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Loi sécurité globale : la France rappelée à l’ordre par l’ONU

Communiqué LDH

L’Organisation des Nations unies (ONU), saisie par la Ligue des droits de l’Homme (LDH), a adressé, le 12 novembre 2020, à monsieur le président de la République des recommandations concernant la proposition de loi « Sécurité globale ».

Les termes utilisés sont particulièrement sévères « L’information du public et la publication d’images et d’enregistrements relatifs à des interventions de police sont non seulement essentiels pour le respect du droit à l’information, mais elles sont en outre légitimes dans le cadre du contrôle démocratique des institutions publiques ».

Elle considère ainsi de manière claire et sans ambiguïté que l’infraction de diffusion malveillante d’images des forces de l’ordre n’est pas conforme aux principes de légalité, nécessité et proportionnalité. Par ailleurs, les rapporteurs spéciaux considèrent que l’instauration de la surveillance par drone et celle de la centralisation des images de cameras-piéton avec accès direct par les autorités policières, soulèvent d’innombrables problématiques quant aux garanties du public et à leurs libertés fondamentales.

La LDH demande instamment aux parlementaires de ne pas voter ces dispositions sauf à porter une atteinte sans précédent à l’Etat de droit ainsi que les rapporteurs spéciaux de l’ONU le rappellent.

La France s’inscrit dans une communauté internationale. Le respect des traités internationaux et des recommandations de l’ONU est le seul moyen pour garantir sa crédibilité et sa stature aux yeux des autres nations.

Paris, le 16 novembre 2020

Le communiqué en pdf CP-LDH-Loi-sécurité-globale-ONU et le rapport Rapport-Haut-commissaire-aux-droits-de-lHomme-ONU


Source https://www.ldh-france.org/wp-content/uploads/2020/11/Rapport-Haut-commissaire-aux-droits-de-lHomme-ONU.

Communiqué du dispensaire social métropolitain d’Elliviko

Le dispensaire d’Elliniko avait été expulsé pour construire à sa place casino, palaces et maisons de jeux. Il vient de rouvrir, accueilli par la municipalité de Glyfada.
A peine installé il reprend la lutte et voici son premier communiqué de presse :

Communiqué. LE SYSTÈME PUBLIC DE SANTÉ GREC VA S’EFFONDRER
 Dispensaire Social Métropolitain d’Elliniko (MKIE).
Communiqué de presse du 11 novembre 2020

Depuis début octobre notre pays revit le cauchemar de la pandémie qui prend cette fois  une importance particulièrement menaçante avec des dizaines de morts, un nombre à trois chiffres d’intubations et des milliers de contaminations chaque jour.

Alors que les scientifiques avertissaient de la tempête imminente, nous, citoyens, avons connu l’absence de prévention avec des moyens de transport bondés tous les jours, des classes surpeuplées dans les écoles et une mauvaise gestion du tourisme.

Nous avons constaté que la manière envisagée de faire face à la pandémie était essentiellement d’en transférer à nouveau la responsabilité exclusivement aux citoyens. Cela s’est traduit au départ par la prise de mesures ponctuelles et locales pour aboutir finalement à l’imposition d’un second confinement général.

Au-delà des conséquences sociales et économiques désastreuses, cette situation a mis une fois de plus en évidence l’ampleur des insuffisances du système de santé publique et de la protection inadéquate du pays en termes de personnel de santé, d’infrastructures et de planification.

Il est tragique d’attendre l’éclatement de la pandémie pour annoncer l’embauche de médecins en soins intensifs, de dépouiller des structures de soins primaires de santé pour combler les postes vacants dans les hôpitaux (au lieu d’embaucher du personnel permanent), d’assurer les permanences dans un grand hôpital (CHU, Thessalonique) sans lit disponible dans l’Unité de Soins Intensifs ou d’épuiser le personnel médical et infirmier par des gardes continuelles avec risque de burn-out et d’effondrement du système.

 Dans le même temps, le gouvernement tente de couvrir les carences de lits des Unités de Soins Intensifs par des contrats coûteux payés à des cliniques privées et laisse les citoyens à la merci de la spéculation de centres de diagnostics qui ont des tests de dépistage de virus aux prix surévalués.

Nous sommes particulièrement préoccupés par les problèmes mis en évidence par les médecins responsables qui ont affaire à des malades liés au Covid-19 et à d’autres patients. A savoir la réduction de 80% des interventions chirurgicales qui entraîne une augmentation de l’attente déjà trop longue, et se traduit par des complications fatales et le développement des maladies.  C’est aussi un fardeau supplémentaire pour les patients ayant par exemple une crise cardiaque ou un AVC en raison des difficultés de prise en charge dues à la fermeture d’hôpitaux.

Le MKIE (Dispensaire Social Métropolitain d’Elliniko) signalait dès le mois d’avril les priorités urgentes pour faire face à la pandémie et soulignait :  » maintenant que nous avons gagné du temps il est impératif  de développer le système de santé publique du premier degré « .

C’est le contraire que nous avons découvert et nous sommes étonnés que l’avant-projet de budget 2021 prévoie une réduction des dépenses de 31 millions d’euros pour les hôpitaux et les soins de santé du premier degré.

Les dépenses pour le recrutement de 4 000 agents de santé annoncées par le Premier ministre à la Foire Internationale de Thessalonique n’ont pas été enregistrées. Cela alors que les Soins de Santé du premier degré en Grèce sont au dernier rang des États européens et des pays comme l’Espagne et l’Italie. Des problèmes financiers aussi énormes plombent tout le secteur de la santé d’une quantité de milliards d’euros supplémentaires.

Voilà pourquoi nous appelons maintenant à un renforcement et un soutien substantiels du Système Public de Santé à tous les niveaux quantitativement et qualitativement avec
§ l’augmentation des crédits du budget de la santé publique
§ le recrutement de personnel médical et infirmier permanent pour combler les postes vacants dans les services de santé et de soins de santé primaires et secondaires
 § la création de lits pour les Unités de Soins Intensifs dans les hôpitaux publics, et dotation en personnel

Le MKIE, dispensaire autogéré, qui dispense gratuitement soins et médicaments,  proche de ses patients et de la société grecque, continuera de lutter, avec le même engagement envers ses principes et son but, pour un Système Public de Santé moderne et efficace, doté de tous les moyens nécessaires.

Traduction Solidarité Grèce 67

 Dispensaire Social Métropolitain d’Elliniko
Tsitsanis et Karaïskakis 34
Glyfada, ΤΚ 16675
http://www.mkiellinikou.org
Email: mkiellinikou@gmail.com

Source Les dispensaires autogérés grecs KIF

La police grecque suspend le « droit de réunion » constitutionnel, 15-18 novembre

Avec la bénédiction du gouvernement, la police grecque a procédé au verrouillage des droits démocratiques des citoyens et a déclaré une interdiction nationale de trois jours de tout rassemblement public de plus de quatre personnes sous prétexte de la pandémie de coronavirus. Cette décision sans précédent non seulement suspend littéralement l’article 11 de la Constitution et le droit de réunion des Grecs, mais elle viole la Constitution elle-même car seul le Parlement peut suspendre les dispositions de la Constitution.

Tard samedi soir, la police a déclaré qu’aucun rassemblement public de 4 personnes ou plus n’est autorisé de 06h00 du 15 novembre à 21h00 le 18 novembre 2010. Notez que le 17 novembre est l’anniversaire du soulèvement des étudiants de l’école polytechnique contre la dictature militaire en 1973.

Les contrevenants à l’interdiction seront condamnés à une amende de 3 000 euros s’ils sont des personnes physiques et de 5 000 euros pour les personnes morales, voire partis politiques.

La décision du chef de la police grecque a été publiée tard samedi dans le journal officiel.

Invoquant des « raisons d’urgence pour faire face au grave danger de propagation des coronavirus », le chef de la police suspend l’article 11 de la Constitution grecque. Il est à noter que seul le Parlement peut suspendre un tel article de la Constitution.

Le site d’information in.gr note que l’interdiction totale de tout rassemblement public, c’est-à-dire la suspension totale de l’article 11 de la Constitution, a été appliquée deux fois dans le passé : Le 21. avril 1967, lorsque les colonels se sont emparés du pays et ont déclaré une dictature militaire, et le 17. Novembre 1973, lorsque les colonels sont entrés à l’école polytechnique avec un char d’assaut.

C’est la première fois que le droit de réunion est interdit par la Constitution depuis 1975.

La publication de la décision est intervenue après que le ministre de la protection des citoyens, Michalis Chrysochoidis, ait averti les dirigeants politiques que l’école polytechnique resterait fermée et que les rassemblements ne seraient pas autorisés. S’adressant à Star TV, le syndicaliste de la police Stavros Balaskas a déclaré que « les citoyens ou les responsables politiques qui enfreignent la loi et les ordres seront arrêtés ».

Seules les petites délégations de partis politiques sont censées être autorisées à déposer des couronnes « après consultation préalable de la police ».

Article 11 de la Constitution :  Les Grecs ont le droit de se réunir pacifiquement et sans armes. La police ne peut être présente que lors de rassemblements publics en plein air. Les rassemblements en plein air peuvent être interdits par décision motivée de l’autorité de police, en général, s’ils constituent une menace sérieuse pour la sécurité publique et, dans certaines régions, si une perturbation grave de la vie socio-économique est menacée, comme l’exige la loi.

La décision sans précédent d’un chef de police de suspendre un article de la Constitution avec la bénédiction du gouvernement conservateur a déclenché un scandale sur les médias sociaux et plusieurs avocats ont souligné qu’elle violait de manière flagrante la Constitution.

L’avocat Vassilis Sotiropoulos a noté, entre autres :

« La suspension de l’article 11 de la Constitution (droit de réunion) dans tout le pays n’est pas compétente pour être ordonnée par un chef de police, sauf par le Parlement et dans les conditions de l’article 48 de la Constitution.

La loi 4703/20120 sur les rassemblements publics en plein air stipule que l’autorité de police compétente peut interdire « un rassemblement public imminent », et non le droit de réunion publique dans tout le pays pendant un certain nombre de jours, note l’avocat Sotiropoulos en rappelant que « la disposition constitutionnelle  n’a jamais été mise en œuvre depuis l’adoption de la constitution actuelle ».

Συγκεκριμένα, την αναστολή του άρθρου 11 του Συντάγματος (δικαίωμα του συνέρχεσθαι) σε όλη την χώρα δεν είναι αρμόδιος να διατάξει αρχηγός της Αστυνομίας, παρά μόνο η Βουλή υπό τις προϋποθέσεις του άρθρου 48 του Συντάγματος.

– Sotiropoulos (@Sotiropoulos) 15 novembre 2020

Akritas Kaitzidis, professeur assistant de droit constitutionnel à l’université de Thessalonique, a souligné que  »

« L’interdiction universelle de quatre jours des rassemblements dans tout le pays n’est pas une restriction mais une suspension de la liberté de réunion. Et déjà pour cela est inconstitutionnel. Mais même si elle est considérée comme une restriction, la décision de l’imposer est illégale.

La décision fait référence à l’article 11, qui n’autorise toutefois une interdiction que pour des raisons de sécurité publique, et non de santé publique, et à l’article 5, qui n’autorise toutefois que des mesures individuelles pour la santé publique, et non des interdictions universelles ».

< Η απόφαση επικαλείται το άρθρο 11 Συντ, που όμως μόνο για ασφάλειας δημόσιας επιτρέπει απαγόρευση, όχι για δημόσια υγεία, και το άρθρο 5, που όμως μόνο ατομικά μέτρα επιτρέπει για δημόσια υγεία, όχι καθολικές απαγορεύσεις 2/2

– Akritas Kaidatzis (@AkritasKaidatz1) 14 novembre 2020

Le vice-président du Parlement européen et député européen de SYRIZA, Dimitris Papadimoulis, a tweeté que la décision n’a pas été prise suite aux recommandations des épidémiologistes. « C’est extrême et cela rappelle les époques sombres. Le gouvernement de droite, avec des ministres de haut rang orphelins de la junte, vise à provoquer des incidents et des divisions afin de cacher qu’il n’a pas su faire face à la pandémie et à l’économie ».

Την #απαγορευση_κυκλοφοριας για το 3ήμερο δεν την πρότειναν λοιμωξιολόγοι. Είναι ακραία και και θυμίζει σκοτεινές εποχές. Η Δεξιά, με κορυφαίους υπουργούς ορφανά της Χούντας, επιδιώκει ταραχές και διχασμό, για να κρύψει πως « έπεσε έξω » κ στην #Πανδημια κ στην #οικονομια #Πολυτεχνειο

– Dim. Papadimoulis (@papadimoulis) 15 novembre 2020

Dans une déclaration, le parti communiste KKE a décrit ces décisions comme un « monument à l’autoritarisme », ajoutant qu’elles seront « annulées dans la pratique ».

MISE À JOUR : L’Association des juges et des procureurs grecs a publié une déclaration dimanche après-midi, décrivant la « décision du chef de la police comme « inconstitutionnelle » et demandant qu’elle soit « immédiatement révoquée ».

C’est la deuxième fois que la pandémie est utilisée comme un instrument, un prétexte à d’autres fins. La première était pour la Grande Promenade d’Athènes en été, et le Conseil d’État a jugé qu’elle était « illégale ».

Cette fois, cela semble être pour des raisons purement idéologiques, car au moins deux partis, le KKE communiste et le MeRA25 de Varoufakis, ainsi que plusieurs organisations de gauche ont déclaré qu’ils conserveraient la tradition des festivités à l’occasion de l’anniversaire du soulèvement étudiant. La principale opposition, SYRIZA, avait laissé entendre qu’elle resterait à l’écart des festivités.

Sur les médias sociaux, les Grecs en colère attendent que la Présidente de la République hellénique, Katerina Sakellaropoulou, ancienne juge au Conseil d’Etat, prenne position sur la question.

Il est à noter que les 16, 17 et 18 novembre sont des jours ouvrables où les banlieusards d’Athènes et d’autres grandes villes vont à nouveau s’entasser dans les transports publics, le gouvernement n’ayant pris aucune mesure pour améliorer la situation.

PS Espérons que la police ne considérera pas l’encombrement des bus et du métro, des quais de train comme des « rassemblements » et qu’elle n’infligera pas des amendes aux personnes qui se rendent au travail et en reviennent. Il en va de même pour la foule sur les marchés ouverts… ou même pour les prêtres  pour avoir ouvert illégalement des églises pour les fidèles ….

Traduit avec www.DeepL.com/Translator (version gratuite)

Source https://www.keeptalkinggreece.com/2020/11/15/greece-police-chief-right-assenbly-public-gatherings-constitution-article/


Mise à jour par IOANNA MANDROU

Le Conseil d’État juge légale l’interdiction de 4 jours de rassemblements

La plus haute juridiction administrative grecque, le Conseil d’État (CoS), a décidé jeudi qu’une interdiction de la police grecque (ELAS) de manifester avant l’anniversaire du soulèvement des étudiants de l’École polytechnique de 1973, le 17 novembre, était justifiée pour des raisons d’intérêt public et de protection de la santé publique.

Avec sa décision, prise par le plénum du CoS, la cour a rejeté un appel présenté par le parti MeRA25, les groupes de défense des droits de l’homme et d’autres citoyens pour lever l’interdiction. Le tribunal avait également rejeté une injonction urgente déposée par les mêmes plaignants à l’approche de la marche annuelle de l’école polytechnique.

La cour a décidé que la mesure en question était « en effet stricte mais nécessaire pour la protection de la santé publique… pour des raisons extrêmement urgentes ».

Les juges ont également noté que l’interdiction « est totalement temporaire et, compte tenu de la situation spécifique, d’une durée raisonnable ».

https://www.ekathimerini.com/259350/article/ekathimerini/news/council-of-state-finds-4-day-ban-on-rallies-lawful

Olivier Delorme : « L’Allemagne est l’allié du régime islamo-impérialiste d’Erdogan »

ENTRETIEN. Historien et romancier, Olivier Delorme est notamment l’auteur de La Grèce et les Balkans (3 tomes Gallimard, 2013) et de 30 bonnes raisons pour sortir de l’Europe (H&O, 2017). Il fait le point avec nous sur la politique européenne d’Erdogan et sur le jeu trouble de l’Allemagne de Merkel.

Front Populaire : Fin octobre, le gouvernement grec a adressé une lettre à Berlin pour demander l’arrêt des exportations militaires vers la Turquie en raison des menaces d’Erdogan. Or nous avons appris il y a quelques jours que Berlin semble continuer à livrer Ankara en sous-marins (214T). Les Verts allemands s’en offusquent d’ailleurs. L’Allemagne serait prête à mettre en danger la Grèce pour sauvegarder ses intérêts ?

Olivier Delorme : Sans aucun doute ! Depuis dix ans, l’UE à direction allemande a imposé une déflation sans fin dont la principale conséquence est d’alourdir le poids de la dette par rapport au PIB, qui a été le prétexte de cette politique. En dépit des déclarations mensongères répercutées par les médias, la Grèce ne va pas mieux. Son économie n’a cessé de s’affaiblir, 500 000 Grecs parmi les plus jeunes et les mieux formés ont dû partir en exil, le budget de la Défense a subi des coupes désastreuses comme tous les autres, les biens communs du peuple grec ont été mis à l‘encan – les entreprises allemandes se taillant la part du lion dans cette grande braderie. Tandis que l’UE arrosait avec l’argent des contribuables européens le régime islamo-impérialiste d’Ankara qui déversait un flot de migrants – pas de réfugiés – sur les îles grecques et la frontière terrestre. Àfonds perdus et sans jamais exiger de contrepartie sur la cessation des provocations à l’égard de la Grèce et de Chypre.

Quant à la réponse de Berlin à la lettre du ministre des Affaires étrangères grec, elle est un monument de cynisme puisqu’elle mentionne que l’Allemagne vend très peu d’armes à la Turquie, que ces ventes sont soumises à autorisation gouvernementale et qu’il n’y a donc aucune raison de modifier quoi que ce soit. Or si les sous-marins grecs disposent aujourd’hui d’une supériorité technologique qui leur permet d’assurer la sécurité de l’espace égéen, vendre de nouveaux sous-marins à la Turquie, c’est obliger la Grèce à passer un marché équivalent pour maintenir l’équilibre actuel !

FP : Les ambitions de la Turquie dans l’espace méditerranéen interrogent. Pourriez-vous résumer à grands traits le comportement de la Turquie en Méditerranée orientale depuis août ? A quoi joue Erdogan ?

OD : Erdogan est porteur d’un projet à la fois islamiste et impérialiste. Mais l’économie est en récession depuis la fin de 2018 et le système de clientélisme islamique sur lequel reposait la fortune électorale de son parti, l’AKP, manque de carburant. Les milliards déversés par l’Union européenne au titre de la préadhésion, de la réalisation de l’union douanière et du chantage aux migrants ne suffisent plus à financer ce système, notamment par les commissions que génèrent des travaux pharaoniques et souvent inutiles. La monnaie s’effondre (-40 % face au dollar en un an), les prix des importations flambent, l’inflation s’emballe et le déficit de la balance commerciale se creuse car la Turquie exporte des produits à faible valeur ajoutée alors qu’elle importe des produits à forte valeur ajoutée et la quasi-totalité de son énergie. Erdogan interdit à la Banque centrale de relever des taux d’intérêt déjà supérieurs à 10 % afin de ne pas ralentir davantage l’activité : les réserves de change s’épuisent à soutenir la monnaie et ne couvriraient plus que deux mois d’importations. Quant aux recettes touristiques, elles sont en chute libre du fait de la crise sanitaire dont la gestion a été catastrophique.

Du coup, comme tout régime despotique dans une impasse intérieure, celui d’Erdogan cherche à ressouder l’opinion derrière lui dans des aventures extérieures : la deuxième orientation du régime – renouer avec le passé impérial ottoman – se trouve ainsi suractivée par les circonstances. Mis en échec en Syrie par la Russie, bloqué en Libye par l’Égypte (sans doute avec le concours des Émirats arabes unis, de la France et encore de la Russie), Erdogan s’est retourné durant l’été contre deux membres de l’Union européenne – la Grèce et Chypre, dont la Turquie occupe et colonise 37 % du territoire depuis 1974 –, puis il a poussé le despote d’Azerbaïdjan à rallumer en Artsakh (Haut-Karabagh) une guerre contre les Arméniens en réalité dirigée par Ankara.

Depuis 1973, la Turquie prétend s’arroger le droit d’exploiter les ressources de toute la moitié orientale de la mer Égée, au mépris du droit international qui reconnaît à la Grèce une zone économique exclusive (ZEE) autour de ses îles. Cette prétention a généré plusieurs « épisodes chauds » – ainsi que les Grecs les nomment. Puis, dans les années 1990, la Turquie élabora la « doctrine des zones grises » qui, par une interprétation insoutenable des traités de 1923 et 1947 fixant les frontières gréco-turques, nie la souveraineté grecque sur des centaines d’îlots en Égée. Et en 1995, l’Assemblée nationale d’Ankara a donné à l’exécutif une autorisation permanente de déclarer la guerre à la Grèce si celle-ci procédait à l’extension à 12 milles de ses eaux territoriales prévue par la convention internationale de Montego Bay (1982) – bien que la Grèce se fût engagée à ne pas y procéder unilatéralement et que la Turquie, non signataire de cette convention, l’ait fait en mer Noire comme en Méditerranée. Enfin, l’actuel pouvoir a adopté le concept de « Patrie bleue » qui permet d’étendre de manière quasi illimitée les prétentions turques dans l’espace maritime.

Et Erdogan est passé aux actes, au début d’août, envoyant des navires de prospection d’hydrocarbures, escortés par des flottilles de guerre, dans les ZEE grecque et chypriote, notamment autour de Kastellorizo, la plus orientale des îles grecques. La Grèce a répliqué en dépêchant sur zone sa marine afin d’entraver ces actions illégales et le face-à-face a failli à plusieurs reprises dégénérer en affrontement, tandis que la Turquie multipliait partout en Égée les violations des eaux territoriales et de l’espace aérien grecs (qui ne cessent jamais), des sous-marins turcs étant débusqués à proximité immédiate des côtes de la Grèce continentale.

FP : L’attitude de l’Allemagne est plus qu’ambiguë depuis août. Merkel cherche clairement à ne pas faire de vague avec la Turquie et refuse de condamner Erdogan avec le reste de l’UE. Quelles sont les raisons d’un tel positionnement de l’Allemagne par rapport à la Turquie ?

OD : Vous êtes charitable en parlant de position ambiguë ! En réalité, depuis le début de la crise, Merkel s’est alignée sur Erdogan, au mépris du droit international, de la position du Conseil de sécurité de l’ONU, des principes de bon voisinage et de règlement pacifique des différends affichés par l’Union européenne ainsi que des intérêts vitaux de deux de ses membres !

En 1975, les Premiers ministres grec et turc avaient convenu de recourir à l’arbitrage de la Cour de justice internationale de La Haye, seule instance compétente pour régler les différends de ce type. Mais le Turc s’est rétracté sous la pression des Loups gris, un groupe ultra violent d’extrême droite dont le gouvernement français vient d’interdire l’activité dans notre pays et dont le chef était alors vice-président du gouvernement. En 1976, le Conseil de sécurité de l’ONU s’est prononcé en faveur de cet arbitrage et la Cour s’est affirmée compétente, mais seulement dans la mesure où les deux parties la saisiraient. On sait approximativement ce que serait sa décision au vu des arrêts qu’elle a déjà rendus dans des situations comparables de mer semi-fermée. Et tous les gouvernements grecs, quelle que soit leur orientation politique, ont depuis demandé à la Turquie d’aller à La Haye.

Pourquoi l’UE, si prompte à brandir le droit – y compris là où elle n’a rien à faire –, n’a pas plus conditionné l’ouverture des négociations d’adhésion de la Turquie à l’acceptation de cet arbitrage qu’à la cessation de l’occupation et de la colonisation illégales du nord de Chypre, alors que deux États de l’Union sont en cause ? Pourquoi Merkel n’exige-t-elle pas aujourd’hui de la Turquie qu’elle accepte cet arbitrage ? Pourquoi Merkel tente-t-elle d’obtenir une négociation bilatérale entre un pays de moins de 11 millions d’habitants et un pays de plus de 80 millions dont les responsables ne cessent de menacer et d’imposer leur volonté par la force, contre le droit, alors que cette négociation bilatérale est, depuis 1975, l’exigence… d’Ankara ?

Il faut donc cesser de se voiler la face. L’Allemagne bloque les sanctions contre la Turquie qui pourraient contribuer à ramener le calme et contraindre le tyran turc à revenir à un peu de raison. Elle n’est pas un arbitre ; elle est l’allié objectif du régime islamo-impérialiste turc.

À cause de ses 2,5 milliards d’excédent commercial ? Ou des 3 millions de Turcs d’Allemagne, dont certains sont électeurs dans les deux pays, alors que, comme en France, en Belgique, aux Pays-Bas ou en Autriche, les politiciens locaux ont favorisé le contrôle de cette communauté par l’AKP d’Erdogan et son allié le MHP – émanation politique des Loups gris – en échange de services électoraux.

FP : L’UE sera-t-elle un jour capable de parler d’une seule voix ? N’est-ce pas un nouvel exemple que les intérêts stratégiques des différents pays de l’UE divergent inexorablement ? A cette aune, que dire du « couple » franco-allemand ?

OD : Quelle voix ? L’UE n’est pas et ne peut pas être une addition de volontés ; elle n’est et ne sera jamais qu’une soustraction d’objections. Ce mantra de nos « élites » – « on est plus forts à plusieurs » – est grotesque. Les États n’ont ni le même passé, ni les mêmes intérêts, ni la même vision du monde, ni les mêmes moyens d’action. Par quel miracle voudrait-on que cela fasse une volonté d’agir ?

Toute décision au sein de l’UE n’est jamais que le plus petit dénominateur commun entre 27 positions divergentes ; avec un plus petit dénominateur commun, on ne fait pas l’histoire, on regarde passer les trains !

Quant au couple franco-allemand, c’est une autre fantasmagorie des mêmes « élites » ! L’ancien directeur des Études et recherches de l’Institut Charles de Gaulle que je suis vous dira que sitôt que le Bundestag ratifia le traité de l’Élysée (1963) en y ajoutant un préambule unilatéral le vidant de tout contenu politique, tandis que la CDU congédiait le chancelier Adenauer, qui l’avait signé, au profit du francophobe Ehrard, le général de Gaulle n’a plus eu la moindre illusion sur une entente politique avec l’Allemagne ! Pour la suite, mon amie Coralie Delaume l’a parfaitement analysée dans son magistral Le Couple franco-allemand n’existe pas (Michalon, 2018).

Et à l’égard de la situation actuelle, je fais l’hypothèse que le président Macron a pensé que son éclatant génie suffirait à faire bouger une Allemagne dont la politique est conditionnée par le rapport pathologique à la monnaie qu’elle a hérité de l’histoire. Mais le sommet des marchands de tapis sur les conséquences économiques de la crise sanitaire l’a sans doute ulcéré. Car tout en affichant son soutien à Macron, Merkel n’a cessé de pousser ceux qui lui étaient opposés et a promu un compromis typiquement européen, c’est-à-dire insignifiant au regard des nécessités du moment et impraticable dans les faits parce que l’usine à gaz qui en résulte ne fonctionnera pas.

Aussi le soutien salutaire – et que je salue ! en espérant que des actes suivront les paroles – de Macron à la Grèce me semble-t-il en partie motivé (outre les intérêts de Total dans le gisement de gaz découvert entre Chypre, le Liban, Israël et l’Égypte, dont les prétentions turques menacent l’acheminement vers l’Europe occidentale) par le désir de prendre sa revanche sur cette humiliation que lui infligée la chancelière, en faisant usage du seul atout, avec le siège permanent au Conseil de sécurité, dont les « élites » françaises n’ont pas encore dépouillé la nation : la force armée. La force armée que l’Allemagne a sacrifiée à ses stupides dogmes budgétaires.

FP : Si l’on ajoute à ce climat les accusations d’islamophobie qu’Erdogan profère à l’encontre de la France en général et de Macron en particulier, sommes-nous face à un choc des civilisations aux portes de l’Europe ?

OD : Le projet d’Erdogan est la diffusion de l’islam radical par tous les moyens. Il a fait tirer dans le dos des Kurdes en lutte contre Daesh qu’il a soutenu en important et revendant son pétrole. Il a recyclé comme supplétifs de son armée les restes d’al Qaida et Daesh et dissémine ces terroristes de la Libye à l’Artsakh. Il finance la réislamisation sur un mode radical des minorités musulmanes des Balkans. Il envoie des prêcheurs radicaux en Autriche, aux Pays-Bas, en Allemagne, en Belgique, en France. Les consulats turcs en Europe occidentale organisent dès l’enfance l’endoctrinement des communautés émigrées dans la haine des valeurs occidentales. Aujourd’hui, des Turcs descendent dans les rues de France pour appeler au meurtre de nos concitoyens d’origine arménienne et achever le génocide de 1915… dont ils nient l’existence et vandalisent les mémoriaux. Comment voulez-vous appeler ça autrement ?

Nous devrions comprendre que les Arméniens, les Grecs, les Chypriotes victimes de cet islamo-impérialisme turc mènent un combat qui est le nôtre et qu’il est dans notre intérêt de les aider. Alors que l’UE continue à financer ce régime devenu l’un des plus dangereux du monde. Mais Erdogan n’a pas d’ennemi plus résolu que le maréchal Sissi qui a réuni les chefs d’État jordanien et irakien pour élaborer avec eux une position commune hostile à l’impérialisme turc ; Al Azhar, la plus grande autorité intellectuelle sunnite, a condamné la réislamisation de Sainte-Sophie ; et l’Égypte a signé avec la Grèce un accord sur leurs ZEE respectives déniant les exorbitantes prétentions turques. L’Arabie Saoudite est outrée par la prétention turque de prendre la tête du monde sunnite et on y boycotte les produits turcs. Les Émirats arabes unis ont envoyé des avions de chasse en Crète. Il est quand même paradoxal de constater que la Grèce et Chypre ont aujourd’hui bien davantage d’appuis de la part d’Israël, de l’Égypte et des Émirats que de la part de l’Union européenne !

FP : Dans ce contexte, quelle est encore la crédibilité d’une défense collective comme l’OTAN, quand un pays comme la Turquie en fait partie ?

OD : Si Macron a dit un jour une chose juste, c’est que l’OTAN est en état de mort cérébrale. Reste à en tirer les conséquences ! Même lorsqu’une frégate turque accompagnant un navire qui viole l’embargo de l’ONU sur les armes à destination de la Libye « illumine » la frégate française Courbet chargée de veiller au respect de cet embargo, l’OTAN apparaît aussi paralysée devant la Turquie que l’UE !

Pour autant, la relation turco-américaine, longtemps si étroite, ne cesse de se dégrader. La Turquie a été exclue du programme d’avions F-35 en raison de l’achat de systèmes d’armes russes, et les activités de la base OTAN d’Incirlik, autrefois essentielle au dispositif américain dans la région, continuent de se réduire, tandis que la présence américaine ne cesse de se renforcer sur la base de Souda en Crète ainsi que, au nord de la Grèce, à Alexandroupoli près de la frontière turque.

Les responsables américains se sont succédé à Athènes ces dernières semaines, affirmant l’excellence des relations gréco-américaines et le rôle essentiel de la Grèce pour la stabilité régionale. Les exercices militaires conjoints se multiplient et le Département d’État a plusieurs fois réaffirmé son soutien à la position de la Grèce comme la responsabilité de la Turquie dans les tensions actuelles. Des sénateurs influents, démocrates ou républicains, demandent désormais des sanctions contre la Turquie et l’on voit mal comment Washington pourrait être étranger à la chute de la livre turque.

Une victoire de Biden à la présidentielle changerait-elle quelque chose ? Un think tank proche des démocrates recommandait récemment de durcir significativement la position américaine à l’égard de la Turquie et d’évacuer au plus vite les armes nucléaires entreposées à Incirlik.

Source https://frontpopulaire.fr/o/Content/co294612/olivier-delorme-l-allemagne-est-l-allie-objectif-du-regime-islamo-imperiali?fbclid=IwAR2zPOLTs6Xy9XfjKs3f7qGOSeruO5P0y-1leLtwSW-RDphruDMmbIT5TZo

Réforme des retraites Une provocation pendant le confinement

URGENT. Le Sénat remet la réforme des retraites à l’ordre du jour par un amendement surprise

Ce samedi 14 novembre à 19h, le Sénat a imposé le retour à des concertations sur la réforme des retraites majoritairement rejetée par la population et par une mobilisation historique notamment des grévistes de la RATP et de la SNCF. C’est lors du vote sur le budget de la Sécurité sociale pour 2021 qu’un amendement surprise intégrant cette réforme des retraites a été voté par les sénateurs de droite, majoritaires au Sénat.

Crédits photos Laurence Cohen.

« Budget de la sécurité sociale : à 19h la majorité de droite du sénat fait rentrer par un amendement la réforme des retraites rejetée par les Français : report de l’âge de départ et allonger la durée des cotisations. Très choquant en pleine crise », explique Laurence Cohen sénatrice PCF.

Comme le relate Public Sénat, « le Sénat a décidé, en séance, de réactiver la conférence de financement sur l’équilibre et le financement des retraites, suspendue au printemps dernier, que le gouvernement souhaitait en parallèle de sa réforme sur un système universel. En cas d’échec de cette conférence des partenaires à formuler des propositions, le rapporteur LR pour la branche vieillesse, René-Paul Savary, a fait adopter par l’hémicycle ses propres remèdes. Tout en concédant que ses amendements n’avaient aucune chance de survivre à la navette parlementaire. »

Le site d’information officiel du Sénat ajoute : « Selon ses pistes, il s’agirait à la fois de repousser progressivement l’âge légal de départ à la retraite jusqu’à 63 ans en 2025. Mais aussi d’accélérer l’allongement de la durée de cotisations pour atteindre 43 annuités dès la génération 1965. »

L’amendement a été voté par les seuls groupes LR et Union centriste (200 voix pour) selon Public Sénat. « Les groupes de gauche et les sénateurs LREM ont voté contre (118 voix) », tandis que le groupe écologiste n’a pas pris part au vote.

Nous relayons ci-dessous le post de Nantes Révoltés qui récapitule les évènements.

🔨LA RÉFORME DES RETRAITES IMPOSÉE PAR SURPRISE AU SÉNAT

- Les casseurs sont au pouvoir-

Lors du vote sur le budget de la sécurité sociale pour 2021, ce samedi 14 novembre à 19H, les sénateurs droite, majoritaires au sénat et estimant que Macron ne va pas assez vite, ont fait rentrer par un amendement de dernière minute la réforme des retraites massivement rejetée par les Français :

➡️ Report de l’âge de départ à 63 ans
➡️ Allongement de la durée des cotisations à 43 annuités
➡️ Attaque contre les régimes protecteurs
➡️ Etc …

Une véritable provocation en plein confinement, alors que la liberté de contester est drastiquement réduite, et que la crise sanitaire engendre une crise sociale catastrophique. Une provocation également, car cette réforme avait mis des millions de personnes dans les rues, suscité des mois de grève, et était contestée par l’immense majorité de la population. C’est une accélération : après ce coup de force, il ne reste plus qu’un vote à l’Assemblée avec la majorité En Marche/Le Républicains pour faire passer définitivement la casse des retraites.

Source https://www.revolutionpermanente.fr/URGENT-Le-Senat-remet-la-reforme-des-retraites-a-l-ordre-du-jour-par-un-amendement-surprise

 


Accord de libre-échange : grâce à la mobilisation, une première victoire

par Maxime Combes

Jamais un accord de libéralisation du commerce n’a été aussi contesté. Le 9 novembre, sous la pression de l’opinion publique, les ministres des 27 États-membres n’ont pas pu avaliser le projet entre l’Union européenne et les pays du Mercosur (Brésil, Argentine, Uruguay et Paraguay). Une première victoire qui peut en amener d’autres, selon Maxime Combes, chroniqueur de Basta !.

Le lundi 9 novembre aurait dû marquer l’ouverture du processus de ratification de l’accord de libéralisation entre l’Union européenne et les pays du Mercosur (Brésil, Argentine, Uruguay et Paraguay). Cela n’a pas été le cas. La mobilisation citoyenne et le rejet toujours plus massif de ces accords visant à approfondir la mondialisation néolibérale et productiviste ont empêché dans l’immédiat la Commission européenne et les lobbys économiques européens de parvenir à leurs fins. C’est une victoire, certes partielle et non définitive, comme il y en a peu.

Opacité des négociations

Rembobinons le film. Cela fait 20 ans que les négociations pour un accord d’association entre l’UE et le Mercosur sont sur les rails. En 1999, date où la Commission européenne obtient des États-membres de l’UE mandat de négocier, près de 70 % du commerce mondial était l’apanage des États-Unis, de l’UE, du Japon et du Canada. La Chine, le Brésil ou l’Inde n’étaient pas encore des puissances mondiales. La crise climatique, l’effondrement de la biodiversité ou l’aggravation des inégalités mondiales passaient sous le radar médiatique d’une période où les élites nous promettaient une « mondialisation heureuse » (selon le titre du livre d’Alain Minc publié en 1997).

Interrompues à de multiples reprises, ces négociations ont été marquées d’une grande opacité. Il a fallu attendre que ce soit la société civile qui rende public en 2019 le mandat de négociation avec lequel la Commission négocie. Il ignore allègrement le défi climatique et fleure bon les réflexes néolibéraux pavloviens des années 1990. Quant à l’étude d’impact commandée par la Commission, de médiocre qualité, elle n’a été rendue publique qu’une fois les négociations finalisées alors qu’elle est supposée éclairer le débat public et les négociateurs.

« Jamais un accord de libéralisation du commerce n’a été aussi contesté »

C’est en juin 2019 que la Commission a annoncé que l’essentiel du contenu de l’accord était finalisé. La quasi-totalité des gouvernements européens ont alors salué un « bon accord commercial, bon pour nos entreprises et nos emplois », selon les mots d’Emmanuel Macron [1]. L’histoire semblait alors écrite : écologistes et altermondialistes allaient critiquer l’accord, mais la Commission et les États-membres tiendraient bon et l’accord serait ratifié rapidement, créant un vaste marché entre deux blocs régionaux qui représentent un quart du PIB mondial et près de 775 millions d’habitants.

Mais rien ne s’est passé comme prévu. Jamais un accord de libéralisation du commerce n’a été aussi contesté : selon un sondage publié le 10 septembre 2020, et réalisé dans quatre pays européens (France, Allemagne, Pays-Bas et Espagne), près de 80 % des personnes interrogées souhaitent que cet accord soit abandonné [2]. Depuis juin 2019, on ne compte plus les chefs d’État européens et membres de gouvernements, Emmanuel Macron en tête, obligés de prendre leurs distances.

Une majorité de citoyens aspire à des formes de relocalisation des activités économiques et d’autonomie alimentaire

Vendre des voitures pour importer plus de viande ne fait plus recette . Déstabilisation des marchés agricoles, destruction d’emplois dans les secteurs industriels, aggravation des dérèglements climatiques et pollution aux pesticides, droits humains sacrifiés, multinationales s’arrogeant de nouveaux marchés au détriment des entreprises locales, les critiques documentées ne manquent pas [3]. Elles ont rendu cet accord toxique et anachronique.

La multiplication des violations des droits humains et des feux de forêts depuis l’élection de Jair Bolsonaro au Brésil et la pandémie de Covid-19 ont aussi contribué à amplifier cette lame de fond. L’opinion publique semble avoir massivement basculé sur tous ces sujets : il y a désormais 8 à 9 sondés sur 10 qui aspirent à des formes de relocalisation des activités économiques et d’autonomie alimentaire pour ne plus dépendre des marchés mondiaux.

La Commission européenne avait pourtant bon espoir de passer outre. Le 6 juillet dernier, elle indiquait avoir « terminé le nettoyage juridique » du texte et entamé sa traduction afin que la phase de ratification puisse débuter à l’automne. L’Allemagne avait d’ailleurs fait de la ratification de cet accord une priorité de la présidence de l’UE qu’elle exerce pour six mois depuis le 1er juillet.

Mais lors du Conseil de l’UE des ministres des Affaires étrangères consacré aux affaires commerciales de ce lundi 9 novembre, les ministres des 27 États-membres ne vont pas pouvoir avaliser ce projet d’accord et le transmettre pour ratification au Parlement européen. Celui-ci vient d’ailleurs de voter contre « sa ratification en l’état », un vote indicatif qui s’ajoute à ceux de plusieurs Parlements nationaux (Autriche, Pays-Bas, Irlande, Wallonie).

Engager les collectivités territoriales dans la bataille

Ne nous y trompons pas : que les États-membres de l’UE ne puissent avaliser 20 ans de négociations menées par la Commission est une victoire. Les arguments du mouvement altermondialiste et pour la justice climatique ont marqué les esprits : l’heure n’est plus celle d’une mondialisation qui fait de l’intérêt des multinationales un objectif supérieur à la protection de la planète, aux droits sociaux et aux droits des populations.

Certes, la Commission européenne et les ministres du Commerce des États-membres de l’UE, qui ne veulent pas « jeter à la poubelle 10 ans de travail », s’activent pour sauver ce projet d’accord : vont-ils chercher à le compléter d’un protocole additionnel ou d’une déclaration interprétative, comme ce fut le cas pour le CETA sans que cela ne change la nature de l’accord ? Sans doute. Mais de telles difficultés illustrent les contradictions dans lesquelles ils sont en train de se débattre.

Il est donc de notre responsabilité collective de ne rien lâcher et d’appuyer les initiatives en cours pour interpeller Emmanuel Macron et le gouvernement [4] et pour engager les collectivités territoriales dans la bataille en leur proposant de voter une résolution disant : « Non à l’accord UE-Mercosur – Oui à la Relocalisation écologique et solidaire » [5]. Pour que cette première victoire en amène d’autres.

Maxime Combes, économiste, en charge des enjeux commerce/relocalisation à l’Aitec, et porte-parole d’Attac

- Cette chronique a initialement été publiée dans Politis, la semaine du 2 novembre 2020, et actualisée par la rédaction de Basta !, en accord avec son auteur.

Photo : CC Rock Cohen

Source https://www.bastamag.net/Accord-libre-echange-liberalisation-commerce-UE-Mercosur-mobilisation-citoyenne-premiere-victoire-relocalisation

65 organisations contre la « sécurité globale »

Nous signons aux côtés de 54 organisations la lettre ci-dessous pour nous opposer à la loi de sécurité globale. Si vous êtes une association partageant notre combat, écrivez-nous à contact@laquadrature.net pour signer la lettre (mettez « signature lettre sg » en objet). Si vous êtes un particulier, appelez les députés pour leur demander de rejeter ces dispositions.

Source https://www.laquadrature.net/2020/11/12/55-organisations-contre-la-securite-globale/

Contre la loi « sécurité globale », défendons la liberté de manifester

Nous nous opposons à la proposition de loi « sécurité globale ». Parmi les nombreuses propositions dangereuses de ce texte, trois articles risquent de limiter la liberté de manifester dans des proportions injustifiables, liberté déjà fortement restreinte sur le terrain et de nouveau remise en cause par le Schéma national du maintien de l’ordre.

L’article 21 concerne les caméras portables qui, selon les rapporteurs du texte, devraient équiper « toutes les patrouilles de police et de gendarmerie […] dès juillet 2021 ». S’il est voté, le texte autorisera donc la transmission des flux vidéo au centre de commandement en temps réel. Cela permettra l’analyse automatisée des images, et notamment la reconnaissance faciale des manifestants et des passants, en lien avec les 8 millions de visages déjà enregistrés par la police dans ses divers fichiers.

Ces nouveaux pouvoirs ne sont justifiés par aucun argument sérieux en matière de protection de la population et ne s’inscrivent aucunement dans une doctrine de gestion pacifiée des foules. L’effet principal sera de faciliter de façon considérable des pratiques constatées depuis plusieurs années en manifestation, visant à harceler des opposants politiques notamment par des placements en « garde à vue préventive », par l’interdiction de rejoindre le cortège ou par des interpellations arbitraires non suivies de poursuites. Ces pratiques illicites seront d’autant plus facilement généralisées que l’identification des militants et des militantes sera automatisée.

L’article 22 autoriserait la surveillance par drones qui, selon le Conseil d’État, est actuellement interdite. Ici encore, la police n’a produit aucun argument démontrant qu’une telle surveillance protégerait la population. Au contraire, nous avons pu constater en manifestation que les drones sont avant tout utilisés pour diriger des stratégies violentes contraires à la liberté de manifester : nassage, gaz et grenades lacrymogènes notamment. Comme pour les caméras mobiles, la reconnaissance faciale permettra ici aussi d’identifier des militantes et militants politiques.

En clair, le déploiement massif des caméras mobiles et des drones, couplés aux caméras fixes déjà existantes, entraînerait une capacité de surveillance généralisée de l’espace public, ne laissant plus aucune place à l’anonymat essentiel au respect du droit à la vie privée et ne pouvant avoir qu’un effet coercitif sur la liberté d’expression et de manifestation.

L’article 24 vise à empêcher la population et les journalistes de diffuser des images du visage ou de tout autre élément d’identification de fonctionnaire de police ou militaire de gendarmerie. Autrement dit, les images des violences commises par les forces de l’ordre ne pourront dés lors plus être diffusées. Le seul effet d’une telle disposition sera d’accroître le sentiment d’impunité des policiers violents et, ainsi, de multiplier les violences commises illégalement contre les manifestantes et manifestants.

Nous appelons les parlementaires à s’opposer à ces trois dispositions qui réduisent la liberté fondamentale de manifester dans le seul but de faire taire la population et de mieux la surveiller.

Signataires

Cachez ces violences policières que je ne saurais voir  : protégeons la liberté d’informer !

« Cachez ces violences policières que je ne saurais voir » : protégeons la liberté d’informer !

C’est une atteinte inédite à la liberté d’informer. L’article 24 de la proposition de loi « relative à la sécurité globale », sanctionne d’un an de prison et de 45 000 euros d’amende la diffusion d’images relative aux pratiques policières. La rédaction de Basta !, aux côtés d’autres médias, actuels et futurs journalistes, organisations et personnalités, s’opposent à cette loi liberticide. « Il en va de la liberté de la presse, de la liberté de manifester, de notre démocratie », rappelons-nous dans cette tribune.

« J’avais fait une promesse, qui était celle de ne plus pouvoir diffuser les images des policiers et des gendarmes sur les réseaux sociaux. Cette promesse sera tenue puisque la loi prévoira l’interdiction de la diffusion de ces images », résume Gérald Darmanin, ministre de l’Intérieur, lorsque Jean-Jacques Bourdin l’interroge sur la proposition de loi (PPL) « Sécurité Globale ».

Ce texte, les député·e·s LREM sont pressé·e·s de le faire passer, sans doute craignent-ils une levée de boucliers légitime pour défendre la démocratie. Sinon comment pourrait-on expliquer que cette loi fasse l’objet d’une procédure accélérée ? Quelle urgence, en plein confinement, justifie cette attaque liberticide ?

Déjà, en février dernier, Mediapart révélait que Christophe Castaner, à l’époque encore ministre de l’Intérieur, envisageait de « contrôler la diffusion de vidéos montrant les violences policières », reprenant ainsi les revendications des syndicats de police les plus liberticides. L’information avait déjà fait à l’époque bondir les défenseur·se·s des libertés publiques. Le ministre de l’Intérieur avait alors nié étudier une telle loi, affirmation pourtant démentie quelques heures après par ses propres services.

« Il en va de la liberté de la presse et, plus largement, du droit d’informer et d’être informé·e »

Quelques semaines après, en mai, c’était au tour des député·e·s LR, Éric Ciotti en tête, de ressortir cette idée du placard. Sans succès.

Cette fois-ci, le texte pourrait bien être adopté. Derrière cette nouvelle attaque contre les libertés fondamentales, les député·e·s LREM, dont Christophe Castaner et Jean-Michel Fauvergue, deux ténors de la majorité présidentielle. Le gouvernement est clair, la proposition liberticide.

L’article 24 prévoit en effet « un an d’emprisonnement et une amende de 45 000 euros » pour sanctionner la « diffusion du visage ou tout autre élément d’identification d’un fonctionnaire de police dans le but qu’il soit porté atteinte à son intégrité physique ou psychique ».

Nous, journalistes en devenir, professionnel·le·s de l’information, syndicats de journalistes représentatifs de la profession, associations de défense des droits humains, avocat·e·s et usagers des médias, tenons à alerter l’opinion publique sur de telles menaces. Il en va de la liberté de la presse et, plus largement, du droit d’informer et d’être informé·e.

« Cette nouvelle disposition ne pourra que rendre l’opposition de la police encore plus systématique, plus violente »

En effet, un flou persiste sur cette notion d’ « intention » de « nuire à l’intégrité physique et psychique ». Cette partie de la loi vise sans doute à tenter de rassurer, mais nous sommes nombreux à ne pas être dupes.

Toutes les personnes qui ont déjà filmé les forces de l’ordre le savent : ces dernières s’opposent régulièrement, souvent violemment, à la captation de leur image. Agressions, intimidations, garde à vue, destruction du matériel : les exemples ne manquent pas, les victimes nombreuses.
Pourtant, à ce jour, aucune loi particulière ne donne raison à de tels agissements : les forces de police et de gendarmerie n’ont pas de droit à l’image particulier lors des manifestations. Mais ne soyons pas naïfs, cette nouvelle disposition ne pourra que rendre l’opposition de la police encore plus systématique, plus violente, peu importe le sens souhaité par le législateur.

Les dérives possibles avec un tel arsenal juridique sont inquiétantes. On connaît la puissance d’instrumentalisation et de lobbying des syndicats de police. Si cette loi passe, qui peut affirmer que ces derniers n’exigeront pas des réseaux sociaux, la censure de toutes images d’abus policiers ? Un tel scénario est d’autant plus à craindre que la loi française rend ces plateformes responsables des images « manifestement illicites » qu’elles ne censureraient pas après signalement.
Nous le savons tous : Facebook , Youtube et Twitter n’iront pas jusqu’au procès, ils préfèreront supprimer toutes images désignées comme potentiellement sensibles. Vidéos de violences policières comprises, bien évidemment.

« Les violences policières existent, nos images les attestent, les rendent réelles aux yeux de l’opinion »

Or, sans ces vidéos, la réalité des abus policiers resterait trop souvent invisibilisée, niée dans son existence même. Trop souvent, elle l’a été dans les quartiers populaires d’abord, puis dans les cortèges ou dans les différents lieux d’expression politique.
Ce sont nous, journalistes de terrain, associations de défense des droits et observateur·rice·s régulier·e·s de la police, qui les documentons et participons à les visibiliser, via nos enregistrements, diffusés sur les réseaux sociaux et les médias traditionnels.

Les violences policières existent, nos images les attestent, les rendent réelles aux yeux de l’opinion. Ce alors même que les autorités françaises nient leur existence et persistent, une nouvelle fois, à vouloir les invisibiliser.

C’est ce contre-pouvoir, nécessaire en démocratie, que le gouvernement et sa majorité parlementaire souhaitent enlever aux citoyen·ne·s, aux journalistes encore soucieux de dénoncer ce qui ne va pas dans nos sociétés. La police doit agir sous la surveillance des citoyen·ne·s. Même devant les smartphones ou les caméras, si le public le juge nécessaire pour notre démocratie.

Sans ces vidéos, qui aurait entendu parler de Cédric Chouviat ou d’Alexandre Benalla ?

Sans ces outils, sans celles et ceux qui les braquent, combien de violences policières auraient été passées sous silence ?
Bien souvent ces vidéos, qu’elles soient le fait de journalistes, de citoyen·ne·s ou directement des victimes des abus policiers, peuvent aussi constituer des éléments de preuve pour la justice, comme pour la mort de Cédric Chouviat ou d’Aboubakar Fofana.

Avec cette loi, et sans ces vidéos, qui aurait entendu parler de Geneviève Legay, militante pacifiste de 73 ans, gravement blessée à la tête dans une charge policière d’une violence inouïe ? Qui aurait entendu parler d’Alexandre Benalla si notre confrère Taha Bouhafs n’avait pas diffusé son visage sur les réseaux sociaux ?

Aujourd’hui, la priorité du gouvernement n’est pas de résoudre le problème du lien entre la police et le citoyen, mais de s’attaquer à la diffusion du message, en condamnant journaliste, manifestant.e ou habitant.e des quartiers populaires. Leur politique ? « Cachez ces violences policières que je ne saurais voir ».

« Le pouvoir souhaite rendre toujours plus difficile l’accès à une information indépendante donc dérangeante, sur le travail de la police »

Ne nous leurrons pas, ce projet de loi s’inscrit dans un contexte pré-électoral où la majorité présidentielle court après les quelques voix sensibles aux arguments sécuritaires. En accédant aux demandes de certains syndicats de police, le pouvoir souhaite rendre toujours plus difficile l’accès à une information indépendante donc dérangeante, sur le travail de la police.
Mais, devons-nous rappeler que la force publique, au service de tous, doit être observable en tout temps, par toutes et tous ?
Dans un État démocratique respectueux du droit international et de la liberté d’informer, ce serait inutile.

Inutile de rappeler au pouvoir, la nécessité de maintenir coûte que coûte ce droit comme le répètent l’Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe, le rapporteur spécial des Nations unies sur la liberté de réunion et d’association ou encore la Fédération européenne des journalistes (FEJ) et le Centre européen pour la liberté de la presse et des médias (ECPMF), dans le code la liberté de la presse pour la police.

Alors que les manifestations et leurs observateur·trice·s sont de plus en plus réprimé·e·s, nous nous inquiétons de voir le gouvernement céder à ce point aux sirènes liberticides lorsque celui-ci aurait dû se tenir au chevet des 2000 manifestant·e·s blessé·e·s en 2019.
Notons également que plus de 200 journalistes ont été empêché·e·s de travailler, blessé·e·s ou mis en garde à vue, depuis novembre 2018, lors d’opérations de maintien de l’ordre en France.

Filmer les agissements et les comportements des agents des forces de l’ordre, dans leur action, doit rester un droit !
Il en va de la liberté de la presse, de la liberté de manifester, de notre démocratie.

(Pour suivre le nombre de signataires cliquez ici, puis sur l’onglet « résultats publics ».)

Liste des signataires :

Organisations : Syndicat national des journalistes (SNJ) ; SNJ-CGT, syndicat national de journalistes de la CGT ; ACRIMED, association de critique des médias ; Ligue des droits de l’Homme ; Malik Salemkour, président de la LDH ; Pierre-Antoine Cazau, Observateur, président de la section de Bordeaux LDH ; Attac France ; Raphaël Pradeau, Aurélie Trouvé et Maxime Combes, portes-parole d’Attac France ; Peuple Révolté, Collectif de Convergence des Luttes ; Fondation Copernic

Les personnalités universitaires et en dehors du journalisme : Larrere Mathilde, historienne ; De Cock Laurence, historienne et enseignante ; Ludivine Bantigny, historienne ; Sebastian Roché, directeur de recherche au CNRS ; Silyane Larcher, chercheure au CNRS, Lévrier Alexis, MCF, historien de la presse ; Gilles J. Guglielmi, Professeur de droit public ; Pouget Grégoire, président de l’association Nothing2Hide ; Vergiat Marie-Christine, ancienne Eurodéputée ; Elliot Lepers, le Mouvement ; Smidt Chloe, observatrice des droits de l’homme ; Jérôme Graefe, juriste, observateur de l’Observatoire parisien des libertés publiques ; Avert Erik, universitaire ; Rain Simono, juriste

Rédactions et collectifs de photographes/journalistes : Collectif REC, Reporters en Colère ; Kelaouiñ, collectif de journalistes pour la liberté d’informer en Bretagne ; Collectif Presse-Papiers ; Société Des Journalistes de LeMédia TV ; La rédaction de Reporterre, La rédaction du journal Fakir ; La rédaction de Radio Parleur, le son de toutes les luttes ; La rédaction de La Meute , un média pour photographier le social ; La rédaction de Bastamag, média indépendant ; La rédaction de la Relève et la Peste ; Rapports de force ; Rue89Lyon ; Polka Magazine ; Collectif OEIL ; Tendance Floue, collectif de photographes ; Collectif Prism ; Primitivi, télévision de rue ; La Mule du Pape, média indépendant ; Collectif Gerda

Signature journalistes : Taha Bouhafs, journaliste à Là-bas si j’y suis ; Valentin Gendrot, auteur de “Flic” ; Soudais Michel, Rédacteur en chef adjoint de Politis ; Debove Laurie, rédactrice en chef de La Relève et la Peste ; Mathieu Molard, rédacteur en chef de StreetPress.com ; Inès Belgacem, red-cheffe adjointe à StreetPress ; Rousseaux Agnès et Sophie Chapelle, journalistes à Basta ! ; Nicolas Mayart, journaliste au MédiaTV ; Jérémy Paoloni, photographe ; Maxime Reynié, journaliste, créateur de maintiendelordre.fr ; Ulysse Logéat, Photo-Reporter à Taranis News ; Wilfrid Estève, photographe et directeur de l’Agence Hans Lucas ; Alain Genestar, journaliste et directeur de publication de Polka Magazine ; Bruno Barbey, Photographe Magnum Photos ; Sebastião Salgado ; Olivier Culmann, photographe ; Louis Witter, photojournaliste ; Yann Levy, photojournaliste ; Stéphane Trouille, reporter vidéaste ; Martin Bodrero, journaliste co-fondateur de Radio Parleur ; Walid Salem, journaliste et directeur de publication Rue89 Bordeaux ; Alexis Kraland, journaliste ; Gaël Cérez, rédacteur en chef de Mediacités Toulouse ; Nnoman Cadoret, photoreporter – collectif OEIL ; Julien Pitinome, photo reporter – collectif OEIL ; Théo Giacometti, photojournaliste ; Hascoët Julie, photographe membre de l’agence Myop ; Lamoulère Yohanne, photographe ; Michele Gurrieri, directeur de la photographie ; Baya Bellanger, journaliste et réalisatrice de documentaire ; Jean-Marie Leforestier, journaliste à Marsactu

ValK, photographe ; Tixador Léo, graphiste à Le Média TV et journaliste ; Tulyppe, photo-journaliste ; Patrice Nice journaliste et photographe indépendant ; Fastre Sandra, photographe ; Estelle Ruiz, Studio Hans Lucas ; Sylvain Ernault, journaliste ; Blot Tiphaine, JRI ; Amanda Jacquel, journaliste indépendante ; Pauline Achard, journaliste à Liberation ; Toufik-de-Planoise, correspond local de presse Factuel.info – Radio BIP/Média 25 ; HARDOY, Matthias, journaliste ; Jeanne GOBIN, photojournaliste ; Ptak Guillaume, journaliste ; Théophile Pouillot-Chévara, Photojournaliste ; Alexandra Lassiaille, journaliste ; Baptiste Soubra, Photographe ; Lyafori Imane, Journaliste ; Léo Lefrançois, journaliste ; Daphné Deschamps, journaliste ; Thomas Clerget, journaliste ; Romain Boyer, photographe indépendant ; Lily Blue, photographe indépendante ; Eloise BAJOU, journaliste/photojournaliste ; Bastien Lion, journaliste ; Gaspard Flamand, journaliste ; Gazzoti Julie, photoreporter indépendante ; Marine Regini, journaliste ; Camille Estève, journaliste ; Clémentine Semeria, iconographe ; Ljubisa Danilović, photographe ; Thomas Baron, Photographe indépendant ; Maëlle Benisty, journaliste ; Julien Lormier photographe ; Christian Badger, photographe ; Thomas Hakenholz, vidéaste ; Cauhepe Pauline, Journaliste indépendante et photographe ; Escrihuela Méline, journaliste ; Anne Paq, photographe ; Louisa Benchabane, journaliste ; Clémentine Bonnet, photographe ; Kevin Piotrowski, journaliste ; Gabriel Pacheco, Photo-Reporter ; Mollé Nicolas, journaliste ; Auriane Duroch-Barrier, journaliste ; Philippe Borrel, auteur et réalisateur de films documentaires ; Lily Jaillard, journaliste ; Matthieu Chassain, pigiste ; Raphaël Kessler, photographe ; Stéphane Lavoisard, journaliste ; Pierre Salard, journaliste ; Liponne Nicolas, Photojournaliste ; Coissac Noémie photographe ; Crouzillat Hélène, réalisatrice ; Antoine de Raigniac, photojournaliste ; Maxime Buchot, journaliste ; Simon Abraham, journaliste ; Antoine Medeiros, journaliste ; Jean-Francois Fort, photographe ; Padovani Ugo, photographe ; Raillard Quentin, journaliste ; Justine Canonne, journaliste ; Antoine Atthalin, Resp. Communication Radio Parleur ; Tanguy H., journaliste ; Souteyrat Mathias, journaliste ; Vincent Kelner, journaliste ; Jean Saint-Marc, journaliste ; Gonon-Guillermas Georges, photographe ; Margaux Dzuilka, journaliste ; Etienne Cornec, journaliste ; Roche Mathilde, journaliste ; Fares El Fersan, photographe ; Rahmil David-Julien, journaliste ; Allag-Morris Safia journaliste ; Fares Lydia, photojournaliste ; Louis Claveau – JRI ; Laura poli, journaliste ; Marine Vlahovic, journaliste ; Bonhoure Matthieu, journaliste ; Maud Charlet, journaliste ; Emmanuel Davila, journaliste ; Dominique Faye, journaliste honoraire ; Aït Ouariane Maria, journaliste ; Coline Charbonnier journaliste ; Barriaux Céline, enseignante ; Hervé Bossy, photographe ; Pierre Isnard-Dupuy, journaliste ; Anne-Claire Veluire ; David Hury, journaliste et photographe ; Iliès Hagoug, journaliste ; Hélène Servel, journaliste indépendante ; Béatrice Turpin, JRI et réalisatrice de documentaires ; Hubinet Nina, journaliste ; Campitelli Nicolas, journaliste ; Sophie Eyegue, journaliste alternante ; Leïla Beratto, journaliste ; Thierry Noël-Guitelman, journaliste honoraire ; Benoît GILLES, journaliste ; Juliette Vincent Seignet, journaliste ; Clara Monnoyeur, journaliste ; Hélène Bourgon, journaliste ; Sandrine Lana journaliste ; Charlotte Machado, journaliste ;Christophe Noisette journaliste ; Minault Eve, réalisatrice de documentaires ; Julien Vinzent, journaliste ; Juliette Cabaço Roger, journaliste ; Gwenvael Delanoe, journaliste ; Zinzius Quentin, journaliste ; Carayol Rémi journaliste indépendant ; Nolwenn Weiler, journaliste ; Laura Diab, journaliste ; Alexis Montmasson, journaliste ; Romain Bouvet,journaliste ; Alexis Montmasson, journaliste ; Thomas Gropallo, journaliste ; Philippine Kauffmann, journaliste ; Simon Becquet, journaliste ; Valentin Monnier, journaliste ; Hadrien Degay Delpeuch, Graphiste & Musicien ; Chloé Dubois, journaliste indépendante (Collectif FOCUS) ; Matthieu Lacroix, photojournaliste ; William Zarour, directeur de production ; Pierre France, journaliste ; Slick Marie-Claude journaliste ; Lio Viry, journaliste ; Bourboulon Isabelle ; Larminach Guylaine – Auteur ; Hippolyte Radisson, journaliste ; Michel Desbordes, journaliste ;

Etudiant.e.s en journalisme : Quentin Saison, photographe pour Hans Lucas ; Juliette Moinet-Marillaud, photographe ; Laurent Agbezouhlon ; Kilian Le Bouquin ; Théo Borne ; Lisa Noyal, ; Christophe Hosebian-Vartanian ; Alice Labro-Terrier ; Martin Esposito, journaliste vidéo ; Quentin Danjou ; Alexandre Keirle ; Agathe Marty ; Romane Parrado ; Multeau Zoé ; Emma Saulzet ; Chloé Lavoisard ; Alicia Feras ; Juliette Thoman ; Chazal Marion ; Elisa Zanetta ; Benjamin Watelle ; Em Rivet ; Fanny G ; Éléonore Pointeau ; Durieu, An Nam, ; Rose-Amélie Bécel ; Morgan Prot ; Julia Pellegrini ; Joël Miranda ; Pechkechian Laure ; Delcourt Maïa ; Maio Valentin ; Emma Challat ; Lou Momège ; Lauryne Guignard ; Pauline Roussel ; Rémy Adrian ; Larcade Flavien ; Loek Aurélie ; Marjolaine Roget ; Maxime Dubernet ; Bouraoui Alice ; Bensana Jean ; Emilie Jullien ; Dounia Mahieddine ; Surmaire Léa ; Solène Guili ; Klervie Vappreau ; Léo Roussel ; Aouregan Texier ; Armand Patou ; Myriam Aloegninou ; Guiomard Morgane ; Thomas Imbert ; Tom Bertin ; Trihan Lucile ; Rania Gabel ; Inès Khiari ; Maëllyss Hedin, ; Gilles Bénédicte ; Marthe Dolphin ; Lerond-Dupuy Juliette ; Marine Ledoux ; BERGE-CIA Pierre ; Quentin Bral ; Lucile chaussoy ; Justine Brichard ; Corentin Alloune ; Julie Malfoy ; Chrystal Delfosse ; Julien Errard ; Pauline Gardet ; Emilien Roy ; Essindi Ivan ; Bastien David ; Pieragnoli Héloïse ; Eva Massy ; Nolwenn Autret ; Leslie Larcher ; Kron Pierre ; Tanguy Roman Clavelloux ; Angèle Delbecq ; Eléa Morel ; Isma Le Dantec ; Héloïse Bauchet ; NOURY Mara ; Amel Zakian Gow ; Germain Baslé ; Léa Dandois ; Lena Gomez ; Chloé Cenard ; James-Nicolas de Sade ; Marguerite De Lasa ; Juliette Bourgault ; Mélodie Taberlet ; Cousin Victor ; Jules Pilorge ; Leproux Tiphaine ; Tovmassian Mariam ; Lucile Perrone ; Louis Haeri ; Colin Ancel ; Jeanne Spicarolen ; Papeghin Marie-Stella ; Charles Fandre ; Inès Sabatier ; Selli, Manon ; Camille Bluteau ; Bertille Dreuillet ; Solène Gardré ; Alizée Chebboub ; Hillairet Sashah ; Lolla Sauty ; Valentin Garnier ; Mathieu Barrere ; Alice Bouviala ; Nina Droff ; Nicolas Portnoi ; Léopold Picot ; Mehdi Laghrari ; Léo Da Veiga ; Juliette Coulais ; Elio Bono ; Le Coz Yohann ; Gueuti Célia ; Mathis Boronat ; Baudé Maël ; Sort Marius ; Saligot Guillaume ; Germain Michelet ; Emeriau Colyne ; Merlin Lambert ; Laudet Esther ; Myriam Renaud ; Fabien Briand ; Célia Consolini ; Sarah Ziai ; Charlotte Joyeux ; Lison Bourgeois ; Sionneau Efflam ; Valentin Stoquer ; Valentin Machard ; François Boyer ; El-Hassan Moulay ; Violette Vauloup ; Marie Gasnier ; Kevin Helies ; Wassila ; Marine Veillé ; Koupaïa Rault ; Moal Morgane ; THEO Bessard ; Anna Bonnemasou Carrere ; Ophélie Boussadoun ; Marine Salaville ; Floriane Padoan ; Romane Rosset ; Pénélope Navarro ; Anastasia Nicolas ; Jeanne Le Bihan ; Laura Le Strat ; Maxime Asseo ; Raphaël Lardeur ; Thibault Lacoux ; ; Théo Putavy ; Pauline Senet ; Philippine Thibaudault ; Timéo Guillon ; Eléa Tymen ; Margaux Harivel ; Juliette Brossault ; Émilie Tollet ; Oriane Cuenoud ; Alexis Souhard ; Stéphane Duprat ; Aziliz Peaudecerf ; Aurore Thibault, photographe

Une courte vidéo de Ivan du Roy, journaliste et cofondateur de Basta ! :

Photo de une : Si les dispositions prévues par la #PPLSecuriteGlobale venaient à être votées, cette photo de Serge D’Ignazio, prise le 1er mai 2019 à Paris, n’existera plus. © Serge D’Ignazio/Basta !

Source https://www.bastamag.net/tribune-cachez-ces-violences-policieres-protegeons-liberte-presse-loi-PPL-securite-globale-fauvergue-repression-diffusion-images

Le père de l’enfant mort en mer arrêté pour « mise en danger de la vie d’autrui »

Les autorités grecques ont arrêté le père de l’enfant mort lors de la traversée de la mer Égée sur une embarcation de fortune. Cet Afghan de 25 ans est accusé de « mise en danger de la vie d’autrui » et risque jusqu’à 10 ans de prison.

Un Afghan de 25 ans, père de l’enfant de six ans dont le corps a été retrouvé dimanche en mer Égée, a été arrêté par les autorités grecques. Le père et son fils avaient embarqué sur une embarcation de fortune, composée de 23 autres personnes, depuis les côtes turques dans le but de rejoindre les îles grecques.

Il risque jusqu’à 10 ans de prison. C’est à notre connaissance la première fois que le parent d’un enfant mort lors d’une traversée de la mer est inculpé. Cette arrestation, inédite, inquiètent les ONG.

« Attaque directe contre le droit de demander l’asile »

« Cette accusation est une attaque directe contre le droit de demander l’asile. Il est scandaleux qu’un père en deuil soit puni pour avoir cherché la sécurité pour lui et son enfant », a réagi à l’AFP Josie Naughton, fondatrice de l’organisation humanitaire Help Refugees / Choose love.

>> À (re)lire : La Grèce renforce sa frontière terrestre avec la Turquie

« La criminalisation des personnes qui recherchent une protection montre l’échec de l’Union européenne à trouver une solution aux routes migratoires dangereuses », a ajouté la militante.

Le Conseil européen pour les réfugiés et exilés a pour sa part estimé que « cette nouvelle tragédie montre la nécessité urgente de trouver des voies sûres et légales » permettant aux demandeurs d’asile de rejoindre l’Europe en toute sécurité.

Un autre passager arrêté pour trafic de migrants

Selon les autorités, le corps du petit garçon a été découvert sur une partie de la côte difficile d’accès, avec une femme rescapée à ses côtés.

Les raisons de ce naufrage sont pour l’heure encore floues, ont affirmé les garde-côtes grecs, tout comme les circonstances ayant entraînées la mort de l’enfant de six ans.

>> À (re)lire : Vidéo-témoignage : « Les garde-côtes grecs ont repoussé notre bateau vers la Turquie »

Les passagers de ce canot avaient dans un premier temps été portés disparus. Une partie d’entre eux ont été retrouvés dimanche sur les rives de l’île de Samos, Dix personnes ont été secourues non loin de l’île grecque et six autres ont réussi à rejoindre les côtes à la nage.

Un jeune de 23 ans, identifié comme le capitaine du bateau, a quant à lui été arrêté pour trafic de migrants.

Source https://www.infomigrants.net/fr/post/28411/grece-le-pere-de-l-enfant-mort-en-mer-arrete-pour-mise-en-danger-de-la-vie-d-autrui

Atteintes aux libertés : la proposition de loi relative à la sécurité globale

Quelques articles sur la loi sécurité globale publiés par La Quadrature du net, Reporterre, Ligue des droits de l’homme, Bastamag

Sécurité globale : la police fait la loi Source https://www.laquadrature.net/2020/11/06/securite-globale-la-police-fait-la-loi/

La loi « sécurité globale » a été adoptée hier en commission des lois de l’Assemblée nationale (relire notre première analyse de la loi). Un premier constat s’impose aux personnes qui ont suivi l’examen du texte : une ambiance singulière, lugubre et fuyante. Un silence de plomb rompu seulement par divers éclats de rires du groupe LREM, incongrus et parfaitement indécents compte tenu de la gravité du texte examiné. Certains diront qu’il faut écrire la loi d’une main tremblante. Alors tremblons.

Le RAID dans l’Assemblée

Cette loi illustre la méthode législative propre aux États policiers : la police écrit elle-même les règles qui définissent ses pouvoirs.

D’abord, littéralement, l’auteur principal du texte, Jean‑Michel Fauvergue (LREM), est l’ancien chef du RAID, de 2013 à 2017. Il est l’un des deux rapporteurs du texte. À travers lui et, depuis son pupitre en commission des lois, la police a pu imposer son autorité.

Quand la députée Danièle Obono (LFI) s’inquiète pour nos libertés fondamentales, Fauvergue lui reproche de « déverser [son] fiel sur la société française » – car, comprenez-vous, critiquer la police, c’est critiquer « la France ». Voyant Obono insister, il lui intime même : « Allez prendre vos gouttes ! ». Sans doute voit-il le « débat parlementaire »a comme un champ de bataille où il est exclu de négocier avec l’ennemi, tout en se permettant de reprocher à Obono de « voir la société de façon binaire entre les « gentils » et les « méchants »».

Pensées interdites

Cette négociation impossible s’est aussi traduite dans l’attitude de l’autre rapporteure du texte, Alice Thourot. Chaque fois qu’un amendement proposait de limiter ne serait-ce qu’un tant soit peu les nouveaux pouvoirs de la police, elle restait cloîtrée dans une unique et lancinante réponse, se résumant à : « Cette disposition a été demandée par la police, il faut l’adopter telle quelle ».

Elle n’est sortie de ce mutisme intellectuel que pour demander aux députés d’arrêter d’envisager des hypothèses où la police abuserait de ses nouveaux pouvoirs, car de telles pensées seraient insultantes pour la police. Entre ces « crimepensées » et le slogan choisi par Thourot pour cette loi, « protéger ceux qui nous protègent », 1984 est à l’honneur.

Trois député·es

Ne laissons ici aucun doute : le rôle historique du Parlement et du droit est précisément d’envisager des hypothèses où les institutions abuseraient de leur pouvoir afin d’en limiter les risques. Mais il n’y avait plus hier qu’une poignée de députés pour s’en souvenir. Saluons-les pour leur étrange baroud d’honneur. Danièle Obono, déjà citée, l’ancien marcheur Paul Molac et le centriste Philippe Latombe qui, devant les barrières dressées par la police au sein même de l’Assemblée nationale, a fait tomber les masques, rempli d’amertume, avouant que « les députés ne servent à rien ». Et en effet, ils n’auront servi à rien.

Alors que le sujet de cette loi, dont le processus d’adoption est – rappelons le – d’une rapidité exceptionnelle, touche à nos libertés publiques et nécessiterait une discussion solennelle et sérieuse de la part des parlementaires, nous avons à l’inverse pu observer une absence criante de la mesure de la gravité des enjeux, chaque augmentation de pouvoir de la police étant votée comme une simple formalité administrative.

La police autonome

Ce débat, tant sur sa forme que sur son fond, aura démontré que la police est une institution politique autonome, avec son agenda et ses idéologies propres qu’elle entend défendre elle-même. Les discussions sur l’article 21 sur les « caméras-piétons » l’ont parfaitement illustré.

Les députés de droite ont martelé qu’il fallait que cet article 21 permette aux policiers de publier les vidéos prises par leur caméra portative afin de « rétablir la vérité », ou plus exactement d’établir « leur vérité » dans la « guerre des images », et de justifier les violences policières filmées par les journalistes et la population. La police n’est donc plus uniquement chargée de protéger la population contre les infractions. Elle est aussi destinée à faire de la communication politique au même titre qu’un parti politique ou qu’un journal militant – les armes et les hélicoptères en plus.

Un chien-fou en liberté

Le gouvernement et sa majorité parlementaire ont toujours dû laisser à la police certaines libertés en contrepartie de la protection armée offerte contre les débordements populaires. Mais ce rapport de force semble largement déraper. Sur la forme, on pourrait se demander ce qu’il reste de l’indépendance du pouvoir législatif, soumis de fait à la police et à ses lobbyistes élus.

Sur le fond du texte aussi, le rapport de force semble basculer brutalement en faveur de la police. L’article 24 de la loi, qui conduira en pratique à empêcher la population et les journalistes de filmer et de diffuser les images de violences policières, fera disparaître un contre-pouvoir fondamental dans l’équilibre des institutions. Car la documentation des abus policier dans les médias, par la presse et la population, permettait de les contenir un minimum, ce qui arrangeait bien les autres pouvoirs. Si le contre-pouvoir de la presse devait sauter, plus grand-chose n’empêcherait la police de verser dans l’arbitraire le plus total.

Les amendements de la police

Hier, l’agenda a bel et bien été dicté par la police. Les seuls amendements sérieux à avoir été adoptés sont ceux qui accroissent les pouvoirs de la police.

Sur les articles qui nous intéressent, un premier amendement « vise à étendre aux polices municipales les avancées permises par le présent article en matière de caméras individuelles » (notamment la transmission en temps réel au centre de commandement, où les images pourront être analysées automatiquement). Un deuxième ensemble d’amendements allonge la liste des finalités permettant la surveillance par drones (lutte contre les rodéos urbains et les petits dealers notamment).

Enfin, la seule modification apportée à l’article 24 sur la diffusion d’images policières sonne comme une provocation : l’article 24, qui interdit toujours la diffusion du visage et d’autres éléments d’identification des policiers, permet désormais de diffuser des images illustrant leur matricule – ce fameux RIO dont l’absence est justement si souvent déplorée… Réagissant aux vives oppositions, notamment celle de la défenseure des droits, contre l’atteinte à la liberté d’informer constituée par cet article, l’ancien chef du RAID a été définitif : « nous voulons que les agents ne soient plus identifiables du grand public ».

La suite

Le texte sera examiné par l’ensemble des députés à partir du 17 novembre. Vous pouvez appeler ou écrire aux élus d’ici là via l’outil ci-dessous.

Nos espoirs principaux seront peut-être à placer dans le Sénat et le Conseil constitutionnel, qui ont une place singulière dans les rapports de force entre les institutions et sont récemment parvenus à réduire à néant les initiatives du gouvernement, notamment en s’opposant à la loi Avia.


La proposition de loi relative à la sécurité globale durcie en commission Source https://reporterre.net/La-proposition-de-loi-relative-a-la-securite-globale-durcie-en-commission

Les députés de la Commission des lois ont terminé, jeudi 5 novembre, l’examen de la proposition de loi relative à la sécurité globale. Ce texte, considéré comme liberticide par de nombreux défenseurs des droits et comme risquant d’introduire une nouvelle limitation à la liberté de la presse, a été quelque peu amendé par les députés.

L’article 24 est l’un de ceux suscitant le plus d’opposition. Il prévoit que les images d’agents des forces de l’ordre ne pourront être diffusées, si l’intention est de porter atteinte à l’« intégrité physique ou psychique » des agents. Il est vu comme une façon d’invisibiliser les violences policières. Avocats et journalistes ont dénoncé le risque de « procès baillons » car cet article pourrait notamment permettre de renvoyer très facilement devant la justice des journalistes ou avocats diffusant des vidéos de violences policières. Libre ensuite à la justice de déterminer s’il y avait intention de nuire.

Les amendements de suppression de cet article ont été balayés d’un revers de main par la majorité. Seule modification, il a été précisé que le numéro d’identification des agents (numéro RIO), pourra lui être visible. Cependant, il n’est pas rare que les agents des forces de l’ordre ne le portent pas.

Par ailleurs, voici les autres modifications du texte que Reporterre a relevé :

  • Pour l’article 21, qui concerne les images prises par les « caméras piétons » (petites caméras individuelles portées par les agents des forces de l’ordre) : leur diffusion était autorisée largement dans le but de l’information du public, une limitation « protection de la vie privée des individus filmés » a été introduite.

Toujours pour cet article, l’accès des forces de l’ordre aux images qu’ils ont filmées (accès interdit actuellement) est encadré : ils ne pourront les consulter que dans le cadre d’une intervention ou d’une procédure judiciaire.

En revanche, l’accès aux images est étendu aux agents des polices municipales.

  • Pour l’article 22, qui autorise l’utilisation de drones et de leurs images — dans un précédent article de Reporterre, Amnesty International y voyait la possibilité d’instaurer une « surveillance de masse » — la liste de cas où cela est possible est encore étendue par trois amendements :
    • l’un ajoute les lieux « particulièrement exposés à des risques de troubles à l’ordre public, qu’il s’agisse d’agressions, de vol ou de criminalité organisée ».
    • Un deuxième y inclut les besoins de la défense nationale et les lieux dits « d’importance vitale ».
    • Un dernier inclut la surveillance des rodéos motorisés.
  • L’article 23 limite les remises de peine pour les personnes ayant commis des actes de violence sur les policiers, gendarmes, sapeurs-pompiers, etc. Les agents pénitentiaires, agents de police municipale et agents des douanes sont ajoutés à la liste, toujours dans l’objectif de mieux les « protéger », expliquent les rapporteurs de la loi.
  • En fin de texte, des articles ont été ajoutés afin d’étendre encore l’accès des forces de l’ordre à différentes images : ici, celles des caméras de vidéosurveillance des réseaux de transport et des gares. Ces vidéos étaient auparavant transmises en cas de « circonstances faisant redouter la commission imminente d’une atteinte grave aux biens ou aux personne ». Cette limite est levée.

Ce texte doit maintenant être examiné par l’ensemble des députés à partir du 17 novembre prochain.

  • Source : Marie Astier pour Reporterre
  • Photo : Contrôle de police avec l’aide des soldats de l’opération Sentinelle le 18 mars 2020 sur la Promenade des Anglais, à Nice (Alpes-Maritimes). © Valéry Hache/AFP

L’obsession sécuritaire  https://www.ldh-france.org/lobsession-securitaire/
Une fois de plus, le Parlement examine une proposition de loi présentée par des députés de la majorité gouvernementale « relative à la sécurité globale » qui s’inscrit dans le sillage sécuritaire des abondantes réformes des dernières années et des recours successifs à l’état d’urgence. Alors que cette proposition de loi porte lourdement atteinte à des libertés et droits fondamentaux, elle est l’objet d’une procédure accélérée qui évince, de fait, le rôle législatif des parlementaires.Ce texte prévoit d’étendre aux polices municipales, sous le seul contrôle des maires, des compétences de la police nationale sur des missions de police judiciaire pour la constatation d’un nombre accru de contraventions (notamment au Code de la route, avec possibilité de demande de mise à la fourrière) et même de délits. Ils pourront aussi procéder à des contrôles d’identité et à des saisies au risque d’amplifier les abus et détournements déjà dénoncés.De plus, il organise une privatisation de la police en contradiction flagrante avec les normes constitutionnelles en déléguant aux agents privés de sécurité des pouvoirs réservés à la police judiciaire comme la verbalisation d’infractions et le relevé d’identité pouvant conduire à la rétention de la personne contrôlée.Allant encore plus loin dans la surenchère sécuritaire, la proposition de loi prévoit d’instaurer une surveillance généralisée de l’espace public, en autorisant l’Etat à utiliser des drones avec caméras, visant explicitement le contrôle de tous les manifestants.

Alors que depuis 2016 les images des « caméras mobiles » portées par les policiers étaient uniquement utilisées a posteriori pour éclairer des faits contestés, l’article 21 de la loi « sécurité globale » permettrait leur utilisation immédiate et une analyse automatisée pour reconnaître en temps réel l’identité de tous les manifestants (reconnaissance faciale) avec le risque d’arbitraire par des gardes à vue préventives ou l’empêchement de se joindre au cortège au mépris de la liberté de manifestation.

Enfin, le texte prévoit la pénalisation de la diffusion d’images de policiers ou de gendarmes agissant dans le cadre de leurs missions d’ordre public, portant atteinte à la nécessaire transparence de ces opérations. Une telle mesure, si elle était adoptée, avec des sanctions très lourdes (1 an d’emprisonnement et 45 000 € d’amende) empêcherait tout contrôle citoyen, voire le travail des journalistes, en favorisant l’impunité d’auteurs de violences policières.

La Ligue des droits de l’Homme (LDH) appelle les parlementaires à rejeter cette proposition de loi liberticide et de fuite en avant sécuritaire qui menace gravement les principes fondamentaux de notre démocratie et l’Etat de droit.

Paris, le 5 novembre 2020

Télécharger le communiqué en format PDF CP-LDH-Lobsession-sécuritaire


Forte mobilisation contre le projet de loi réprimant la diffusion d’images de violences policières https://www.bastamag.net/Mobilisation-massive-proposition-loi-Fauvergue-Securite-globale-repression-diffusion-images-violences-policieres-petition-droit-d-informer

L’article 24 de la proposition de loi « relative à la sécurité globale » sanctionne d’un an de prison et de 45 000 euros d’amende la diffusion d’images relative aux pratiques policières. Face à cette mesure considérée comme « une atteinte inédite au droit d’informer », plusieurs dizaines de milliers de personnes ont d’ores et déjà signé une pétition.

Le 17 novembre, l’Assemblée nationale doit étudier la proposition de loi dite de « Sécurité globale » (#PPLSecuriteGlobale). Ce texte, montagne de mesures liberticides, précise notamment dans son article 24 vouloir réprimer de 45 000 euros d’amende et un an de prison le fait « de diffuser, dans le but qu’il soit porté atteinte à son intégrité physique ou psychique, l’image du visage ou tout autre élément d’identification d’un fonctionnaire de la police nationale ou d’un militaire de la gendarmerie nationale lorsqu’il agit dans le cadre d’une opération de police ».

Face à cette loi considérée comme « une atteinte inédite au droit d’informer », « une loi liberticide comme jamais » et permettant la « mise au pas du contrôle citoyen des pratiques policières », des dizaines de milliers de personnes ont d’ores et déjà signé une pétition. « Aujourd’hui et comme depuis trop longtemps, nos seuls moyens de médiatisation de ces affaires sont les réseaux sociaux. Nous ne voulons pas harceler les policiers, nous voulons diffuser certaines de leurs violences. Nous devons informer, car sans information, c’est l’impunité qui est une fois de plus renforcée. (…) Ne les laissons pas faire barrière à nos libertés fondamentales » écrivent les signataires.

Lire notre analyse : Entrave à la liberté de la presse et surveillance de masse : la nouvelle loi macroniste de « sécurité globale »

Ces images, « ce sont la voix de nos défunts. Ne la réduisons pas au silence, n’étouffons pas encore la vérité »

Le journaliste David Dufresne, auteur du recensement Allô Place Beauvau, a recueilli plusieurs témoignages dont celui de Sofia, fille de Cédric Chouviat, décédé à 42 ans lors de son arrestation à Paris par la police le 3 janvier 2020, témoigne. « Avec l’aide de vidéos, nous avons pu contredire les mensonges de policiers », souligne t-elle. « Sur ces images, mon père est victime de violences policières. Le droit de diffusion nous a permis de révéler au grand jour la vérité. C’est pour cela que ces images, ces appels à témoins, ces vidéos sont notre seul moyen de défense. Ce sont la voix de nos défunts. Ne la réduisons pas au silence et n’étouffons pas encore la vérité. »

La militante Geneviève Legay, également victime de violences policières le 23 mars 2019 à Nice, témoigne : « Si des avocats, des journalistes, ma famille ou moi-même, diffusons ces vidéos, nous pourrions être jugés devant un tribunal correctionnel et risquer cinq ans d’emprisonnement. Protégeons nos libertés ainsi que celle de la presse. » Une vision partagée par Mathieu Molard, rédacteur en chef du média indépendant StreetPress. « Avec ce texte, plus de live manifs, plus ou pas de vidéos amateurs sur le web. Ces vidéos sont la base de très nombreuses investigations. Sans elles, pas d’enquêtes sur les gilets jaunes mutilés, pas d’affaire Benalla. Nous se saurions sans doute rien de la mort de Cédric Chouviat. »

 Toutes les vidéos Non à la #PPLSecuriteGlobale sont à retrouver ici

Même la Défenseure des Droits, Claire Hédon, se dit particulièrement préoccupée par les restrictions envisagées concernant la diffusion d’images des agents des forces de sécurité dans l’exercice de leur fonction. Dans un avis publié le 5 novembre, elle demande à ce que ne soient, à l’occasion de ce texte, entravés ni la liberté de la presse, ni le droit à l’information. Elle considère que l’information du public et la publication d’images relatives aux interventions de police sont légitimes et nécessaires au fonctionnement démocratique, comme à l’exercice de ses propres missions de contrôle du comportement des forces de sécurité. Pour contourner les dispositions prévues par cette proposition de loi si elles venaient à être votées, un collectif belge propose leur diffusion avec les hashtag #CettePhotoNexisteraPlus #LiberteDinformerEnDanger.

Photo de une : Manifestation du personnel soignant et pompiers le 15 octobre 2019. © Yann Levy

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