La pandémie du coronavirus a mis à nu la logique néolibérale de l’UE

Eric Toussaint , Miguel Urbán Crespo


Miguel Urban CRESPO in the EP in Strasbourg. Picture of GUE/NGL

Miguel Urban est eurodéputé, membre des « Anticapitalistas » (État espagnol). Interviewé par Éric Toussaint.

Quel est l’objectif de l’initiative Taxe Covid, au niveau européen d’une part et d’autre part, de façon complémentaire, au niveau de l’État espagnol ?

La concentration toujours plus grande des revenus et de la richesse n’est pas seulement une conséquence, elle est aussi la cause et le moteur de la crise de laquelle nous ne sommes pas encore sortis alors que la suivante arrive déjà

Tout au long de ces dix dernières années, nous avons vu les institutions européennes et les gouvernements nationaux renflouer les banques alors qu’ils laissaient des millions de familles sombrer, qu’ils soumettaient les peuples du Sud de l’Europe à une véritable doctrine du choc néolibéral et qu’ils intervenaient dans leurs économies, mettant par-là entre parenthèse, de fait, leur souveraineté. Dix années qui ont été perdues pour les classes populaires mais qui ont été une décennie de gains pour les grandes multinationales qui n’ont cessé d’accroitre leurs profits et leur pouvoir. Une période marquée par une combinaison de pénurie et d’inégalités où le poids des revenus du travail a diminué au profit de ceux du capital, de façon particulièrement féroce. Une époque d’ « oligarchisation » accélérée du pouvoir, phénomène qui est tout à la fois le résultat, la cause et l’axe central du nouveau cycle historique que vivent l’Europe en général et l’Espagne en particulier.

L’évasion et la fraude fiscales des grandes fortunes et des multinationales sont au cœur d’une vertigineuse croissance des inégalités dans le monde ainsi que du manque de ressources financières des États. L’architecture économique propre à l’UE, favorise, dans le cadre d’une liberté de mouvement des capitaux et en l’absence d’harmonisation fiscale, des régimes fiscaux disparates qui entraînent un « dumping » fiscal permanent, les gouvernements des différents pays diminuent les impôts sur les grandes sociétés privées et sur les riches afin de les attirer ou de les « garder » sur leur territoire. De même, l’UE dispose de ses propres structures offshore et d’un cadre réglementaire dont les différences de niveaux, les permissivités et les stimulants occultes favorisent cette évasion et ces fraudes fiscales qui bénéficient de facto aux grands capitaux, aux rentiers et aux familles les plus riches, au détriment de la majorité de la population. Un projet européen fait d’inégalités, pour une poignée de multimillionnaires au détriment de millions de pauvres.

Mais la concentration toujours plus grande des revenus et de la richesse n’est pas seulement une conséquence, elle est aussi la cause et le moteur de la crise de laquelle nous ne sommes pas encore sortis alors que la suivante arrive déjà. Les politiques économiques appliquées par les institutions communautaires et par les gouvernements des États membres ont produit un transfert massif des ressources du bas vers le haut. Une socialisation des pertes avant, pendant et après la crise. Et maintenant avec celle qui pointe, que va-t-il se passer ?

Si nous voulons que cette fois-ci l’histoire soit différente, nous devons résolument affronter la fronde des privilégiés : cette poignée de milliardaires et de multinationales qui refusent de payer des impôts et pratiquent un véritable terrorisme fiscal avec l’aide complice des gouvernements et des principaux partis tout en accusant et en menaçant directement ceux qui dénoncent leurs pratiques de détournement des finances publiques.

Les Anticapitalistas ont lancé l’idée d’une Taxe Covid dans le cadre d’une campagne plus large « Que les riches paient » où nous abordons des questions de fiscalité et de répartition de la richesse, de nationalisation des secteurs stratégiques de l’économie, de la répartition du travail et de la diminution du temps de travail, du changement de modèle productif

Affronter la pandémie sanitaire qui vient suppose inévitablement combattre les inégalités, toutes les inégalités, plurielles et interconnectées et en augmentation, en intervenant sur les réalités qui sont la source et le reflet de ces inégalités, au niveau de la fiscalité, de la précarité et du pouvoir des entreprises. En définitive, remettre au centre du débat la redistribution de la richesse et des ressources comme axe principal d’un programme éco-socialiste. Tel est le principal objectif de la taxe Covid : intervenir dans le débat public sur la reconstruction post-Covid avec une proposition concrète qui accorde la priorité à la répartition de la richesse face à la logique néolibérale en vigueur qui ne parle que de l’endettement public comme unique manière d’augmenter la dépense. Au niveau européen, la Taxe Covid s’introduit justement dans ce débat sur la mutualisation ou non des dettes, sur le financement du fonds de reconstruction, se posant comme une initiative concrète au niveau européen qui s’oppose à l’architecture même de l’UE, dans une perspective redistributive, solidaire et internationaliste. Une façon de remettre en cause l’UE, mais aussi de construire une Europe différente à partir de la mobilisation sur une proposition concrète qui ne devrait pas en rester là mais évoluer vers un programme d’urgence sociale pour affronter la crise.

De fait, dans l’État espagnol, les Anticapitalistas (qui se sont séparés de Podemos en 2020, NDLR) ont lancé l’idée d’une Taxe Covid dans le cadre d’une campagne plus large « Que les riches paient » où nous abordons des questions de fiscalité et de répartition de la richesse, de nationalisation des secteurs stratégiques de l’économie, de la répartition du travail et de la diminution du temps de travail, du changement de modèle productif. Mais justement, commencer par la Taxe Covid nous a permis de placer dans le débat public, et auprès de l’ensemble de la gauche de l’État espagnol, la nécessité de la répartition de la richesse. De telle façon que l’ensemble de la gauche s’est réapproprié l’idée, avec des formulations diverses. Cela n’a pas empêché le Parti Socialiste Ouvrier Espagnol (qui dirige le gouvernement) de refuser publiquement les différentes propositions d’impôts sur les grandes fortunes et les bénéfices des entreprises.

On comprend l’importance qu’il y a à taxer les riches et les grandes entreprises, mais pourquoi entrer dans le détail des pourcentages ?

Cela fait trente ans que nous sommes sur la défensive. C’est précisément parce que nous sommes en train de nous restructurer que nous devons faire bouger les pions, devenir plus offensifs.

De nombreux consensus néolibéraux sont aujourd’hui remis en question. Il est temps de pratiquer une doctrine de choc contre les élites et en faveur de ceux et celles qui sont au bas de l’échelle. Mettre la répartition des richesses et des emplois sur la table comme élément central du débat politique ; demander ouvertement qui va payer la prochaine crise ; montrer du doigt la fronde des privilégiés qui estiment avoir le droit de ne pas payer d’impôts ou de cacher leurs trésors dans des égouts fiscaux. Mais cette fenêtre ne sera pas ouverte longtemps. Nous avons déjà vu combien de temps ont duré les promesses de « refondation du capitalisme » faites par Sarkozy et consorts en 2008. Finalement cela s’est traduit par un tour de vis des mêmes politiques qui nous avaient conduits au désastre.

De nombreux consensus néolibéraux sont aujourd’hui remis en question. Il est temps de pratiquer une doctrine de choc contre les élites et en faveur de ceux et celles qui sont au bas de l’échelle

C’est pourquoi nous avons estimé qu’il était nécessaire de ne pas se contenter de slogans ou de manifestes sur la crise et ses alternatives. Nous avons voulu proposer un outil concret, abouti, urgent et utile, mais qui vise haut : si haut qu’il remet en cause le modèle de construction de l’Europe néolibérale ou, ce qui est pratiquement la même chose, qu’il remet en cause l’accaparement croissant de toutes les ressources par une dangereuse minorité. La lutte contre les inégalités et pour la répartition des richesses sera au centre de la lutte pour cette autre Europe dont nous parlons tant. Il est évident que l’application de ces taxes d’urgence européennes Covid-19 ne suffiront pas pour cette bataille. Le défi est beaucoup plus vaste. Mais nous devons commencer quelque part. Et il est peut-être temps de mettre des propositions concrètes sur la table. Nous devons placer la lutte pour la répartition des richesses au centre du débat et de l’action politique. Ce n’est qu’ainsi que nous pourrons faire en sorte que cette fois-ci la crise ne soit pas payée par les classes populaires. Cette fois, que ce soit les riches qui paient. C’est l’idée force qui peut entraîner le reste. Les pourcentages sont des questions techniques, importantes bien sûr, mais qui ne mobilisent pas.

Quelle est ta position sur les paradis fiscaux ou que faut-il faire à leur sujet ?

La fraude et l’évasion fiscales ne sont pas des cas isolés ou circonstanciels : elles sont un phénomène structurel du capitalisme d’aujourd’hui, intimement lié à l’offensive néolibérale qui sévit dans nos économies depuis des dizaines d’années. Un système de fraude et d’évasion qui ne pourrait pas fonctionner sans un réseau de tanières fiscales qui se situent en dehors des obligations fiscales. Et nous disons « tanières », pour ne pas dire directement « cloaques », car les appeler « paradis fiscaux » serait accepter la grammaire de cette même minorité dangereuse pour qui ces lieux sont des paradis. Grâce à ces lieux où la lex mercatoria prime sur tout autre droit, grâce à l’ingénierie comptable et aux niches légales, une poignée de privilégiés a trouvé de nombreuses failles pour cacher ou dissimuler une part importante de leur fortune. Et aujourd’hui, tout le système fuit par ces fissures. Toutes les études concordent sur le fait qu’il n’y a jamais eu autant d’argent dans les tanières fiscales qu’aujourd’hui.

La fraude et l’évasion fiscales ne sont pas des cas isolés ou circonstanciels : elles sont un phénomène structurel du capitalisme d’aujourd’hui, intimement lié à l’offensive néolibérale qui sévit dans nos économies depuis des dizaines d’années

La lutte contre ces cloaques fiscaux devrait être un élément central du combat actuel contre les inégalités et pour la démocratie. Un combat que nous pouvons commencer en mettant en œuvre une série de mesures concrètes qui s’attaquent à la racine du problème dans divers domaines et niveaux d’action :

Dans le cadre de l’UE, la liste des juridictions tierces qui ne coopèrent pas en matière fiscale devrait être revue et modifiée (en suivant, par exemple, les critères du Parlement européen ou ceux d’organisations sociales telles que Oxfam, Tax Justice Network ou Gestha, le syndicat espagnol des experts financiers). Cela permettrait d’avoir un premier répertoire réel des paradis fiscaux commun à toute l’UE, au lieu des anciens index nationaux élaborés par certains États ou de la liste actuelle de la Commission européenne, qui se voulait une liste noire mais qui a fini par être une liste de blanchiment des paradis fiscaux. Sur les 15 paradis fiscaux les plus utilisés par les multinationales, un seul apparaît dans cette compilation de la Commission. Disposer d’une liste fiable des tanières fiscales, qui indique également celles qui opèrent dans le cadre de l’UE, constituerait un premier pas nécessaire pour isoler commercialement et économiquement ceux qui favorisent et/ou profitent de cette structure fiscale, sanctionner ceux qui y opèrent et enquêter de manière approfondie sur les grandes banques et les intermédiaires complices qui profitent du secret bancaire – qu’il faudrait aussi éliminer – et qui contournent systématiquement toute pratique normalisée de formalités obligatoires afin de faire de la fraude et de l’évasion fiscales un business lucratif. Et pour que ces mesures durent dans le temps, des sanctions dissuasives devraient être appliquées, y compris le retrait de la licence bancaire. En outre, il est essentiel d’appliquer des règles comptables homogènes qui obligent les multinationales à présenter des informations économiques pertinentes, structurées, fondées sur leur activité réelle par pays, afin qu’elles soient imposées dans chaque territoire sur la base de la présence de personnel, du capital physique et des bénéfices effectifs qui y sont réalisés, en évitant les abus en matière de prix de transfert.

Deuxièmement, et comme plan B au cas où l’UE refuserait de sanctionner les tanières fiscales qui y opèrent, ce qui est malheureusement un scénario très probable, des sanctions commerciales pourraient être établies de manière coordonnée entre certains États membres pour les pays qui opèrent en tant que paradis fiscaux, en commençant par les Pays-Bas ou le Luxembourg et en continuant avec la Suisse. Une forte alliance de plusieurs pays d’Europe du Sud pourrait contraindre ces États à abandonner le secret bancaire et à coopérer en matière fiscale, en utilisant l’argument selon lequel les pertes résultant de ce changement de pratique seraient moindres que celles résultant des sanctions commerciales qu’il faudrait leur imposer s’ils ne coopéraient pas.

Nous pensons qu’il est essentiel que la BCE annule toutes les dettes des États membres destinées à combattre les causes et les effets de la pandémie ou, à défaut, qu’elles soient transformées en « dettes permanentes » sans rapport avec les budgets actuels

Nous devons également agir au niveau des États. Sans attendre que l’UE se décide à mettre à jour sa liste noire des paradis fiscaux, des progrès pourraient être réalisés à cet égard en Espagne, en suivant les mêmes critères que ceux mentionnés ci-dessus et en contribuant ainsi à donner l’exemple et à encourager d’autres pays à se joindre. Cela impliquerait et permettrait l’interdiction des aides aux entreprises qui opèrent ou ont des filiales et/ou des succursales dans des tanières fiscales. De même, la fraude et l’évasion fiscales pourraient être incluses parmi les critères qui empêcheraient une entreprise de bénéficier de commandes publiques, mesure qui pourrait être reproduite au niveau régional et municipal. Une autre mesure abordable serait d’interdire par une loi les amnisties fiscales. Enfin, en continuant la liste des propositions à la portée d’un gouvernement qui se veut « de changement », des sanctions pourraient être établies à l’encontre des banques et des intermédiaires financiers qui opèrent dans ces territoires extraterritoriaux en tant que facilitateurs et/ou bénéficiaires de la fraude et de l’évasion fiscales.

Mais il serait naïf et irresponsable de la part de la société civile de tout confier à l’action des institutions pour lutter contre le fléau de la fraude, de l’évasion ou du blanchiment fiscal. D’autant plus que le peu de progrès réalisés jusqu’à présent l’a été à coup de fuites journalistiques et de scandales impliquant une classe politico-économique qui n’a même plus besoin du pantouflage pour connecter ses cohabitations. Pour éviter qu’une poignée de mesures cosmétiques n’essaient de masquer la puanteur de ces cloaques, il est essentiel que la société civile prenne la tête de ce combat et se mobilise résolument pour la justice fiscale et le partage des richesses, avec des campagnes de dénonciation et de boycott de ces entreprises et de ces milliardaires. En ce sens, la campagne d’occupation des magasins Apple ou des agences de BNP Paribas menée par Attac France il y a quelques années est aussi intéressante qu’inspirante. Les dénonciations et signalements publics des cabinets d’avocats, sociétés de conseil et banques qui opèrent et sont des intermédiaires obligés dans la fraude et l’évasion fiscales contribueraient à nuire à l’image de marque de ces multinationales, qui est précisément l’un de leurs principaux atouts en ces temps de capitalisme liquide.

Que dit l’appel Taxe Covid à propos de la dette ?

Notre première tâche est de briser l’encerclement qui vise à minimiser encore plus nos positions statistiquement minoritaires

Nous savons que l’urgence médicale, sociale et économique de la pandémie de coronavirus nécessite une réponse urgente et immédiate. En fait, des milliards d’euros ont déjà été mobilisés à cette fin, ce qui alimente une dette qui ne peut être assumée par les États et qui entrave leur capacité à faire face à cette situation. Nous pensons donc qu’il est essentiel que la Banque centrale européenne (BCE) annule toutes les dettes des États membres destinées à combattre les causes et les effets de la pandémie ou, à défaut, qu’elles soient transformées en « dettes permanentes » sans rapport avec les budgets actuels. En attendant, et comme forme de pression pour que cette mesure soit appliquée, nous proposons le non-paiement unilatéral par les États, ainsi qu’un audit citoyen de l’ensemble de la dette en vue d’en répudier la partie illégitime. La dette reste l’un des éléments clés pour comprendre la crise de l’UE. Un véritable carcan pour les pays du Sud qu’il faut rompre si l’on veut redresser l’Europe.

Qui sont les signataires ?

Au départ, le manifeste a été signé par 45 personnalités du monde syndical, social, politique et intellectuel de plusieurs pays européens. Parmi ces noms, on trouve par exemple Susan George, Eric Toussaint, Christophe Aguiton ou Eleonora Forenza. Depuis le lancement, nous avons reçu des dizaines de nouvelles signatures de divers pays et domaines d’action politique. Dans les prochaines étapes, nous ouvrirons le soutien aux organisations et au grand public. Et au-delà des noms et de leur nombre, il est important de souligner l’accueil que nous recevons des pays du nord de l’Europe, dont beaucoup sont dits « frugaux », contribuant ainsi à briser cette fausse division nord-sud en Europe, qui cache les intérêts communs des élites des différents pays alors que les classes populaires et travailleuses doivent ériger les ponts nécessaires et l’agenda partagé que nous, les classes populaires et ouvrières des quatre points cardinaux de l’Europe, devons mettre en œuvre.

Avez-vous un calendrier ?

Il est fondamental d’être conscient de notre position minoritaire pour ne pas faire de notre mandat d’euro-parlementaire une fin en soi, mais plutôt un levier pour travailler à l’intérieur, mais surtout à l’extérieur du Parlement

Au cours de l’été, nous avons clôturé la collecte de cette deuxième phase de signatures, après quoi nous évaluerons comment continuer en fonction du soutien reçu et de la situation sanitaire. Nous avons tenu une rencontre physique combinée à une vidéoconférence à Bruxelles les 22 et 23 septembre 2020 sous les auspices du CADTM et avec ReCommonsEurope, pour continuer à avancer plus collectivement et reconstruire des liens entre les organisations et les espaces en lutte. Cette conférence était appuyée par la GUE/NL qui rassemble une partie de la gauche radicale dans le parlement européen.

En tant que député européen anticapitaliste, quel est ton rôle au sein du Parlement européen ?

Notre premier rôle est d’observer et de contribuer modestement mais résolument à briser les énormes et solides consensus qui existent au Parlement et dans les institutions européennes en général sur de nombreuses questions : le rôle de l’Europe dans le monde, l’incapacité à concevoir l’économie ou la société selon d’autres mécanismes que le marché ou les valeurs supposées que l’UE « apporte » à l’humanité par son action extérieure, parmi bien d’autres questions. La grande coalition des sociaux-démocrates et des sociaux-libéraux qui a traditionnellement co-gouverné le Parlement européen et la majorité des pays européens s’est élargie pour inclure les libéraux et une bonne partie des Verts, tout en tendant la main à la droite réactionnaire qui est de plus en plus euro-réformiste. Tout cela constitue un noyau de pouvoir très solide qui est parfaitement aligné sur le reste des élites économiques et politiques européennes. Notre première tâche est de briser l’encerclement qui vise à minimiser encore plus nos positions statistiquement minoritaires. Le problème est que, même au sein de la gauche, certains considèrent que cela se fait en s’intégrant à tout prix dans le consensus de ce noyau extrême de la grande coalition néolibérale.

En tant qu’anticapitalistes et en tant que mouvement international, nous concevons le travail institutionnel comme un front de plus, important mais non indispensable, et surtout stérile s’il n’est pas accompagné d’un mouvement social organisé et d’une lutte en dehors des institutions

Notre deuxième rôle, et il est commun à tout anticapitaliste dans toute institution, est de ne pas succomber aux charmes et aux dangers d’une institution comme le Parlement européen. Non pas seulement en raison des risques de s’accommoder et d’être contaminé par le cynisme et l’arrogance qui caractérisent cette institution et contre lesquels nous devons nous vacciner quotidiennement, mais aussi parce qu’il existe un réel danger de se laisser prendre au jeu parlementaire, en pensant à tort que c’est le plus important et en consommant l’essentiel des maigres ressources qu’il faut pourtant mettre sur d’autres fronts. Il est fondamental d’être conscient de notre position minoritaire pour ne pas faire de notre mandat d’euro-parlementaire une fin en soi, mais plutôt un levier pour travailler à l’intérieur, mais surtout à l’extérieur du Parlement, en portant des propositions et des mouvements qui se heurtent de front à la logique et aux intérêts de l’UE telle qu’elle est réellement.

Quelle est ta conception du travail de parlementaire européen ?

Tout d’abord, la question, et donc la réponse, doit être formulée au pluriel : nous, en tant qu’anticapitalistes et en tant que mouvement international, concevons le travail institutionnel comme un front de plus, important mais non indispensable, et surtout stérile s’il n’est pas accompagné d’un mouvement social organisé et d’une lutte en dehors des institutions. Accompagner ces luttes, les soutenir et en tirer les leçons, articuler l’action politique et sociale ou contribuer à leur décollage, est un élément fondamental de notre conception du travail institutionnel et de notre rôle en son sein. Par ailleurs, une institution comme le Parlement européen apporte deux autres éléments intéressants : une perspective territoriale élargie, au niveau européen, et une perspective temporelle qui permet d’anticiper certaines attaques du capital qui atterriront bientôt au niveau national et local. Une présence au sein d’une telle institution est utile pour situer d’autres acteurs et établir des alliances, et pour préparer le terrain pour de nouveaux champs de bataille.

Après l’échec de la stratégie de Syriza en Grèce : la participation de Unidad Podemos au gouvernement Sanchez suit-elle toujours la même ligne ou est-elle différente ?

Les différences stratégiques sous-jacentes qui ont fini par cristalliser notre sortie de Podemos en tant qu’anticapitalistes sont intimement liées aux discussions que nous avons eues par rapport à la situation en Grèce en 2015

L’expérience grecque est, ou devrait être, la grande leçon politique de la dernière période. Nous pouvons en fait établir un tournant au sein de la gauche européenne en fonction de la façon dont ses composantes ont interprété et se sont positionnées à ce moment-là et depuis lors par rapport à l’expérience du gouvernement Syriza. Les différences stratégiques sous-jacentes qui ont fini par cristalliser notre sortie de Podemos en tant qu’anticapitalistes sont intimement liées aux discussions que nous avons eues par rapport à la situation en Grèce en 2015. Dans le cas de l’Espagne, les Anticapitalistes, nous avons été très clairs sur le fait qu’entrer en minorité dans un gouvernement dirigé par le social-libéralisme comportait de nombreux risques, mais surtout trois :

  1. cela revitalise le PSOE en tant qu’acteur de changement malgré le fait que le cycle du 15M [1] ait eu comme un de ses axes principaux la récusation du bipartisme et de ses politiques, dont le PSOE est un pilier fondamental et constitue le grand « parti d’État » de l’État espagnol ;
  2. cela vieillit et désactive Podemos en tant que force de transformation, en le cantonnant dans la sphère institutionnelle et en le soumettant à la majorité du gouvernement social-libéral ; et
  3. cela donne à la droite et à l’extrême droite le monopole de l’opposition et la canalisation potentielle du malaise qui résultera de la gestion de la nouvelle crise qui est déjà là. Par contre, il aurait été possible de soutenir de l’extérieur la formation d’un gouvernement minoritaire du PSOE et de continuer à faire de l’opposition à l’intérieur et à l’extérieur du Parlement espagnol, avec les mouvements et sans les engagements actuels qui découlent de la participation au gouvernement.

Vous avez également lancé une campagne pour la nationalisation de différents secteurs stratégiques : quels sont-ils ? les grandes entreprises pharmaceutiques, l’énergie, les banques, d’autres encore ?

Cette pandémie a mis à nu les parties honteuses du capitalisme. Les insuffisances du capitalisme à relever le défi de la protection des classes populaires et de la sauvegarde des vies ont été démontrées. Il est temps d’analyser les conséquences des années d’attaques continues contre le secteur public. Le droit à la santé a été amputé par les politiques néolibérales. Et le coût de cette pandémie n’est pas seulement économique, il se chiffre surtout en centaines de milliers de vies.

Il est fondamental de susciter un nouvel internationalisme militant et solidaire capable de construire un projet éco-socialiste répondant à partir des différents contextes et particularités régionales au défi commun de porter un scénario post-capitaliste

La pandémie a également mis à nu l’Europe néolibérale. Au plus fort de la crise virale, nous avons vu qu’il n’y avait aucun moyen de fabriquer les équipements d’urgence nécessaires pour combattre le Covid-19 en Europe, suite à des années de délocalisation et de désindustrialisation. L’Europe a besoin d’une ré industrialisation, en même temps que d’un changement vers un modèle de production socialement et écologiquement juste. L’économie doit être au service de la vie, et non servir à engraisser les profits privés. C’est sans aucun doute l’une des grandes leçons de cette crise. Il est fondamental de nationaliser les secteurs stratégiques sous contrôle social pour assurer le bien commun. C’est pourquoi les Anticapitalistes ont lancé une campagne d’agitation et de propagande sur la nécessité de nationaliser des secteurs stratégiques et de changer de modèle de production, avec différentes propositions concrètes comme le cas des usines que Nissan a l’intention de fermer en Catalogne.

Le capitalisme est dans une longue vague dépressive, due à une crise de rentabilité, dont la cause principale est la tendance à la baisse du taux de profit. Face à cette difficulté permanente à se redresser, le capitalisme a cherché, comme il le fait systématiquement, une issue par l’intensification de l’exploitation de l’homme et de la nature, dans un processus de précarisation permanente du travail et de dégradation de la biosphère. Ainsi, ce sera la crise écologique qui introduira, comme elle le fait déjà, de nouvelles limites au productivisme et « croissantisme » capitaliste, mais aussi de nouvelles limites aux cycles de transformation et à leurs stratégies. En ce sens, il est fondamental de susciter un nouvel internationalisme militant et solidaire capable de construire un projet éco-socialiste répondant à partir des différents contextes et particularités régionales au défi commun de porter un scénario post-capitaliste.

Traduction de Lucile Daumas

Source https://www.cadtm.org/La-pandemie-du-coronavirus-a-mis-a-nu-la-logique-neoliberale-de-l-UE

Aube dorée les condamnations

En Grèce, le chef du parti néonazi Aube dorée condamné à 13 ans de prison

Par Elisa Perrigueur

Une semaine après avoir qualifié le leader et plusieurs ex-députés d’Aube dorée de « dirigeants d’une organisation criminelle », la justice grecque a prononcé les peines, notamment 13 ans de prison pour le premier, Nikos Michaloliakos, et une condamnation à la réclusion à perpétuité pour le meurtrier du rappeur antifasciste Pavlos Fyssas

Le chef du parti néonazi Aube dorée Nikos Michaloliakos, négationniste et admirateur du national-socialisme, a été condamné mercredi à 13 années de prison ferme par la Cour pénale d’Athènes qui l’avait reconnu coupable d’avoir dirigé une « organisation criminelle ».

Parmi les six autres cadres du parti paramilitaire, l’eurodéputé Ioannis Lagos, ancien membre d’Aube dorée, écope également de 13 années de prison. Son immunité parlementaire doit être levée par le Parlement européen, à la demande de la Grèce, une fois qu’un mandat d’arrêt aura été émis.

La cour pénale a également suivi les réquisitions de la procureure en condamnant à 13 ans de prison l’ancien porte-parole du parti Ilias Kassidiaris et le député Christos Pappas, bras droit de Michaloliakos. Elle a infligé la même peine à deux autres dirigeants du parti reconnus coupables de « direction d’organisation criminelle » : les anciens députés Ilias Panagiotaros et Georgios Germenis.

Seul Artemis Matthaiopoulos, l’ex-gendre de Michaloliakos, a été condamné à dix ans de prison en deçà des réquisitions de la procureure. Sans surprise, le militant d’Aube dorée Yorgos Roupakias, le meurtrier du rappeur antifasciste Pavlos Fyssas, a été condamné à la réclusion criminelle à perpétuité.

Succès de la mobilisation anti fasciste à Athènes

Le CADTM se réjouit du succès de la mobilisation unitaire anti fasciste à Athènes du 7 octobre 2020 et de la condamnation du parti néonazi Aube Dorée 7 octobre par CADTM International

 

Le CADTM salue le succès de la mobilisation unitaire anti-fasciste à Athènes de ce mercredi 7 octobre ainsi que la décision de la cour pénale d’Athènes de qualifier le parti néonazi Aube dorée « d’organisation criminelle ».

C’est dans la rue que le combat a été mené contre le groupuscule néonazi Aube Dorée, responsable des violences parfois mortelles commises depuis des années contre des personnes sans-papiers et des militant-e-s de la gauche radicale. Ce combat du mouvement anti-fasciste grec contre les violences néonazies a conduit à une victoire historique, une victoire pour la Grèce mais aussi pour l’ensemble des peuples d’Europe.

(Photo credit : Anna Muchin)

La Cour pénale a tranché, les dirigeants du parti ont été condamnés. Il s’agit des membres du « Conseil politique » du parti, ainsi que de ses représentants au parlement. D’autres inculpés ont été condamnés pour leur appartenance à l’organisation mais aussi pour les violences (meurtre de Pavlos Fyssas, attaque violente contre des pêcheurs égyptiens, attaques contre des membres du syndicat PAME). Le chef du parti, Nikos Michaloliakos, et celui qui en a été le numéro 2 pendant des années, Ilias Kasidiaris, tous deux admirateurs du national-socialisme, ont été reconnus coupables. À l’annonce de cette décision, la foule explosait de joie.

(Photo credit : Anna Muchin)

Javied Aslam, un pakistanais anti-néonazi, avait réussi à récolter des milliers de témoignages des agressions d’Aube Dorée notamment entre 2010 et 2013. Pourtant, ces témoignages ont été ignorés pendant des années, notamment par les commissariats et administrations « compétentes » alors que les agissements du groupuscule étaient connus de tous.

(Photo credit : Anna Muchin)

Aujourd’hui le silence s’est enfin brisé.

Selon le site rapportsdeforce.fr : « Un rassemblement antifasciste énorme, boulevard Alexandras devant le tribunal d’Athènes. Ce mercredi 7 octobre, des milliers (jusqu’à 20 000 selon certaines sources) de militants de gauche, d’extrême gauche et anarchistes sont venus attendre le verdict du procès d’Aube dorée, le parti néonazi entré au parlement en 2012 à la faveur de la crise grecque. Un parti mis en accusation après le meurtre par un de ses membres en 2013 de Pavlos Fyssas, un rappeur antifasciste. Mais aussi après les tentatives de meurtre perpétrées à l’encontre de deux pêcheurs égyptiens. A savoir, trois des exactions et violences les plus connues d’Aube Dorée.

Cinq années de procédure, 400 audiences, 68 accusés, 154 témoins, 129 avocats, pour un procès hors norme. Et de premiers verdicts qui tombent. Le parti est considéré par la cour d’Athènes comme une organisation criminelle, ce qui ouvre la voie à d’autres condamnations. Notamment celle de Nikos Michaloliakos, le chef négationniste d’Aube dorée. Celui-ci est reconnu coupable de « direction d’une organisation criminelle ». Mais aussi celle de Yorgos Roupakias, le meurtrier de Pavlos Fyssas. Les peines n’ont pas encore été prononcées ce midi, mais elles seront probablement lourdes. Au même moment, la police dispersait à coup de gaz lacrymogènes et de canons à eau les manifestants rassemblés devant le tribunal. »

Les membres du CADTM ont participé activement au mouvement de solidarité internationale qui demandait à la justice grecque de condamner Aube Dorée notamment en soutenant l’appel « Ils ne sont pas innocents » https://www.cadtm.org/Grece-Proces-d-Aube-doree-Ils-ne-sont-pas-innocents.

Rappelons que Mamadou Bah, membre du CADTM avait été brutalement agressé par un commando d’Aube Dorée en 2013 dans les rues d’Athènes et avait dû chercher refuge en Belgique voir https://cadtm.org/Droit-d-asile-pour-Mamadou-Bah et https://www.cadtm.org/Victoire-Mamadou-Bah-obtient-le

Merci à Anna Muchin pour son reportage photographique.

Chute du parti néonazi

En Grèce, la condamnation d’Aube dorée signe la chute du parti néonazi   Par Elisa Perrigueur

La justice grecque a qualifié mercredi 7 octobre le leader et plusieurs ex-députés d’Aube dorée de « dirigeants d’une organisation criminelle ». Une annonce accueillie avec joie par plusieurs milliers de personnes réunies à Athènes.

Athènes (Grèce).– Mercredi 7 octobre à la mi-journée, une foule de quelque 15 000 personnes a poussé un immense cri de joie sur le boulevard Alexandras, au centre d’Athènes.

La cour pénale devant laquelle se sont massés ces milliers de citoyens aux sensibilités politiques plutôt à gauche, antifascistes ou anarchistes, venait en effet de désigner le parti néonazi Aube dorée comme une « organisation criminelle ». Son fondateur, Nikos Michaloliakos, et six anciens députés de cette formation ont été reconnus coupables de la diriger. Leurs peines seront prononcées dans les jours prochains.

Pour ceux qui attendent debout sous la chaleur écrasante, cette qualification cruciale signe enfin « la mort d’Aube dorée », comme le crie un jeune. La preuve que ce mouvement très hiérarchisé est lié à des crimes qui ne sont pas des actes d’individus isolés. Ce verdict coupe aussi définitivement ses financements étatiques et l’empêche de se présenter aux élections.

Un rassemblement mercredi à Thessalonique dans l'attente du verdict à Athènes. © Nicolas Economou/NurPhoto/AFP Un rassemblement mercredi à Thessalonique dans l’attente du verdict à Athènes. © Nicolas Economou/NurPhoto/AFP

« Cette reconnaissance va mettre un terme à leurs pratiques inacceptables comme la violence à l’encontre des migrants, les escadrons de la mort. Cela crée un précédent judiciaire important », exulte l’architecte Athina Arampatzi, masquée sous ces bannières aux slogans antifascistes. Sur sa jambe, elle porte un autocollant portant l’inscription : « Ils ne sont PAS innocents. Les nazis en prison ». Cette formule, sur fond de tache de sang, est visible partout dans le cortège dense.

Quelque 69 partisans ou membres d’Aube dorée étaient poursuivis pour divers chefs d’accusation dans un procès-fleuve de plus de cinq ans. Parmi eux, certains étaient jugés pour « tentative d’homicide » à l’encontre de pêcheurs égyptiens en juin 2012 et de membres du syndicat communiste PAME en septembre 2013.

D’autres étaient poursuivis pour meurtre et complicité de l’assassinat du rappeur antifasciste Pavlos Fyssas, qui avait choqué la Grèce en septembre 2013. Il avait été tué dans les faubourgs du Pirée, près d’Athènes, par Giorgos Roupakias, membre du parti reconnu aujourd’hui coupable du meurtre. Quatorze autres accusés ont été reconnus coupables de complicité de meurtre.

© Alexandros Kottis

« C’est ce que nous voulions, la décision est historique », se satisfait Christos, une connaissance de Pavlos Fyssas, présent non loin des bus de CRS grecs qui barrent l’entrée du tribunal. Au même moment, à l’intérieur, ils ne sont que 11 sur les 68 accusés à être présents.

Pour la première fois depuis le procès de Nuremberg en 1945-1946 à l’encontre de responsables du Troisième Reich, un parti politique était visé pour « constitution d’une organisation criminelle » en Europe. La formation était devenue un temps troisième force politique du pays, siégeant au Parlement grec de 2012 à 2019.

De l’autre côté du cordon de police, sur le parvis de la cour de justice, Magda Fyssas, la mère du rappeur défunt, montre son émotion devant les caméras. « Mon fils, tu l’as fait », crie-t-elle, levant les bras au ciel. Jamais elle n’a manqué une des journées d’audience à la prison de Korydallos ou dans la cour pénale d’Athènes (plus de 400 au total).

La tension était vive dans cette salle aux fauteuils rouges. D’un côté se tenaient les parties civiles – des citoyens issus de la mouvance antifasciste, communiste, des réfugiés, etc. De l’autre, les accusés, des figures de l’extrême droite adeptes de la violence permanente à l’égard de leurs opposants. Trois magistrats ont entendu les 68 accusés (l’un est décédé entre-temps) et leur défense, et recueilli plus de 150 témoignages, avant d’annoncer enfin le verdict.

Dans le cortège, Alexandros Galdis, membre de Orma (Organisation pour les militants antifascistes), sur la réserve, en appelle au passé. « Il y a eu des condamnations après la dictature des colonels [qui a pris fin en 1974 – ndlr], cela n’a pas empêché la montée d’Aube dorée », dit-il, serrant l’épais bâton de son drapeau rouge et noir. « Ce parti-là est mort aujourd’hui, mais les idées fascistes circulent toujours : qu’allons-nous faire de leurs descendants qui sont dehors ? La Nouvelle Démocratie [droite au pouvoir – ndlr] a elle-même recruté des anciens membres extrémistes du Laos [parti nationaliste – ndlr] dans son gouvernement », dénonce-t-il.

Le premier ministre Kyriakos Mitsotakis a réagi positivement au verdict, le qualifiant de « preuve de la séparation des pouvoirs », alors que le chef d’Aube dorée avait dénoncé un « complot politique ». « La démocratie a gagné », a ajouté M. Mitsotakis.

À peine le verdict annoncé, les policiers présents en nombre ont lancé des lacrymogènes en rafale sur la foule paniquée qui a déserté le boulevard. En quelques dizaines de minutes seulement, les forces de l’ordre ont déployé au moins quatre canons à eau. La tension était forte, certains dans la foule dévisageant des forces de l’ordre longtemps accusées de « complicité » avec Aube dorée.

L’impunité dont le parti a bénéficié pendant des années et la sympathie dont il jouissait parmi les policiers ont en effet contribué à son expansion. Le laboratoire d’investigation pluridisciplinaire Forensic Architecture, qui a reconstitué la nuit de la mort de Pavlos Fyssas, assure que « les membres d’Aube dorée, dont de hauts représentants, ont agi de manière coordonnée, et les membres des forces de police spéciales (…) étaient présentes sur les lieux, pendant et après le meurtre, et ne sont pas intervenues ».

Malgré son idéologie nationale-socialiste, aucune interdiction du parti n’était envisageable. Celle du parti communiste banni sous la dictature des colonels a marqué les mémoires et une telle décision est perçue comme contraire aux principes démocratiques.

Le dirigeant Michaloliakos renie aujourd’hui cette idéologie « nazie », se revendiquant « nationaliste ». Dans les années 1980, Aube dorée était pourtant le nom d’une revue présentant une croix gammée sur sa couverture. En 1983, l’ancien député Christos Pappas, jugé mercredi, y qualifiait Hitler de « visionnaire de la nouvelle Europe », comme le rapporte le journaliste Dimitri Psarras dans l’ouvrage Aube dorée : le livre noir du parti nazi grec.

Le groupuscule s’était transformé en parti politique en 1993. À cette époque, l’immigration albanaise liée au conflit des Balkans alimentait le succès des thèses xénophobes. Mouvement marginal dans les années 2000, « il multipliait déjà les actions contre les antifascistes mais ses liens avec la police lui ont permis de continuer, explique Petros Constantinou, coordinateur de la coalition antiraciste et antifasciste Keerfa. À l’époque, nous alertions déjà contre cette menace, mais lorsqu’on parlait d’Aube dorée, les partis de gauche de l’époque nous accusaient d’en faire trop, de les médiatiser. Nous nous sentions bien seuls ».

« Aube dorée se crée des ennemis pour exister, il vise les communistes, les antifascistes, les réfugiés », résume le journaliste Dimitri Psarras, qui a témoigné à leur procès. Les migrants, dont le parti ouvertement raciste préconise l’expulsion, sont une autre cible vulnérable privilégiée. Les attaques se multiplient après leur succès électoral aux législatives de 2012.

Durant la crise de la dette, sur fond de délitement du corps syndical, de détérioration des services publics, Aube dorée a séduit un électorat abattu par les « mémorandums ». Entré au Parlement avec 6,9 % des voix, il s’est forgé une image de « parti social », surmédiatisant des distributions de nourriture, en réalité minimes. Ses membres ont exploité les symboles d’un passé antique héroïque. Vêtus de noir, ils manifestaient torche en main lorsqu’ils rendaient hommage au roi Léonidas et ses 300 Spartiates.

La progression du parti a finalement cessé en 2013. En janvier de cette année-là, Shehzad Luqman, un Pakistanais de 27 ans, a été poignardé par deux de ses partisans, à Athènes. En septembre, des communistes ont été agressés au Pirée. Le point de non-retour sera l’assassinat du rappeur Pavlos Fyssas, connu sous le nom de Killah P, par Giorgos Roupakias. Il a entraîné ce procès historique. Le parti, qui s’est divisé au fil des ans, a subi une déroute aux dernières législatives.

Source https://www.mediapart.fr/journal/international/081020/en-grece-la-condamnation-d-aube-doree-signe-la-chute-du-parti-neonazi

Le parti Aube Dorée reconnu organisation criminelle

La justice grecque qualifie le parti néonazi Aube d’« organisation criminelle »

Son fondateur, Nikos Michaloliakos, et 45 autres députés et membres ont été reconnus coupables d’« appartenance « .

Après plus de cinq ans de procès, le parti néonazi grec Aube dorée a été qualifié d’« organisation criminelle », mercredi 7 octobre, par la cour pénale d’Athènes. Dans un verdict historique acclamé par la foule, mais ponctué d’incidents, le chef et les principaux cadres d’Aube dorée ont été reconnus coupables d’avoir dirigé ce parti.

Devant le tribunal, plus de 15 000 manifestants, selon la police, s’étaient rassemblés à l’appel du mouvement antifasciste, et de syndicats et partis de gauche. Hurlant de joie à l’énoncé du verdict au mégaphone, des manifestants ont lancé des cocktails molotov, auxquels les forces antiémeute, présentes en nombre, ont aussitôt répliqué par des tirs de gaz lacrymogène, des grenades assourdissantes et l’utilisation de canons à eau, pendant une vingtaine de minutes, a constaté une journaliste de l’Agence France-Presse (AFP).

Les principaux cadres absents

Nikos Michaloliakos, 62 ans, négationniste et admirateur du national-socialisme, a été reconnu coupable, avec six autres cadres du parti, de « direction et appartenance à une organisation criminelle ». Il était l’un des 68 accusés du procès fleuve du parti néonazi, impliqué dans un meurtre et deux tentatives d’homicides. Quarante-cinq autres députés et membres d’Aube dorée ont été reconnus coupables d’« appartenance » à une telle organisation, tandis qu’une quinzaine d’autres ont été acquittés.

Seule une dizaine d’accusés étaients présents dans une salle d’audience clairsemée, les principaux cadres étant absents à l’énoncé du verdict. Ils connaîtront leur peine lors d’une audience ultérieure, mais ils encourent entre cinq et quinze ans de prison.

La cour pénale d’Athènes a également reconnu Yorgos Roupakias, membre d’Aube dorée, coupable du meurtre d’un rappeur antifasciste en 2013. Le militant de gauche Pavlos Fyssas, avait été assassiné à l’arme blanche dans la nuit du 18 septembre 2013, à l’âge de 34 ans, devant un café de son quartier de Keratsini, une banlieue de l’ouest d’Athènes. Son meurtrier, qui a reconnu l’avoir tué, risque la prison à perpétuité. Les peines n’ont pas été annoncées mercredi.

« Justice a été rendue »

« Pavlos, mon fils, tu as réussi », a déclaré la mère de la victime, Magda Fyssas, très émue après la décision. Les parents de Pavlos Fyssas avaient écouté le verdict assis au fond de la salle d’audience. Mme Fyssas s’est levée, les poings serrés, en entendant le jugement, frappant frénétiquement la barre d’escalier devant elle, avant de quitter la salle pour fumer. « C’est une décision positive », a ajouté le père du rappeur tué, qui attend cependant de « voir maintenant les peines ».

A l’extérieur, la foule a exulté de joie dès l’annonce du premier verdict. Sur les masques des manifestants, les pancartes et les banderoles, ils proclamaient « le peuple veut les nazis en prison ». « C’est une grande victoire », s’est félicité Giorgios Papanikolaou, du parti d’extrême gauche Antarsya. « C’est très important que le parti soit qualifié d’organisation criminelle et pas uniquement jugé pour le meurtre de Fyssas », a-t-il dit à l’AFP. « Mais la lutte contre les idées nazies et racistes continue », a ajouté le manifestant, alors que le cortège se dirigeait aux cris de « Pavlos vit plus que jamais aujourd’hui » vers la place centrale d’Athènes, devant le Parlement grec.

A la sortie du tribunal, les avocats des parties civiles ont salué une « décision historique ». « Aube dorée est une organisation criminelle nazie », a déclaré MThanasis Kampayannis, avocat du syndicat PAME. « Justice a été rendue : Aube dorée est une organisation criminelle », a également déclaré à l’AFP Me Kostas Papadakis, avocat de pêcheurs égyptiens, autres parties civiles.

Déclin du parti

Dans ce procès fleuve, Aube dorée était en effet jugé pour deux autres affaires, des « tentatives d’homicide » impliquant elles aussi des membres de ce parti : l’une à l’encontre de pêcheurs égyptiens le 12 juin 2012, l’autre visant des membres du syndicat communiste PAME le 12 septembre 2013. La présidente de la cour, Maria Lepenioti, qui a égrené les noms des accusés et leurs jugements, a vu défiler 150 témoins et une cinquantaine d’avocats au cours de plus de 400 audiences ces cinq dernières années.

Formation politique fondée en 1985 par Nikos Michaloliakos, longtemps marginale, la débâcle sociopolitique que la Grèce a dû affronter après la crise financière de 2010 a profité à ce parti néonazi, dont des représentants entrent pour la première fois, en 2012, au Parlement grec. A l’époque, des groupes d’hommes en noir sillonnaient les rues d’Athènes, tabassant leurs opposants à coups de pied ou de barres de fer et scandant « sang, honneur, Aube dorée ».

Qualifié d’« historique » par le monde politique et les parties civiles, ce procès a entraîné progressivement le déclin de la formation, dont la direction renie actuellement l’idéologie nazie. Aux dernières législatives de juillet 2019, Aube dorée n’a obtenu aucun député.

Le Monde avec AFP

Source https://www.lemonde.fr/international/article/2020/10/07/grece-le-chef-du-parti-neonazi-aube-doree-coupable-incidents-devant-le-palais-de-justice_6055138_3210.html

 

Des camps d’asile fermés en Grèce

Après la Moria, l’UE va expérimenter des camps d’asile fermés sur les îles grecques

Un « camp fermé » pour les personnes déplacées est en cours d’installation à Samos dans le cadre de la stratégie de l’UE visant à renforcer ses frontières extérieures. Ni les habitants de l’île ni les personnes qui y seront détenues ne veulent de ce camp.

Le site de ce qui sera l’un des premiers nouveaux camps de l’UE pour les personnes déplacées est entouré d’une clôture en fil de fer barbelé de 6 mètres de long. La chaleur de la journée s’accumule dans la vallée, qui n’est desservie jusqu’ici que par une route de gravier. Le futur camp est situé à plus de 5 kilomètres de Samos, la principale ville de l’île du même nom. Lorsque le camp sera construit, les résidents pourront y entrer par des tourniquets aux portes grâce à des brassards à micropuces. La nuit, les portes resteront verrouillées.

D’ici la fin 2020, Samos devrait être la première île grecque à accueillir un « camp fermé ». L’annonce a été faite par le ministre grec de l’immigration, Notis Mitarachi, lors de sa visite sur l’île fin août. La Commission européenne a accordé à la Grèce près de 130 millions d’euros (152 millions de dollars) pour la construction de centres d’accueil et d’identification polyvalents, qui devraient offrir un niveau d’hébergement supérieur à celui des camps précédents, avec des cabines portables, de l’eau courante, des zones séparées et, surtout, plus de sécurité.

Le concept des camps fermés fait partie d’une nouvelle stratégie visant à mieux sécuriser les régions situées aux frontières extérieures de l’Union européenne. Les camps surpeuplés dans ces régions sont devenus un problème chronique depuis qu’un grand nombre de personnes déplacées ont commencé à arriver en Europe à partir de 2015. Au début de l’année, les îles grecques proches de la frontière avec la Turquie accueillaient plus de 40 000 demandeurs d’asile. Dans la ville de Samos, le nombre de demandeurs d’asile dépassait le nombre de personnes qui y vivaient en permanence. Près de 5 000 personnes vivent actuellement dans le camp existant sur l’île – alors qu’il ne devait en accueillir que 650 au départ.

Les résidents ont construit des tentes faites de sacs de couchage, de bâtons et de bâches. Des tuyaux d’eau sortent du sol. Les portes des cabines de toilettes portables s’ouvrent et se ferment au gré du vent. Il y a une odeur de poisson frit et d’urine.

Renvoyez-nous

Omar, qui a demandé que son vrai nom ne soit pas utilisé, était assis sur une palette, buvant du thé avec sa femme et ses enfants près de la tente que la famille – huit membres en tout – partage. La nuit, les rats sont si bruyants qu’ils ne peuvent pas dormir, a déclaré Omar, 58 ans. Après sept mois d’attente depuis que la famille est venue d’Idlib, en Syrie, il en a eu assez. « Il vaut mieux nous renvoyer dans notre pays », dit-il : Il vaut mieux être en danger dans une guerre civile que d’avoir un refuge indéfini dans ce camp.

Les infections cutanées prolifèrent, a dit Omar, et la plupart des gens sont sans douche. Chaque personne reçoit une bouteille d’eau et deux repas par jour – que les membres de la famille font la queue à tour de rôle pendant trois heures pour les obtenir.

Un fils, Mohammed, qui avait étudié à l’université en Syrie, a distribué les bons de repas pour les jours suivants. Alors qu’au début, chaque personne recevait environ 90 euros par mois, cette somme forfaitaire a maintenant été réduite à 75 euros. Omar avait entendu dire que l’argent économisé servait à améliorer les conditions de vie générales. Mais, dit-il, rien n’a changé pour lui. Au contraire : Depuis que des restrictions ont été imposées à la circulation, a-t-il dit, la situation est devenue encore plus tendue. Il a dit que la situation s’est souvent aggravée la nuit – quand il n’y a ni électricité ni lumière.

Les ONG sont-elles autorisées ?

Après la découverte des deux premiers cas de coronavirus dans le camp au début du mois de septembre, les autorités grecques ont imposé un confinement qui doit durer jusqu’à la fin du mois. Au cours de la semaine dernière, y compris dimanche soir, des incendies ont éclaté dans le camp. On ne sait toujours pas ce qui a provoqué ces incendies. Mais les politiciens grecs mettent en garde contre les effets d’imitation suite aux incendies du camp de Moria à Lesbos, et excusent même les résidents du camp de s’être livrés à des incendies criminels pour échapper aux conditions misérables.

À l’avenir, 2 100 personnes seront détenues au camp – 900 d’entre elles dans une zone fermée où elles attendront que des décisions soient prises sur leur cas, selon Jonathan Vigneron, coordinateur du projet de Médecins sans frontières (MSF) sur Samos. Les chiffres sont tirés d’une carte que le ministre des migrations a distribuée lors de sa visite. M. Vigneron a déclaré que tout cela lui rappelait une prison.

« C’est une chose très effrayante à voir », a déclaré M. Vigneron. Il a ajouté que les organisations internationales avaient demandé des éclaircissements sur la question de savoir si des ONG telles que MSF seraient même autorisées à travailler dans le nouveau camp. La procédure d’enregistrement des ONG rend l’accès presque impossible, a-t-il dit. Dans une lettre ouverte, 68 organisations ont écrit que les conditions dans le camp pourraient créer « une situation préoccupante en ce qui concerne la dignité humaine ».

Les personnes déplacées pourraient avoir un meilleur niveau de logement et plus de sécurité dans le camp fermé, a dit M. Vigneron, mais elles n’auraient rien à faire et aucune liberté de mouvement. « Le camp est situé à 5 kilomètres de tout endroit », a déclaré M. Vigneron. « Ce n’est pas marginaliser les gens : C’est de la ségrégation par définition. »

Cet article a été adapté de l’allemand par Tim Jones. Auteur : Ann Esswein

Source : dw.com

Traduit avec www.DeepL.com/Translator (version gratuite)

Source https://www.infomigrants.net/en/post/27510/after-moria-eu-to-try-closed-asylum-camps-on-greek-islands

Pétition Respectons les droits humains de tous les migrants

La plainte déposée le 22 septembre 2020 à la Commission Européenne pour violation des droits des demandeurs d’asile en Grèce est devenue une pétition

https://act.wemove.eu/campaigns/droits-migrants-moria?utm_source=civimail-32725&utm_medium=email&utm_campaign=20200923_FR

en haut de la pétition, il est possible de choisir sa langue : français, castellano, deutsch, english, italiano, polski, portugues

Grèce-Turquie : mise en garde Européenne pour Ankara…

At summit, EU leaders talk tough on Turkey
The accord on Turkey came shortly before 1 a.m. | Johanna Geron/AFP via Getty Images

Le Conseil européen met en garde Ankara contre des sanctions, impose des pénalités au Belarus.

Par David M. Herszenhorn, Jacopo Barigazzi et Rym Momtaz

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Les dirigeants européens sont parvenus à un accord *sur la manière de s’attaquer à la Turquie, en convenant tôt vendredi d’avertir tacitement Ankara de sanctions si elle ne parvient pas à résoudre ses différends de longue date avec la Grèce et Chypre, notamment en ce qui concerne les forages énergétiques en Méditerranée.

Mais les dirigeants ont également fait miroiter quelques prunes alléchantes si la Turquie parvenait à apaiser les tensions avec ses voisins de l’UE, notamment en renforçant les liens commerciaux dans le cadre d’une union douanière modernisée et en approfondissant la coopération sur les questions de migration et de réfugiés.

Les dirigeants ont également adopté un langage délibérément ambigu sur les « contacts interpersonnels » qu’Ankara peut interpréter comme un assouplissement potentiel des exigences de visa pour les voyageurs turcs vers l’UE. Certains fonctionnaires de l’UE ont toutefois déclaré qu’une telle analyse serait trop optimiste. Et les diplomates de l’UE se sont vus forcés de réagir négativement à certaines formulations du texte.

La menace de sanctions n’a pas manqué. « En cas de nouvelles actions unilatérales ou de provocations en violation du droit international, l’UE utilisera tous les instruments et les options à sa disposition », ont averti les dirigeants dans leurs conclusions, en citant également les dispositions du traité de l’UE relatives aux sanctions.

« Nous souhaitons vivement avoir une voix plus forte sur la scène internationale », a déclaré le président du Conseil européen, Charles Michel, lors d’une conférence de presse. « Nous sommes prêts à nous engager dans un programme plus positif avec la Turquie, à condition qu’elle s’engage également dans une direction plus positive avec nous, et mette fin à ces actions unilatérales, qui vont à l’encontre du droit international ».

L’UE s’est fermement rangée du côté de la Grèce et de Chypre dans la lutte pour le forage, mais Bruxelles a également essayé de gérer toute une série d’autres tensions avec la Turquie.

L’accord sur la Turquie est intervenu peu avant 1 heure du matin vendredi, après la première journée d’un sommet des dirigeants européens consacré presque entièrement aux affaires étrangères.

L’accord s’est avéré suffisant pour que Chypre cesse de bloquer l’imposition de sanctions dans un autre point chaud de la politique étrangère, le Belarus, en raison de son élection présidentielle contestée – largement condamnée comme frauduleuse – et de la répression violente des manifestants.

*La Grèce et Chypre ont rejeté deux avant-projets de conclusions, estimant qu’ils étaient «trop souples» vis-à-vis de la Turquie, et il a fallu une réunion entre lePremier ministre grec Kyriakos Mitsotakis, le Président chypriote Nikos Anastasiades, le président duConseil européen, Charles Michel, la chancelière allemande Angela Merkel et le Président françaisEmmanuel Macron, avant de pouvoir finalement aboutir à un texte de compromis.

Un grec consacre sa vie à nourrir ceux qui ont faim

Par Anna Wichmann –Konstantinos Polychronopoulos. Credit: Η Ζωή ειναι Όμορφη/ Facebook

Réalisant la nécessité d’un soutien communautaire après que la tempête destructrice Ianos ait inondé Karditsa ce mois-ci, Konstantinos Polychronopoulos et des volontaires se sont rendus dans la ville, située en Thessalie, pour préparer de la nourriture et nourrir les habitants qui sont dans le besoin.

Les images de Karditsa montrent une destruction généralisée, notamment des bâtiments inondés et des routes en ruine. Les habitants se retrouvent avec une ville méconnaissable, des maisons et des entreprises fortement endommagées, voire complètement détruites.

Interrogé sur son travail à Karditsa et dans toute la Grèce, Polychronopoulos a déclaré au Greek Reporter que « chaque jour, l’Autre Humain sert 3 000 portions de nourriture à ceux qui sont dans le besoin à Karditsa ».

« Les migrants et les réfugiés, les Athéniens, les gens de Thessalonique et de toute la Grèce sont ici en train de cuisiner… toutes ces différentes mains sont unies pour montrer leur solidarité aux habitants de Karditsa », a souligné Polychronopoulos.

Après avoir été témoin du bilan de la crise financière en 2009, Polychronopoulos a développé une banque alimentaire appelée « Ο Άλλος Άνθρωπος », ou « L’autre humain », en 2011. Le groupe ne se contente pas de servir de la nourriture aux affamés, mais la prépare devant eux, créant ainsi communauté et confiance.

Polychronopoulos a vu la nécessité évidente d’un tel travail, car de nombreuses personnes luttaient pour se nourrir et nourrir leur famille, mais il a rencontré des difficultés pour apporter de l’aide.

En ce qui concerne ses premiers travaux, M. Polychronopoulos a déclaré qu’il avait commencé par distribuer des sandwiches précuits. Au début, les gens se méfiaient beaucoup de la nourriture, car ils n’avaient pas vu comment elle était préparée, et ils ne la prenaient qu’après l’avoir vu manger lui-même.

Après cela, il a décidé qu’il ferait cuire la nourriture devant ceux qui en avaient besoin, afin qu’ils puissent voir comment elle était préparée et aussi créer une communauté, en parlant et en créant des liens avec d’autres personnes dans le besoin et avec ceux qui préparent la nourriture.

Il rassembla ses ingrédients en demandant aux vendeurs des marchés de plein air d’Athènes s’ils avaient des restes ou des invendus qu’ils pouvaient lui donner. Aujourd’hui, l’Autre Humain accepte les dons des Grecs et des sympathisants du monde entier.

Partout en Grèce, y compris à Athènes et dans les camps de migrants de Lesvos, des personnes affamées ont été nourries gratuitement par Polychronopoulos et d’autres bénévoles de sa « cuisine sociale ».

Le groupe a également loué un espace dans le quartier athénien de Metaxourgeio, où ils stockent leur nourriture, et toute personne dans le besoin peut prendre une douche et prendre un café ou un petit-déjeuner.

Pour son travail d’alimentation des personnes dans le besoin, réfugiés et Grecs, Polychronopoulos a reçu le « Prix du citoyen européen » pour 2015.

Il a toutefois refusé ce prix en signe de protestation contre le traitement des réfugiés par certains États européens et les mesures d’austérité imposées face à la crise économique.

Il a déclaré qu’il attendait de recevoir le prix de « l’Europe de la solidarité et de la culture… et non de l’Europe du cannibalisme ».

Source https://greece.greekreporter.com/2020/10/02/greek-man-devotes-life-to-feeding-the-hungry/

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