déclarations récentes, analysées par la presse mainstream indiqueraient que la date des élections législatives de même probablement avancée pour aboutir à un triple scrutin au mois de mai, quotidien Kathimeriní du 12 septembre . Sans trop d’importance en l’état actuel des choses et de notre régime structurellement et si cruellement méta-démocratique à notre avis.

Le virus du Nil occidental progresse car les services de l’État mafieux et partitocrate grec a cessé sous Tsípras toute campagne de prévention depuis 2016. L’Ordre des Médecins d’Athènes dans un communiqué récent, fustige cette gestion criminelle de la santé publique. Lorsque les Unités de soins intensifs déjà devenues si rares sont manifestement occupées par les patients souffrant du virus du Nil occidental c’est alors grave, sans oublier les dizaines de morts déjà, les régions touchées sont l’Attique, Athènes et aussi le Péloponnèse, quotidien Kathimeriní du 13 septembre . D’après Tsípras, les vieux peuvent doivent mourir, et apparemment tous les autres avec.

Votre blog poursuit ainsi sa lutte… surveillée, autant pour sa survie, sous le regard il faut dire de notre Mimi, vieillissante, amaigrie, et pour tout dire souffrante, du haut de ses quinze ans de félin et fier de l’être.
Automne des feuilles mortes.

Mimi de Greek Crisis. Athènes, septembre 2018
* Photo de couverture: La capitale et ses apparences. Athènes, septembre 2018
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